Le Gambit du Sorcier

Feat Joshua Nott

Un coup d’estoc qu’elle n’avait pas vu venir. Tout le monde en parlait dans les couloirs. Les murmures, sur son passage, redoublaient de regards en coin, de rictus grimaçant et de moqueries tout juste contenues.
Octavia accusait le coup. Dès qu’elle avait appris la nouvelle, elle envoya aussitôt un hibou à son père. Actuellement, aucune réponse ne lui était parvenue. Face à l’adversité, la solitude ne lui faisait pas peur. Depuis longtemps, Octavia s’évertuait à polir le bouclier visant à la protéger des intempéries de la vie. Les efforts payaient. Le bouclier résistait. Pendant combien de temps ses défenses tiendront-elles bon ?
Nous sommes en fin de semaine, Octavia quittait la Grande Salle pour rejoindre sa salle commune. Celui qu’elle cherchait ne s’y trouvait pas. Elle investigua auprès d’étudiants retors à la mine pincée qui répondirent à ses questions à demi-mots et Octavia craignait les demi-vérités. Quand elle pensa enfin tenir une piste, elle quitta discrètement la salle commune. Le couvre-feu ne tardera pas à tomber. Il semblait ne pas s’en inquiéter. Cela tombait bien, Octavia non plus. Peut-être avaient-ils ça en commun, la nuit comme terrain de jeu.
En catimini, la jeune fille gagna le hall d’entrée, se faufila dans l’ouverture de l’énorme porte avant que le concierge ne la referma.
La nuit était noire. Un ciel bas, lourd de nuages, masquait les étoiles. Une fine brume s’étiolait au raz du sol. D’une main, elle rajusta le col de sa cape pour ne pas attraper froid. De l’autre, elle caressa du bout du doigt la boîte métallique coincée contre sa hanche. Elle connaissait son affection pour eux. Un atout dans sa manche, au cas où.
Le serpentard zélé avait dit la vérité. A l’orée de la forêt interdite, Joshua était-là, occupé à elle ne savait quoi. En vérité, peu lui importait. Octavia s’avança sans réserve, sans cacher ses intentions. La mine plus grave que d’ordinaire, même si ça le contenterait, tant pis. Son masque marmoréen s’était craquelé.
– Bonsoir Joshua. La nuit est belle pour siffler à la lune.
La lune n’était pas là. Las de porter le rectangle de métal froid, elle le déposa sur le sol puis croisa les bras dans son dos. Au loin, un cri perdu dans la forêt sombre s’éleva vers le ciel. Etait-ce un loup ou une goule ? Une araignée géante ou un renard en chasse ? Un renard. Octavia se serait volontiers transformée en animagus. Profitant de l’effet de surprise, elle sauterait à la gorge de son frère. Pas pour la saigner. Pas pour le blesser mortellement. Juste pour le faire souffrir et le faire payer. Mais elle se devait d’écarter tous sentiments de vengeance. Dans le poudlard express, l’an passé, Joshua l’avait prévenu. Elle savait qu’il était capable de tout, pourvu que le monde marche vers sa décision. Elle ne s’était pas méfiée ou pas assez. Le temps passa et elle passait à autre chose. Octavia s’était trompée. Maintenant qu’il venait de lui porter le premier coup, Octavia devait se soigner puis aviser la suite. Mais d’abord, il fallait libérer de la place dans son palais mental.
– Je suis certaine que tu te feras une joie de t’expliquer.
Le vent souffla, plaquant le froid contre sa cape. Octavia frissonna. Elle survivra à ce coup d’estoc. Coûte que coûte.

La guerre des Nott

ft. Octavia

Comment récupérer une sœur partie ? Une entreprise ? Deux choses qui pourraient être bien distinctes, mais Joshua et July Nott en avaient décidé autrement. Ils allaient faire d’une pierre deux coups. Au fond, Joshua n’était pas sûr que ça ferait revenir sa sœur, c’était surtout un moyen de se venger. Elle l’avait humiliée, heureusement pas en public, mais tout de même, elle devait payer. Le jeune homme avait entrepris les choses bien assez tôt. De loin, ça avait l’air simple comme tactique, mais ça leur avait demandé beaucoup de travail. Puisqu’il n’était pas simplement question d’inventer des histoires et d’en faire des rumeurs, non, il fallait que ce soit réaliste. Et pour cela, il fallait y mettre une touche de vérité et laisser le temps faire les choses. Cette attaque, qui pouvait sembler hasardeuse, était finalement très calculée. Joshua avait fait le gros du travail. C’était un tacticien. Et comme à la guerre, il avait mis en place une stratégie. Se venger d’Octavia était la partie la plus simple. Il suffisait de lancer des rumeurs. Car cela n’avait pas d’autres objectifs que de mettre à mal sa réputation et de l’isoler. Et avec des adolescents, il n’y avait pas besoin de preuve à l’appui, il suffisait de l'on-dit. Alors, quand, en plus, cela sortait dans la presse, ils se faisaient un plaisir d’y croire et d’envenimer la situation. Pour autant, quels journaux s’intéresseraient à la vie d’une adolescente de 17 ans ? Ce fut pour cette raison que Joshua et July combinèrent leurs attaques.

L’objectif était, dans un premier temps, d’attaquer Pétrus pour récupérer l’entreprise. Et pour cela, July Nott n’avait rien inventé : elle avait simplement mis aux jours la comptabilité de l’entreprise. Puis, elle avait mis le doigt sur l’énorme quantité d’argent qu’avait pu détourner le père de famille, soi-disant, dans le dos de sa femme. Ça, c’était la vérité. Le mensonge, ou en tout cas, l’incertitude, était sur l’utilisation de cet argent détourné. Ce fut là que le scandale éclata. Concrètement, il n’y avait aucune preuve, pourtant, c'étaient des rumeurs suffisamment fortes pour briser une vie : Pétrus aurait utilisé cet argent pour se payer des prostitués.

La presse s’empara du scandale et Joshua et July n’eurent même pas besoin d’envenimer les choses : les journaux le firent eux-mêmes. Tout le monde y rajoutait son grain de sel et empirait l’histoire même qu’avait partagé July Nott. La rumeur qui restait la plus ancrée dans les esprits stipulait que certaines de ces prostitués étaient mineures. Joshua ressentait même en semblant de remords : les choses allaient bien plus loin qu’il ne l’aurait cru. Et puis, si les choses continuaient ainsi, il deviendrait le fils d’un pédophile, ce qui n’était pas très reluisant.

Mais qu’en était-il d’Octavia ? Encore une fois, July et Joshua n’avaient pas eu grand-chose à faire. Ils s’étaient appuyés sur les rumeurs tournant autour de Pétrus. En vérité, cela attaquait, une fois de plus, en grande partie le patriarche. Il se disait que celui-ci avait poussé sa fille à avoir des relations sexuelles avec des hommes adultes, alors que la concernée était mineure. Et cela, en échange de quelques avantages aux bordels ou aux casinos. Bien sûr, ce n’était pas vrai. Car même si entre Joshua et Octavia, ce n’était pas le grand amour, si ce genre de choses arrivait vraiment, Pétrus et ses petits camarades seraient morts dans des circonstances plus que douteuses. Octavia était présentée comme une victime de Pétrus. Les adultes la prenaient en pitié, mais les adolescents, eux, étaient impitoyables. Ce n’était qu’une leçon que Joshua donnait à sa cadette. Il avait l’intention de très vite démentir cette histoire, en se faisant passer pour le grand frère protecteur qui venait à la rescousse de sa petite sœur. Ainsi, cela n’aura pas de grandes conséquences sur sa vie, simplement, elle souffrirait un peu, comme lui avait souffert.

Ce jour-là, les rumeurs venaient de sortir dans la presse et ça faisait beaucoup de bruits à Poudlard. Joshua jouait le héros choqué et très inquiet pour sa sœur. Mais intérieurement, il jubilait. En plus d’être une bonne vengeance, c’était amusant. Le jeune homme passa une très bonne journée, à tel point qu’il en oublia presque les traumatismes qui le brûlaient de l’intérieur depuis Piccadilly Circus. Ainsi, après une grosse journée de cours et de révisions, il décida d’aller voir ses amis de la forêt pour leur raconter ses aventures. Le Nott leur confia tout. Il pouvait, de toute façon, il n’y avait pas beaucoup, voir aucun autre fourchelang à Poudlard. De plus, les serpents savaient garder un secret.

Le jeune homme eut à peine le temps de commencer son histoire qu’il fut interrompu. Son cœur loupa un battement et il pria pour que ce voyeur ne comprenne pas ce qu’était réellement en train de faire Joshua. Et heureusement, ce fut le cas. Octavia était sûrement beaucoup trop en colère pour se rendre compte de quoi que ce soit.

« Bonsoir ma chère sœur. En effet, la nuit est belle et puis il me fallait fêter cette magnifique journée. »

Cette journée n’était certainement pas aussi bonne pour elle que pour lui, ou alors Joshua avait loupé son coup. Mais ce n’était pas le cas. Il eut un sourire carnassier. Premier tir et il avait réussi à couler un de ses navires, ce n'était pas beau ça ?

Octavia, sans détours, exigea des explications. De son côté, le Nott hésitait : il serait agréable de lui avouer son coup machiavélique, de lui donner ce qu’elle voulait, mais c’était trop facile. Trop simple, pour elle. Et puis, imaginez qu’il y ait des témoins. Joshua ne pouvait pas prendre le risque de se faire dévoiler. Puis, bien sûr, il pouvait un peu profiter de sa victoire.

« J’ai entendu parler de ce que tu as subi, en effet. Tu aurais pu me le dire, tu sais, je t’aurais sorti de ce mauvais pas. » Joshua s’amusait, il parlait de façon doucereuse avec un très grand sourire, ce qui n’allait pas avec ses propos.

« Mais tu sais, si tu revenais à la maison, mère et moi règlerions ce problème très vite. » Cette fois-ci, il était plus sérieux : si Octavia revenait au manoir, alors ils s’arrangeraient pour faire sauter ces histoires. Mais si elle s’entêtait, la route serait longue pour elle. Car ce n’était que le début, l’hameçon, pour river les yeux du public sur Pétrus. Ensuite seulement, ils enverraient les scandales et cette fois, il n’y aura pas de mensonge, simplement la pure et dure vérité. Puisqu'il est particulièrement stupide, de la part de Pétrus, de se mettre à dos la femme qui connaissait ses secrets les plus noirs.

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Le Gambit du Sorcier

Feat Joshua Nott

L'ignorance était le meilleur des mépris. Octavia calquait ses réactions sur cet inébranlable principe depuis toujours, faisant fi des faiblesses et lâchetés qu'on lui prêtait en déduction. Car, qu'on se le dise, celui qui vocifère des insultes à défaut d’obtenir des réponses de la part de son adversaire, si hissait au rang des loosers. Celui qui criait perdait - principe inébranlable - signe d’une inéluctable incompétence à voir la réalité en face.
Cependant, cette fois, Octavia ne parvenait pas à conserver le calme apparent qu'elle revêtait si bien d'ordinaire. Le bouchon, implacablement, poussait trop loin.
La jeune fille savait qu'à travers la débâcle médiatique et populaire, il était impossible de se relever de telles accusations, qu'elles soient mensongères ou pas. La vie de Pétrus était, dorénavant, considérée comme détruite.
Qu'à cela ne tienne, Joshua venait de déclarer la guerre. Si la victoire était impossible à prévoir, la seule chose dont Octavia pouvait être certaine, était que la renarde qui sommeillait en elle, aussi minuscule soit-elle, ne lâcherait jamais le jarret de Joshua qu'elle allait mordre. Dusse-t-elle en mourir, son frère terminera le jarret coupé et le fondement à l'air.
Octavia croisa les bras, toisant son frère d’un regard méprisant. L’heure n’était plus au défi, le temps des règlements de compte venait. Le menton relevé, l’air dédaigneux, la jeune fille choisissait ses mots.
Naïvement, Octavia s’était persuadée qu’elle réussirait à passer entre les mailles du filet. Mamma et Joshua finiraient par se lasser, écoeurés du manque d’affection qu’Octavia éprouvait pour les traditions, honteux aussi pour son comportement jugé égoïste. Que faire d’un paria ? Comment rentabiliser une marginale ? Indéniablement, elle les avait mal jugé. Pire ! Elle les avait sous-estimé, et ce mauvais jugement les avait, son père et elle, poussé à leur perte.
Ce croc-en-jambe, elle ne l’avait pas vu venir. Elle s’était écrasée face contre terre.
Ce coup d’estoc était imparable. Mais la blessure n’était pas impossible à guérir. Une fois bandée, Octavia pourra rendre la pareille et, pour ce faire, elle se passera de Papa.
– Inutile de prendre cet air insolent, Joshua Ivar Nott. Cesse de faire le malin. Ce complot était puéril, digne d’un lâche à la botte d’une Gorgone enragée.
Etait-ce vraiment juste pour les Gorgones ? Après tout, elles n’étaient sûrement que des créatures incomprises, tout comme l’était Octavia. Elle regretta tout de suite cette insulte envers les femmes aux cheveux de serpents.
July méritait des insultes de la pire espèce. C’en était fini des aimables conciliations envers Mamma. July Montmond n’était qu’une femme afable, avide de pouvoir, aussi tristement servit par la vie que Pétrus l’avait été. A la seule différence, Pétrus avait toujours éprouvé un amour sincère envers sa fille cadette. July, elle, ne pondait que pour la gloire, la survie des espèces de leur genre. Les mangemorts, les purificateurs de sang. Les fadas, les consanguins, les aveugles…
– Je préfèrerai croupir à Azkaban plutôt que de marcher docilement dans votre ombre, persifla-t-elle entre ses dents. Méfis-toi Joshua, Papa est peut-être hors jeu, mais je suis encore debout. Je pourrai sortir certaines cartes dans ma manche alors que je n’y avais jamais songé, juste parce que vous m’y poussait. Je n’aurai jamais osé vous faire une chose pareil, par indifférence ou par amour, choisissez, je m’en contrefiche désormais. Vous avez choisi la haine, vous ne récolterez que ce que vous avez semé. Je préfère crever que d’être votre esclave, et la mort ne me fait pas peur, contrairement à vos petites âmes obnubilées par l’ambition des grandeurs. Si futiles, si restreintes, si pauvres, si seules. J’ai proposé une solution d’arrangement à Mamma lorsqu’elle a refusé que j’aille vivre chez Papa. Désormais, sachez que je ne veux plus jamais la revoir. Ni toi ! Et n’oubliez pas que Papa reste le propriétaire principal de sa société.
Cette dernière phrase sonnait comme une menace. En vérité, Octavia s’apprêtait à déployer son propre coup d’estoc. Même avec une blessure, elle pouvait encore frapper.

La guerre des Nott

ft. Octavia

Joshua n’avait jamais pris le temps de se questionner sur la relation qu’il avait avec sa sœur. Après leur première altercation, il y a de cela plus d’un an, le jeune homme s'était demandé ce qu’il se serait passé si leur relation était différente. S’ils avaient été fusionnels, serait-elle tout de même partie ? Il n’avait jamais pris son rôle de grand-frère très au sérieux. Joshua avait préféré la jalouser plutôt que de la soutenir. Après tout, elle avait eu la chance d’être la cadette et non l’aînée. Octavia avait eu une vie tellement simple, sans aucune responsabilité. Alors que Joshua, lui, était l’héritier. Tandis que sa sœur était gâtée et adulée par Pétrus, le jeune Nott avait été entraîné et conditionné à représenter sa famille à travers le monde. Pour la première fois de sa vie, Octavia avait eu une décision à prendre. Mais au lieu de soutenir une grande cause qui la concernait directement, Octavia avait choisi de se comporter comme une enfant pourrie gâtée. Peut-être que Joshua aurait fait preuve de plus de clémence si elle lui avait donné des arguments dignes pour se ranger du côté de leur père. Mais non. Elle s’était contentée de dire qu’elle n’en avait rien à faire de toute cette histoire. Qu’elle faisait juste ce qu’elle voulait au moment où elle le voulait. Joshua devait la faire grandir un peu.

« Tu devrais me remercier. » Joshua continuait de sourire comme si de rien n’était. « C’est une leçon de vie. » Le Nott la scrutait de haut en bas. La voir ainsi était une grande victoire pour lui. « Et puis, sache que les Grognes sont des êtres très nobles. »

Le jeune homme savourait sa vengeance. Car au fond, s’il s’était autant investi dans cette contre-attaque, c'était bien parce qu’il avait été blessé dans son égo. Parce qu’elle était sa sœur, le jeune homme l’avait traitée différemment, il s’était ouvert à elle, enfin à sa façon. Mais Octavia avait préféré le prendre de haut. Joshua s’était trompé. Il ne pouvait faire confiance à personne, pas même à sa famille. Le Nott ne se montrait plus, y compris à sa mère. Personne ne savait à quel point il souffrait. Joshua était jaloux de l’innocence de sa sœur, c’était peut-être pour cette raison qu’il lui avait retiré.
« Je suis bien curieux de voir ça. J’irais même jusqu’à dire que j’attends ta riposte avec impatience. » Il ne fallait pas croire que Joshua la sous-estimait. Au contraire, il attendait beaucoup d’elle. Mais le jeune homme se nourrissait du chaos. Une guerre se faisait à plusieurs. « Ne t’inquiète pas, je n’ai pas l’intention de te tuer. Et si tu ne souhaites pas me revoir, évites de me suivre en pleine nuit. » Elle disait en même temps qu’elle voulait se venger et en même temps ne plus les voir, c’était contradictoire. Octavia finit sa phrase comme une menace. Alors, pour conclure, Joshua se rapprocha d’elle et lui sourit à pleines dents. « L’entreprise appartient à notre père, tant que celui-ci sera en vie. » Elle voulait des menaces, elle était servie.

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Le Gambit du Sorcier

Feat Joshua Nott

A bas les masques.
La colère affluait dans tout son être pour, lui semblait-il, la toute première fois de sa vie. Un déferlement de rage mal contenu l’envahissait au point de modeler les traits de son visage, le marbre se liquéfiait, sa blessure s’exposait.
La jubilation nettement visible de Josh meurtrissait sa fierté plus qu’elle ne l’imaginait, embrouillant son esprit coupé des mots qui trouvaient difficilement le chemin jusqu’à sa bouche.
La seule leçon qu’elle retenait, était son erreur flagrante d’avoir cru que rester en retrait la protégeait.
– J’ai été si stupide de croire en vous, se lamenta-t-elle à voix haute, son timbre oscillant à cause d’une haine mal maitrisée.
Mais, on ne l’y reprendra pas à deux fois.
– Epargne-moi tes sarcasmes, Joshua Nott, même le serpent le plus venimeux possède des prédateurs.
Elle se rapprocha de lui, le regardant droit dans les yeux.
– Souvent, ce sont de tout petits et insoupçonnables mammifères. Celui qui paraîtrait bien mignon à côté d’une langue fourchue, d’une peau écailleuse et d’un sang froid.
Elle s’imagina se transformer en ce tout petit renard qui vivait désormais au fond d’elle-même. En une fraction de seconde, deux temps trois mouvements, elle bondirait pour lui trancher le jarret et, une fois à terre, le saisirait à la gorge. Cette action était inenvisageable, son animagi constituait une subtilité à utiliser en cas de nécessité, un dernier recours gardé de côté.
Octavia pencha la tête, le bleu de ses yeux transformé en un océan déchaîné. La nuit était d’un noir parfait, ce soir-là. La boîte de métal trônait toujours à ses pieds, assez épaisse pour n’émettre aucun son, suffisamment ensorcelée pour le laisser respirer. L’assurance d’Octavia défaillait, elle craignait de ne pas y arriver. L’atout dans sa manche était une carte coincée dans son ourlet.
Peut-être fallait-il attaquer directement avec un plus gros coup. Tirer avantage de ses erreurs passées, ne plus sous-estimer la cruauté de son frère et lui répondre à la hauteur de son ambition démesurée. Cela lui faisait mal de se rabaisser au même comportement. Elle n’avait pas envie de le faire mais elle comprenait, en parallèle, qu’elle n’avait pas le choix.
Le choix. Elle n’avait jamais eu le choix. Destinée à être une sang-pur, destinée d’entrer dans la maison des serpentards, calquer son comportement sur celui qu’on attendait d’elle. Toute son existence n’avait été qu’une immense mascarade. Il y a un an, elle empruntait la voie de la liberté avec force et courage, et elle refusait qu’on lui barra le chemin.
Alors, elle fit un nouveau pas, si bien que leur visage se frôlèrent presque. Les yeux dans les yeux, le nez levé et le nez baissé. D’une voix lente et mieux maîtrisée, elle siffla :
– Je me répète, n’oublie pas que Papa est le propriétaire de l’entreprise, il revient à lui seul de décider de son successeur. Vois-tu, il n’y a pas si longtemps, il m’a fait une proposition des plus surprenantes. Je devrais te remercier, Joshua, car comme tu le sais je suis en septième année, j’atteindrais ma majorité dans moins d’un mois et on me demande de choisir mon orientation. Grâce à toi et Mamma, je sais désormais quelle filière je vais choisir. Je vais accepter de reprendre l’entreprise.

La guerre des Nott

ft. Octavia

Joshua en voulait à la terre entière. Au fond de lui, il haïssait toutes ces personnes qui le faisaient se ressentir si seul. Pour Octavia, elle ne comprenait pas ce qu’il lui était passé par la tête. Le Nott avait conscience que sa sœur ne savait pas comment elle l’avait blessé. Peut-être que July avait un but précis dans sa vie et Joshua voulait se persuader qu’il en était de même pour lui. La vérité était qu’il frappait au hasard pour blesser. Depuis sa première mission qui avait tourné à la catastrophe, Joshua était en train de changer. Ou alors de se révéler. Sa violence s’était accrue, il faisait des crises de colères d’une violence inouïe. Pour lui, ce n’était que les répercutions d’un petit traumatisme qui allait très vite passer. Et pourtant. Octavia avait payé pour ses souffrances. De plus, c’était dans ces moments de sadisme, Joshua se sentait vivre. Il n’était pas une coquille vide.

« Tu n’as jamais cru en nous, Octavia, ne fait pas la victime. J’ai peut-être répondu avec ardeur, mais c’est toi qui as tiré la première. » Son ton était désinvolte. Tout cela n’était qu’un petit jeu pour lui. Il ne mesurait en aucun cas la gravité de la situation.

Quand Octavia s’approcha, le jeune homme n’oscilla pas. Il la fixa toujours avec un flegme qui lui était propre. « Tu sous-entends quoi ? » Il était légèrement outré, il faut le dire. « Les serpents ne seraient-ils pas beaux ? Ce sont des êtres magnifiques. Tu les rejettes parce qu’ils sont différents, c'est tout. La société et ces stupides religions ont fait des serpents leur bouc émissaire. Pourquoi ? Je n’en sais rien. C'est des animaux magnifiques, autant physiquement que mentalement. Tu connais des serpents pour dire ainsi qu’ils sont aussi vicieux ? Sache que chaque serpent est différent et possède une personnalité tout aussi complexe que la tienne, voir plus. » Ses amis serpents de Poudlard n’étaient pas loin. Joshua ne pouvait pas les laisser se faire calomnier ainsi sans rien dire. « Tu peux t’en prendre à moi si tu le souhaites, mais laisse ces pauvres êtres en dehors de tout ça. Ils souffrent déjà assez de leurs différences pour que tu viennes les agresser en t’appuyant sur des idées à la limite du racisme. » Franchement, Joshua n’aurait jamais imaginé que sa sœur fût aussi étroite d’esprit.

Le Serpentard sentait la colère d’Ocatvia. Pour autant, il prenait ça à la légère. Pour lui, ce n’était qu’une petite dispute entre frère et sœur. Comme un gamin de dix ans qui venait de voler le jouet de sa sœur. Mais la cadette devenait de plus en plus menaçante. Joshua essaya de l’avertir : il n’hésiterait pas à tuer leur père. Pourtant, elle n’avait pas l’air de le prendre au sérieux. Il y avait tellement de personnes qui le sous-estimaient. Ils ne savaient pas l’étendue de sa folie. Parfois, cela avait le don de mettre Joshua hors de lui. Cependant, la vérité fut qu’il avait simplement bien réussi à cacher son jeu.

Alors comme ça, Pétrus voulait qu’Octavia reprenne l’entreprise. Joshua n’était pas vraiment étonné, c’était un coup, on ne peut plus prévisible. Joshua fixa sa sœur dans les yeux alors qu’elle lui promettait de reprendre l’entreprise et l’évidence lui sauta aux yeux : elle était comme July. Ce regard flamboyant était le même que celui qu’avait eu leur mère après le divorce. Ses menaces, ses mots. Tout correspondait à July. Alors que Joshua aurait dû s’énerver, il ressentit pour sa sœur un sentiment qu’il n’avait jamais éprouvé, mais qu’il n’arrivait pas pour autant à identifier. « Tu es comme mère. » Il souriait tendrement. Le jeune homme n’avait pas l’intention de lui laisser l’entreprise. Mais si leur attaque poussait Octavia à faire des études sérieuses, si elle la poussait à prendre ses responsabilités en main, alors c’était une victoire. Joshua n’avait pas imaginé avoir autant réussi son coup. « Je ne dis pas ça pour t’embêter. Tu es son portrait craché, aussi physiquement que psychologiquement. Tu as la même réaction qu’elle a eue quand Pétrus lui a volé son entreprise. » Joshua s’éloigna un peu, n’aimant pas cette proximité. « Bravo Octavia, tu es devenue une Nott. Mieux encore, tu es devenue une Montmond. »

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Le Gambit du Sorcier

Feat Joshua Nott

La conversation tournait au ridicule. Assurément, Octavia n’avait primo, pas tiré la première - simplement pris une décision ne concernant qu’elle-même et que Mamma et Joshua décidèrent de prendre pour eux - mais qui plus était, elle se refusait de répondre aux sornettes concernant un prétendu racisme envers les serpents. Deuzio, d’après ses lectures, elles savaient les serpents incapables d’affection envers l’être humain, mais cela suffisait-il, au bout du compte, pour leur attribuer pareille réputation ? Après tout, l’humain affubla depuis la nuit des temps les adjectifs de rusés et roublards aux renards, tout ça parce que les traits de l’animal s’apparentait aux expressions de fourberies des humains. En un sens, Joshua avait peut-être raison. Avec ses comparaisons et métaphores, l’argument d’Octavia avait comme un goût de spécisme, mais elle se garda bien de l’avouer à son frère.
Cependant, elle nota dans un coin de son palais mental la passion avec laquelle Joshua défendait les serpents. Son instinct lui édictait qu’un jour prochain, il y aurait une faiblesse à exploiter.
Tout de même, cette “ différence”. Parlait-il vraiment des serpents en l’évoquant ou faisait-il une projection de lui-même à travers leur cas ?
Quoiqu’il en soit, la tension était à son comble et, pour couronner le tout, Joshua lui asséna le coup de grâce.
Son insulte l’année passée n’était que les prémisses. C’était bien peu par rapport à ce qu’il lui balança cette fois à la figure. Joshua lançait-il ça conscient que ça lui crèverait le cœur, les yeux et la cervelle, ou y aurait-il véritablement de l’eau dans le gaz entre Mamma et lui ?
Tu es comme Mère.
Octavia avait toujours détesté ce parlé ampoulé. Elle préférait la simplicité, c’était là la seule preuve d’affection qu’elle témoignait auprès de ses parents. Un papa et un mamma bien anglais, sans enrobage ni chichi, qui voulaient tout et ne rien dire.
Tu es comme Mère.
Certes, la ressemblance était frappante. Octavia héritait de la longue chevelure noir de geai de July et du bleu féroce de ses yeux. Que pouvait-on faire contre la génétique ? Mais du caractère, Octavia ne possédait rien. Mamma avait toujours été extrêmement ambitieuse, elle rêvait de fonder une famille depuis sa plus tendre enfance et pour cela, elle était prête à tout, tout ! Même à épouser un imbécile. Mais parfois, il ne faut pas prendre la stupidité à la légère. A contrario, Octavia se moquait bien d’avoir une place de choix dans la société, d’épouser un imbécile à qui elle pourrait tirer autant d'enfants qu’elle le voudrait. Elle ne désirait que la tranquillité d’esprit et la tranquillité, c’était faire ce qu’il lui plaisait.
Tu es comme Mère.
– C’est, c’est faux ! bredouilla-t-elle.
Mais déjà Joshua ne l’écoutait plus. Il connaissait la portée de ses mots et allait la laisser planté là avec son pieux dans le coeur et ses doutes, dans sa tête. Alors elle détourna les talons et s’en fut. Elle marcha longuement dans les couloirs pour chasser les mots de son esprit. Ceux-là ne devaient pas pénétrer son palais mental. Elle secoua sa tête comme un prunier, à s’en donner le tourni et la migraine. Malgré ses efforts pour oublier, Octavia devait admettre qu’elle avait désormais matière à réfléchir. Et une offensive à mener.