Les fêtes de décembre… C’était une période courte où chacun passait du temps avec sa famille et échangeait des cadeaux avec des amis. Pour Raphaël, cette période avait tendance à se prolonger jusqu'à la moitié du mois de Janvier puisque son anniversaire tombait, comme chaque année, le 15 Janvier. Même s’il ne le fêtait plus avec sa famille proche depuis qu’il vivait à Londres, c’était tout de même un événement qui se marquait, de manière générale. Mais cette année, les fêtes avaient quelque chose de nouveau. Elles commencèrent plus tôt, et se finirent dans une ambiance des moins conviviales...
Cette année le festivités commencèrent donc dès le 20 décembre, avec l’anniversaire de Nymphéa. Nymphéa était une personne qui a pris énormément d’importance dans la vie et le cœur du jeune homme. Au début, ce n’était qu’une simple actrice amatrice pour le tournage d’un projet d’étudiant. Avec les mois et les rares tournages qu’ils ont pu faire ensemble, une complicité s’est installée entre les deux jeunes. Mais là où ils sont réellement devenus amis proches, aux yeux de Raphaël, c’était suite à l’enlèvement d’Amber, quand il a pris des risques idiots pour tenter de l’aider. Il avait frôlé la mort de très près ce jour là, mais ça avait changé sa vie, en bien. Si c’était à refaire il recommencerait…
Un peu plus intelligemment peut-être… Le jour du sauvetage correspondait également à celui de la disparition de Hyacinthe, le frère de son amie. L’asiatique semblait énormément aimer son frère,
même si elle ne lui avait probablement jamais avoué, par orgueil. Raphaël et Nymphéa avait passé une
longue soirée en tête à tête sur les quais de la Tamise à discuter de la disparition du frère de la sorcière, des relations entre sorcier et moldus et beaucoup d'autres confessions personnelles. Une soirée avec beaucoup de pleurs, de secret, et de marques de confiance et d'affections l’un envers l’autre. Des échanges très humains, sensibles et…
un peu gênants il faut l'avouer… Pour Raph, un lien fort s’était tissé entre lui et la jeune sorcière. Ensemble ils comptaient mener à bien un projet pour que Moldus et Sorciers acceptent de vivre en paix, même si ça n’allait pas être une mince affaire pour ébranler l’influence de la propagande du Blood Circle, les deux amis étaient optimistes. Nymphéa avait fait jouer de ses relations ainsi que de celles de sa mère pour qu’il puisse intégrer la branche moldu de l’Ordre du Phénix, initialement créé pour lutter contre les Mangemorts qui s’en prenaient aux Moldus et sorcier d’ascendance Moldus. L’ordre avait évolué et le jeune homme l'avait rejoint afin de contribuer à la résistance contre les actions meurtrières du Blood Circle. Les deux amis se voyaient et communiquaient régulièrement. Ils étaient devenus tellement proches que Raphaël n’était plus tellement sûr de la nature des sentiments qu’il éprouvait pour la jeune sorcière. Il avait même rêvé à plusieurs reprises qu’ils dormaient l’un contre l’autre enlacés après s’être embrassés longuement. Bien sûr, ce n’était qu’un rêve, mais…
Pourquoi ce creux dans la poitrine ? Pourquoi cette déception d’être seul au réveil ? Pourquoi cette frustration d’être réveillé ? Bref… Il ne savait pas trop la nature de ses sentiments pour la jeune fille. Ou plutôt, il n'était pas sûr de vouloir les avouer, déjà qu'il avait de la peine a se les avouer à lui même...
Est-ce qu’il voulait en faire sa sorcière bien aimée, ou préférait-il s’assurer leur amitié ? Le choix du cadeau d’anniversaire pour Nymphéa était quelque chose qui s’était avéré compliqué à cause de ça.
C’est pourquoi il avait prévu deux cadeaux… L’un qu’il pouvait offrir publiquement et qu’il pouvait assumer sans aucunes craintes… Et un deuxième, plus intime… Qu’il ne lui offrirait que s’il l’osait, et dans un cadre beaucoup plus privé…
Le lendemain de l’anniversaire, Raphaël devait déjà prendre le train pour rejoindre sa famille. S’il n’avait rien eu de prévu, il aurait pris le train le vendredi soir, mais du coup ça s’était reporté au samedi. Le trajet en train allait être long, plus de deux heures pour rejoindre Paris et autant pour aller à Lyon, et il n’avait pas grand chose pour s’occuper. Il décida d’enfin retranscrire
l'enregistrement audio qu'il avait fait le jour du
sauvetage d'Amber.. Il enfila ses écouteurs et lança la lecture de l’enregistrement. Il s’entendait parler d’une voix paniquée
«Hey tu peux pas faire un truc magique pour nous protéger de ce gaz hallucinogène ? Genre nous faire apparaître des masque à gaz ou des scaphandre magiques ? Faut qu’on retrouve mon amie, elle doit pas être en meilleure état que toi juste avant. On risque de se retrouver avec d’autres prisonniers sur les bras.» L’enregistrement commence donc juste après l’apparition du gaz, la mémoire de Raph lui revint peu à peu, il avait enregistré car il ne pouvait pas filmer ce qui était invisible :
le gaz hallucinogène. Une détonation retentit juste après, et Raphaël eut un frisson qui lui parcourra l’échine en repensant à ce qui allait se passer ensuite dans l’enregistrement. Bruit de course, chute, cris de douleur, bruit sourds d’objets lourds qui tombent, puis un brouhaha de lutte, gémissement de douleur suivi d'un long moment de calme achevé par la voix de Raphaël qui se rendit. Il mit sur pause…
Oui, se rappelait de tout ça, la tentative de fuite avec la cape d’invisibilité, le manque de synchronisation, la chute, l’attaque du Blood Circle, le sacrifice de sa caméra pour désarmer l’homme, le coup de pied dans l’armure et finalement la soumission de Raph. Il griffonna dans un cahier un bref résumé de ce qu’il venait d’entendre avant de reprendre l’écoute de l’enregistrement, l’homme qui le menaçait, Nymphéa qui vint le sauver, les lancers de briques, ses propres gémissement de douleurs. Il retranscrivit tout ce qu’il entendit jusqu’au moment où Nymphéa lui avoua oralement qu’elle était une sorcière avant que l’enregistrement ne soit coupé.
Nymphéa… Il écouta encore et encore ce passage qui n’était que le prologue à la longue discussion qui avait eu lieu le lendemain. Raphaël soupira, le sourire aux lèvres. Il mit la main dans son sac et caressa l’emballage du deuxième cadeau prévu pour Nymphéa et qu’il n’avait pas encore eu le courage d'offrir à son amie.
Vivement qu’ils puissent se revoir… Après avoir fini de noter tout ce qu’il y avait à noter sur cet enregistrement d’octobre, il mit en route celui de juillet. Son téléphone avait enregistré par erreur quand il l’avait remis dans sa poche cet été mais il était curieux de savoir comment il s’était retrouvé à enregistrer pendant plus de quatre heures. Il ne savait pas à quoi s’attendre, mais il ne s’attendait
certainement pas à ça. Au début de l’enregistrement, on pouvait entendre des bruits de froissements.
Rien de bien choquant, c’était probablement le bruit du téléphone que l’on mettait dans la poche. On entendit une voix faible parler, inaudible sur l’enregistrement, suivi de la voix de Raphaël. Le jeune homme se présentait. Il parlait de ses études et de ses origines. Il parla de Magie.
L’homme l'interrogeait sur la magie ? Raphaël coupa l’enregistrement pour vérifier la date.
Début Juillet… Il ne savait rien de la magie à ce moment là et surtout,
il n’avait aucun souvenir de cette conversation ! Il tourna les pages de son cahier et mit la date de l’enregistrement.
Bon sang, s’il devait retranscrire quatre heures d’audio, il n’allait pas s’en sortir… Il reprit l’enregistrement en essayant d’entendre ce que l’homme disait.
Impossible, même avec le son à fond, on entendait bien quelqu’un parler mais impossible de comprendre ce qu’il disait tellement la voix était calme, et de faible intensité. Tant pis, il continua l’écoute de l’enregistrement. Un bruit sec et court retentit, l’homme parlait à nouveau. On pouvait ensuite entendre un raclement de gorge puis quelqu’un qui crachait suivi de ce qui semblerait être une puissante claque.
Le premier bruits sec pourrait-être une claque également ? «Putain… Mais qu’est ce qu’il s’est passé ?»Il arrêtait de retranscrire, il avait besoin de se concentrer sur ce qu’il découvrait. Le Raphaël de l’enregistrement parlait du Blood Circle, du gouvernement, des dénonciations. Il tentait de supplier l’homme de le laisser partir.
Il était prisonnier ? Il répétait qu’il ne savait rien de plus que ce que les journaux disaient. Vint enfin le moment où les deux Raphaël comprirent que l’homme était un Sorcier.
Un Mangemort l’avait agressé en juillet… Qui ? Est-ce que c'était Tobias ? En écoutant l’enregistrement il pensait qu’il aurait la réponse. Il n’en était pas loin, après avoir supplié l’homme d’abréger rapidement ses souffrances, il lui avait demandé son nom.
Pourvu qu’on entende la réponse dans l’enregistrement. Non… évidemment que non, l’homme parlait trop faiblement à chaque fois. Il contrastait totalement avec Raph qui hurlait une phrase sur deux quand il ne gémissait pas. Il ferma l’application dictaphone et retira ses écouteurs…
Il n’avait pas très envie d’écouter la suite maintenant. Il s’en voulait de ne pas avoir découvert cet enregistrement plus tôt, mais d’un autre côté… S’il l’avait entendu, est-ce qu’il se serait autant rapproché de l’Ordre du Phénix et de Nymphéa ?
Non… Rien à voir.
C’était la faute du Blood Circle. Peut-être que Artémis s’était faite repérer et que le Sorcier lui était tombé dessus parce qu’il savait où elle habitait. Oui…
Tout ça c’était la faute d’Artémis…
Les fêtes de Noël en compagnie de sa famille s’étaient déroulées comme d’habitude. En petit comité et dans le calme. Raphaël avait initialement prévu de passer énormément de temps à jouer, pour compenser ses trois semaines de Décembre lourdement chargées ; entre l’Ordre, les cours, ses propres états d’âmes et ceux de ses amis, il n’avait quasiment pas pu jouer :
quel comble avec la réputation de Geek qu'il se traînait ! Ses projets furent chamboulés par cet enregistrement de Juillet qui l’intriguait au plus haut point. Il avait passé pas mal de temps à étudier l'enregistrement. Le document ne durait pas réellement quatre heures, mais l’homme avait manipulé Raphaël et altéré sa mémoire de sorte que ce dernier avait oublié qu’il enregistrait. C’était le manque de batterie du téléphone qui avait mis fin à l’enregistrement. Se connaissant lui même, il se doutait que le Raphaël de juillet avait repéré quelque chose de suspect et avait décidé d’enregistrer pour avoir des preuves. Il avait comparé la date et elle correspondait à ce fameux jour où il avait cassé son écran de téléphone et qu’il s’était retrouvé en cellule de dégrisement.
Il avait toujours trouvé cette histoire d’ivresse sur la voie publique complètement bizarre. C’était pas le genre à se saouler la gueule, et il n’avait aucune trace de cette fête, que ça soit dans ses messages, sur les réseaux ou dans ses photos. Il n’avait jamais pensé à vérifier le Dictaphone, mais…
Qui utilise le dictaphone en dehors des cours ou des interview ? Il ne savait rien du sorcier qui l’avait agressé, juste un prénom “William”
mais ça pouvait tout aussi bien être un pseudonyme donc il n’était pas spécialement avancé. Bien entendu Raphaël ne parla pas à sa famille de ce qu’il avait appris. Tout comme il leur cachait l’existence de l’Ordre du Phénix et du contact qu’il avait avec les sorciers. Ses parents s’étaient fait une raisons, ils avaient d’abord accepté, à contrecœur, de le laisser repartir à Londres en Août, il ne comptait pas leur donner une raison de le retenir en Janvier. Dans une autre mesure, il leur avait également caché l'existence de Nymphéa ainsi que de ses sentiments pour elle : c'était son jardin secret. Dans la semaine entre Noël et le nouvel an, il reçut un message de Toni Santana, une amie d’enfance de Samuel, qui l’informait que la ville de Londres organisait une soirée pour le nouvel an, quelques jours après le début d’année et que c’était l’occasion de sortir un peu Samuel, de lui remonter le moral lui qui était d’humeur taciturne depuis plusieurs semaines. Raphaël avait fini par céder. C’est ainsi qu’après le réveillon du 31, Raphaël prenait le train afin d’aller à
une autre fête du nouvel an, à Londres.
Finalement, le 15 janvier arriva, avec l’anniversaire de Raphaël. Il n’avait pas prévu de grosse fête avec de nombreux invités, comme Nymphéa avait fait pour son propre anniversaire. En fait… Il n’avait rien prévu du tout, juste de retrouver Nymphéa, bien décidé à lui offrir le cadeau qu’il gardait depuis bientôt plus d’un mois, et peut-être enfin lui avouer ses sentiments qu’il commençait peu à peu à assumer. L'enregistrement l'avait ébranlé, il ne se sentait pas prêt à en parler avec quelqu’un, mais il avait besoin de réconfort que peu de gens pouvaient lui apporter. Le jeune homme prépara son sac pour la soirée et se dirigea vers la sortie de l’appartement quand Samuel, son ami depuis toujours, l’interpella en lui demandant où il allait.
«Euh, bah je sors pour la soirée. Je sais pas trop quand je rentre.»Son ami lui reprochait de ne pas passer son anniversaire avec lui.
«C’est quoi le problème, on avait rien prévu de faire que je sache ? T’es pas mon seul ami j’ai le droit de voir d’autres gens hein ?»Samuel expliqua que le soucis n’était pas le fait qu’il passe la soirée sans lui, mais qu’il l’avait d’office écarté de ses projets. Que depuis le temps qu’ils étaient amis, ça se faisait pas mais que s’il préférait passer la soirée avec sa chinoise plutôt qu’avec lui, c’était pas grave il n’était plus à une trahison près.
«Attends mais c’est quoi ce numéro de Caliméro que tu me sors là ? Ça fais des semaines que tu tires la tronche, que tu nous parles même pas. Toni est venue me casser les couilles à me demander qu’est-ce qu’il t'arrivait, pourquoi tu nous parles pas que tu veux jamais rien faire. Je suis revenu plus tôt à Londres exprès pour faire cette soirée du nouvel an avec vous où, je te rappelle, t'as pas pipé un mot de la soirée ou presque et là tu me chies une pendule parce que je fais un truc sans toi ? Bah ouais, désolé de pas vouloir perdre ma soirée d’anniversaire en compagnie d’un connard. »Raphaël commençait à s’énerver, c’était l’hôpital qui se foutait de la charité.
Le mec il veut rien faire, il parle pas, il communique pas tu sais juste qu'il existe parce qu'il tire la chasse d'eau de temps en temps et là il lui reprochait de préférer passer son anniversaire avec son crush plutôt qu’avec lui ?
Mais qu’il aille juste se faire foutre en fait. «Alors concrètement oui, pour le coup je préfère passer ma soirée avec Nymphéa plutôt qu’avec toi. En fait je préférerais la passer avec n’importe qui plutôt qu’avec toi.»Raphaël ne laissa pas le temps à Samuel de répondre, il sortit de l’appartement en claquant la porte. Son téléphone vibra, il reçut un message de Samuel “En tout cas, tu l’as vite oubliée Artémis”. Raph hésita à répondre à la provocation, il y avait tellement à dire, tellement à reprocher à l'anglais sur ce sujet mais il se contenta de bloquer le contact, c'était plus sain.
Il n’allait pas laisser ce trou du cul lui gâcher sa soirée, même si au final c’était déjà le cas. Il ne voulait plus rien à voir à voir avec Samuel. Leur relation était plutôt froide ces derniers mois, mais cette dispute puérile c’était de trop. Il posta un statut sur Facebook pour remercier ses amis de lui avoir souhaité son anniversaire et profita pour laisser passer un
petit message, et partagea une publication en la commentant avec un autre message
lourd de sens. C’était pas grand chose, et plutôt mesquin, mais il espérait que ça atteigne Sam et que ça allait lui faire bien mal. Raphaël replia ses jambes et serra son sac contre lui en regardant par la fenêtre du bus… Il n'allait pas bien, il venait de se disputer avec son meilleur ami.
Non... Il venait de perdre son meilleur ami. Il était mort en tant qu'ami. Et désormais, il n’avait plus qu’à se trouver une nouvelle colocation. Il était triste, en colère, frustré.
Pourquoi est-ce que Samuel se comportait ainsi ? Il était perdu, il était déçu de la réaction de l'Anglais mais aussi de la sienne. Il avait honte de s'être emporté ainsi. L'accumulation de rancune de jalousie et d'envie accumulée au fil des mois l'ont fait exploser. Oui, il culpabilisait un peu, à mesure qu'il se calmait il prit conscience de sa part de responsabilité dans cette dispute. Il serra un peu plus fort son sac contre lui. Il se sentait seul et il n'était pas certain d'avoir envie que ce sentiment de mal-être ne disparaisse. Tous ces sentiments négatifs qu'il ressentait le rongeaient de l'intérieur, ils le consumaient et il y ressentit une certaine satisfaction, comme s'il se complaisait à être le plus malheureux des hommes.
En tout cas, ce n’était peut-être pas le bon soir pour avouer ses sentiments pour son amie sorcière…
Ou alors si ? Au point où il en était, il n'était pas à un râteau près...