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Les moldus et élèves de Poudlard du forum se sentent cruellement seuls au milieu de tous ces sorciers adultes,
alors pensez à les privilégier pour vos personnages

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Abigail MacFusty
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Jeu 27 Mai - 22:47
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Octobre 2020

Assise sur le tabouret de mon piano, je laissais mes doigts caresser les touches sans réfléchir à la note suivante. Emportée simplement par la mélodie, j'improvisais totalement ce que j'étais en train de jouer, mon esprit s'étant enfui loin, très loin.
Après avoir été devant le fait accompli de ma situation, à savoir une santé bien plus fragile que d'ordinaire, privée de ma magie, et terriblement seule, j'avais eu du temps pour faire quelques rapides comptes rendus. Je ne pouvais guère me débrouiller seule, et fort heureusement Bonnie était aujourd'hui à mes côtés pour m'aider avec tout ce qui concernait la magie. Toutefois, je restais désespérément seule face à mon désespoir, et je ne sentais rien qui puisse éponger la peine que je ressentais. Je me sentais comme une coquille vide, dénuée d'intérêt ou de tout ce qui pouvait me constituer. J'étais comme une âme en peine qui errait sans but alors que j'avais déjà des difficultés d'ordinaire pour me contenter de la vie que j'avais. Rétrospectivement, j'avais la sensation que j'étais passée à côté de bien des choses, et maintenant que ma magie m'avait été enlevée, je regrettais presque de ne pas avoir profité davantage. Mais c'était toujours lorsqu'il nous manquait quelque chose qu'on réalise à quel point ça nous était essentiel. Naturellement, je savais déjà depuis longtemps que vivre sans magie me serait difficile, moi qui en étais entourée depuis ma naissance bien que je ne sois pas issue d'une famille de sang-pur. Cela dit, il y avait une différence tout à fait notable entre être conscient de quelque chose, et le vivre véritablement. C'était un obstacle franchi par obligation alors qu'on se sentait en sécurité avant. Une sécurité toute relative et biaisée. Je savais le Blood Circle dangereux, avec des technologies puissantes, mais je n'avais encore jamais été l'une de leurs victimes, tout le moins, pas comme ça, et c'était d'autant plus pénible à vivre, en tout cas pour moi. Autant je pouvais me remettre tant bien que mal d'une balle logée dans mon corps, autant vivre sans magie, c'était comme m'avoir amputé d'un membre. Le plus terrible là-dedans était que j'ignorais combien de temps la situation allait durer. Peut-être retrouverais-je mes pouvoirs demain ? Ou dans un an ? Ou peut-être jamais…
Aujourd'hui, je vivais constamment avec cette épée de Damoclès au-dessus de ma tête, et je craignais le jour où elle s'abattrait sur moi pour m'achever.

Voilà pourquoi j'avais demandé à Luca de venir me voir, ce qu'il avait fait, et notre entrevue avait été des plus intéressantes, mais aujourd'hui, ce n'était pas le sorcier que j'attendais. J'avais requis la présence de Harper, surtout pour qu'elle me donne des nouvelles de mes élèves et du collègue qui me remplaçait. J'avais à cœur que tout se déroule pour le mieux le temps de mon absence. Bien sûr, je reviendrais rapidement, dans quelques jours, le temps que je prenne soin de moi, que je retrouve l'énergie que j'avais perdue durant l'été. Enchaîner le décès de mon frère et l'arrêt de ma magie avait été particulièrement éprouvant pour moi, qui étais déjà d'une faible constitution de base.
Malgré une relation composée de doutes et de hauts et de bas, Harper était bien la seule véritable amie sur qui je pouvais compter vraiment. Bien qu'elle m'ait abandonnée et qu'elle m'ait fait du mal plus d'une fois, nous avions toujours réussi à passer les obstacles de la vie ensemble, presque main dans la main. Relation toujours ambiguë entre nous, c'était en tant qu'amie que j'avais fait appel à elle maintenant. Le simple fait de pouvoir bénéficier de sa présence, juste une heure, le temps d'un thé, me serait des plus bénéfiques. Je ne l'avais pas invité pour plus longtemps, je ne voulais pas la retenir, elle avait sûrement bien d'autres choses à faire,  bien d'autres personnes à aller voir.  Après tout, je ne connaissais rien de sa vie privée d'aujourd'hui, et quand bien même j'étais fiévreuse de curiosité, jamais je ne m'étais avancée à devenir indiscrète. Nous avions toujours respecté le jardin secret de l'autre, même si je le regrettais.
Il y avait beaucoup de non-dits entre nous, je le sentais lorsqu'elle me cachait des choses, et j'en étais d'autant plus blessée. Comme si la vérité que notre relation était en fait basé que sur des mensonges venait me sauter en plein visage.
Pourtant voilà, Harper, je ne lui souhaitais que son bien et son bonheur, j'étais incapable de lui faire de mal, quand bien même je pouvais la détester au plus profond de moi. Présentement, la situation était claire pour moi, je savais ce que je voulais et ce que je désirais. Malheureusement tout cela ne dépendait pas de moi, et je le craignais aussi. Car cela rouvrait une très vieille blessure que je pensais cicatrisée depuis des années. Pourtant, la douleur était toujours vive, comme au premier jour. Cet horrible jour de perte.

Ce fut lorsque j'entendais toquer à ma porte que je fus tirée de mes pensées et que mes mains cessèrent toute musique, laissant les notes s'envoler en l'air sans que je ne mette fin à la mélodie. Image parfaite de l'état d'esprit dans lequel je me trouvais lorsque j'étais en présence de Harper : en suspension.
Presque à la hâte, je me levais pour traverser ma demeure et aller ouvrir à mon amie, Bonnie étant absente pour la journée puisqu'elle s'occupait de nombreux sujets administratifs dont je l'avais chargée. C'était le meilleur moyen pour moi de m'en débarrasser et de rester tranquille avec Harper.
Ma Harper.
En découvrant son visage, je lui souriais, joyeuse, véritablement heureuse de la retrouver, mon cœur faisant des bonds dans ma poitrine. Étrange… m'aurait-elle manqué plus que de raison, ou était-ce parce que je comprenais enfin ce qui m'animait depuis tant d'années ?

- Hey salut ! Je m'écartais pour la laisser entrer, la pluie dehors battait de manière épouvantable, comme d'habitude. Une fois entrée, je refermais la porte derrière elle. Comment vas-tu ? Merci d'être venue.

Lui indiquant de se mettre à l'aise, je lui indiquais les porte-manteaux. Voilà des années qu'elle n'était pas revenue ici, la dernière fois, la maison était encore vaguement en construction. Aujourd'hui, tout était fini et j'étais convenablement installée. Me tournant dans sa direction, faisant flotter le petit haut blanc que je portais, je m'adressais à nouveau à elle.

- Tu veux boire quelque chose ?


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Harper MacFusty
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Ven 28 Mai - 8:25
Comme au premier jourAbigail & Harper


Un voyage aux Etats-Unis l’avait immanquablement privée d’accompagner ses amis (et les autres) au front contre le Blood Circle. En apprenant la bataille qui avait fait rage lors d’une soirée étudiante en présence de certains de ses élèves qui plus est, Harper s’était rongé les ongles, arraché les cheveux, et renversée sur son tee-shirt préféré la boisson XXL de soda qu’elle venait de commander lorsque la missive lui été parvenue depuis l’Angleterre. Avoir raté pareille occasion de défendre ses élèves auprès de ses collègues l’avait terriblement contrariée, l’idée d’écourter son séjour lui avait traversé l’esprit, mais à quoi bon maintenant que le mal était fait ?  Dans la missive, l’Ordre lui demandait d’assister à une réunion dès son retour pour faire une mise au point. S’il y avait e urgence, ils lui auraient demandé de rentrer sur le champ. Ainsi, Harper continua son périple à New-York qui se déroula sans encombre mais qui n’avait plus la même saveur, d’autant plus qu’elle rentrera en Angleterre bredouille, sans avoir trouvé ce qu’elle était partie cherchée.

De l’eau avait coulé sous les ponts depuis le mois d’août. Harper avait eu le temps de digérer sa déception, la reprise des cours et la fabrication du cristal notamment lui avait particulièrement bien occupé l’esprit. Elle avait assisté aux premiers maux d’Abigail, jamais au grand jamais elle ne se serait imaginé qu’une chose pareille puisse arriver. Perdre sa magie. Ah ! Si les sorciers s’étaient attelés à rechercher plus profondément leurs origines, peut-être que des évènements pareils pourraient être contrés. Mais ce n’est pas le débat du jour, ni le moment pour en débattre. Aujourd’hui, elle rend visite à Abigail, à sa demande ; Harper avait accepté avec plaisir, c’était l’occasion de jeter un œil sur elle, de prendre la température et de lui remonter le moral si nécessaire. Et elle avait tout prévu.

Être privée de sa magie. Cela lui faisait froid dans le dos rien que d’y penser. Pourtant, Harper avait vécu onze ans sans magie, la vie n’avait certes pas mauvais goût, mais elle n’avait tout de même pas la même saveur.

Arrivée devant la demeure d’Abigail, demeure désormais complètement terminée, elle dépose une montagne de paquet dans un coin de l’allée, secoue son chemisier qu’elle venait d’agripper dans une haie, puis tape à la porte en observant d’un œil distrait la façade flambant neuve. Fraîchement vêtue, Abigail lui ouvre la porte, la salue et lui indique d’entrer. Se parant de son immense sourire comme à son habitude, Harper fait ses premiers pas dans la maison, rate le porte-manteau, et s’avance dans le séjour d’un œil curieux.

Je pète la forme, un café ne serait pas de refus. Ta maison est superbe, on ne se sentira pas à l’étroit ici. Merci de m’avoir invitée, je suis permise d’emportée quelques affaires, elles sont garées dans ton allée.

Et, ravie d’être ici, elle poste négligemment son postérieur sur le divan en faisant sursauter les coussins sous son poids.

Je n’aurai pas l’indélicatesse de te demander ce que ça fait d’être une moldue, moi-même je ne le supporterai pas. Cependant, je n’oublie pas que je suis issue d’une famille moldue, et j’ai vécu pendant des années dans une maison sans magie. Ce n’est pas agréable, mais c’est jouable. J’ai tout prévu pour notre immersion, finit-elle par dire, le regard dans le vide, comme si elle s’assurait, intérieurement, qu’elle n’avait vraiment rien oublié.


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Ven 28 Mai - 18:27
Je laissais Harper entrer dans ma demeure d'ordinaire si calme comme si je laissais entrer un véritable ouragan. Presque décoiffée, mais aussi éblouie par sa vivacité, je me surprenais à remarquer à nouveau les couleurs qui m'entouraient. Le vert si éclatant des diverses plantes éparpillées un peu partout dans la grande pièce de vie. Les rouge, orange et jaune flamboyant de Grishkin qui restait tranquillement sur son perchoir à fixer Harper l'air un peu circonspect. L'élégance des mélanges de gris et de brun dans le pelage de Gérard, collé contre le phénix comme un amoureux.
Sourire fiché sur mes lèvres, je laissais mon invitée s'installer sur mon canapé, et à sa demande, j'allais me déplacer vers la cuisine pour lui préparer un café (sans utiliser ma baguette), mais je m'arrêtais en plein mouvement alors qu'elle me précisait avoir amené "quelques" affaires. J'avais toujours un peu peur lorsque la jeune femme était aussi évasive, parce que je la connaissais sur le bout des doigts, et je savais que "quelque" pouvait représenter une multitude en réalité. Les sourcils froncés parce que j'étais intriguée, je fis volte-face pour retourner dans mon entrée et ouvrir la porte. Là, j'y voyais la montagne de paquet qui risquait bientôt de prendre l'eau tant la pluie battait fort dehors.

- Bordel c'est quoi tout ça ? J'ignorais si je devais m'inquiéter ou rire, mais au point de désespoir où j'en étais, je préférais être amusée. Ce fut donc en pouffant que j'empoignais les premiers paquets pour les rentrer et les poser non loin du canapé. T'es dingue, t'as ramené ton appartement entier ou quoi ?

Pour le coup, le café attendra puisque je ne pouvais pas tout ramener par magie. J'entreprenais donc de faire des allés et retour, laissant la porte d'entrée ouverte, ainsi, le froid commençait à s'engouffrer, faisant face au feu qui animait le foyer de ma cheminée, juste devant le canapé. Sans demander de l'aide à Harper (parce que je m'en fichais), je me contentais de lui répondre vis-à-vis de ma maison.

- Merci, c'est vrai que la dernière fois que tu es venue on allait sortir de l'université. Je venais de la construire, il n'y avait que cette pièce. Ça fait longtemps que je l'ai terminée, mais des fois j'hésite à agrandir mon potager. Si la pluie se calme tout à l'heure, je te montrerais.

Harper savait que j'étais une grande passionnée de botanique, s'était sans nul doute ma seconde passion après les créatures fantastiques. Successivement, je lui indiquais une porte fermée, la plus proche de l'entrée, puis une autre, non loin de la cheminée.

- Là tu as la salle de bain, si une envie pressante te prend (je souriais, taquine), et là ma chambre. Dehors j'ai rajouté une étable pour les animaux, et voilà… je suis bien. Je ne demande rien de plus.

J'étais quelqu'un de simple, et cette maison était parfaitement à mon image : simple. La décoration était très sobre, se contentant de quelques tableaux de ci, de là, ainsi que de quelques photos de famille, comme celle à l'entrée, nous représentant, les cinq cousins MacFusty, et une autre, plus discrète sur une étagère des nombreuses bibliothèques qui encombraient mes murs, un portrait de Kyle et moi. À côté de cela, les bibliothèques débordaient d'ouvrages traitant principalement de la dragonologie et de la magizoologie, puis de la botanique, de la musique, et enfin un peu de littérature en tout genre. Enfin, éparpillées un peu partout se trouvait des plantes, dont une, contre la fenêtre à proximité du canapé, qui se tourna vers Harper, toutes dents acérées dehors. J'y jetais un œil avant de renifler.

- Oh prend juste garde à cette plante, elle n'est pas super sympa.

Terminant de rentrer tous les paquets, je ne prenais pas la peine de les ouvrir puisque mon amie ne m'y avait pas invitée, quand bien même je restais curieuse de ce qu'elle avait pu prendre avec elle, je n'étais pas non plus indélicate. Me dirigeant enfin vers la cuisine (qui était d'ailleurs encombrée de semis de plantes diverses que je laissais à proximité du lavabo), je remplissais ma bouilloire d'eau pour préparer du café. Souriant, un peu amusée par les paroles de la jeune femme, je prenais tout de même le temps de lui répondre, apparemment peu offensée.

- Oui je sais que ce n'est pas insurmontable, j'essaie de relativiser, mais bon… c'est juste que ça va beaucoup m'embêter au quotidien surtout professionnellement… encore que ma fois, Poudlard je peux faire sans être étudiante… mais ne plus être dragonologiste, ça, ce n'est pas envisageable… et sans la magie, je vais rester un peu sur la touche…

Dos tourné à Harper, puisque je lui préparais son café, elle ne put pas voir ce visage accablé par la détresse tandis que je formulais mes explications, néanmoins, mes épaules s'étaient largement affaissées. Attrapant le café soluble, je le posais sur un plateau tout en ajoutant deux tasses. Fouillant dans un placard pour attraper une boite noire aux finitions à la feuille dorée, je me dirigeais vers le canapé une fois l'eau bouillie. Posant le plateau sur la table basse, je prenais place à mon tour, laissant mon invitée se servir la première tandis que je choisissais mon thé après avoir ouvert la boite noire. Un peu interpellée, je la regardais, alternativement avec la montagne de paquets qui était à présent à quelques centimètres de nous.

- Tu as tout prévu hein ? Par Merlin qu'est-ce que tu as prévu ?

Je retrouvais mon sourire tandis que je m'appuyais contre le dossier du divan, croisant les jambes vêtues d'un jean bleu clair aux grands trous au niveau des genoux. Vêtue ainsi, avec ma chevelure blonde, je pouvais rappeler une adolescente en pleine crise d'identité.
N'ayant pas invité Harper pour une autre raison que juste passer un peu de temps ensemble et prendre des nouvelles de Poudlard, je joignais mes mains entre mes jambes légèrement espacées avant de venir droit au sujet. Autant ne pas lui faire perdre trop de temps, si d'aventure elle avait d'autres choses à faire ou d'autres personnes à aller voir. Quand bien même j'aurais apprécié la capturer, la ligoter et la garder pour moi éternellement, je ravalais cette pulsion en déglutissant simplement ma salive.

- Alors, raconte-moi, comment ça se passe à Poudlard ? Mon collègue s'en sort bien apparemment, il n'y a rien de nouveau ?

Je m'attendais à ce qu'elle me raconte les derniers potins comme on le faisait d'ordinaire lorsque nous nous croisions par hasard dans la salle des maîtres alors vide.  


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Harper MacFusty
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Sam 29 Mai - 11:21
Comme au premier jourAbigail & Harper


La pluie martèle le toit sans scrupule. Dehors, la météo se déchaîne, les arbres ploient sous les bourrasques du vent qui projette des trombes d’eau contre les fenêtres. Il s’en était fallu de peu pour se retrouver trempée des pieds à la tête. Confortablement assise dans le canapé d’Abigail, au chaud et au sec, Harper inspecte les environs, scrutant les rares tableaux, les plantes éparpillées un peu partout, la simplicité des couleurs, une harmonie délicieuse respirant le confort.

On va être bien ici, lance-t-elle au hasard, ses paroles dépassant ses pensées. Mais Abigail n’écoute pas, ou plutôt, ne pouvait plus écouter, car elle avait rebroussé chemin, abandonnant l’idée de préparer le café pour contrôler l’état de son allée. Une quinzaine de paquets empaquetés dans du papier Craft de diverses formes et tailles s’entassent devant sa maison. Malgré son état fébrile et l’incongruité de la situation, Abigail ne se démonte pas. Elle entreprend de rentrer le bazar sous la pluie. Fort heureusement, Harper avait jeté un sort d’imperméabilité (maxima, bien-sûr, car le ciel menaçait déjà de tomber lorsqu’elle avait quitté son appartement).

J’ai tout prévu, dit Harper pour satisfaire la curiosité (inquiétude ?) d’Abigail. Et, se désintéressant totalement du potager ou elle ne savait trop quoi qu’elle souhaitait lui montrer (à quoi ça sert de regarder des radis pousser ?) , elle demande, avec inquiétude : tu n’as pas de chambre d’ami ??

C’est embêtant, elle n’a pas du tout envie de dormir sur le canapé, ni dans la nouvelle étable, avec les animaux.

Oh ! Ne t’en fais pas pour la plante, je dois avoir quelques emballages de friandises en réserve…

Elle faisait allusion à un évènement en troisième année. Lors d’un cours de botanique en commun avec les serpentards, Harper n’avait pas réussi à dompter une plante ressemblant sensiblement à un figuier de barbarie. Ses figues comportaient des dents, elles suintaient un nectar pour attirer les insectes et les fous avant de les gober tout rond ou leur arracher la main. Sauf si on leur demandait gentiment de ne pas mordre, en précisant s’il te plait et merci, à chacun des fruits, pour que la plante se comporte chaleureusement en restant à vos côtés. Durant l’exercice, l’un des fruits lui avait tiré la langue, et tout le monde s’était moqué d’elle. Alors elle avait écrasé de la gelée sur un papier en aluminium pour le lui donner à manger, et tout la plante avait été malade. En apprenant son geste (par quelqu’un qui avait entendu dire par quelqu’un qui était présent), Abigail, folle de rage, l’avait sermonné durant une bonne demi-heure. Regrettant son geste, elle était allée se dénoncer au professeur. Faute avouée à demi pardonnée. Appréciant son honnêteté, le professeur ne la gratifia pas d’heure de colle, mais la condamna à s’occuper de la plante jusqu’à la fin de l’année.

Pendant la préparation du café, Harper ne remarquera pas les épaules affaissées d’Abigail, trop préoccupée à se remémorer de bons souvenirs en tâchant de l'écouter. Le plateau des boissons déposé sur la table basse, Harper s’empresse d’attraper l’un des paquets pour en sortir des biscuits maisons achetés dans une biscuiterie moldue. Elle présente fièrement la jolie boîte rose à Abigail, comme pour signifier que pour une fois, elle n’est pas venue les mains vides. Bravo Harper. Découvrant une panoplie de cookies et autres biscuits sablés, elle pose la boîte à côté de l’eau fumante, et s’attèle à se servir du café.

J’ai eu l’idée dans la nuit.

Ce n’est franchement pas rassurant.

Je me suis levée à l’aube pour tout trouver.

C'était franchement fatiguant. Elle touille le café soluble dans l’eau chaude, ajoutant une bonne rasade de sucre.

Poudlard est calme, ennuyeux à mourir, et ton remplaçant est si charmant que ça m’en file la gerbe.

Elle avait parlé sans animosité, sur un ton parfaitement détaché.

Heureusement que le neutralisateur pimente un peu ma vie. J’ai même acheté une télévision ! Annonce-t-elle en tapant dans ses mains pour exprimer son enthousiasme. Tu vas prendre ce gros cookie là ? Non ?

Elle se saisie d’un énorme cookie à la vanille, décoré de sucre glace et mord à pleine dent dedans. La pâte sablée explose en miette qui retombent sur le sol.

On va s’éclater ! Précise-t-elle la bouche pleine, du sucre glace plein les lèvres.

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Abigail MacFusty
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Sam 29 Mai - 21:22
J'avais un peu du mal à saisir pourquoi mon amie prétendait que nous allions être bien ici. Comme si elle doutait que je me sois mal installée dans ma propre maison ou plutôt… comme si elle allait s'y établir également. Cette idée me frappa comme la foudre, m'immobilisant comme si j'étais tétanisée par cette simple idée. L'amoncellement de paquets que je venais de rentrer trouvait alors tout son sens, et j'en eus du mal à avaler ma salive, d'autant plus lorsqu'Harper me signala encore une fois qu'elle avait tout prévu. Cette fois-ci, la bonne humeur que j'avais choisi de ressentir fut totalement balayée par un vent si froid qu'il me glaça l'échine à m'en faire trembler. Une chambre d'ami ? Je croyais halluciner en entendant ça.
Alors certes, je me sentais quelque peu plus à l'aise avec ma vie sentimentale depuis la visite de Luca, mais quand même, de là à m'imaginer emménager si rapidement avec Harper, qu'elle s'invite de la sorte, je ne comprenais vraiment pas ses motivations. Je bredouillais.

- B… baheu… le… le canapé se déplie, mais… bah non je ne reçois jamais personne pour dormir… enfin… si, mais…

Mais pas dans une chambre d'amis. Je fronçais les sourcils, non pas parce que j'étais fâchée, mais parce que je ne comprenais pas la situation. Toutefois, je ne terminais pas ma phrase en décidais plutôt de finir de préparer thé et café avant de rejoindre Harper sur le canapé. La plante aux crocs acérés fixait toujours mon amie jusqu'à ce que je m'assieds. Là, comme calmée par ma présence, elle se redressa, dents pointues en direction du plafond et ouvra la gueule, comme un oisillon attendrait qu'on vienne lui donner la béquée.
Aux souvenirs que Harper évoquait, je souriais légèrement avant de lui répondre, le regard trainant sur la plante. Je préférais me faire fuyante et ne pas avoir contact avec les yeux de mon amie. Je craignais d'y comprendre quelque chose que je ne comprenais pas encore. Ainsi, je me recroquevillais dans l'angle de mon canapé, ramenant mes jambes contre ma poitrine, ma tasse de thé posée sur mes genoux.

- Celle-là ne mange pas de friandise, s'il te plait. C'est ma gobeuse d'insectes lorsque je suis à Poudlard. Elle entretient la maison aussi bien qu'un elfe.

C'était une image bien sûr, cette plante ne faisait pas le ménage, cependant, lorsqu'un insecte quelconque osait s'approcher de son pot, elle devenait aussi vive qu'une tigresse. Je l'avais même vu manger de petites souris une fois, m'épargnant d'être infestée. Quand bien même j'appréciais tous les animaux et je ne leur souhaitais aucun mal, je ne désirais pas avoir de nuisibles chez-moi. Bien évidemment, je me serai occupée des souris à ma manière, en les capturant et en les emmenant sur une île où elles seraient plus épanouies. Hélas, le temps de chercher une boite où les déposer, la verdure carnivore s'en était occupée.
Plissant légèrement les yeux pour savourer la chaleur de mon thé, j'inspirais profondément afin de me calmer, mais aussi pour m'enivrer du parfum d'agrumes qu'il dégageait. Par ailleurs, l'eau s'était teinte d'orange, donnant l'impression que je buvais en fait un jus d'orange. Amusée par les constatations de Harper, je ne pus m'empêcher de pouffer sensiblement, sentant le calme revenir petit à petit.

- Oh bah il est bien pourtant ce garçon. Tu n'aimes plus les gens charmants ? Je penchais sensiblement la tête sur le côté. Te dégouterais-je également ?

Boutade bien évidemment, l'occasion avait été trop grande pour que je passe à côté. Pourtant, je grimaçais aux paroles suivantes, fronçant à nouveau les sourcils, cette fois-ci, aussi perdue que sentant une pointe d'agacement me piquer la poitrine.

- Comment ça "le neutraliseur pimente TA vie" ? Tu crois que c'est un jeu Harper ? Tu crois que c'est amusant tout ce qui m'arrive ? Et c'est quoi ces paquets bordel ? Comment ça "on va s'éclater" ? Tu comptes rester ici et tu ne m'as rien dit ? Qu'est-ce que tu as derrière la tête ?

J'étais presque déçue que le début de notre entretien commence déjà par des chamailleries, et je laissais à Harper le bénéfice du doute et de l'incompréhension, ainsi, j'essayais de garder mon calme. Mais avec elle, c'était un exercice qui m'était extrêmement difficile. Autant je l'appréciais pour toutes ses qualités et ses défauts, autant elle était la seule personne sur cette terre à pouvoir m'énerver d'un simple claquement de doigts, moi qui étais d'ordinaire une sorcière si calme et discrète. Mais là, je devais savoir. Certes je l'avais invitée à venir un petit moment pour me voir, mais pas pour m'envahir… Ou alors si envahissement il y aurait, ce ne serait pas impuni. Le problème étant que je n'avais pour l'heure aucune idée de la sentence à lui donner. Dans le fond, j'ignorais si je devais me réjouir qu'elle veuille rester, parce que j'avais cruellement besoin de sa présence, ou me mettre en colère de cette intention, car j'avais aussi besoin de me reposer, et ça, j'avais l'habitude de le faire uniquement en étant seule.


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Harper MacFusty
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Dim 30 Mai - 9:28
Comme au premier jourAbigail & Harper


La sentence tombe. Harper est condamnée à dormir sur le canapé, au beau milieu du salon, en compagnie des plantes douteuses. Fort heureusement, sa condamnation ne durera pas éternellement. Intérieurement, elle peste contre la lumière qui l’éveillera le matin, et le risque qu’Abigail fasse du bruit en se levant la première. Pourquoi peste-t-elle autant au juste ? Elle a un sommeil de plomb. Un lendemain matin de fête, elle avait reçu une beuglante, elle n’en avait rien entendu, et découvert les morceaux de papiers déchiré au pied de son lit. Elle n’a jamais su qui le lui avait envoyé. Soit, elle assume les conséquences de sa décision. Harper met un pied d’honneur à honorer l’objectif qu’elle s’est fixé, celui de prendre soin d’Abigail durant les prochains jours. Qu’elle le veuille ou non. Pourvu qu'elle le veuille. Mais non, elle ne le voudra pas.

Pour une fois, elle avait fait les choses correctement. Jusqu’à hier encore, elle hésitait, craignant de blesser son amie. Mais une discussion par téléphone hier soir avec Grand-Père Vicky l’avait convaincu : parfois, il faut prendre le risque de blesser les gens pour prendre soin d’eux et insister jusqu’à ce qu’ils se rendent compte et acceptent qu’ils ont besoin d’aide. Alors dans la nuit, branle-le-bas de combat. Harper avait listé toutes les affaires dont elle avait besoin, acheté tout ce qui était nécessaire. Et là voilà maintenant assise dans le salon d’Abigail qui commence petit à petit à comprendre son manège. Un mal pour un bien, avait dit Grand-Père Vicky.

Il y a charmant, et il y a les gens qui en font trop, à croire qu’il le fait exprès en espérant que tu ne puisses plus jamais regagner ton poste, répond-t-elle, jugeant que cette réponse satisfasse chacune de ses questions.

Et elle ne s’attarde pas sur le sujet, préférant passer du coq à l’âne, sautant pour mieux reculer, mais il fallait absolument rentrer dans le vif du sujet. Evoquer le neutralisateur pour piment de vie est indélicat, et pourtant, en un sens, ses paroles se confirment au vu de la réaction d’Abigail. Une Abigail qui passe, en l’espace d’une seconde, d’une blancheur de peau à une peau rosie par l’énervement.

Harper eut envie de répliquer que non, devoir annoncer à Abigail Mcfusty qu’elle venait l’aider dans sa coupure de magie n’est pas une mince affaire. Harper se voulait être une bonne amie, mais les arguments clairs et concis visant à convaincre et apaiser, ce n’est pas sa tasse de thé, elle procède un peu comme elle peut. Quand Abigail lui demande ce qu’elle a derrière la tête, Harper eu envie de répondre des cheveux, mais cet humour de mauvais goût risque d’envenimer les choses. Un peu perdu, la bouche pleine de cookie, elle prend une inspiration avant de parler et de la poudre du sucre glace s’engouffre dans ses voies respiratoires. Les joues gonflées comme un hamster, elle tente de tousser sans rien recracher et devient rouge comme une pivoine. Lorsque la gêne est passé, qu’elle peut de nouveau respirer convenablement par le nez et mâcher pour avaler, elle lui répond, d’une voix enrouée :

Je suis venue te prêter assistance durant quelques jours. J’assurerais mes cours, et serait présente les soirs et les matins. J’ai fait quelques recherches sur Internet et, couplées avec les informations de l’OP, je pense que ce n’est pas une bonne idée de te laisser seule 24 heures sur 24. S’il se passe quoi que ce soit, ma baguette sera d’une grande utilité. On ne peut pas prendre le risque que cela empire. On ne sait pas ce que ses ondes ont pu faire sur ton corps. Laisse-moi t’aider. Donne-moi quinze jours, au moins, pour commencer. Tu ne m’auras pas toujours dans les pattes. Je dormirai dans ton canapé. Et j’enlèverai les cheveux dans le lavabo, promet-elle.

Décidément, manquer de s’être étouffée avant de répondre, c’était comme si elle avait tourné sa langue sept fois dans sa bouche. Harper s’étonne de sa lucidité et la qualité de ses mots. Peut-être devrait-elle manger des cookies plus souvent.

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Dim 30 Mai - 17:00
Manquer que je revienne un jour à ma place de professeur de Soins Aux Créatures Magiques semblait apparemment servir à quelqu'un, et en entendant les paroles de Harper, mes épaules s'affaissèrent sensiblement. Alors, l'habituelle litanie revint changer dans mon esprit. Avais-je véritablement ma place à Poudlard en tant qu'enseignante ? Étais-je vraiment à la hauteur de ce que je faisais (sans aller jusqu'à douter de mes compétences de sorcières) ? Étais-je vraiment épanouie dans ce métier alors que toute ma vie j'avais aspiré à un autre ? Le neutraliseur de magie n'était-il pas l'aubaine que j'attendais pour fuir les couloirs professoraux de Poudlard et aller me cacher dans un buisson pour faire ce que j'appréciais le plus au monde : la dragonologie ?
Tasse de thé sur mes genoux, les mots de mon amie tombèrent comme une guillotine, me coupant le souffle au passage. Je décidais de noyer cette asphyxie en buvant une gorgée du contenu fumant dans ma tasse qui vint alors teindre mes lèvres d'un orange brillant, mes doigts s'agitant légèrement autour du contenant. Toutefois, je préférais ne rien dire, garder cette souffrance en moi, parce que Harper n'était pas là pour ça, si ?

Ben merde alors, si.

Yeux arrondis comme des soucoupes, je restais complètement interdite devant ce qu'elle avait dit. La bouche légèrement entrouverte, je ressemblais à un poisson hors de l'eau. Voilà que j'étais accablée d'une elfe de maison pot de colle qui me connaissait sur le bout de ses très longs doigts fins et squelettiques, et maintenant de ma meilleure amie et ennemie que j'aimais autant que je la détestais. Bordel de merde qu'avais-je fait au monde pour mériter tel châtiment ? Silencieuse durant de longues minutes, je cherchais dans ma mémoire pour trouver la raison qui aurait pu m'attirer à ce point le courroux des esprits, en vain.
J'avais toujours été une solitaire, à ne jamais me plaindre de ce qui m'arrivait dans la vie. J'avais étouffé la détresse profonde que j'avais ressentie au décès de mon frère, et j'avais continué à avancer dans la vie, à me battre pour les causes que je pensais juste. L'été de cette année avait été particulièrement difficile à traverser puisque j'avais perdu toute notion de volonté de prendre soin de moi, me rendant ainsi malade durant de très longues semaines, m'obligeant à un repos forcé de plusieurs jours. Lors de l'intervention dans la forêt non loin de Pré-Au-Lard alors que le Blood Circle avait été détecté, j'avais combattu pour protéger Septima Ombrage et mes camarades avec hargne alors que j'étais dans un état de faiblesse presque alarmant. Avant la rentrée scolaire à la fin du mois d'août, j'étais retournée sur place afin de comprendre ce qu'avaient voulu nous dire les centaures et pour constater l'ampleur des dégâts sur la faune et la flore.
Sans doute était-ce là que la puissance du neutraliseur s'insinua en moi comme un virus, prenant la main de ma maladie pour me faire souffrir deux fois plus. N'était-ce qu'un coup du sort ? N'était-ce que les conséquences directes de ma trop grande curiosité, de ma trop grande maladresse ?

Manquant de faire tomber ma tasse de thé à ce que venait de dire Harper, je réussissais tant bien que mal à la poser sur la table basse, gardant encore et toujours obstinément le silence. Comment devais-je réagir ? M'énerver ? Sauter de joie ?
Car après tout, vivre avec Harper n'était-ce pas ce que j'avais désiré le plus au monde fut un temps ? N'était-ce pas ce qui avait causé la rupture de notre amour ? N'était-ce pas l'un de mes plus grands regrets de ne pas avoir pu l'accomplir ?
Harper était bien la seule et unique personne que je voulais accueillir sous mon toit pour qu'elle y vive, mais pas comme ça, pas dans cette situation… pas par… pitié.
Nerveuse, je me redressais, l'index de ma main gauche entre mes dents (je me rongeais l'ongle), le dragon tatoué sur mon bras ne bougeait plus lui non plus, comme s'il était devenu un tatouage moldu. En réalité, il était figé de l'annonce que mon amie resterait vivre chez moi durant deux semaines. Étrangement, le fait de la renvoyer ne me traversa pas un seul instant l'esprit, car elle avait déjà assez argumenté pour me mettre dos au mur. Je comprenais ses bonnes intentions, elle avait fait des recherches, et si elle disait s'être informée auprès de l'Ordre, alors je la croyais. Je savais que Harper Auburn n'était pas du genre à mentir ou inventer des conneries sur un sujet aussi grave.
À présent debout face au canapé, je faisais des allées et retours entre le petit espace que j'avais laissé entre ma cheminée et la montagne de colis. Finalement, ce furent les larmes qui s'emparèrent les premières de moi, décelant ainsi ma rage, ma joie et mon désespoir tous entremêlés en cet instant précis, m'interdisant de réagir d'une quelconque façon. Prise dans un étau, je n'avais aucune possibilité de retrait, aucun droit de refuser, j'étais accablée comme un animal chassé, et je détestais cette sensation, bien que je savais que Harper Auburn ne me dévorerait pas.
Plus jamais.
Hélas.

- Putain, mais qu'est-ce que j'ai fait à Merlin pour qu'il s'acharne sur moi comme ça ? Je… je voulais juste vivre tranquillement et… et voilà que je suis née avec… (je ne continuais pas) puis mon frère m'est retiré, ensuite mes pouvoirs et maintenant….

Je posais mes prunelles sombres sur Harper, le menton bas, me donnant des airs davantage colériques et démoniaques ainsi.

- Et maintenant me voilà obligée d'accepter une putain d'elfe de maison et… Toi.

Je riais nerveusement, secouant la tête, reprenant mes cent pas dans le petit espace que j'avais attribué à cela.
D'accord, essayons de relativiser. Tout ce qui m'arrivait avait sûrement ses raisons que j'ignorais encore. Inutile donc de chercher à savoir de ce quoi il s'agissait. Je devais vivre le moment présent et analyser ce que j'avais sous la main. Réfléchissant à voix haute, je levais mon index pour énumérer les faits qui allaient se produire.

- Bonnie va me rendre la vie encore plus impossible, elle va aller tout raconter à mes parents que tu vis là. Les rumeurs vont s'enflammer et tout le monde va venir sonner à ma porte comme si cette maison est en fait un moulin.

Je dramatisais bien sûr, mais je n'étais pas dans un état d'esprit me rendant capable de raisonner convenablement. Harper connaissait Bonnie car elle l'avait déjà rencontrée les quelques fois où elle s'était rendue à Uachdar, chez mes parents, lorsque nous étions enfants. Je me mordais les lèvres. Les avoir les deux sous le même toit durant deux semaines… j'allais finir par aller m'installer dans l'écurie… Je levais le majeur.

- Ok tu ne seras pas là en journée, mais je vais vivre avec l'angoisse, ou la joie je ne sais pas, de te voir revenir le soir… je vais paniquer, je vais être chiante, je vais…

Je m'arrêtais, comme frappée par la foudre, puis je me tournais à nouveau vers Harper, la regardant enfin véritablement depuis qu'elle m'avait annoncé qu'elle resterait avec moi, comme si tantôt j'avais été prise d'une hallucination et que je parlais seule.

- Je ne vais pas te laisser dormir sur le canapé. Je riais nerveusement, levant un index pour le secouer de droite à gauche. Non non non non non ma grande, je ne vais pas te faire se plaisir ! Tu… tu vas dormir dans ma chambre ! Moi, je vais dormir ici, sur le canapé, je dors de toute façon moins que toi et je n'ai pas envie que tu…  j'agitais mes bras dans tous les sens comme le ferait une araignée en détresse. ... que tu touches à des trucs sans que je sois là !

Je n'avais rien à cacher en vrai, mais cette maison m'appartenait, c'était mon îlot de bien-être et de tranquillité. Je ne ressentais pas ce besoin de surveiller Bonnie car elle était une elfe de maison, mais Harper je la savais curieuse, avec ses petites mains fouineuses malgré elle qui irait tirer un livre pour le lire et qui, ô drame, ne me rangerait pas au bon endroit. Elle viendrait jouer du piano avec ses mains grasses de cookie et elle en foutrait partout, elle semait déjà des miettes partout. Miettes que JE nettoierais derrière elle, parce que, admettons-le, j'étais maniaque. Et être maniaque sans ses pouvoirs magiques, c'était l'enfer sur terre.
Je paniquais.
Au secours…


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Lun 31 Mai - 8:06
Comme au premier jourAbigail & Harper


A vrai dire, l’idée lui a traversé l’esprit le jour où Abigail lui annonça avoir été victime de la technologie moldue. Apparue comme une évidence. Si la situation avait été inversée, Abigail aurait fait de même pour elle, sinon plus.

Cette cassure entre magique et non-magique lui avait toujours brisé le cœur.  Depuis sa plus tendre enfance, le cœur de Harper bat pour combattre le mal, mais comment battre le mal de la différence ? Cette peur de l’autre, la haine du dissemblable, est partout, sous toutes les formes, et aujourd’hui, Harper Auburn, sorcière, doit lutter contre le monde dans lequel elle est née.

Non, se reprend-t-elle, pas le monde. Une partie du monde. Elle est persuadée que bon nombre de moldus seraient capables d’accepter la communauté sorcière, dès lors où les deux mondes vivent en harmonie, dans le respect de chacun, dans l’acceptation de leurs dissimilitudes, sans craintes, sans reproches….

Les lèvres d’Abigail se teintent brièvement d’orange tandis qu’elle sirote sa boisson fumante. La nouvelle est retombée sur ses épaules comme un coup de massue, un poids sous lequel elle s’efforce de ne pas plier. Harper le voit au léger affaissement de ses épaules, à la tasse de thé bouillante qui manque de se déverser sur le sol, à cet ongle raccourci, à son ami devenue statue, à son tatouage devenu statique sous le choc de l’annonce. Est-ce si effrayant que ça ? Harper s’efforce de ne pas réagir, bien qu’elle aurait voulu lui crier haut et fort que c’est pour son bien, qu’elle se doit de l’accepter. Mais ça ne sert à rien d’essayer de convaincre quelqu’un en tassant les idées dans sa tête. Cela produirait l’effet inverse, absolument contre-productif.

Et puis vinrent les larmes. Chaque trait du visage d’Harper s’arrondi de surprise. Abigail marche nerveusement dans le salon, l’œil embué. Harper se sait difficile à vivre, mais tout de même, inutile de se mettre dans cet état ! Voilà qu’Abigail peste, contre l’injustice du ciel, contre elle-même, contre le coup du sort.

Sans vouloir t’offenser, je pense que Merlin n’y…

Elle n’eut pas le temps de terminer sa phrase qu’Abigail enchaîne, citant l’elfe de maison. Quoi ? Elle avait une elfe de maison maintenant ? Quelle chance ! Cela dit, son amie doit se sentir sacrément en colère pour oser qualifier une créature de putain. Harper se console qu’elle ne lui ai pas attribuer ce gros mot en la citant. Les rires nerveux redoublent, Abigail semble lancée dans sa tirade sans fin. Stoïque, Harper ne dit pas un mot, se demandant si elle allait réussir à tout retenir. Quand…

Hey !

S’écrie-t-elle enfin, piquée au vif, comme si la mouche de la susceptibilité venait de la toucher.

Tu me vexe ! J’ai mis tout en œuvre pour pouvoir t’aider. Je sais que je ne suis pas un cadeau à vivre, mais face au Blood Circle, on est tous dans le même pétrin. Et je te ferai remarquer, que si c’est moi qui avais été touché par le neutralisateur, tu aurais débarquée comme une mère de substitution dans mon appartement pour y mettre de l’ordre dans mon désordre. Et si tu crains les racontars de ton efle, qu’elle sache que…

Elle porte ses mains à sa bouche pour amplifier sa voix :

Je suis ici dans l’unique but de t’aider à traverser cette épreuve.

Elle poursuit d’une voix normale :

Deux aides en valent mieux qu’une, ce n’est pas l’Elfe de maison qui va t’accompagner mettre le nez dehors pour respirer un autre air que celui de ta maison. D’ailleurs, si je suis ici, ce n’est pas pour pallier ton absence de magie. J’ai vécu onze ans sans magie, et en fait, ce n’est pas si terrible, ce n’est pas grave, ma mère mise à part, il y a des moldus qui vivent très bien. C’est pour cela que, j’ai décidé d’être solidaire. Tant que nous le pourrons et que tu me permets d’être ici (car oui, tu as le choix de me renvoyer chez moi, calme-toi s’il te plait !), nous allons vivre comme des moldus. Pas de magie. Chaque soir, en rentrant du travail, je déposerai ma baguette dans cette boîte…

D’un gros paquet rectangulaire, elle en sort un étui, elle remue sous le nez d'Abigail.

… et je ne la récupérerai qu’en partant travailler le matin. J’ai acheté une télévision (que nous serons obligées de brancher magiquement pour capter les ondes), et tout un tas de trucs qui occupent les moldus. J’ai même récupéré mes vieux DVD pour te faire découvrir tous mes dessins-animés préférés.

Harper, trente-deux ans.

Alors maintenant tu vas te calmer et t’assoir ! Ce n’est pas être faible que d’accepter d’être aidé. Mais vous le savez très bien, vous, les Pouffsoufles. Bien au contraire ! C'est faire preuve de force que d'accepter qu'on vous tende la main lorsque qu'on se noie dans une situation difficile. Inutile de se fatiguer à essayer de regagner miraculeusement la berge. Le principal c'est de survivre, on ne survie pas en pataugeant.

Et elle se tut. Accepter les mains tendues, Harper en savait quelque chose, plus qu'on ne l'aurait cru. Elle n'était pas qu'un bébé d'un mètre soixante dix vieux de trente et quelques années.

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Mar 1 Juin - 7:37
Prise de panique, je déblatérais des âneries à toute vitesse, l’émotion étant plus forte que la pensée, les mots dépassant cette pensée. J’étais tout bonnement dans l’incapacité de bien me tenir, de rester calme et de ne pas faire les cent pas. J’étais dans l’incapacité de raisonner de manière calme, logique et censée. J’avais la sensation que tout me tombait sur le coin de la figure et que je me devais de tout encaisser sans rien dire, je me plaignais rarement d’ailleurs, et voilà que lorsque je le faisais, on me rappelait à l’ordre, comme si mon droit d’expression n’était pas légitime.
Dans ma détresse, je parvenais cependant à écouter les paroles de Harper, et même s’il y avait du vrai dans ce qu’elle disait, d’autres points me piquaient au vif. Je fronçais les sourcils lorsque la jeune femme se mit presque à hurler dans ma maison dans l’espoir que Bonnie l’entende. Enfonçant ma tête dans mes épaules à l’instar d’une petite tortue, je grommelais avant de répondre d’une voix tout aussi vive.

- Arrête de hurler, Bonnie n’est pas là ! Elle est allée faire des courses pour moi. À t’entendre, on dirait que tu as oublié qu’elle genre d’elfe de maison elle est. Évidemment qu’elle va me tirer dehors pour me faire prendre l’air et me faire sortir de l’île. Je te rappelle qu’elle a failli nous lancer un Crache-Limace durant le repas de Noël quand tu étais à Uachdar, parce qu’on avait eu le malheur de manger du chocolat avant le souper. Je frissonnais presque exagérément. Cette… cette elfe de maison est un démon !

Traumatisme de l’enfant je ne trahissais cependant pas la profonde affection que j’avais envers la créature. Bonnie avait été l’une de mes rares confidentes à l’époque, et je lui devais beaucoup. Cependant, les MacFusty ne considéraient pas les elfes de maison comme des esclaves, mais comme des créatures qui étaient leur égal. Bonnie pouvait donc se permettre des choses que d’autres elfes de maison ne feraient pas. Glissant mon visage dans la paume de ma main gauche, j’inspirais profondément comme si j’essayais de me calmer.

- Je t’aurais sûrement proposé mon aide oui, si ça avait été toi, mais bon sang je ne me serais jamais imposée comme ça… Harper purée on dirait que tu ne comprends pas ce que je suis en train de vivre. Je sais qu’on peut vivre sans magie, ça ne me pose foncièrement pas de problème d’ailleurs, une grande partie de ma famille est moldu, tu le sais… là où le truc est difficile à digérer, c’est que…

Comme si mes jambes se dérobaient, je me laissais glisser à terre pour venir m’asseoir mollement sur le sol, posant mon menton sur la table basse comme le ferait un chien malheureux. Passant une main dans mes cheveux blonds, je fixais ma tasse de thé fumante tout en reprenant.

- C’est comme si on m’avait amputé d’un bras ou d’une jambe… il me manque quelque chose, tu comprends ? Je ne suis pas malheureuse de vivre sans magie, je suis malheureuse d’avoir un manque…

Tournant la tête pour poser cette fois ma joue contre la table, je regardais la montagne de colis tout en pouffant de manière sarcastique.

- Comme si le manque de l’absence de mon frère ne suffisait pas, il faut maintenant qu’on me retire mes pouvoirs…

Pour une fois, j’osais me plaindre de mon sort, parce que j’étais à bout de nerf, parce que j’en avais marre que tout me tombe dessus et que je supporte le destin sans rien dire. Alors, une nouvelle fois sans que je ne puisse vraiment le contrôler, je me mettais à pleurer, glissant une main sur mon visage. Être forte en apparence était une chose, je ne perdais pas la face devant ceux qui n’avaient pas ma pleine confiance. En réalité, j’étais brisée de l’intérieur depuis des mois, et aujourd’hui, je le montrais à Harper, parce que je n’avais plus l’énergie ni la volonté d’être forte pour qui que ce soit. J’étais juste brisée, et je n’arrivais pas à recoller les morceaux ensemble.

- Pourquoi ? Pourquoi il a fallu que ça me tombe dessus dans un moment où j’en avais le plus besoin ? Pourquoi il a fallu que je retourne là-bas pour vérifier des éléments ? Pourquoi je ne peux pas être tout simplement tranquille ?

Je ne cherchais pas de réponse, mes questions étaient bien sûr rhétoriques, mais elles pesaient si lourds à mon cœur que j’avais besoin de les exprimer, les dire à voix haute, afin de les extérioriser pour me calmer. Je n’avais pas besoin de philosopher sur le bien ou le mal de ma vie, je savais que les épreuves que je vivais avaient un sens, même si je ne les comprenais pas actuellement. Par ailleurs, je doutais toujours que la mort de Kyle ait eu un véritable sens, c’était bien trop douloureux de vivre avec son manque.
Me redressant un peu, je reniflais tout en me passant la main sur les yeux pour les éponger avant de baisser la tête pour regarder mes jambes. Je n’avais plus de force, je n’avais plus de courage, alors je n’osais même plus lever les yeux sur Harper. Je n’avais plus l’ambition de la chasser, à quoi bon ? Sans doute allais-je me laisser porter dans le courant de l’eau de ma vie, et si de temps en temps les vagues me feraient boire la tasse, alors soit.

- Je ne veux pas de ta pitié Harper. Je ne suis pas une handicapée. Alors ta baguette, tu vas la garder avec toi et tu vas continuer à l’utiliser même quand tu seras là. Parce que je m’en fout. Parce que toi, t’as pas de raison d’être amputée… et tu fais de la jolie magie… je ne veux pas nous priver de ça.

La magie de Harper m’avait toujours enchantée. Fut un temps lorsque nous étions enfants, nous nous amusions à nous envoyer des signaux à travers Poudlard, et ce, de manière toujours très inventive. J’adorais déposer un parchemin enchanté dans le verre de jus d’orange qu’elle buvait le matin. Le papier barbotait dans le liquide sous la forme d’un petit poisson, parfaitement à l’aise. Lorsque Harper le récupérait pour le lire, j’avais simplement écrit un « bonne journée ». Ce souvenir me mit du baume au cœur. J’inspirais profondément, calme retrouvé, bien que la sérénité ne soit pas au rendez-vous. Sûrement que, par extension, j'avais besoin de ce genre de douce magie que pouvait faire Harper pour que le manque de mes pouvoirs soit plus doux.

- D’accord… d’accord… reste. J’ai… j’ai juste besoin que mon espace vital reste plus ou moins intact, tu comprends ? Cette maison… c’est ma vie entière qui est ici… Laisse-moi… laisse-moi le temps de m’adapter, et de te faire une place, tu veux bien ? Ça fera un genre de temps d’essai.

Un temps d’essai pour quoi au juste ? Je déglutissais nerveusement, mes mots ayant à nouveau dépassé mes pensées. Nerveusement, je venais renifler et me frottant le nez, essayant de mettre ça sur le compte d’un temps d’essai pour lui faire de la place dans ma vie, à nouveau, comme avant, puis, je me relevais. D’un geste négligé et quelque peu désintéressé, j’attrapais un minuscule paquet en haut de la pile, puis, regardant Harper de biais, je parlais d’une petite voix.

- S’il te plait… on peut tout déballer et se débarrasser de se merdier ? Ça évitera que Bonnie fouille tout lorsqu’elle sera rentrée... et je suis curieuse aussi de tout ce qu'il y a là-dedans.

Malgré moi, malgré ma douleur, j'essayais de détendre l'atmosphère. J'avais posé mes conditions et mes besoins, à Harper de les saisir et de les respecter. Mes parents, Bonnie, puis maintenant Harper. Savoir que j’étais si bien entourée me mettait du baume au cœur, mais je voyais ces gens comme des plaies aussi. Les plaies qui bousculaient fortement ma vie sans prendre garde à ma sensibilité.


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Mer 2 Juin - 14:00
Comme au premier jourAbigail & Harper


Crise de panique ? Ou bien crise d’angoisse ? Harper ne sait pas vraiment faire la différence. Cependant, elle sait reconnaître quelqu’un d’excédé et l’explosion d’Abigail lui apparaît claire et nette comme des nerfs qui lâchent. En silence, elle l’observe se lever, faire les cent pas, s’agiter, déblatérer un flot de paroles, tout ce qui lui passe par la tête, tout ce qui lui passe par le cœur, tout ce qui déborde se renverse. En vérité, il est inutile de gigoter dans tous les sens, Harper avait pris sa décision hier soir et c’est tête dure qu’elle se résout à honorer la mission qu’elle s’est fixée.

Assise désormais sur le sol, la tête posée sur la table basse en guise de profonde lassitude, les maux d’Abigail se déversent, le débit de son désarroi atteint Harper qui n’en montre rien et, en guise de bouclier se ressert en cookie pour reprendre des forces. Si elle comprend ce que vit Abi ? Harper ne répond pas. Pouvoir vivre sans magie mais en être en manque, c’est bien ça ? Un manque qui s’ajoute à l’absence de son frère, c’est bien ça ? Harper n’avait jamais connu Abigail dans un tel état, cette décontenance, ces épaules affaissées, ce harassement qui la fait ployer, là, juste sous ses yeux.

Elle la laisse s’exprimer, jusqu’au bout, jusqu’à l’épuisement des mots. Terminant son cookie, elle époussète ses mains et sa bouche, retire avec la langue ce morceau de pépite de chocolat venu se coincée entre deux dents. Ses yeux ne quittent pas Abigail, qu’elle observe, sans mot dire, qu’elle laisse agir, sans intervenir.

Les choses sont simples Abigail. Parfois, pour aider les gens qu’on aime, il faut avoir le courage d’aller à l’encontre leur volonté. Tu n’as pas envie que je m’impose et pourtant, je vais le faire, même si je n’appellerai pas ça m’imposer. T’avertir de mon envie de t’aider reposait sur deux aléas : soit tu acceptais avec plaisir, soit – et te connaissant, c’était fort possible et tu viens de me le prouver – tu refusais catégoriquement. Alors quoi ? J’abandonne ? Parce que tu as décidé que les choses doivent se dérouler d’une certaine manière et pas d’une autre ? Parce que ta maison est ton cocon et que personne ne doit le percer ? Je l’ai percé, je ne regrette pas. Je ne partirai pas. Je n’ai aucun remord de m’être imposée pour t’aider. J’ai même cru, un instant, que tu serais ravie de mon idée et que nous allions bien nous amuser. Puisque l’absence de magie est ressentie comme un manque, je conserve ma volonté de n’user de ma baguette qu’en dehors de ta maison. En procédant ainsi, je ne me sens pas privée, et je ne t’imposerai pas de me voir utiliser ce que toi tu ne peux plus faire. A ta place, je l’aurai mal vécu. Et je me garde le droit de me mettre à ta place. Je n’utiliserai pas ma baguette pour déballer et ranger tout ces paquets. Par contre, tu as touché un point sensible de ma susceptibilité en prétextant une soi-disant pitié à ton égard. Depuis quand Harper Auburn agit-elle par pitié ? Tu sais que je ne sais pas faire les choses si elles me sont forcées. Je ne les fais que si j’en ai envie. Je les fais seulement si elles me semblent juste.

Loin d’être habitué à ce genre de discours solennelle, Harper frappe des mains sur ses genoux pour se relever avec entrain et se diriger vers les paquets qu’Abigail commence à tripoter nerveusement.

Je vais tout déballer et ranger. Ce n’est ni plus ni moins que les affaire dont j’ai besoin pour mon séjour ainsi que quelques fantaisies que je me suis accordée pour égayer notre cohabitation.

Arrivée aux côtés d’Abigail, Harper ne peut contenir une frustration et des mots insinués dans son esprit depuis le début de l’opposition d’Abigail :

Que voulais-tu que je fasse ? Que je t’abandonne ? A nouveau ?

Elle détourne la tête, comme si elle en avait trop dit, comme si tout ça lui avait échappé, comme si elle n’assumait pas, comme si elle aurait voulu disparaître, devenir toute petite et se cacher dans un trou de souris. Alors, sans transition, elle ajoute :

Pourquoi tu ne me parle jamais de ton frère ? Pourquoi tu n’acceptes pas mon amitié ? Pour ce qu’il s’est passé entre nous ? Pour ce que je t’ai fait ?

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Mer 2 Juin - 22:30
Quelque peu abasourdie et confuse, j'écoutais la tirade de Harper, manquant d'en rester bouche-bée et de ressembler à un poisson hors de l'eau. La jeune femme ne m'avait pas habituée à de tels discours, et maintenant qu'elle se prêtait à l'exercice j'avouais être totalement déboussolée, mais dans un sens, cela me rassérénait, car c'était là bien la preuve que Harper agissait avec son cœur et qu'elle tenait à la démarche qu'elle avait entreprise. Au plus profond de moi, j'étais touchée à un tel point que j'en ressentais de la douleur (encore une) dans la poitrine.
Naturellement, mon amie d'enfance n'avait pas toutes les clés en main, elle ignorait par exemple que j'étais malade, ainsi donc elle ne pouvait pas comprendre tout ce que j'avais insinué malgré moi dans ma panique et ma tristesse. J'étais désorientée et j'avais la sensation de me noyer, mais voilà que Harper m'avait tendu la main, et que j'essayais de la saisir tant bien que mal. Je luttais contre la voix d'opposition intérieure qui me hurlait de la chasser, et davantage je souhaitais me concentrer sur la petite parole du cœur qui me disait d'accepter, pour une fois, d'être aidée. Chose inhabituelle puisqu'entre Harper et moi, ça avait été globalement moi la bonne samaritaine. Évidemment il était arrivé à la jeune femme de prendre soin de moi lorsque j'étais au fond du lit avec 40 de fièvre, elle m'aidait à rattraper mon retard, notamment c'était grâce à elle que j'avais réussi à invoquer un patronus corporel.
Les yeux rivés sur les colis, je triturais nerveusement un coin du paquet que je tenais dans la main en déglutissant nerveusement. Comment pouvais-je lui expliquer ? Comment pouvait-elle comprendre ? Je craignais que nous soyons en permanence en désaccord sur le point de sa venue, dans sa manière de faire. Malgré ma maladresse à m'exprimer, j'essayais toutefois encore de l'éclaircir, parlant à nouveau calmement, voire même timidement, comme si j'étais cette enfant qui venait de se faire gronder par sa mère.

- Tu… Tu ne peux pas t'imposer comme ça dans ma vie si je n'en ai pas envie ni dans la vie de qui que ce soit… enfin… je crois ? Ce n'est pas poli, si ? Je… j'ai envie d'être contente que tu sois là… mais… mais j'ai peur aussi. C'est pour ça que je te demande juste… juste un peu de temps, s'il te plaît. Tu sais que je suis sensible… j… j'ai besoin d'un instant.

Être bousculée, j'avais l'habitude. Être forcée à ce point, non, pas même de la part de Harper bien que je la sache entreprenante. Je désirais lui faire de la place, je désirais qu'elle reste, qu'elle utilise sa magie devant moi et même qu'elle laisse des cheveux dans le lavabo. Je devais juste me faire à l'idée. Je devais juste vaincre mes vieux démons, ceux de cette peur qui me tenaillait la poitrine à chaque fois que j'étais en présence de Harper depuis nos dix-huit ans. Depuis notre rupture.

- Si tu veux te mettre à ma place, fais-le correctement… Je fronçais les sourcils en réalisant que je venais de mal parler. Je me raclais la gorge pour reprendre. Enfin je veux dire… ça ne me fera pas de mal que tu utilises ta baguette et ta magie en ma présence, au contraire, ça me fera plaisir. J'aime la magie, et surtout, j'aime TA magie, Harper… Je… je suis déjà privée de tant de choses… s'il te plaît, ne me prive pas en plus de ça… Je la regardais du coin de l'œil, timidement, comme si nous étions devenues des étrangères. Mais… mais je veux bien déballer les paquets sans magie, avec toi. Ce sera un peu… comme à Noël, non ?

J'étirais mes lèvres en un petit sourire maladroit, ne sachant que dire à propos de la pitié. C'était un sentiment que je ressentais dès que l'on mettait en valeur mes faiblesses. Pas mes défauts ni le fait que j'ai la carrure musculaire d'un enfant de dix ans, non. Je parlais là des faiblesses que les autres, les gens normaux, n'avaient pas. Ma maladie incurable, et maintenant le manque de ma magie. Qu'on veuille s'occuper de moi comme si j'étais un animal blessé, qu'on me force à accueillir quelqu'un alors que je ne l'avais pas désiré au départ… J'avais la sensation que dans le fond, Harper ne me croyait pas capable de surmonter tout cela, et que puisqu'elle savait que j'étais une personne fragile, elle me prenait en pitié en se chargeant d'un genre de mission humanitaire en venant s'occuper de moi comme si j'étais une véritable handicapée. Je soupirais.

- Ce n'est … ce n'est pas parce que je suis fragile… ou sans pouvoirs magiques, que j'ai forcément besoin d'être… surveillée, ou que j'ai besoin d'assistance. Je… je pense pouvoir me débrouiller seule, sans l'aide des autres… parce que… parce que c'est comme ça que j'ai toujours fait Harper, je ne t'apprends rien. Ma réussite scolaire, mes diplômes, mon talent en magizoologie, en dragonologie et en botanique, je ne le devais pas uniquement à mon sang, mais aussi aux heures incalculables aussi bien théoriques que pratiques que j'avais effectuées. Les nombreuses expériences que j'avais accumulées et la place que je me faisais au sein du Ministère dans la section de contrôle des dragons, je le devais à moi, et à moi seule. Lorsque j'étais malade, je demandais très peu de l'aide, pas même à un médicomage. J'avais poussé les limites de mon corps cet été au point de m'effondrer plusieurs fois, mais jamais je n'avais demandé de l'aide, jamais je ne m'étais plainte. Je… je ne veux ni faire pitié, ni recevoir ta pitié, parce que… parce que c'est le sentiment que ça m'évoque quand je vois ta façon d'agir avec moi. Peut-être qu'il faudrait… m'expliquer, m'apprendre à ressentir autre chose ? Tu dis que tu n'agis pas par pitié, alors qu'est-ce que c'est ?

À nouveau, je hasardais un coup d'œil dans sa direction, d'autant plus lorsqu'elle frappa ses genoux pour se relever. La voyant se diriger vers moi, je rentrais sensiblement ma tête dans mes épaules, comme nerveuse de me faire à nouveau sermonner, ce qui ne tarda pas à tomber quand la sorcière fut à mes côtés. Sa remarque cinglante et ses questions me coupèrent le souffle au point que j'en eus un léger frisson. C'était comme si l'épée de Damoclès venait de s'abattre sur moi sans que je ne le voie venir. Sentant une nouvelle fois les larmes me monter aux yeux, car il s'agissait là de sujets très sensibles, je m'écartais d'un pas pour poser de la distance entre Harper et moi. Tant bien que mal, j'essayais de garder le contrôle de mes émotions tout en m'éclaircissant la voix.

- Harper je… je ne sais pas moi-même… Parler de Kyle c'est… c'est trop douloureux, mais pas que avec toi, avec tout le monde… Je… Les perles salées s'échappèrent de mes yeux pour couler le long de mes joues. Essayer de parler de mon frère me faisait toujours cet effet, c'était toujours très douloureux, et je refusais toujours de faire mon deuil, obstinément. Hors de question. Me passant le dos de la main sur mes joues pour me les essuyer brièvement, je reprenais en étouffant un sanglot. Faut que tu comprennes que… quand tu m'as abandonné quand on était gamine, mon épouvantard a changé de forme. Mon épouvantard est l'abandon. Je… Harper, tu es la seule véritable amie que j'ai, et je n'en veux aucune autre que toi. Personne, jamais personne. Juste… toi. Que toi. Je baissais le menton, laissant ma chevelure tomber sur mon visage et le cacher. Ça a toujours été que toi, toujours toi. Mais oui… peut-être que… que je reste méfiante parce que… parce que j'ai peur de souffrir à nouveau d'un abandon de ta part… J'ai peur que tu t'en ailles, j'ai peur qu'il t'arrive quelque chose, j'ai peur que toi aussi tu perdes tes pouvoirs magiques, j'ai peur de trop m'attacher à toi, j'ai peur de t….

Je m'interrompais de justesse, glissant une main libre sur mon visage pour me masser les paupières, gardant la tête basse et une distance raisonnable entre elle et moi. Je ne parvenais pas à calmer les quelques sanglots les plus forts. J'étais effondrée, en pleine détresse émotionnelle, sans repère, fragilisée par les violents coups que le destin m'avait infligés dernièrement.
Et par Merlin… j'avais si peur de l'aimer à nouveau, ma Harper. Ma belle, merveilleuse et dévouée Harper.


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Jeu 3 Juin - 22:15
Comme au premier jourAbigail & Harper


Il est interdit de s’immiscer dans la vie d’une amie que l’on souhaite aider, sous peine d’être impoli. Voilà un concept philosophique qui interpelle la pauvre cervelle d’Harper Auburn désormais à court d’argument. Refusant d’entretenir le débat (sa décision est prise, rappelons-le, à quoi bon tergiverser plus longtemps ?), la satisfaction la gagne toutefois en observant les tensions d’Abigail diminuer d’un cran (ou peut-être deux ?). Son amie a besoin de temps pour accepter, intégrer l’idée, digérer la survenue de Harper dans son espace vital. Un deuxième concept qu’elle peine à comprendre. Pourquoi se contrarier d’une chose aussi banale ? Harper était-elle aussi envahissante pour que la perspective de vivre en sa compagnie nécessite une préparation mentale ? Qu’à cela ne tienne, si Abigail désire un temps d’adaptation, Harper lui laissera tout le temps nécessaire. Cependant, la déception l’envahie quand Abigail insiste pour qu’elle continue d’utiliser la magie. Pour une fois qu’elle s’était fixée un challenge et qu’elle avait tout acheté pour s’y tenir, Abigail ne l’encourageait pas à le relever. A ses yeux, l’esprit des gens est un puit d’incompréhension. Un puit c’est profond, et cela demanderait beaucoup de travail rien que pour espérer se faire une idée du fond. Dans le fond, nous sommes tous les mêmes : profondément compliqués. Par contre, il y a vraiment quelque chose qu’elle ne comprend pas qui nécessite absolument d’être éclairci :

Je ne comprends pas pourquoi tu assimile mon aide à de la surveillance. Je suis là pour t’accompagner, pas pour faire les choses à ta place. Je ne vais ni faire la toilette, ni donner à manger à la petite cuillère. Nous ne savons pas l’ampleur des dégâts de ces foutues ondes, je suis là au cas où, je suis là en tant que compagne de route, je ne suis pas là pour te tenir la main. Disons que si tu étais une escaladeuse, je serai ton baudrier : là, juste au cas où. Te laissant libre de grimper seule, à ton aise, à ton rythme. Disons que d’ordinaire tu as l’habitude de jouer sans filet. Pour cette fois, accepte d’en avoir un. Ce n’est pas moi qui vait t’aider à faire ton numéro de voltige. Moi je serai juste là pour m’assurer que tu ne vas pas tomber. Et ce n’est pas parce qu’on place une protection que tu en auras forcément besoin. Ceci dit, va pour une cohabitation avec magie, mais je brancherai quand même la télévision !

Elle avait précisé ce détail sur un ton de caprice.

J’ai harcelé de nombreux collègues pour obtenir toutes les informations nécessaires à la captation des ondes sans user de branchement ni électricité. Je dois absolument tester cette technique. Je promets de ne rien abimer ! D’ailleurs, rien ne sera abimé puisque rien ne sera branché.

Et puis l’émotion la submerge : des larmes pleuvent sur les joues d’Abigail. Face à son désarroi, Harper se sent désemparée. Comment apaiser l’inapaisable ? Face au deuil, Harper se sent impuissante. Elle n’a jamais su trouver les mots. Comment réussir à se mettre à sa place quand elle-même n’a jamais vraiment su ce qu’était le véritable amour fraternel ? Elle le comprend, certainement, cet amour profondément ancré. Mais cette perte restera à jamais qu’une tempête de tristesse, comment trouver les mots justes face à cette météo enragée pour l'éternité ? Et puis Abigail lui avoue cette histoire d’épouvantard. Un sentiment terrible de culpabilité s’empare de la jeune femme, une douloureuse culpabilité qu’elle s’efforce de repousser ou plutôt d’enfouir au plus profond d’elle-même. Que son inconscient se débrouille avec. De l’index, elle vient relever le menton d’Abigail, la cascade de cheveux blond s’ouvrant comme un rideau lorsque leurs yeux reviennent au même niveau.

Ecoute, à l’époque, je suis partie oui, je l’admets. Mais aujourd’hui je suis là. Si j’ai commis des erreurs par le passé…

Elle avale difficilement sa salive, cherchant désespérément les bons mots et rabaisse son bras le long de son flanc droit. Que c'est dur d'avouer ses fautes. Des fautes jusqu'ici inavouées.

… rien n’est linéaire, tout n’est que changement, et moi aussi, j’ai changé. Nous sommes amies, professeures à Poudlard, alliées à l’OP, me crois-tu vraiment capable de débarquer chez toi en prétextant t’aider pour changer d’avis dans deux jours ? J’en commet des frasques plus rocambolesques les unes que les autres. Mais pas à ce point-là. Je suis une grande enfant mais je ne suis pas apathique.  
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Ven 4 Juin - 14:15
Les paroles de Harper, ses métaphores, m'infligèrent un vertige. Afin d'éviter de tomber à terre comme une poupée de chiffon, je m'appuyais contre le mur le plus proche sans lâcher le petit paquet que j'avais entre les mains depuis le début. Comment pouvais-je ne pas avoir le vertige alors que la jeune femme se qualifiait de compagnon de route, de baudrier, de filet. Qu'elle m'assurait vouloir veiller à me rattraper si je tombais. Comment ces perspectives d'avenir pouvaient ne pas m'effrayer alors que Harper avait laissé en moi un cratère si grand lors de notre toute première rupture ? Certes ça avait été il y a des années, certes je vivais sans doute un peu dans le passé, comme avec Kyle, mais il m'était difficile de surmonter les traumatismes les plus profonds de ma vie (pour qui est-ce facile ?). J'avais peur. Indéniablement, je ne pouvais m'empêcher de craindre que la sorcière lâche ma main, comme elle l'avait déjà fait. Cela dit, bien que je sois restée méfiante, depuis nos retrouvailles à l'université, Harper n'avait guère fait de faux pas. Nous étions toujours restées en contact et nous avons toujours entretenu une excellente relation amicale. Là où je me questionnais à présent, c'était s'il était possible de faire mieux ? De faire plus ? Que nous soyons davantage amies… ou peut-être que l'étincelle de la passion peut se raviver ?
Non Abigaïl, tu rêves, ça, c'est ton désire le plus profond, parce que Harper est la femme de ta vie. Mais regarde-la, si belle et omniprésente, et moi, si fade, si triste, si dénuée d'intérêt sans ma magie et mes talents. Distraite, je jetais un œil vers mon piano juste derrière nous. Mes talents ? Non, sans la magie j'en avais encore plein. Je n'avais pas besoin de magie pour jouer de la musique ou chanter, non plus pour entretenir mon potager et écrire mes observations de dragonologiste. Revenant sur mon paquet, je hochais sensiblement la tête.

- D'accord, essayons. Puis, sans relever la tête, car observer la jeune femme m'était devenu temporairement trop difficile, je sautillais d'un pied à l'autre tout en souriant, cachant maladroitement mon amusement. Tu la brancheras comme tu le voudras ta télévision, ça ne me dérange pas, et… Je lui jetais un coup d'œil rapide, sourire aux lèvres. Je me réjouis de voir ces dessins animés, mais tu sais, "La Belle et la Bête" n'a pas d'égal.

Oui, j'avais peut-être grandi dans une famille de sorciers et entourée de magie, mais de par certains de mes cousins éloignés ou d'autres membres du clan MacFusty, je savais aussi ce que c'était que de vivre sans magie. Alors, des dessins animés et des films, j'en avais vu beaucoup, et je continuais de prendre plaisir à en voir quand je le pouvais, surtout via mon téléphone portable lors de longue soirée de solitude et de flemme professionnelle. Cependant, j'avais bien saisi le ton de caprice de la jeune femme quant à sa magie. J'inspirais comme pour me donner du courage avant de préciser ma pensée.

- Faisons un compromis. Tu n'utiliseras ta magie que si on… si on est trop connes pour ne pas réussir à faire sans. En cas de dernière nécessité.

Je venais délibérément de nous traiter de connes, oui, mais Harper avait l'habitude que je puisse utiliser un certain jargon lorsque j'étais en colère, ivre ou enfin à l'aise face à mon interlocuteur. Je n'étais pas ivre, je n'étais plus vraiment en colère, et j'étais à l'aise. Que de cases cochées pour mon amie.
J'eus un petit frisson en sentant son doigt venir me toucher la peau, faisant exploser dans ma tête une multitude de souvenirs aux couleurs vermeilles. Obligée alors de cligner plusieurs fois des paupières, je plongeais mon regard brun foncé dans le sien, sensiblement plus clair. Comme suspendue au bout de son index, j'attendais mon jugement dernier, la gorge serrée par l'émotion et le cœur battant la chamade à tout rompre. Ses paroles me touchèrent directement, à tel point que j'en venais à me mordre la lèvre inférieure avant de rétorquer maladroitement.

- Oui… je veux dire, non… je… Fermant les paupières pour essayer de calmer le flot de mots qui me noyait, je m'interrompais un instant. Je ne sais plus quoi penser Harper, depuis tout ce temps. J'ai juste envie que tout aille bien entre nous, que ce soit comme… Ma voix s'étrangla, mais je réussissais à finir ma phrase cette fois-ci. Comme avant.

Comme avant quand ? Comme avant lors de nos nombreuses entrevues intimes durant nos études universitaires ? Ou peut-être comme avant lorsque nous étions deux jeunes enfants complices et perdues dans un amour bien trop débordant pour nos deux cœurs réunis. Je ne savais plus ce que je voulais, ce que je désirais, ni si j'étais certaine de faire les bons choix. Dans le fond, peut-être que Harper avait changé elle aussi. Même si je ne l'avais pas remarqué jusqu'ici, peut-être qu’elle aussi avait pu sensiblement mûrir de ses expériences passées. Peut-être qu'effectivement elle essayait de moins fuir les problèmes, de faire davantage face, d'être d'autant plus droite et juste qu'elle ne l'était déjà. Peut-être avait-elle un peu plus de plombs dans la tête. Peut-être que sa visite de plusieurs jours pourrait nous être bénéfique, qui sait ?
Soudaine, ce fut comme si quelque chose en moi venait de se déconnecter en moi. Un lâcher-prise qui fut salutaire et qui affaissa mes épaules de soulagement.
Bredouillant un peu, sautillant toujours nerveusement sur place, j'indiquais un gros paquet, long et plat, de l'index.

- C'est ça ta télévision ? On la déballe ? Tu voudrais la mettre où ? Et ça, c'est quoi ?

Je lui désignais le petit colis que j'avais entre les doigts depuis tout à l'heure, tête relevée, larmes séchées, sourire aux lèvres. Quelqu'un aurait pu rentrer à ce moment, jamais il n'aurait pu deviner que je sortais d'une crise de panique et de larmes un instant plus tôt. J'avais fait tomber le masque, mais je savais aussi très bien le remettre.
Si Harper devait séjourner ici, autant que ce soit agréable, et je faisais l'effort de la laisser choisir l'emplacement de la télévision, essayant, à ma manière, de lui faire la place qu'elle méritait, aussi bien dans ma maison que dans mon âme.
Moi aussi j'avais envie de m'amuser.
Comme avant.


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Mar 8 Juin - 22:13
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Comme au premier jourAbigail & Harper


Assumer ses paroles. Avec calme et sang froid ainsi qu’un sourire résolu, Harper observe Abigail subir le flot de ses états d’âmes, comme une enfant dans un corps d’adulte ou peut-être, comme un adulte fatigué d’accumuler les difficultés depuis l’enfance. Peut-être bien. Loin de se douter de l’ampleur de ses difficultés, la jeune femme se réjouie de l’acceptation d’Abigail, ravie de pouvoir mettre son plan à exécution : opération AEUM (Abigail est une moldue).

Son sourire s’élargie. L’amas de paquet jonchant le sol est bousculé, Harper dégage un gros paquet rond et lourd empaqueté dans son papier Craft. Il s’agit d’une ancienne télévision, un modèle que les moins de vingt ans (et plus) ne peuvent pas connaître. Pour le transport, Harper l’a protégé avec du papier bulle grossièrement scotché. Prêtant une oreille à Abigail, Harper entreprend de le déballer, puis cherche d’un œil avisé un endroit où la poser. Elle prend une posture militaire pour répondre à son amie :

Baguette en cas d’extrême nécessité, cheffe oui cheffe.

Elle dégage quelques plantes d’une console plus longue que large pour en disposer au-dessus la télévision en sécurité dans son papier bulle. D’une main, elle invite Abigail à terminer de la déballer, avant de s’emparer du petit paquet désigner par Abigail.

C’est un cadeau spécial… Elle le dépose sur le buffet. Celui-ci, je préfère que tu l’ouvres plus tard. C’est un cadeau, répète-t-elle, un brin d’incertitude dans la voix.

Serait-ce un signe de manque de confiance que Harper venait de lancer ? Un manque de confiance en elle, le doute d’avoir mal agit. Pour une fois. Oh mal agir, elle le faisait souvent. Mais rarement elle doutait au préalable de la maladresse de son geste. Il réside un sentiment très paradoxal en elle. Celui d’avoir une certitude qu’un doute vient toujours perturber.

Comme avant. Evidemment, ces mots résonnent dans son esprit depuis qu’Abigail les a prononcés. Comme à son habitude, de prime abord, Harper les ignore. Elle les garde un peu en mémoire, essaie de repousser les sentiments dont les mots sont capables de lui faire ressentir. Elle se part du sarcasme, se protège derrière le rire, créé un joli méli-mélo de maladresse additionné d’indélicatesse :

Mais tout est comme avant. Tu es toujours Le Chien et je suis toujours la Harpe. Seulement, l’image et le son n’avancent plus ensemble. Elle se garde bien de le préciser. Elle se garde bien de rajouter qu’elle aimerait que les choses soient autrement. On ne peut pas effacer le passé, gommer ses erreurs, réécrire l'histoire. Nous nous sommes éloignés mais la vie nous a toujours rapprochées. Notre orchestre ne fonctionne qu'avec tous ses éléments.

Dans un coin, elle rassemble tous les paquets de forme rectangulaires voire carrée : ce sont les jeux de sociétés. Prêt du canapé, elle en jete d'autre, plus gros, plus moelleux : ses propres bagages. Surr le buffet, elle dépose un présent de la part de ses grands parents : une orchidée, bien figée, bien moldue, dans un jolie pot en forme de nid d'abeille aux couleurs moutarde, maronnée et ocre. La fleur étouffera bientôt sous l'épaisseur du Craft. Gentille, délicate Harper. Elle voulait simplement la protéger de la pluie.

Et ça, c'est un cadeau de mes grands-parents, annonce Harper, souhaitant rapidement changer de sujet.

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Mer 9 Juin - 16:00
L'entrain de la jeune femme me fit légèrement sourire, tout comme sa spontanéité. Après tout, pourquoi pas ? à l'époque, j'avais tant désiré avoir cette tempête dans ma vie, que lorsque je l'avais perdue, j'avais tout fait pour m'en protéger, quand bien même je mourrais d'envie de la posséder. Aujourd'hui, Harper était chez moi, elle avait décidé de s'imposer avec moi (pour une fois), et ne m'avait guère laissé le choix. Je savais mes résistances faibles, et elles avaient cédés bien rapidement. Mais maintenant que nous étions en train de mettre de l'ordre dans tout ce qu'elle avait amené, je sentais comme un vent de changement. J'étais contente qu'elle soit là, j'étais contente qu'elle puisse me tenir compagnie pendant quelques jours, j'étais contente… de ne plus être seule, tout simplement. Alors oui, pourquoi pas ? Pourquoi ne pas essayer de me laisser porter par les événements et de simplement accepter la situation comme elle l'était ? Repoussant le picotement désagréable que je ressentais en m'imaginant le jour où elle repartait, je la laissais me prendre le petit paquet des mains et le déposer un peu plus loin sur mon buffet. Intriguée, je levais un sourcil avant de m'assoir à nouveau sur le canapé et attraper ma tasse de thé pour y tremper mes lèvres dans le liquide chaud et orange qui vint teindre une nouvelle fois mes lèvres.

- Et plus tard, c'est quand ?

J'adorais les surprises et j'étais toujours impatiente de les découvrir lorsque je les avais sous le nez comme à présent. Noël était perçu par moi aujourd'hui comme je le voyais lorsque j'avais six ans, j'adorais les cadeaux et les fêtes de famille, j'adorais faire plaisir aux autres ainsi que les échanges merveilleux qu'on y vivait. Toutefois, aujourd'hui, ce n'était pas Noël, c'était juste Harper qui faisait la Harper et qui venait fouler ma vie de ses élégants sabots tout en me réservant des événements dont j'ignorais si j'avais vraiment envie de les vivre ou non.
Je réfléchissais à ce qu'elle me disait nous concernant, et je ne pouvais m'empêcher de froncer légèrement les sourcils sous la réflexion.

- Je ne suis pas d'accord. Rien n'est comme avant. Notre amitié est fragilisée, tu l'as sous-entendu toi-même tout à l'heure en prétendant que je n'acceptais pas ton amitié. Alors certes, nous sommes les personnes que nous sommes et la vie nous a toujours plus ou moins rapprochées, c'est vrai… mais moi qui suis musicienne, je peux te dire d'expérience que la partition a changée.

Me pliant un peu sur moi-même, le dos vouté, je me perdais dans mes pensées, le regard lointain. Je ne voulais pas de ça. Je ne voulais pas que notre amitié déraille sans arrêt, je ne voulais pas que nous nous drapions de non-dits (c'était pourtant ce que nous faisions depuis tant d'années), je ne voulais plus de ce poids que je ressentais dans la poitrine depuis si longtemps. Pourtant aujourd'hui, l'attitude de Harper me montrait que je n'avais guère le choix que de subir, que c'était comme ça, et pas autrement. Cela dit, je prenais conscience de l'ampleur de mes désirs et de mes pensées. Soit je perçais l'abcès et que je discutais à cœur ouvert, ce que j'aurais fait d'ordinaire, soit je continuais à renfermer mes sentiments dans une boite, comme je l'avais fait depuis notre adolescence. Je savais pertinemment que Harper allait se contenter d'un petit pas de danse, à l'instar d'une pirouette de valse, et écarter le sujet comme s'il s'agissait de simples formalités. Cette attitude était aussi déplaisante qu'agaçante, bien qu'elle ait aussi de bons côtés.
Persuadée que mon combat était perdu d'avance, je me contentais de soupirer en fermant les yeux, ma tasse de thé glissant jusque sur mes genoux.

- Laisse tomber…

Je baissais les bras. Après toutes ces années, après mon été à pleurer la mort de mon frère seule, à subir la technologie du Blood Circle, à subir ma maladie qui me guettais à chaque instant, en ce moment précis, je n'avais plus du tout envie de me battre. Pas même pour Harper, puisqu'elle ne voulait rien entendre ni rien comprendre. La jeune femme était la plaie de ma vie, celle qui ne cicatrisera jamais, et après une quinzaine d'années à tout ressasser, à retrouver espoir après avoir discuté avec Luca, finalement, je me contenterais tout simplement et bonnement d'abandonner.
Rouvrant les paupières, j'apercevais alors l'orchidée que ma collègue avait emballée elle aussi. Si je ne pouvais pas m'occuper de moi, je pouvais au moins garder un ersatz de volonté pour mes animaux et les fleurs qui vivaient ici. Alors, je retrouvais la petite force de me relever pour aller récupérer le pot et sa fleur, pour immédiatement l'emmener au lavabo de la cuisine afin de lui donner à boire.

- C'est gentil de leur part… il ne faudra pas que j'oublie de les remercier. Comment vont-ils ?

Soigneusement, j'évitais le sujet de Jean car, encore une fois, je devinais comment allait réagir mon invitée. Me tournant dans sa direction avec un léger sourire aux lèvres, me parant à nouveau de mon masque, je la regardais en train d'essayer de fixer la télévision.

- Je te propose un truc ! Chacune notre tour on dit un mot au hasard, et l'autre doit donner une vraie anecdote qui lui est arrivée en rapport avec ce mot. Par exemple… Tu me dis Botrucs, et je vais te raconter nos retrouvailles à l'université. Ça te dit ?
Je n'attendais pas sa réponse. Bon, je commence. Mmmh… je scrutais la petite boite mystérieuse. Cadeau !

Quitte à avoir une surprise, autant essayer de deviner ce qu'il contenait. Aussi, cette astuce sous forme de jeu que je venais de lui proposer nous permettra, peut-être, de nous rapprocher, nous retrouver, et ranimer notre complicité d'antan.
Tout le moins, j'avais la naïveté de le croire.


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Comme au premier jourAbigail & Harper


Absolument tout cet attirail avait été rassemblé à la hâte ce matin. Absolument tout, sauf ce petit paquet qu’Abigail lorgne sur le buffet, un cadeau précieusement emballé, spécialement choisi, un objet posé en travers de son chemin dans le plus parfait des hasards. Longtemps avait-elle hésité à l’emmener, car voilà plusieurs années que l’objet était en sa possession. Ce matin, au moment de l’embarquer avec les autres, Harper fut frappé de doutes, sa cervelle tiraillée de milles et unes questions : est-il sage de lui offrir ? Est-il sage de ne pas lui offrir ? Incapable de démêler ses tourments intérieurs, Harper s’était résolu d’abandonner l’objet dans son tiroir. Puis, au dernier moment avant de partir, elle s’en saisit, se précipita pour l’empaqueter de papier Craft et le déposer dans le coffre du Taxi avec les autres. Le chauffeur du taxi fut pour le moins surpris qu’elle transporte ces affaires en vrac, correctement emmailloté, mais sans sacs. Je suis le Père Noël, lui dit Harper pour répondre à sa mine étonnée. Et l’homme la pris pour une folle et appuya sur le champignon pour vite la conduire à destination et s’en débarrasser rapidement (d’autant plus qu’elle avait insisté pour écouter Britney Spears). Maintenant que le paquet trône sur le buffet d’Abigail, à nouveau le doute balaie son assurance.

Quand se sera le bon moment.

Assurément. N’en déplaise au regard enfantin d’Abigail un matin de Noël : plus tard sera le bon moment. Son amie sirote le thé fumant orangé. Harper repense au petit paquet, à ce petit objet si représentatif du passé. Cette chose reflétant leur adolescence, ces longues années durant lesquelles, elles ne pouvaient compter que sur elles-mêmes. Un objet pour immortaliser leur vie d’avant. Mais… rien n’est comme avant ? Un objet pour marquer leur amitié ineffaçable, comme une existence indélébile sur la ligne capricieuse du destin. Mais… leur amitié est fragilisée ? Un objet qu’elle lui offrait pour lui rappeler leur lien indéfectible, ce lien qu’elle… n’accepte plus ? Un objet agissant comme un centre de gravité. Telles deux planètes, si elles s’éloignent elles finiront toujours par se recroiser pour peut-être finir leur route ens… fin de la musique.  Pif, paf, pouf, bim, bam, boom : dans ta tête. Harper déglutit avec difficulté. Pense-t-elle seulement ce qu’elle affirme ? Ce cadeau caché derrière son papier ne représente-t-il réellement plus rien ? C’était-elle voilée la face ce jour-là, devant l’étalage du marchand, où son visage s’était illuminé, ravie que le destin la rappelle à l’ordre, enchantée que la vie lui jette une pierre en pleine figure pour la forcer à regarder du bon côté ? Harper s’était-elle leurrée ? Quoi qu’il en soit, Harper a bien fait de remettre son déballage à plus tard. Plus tard, on verra. On verra si c’est le bon moment. On verra s’il n’est pas trop tard. Un tonner de déception semble s’abattre sur ses épaules. Mais Harper Auburn n’abandonne pas aussi facilement. C’est bien Harper Auburn qui a couru, avec acharnement, derrière un rêve qui ne lui appartenait pas, sans s’essouffler, sans faillir, sans dévier de son ambition.  Allons dont. Il en faut plus pour décourager l’incorrigible Gryffondor. Cette fin de discours pourtant pertinente n’est que découragement à l’indécrottable parfum de pessimisme. Oui c’est bien cela. Du pessimisme. What else ? Harper Auburn ne se décourage jamais. Harper Auburn ouvre la bouche pour répliquer. Harper Auburn va sonner la nouvelle note, donner le ton, en avant la musique, faites entrer le Chien, que la harpe s’anime, laisse tomber.

Harper se laisse tomber dans le canapé pour se resservir du café. Trop d’émotions différentes d’un coup. C’est fatiguant. Comment fait Abi pour supporter ce genre de chose constamment ? Trop de questions, trop peu de réponses. Dans la concrétisation du monde, l’abstrait n’a pas sa place. Les réponses fantomatiques sont autant de leurres culbutant votre raison. Et si aujourd’hui Harper avait tort, elle n’est pas prête à l’accepter. Pas encore.

Ils vont bien, ils sont outrés que leurs semblables soient capables de choses pareilles. Ils sont tellement innocents. Parfois je me demande s’ils n’ont pas adopté ma mère.

Elle pouffe de rire et verse cinq cuillérées de sucre dans sa tasse qu’elle touille négligemment en renversant quelques gouttes.

J’adore les jeux ! S’exclame-t-elle comme une enfant. Et son excitation provoque une nouvelle vague de café par-dessus sa tasse. Heureusement que celle-ci est déposée sur sa soucoupe, épargnant la table du liquide brun brûlant.

Aillant saisie le principe, Harper se concentre, tire la langue, réfléchie.

C’est nul ! J’en ai plein.

Cadeau. Il y a ces jours de Noël riche des cadeaux de Grand-Père Vicky et Grand-Mère Elaine, couvrant de présents leurs deux petites filles, pendant que leur fille se prélassait sur le canapé en pianotant sur l’ordinateur pour consulter les sites de rencontres. Il y a ces premiers anniversaires à Poudlard en compagnie de ses amis. Abigail. Ces premiers Noëls de collégienne où elle n’était plus obligée de rentrer à la maison, accompagnant Abigail sur l’île des Hébrides pour passer ses vacances chez la famille Mcfusty. Ce premier Noël où Jean lui appris qu'elle avait retrouvé son père biologique. Non, décidément non, il faut qu'elle pense à autre chose. Sa soeur se débrouille toujours pour tout gâcher, même quand il s'agit de se remémorer de bons souvenirs, faut qu'elle débarque pour tout salir. Pas Noël. L'histoire de ses anniversaires est semblable à celle de ses Noël. Pas l'anniversaire. Pas l'anniversaire des autres non plus parce que premièrement elle ne se rappelle d'aucune date d'anniversaire, deuxièmement elle ne fait jamais de cadeau (à cause du premièrement). Sauf à Abigail. Abigail. Cadeau. C'est un piège ? Elle l'a fait exprès. Non, décidément non, son précédent débat intérieur à conclu au bon moment. Pourquoi faut qu'elle remette ça sur le tapis ?

La jambe de Harper commence à s'animer, son genou remuant incessament. Panique à bord, sa pauvre cervelle ne parvient pas à dégoter un souvenir en rapport au mot cadeau autre que celui rattaché à ce petit objet posé là, sur le buffet. Au hasard mon cul putain ! Harper se mord la lèvre qu'elle tapote de l'index. Elle regarde Abigail, puis le plafond, puis la fenêtre innondée de pluie. Elle cherche, bordel elle cherche quelque chose pouvant la mettre sur une piste, sur une autre piste... Putain mais elle l'a fait exprès ! Impossible de céder, on aura pas Harper Auburn comme ça. Diantre ! Par Merlin et tous les abrutis de sorciers qui portaient une barbe. Barbe. Barbe à papa. Comme à la fête foraine où elle a degoté cet objet. Putain !

Il y a deux ans je me promenais dans une fête forraine pleine de moldus. J'ai toujours adoré les fêtes forraines. Ma mère nous forçait à en traverser une pour nous emmener chez nos grands-parents. Cet endroit de lumières qui sentait bon le sucre mettait plein d'étoiles dans mes yeux. Elle n'a jamais voulu s'y arrêter. Moi je n'osais pas mais Jean réclamait sans cesse qu'elle lui paie un tour de manège. Moi je savais qu'elle n'avait pas les moyens. Elle refusait sans même lui jeter un regard.

Et Jean avait toujours eut beaucoup plus de courage et d'audace qu'elle.

Un jour Grand-Père Vicky m'a demandé ce que je voulais pour mon dixième anniversaire. C'était un an tout pile avant ma rentrée à Poudlard. J'ai répondu que je voulais qu'il m'emmène à la fête foraine, mais que Grand-Mère Elaine devait rester à la maison pour garder Jean car je ne voulais pas qu'elle vienne. Jean m'a mis un coup de pied et depuis ce jour, quand maman leur demandait de nous garder parce que soit disant elle se sentait fièvreuse, on allait y faire un tour tous les samedi après-midi. Jean était obligée de venir. Je vagabondais des heures entre les attractions. J'adorai les centres de tirs. Pour en revenir à mon annecdote, je me suis arrêtée à un stand de tir il y a deux ans, dans une fête forraine de Londres. Le forrain m'a interpelé, dragué ou je ne sais trop quoi. Il m'a offert deux tirs gratuit. Je me suis contentée d'un seul : bingo ! J'ai explosé les trois ballons d'un coup. Deux ce sont juxtaposés et le troisième à éclaté sous les éclats des autres. Le forrain m'a laissé choisir ce que je voulais parmis trois objets sur son étalage. Moi choix à vite été fait. Je n'en croyais pas mes yeux. Le destin. C'était incroyable. C'était le moins onéreux des trois objets et apparemment l'un des jouets qu'aucun enfant ne voulait. Et le voilà maintenant posé sur ton buffet. Et non, ce n'est pas l'heure de le déballer.

Pas après tout ce qu'il vient de se passer. Harper regarde tout autour d'elle, cherchant quelque chose qui attirerait son regard, quelque chose d'intéressant pour lui donner un mot, celui qui la mettrait dans la difficulté, comme elle venait de le faire. Des tableaux. Des plantes. Bonnie. Créature, trop facile. Harper se souvient des courts de Soins aux Créatures Magiques, en commun avec les Pouffsoufles. Harper était toujours indisciplinée, particulièrement en milieu extérieur. Cela rendait folle de rage Abigail, mais il faut bien avouer que plusieurs fois, elles ont bien rigolés. Toutes la classe à bien rigolé. Comme cette fois pendant l'étude des...

Sombrales.
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Je haussais les yeux au plafond aux réponses évasives de Harper, un sourire aux lèvres. Elle avait toujours été ainsi, à esquiver les choses ou à préférer me faire languir, elle jouait sans cesse avec mes nerfs, et des fois je réussissais à le tolérer, des fois je m'énervais tant je trouvais ça insupportable. Pour le coup, je ne voyais pas pourquoi je me mettrais en colère, je voyais bien que l'attention était innocente et mignonne, alors je laissais sa surprise être entière en la respectant. Je savais bien que je serais aussi du genre à m'amuser de la sorte avec elle, surtout sachant si le cadeau en question allait de toute façon lui plaire.
J'avais à cœur que son séjour à Soay se passe bien, alors je prenais sur moi et me mettais à marcher sur des œufs. Attention à ce que je dis, attention à ce que je fais, il ne fallait surtout pas faire de vagues ni d'émules. Qu'elle passe quelques jours ici, puis qu'elle reparte comme si de rien n'était, comme si rien ne s'était passé, pour qu'ensuite le cours de la vie reprenne, tranquillement, sans surprise, décevant et chiant… Parce que je savais par avance que ma vie sans elle était pourrie et je craignais profondément que son séjour chez moi n'aggrave les choses. Regard posé sur les carreaux de ma fenêtre pour contempler la pluie à l'extérieur, je soupirais un peu alors que la jeune femme me parlait de ses grands-parents.

- Dans un sens… Heureusement qu'il y a des gens comme eux qui sont outrés de ce qui arrive… Je veux dire, des moldus. Pour que le monde sorcier soit un tant soit peu accepté par les moldus. Des fois, les agissements du Blood Circle me donnent le sentiment que tous les moldus sont contre nous, mais heureusement il y a des gens comme tes grands-parents, ou comme certains membres de ma famille qui sont là pour me rappeler le contraire.

D'autant plus que j'étais très esseulée, alors malgré moi et tout le travail que j'avais à faire, je réussissais toujours à remuer les événements dans ma tête, surtout en ce moment. Dénuée de ma magie, handicapée dans mon quotidien, je savais que je ressassais énormément de choses, surtout à me perdre en élucubration, supposant des agissements des gens qui ne viendraient probablement jamais. Avec des "et si" on pouvait refaire le monde, seulement, moi qui étais sensible, cela influençait forcément ma façon de penser ainsi que mes sentiments. Des fois je réussissais à me faire peur toute seule et à m'inquiéter de ce qui n'existait pas encore.
Je voulais beaucoup revoir ses grands-parents puisque je les appréciais énormément, mais je taisais cette envie, tout comme je me retenais de questionner mon amie vis-à-vis de sa sœur et de sa mère. Je savais que c'était des sujets tabous, et je restais dans cette dynamique de vouloir la voir heureuse chez moi, et de ne lui poser aucun problème.
Voilà pourquoi je lui proposais plutôt un jeu, afin de détourner l'attention, et j'étais fort aise de constater que cela fonctionnait à merveille. Feignant de voir qu'elle secouait trop son café et qu'elle était en train de tout salir, je gardais obstinément mon regard posé sur elle afin de ne pas faire de scène, elle avait dit qu'elle nettoierait, j'attendais de voir. Amusée, je pouffais un peu en la voyant réfléchir en tirant la langue, puis, d'un silence religieux, j'écoutais son histoire.
J'étais touchée qu'elle choisisse cet événement en particulier, puisque c'était une partie de sa vie que je ne connaissais pas bien et qu'elle s'obstinait à garder secrète. Sans le moindre mal, je ressentais les émotions qu'elle essayait de me transmettre, et j'en arrivais presque à sentir les odeurs des fameuses fêtes foraines. Moi, je les évitais soigneusement, car c'était des lieux bien trop fréquentés, et je détestais la foule. Cela dit, y aller avec Harper m'amuserait sans le moindre doute.
Ne pouvant m'empêcher de froncer les sourcils lorsqu'elle m'évoqua le forain qui voulut le draguer, je posais ensuite mon regard foncé sur le petit paquet poser un peu plus loin, à nouveau amusée par la conclusion de la sorcière. Cette conclusion qui me faisait attendre, encore. Baissant mes yeux sur ma tasse de thé, je gardais le sourire avant de lui répondre.

- Je crois… que c'est une jolie histoire, merci de me l'avoir raconté. Peut-être qu'un jour je devrais essayer de me rendre dans les fêtes foraines. Je n'y suis allée que quand j'étais petite, je ne m'en souviens pas très bien, je sais juste que la foule m'oppresse beaucoup, et je me fais bousculer par tout le monde, ce n'est pas très agréable. J'inspirais profondément en levant le menton théâtralement avant d'observer mon amie avec de la malice dans les prunelles. Je saurais attendre que tu dormes pour l'ouvrir dans ton sommeil, ne t'inquiète pas.

À mon tour, je lui tirais la langue, avant d'attendre le mot, pour raconter à mon tour une anecdote de vie. Mais voilà, parmi les milliers de mots qui existaient dans notre langue, Harper choisit celui-ci. Il tomba comme une guillotine pour me trancher la tête, et d'un coup, mon corps sembla fondre. Mes épaules s'affaissèrent, mon visage perdit immédiatement son sourire et mes yeux devinrent à nouveau fuyants. Bien sûr, je me remémorais plein de choses avec les Sombrals, mais il y avait un moment qui était plus brillant (et paradoxalement plus sombre) que tous les autres. Celui qui prenait le pas et qui m'obligeait à me rappeler. Lèvres légèrement pincées, j'inspirais une nouvelle fois avant de commencer mon histoire, apparemment difficile à raconter.

- J'étais en intervention pour libérer des créatures d'un trafic dans une réserve illégale. Je me battais avec divers sorciers, nous étions tous animés par la même envie de libérer ces pauvres animaux. Seulement, nos informations n'étaient pas complètes, et nous étions tombés sur des créatures bien plus dangereuses que prévu. On n'était pas en sous-effectifs, mais nous aurions pu mieux nous préparer. Je déglutissais nerveusement. Il y avait une femelle Verte Galloise dans un état déplorable, et bien que faible, elle était extrêmement dangereuse, justement parce qu'elle était très mal au point… Puisque les autres sorciers étaient déjà occupés, nous nous sommes avancés à deux, histoire de la retenir le temps que les renforts arrivent… sauf que nous l'avons sous-estimé et… l'autre sorcier, mon partenaire de vie, mon… fut… brûlé vif sous mes yeux.

D'un geste négligé, je chassais une larme de mon index et de mon majeur avant de continuer mon récit.

- Les autres sorciers arrivèrent pour m'aider, mais il était trop tard. Je ne sais pas combien de temps j'ai pleuré au-dessus de son corps… Je ne sais pas combien de temps il m'a observé… Mais quand j'ai relevé les yeux, je l'ai vu… Un jeune poulain Sombral qui me regardait, lui aussi victime du trafic et très amaigri. C'est depuis ce jour que je peux voir les Sombrals et… C'est depuis ce jour que je suis accompagnée par Sleipnir. Il ne m'a plus jamais quitté, j'ai pris soin de lui, je l'ai éduqué, et maintenant j'essaie de lui apprendre à me supporter sur son dos. Je penchais un peu la tête sur le côté. Malgré les circonstances de notre rencontre, nous avons une merveilleuse relation lui et moi.

Portant ma tasse de thé à mes lèvres, je noyais mon chagrin en prenant de grosses gorgées. Durant l'été j'avais pleuré toutes les larmes de mon corps en me remémorant cet instant traumatisant de ma vie, j'étais presque surprise du calme et de la maitrise de mes émotions avec lesquelles j'avais raconté, pour la première fois, l'accident à Harper. Après tout, elle avait voulu que je lui parle un peu plus de Kyle, la voilà servie.
Me forçant à inspirer profondément pour garder mon calme, je souriais maladroitement avant de me relever et de faire face au canapé. Là, je me baissais pour attraper deux lanières.

- Lève les jambes, je vais le déplier en canapé-lit, comme ça on peut se cocooner et regarder tes films. Ça te dit ?

Maintenant que j'avais raconté mon récit, je ressentais le besoin de me ressourcer, j'avais envie de m'envelopper sous une couverture avec un thé et une peluche dans mes bras. Me changer les idées en regardant des dessins animés me conviendra tout aussi bien. Seulement, je doutais que Harper veuille bien me servir de peluche que je pouvais serrer fort contre moi pour évacuer mon chagrin dans un câlin consolateur.



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Comme au premier jourAbigail & Harper


Des gens comme eux. Heureusement qu’il en existe pour combler le vide sidéral des autres, les partisans du Blood Circle. Et heureusement qu’il y a des gens comme nous. Nous les sorciers capable de combler le vide tout aussi sidéral des autres, ces sorciers creusant un gouffre entre la magie et la non-magie. D’un côté comme de l’autre, tous les mêmes. La révélation de la communauté sorcière au reste du monde traîne une remarquable avancée de l’humanité au goût d’amertume. Alliés, combattant tous mains dans la main, contre un seul et unique ennemi : le blood circle. Mettre ses désaccords de côté. Et quels désaccords ! Combattre la cruauté, la tyrannie, l’ignominie moldus aux côtés de la cruauté, la tyrannie, l’ignominie sorcières. Harper n’avait jamais pu s’y faire. S’il est hors de question d’abandonner ses semblables face aux dangers, c’est en serrant les dents qu’elle se bat aux côtés de mangemorts. L’hôpital qui se fou de la charité. Cette alliance, elle n’y croira jamais. Mais l’avis de Harper Auburn n’est qu’une onde perdue qui ne se répercutera jamais. A ses yeux, il n’existe que deux possibilités : le bien et le mal. S’allier à l’obscurité…


Harper ne perd pas contenance devant l’air théâtrale d’Abigail la taquinant au sujet du cadeau qu’elle pourrait déballer durant son sommeil. Un large sourire fend le visage rayonnant de Harper. Elle va chercher l’écrin dans lequel est rangé sa baguette, se saisit de son bien et la pointe vers le paquet.

Clauderis Maxima.

Du bout des doigts elle range la baguette dans son écrin qu’elle referme précieusement avant de lancer :

Bonne chance.

Harper affiche un sourire satisfait. Elle s’installe confortablement pour jouer au jeu suggéré par Abigail. Assurément, durant leur convalescence sans magie, il faudra qu’elle emmène Abigail dans cette fête foraine qu’elle affectionne tant. Elle ne lui en dit rien, préférant lui faire la surprise. Elle connaît les soirs les moins peuplés, parfait pour rendre à l’aise son amie. Si son siouvenir s’avère joyeux, celui d’Abigail l’est beaucoup moins. Jamais Abigail ne lui avait donné les détails de la mort de son frère. Jamais. Si bien que, sans préciser le nom de son partenaire de vie, les détails étant pourtant révélateur, Harper peine à croire le degré avec lequel Abigail se livre. Elle ne dit rien, bouche bée, sourcils élevés (de surprise ? De peine ? D’horreur ?), se contentant d’écoutant son récit en silence. Pour une fois, en silence. Que faire ? La prendre dans ses bras pour crier à l’horreur, qu’elle s’est toujours sentie solidaire avec elle face à ce drame ? Qu’elle voudrait pouvoir porter, ne serait-ce qu’un millième de son chagrin pour en délester son cœur souffrant ? Que faire ? Exprimer des paroles rassurantes au risque d’être maladroite ? Peinant à trouver un compromis dans son flot d’idée, Harper préfère rester silencieuse. Pour une fois. Elle approuve l’idée d’Abigail de déployer le canapé pour les rendre plus confortable et regarder un film. Mais ce petit jeu lui a plu. Alors, quand son amie vient prendre place à ses côtés, Harper lance en la regardant droit dans les yeux :

Whisky.

Parfois, Harper oublie qu’Abigail n’ai pas comme elle, à faire la fête plus que de nécessaire et que non, tout le monde n’a pas une anecdote par espèce d’alcool à raconter. Et elle attend le récit de son amie, un air béat et le sourire satisfait par son mot.
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Mer 16 Juin - 23:00
Je riais en voyant mon amie sceller davantage le petit paquet, comme si elle craignait vraiment que j'abuse de sa confiance en l'ouvrant dans son dos. Car oui même si l'idée avait été tentante, j'étais aussi respectueuse et jamais je n'aurai agis sans la consulter, surtout que ça semblait important pour elle. Je ne voulais pas la décevoir, au contraire, je voulais essayer de me faire bien voir par la jeune femme. Je voulais qu'elle voit que j'allais bien (tout le moins qu'elle le croit) pour que son séjour ne s'attarde pas. Non pas que je voulais la chasser, mais parce que je ne voulais pas lui prendre de son temps inutilement.
Arroseur arrosé, j'étais prise au piège dans mon propre jeu au mot de la jeune femme qui souleva de lourds souvenirs. Puisque je sortais de la pire période de ma vie, l'estival, c'était un peu plus facile pour moi d'en parler, et c'était après tout ce qu'elle avait réclamé, alors voilà, comme je l'avais toujours fait avec Harper, je jouais franc jeu. Son air ne me laissait aucun doute sur le fait qu'elle ne savait pas comment réagir, qu'elle mesurait à peine toute l'horreur et la douleur de ce que j'avais vécu. Mais je ne me confiais pas à elle pour pleurer sur son épaule et pour qu'elle me plaigne. Avec cette confidence, je lui prouvais que je tenais à elle, que je tenais à notre amitié, et puisque je ne cessais de fuir notre relation ces dernières semaines, je voulais lui prouver que je voulais faire des efforts pour la retrouver. Cela dit, je n'étais pas certaine que elle, elle veuille véritablement me retrouver, ou plutôt, j'ignorais comment elle voulait me retrouver.

Sortant mes plaid, je tirais le canapé pour me cocooner, m'enfonçant dans ce dernier en lâchant un bâillement. Là, je tendais une partie de ma couverture pour que Harper m'y rejoigne. C'est à ce moment qu'elle me donna un nouveau mot. Amusée, je ne pus m'empêcher de sourire, répondant presque instantanément, car un souvenir était plus éclatant que les autres, d'autant plus qu'il était assez frais.

- En Avril dernier, j'avais besoin de me changer les idées. Je suis allée dans un bar à Londres, et c'est là que j'ai fait connaissance avec un garçon. Il a été attiré par mon tatouage à la base Je montrais ce dernier en sortant mon bras gauche du plaid. On a parlé de tout et de rien, et surtout on l'a fait autour de plusieurs verres d'alcool, dont du Whisky pur feu. Je lui ai promis de lui faire goûter le Whisky pur feu des Hébrides, histoire de lui apprendre les véritables bonnes choses. Baissant les yeux, une lueur tendre traversa mon regard. On est devenu de bons amis, on a continué à se voir régulièrement, il m'apprend le français, il a fait ses études à Beauxbâtons, alors que pourtant il est italien, il s'appelle Luca Zabini tu vois. Je pouffais un peu de rire avant de lever le regard au plafond, un air aguicheur sur les lèvres. Lèvre que je venais à présent pincer, comme hésitante à dire quelque chose que je cachais jusque-là. On prend du bon temps, lui et moi. C'est amusant et plaisant.

D'une œillade sincère et pétillante de malice, je regardais Harper tout en me penchant en avant pour attraper ma tasse de thé et en boire une gorgée, cherchant un nouveau mot. Là, je me penchais vers le sac qui contenait les dessins animés que j'avais attiré à nous au préalable, en choisissant un au hasard, ou pas tout à fait (il y avait un lézard sur la couverture). Harper avait été l'une des rares avec qui j'avais partagé ma couche depuis la sortie de l'université. Il m'était bien arrivé d'essayer de temps à autre avec d'autres partenaires (homme ou femme) mais ça n'avait jamais donné suite. Avec Luca, c'était différent, notre relation était avant tout basée sur de l'amitié, et on se rendait service mutuellement tout en se faisant du bien. Il n'y avait pas de mal à ça… si ?

- Et toi alors ? Depuis l'université, tu as eu des aventures ? Et maintenant ?

Tant qu'à remuer le couteau dans la plaie, autant le faire bien !



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Sam 19 Juin - 15:36
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Comme au premier jourAbigail & Harper


Un garçon. Un garçon attiré par le tatouage enroulé autour de son bras. Un tatouage que ses œillets naturels l’ont empêché de remarquer lors de leurs retrouvailles. Et un garçon au premier regard l’a remarqué. Un garçon. Un garçon ? C’est mignon comme appellation. Pour désigner un vulgaire amant ne dit-on pas « homme » ? Pour désigner un amant mignon, qui n'est sans doute pas un simple amant, le mot « garçon » sied d’avantage. Un garçon. Un garçon qui boit du whisky ? Qui boit du whisky de nos jours si ce n’est les péteux ? On boit de la bière, on boit du rhum, on boit du vin. Du whisky sérieusement ? Harper déteste le whisky. Le whisky aide les gens à devenir ami. Le rhum aussi et la bière surtout ! Mais du whisky… du whisky ! « Le bon temps », ces mots résonnent dans sa tête comme s’il s’agissait d’une grotte profonde. Profondément creuse.

En apparence, Harper sourit, réagissant aux expressions d’Abigail qui rit en repensant aux bons souvenirs qu’elle lui raconte. Elle rit aussi. Elle calque ses réactions sur les siennes. Intérieurement, il n’existe pas de colère. Au vu du passé, réagir avec colère serait d’une répugnante ironie. Pourquoi réprimander la situation alors qu’à ce jour, si Abigail et Harper ne sont plus un couple, c’est bien par la faute de cette dernière. Par faute, elle entend volonté, bien évidement. N’est-ce pas ? A l’intérieur, sa grotte profonde est chargée d’un air lourd de désarroi.

Le bon temps est amusant et plaisant. Harper s’efforce de ne pas grincer des dents. Au hasard, Abigail se saisit du DVD de Denver le Dinosaure, un dessin-animé lui rappelant les douceurs de son enfance. L’esprit de Harper se ressaisit, ses émotions se stabilisent, chassant la culpabilité. Quand Abigail en vient à la question fatidique, Harper à comme un sursaut. Elle ne s’attendait pas à ce genre de question. Cela signifie-t-il que Abigail est définitivement passé à autre chose ? Toutes ces fois où elles s’étaient retrouver nues, l’une contre l’autre, le temps d’une nuit, Harper avait eu la sensation qu’il n’existent qu’elle deux, que Harper et Abigail restaient incassable, bien que leur relation n’allait pas au-delà d’une histoire de draps et d’oreillers. S'était-elle honteusement trompée ?

Pleins ! Répond Harper plus vivement qu'elle ne l'aurait voulu.

Le tac au tac est mauvais pour la santé. Elle se reprend rapidement :

Je veux dire, j’en ai eu, oui.

Harper se demande si ses aventures de beuveries comptent pour amant ? Les amants, est-ce qu’on est censé s’en souvenir ? Hors de question de lui raconter ses soirées alcoolisées qui n’ont rien de bien mignonne à côté de la jolie histoire qu’Abigail vient de lui raconter.

Négligemment, déroutée par la question et la situation, souhaitant vite changer de sujet, elle ouvre rapidement (brutalement) un deuxième sachet de café soluble qu’elle renverse dans le fond de sa tasse vide. Elle s’empare de la bouilloire pour remplir la tasse d’eau… froide. Depuis le temps, l’eau à refroidit. Harper porte une main dans la petite poche magique de son pantalon, gênée, et s’aperçoit que la poche magique est désormais une poche non-magique, conformément au challenge qu’elle s’est lancée en soutien à Abigail. Mal à l’aise, craignant un regard inquisiteur de la part d’Abigail, elle lui tend la bouilloire :

Il n’y a plus d’eau chaude.

Sacrée Harper. Toujours tout faire pour dédramatiser et détourner l’attention. Toujours ce mot pour rire qui ne fait pas rire du tout.

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Sam 19 Juin - 16:20
Les réactions photocopiées de Harper m'intriguèrent, elle qui était d'ordinaire si spontanée, pourquoi réagissait-elle ainsi ? Mon cœur s'emballa sous l'espoir que c'était parce qu'elle avait encore des sentiments pour moi, mais ma raison l'emporta en me rappelant que c'était elle qui avait mis fin à notre relation, et j'avais eu beau espérer toutes les nombreuses fois où nous nous étions retrouvées toutes les deux durant l'université, ça n'avait jamais rien donné. Alors pourquoi aujourd'hui ce serait différent, aujourd'hui alors que nous étions adultes et que de l'eau avait coulé sous les ponts ? J'avais pourtant tant rêvé de potentielles retrouvailles, oh oui, tant. À chaque fois que je voyais sa chevelure dans la foule des autres élèves. À chaque fois que nous avions un fou rire au détour d'un couloir. À chaque fois que nous nous regardions dans les yeux, en silence, après avoir fait l'amour. Mais voilà, jamais ça n'était arrivé. Il fallait dire aussi que jamais je n'avais clairement prononcé les mots, ils restaient obstinément coincés dans ma gorge, et même encore maintenant. C'était une boule si difficile à avaler que je me resservais d'une gorgée de mon thé, finissant ainsi ma tasse.
Alors, à sa réponse, je ne pus m'empêcher d'arrondir des yeux étonnés, et presque dégoutés. Plein. Plein… ça voulait dire quoi "plein" ? Plein genre un, ou plein genre un milliard ? Plein tous les soirs, ou plein juste de temps en temps ? Moi, ça avait été rare depuis l'université, car je me sentais tout bonnement incapable de partager ma couche avec quelqu'un d'autre que Harper (même si j'avais du mal à l'admettre). Luca était la seule exception. Alors plein ? Mon cœur se mit à battre douloureusement la chamade tandis que je gardais obstinément mon regard sur Harper, accroché à elle comme si je voulais m'assurer qu'elle mente, que non elle n'avait pas pu m'oublier à ce point, que non je ne devais pas être forcée de la partager avec plein d'autres gens.
Je serrais mâchoires et poings tandis que je me sentais légèrement fulminer. Encore une fois elle jouait avec mes nerfs et sur ce sujet, c'était insupportable. Elle savait bien les sentiments que j'avais pour elle, elle savait bien que ça n'avait jamais changé depuis l'école, alors bon sang pourquoi elle faisait ça ?

Je lui souriais, de manière crispée et fausse. Ce sourire qui n'était pas si doux ou décontracté que d'ordinaire. Ce sourire que je voulais bienveillant, mais qui en fait était carnassier. Mais malgré la colère que je sentais monter en moi, je la voyais soudainement maladroite et brusque. Presque tremblante alors qu'elle se servait de café… et qu'elle détournait une nouvelle fois la conversation. Serait-ce l'un de ces stratagèmes ? Je ne pouvais m'empêcher de hausser un sourcil, intriguée, avant de me lever et de prendre la théière. Là, j'hésitais un instant, avant d'attraper le poignet de la sorcière et de la tirer pour l'inviter à se lever et me suivre. Serrant tendrement sa peau entre mes doigts, je la lâchais avec difficulté tandis que je l'entraînais jusqu'à la cuisine, me raclant la gorge pour garder contenance. La toucher m'électrisait toujours comme au premier jour, et j'avais mis mon cœur au supplice juste par ce simple geste.

- Si tu veux vivre ici deux semaines, je vais commencer à t'expliquer les rudiments de la maison.

Portant la théière sous le robinet, je la remplissais d'eau puis la posais sur son socle avant d'appuyer sur le bouton. Bientôt, l'eau chaude se mit à crisser dans le contenant.

- Bonnie m'a acheté ça, c'est pratique je dois dire, et ça va plus vite que sur le feu. Je souriais avec innocence à Harper avant de désigner des placards. Là tu as le garde mangé, là le frigo, là le four. J'ai un peu de tout… hum, pain, farine, fromage, confiture, fruits et légumes, pâtes… La viande je l'achète plus loin d'ordinaire, au marché, mais là je n'en ai plus puisque je ne peux pas transplaner. On peut y aller demain si tu veux ? Le poisson en général je le pêche moi-même avec le branchiflore, mais… ben pareil, je ne peux plus l'utiliser. On prendra aussi au marché si ça te dit ?

Le clac sonore de la bouilloire se fit entendre tandis que je venais totalement faire face à Harper pour planter mon regard dans le sien. Nos corps si proches l'un de l'autre mais au même temps si loin. En me penchant, j'aurais presque pu l'embrasser. Plein. Je n'arrivais pas à m'y faire. Elle était si belle, et eux, ils ne la méritaient tellement pas, quand bien même je ne les connaissais pas. Harper était à moi et je désirais qu'elle le reste pour toujours, malheureusement, je n'y pouvais plus rien. Plein. Elle était forcément passée à autre chose alors.

- Tu aurais envie de manger quelque chose en particulier ? Si tu as des idées, des désirs ou des envies, n'hésite pas à me les dire ! Autant rendre le séjour agréable.

Houla, n'y a-t-il pas un millier de sous-entendus dans ce que je venais de dire ? Ou alors était-ce mon imagination trop fertile qui déformait mes mots ?
Plein.
Plein.
Non décidément, j'avais beau parler de nourriture, ça restait Harper que je voulais dévorer. Je n'arrivais pas à changer de sujet mentalement, je restais coincée. Alors, je tournais sept fois ma langue dans ma bouche pour articuler avec peine.

- Plein, ça veut dire combien ? Vas-y raconte moi aller !

Je mimais être curieuse, comme une enfant qui voulait connaître un secret ou une surprise à l'avance. Curiosité déplacée… mais j'avais la sensation que si elle ne me racontait pas, j'allais mourir étouffée dans ce sentiment qui m'esclavageait…. De la jalousie ?


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Dim 20 Juin - 21:48
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Comme au premier jourAbigail & Harper


Ce n’était absolument pas malin. Dans la panique, les mots sont sortis de sa bouche avant même de reprendre son souffle pour réfléchir. Un peu comme si, en proie avec ses ravisseurs, un fugitif sautait dans une mer infestée de requin alors que s’il s’était arrêté deux secondes sur la bordure, il aurait remarqué cette échelle suspendue pour l’emmener loin des problèmes, loins de l'irréparable.

Assise sur le canapé, bouilloire tendue, elle avait ignoré les possibles réactions d’Abigail. La fuite avant tout. Elle a loupé une échelle, elle n’en loupera pas une autre. Pas aujourd’hui. Elle préféra ignorer les sentiments d’Abigail pour préserver les siens. Fuir, c’est tellement plus facile.

Puis, contre toute attente, Abigail la saisie par le poignet pour l’entraîner dans la cuisine. Harper se laisse faire et la suit, comme un chien tiré de force par la laisse. Elle serait volontiers restée assise. Elle n’a pas besoin de la regarder faire chauffer de l’eau. C’est ça cohabiter ensemble ? On fait tout pareille, tous ensemble ? Fusion ?

Harper est loin du compte. Elle écoute Abigail lui expliquer le fonctionnement de la théière. Aurait-elle oublié qu’elle est née-moldue ? Dans la foulée, son amie lui indique les différents recoins de la cuisine. Harper ouvre la bouche pour rappeler qu’elle ne s’en souviendra pas avant de la refermer : Abigail doit certainement le savoir. Ses explications sont une simple formalité.

Je te conduirai où tu le souhaite. Je n’ai pas de préférence. Je ne suis pas difficile pour la nourriture. Le principal, c’est qu’il y est des chips dans le placard. D’ailleurs, j’en ai apporté un carton plein…

De l’index, elle désigne le salon où ses paquets sont entreposés. Plein. Un peu à la déroute, Harper ne sait pas comment réagir. La distance entre elles est faible. Elles sont là, seules, à la merci l’une de l’autre. Abigail fait tout pour accueillir Harper comme il se doit. Harper est là pour pallier aux besoins d’Abigail désormais sans magie.

Ne te mets pas la rate au court-bouillon, je ne fais pas parti du Conseil d’Administration. Tout est parfait. On va faire les choses le plus simplement possible.

Et alors que les choses avait semblé redevenir simple, Abigail pose la question fatidique. Celle où elles reviennent sur le sujet précédent. Là où Harper c’est indéniablement manqué. Là où elle va devoir faire marcher ses méninges pour s’en sortir par l’échelle suspendue.

Je n’ai pas compté, répond-t-elle bêtement. Des histoires d’un soir, rien de plus.

En vérité, elle commence à être sérieusement agacée. Ses sourcils se froncent. Elle n'aperçoit pas d'échelle.

Quelle importance ?

Elle aurait aimé dire, elle aurait aimé lui dire, qu’elle n’avait connu que des aventures, rien de plus, rien de moins. Rien de comparable à ce qu’elles avaient vécu ensemble. Mais son courage failli. Elle craint les retombées de pareilles paroles, elle ne sait pas à quoi s’attendre, ne sait pas même ce qu’elle ressent. A-t-elle peur du jugement ? A-t-elle peur de la réaction d’Abigail ? Veut-elle qu’elle lui en veuille ? Craint-elle qu’elle ne lui en veuille pas ?

Est-ce que tu essaie de me mettre mal à l’aise ?

Quelque chose au fond d’elle lui empêche de se taire et l’encourage à aller de front.

Tout le monde ne vit pas d’amourette parfaite avec monsieur whisky.

Harper recule d’un pas. Elle ne voulait tellement pas qu’elle sache.

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Mar 22 Juin - 13:30
Je faisais de mon mieux pour accueillir Harper comme il se devait, pour qu’elle se sente bien chez moi et pour que son séjour soit le plus agréable possible pour elle. Je savais que je n’étais pas un cadeau à vivre à cause de ma trop grande introspection, et nous n’avions jamais cohabité toutes les deux. C’était donc un nouvel exercice qui nous attendait là, et je voulais vraiment rendre l’expérience agréable bien que j’aie été réticente au début. Présentement, je devais reconnaître que sa présence me faisait du bien, et, sûrement que maintenant, je craignais de la voir s’en aller. Déjà maintenant, et je savais que ce sera pire dans deux semaines. Cette femme, j’avais toujours eu du mal à m’en séparer, à m’en défaire, et la voir à présent ici, presque installée, c’était comme un rêve qui se réalisait enfin. Je ne voulais pas que ça devienne un cauchemar. Voilà pourquoi j’essayais de mettre la sorcière à l’aise en lui montrant et en lui expliquant un peu mes stocks. Bien que j’eusse le doute qu’elle retienne tout, je savais aussi qu’elle était très gourmande, et je ne serais pas choquée si elle prenait la liberté de se servir dans mes placards dans me demander la permission. Mieux, je serais heureuse qu’elle se serve sans me demander. Que nous vivions à deux en toute liberté en somme. Néanmoins, Harper me semblait soudainement étrangement fébrile, car elle me suivait sans grande conviction jusqu’à la cuisine, et ses réponses furent si standards que j’en fus déstabilisée. Devais-je être la seule à faire des efforts ? Pensait-elle que le simple fait de me forcer à sa présence suffisait et qu’elle n’avait donc plus besoin de faire quoique ce soit ? S’inviter, poser les pieds sur la table et voilà tout ?
Plutôt qu’être agacée, c’était de la déception qui vint serrer mon cœur. J’avais du mal à comprendre pourquoi Harper tenait à ce point venir ici si c’était pour avoir une telle attitude ? Où donc était passée la Harper solaire, spontanée, joyeuse et vive que je connaissais, et dont j’avais besoin ? Passer du temps avec la version de la sorcière que j’avais là en face de moi allait être bien plus déprimant.

- Je ne veux pas tout compliquer, je veux juste que tu te sentes bien.

Ce n’était pas plus compliqué que ça. Je doutais fort que ma simple présence lui permette de se sentir bien, la preuve à l’instant même en voyant son air perdu, presque agar.
Pourtant, malgré cet état, je ne pouvais m’empêcher de pousser la curiosité. Je voulais savoir avec combien de personnes elle avait partagé son corps, combien je devais me méfier des autres, combien je devais pleurer, combien je devais me l’imaginer, elle, sa peau si douce et splendide, entre les mains d’une personne qui ne savait pas convenablement la toucher, comme un mauvais musicien toucherait un Stratovarius. Sacrilège.
C’était une curiosité mal placée venant de moi, j’en avais bien conscience, pourtant c’était d’une importance capitale pour mon cœur. J’avais la sensation que si je ne savais pas, j’allais étouffer dans une sorte de rage qui ne me ressemblait pas. Alors que j’ouvrais la bouche pour répondre à sa première question, je comprenais que cette dernière était rhétorique alors qu’elle enchainait. Je voyais ses sourcils se froncer, sa mâchoire se serrer, son corps se crisper.
J’allais garder mon calme pour lui expliquer tranquillement. Mais voilà qu’elle s’en prenait à Luca de manière totalement injuste. Là, s’en était trop. On ne s’en prenait pas à mes amis, quand bien même on s’appelle Harper Auburn. Ça ne donnait pas tous les droits sur mes principes de vie. Ma forme animagus n'était pas un hasard, j’étais un chien de garde, et la directrice de la maison Gryffondor allait s’en souvenir. Rares étaient les instants où je perdais mon calme, mais Harper avait toujours eu ce talent de me faire sortir de mes gonds en un temps record. S’en prendre à mes quelques amis étaient la certitude que j’allais monter les tours instantanément.
À mon tour de froncer les sourcils et de crisper ma bouche. Ma voix d’ordinaire si douce et timide se fit sensiblement plus dure et je levais un doigt accusateur dans la direction de mon amie d'enfance.

- Hey dis donc tu vas arrêter tout de suite de parler de Luca comme ça ! Il ne t’a rien fait ! Tu devrais même être contente pour moi que j’ai pu trouver un équilibre avec quelqu’un de convenable ! Si ce n’est pas ton cas, ce n’est pas mon problème, j’y suis pour rien moi ! Dois-je te rappeler que c’est TOI qui à briser l’équilibre qu’il y avait entre nous ? Moi je voulais continuer, moi je voulais vivre avec toi, je t’aurais suivi pour ça ! Maintenant si tu n’es pas contente de la situation, j’y suis pour rien du tout ! C’est à toi de rattraper tes merdes et d’en assumer les conséquences, c’est à toi de corriger le tir plutôt que de fuir sans arrêt comme une gamine ! Putain Harper, t’es adulte aujourd’hui, fais face bon sang !

Je soupirais pour retrouver un temps soit peu de calme. Tout le long de notre amitié et de notre amour, j’avais toujours encouragé Harper à faire face au monde, à prendre son courage à deux mains, et quand bien même je savais qu’elle faisait des efforts, je ne pouvais rien faire d’autre que constater présentement que ce défaut lui collait toujours à la peau. Dans un sens, c’était aussi ce qui la rendait charmante à mes yeux, elle était faillible derrière ses airs forts et assurés, et je savais comment percer cette coquille, je savais ce qu’il y avait derrière. Mais aujourd’hui, elle n’avait aucun droit de s’en prendre à un ami qui était là pour m’aider, lui. Qui était là, présent, et qui ne me fuyait pas, lui. Qui ne m’abandonnait pas, lui (tout le moins, pas encore).
Tirant la commissure droite de ma lèvre en un genre de rictus de malaise, je me passais nerveusement une main dans mes cheveux, le regard fuyant.

- Cela dit, je reconnais que mes questionnements étaient déplacés, et non ce n’était pas pour te mettre mal à l’aise… et sans doute que ça n’a pas beaucoup d’importance… ou alors si. Je fronçais les sourcils, confuse. J’en sais rien. Je me suis juste naïvement dit qu’on pourrait partager ce genre de chose entre nous, parce que j’ai la prétention de croire que nous sommes ce genre d’amies.

Je levais les yeux vers elle pour chercher son regard.

- À moins que je me trompe ?

Oui, Harper, quel genre d’amies étions-nous ? D’ailleurs, étions-nous seulement amies où y avait-il autre chose ? Mon cœur battait si fort dans ma poitrine que mon haut en était sensiblement secoué à rythme régulier. J’attendais sa réponse comme un condamné attendait que la guillotine lui tombe sur la nuque. J’avais peur que mes paroles aient été trop vindicatives, et j’étais tétanisée par le fait de voir Harper me tourner le dos et s’en aller, encore une fois.
Je m’attendais à tout instant que le sol se dérobe sous mes pas.


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Mer 23 Juin - 18:43
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Comme au premier jourAbigail & Harper


Réalisant que la panique de ses émotions est coupable de sa réaction piquante, les traits de son visage se détendent, abandonnant leur expression fermée, se débarrassant de l’offensive. Mais les mots qu'elle a prononcés ont parcouru trop de chemin, suffisamment pour dessiner du mécontentement sur le visage angélique d’Abigail. Cette fameuse langue qui ne tourne jamais dans sa bouche avant de parler. Parfois, Harper se demande si son cerveau ne ferait pas mieux de tourner sur lui-même avant de penser.

Dans le fond, ne supporte-t-elle pas de savoir Abigail avec un autre ou lui est-il pénible de comparer la douce amourette d’Abigail et Luca avec ses aventures sans lendemain dénuées d’intérêts ? La chaleur dans la bouilloire augmente, faisant vibrer l’engin au rythme de l’agacement d’Abigail grimpant en flèche. Plop ! L’eau est arrivée à température tandis qu’Abigail prend une grande inspiration comme pour tenter de retrouver son calme face à la colère qui l’habite. Harper reste coi, sans expression apparente, partagée entre l’écoute et la réflexion, son silence tombant à pic car Abigail n’en a pas terminé avec elle. Son ressenti ressemble un peu à une fessée qu’on reçoit, persuadé dans le fond qu’on n’est pas entièrement coupable. Mais ça ne sert à rien de discuter sinon d’envenimer les choses. Et les féssées ça fait mal.

Je suis désolée de t’avoir froissée, s’exclame-t-elle enfin. Ce n’était pas mon intention. Je n’ai jamais douté de notre amitié, je sais pertinemment que nous pouvons compter l’une sur l’autre, ma présence ici en est la preuve, la pérennité de notre amitié à travers le temps également, malgré le tort que je t’ai causé. Je n’ai rien à te cacher, je crois simplement que je ne suis pas disposée à parler de ce genre de chose.

Elle attrape l’anse de la bouilloire avant d’ajouter :

Pas pour le moment. Désolée pour ton Luca…

… qu’il fasse pipi du whisky pur malt dans d’atroces souffrances.

Dehors, la pluie bat toujours son plein. Des éclairs zèbrent le ciel noir de nuages. L’orage est loin, le martèlement de la pluie sur les tuiles étouffe le grondement du tonner.

… désolée de m’être fermée. Et désolée mais je n’ai pas fini mon cookie et sans magie, le dvd ne va pas se lancer tout seul.

Souriant à pleine dent, fière de sa conclusion, elle détourne les talons, invitant Abigail à la suivre d'un geste de la main, marchant fièrement avec la bouilloire dans l'autre. Faire table rase du passé n'est pas dans ses cordes mais la jeune femme sait qu’elle doit s’y préparer. Avant de se livrer, elle devra être capable de s’accorder bien des pardons. Se pardonner avant d’admettre ses torts pour apaiser ses émotions : il existe tellement d’erreur transformé en regret qu’elle ne parvient pas à accepter. Ne dit-on pas qu’il faut être en paix avec soi-même avant de pouvoir être en paix avec les autres ?
Harper retourne dans le séjour pour lancer manuellement le lecteur dvd. L'après-midi touche à sa fin, dans quelques heures elles pourront préparer le diner, et tandis que le lecteur dvd ronronne, Harper, un cookie à la main, se demande ce qu'elles vont manger de bon ce soir.

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Jeu 24 Juin - 13:46
Les disputes avec Harper, on en avait toujours eu, et on en aura toujours. J'étais du genre à me confier, à dire mes états d'âme lorsque je les ressentais, Harper était tout l'inverse. Elle cumulait et cumulait encore, restant à chaque fois dans le déni. Un déni qui pouvait (je n'avais pas de doute là-dessus) durer des années. Pourtant, Harper n'était pas lâche, elle n'était pas non plus dénuée de courage, bien au contraire, son appartenance à la maison Gryffondor était l'un des nombreux exemples les plus parlant. Je n'arrivais jamais à saisir l'origine de ce trouble chez elle, et quand bien même je pouvais le trouver charmant, car c'était ce qui constituait la personne que j'aimais le plus au monde, il y avait des moments où tout simplement ça me faisait chier, et j'aurais pu tuer mon amie pour ça. Tout bonnement et simplement l'étrangler.
Le fait qu'elle se calme, qu'elle s'excuse et qu'elle m'explique (au moins un peu) encouragea ma sérénité à reprendre le dessus. Chassant mon envie de bouder, je venais m'asseoir à côté de la jeune femme pour reprendre une tasse de thé tout en regardant ce dessin animé. Puis un deuxième. Puis un troisième. Jusqu'à ce que les enfantillages prennent le dessus, jusqu'à ce que l'atmosphère devint plus sereine, jusqu'à ce que nous devenions ces fillettes de onze ans que nous avions été lors de notre première rencontre.
Comme au premier jour.



Enfilant l'oreillette de mon casque, je branchais le câble sur mon téléphone pour y enclencher la musique. Harper, allongée dans le canapé à quelques centimètres de moi, dormait encore comme un bébé. Elle avait toujours dormi beaucoup plus que moi. À force d'avoir parlé de tout et de rien, de regarder des films divers et variés, nous nous étions endormies comme deux larves dans le canapé que j'avais pris la peine de déplier. Ce matin, c'était un vent de légèreté qui soufflait dans ma poitrine, je me sentais bien, le soleil commençait à colorer l'intérieur de ma maison de ses rayons jaunâtres encore faibles. Il était encore tôt, et Bonnie n'était pas encore arrivée. Je profitais donc de cet instant pour le prendre pour moi.
Me mordant la lèvre inférieure, je me penchais en avant pour arriver au-dessus du visage de la sorcière endormie. Son souffle serein et profond inspira en moi un grand calme. Je souriais tendrement en admirant ses traits. Par Saint-Georges cette femme était si belle… Sa bouche détendue était entourée de lèvres finement dessinées, d'un rose pâle tout à fait séduisant m'appelant sans cesse au péché. Voilà pourquoi je mordais mes propres lippes, afin de ne pas céder à la tentation. Ses joues rondes étaient peut-être le trait qui avait le moins changé chez elle depuis que nous étions enfants, elle avait toujours ses joues rebondies d'une petite fille. Son nez fin et ourlé était sûrement la partie de son visage (avec ses yeux) que j'aimais le plus. Lors de notre unique relation amoureuse durant l'adolescence j'aimais beaucoup me frotter contre elle à l'instar d'un chat, et l'ensemble de mon corps fut parcouru d'un frisson violent au rappel de ce souvenir, réclamant haut et fort la chaleur de la peau de Harper. Déglutissant nerveusement afin de retenir mes pulsions, je clignais des yeux, et, au lieu de venir caresser sa chevelure en bataille autour de son visage, au lieu de venir l'embrasser aussi tendrement que fougueusement, je me contentais de lever mon téléphone au-dessus de sa tête.  Un raccourci du pouce plus loin, voilà l'appareil photo prêt, et… Hop.

Souriant de plus belle, comme victorieuse d'avoir pris ce cliché à l'insu de la jeune femme, je me redressais en admirant mon œuvre. Ce n'était qu'une photo parmi tant d'autres. J'adorais prendre Harper en photo sans qu'elle ne le voie, j'avais des clichés magnifiques d'elle alors qu'elle l'ignorait. Quand elle sera partie, je rassemblerais les meilleures pour la mettre en cadre, comme je l'avais fait pour mon frère et mes cousins, sur l'étagère de ma bibliothèque, non loin du piano.
Grâce à Luca, j'étais plus au clair avec les sentiments que j'éprouvais envers la jeune femme, et je palliais à ce manque comme je le pouvais, en attendant que la bonne personne se présente à moi… ou que je finisse vieille fille (c'était aussi une possibilité). Après tout, mes rares relations précédentes n'étaient que des échecs, et aujourd'hui j'avais conscience que tout ce que je ressentais pour Harper ne changerait jamais plus. Je l'aimais, je l'aime, et je l'aimerai toute ma vie.


mood


Reculant de deux pas, m'assurant de ne pas l'avoir réveillée, je baissais les yeux sur mon téléphone et changea la piste musicale. Les premières notes venant m'emporter, je fermais les paupières pour m'imprégner de la musique. Vieille chanson que j'écoutais depuis des années, je me mis à me trémousser dans le salon sur l'air, balançant lentement bras et jambes au rythme de la musique. La longue et légère chemise de nuit que je portais suivait mes mouvements en virevoltant dans mon dos, laissant entrevoir de temps à autre mes cuisses dénudées.
Ce fut en rythme que je me dirigeais vers la cuisine pour commencer à préparer le petit-déjeuner, ouvrant les placards et le frigo, dressant la table tout en dansant, laissant échapper de temps à autre de petits murmures des paroles de cette chanson que j'appréciais tant.

I keep on looking for something I can't get,
Broken hearts lay all around me,
But I don't see an easy way to get out of this.
Ooh. .
I just died in your arms tonight,


Temps écoulé, j'en étais venue à oublier la présence de Harper sur le canapé, finissant alors par danser tout à fait entre le salon et la cuisine, imitant les gestes comme si c'était moi-même qui jouais la guitare ou improvisant des pas de danse, ne cessant mes déhanchés, commençant même à sautiller, bras en l'air, le câble de mes écouteurs sautait avec moi. Cheveux blonds décoiffés et ébouriffés ne cessant d'être secoués, ils accompagnaient mes mouvements avec énergie, imitant une cascade blonde qui me tombait sur les épaules et dans le dos.
J'étais partie dans un autre monde le temps d'une chanson, le temps d'un instant léger et simple où, étouffée par l'épreuve terrible de m'interdire d'aimer la plus merveilleuse personne au monde, j'évacuais la frustration en dansant.  


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