1997 - C’est l’année de ma naissance. Je suis venue au monde un 25 août, très précisément, dans la ville de Leipzig. Ça se situe dans l’est de l’Allemagne. Je dois mes beaux cheveux blonds à mes parents, et mes grands-parents encore avant eux… Dans ma famille, le goût n’est pas tellement à l’exotisme. Il ne faut pas faire de vague. Tout est carré et du genre conventionnel. Cette éducation, on la doit à notre père militaire, de sa profession. Une éducation relativement stricte, même si j’ai eu la chance de naître la dernière pour me souscrire à cette forme de dictature ! Cela même parce que j’étais l’unique fille à son papa, même si pour l’autre raison plus évidente, j’y reviendrai un peu plus tard…

Le jour de ma venue au monde, mes parents - Marius et Hanna - ne s’attendaient certainement pas à ce que ma banale existence ne se décline pour l’inattendue sorcière que je suis dès à présent… Ma famille est tout ce qui se fait de plus moldu. Mes frères, Hugo et Mathias, sont des moldus. J’ignore encore ce qui a fait de moi l’unique détentrice de ce « don »… ou de cette malédiction, comme se plait si bien à le répéter Oma Viola… Mais ce qui est pour le moins certain, c’est que ma véritable nature reste un sujet relativement sensible à table. Au mieux, on prétend ne rien savoir, ou ne rien comprendre. Au pire, le déni se révèle être une maladie tout aussi efficace que le sortilège d’amnésie… avec les inconvénients en moins !

2004 - J’étais alors âgée de 7 ans le jour de la première manifestation. Jusque là, ma petite vie tranquille était ce qui se faisait de plus banale au monde. Je n’étais qu’une enfant, en quête de sensations et de reconnaissance sociale… A ce moment-là, je cherchais éperdument à satisfaire les attentes des adultes et à me faire de nouveaux amis. Je m’efforçai constamment à montrer une bonne image de moi pour plaire au plus grand nombre. La satisfaction, dans le regard de mon père, avait un goût sucré et léger - que je pourrais sans doute comparer à de la barbe à papa - mais ce goût aujourd’hui amère, s’est estompé dès l’été de mes sept ans.

Ce jour-là, j’étais invitée avec mes frères et ma mère au goûter d’anniversaire organisé par les parents d’une camarade de classe. Une fille que je n’aimais même pas, mais passons. Alors que je m’amusais à courir dans le grand jardin, mon intérêt déjà présent pour les animaux me frappai en plein fouet, à la découverte du pauvre fox-terrier, resté cloitré à l’intérieur de la maison. Depuis la baie vitrée qui offrait une vue imprenable sur tout le séjour, je pus également repérer un somptueux gâteau attendre depuis l’îlot central de la cuisine ouverte. En sachant que ce gâteau était celui pour ma camarade, j’eus une pensée des plus absurdes au moment où il se mit à se mouvoir étrangement, au point de flotter dans les airs ! Une pensée telle que de vouloir offrir ma propre part de gâteau pour l’animal qui s’ennuyait à mourir… Du moins, je le supposais… Si bien que le gâteau flottant, aérien, décadent, se dirigea jusqu’à la bête qui jappa avec beaucoup d’euphorie. Prise d’un fou rire, mon amusement stoppa nette l’ascension du gâteau qui retomba dans un bruit sourd en plein sur le carrelage froid, juste devant le chien ! Par chance, personne ne fit très attention à la scène… Il n’y eut que moi et quelques enfants, pour le remarquer à cet instant précis. Malgré nos témoignages, personne ne nous cru… Ce qui fut une chance, même si les aveux auprès de mes grands-frères les inquiétèrent bien davantage…  La conséquence ? Le chien qui se voyait être le responsable tout désigné, fut renvoyé du domaine familial et placé dans un refuge pour animaux… Abandonné lâchement et stupidement pour une bêtise qu’il n’a même pas commis….

2005 - Je crois bien que ce genre de phénomènes se multiplièrent l’année d’après. Cette fois-ci, mes parents n’eurent d’autres choix que de prendre ces manifestations très au sérieux. Je continuais de faire léviter des objets sans réellement savoir comment ni pourquoi. Ces incidents à répétition conduisirent des sorciers expérimentés à venir frapper à notre porte afin de nous expliquer plus en détail ce qu’il m’arrivait. Avec la liste des potentiels témoins et suspects issus du voisinage, je ne réalisai pas à cette époque que par « faire le nécessaire » cela revenait à dire d’effacer la mémoire de tous ces pauvres gens ! Je ne pensais rien de tout ceci possible, jusqu’à ce qu’on m’explique ma nature de sorcière. J’étais donc bien différente, de ma famille. Exceptionnelle, selon eux. Et pourtant, malgré les louanges qui auraient pu - et auraient du - m’émerveiller comme jamais, je pus lire dans le regard de mes parents, de la crainte. Voir même, de la peur. Je n’étais pas juste, différente. J’étais devenue un sérieux problème.

2008-2009 - Je soulignais un peu plus haut le fait d’avoir exemptée de l’éducation stricte, familiale. L’autre raison vient bien du fait que durant l’année de mes 11 ans, je fus envoyé en Angleterre auprès d’une famille d’accueil. Une famille exclusivement faite de sorciers, comme moi. Ces dernières années durant, mes parents s’étaient efforcés à comprendre comment régissait le monde des sorciers et comment ils allaient devoir vivre avec, dans le plus grand des secrets. Informés par le choix des écoles susceptibles de me recueillir pour débuter ma formation, ma famille estima plus simple de me confier à des gens de « mon espèce » se dédouanisant complètement de mon éducation ! Depuis la nouvelle qui avait tout chamboulé, je n’étais plus cette petite fille chérie que l’on portait tant en estime. J’étais plutôt devenue une sorte de paria qu’il fallait à tout prix exiler, soit-disant pour mon bien. Oui, l’excuse semblait toute justifiée puisque c’était ce qu’il y avait de mieux pour moi. Etant née moldu, je ne fus pas conviée à rejoindre l’école la plus proche - à savoir Durmstrang - ce qui me laissai le choix entre Poudlard et Beauxbâtons. Même si je dois avouer avoir choisi Poudlard uniquement sur préférence vestimentaire ! J’avais en horreur les uniformes proposés par l’académie de Beauxbâtons.

Avec le recul, je ne regrette pas ce choix. Même si cette nouvelle civilisation et cette nouveau langue avaient de quoi me faire peur, je sentais enfin que j’allais appartenir à une famille capable de m’accepter telle que j’étais. Faute de m’exprimer dans un anglais sommaire - avec un accent qui semblait me faire défaut -  j’eus beaucoup de mal à me socialiser au cours de cette première année. Devenue solitaire à force d’effrayer tout le monde, mes appréhensions et ma trop grande fierté déjà ancrés ne me poussai pas non plus à aller vers les autres et à prodiguer plus d’efforts. J’avais conscience de mes lacunes mais je ne voulais pas trop les admettre. Demander de l’aide ou reconnaitre mes faiblesses revenaient à faire de moi, quelqu’un de non-méritant. Je ne voulais donner raison à personne. Je souhaitais juste progresser dans mon coin et apprendre par moi-même. Plus studieuse que la plupart des Serpentard, je n’eus pas vraiment de mal à me rapprocher en premier lieux de la maison bleue, dont les élèves les plus travailleurs qui me traitaient comme d’un égal. La gentillesse commune aux Poufsouffle fit que je ne rencontrais jamais aucun problème avec eux. Ils étaient tolérants et bienveillants. Il était donc facile de profiter d’eux à la moindre occasion. Quant aux idiots-suicidaires… je ne préfère pas me prononcer. Une petite part de moi jalousais peut-être de ne pas appartenir à la maison la plus populaire - sentant, celle ayant accueilli le célèbre Harry Potter - et je ne comprenais définitivement pas ce que l’on pouvait trouver aux élèves de la maison rouge ! Ils étaient bruyants, prétentieux et stupides. De vraies têtes à claques…

2010 - Petite anecdote que je dois glisser quelque part. C’est durant cette année que le cours dédié aux études des moldus débuta pour la toute première fois. Une véritable agonie où je me voyais criblée au peigne fin ! Et parce que j’étais le parfait exemple de sorcière pouvant témoigner toute la subtilité propre aux moldus, je fus contrainte au cours d’un devoir soit-disant éthique, d’apporter l’intégralité de mon arbre généalogique et de l’expliquer à la classe toute entière ! Plus grand moment de solitude de toute ma vie. Il s’avérait que mon arrière arrière grand-père n’était autre qu’un caporal-chef ayant servi sous le régime nazi lors de la seconde guerre mondiale ! Très franchement, c’est quelque chose que je me serais bien passée de découvrir.

2012 - L’année des BUSES. Une année très importante - peut-être la plus importante - depuis mon entrée à l’école de magie. Je ne passais pas beaucoup de temps avec le genre humain, ou plutôt sorcier. Je me focalisais vraiment sur mes études et le peu de temps de répit que je m’accordais, c’était lors de mes excursions en forêt ou aux alentours de château. J’aime toujours me balader seule, avec tout le nécessaire pour écrire et dessiner les choses qui me proccurent de la sérénité. On a du mal à comprendre mon intérêt pour les images statiques - pour ne pas dire les arts plastiques - je n’ai pas besoin de me justifier. J’aime et je fais ce qui me plais ! Ah… et cette année-là, mon Marley quitta ce monde. Mon chat roux était décédé à cause d’un crétin de joueur de Quidditch.

2014 - Ma septième et dernière année s’achevait enfin. Ce que j’ai pu ressentir ? De la délivrance !! Je me suis sentis si fière et accomplie. Même pire que ça, j’avais l’impression d’avoir des ailes et de pouvoir aller où je veux ! Ma vie de jeune adulte débutait dès maintenant.

2015-2017 - Les années universitaire où je poursuivis mes études en fac de magizoologie et botanique. Je dois avouer savourer bien plus mon quotidien qu’auparavant. Ces trois années ont défilé à une vitesse inespérée. Je n’ai strictement rien vu venir… Cette nouvelle vague de terreur qui préparait dans l’ombre depuis toutes ces années… ? Qui aurait bien pu le savoir ? Mis à part les concernés, eux-mêmes… Je ne m’étais pas attendue, une fois mon diplôme en poche, à devoir faire face à l’assaut des Mangemorts, ainsi qu’à leur grand retour ! Prise au dépourvue, sans savoir comment réagir, ni où me situer… Cette guerre n’est pas la mienne, je le sais au plus profond de moi. Et pourtant je me sens indirectement impliquée. Je ne tiens cependant pas à en faire parti.

2018-2020 - C’est le chaos et j’avoue ressentir de l’anxiété pour ma famille. Avec cette guerre qui oppose l’Ordre et les Mangemorts, ce sont les moldus qui trinquent le plus… Je me satisfait néanmoins de les savoir loin de Londres et de tout ce tumulte. Avec autant de détachement que possible, je veille à ne pas prendre de parti et à agir en parfait caméléon. Par lâcheté ? Par intérêt, plutôt. J’en viens presque à étouffer ma nature de sorcière pour ne pas être impliquée. Toute ma vie, on a de cesse de vouloir me mettre dans une case, mais je ne laisserai personne décider pour moi ! La facilité m’a conduite à me tourner du côté des moldus et à me faire presque passer pour l’un d’eux. Avec un job des plus quelconques, dans un quartier des plus quelconques, j’assure mes arrières. Je sais que je n’ai pas le dessus en tant que sorcière, mais auprès des moldus, je ne crains rien. J’aurais toujours cette longueur d’avance qui facilite mes échanges et mes interactions sociales. Alors oui, la mort du grand Potter a été un choc. Mais cela ne fait que prouver une loi indéniable ; la roue tourne. Et faute d’avoir littéralement le cul entre deux chaises, j’attends patiemment l’annonce du grand vainqueur. Le Blood Circle gagne de plus en plus de crédit. Je suis plutôt bien placée pour savoir qu’il ne faut jamais sous-estimer l’humanité et les prouesses technologiques. Mais si cela devait vraiment arriver, dois-je vraiment m’attendre à vivre des jours heureux ?