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Les moldus et élèves de Poudlard du forum se sentent cruellement seuls au milieu de tous ces sorciers adultes,
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Abigail MacFusty
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Lun 10 Jan - 21:22

Février 2021

Je terminais mon trait d’eyeliner avant de me redresser et de me fixer dans le miroir. Il était rare que je m’apprête de la sorte, mais aujourd’hui était un jour spécial, avec une personne spéciale. Surtout, quand bien même nous ne nous étions pas disputés, je me sentais un peu angoissée de le revoir, et davantage pour les raisons qui me poussaient à sortir aujourd’hui. Je devais l’avouer, j’avais un peu la boule au ventre, de peur, d’angoisse, de stress, d’impatience, de joie, de bonheur… c’était un mélange avec lequel j’avais rarement réussi à composer correctement, moi qui étais étrangère à bien des aléas que la vie pouvait m’offrir.
Néanmoins, je tenais vraiment à vivre cette journée, et si l’italien se déroberait à la dernière minute, ce dont je m’étais préparée et je dont je ne lui tiendrais pas rancune, alors j’appellerais Rory ou ma cousine. J’avais néanmoins pensé à lui, car il était un ami cher à mon cœur, nous avions vécu ensemble des choses intenses, à deux, mais tout en étant séparés. Il n’y avait toujours eu que des sentiments platoniques entre nous malgré nos nombreuses parties de jambes en l’air… mais je devais avouer que la nuit que nous avions passée chez moi m’avait beaucoup remuée, et sa plaisanterie d’autant plus. Nous deux en couple. Quelle solution à nos problèmes aussi idiote qu’ingénieuse. À dire vrai, Luca aurait peut-être été le seul avec qui j’aurais pu envisager un avenir. Un avenir où Harper n’aurait pas eu sa place. Un avenir où je me serais reconstruite, lentement mais sûrement.

Je battais des paupières frénétiquement et revenais à moi alors que la douceur du pelage d’Archibald s’entoura autour de mes chevilles. Le chaton turbulent était en demande d’affection en attendant sa maitresse. Je souriais, me baissais et le pris dans mes bras pour lui gratter affectueusement la tête en le gratifiant de petits baisers délicats.
Déposant mon maquillage, je sortais de la salle de bain en vérifiant que je n’avais rien oublié. Merlin que j’avais mal au ventre à cause des tensions accumulées… Heureusement, Harper m’avait donné son accord pour cette journée et elle savait que c’était aujourd’hui. C’était l’un de mes jours de congé (l’avantage d’être professeur d’une branche optionnelle), et j’avais décidé de faire une surprise à Luca. Enfin… une… « surprise ». Si ça se trouve, il allait juste me rire au nez et repartir dans un craquement de tranplanage.
C’était même sans doute ce qui allait arriver.
Oh bon sang j’avais le don de me fourrer dans des situations impossibles moi…
Inspirant un grand coup, je reposais Archibald sur le canapé et remettais en place le petit bracelet argenté et doré que je portais au poignet gauche. Une simple chainette sur laquelle courait un dragon asiatique (cadeau que m’avait offert Aiko il y a des années de cela).
À mon annuaire de la main droite trônait ma bague de fiançailles en or rouge, et son jumeau était orné de ma bague de pré mariage, celle un peu plus fantaisiste représentant un petit koala. Ce dernier restait d’ailleurs d’une douce couleur jaune, ce qui me soulageait, la météo allait rester clémente.

Arrangeant mes cheveux en y glissant deux barrettes sur chaque côté de ma tête, je réajustais délicatement la manche de mon chemisier turquoise orné de quelques charmantes broderies blanches. Attrapant un petit haut se mariant parfaitement avec mon chemisier, j’enfilais mes chaussures, attrapais mon manteau, mes gants et mon écharpe.
Sortant de l’appartement dans le quelle nous venions d’emménager avec ma fiancée, je marchais machinalement dans les couloirs de l’école pour en sortir. Marcher jusqu’à Pré-Au-Lard allait me faire le plus grand bien, j’avais besoin de m’aérer l’esprit avant de me rendre au Thestral Motors.
Luca ou pas Luca, je vivrais tout de même cette journée à fond, je l’avais décidé ainsi. Ça devait être une belle journée, pour une belle perspective d’avenir, je n’avais guère envie qu’on me gâche cet instant. Après tout, venir à l’improviste n’était pas ce qui était de plus judicieux, mais ça me paraissait être tout de même la meilleure solution, pour une meilleure surprise. Est-ce que ça fera plaisir, voilà là toute la question. J’avais foi en Luca pour qu’il ne soit pas buté au point de me faire des reproches, mais… qui sait ? Après tout, on ne connait jamais vraiment les gens, c’était une leçon difficile que m’avait apprise la vie, et il était clair qu’entre l’italien et moi, il y avait énormément de non-dits. Des terrains sur lesquels nous ne nous aventurions pas, par pur respect mutuel. Qui sait aussi ? Peut-être qu’il n’était pas au Thestral Motor ? Peut-être qu’il était au cinéma ou… en balade en moto ou… encore en vacances ?
Quoique j’en doutais fortement. S’il y avait un point commun entre Luca et moi, en dehors des tatouages, c’était notre attitude très carriériste. Il m’avait également dit autrefois que je pouvais venir le voir quand je le voulais sans forcément le prévenir. Je l’avais pris au mot.
Mais ces paroles me paraissaient si lointaines… était-ce encore d’actualité ?
Peut-être que je me posais simplement trop de questions ? Ou pas assez ?
Olala, mais pourquoi n’avais-je pas écouté ma première intuition, à savoir, aller toute seule comme une grande à mon rendez-vous d’aujourd’hui ? Quelle débile… j’avais vraiment le chic pour m’attirer des ennuis.
Déjà à Pré-Au-Lard, je procrastinais un peu le moment où j’allais transplaner, histoire de me donner un peu plus de courage, mais sentant qu’il me glissait entre les doigts, je n’attendais guère plus et disparaissais dans un craquement sonore.

Je réapparaissais juste à temps pour me baisser afin d’éviter un hibou dont j’avais perturbé la trajectoire de vol. Sortant de la ruelle, je me fondais dans la masse de gens qui se pressaient au Chemin de Traverse, et ne sachant pas jouer du coude, je me laissais malmener par la foule (j’étais habituée). Si petite et discrète petite sorcière dont personne ne faisait attention. Malgré tout, je m’autorisais à lever de temps en temps le nez pour observer les divers objets volants traverser les rues. J’appréciais les odeurs sucrées qui émanaient de certaines boutiques. J’admirais les livres dans certaines librairies, notamment pour les cours. Je souriais en voyant deux enfants si pressés de se rendre dans la boutique de farces et attrapes qu’ils me coupèrent la route et s’excusèrent avec empressement.
Enfin, je parvenais jusqu’à la devanture luxueuse du Thestral Motor.
Admirant la vitrine avant tout (et encore pour laisser couler du temps), je me décidais tant bien que mal à franchir le seuil de la porte.
Tout de suite frappée par l’odeur du cuir, de moteur et d’huile, je clignais des paupières. Ce n’était pas désagréable en soi, bien au contraire, je n’étais juste pas habituée, car ce n’était pas des parfums que je savourais au quotidien dans mes îles ou mes forêts.
M’avançant timidement jusqu’au comptoir, je m’adressais au premier employé venu, la tête enfoncée dans mes épaules.

- Je euh… excusez-moi ? Est-ce que, par hasard, monsieur Luca Zabini serait ici et disponible ?... Je… J’ai quelque chose à lui demander. Et avant qu’il ne me pose la question, j’ajoutais. C’est de la part d’Abigail MacFusty.

Sans jamais oser regarder l’employé dans les yeux, je me mordais nerveusement la lèvre inférieure et me balançait de droite à gauche sur mes pieds. Si j’avais pu me cacher dans un trou de souris, je l’aurais fait.
Aller aller, n’ai-je pas dit que ce serait une belle journée aujourd’hui ? On y croit.
Oui, mais… mais si Luca décidait de me manger ?
Comment ça j’étais irrationnelle ? Oui, et alors ?


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LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse

L’année 2021 a débuté comme 2020 s’est terminée. Dans la drogue. Et dans l’alcool. Le passage à la nouvelle année n’a pas vraiment amené Luca à se dire qu’il fallait qu’il prenne de bonnes résolutions. Il le sait bien, prendre de « bonnes résolutions » est inutile si l’on considère qu’on n’a pas tenu celles des années précédentes. Arrêter la drogue faisait pourtant partie de celle de 2020 et aussi celle de 2019 d’ailleurs. Luca sait que désormais, une cure de désintoxication est illusoire et qu’il ne pourra jamais totalement s’en sevrer. Il y a pourtant bel et bien eu une période d’accalmie mais depuis que les Zabini sont rentrés d’Italie en novembre, Luca a replongé bien plus fort, bien plus durement. La dose par jour est désormais nécessaire, voire plusieurs si la journée est rude et Luca le sait bien, il y a plusieurs raisons à cela mais il n’a envie de penser à aucune d’entre elles alors qu’il est en train de plancher sur de la paperasse administrative qui ne l’intéresse absolument pas. Luca se frotte les yeux, perdant parfois le sens de tout cela.

Ayant comme une envie de se reconnecter à la réalité de terrain, il quitte son bureau et se rend dans l’atelier, cherchant sa sœur des yeux mais elle ne semble pas présente. Toutefois, un autre de ses employés est là et non des moindres. Khris. Luca l'a toujours apprécié, mais il est en train de jurer sur l’une des bécanes récalcitrantes lorsque l'italien s’approche de lui : « Besoin d’un coup de main ? » A en croire le bordel qui règne sur son établi et tout autour de la moto, la panne semble coriace. Remontant ses manches, Luca se penche vers la moto et ils travaillent sur celle-ci pendant plusieurs dizaines de minutes, le temps filant sans qu'il ne s'en rende compte. Luca, plongé dans la compréhension de ce qui coince, n’entendant pas Alessia l’appeler. « Luca. » dit Khris pour l’interpeller. Lui montrant du menton Alessia qui patiente devant la porte de l’atelier, Luca demande à sa cousine dans leur langue natale : «Qu’est-ce qu’il y a ? » Alessia hausse les épaules et répond également en italien : « Une personne te demande au magasin. Elle a l’air bizarre. » Luca quitte sa cousine des yeux et se reconcentre sur la moto tout en disant : « Tu sauras très bien la conseiller. Si elle t’emmerde, tu sais quoi faire. » Il lui renvoie la balle oui. Clairement. Il est bien ici, les mains pleines de cambouis, l’odeur de l’huile de moteur emplissant ses narines, lui donnant l’impression de revenir des années en arrière. L’impression d’être en Italie, l’impression d’être encore simplement le fils de et non plus le dirigeant de. Même si Luca a appris à aimer diriger, et Merlin sait qu’il apprécie qu’on l’écoute et qu’on lui obéisse, détestant qu’on aille à l’encontre de ce qu’il a décidé, il n’empêche qu’il nécessite de temps en temps des expériences régressives où il reprend le rôle d’un simple mécano. « Elle a dit s’appeler Abigail MacFusty. » Luca lève à nouveau les yeux vers Alessia et fronce les sourcils. Abi ? Ici ? Elle n’est jamais venue au Thestral Motor. Ni même au White Thestral. Abi bizarre ? Pourquoi la jeune femme serait bizarre ?

Craignant qu’il ne lui soit arrivé quelque chose, Luca se redresse et attrape un chiffon pour tenter d’ôter les traces de cambouis sur ses mains. « Je t’abandonne mon vieux. » dit-il à Khris avant de se diriger vers la boutique, traversant rapidement l’atelier pour rejoindre son amie. Luca ne l’a pas vu depuis un peu plus d’un mois. Et lorsqu’il l’a vu, il n’était pas vraiment dans son état normal, l’ébriété l’ayant gagné et l’ayant déstabilisé à tel point qu’elle avait fait venir Théodora. Luca l’avait détesté pour ça sur le moment. Mais pour autant, il ne lui en voulait pas, comprenant assez aisément les raisons qui l’ont poussées à prendre cette décision pour le moins radicale. Elle est la seule personne à véritablement comprendre ce que Luca peut bien ressentir pour sa comptable. Bien entendu, Anjelica a vu les signes, elle a compris elle aussi mais son inimité envers Théodora rendait les choses plus ardues, plus difficiles. Quoi qu’il en soit, ils ne sont pas revus depuis la tanière de Jack la Ripaille bien qu’ils se soient fêtés la bonne année et qu’ils se soient écrits pendant ce laps de temps. Abigail avait repris son enseignement à Poudlard et avait même emménagé avec Harper selon ses dernières lettres. Une bonne chose lol. Luca fera semblant d’en être ravi. Luca arrive à la hauteur d’Abigail et la dévisage des yeux un instant. Elle semble différente. Ce maquillage, cette tenue. Elle est très jolie. Elle n’a pas l’air « bizarre » physiquement du moins même si elle semble décontenancée de le voir arriver vers elle à cette vitesse, son chiffon toujours dans les mains. « Stai bene Abi ? » demande-t-il sans se rendre compte qu’il a parlé en italien. Se reprenant en anglais, il dit : « Qu’est-ce que tu fais là ? » Ce sont les premiers mots qui lui viennent à l’esprit. La voir ici n’est pas habituel et il s’attend au pire, surtout qu’elle ne l’a pas prévenu de son arrivée, ni même qu’elle comptait passer sur le chemin de traverse, auquel cas ils auraient pu se rejoindre ailleurs qu’ici. Luca ne sait pas comment prendre le fait qu’elle vienne sur son lieu de travail ; surtout qu’il se souvient lui avoir dit qu’elle pouvait passer quand elle le souhaitait lors de leur première rencontre. Mais maintenant qu’elle est là, voir Abigail au milieu des motos neuves, rutilantes et étincelantes lui fait vraiment une impression étrange, comme si, malgré elle, elle rentrait dans l’univers de la Cosa Nostra. Monde qu’il s’est toujours évertué à lui cacher.
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Aussi loin que j'me souvienne

Nos plus belles années, on était ensemble

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Dim 16 Jan - 15:28

Février 2021

Patientant tant bien que mal à la réception alors que l’employée s’en était allée à l’arrière, sans doute dans l’atelier, je ne pouvais m’empêcher d’inspirer profondément dans l’espoir de retrouver un tant soit peu de calme. Dans le fond, j’avais du mal à savoir pourquoi je me sentais si nerveuse. Était-ce parce que j’allais revoir Luca en étant tout à fait sobre et sans avoir envie de me jeter sur lui pour lui faire l’amour, ou était-ce parce qu’aujourd’hui j’avais l’un de ces rendez-vous qui risquaient de changer ma vie à tout jamais ? Diable je n’arrivais pas à mettre de l’ordre dans mes pensées si confuses, et j’avais beau essayer tout ce que je faisais d’ordinaire pour calmer mes angoisses, méditation, me vider l’esprit, penser à autre chose, m’intéresser à la moto rouge qui trônait devant moi, rutilante, rien à faire, tout revenait au galop.
Je ne pris pas garde au temps qui s’écoulait durant lequel je restais seule à faire les cent pas entre les diverses motos appartenant à mon ami. D’ailleurs, pouvais-je vraiment le qualifier d’ami ? C’était certain que j’appréciais Luca, de manière différente que Rory, certes, mais je savais aussi qu’il me cachait beaucoup de choses, comme moi. Alors, certes, tout en gardant et en respectant le jardin secret de chacun, pouvait-on néanmoins se considérer comme des amis lorsqu’un fossé nous séparait ? Je l’ignorais à dire vrai, et dans le fond, je n’étais pas la mieux placée pour pouvoir donner mon avis puisque j’avais connu trop peu de relation sociale dans ma vie.

Ce que je savais en revanche, c’était que je tenais véritablement à l’italien, et que sa perte me mettrait sans nul doute à terre. Quand bien même je réussirais à me relever (car j’avais Harper et, car j’avais perdu définitivement mon frère), il était certain que ça laisserait un vide profond en moi. C’était étrange, en prenant de la hauteur, de considérer à quel point quelqu’un pouvait prendre de la place dans nos vies. Après tout, ça ne faisait même pas un an que nous nous connaissions avec Luca. Ça ne faisait pas un an que nous nous étions rencontrés dans ce bar pour terminer par s’explorer de manière plus sportive et intime. En vérité, Luca et moi avions franchi une limite que nous n’avions, de base, pas eu envie de dépasser. Celle de l’intimité émotionnelle.
Cette nuit que nous avions passé chez moi, à Soay, à nous conter nos déboires amoureux avait marqué un tournant drastique dans notre relation. La fin de merveilleuses parties de jambes en l’air, mais le début d’une compassion commune, d’une entraide davantage forte et scellée entre nous, moins tacite. Car oui, il ne faisait aucun doute que durant un temps, nous avions été la canne de l’autre. J’avais aidé Luca en l’accueillant dans mes bras, quand bien même j’ignorais pour quoi je l’avais soutenu. Lui, m’avait permise de me sentir vivante, aimée et appréciée alors que je perdais totalement foi en l’humanité et en la vie, surtout en période estivale. Il m’avait permis, le temps de quelques nuits, d’oublier celle que j’aimais éperdument et que j’avais totalement abandonnée de pouvoir retrouver.
Dans un sens, si aujourd’hui Harper et moi étions à nouveau en couple, c’était aussi en partie grâce à Luca. Par cette soirée à Poudlard où nous avions tous les deux clairement poussé Harper et Théodora à bout pour parvenir à nos fins. Ça avait fonctionné pour moi, bien mieux que prévu d’ailleurs. Hélas, il ne pouvait pas en dire autant, et quand bien même je pouvais comprendre Théodora, car nous nous ressemblions beaucoup, j’étais aussi peinée de leur situation.
Mais ce n’était pas à moi d’agir pour eux malheureusement. J’en avais peut-être même déjà trop fait durant cette soirée à l’école.
Voyant l’italien accourir auprès de moi, un chiffon imbibé de cambouis entre les mains, je devinais sans mal que je l’avais dérangé. Aïe… un mauvais point pour Abigail. Un premier d’une longue liste sûrement.
Toutefois, lorsqu’il s’adressa vivement à moi en italien, je ne pus m’empêcher de lui sourire avec douceur et amusement avant de lui répondre en gaélique écossais, simplement pour marquer le coup et le taquiner.

- Tha mi gu math agus thusa ?

Je ne comprenais pas un mot d’italien, néanmoins j’étais intelligente et je pensais avoir deviné ce qu’il m’avait demandé.
Considérant le sorcier devant moi, j’osais soutenir son regard alors qu’il me reluquait. Sans doute était-il surpris de me voir ainsi apprêtée, pourtant, j’avais mes moments où j’appréciais prendre soin de moi, quand bien même ces moments étaient rares, surtout qu’avec lui, je n’avais jamais trop pris le temps de le faire du temps où nous nous fréquentions. Après tout, je n’avais jamais cherché à le séduire, et j’avais eu la prétention de croire qu’il ne s’intéressait pas à moi uniquement pour mon apparence.
Me mordant la lèvre inférieure en le voyant se frotter les mains dans son chiffon, je baissais les yeux et bredouillais tant bien que mal.

- Je euh… je passais dans le coin alors je… pensais venir pour prendre de tes nouvelles et voir comment tu vas puisque ça… ça fait un petit moment qu’on ne s’est plus pas croisés… J’osais relever un regard timide sur lui avant d’ajouter. Je… me suis dit que nous pourrions passer un peu de temps ensemble aujourd’hui si ça te dit ?

Trépignant sur mes deux pieds, je peinais visiblement à tenir en place. Quelle rude épreuve que de dire les choses aux gens avec des phrases encensées. Je n’étais pas faite pour ça, véritablement pas, je ne savais pas comment m’y prendre pour faire les choses bien, moi petite sorcière handicapée socialement. Soit je tournais autour du pot durant des heures, soit je disais les choses si franchement que je déstabilisais mes interlocuteurs jusqu’à parvenir même à les vexer alors que ce n’était pas mon intention. Il m’avait bien fallu une forte fièvre pour demander Harper en mariage sans ressentir autant d’angoisse et de stress (et surtout pour le faire sous la douche, au moment le plus inopportun). Levant les mains devant moi, je me mis à jouer nerveusement avec mes deux bagues. Ainsi, je ressemblais à une petite enfant qui craignait de faire une bêtise et qui cherchait à s’expliquer tant bien que mal, le tout accentué par mes traits qui refusaient de vieillir, me donnant toujours une dizaine d’années de moins que mon âge véritable.
Fermant les yeux, j’essayais de rassembler tant bien que mal mon courage.

- Tu… me manques en fait, alors je me suis dit qu’on pourrait aller se balader ? …

Nop, toujours pas Abi, essaie encore. Quoique j’avais dit une vérité. Luca me manquait véritablement. Voilà longtemps que nous ne nous étions pas vraiment revus, et passer du temps avec lui me manquait. Les pauses que nous avions eu coutume de nous accorder ensemble me manquaient. Voilà pourquoi, aujourd’hui, pour mon rendez-vous de tout à l’heure, j’avais eu envie que ce soit Luca qui m’accompagne, et non pas Aiko ou Rory. De plus, au risque de profondément me vexer et me faire perdre définitivement le peu de confiance que j’avais en moi, je savais que Luca aurait la franchise de me donner son avis sans détour, tandis que Aiko et Rory auraient été davantage délicats et polis. Ce n’était pas ce que je recherchais. Aujourd’hui, j’avais besoin de quelqu’un qui pouvait m’aider avec sincérité tout en nous amusant.
Mais soudainement, ma timidité et ma crainte de déranger les autres revinrent au grand galop. Notre dernière rencontre au bar d’Arondie avait été un peu étrange, et j’étais restée là-dessus. J’étais terrifiée par le fait de le perdre, et quand bien même au début j’avais trouvé une excellente idée de l’inviter, à présent, j’étais pleine de doute. Et si je le dérangeais plus qu’autre chose ? Et si je lui faisais profondément chier en fait ? Encore une fois, je me mordais la lèvre avant de détourner le regard et de remuer nerveusement les épaules.

- M… mais laisse tomber, je vois que tu es occupé. C.. c’est pas grave, t’as sûrement mieux à faire… Désolée, je ne voulais pas te déranger. Je lui jetais un rapide coup d’œil. Je suis contente de voir que tu sembles aller bien.

Oui, sembler seulement, car je savais à quel point Luca était un roc pour cacher véritablement ce qu’il ressentait. Cependant, présentement les faits étaient là : il n’avait pas trop les yeux rouges (j’avais vu pire), il ne sentait pas la vinasse et la tenue de ses épaules semblait détendue, sans doute par son activité avec les motos. Je ne pouvais pas lui retirer ça.
Timidement, j’osais lui adresser un sourire, hésitante alors à rebrousser chemin et à le saluer pour le laisser retourner vaquer à ses activités… Oui, mais… oui, mais c’était lui que je souhaitais avoir à mes côtés tout à l’heure. Par Merlin, pourquoi ne pouvait-il pas être légilimens et lire dans mes pensées, franchement, ce serait bien plus simple merde.



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Jeu 27 Jan - 19:12

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LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse

Alors que Luca quitte l’atelier à la hâte, rejoignant la boutique pour retrouver Abigail, il songe à leur dernière rencontre. Cela fait maintenant quelques semaines qu’il ne l’a pas revu et cela fait plusieurs mois qu’il ne s’est pas retrouvé seul avec elle. Leurs emplois du temps respectifs ont été bien remplis après la venue de Luca aux Iles Hébrides. Le voyage en Italie et la fin d’année avaient rendu Luca très nerveux ; il avait dû s’occuper de Rose qui avait trouvé refuge au garage pendant de nombreux jours. Occasionnant des sentiments ambivalents chez Luca, il avait préféré éviter Abi sur cette période. Non pas parce qu’il ne souhaitait pas la voir, plutôt parce qu’il savait qu’elle saurait lire en lui et déceler que quelque chose n’allait pas. Mais il ne pouvait rien dire, il ne pouvait rien divulguer de la raison de son inquiétude, les problèmes de Rose ne regardant qu’elle et la Cosa Nostra. Se contentant d’une relation épistolaire, Luca et Abi avaient néanmoins échangé quelques courriers depuis. Abigail semblant elle-même bien prise avec ses enseignements à Poudlard, Luca n’avait pas culpabilisé outre mesure de ne pas lui proposer de se voir plus tôt. C’est aussi ce qui lui plaisait dans leur relation, Luca ne ressent pas le besoin de la voir toutes les semaines pour lui témoigner son affection ; il s’imagine qu’elle le sait. Après tout, Abi a pris une place que Luca n’aurait pu imaginer dans sa vie, venant balayer ses certitudes et ses principes amicaux. Quelqu’un qui n’a rien à voir avec la Cosa Nostra, quelqu’un de plus neutre, de plus « normal », de plus « léger » même si ce mot ne rend pas vraiment honneur à la complexité de la personnalité de la jeune femme.

Pour autant, le caractère plutôt prévisible d’Abi avait offert à Luca une certaine stabilité dans le lien qu’ils entretiennent. Alors qu’elle débarque au garage sans prévenir entraîne chez le jeune italien une certaine incompréhension ainsi qu’une angoisse latente. Voulant savoir si tout va bien, il se précipite à son encontre et alors qu’il arrive à sa hauteur, il est soulagé de voir qu’elle semble aller bien. Physiquement du moins. Légèrement surpris de son « accoutrement », Luca ne s’en formalise pas et se contente d’aller droit au but, lui demandant si elle va bien et ce qu’elle fait là. Il secoue la tête doucement, amusé, lorsqu’elle lui répond en gaélique. Au moins elle n’a pas perdu son sens de l’humour. Il ne comprend pas un traitre mot de ce qu’elle vient de dire mais il imagine qu’elle a dû lui demander s’il allait bien en retour. À sa seconde question pourtant, elle semble plus nerveuse, moins sûre d’elle et bafouille quelques mots inhabituels. Luca fronce les sourcils sans oser dire quoi que ce soit. Elle débarque soudainement pour lui dire ça ? Le cœur de l’italien ne fait qu’un tour et il se dit que quelque chose cloche. Pourquoi demande-t-elle ainsi à passer du temps avec lui ? Un problème avec Harper ? Elle ne veut plus l’épouser ? Faisant des liens immédiatement dans sa tête, Luca ne peut s’empêcher de jeter un regard sur sa main gauche où sa bague de fiançailles se trouve toujours et il soupire légèrement, soulagé. Au moins, elle les porte toujours. Pour autant, Abigail semble tendue, presque gênée d’être ici ? Luca se demande si c’est parce qu’ils n’ont pas l’habitude de se voir dans un lien si intime mais il balaie d’un revers de main cette idée ; après tout, elle l’avait invité à Soay, dans son antre, elle lui avait montré les dragons, elle lui avait ouvert la porte de chez elle ; qu’est-ce qui peut être plus intime que cela ?

Luca se contente donc de la fixer, tentant de comprendre où elle veut en venir jusqu’à ce qu’elle lui dise qu’il lui manquait. Luca plisse à nouveau des yeux et c’est décontenancé qu’il l’entend rajouter qu’elle ne voulait pas déranger. « Abi, qu’est-ce que tu me fais là ? Qu’est-ce que tu racontes ? Tu ne me déranges jamais. » Il ne lui laisse pas le temps de répliquer. Un pli soucieux s’est formé sur son front alors qu’il se tourne vers Alessia. « Alessia, je prends une pause. » Sa cousine acquiesce et avant que Luca n’ait le temps d’ajouter quelque chose, Alessia demande : « J’annule ton rendez-vous comptabilité ? » Luca hausse un sourcil et dit : « Si je ne suis pas rentré à dix-huit heures, oui. Préviens Théodora. » Théodora comprendra. Ou non. Peu importe pour l’instant. Le cœur battant, Luca se tourne vers Abi : « Faut que je me change. Viens. » Il l’entraine vers les escaliers, passant devant les bureaux respectifs de Luca et Théodora avant de montrer à l’étage. Vivre au-dessus du garage a toujours semblé très pratique pour Luca mais il n’a pas pour habitude de laisser entrer des femmes dans celui-ci mais Abi ayant daignée faire ce pas pour lui, il souhaite lui rendre la pareille. Par ailleurs, si Luca agit différemment de d’habitude, c’est aussi parce qu’il s’inquiète pour elle, ne comprenant pas pourquoi elle s’est déplacée jusqu’ici pour lui parler sans le prévenir. Il se questionne, se disant que quelque chose doit lui trotter dans la tête, quelque chose doit la tracasser. Ils montent à l’étage et Luca pousse la porte de son loft-appartement. Une grande pièce de vie avec un lit au milieu. Il fait signe à Abi de s’installer sur une des chaises ou sur le canapé et dit : « Mets-toi à l’aise, j’arrive. » Abi aura tout le temps de découvrir son bordel ambiant, sa joyeuse désorganisation. L’appartement est en désordre, des vêtements se trouvant un peu partout dans la pièce, tandis que certaines pièces de moto sont outrageusement déposées à même le sol. Son carnet de croquis encore ouvert sur l’un des portraits de Théodora est posé négligemment sur la table basse du salon où se mêlent d’autres dessins, accompagné d’une boîte de fusains noirs. Une pile incroyable s’y dessine. Nombreux sont ceux qui dépeignent la jeune comptable encore et toujours. Il a bien sûr ceux représentant Anjelica et Tivoli, sa ville natale. En dessous, le visage de la jeune dragonologue attirera peut-être son attention, tout comme les traces discrètes de poudre blanche sur le bois. Entrer ici, c’est comme pénétrer encore plus loin dans l’intimité de Luca et il le sait, il lui offre cette place bien volontiers.

Luca se dirige dans la salle de bain et retire son tee-shirt tâché de cambouis et décide de passer rapidement sous la douche finalement, l’eau chaude achevant de nettoyer toute trace de graisse. Une fois propre, il noue une serviette autour de ses hanches avant de sortir de la salle de bain. Au passage, il ébouriffe les cheveux d’Abi en lui souriant avant de se diriger vers l’armoire. N’ayant aucune notion d’intimité, pas après ce qu’ils ont déjà vécu ensemble, Luca s’habille devant Abi sans la moindre gêne. Il jette son dévolu sur un jean et un col roulé gris, les températures se sont bien rafraichies. Attrapant sa veste, il dit : « Je suis prêt. Où veux-tu qu’on aille ? » Il lui tend la main, ne sachant pas si elle souhaite y aller à pied ou transplaner, lui laissant le choix du roi. La seule chose dont il est certain, c'est qu'elle est perturbée par quelque chose et Luca a très envie de savoir par quoi, car s'il peut l'aider, il le fera volontiers. Il ramène sa main contre lui en demandant : « Sauf si tu veux rester ici pour... parler ? » Luca se questionne et son inquiétude est grandissante en réalité. Il a envie de savoir maintenant et ne sait pas s’il pourra accepter de partir de son appartement sans qu’elle ne lui ait parlé. La situation est beaucoup trop inhabituelle pour cela.
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Ven 28 Jan - 16:23

Février 2021

J’étais nerveuse et fébrile devant Luca, ce qui n’était pour ainsi dire jamais arrivé jusqu’à aujourd’hui. En effet, nous avions eu l’habitude de nous retrouver pour passer du bon temps ensemble et non pas parler chiffons (littéralement ce qui risquait de se passer tout à l’heure). Tant bien que mal, j’essayais de lui faire passer le message, mais je bafouillais et je m’emmêlais les pinceaux. Si Luca avait été habitué à voir une Abigail plutôt sûre d’elle, ayant même assez confiance pour prendre les choses en main au point de devenir le capitaine de l’instant charnel, il découvrait présentement une tout autre facette de ma complexe personnalité.
J’étais recroquevillée sur moi-même, la tête dans les épaules comme une petite tortue, les doigts jouant les uns avec les autres, les jambes nerveuses qui me balançaient de droite à gauche.
Bien attentive aux réactions de mon interlocuteur, je devinais bien le pli soucieux qui se dessinait petit à petit sur son visage, jusqu’à capter son regard sur mes doigts, comme s’il vérifiait que je portais toujours bien mes bagues de fiançailles et de prémariée. Par Merlin, mon comportement pourrait-il à ce point le faire douter de ma relation avec Harper ?
Prenant soudainement conscience de la conséquence de ma timidité, je décidais de laisser l’italien tranquille, et alors que j’allais faire demi-tour, il prit la parole, m’interrompant dans mon élan. Ses propos me touchèrent énormément, ils m’étonnèrent même, car je n’avais pas conscience de la place que j’occupais chez Luca, pensant être simplement une connaissance de passage. Pour moi en revanche, Luca s’était rapidement hissé au rang d’amis alors que nous nous étions amusés tous les deux dans diverses chambres d’hôtel (et même ailleurs), et d’autant plus alors qu’il avait pénétré (huhu) dans ma sphère privée à Soay.
Ouvrant la bouche pour lui répondre, je la refermais bien vite alors qu’il se tourna vers, apparemment, Alessia, qui le questionna rapidement sur son rendez-vous comptabilité. Oh fuck, Théodora… elle allait véritablement me tuer celle-là. Mon sang ne fit qu’un tour et instantanément, ma peau devint blanche à l’instar d’un cadavre.

- Tu… tu seras de retour avant dix-huit heures, promis. Je… J’ai pas envie de mourir. Et je ne veux pas t'apporter d'ennuis.

Confessais-je, un peu confuse et vraiment ennuyée de prendre le précieux temps de l’italien de la sorte. Pourtant, ce fut sans résister que je suivais mon ami devant les escaliers. Jetant un œil devant les portes menant à d’autres pièces, je gardais pourtant des œillères devant mes iris. Je ne voulais pas paraître indiscrète, et je savais me tenir. J’étais venue ici à l’improviste, je chamboulais toute la journée de Luca, je n’allais pas non plus me mettre à fureter sur son lieu de travail, il ne fallait pas pousser le bouchon.
Ainsi, les prunelles sombres fixées dans le dos de mon ami à qui j’avais emboîté le pas, je fixais sa nuque et sa chevelure en me perdant dans mes pensées. Je songeais à nouveau à la nuit où j’étais allée le chercher chez Jack la Ripaille. Je me souvenais de son état et de ses propos, et je craignais véritablement de faire une connerie aujourd’hui… Oui, mais, voilà, je voulais aussi qu’il puisse comprendre et prendre confiance. Qu’il réalise qu’il n’avait plus besoin de se faire de soucis pour moi au sujet de ma vie sentimentale, que tout allait bien, qu’il pouvait se délester de ce poids que je lui avais donné sans le vouloir.
Mais allait-il comprendre mon intention de cette façon ?
Je craignais que non.
À nouveau, la vérité qui m’avait frappé au visage chez Rory me sauta à contre : personne n’était tout simplement heureux pour moi à propos de ce mariage. À croire que j’avais pactisé avec le diable lui-même, et à chaque fois que je voyais cette triste réalité, une boule se formait dans le creux de ma gorge.
Ma pauvre et bien-aimée Harper que tout le monde mettait sur l’autel sacrificiel de la justice alors qu’elle n’avait, dans le fond, fait que des maladresses.

Ce fut nerveuse que j’entrais dans le loft, comprenant immédiatement où je me trouvais. Après avoir fait deux pas, je m’arrêtais, interdite, observant autour de moi. Non pas que je sois choquée par le bazar environnant (que ce soit rangé m’aurait véritablement plus choquée), mais parce que je réalisais que j’étais chez Luca. Chez lui. Alors que, depuis bientôt un an, j’avais bien saisi qu’il ne voulait pas que je franchisse certaines frontières de son intimité, ce que j’avais toujours respecté.
Toujours abasourdie de me retrouver ici, je me contentais de hocher la tête en direction de mon ami alors qu’il prit rapidement congé pour aller dans la salle de bain. Ce ne fut que lorsque le bruissement de l’eau de sa douche s’éleva que j’osais enfin remuer un peu et bouger.
Enfin, un sourire doux se dessina sur mon visage alors que je contemplais avec une profonde bienveillance tout le capharnaüm environnant, y trouvant là une merveilleuse image de ce qu’il y avait à l’intérieur de la tête de l’italien. Un merdier et une confusion sans nom, avec des secrets (je regardais les traces de poudre blanche), mais aussi des merveilles (tandis que j’y voyais les dessins). Sans mal, je reconnaissais les traits de Théodora couchés sur les diverses feuilles de papier, et hoquetais de surprise en y voyant ma propre tête.
Par les esprits… je savais que Luca dessinait, il me l’avait dit, mais pourquoi diable était-il allé me dessiner moi ? Tenait-il à ce point à moi, ou était-ce plutôt une sorte de rituel vaudou ? À nouveau, je sentais une boule d’angoisse se former dans le creux de mon ventre avant que je ne considère la délicatesse des traits et la précision du crayon. J’étais sensible à l’art, et quand bien même mes portraits de gens se résumaient à des bonhommes bâtons, j’étais moi-même excellente dessinatrice pour les animaux fantastiques. Ainsi, en voyant les œuvres de Luca, je saisissais toute la sensibilité qu’il cachait si bien derrière son armure d’homme occupé, voire colérique.

Ne pouvant m’empêcher d’élargir à nouveau mon sourire, je me retournais en l’entendant sortir de la salle de bain. Je n’avais absolument pas pris mes aises, mais à l’évidence, j’avais fait le tour du propriétaire sans déranger le moindre millimètre de vie de Luca. Car j’étais ainsi faite de discrétion et de légèreté que je me refusais toujours de déranger quiconque, ne me considérant jamais assez importante pour quelqu’un et n’être donc rien d’autre qu’un courant d’air de passage dans la vie d’autrui.
Le considérant alors qu’il se tenait devant moi uniquement vêtu d’une serviette, je penchais légèrement la tête en arrière alors qu’il levait la main pour m’ébouriffer les cheveux. Non, mais ils s’étaient tous passé le mot ou quoi ? Certes, j’avais les traits d’une gamine, mais je n’en étais pas une, et ce geste que beaucoup de gens avaient à mon encontre m’exaspérait au plus haut point. Pourtant, à l’instant, m’énerver serait la pire des stratégies, alors je me contentais d’un claquement de langue avant d’attraper vivement la serviette qui entourait les hanches de Luca pour la lui faire tomber. Quand bien même il se serait dévêtu devant moi, j’avais préféré (encore une fois) prendre les devants pour lui rendre la taquinerie. Enroulant la serviette devant moi en la faisant pendre dans le vide, j’hésitais à lui claquer une fesse, sans pour autant m’exécuter.
Si je pouvais être une femme timide et réservée, je n’avais devant Luca aucune gêne alors que j’aurai pu en ressentir pour Rory face à la même situation. Mais avec l’italien, nous nous étions déjà vus de nombreuses fois en tenue d’Ève et d’Adam, une fois de plus ou de moins n’allait pas changer grand-chose. Ainsi, je me contentais de placer la serviette sur mon épaule, et sûrement qu’à l’époque j’aurai provoqué le jeune homme de venir la récupérer sans me déshabiller, pourtant aujourd’hui aucune lueur lubrique ne traversa mon regard. C’était derrière nous, quand bien même j’appréciais toujours observer le haut de son corps. Il n’y a pas de mal à se faire du bien, et cela m’inspirait à ce point qu’Harper allait sûrement prendre cher ce soir.
Quand mon ami fit volte-face pour enfin s’adresser à moi (et être enfin habillé), je sentais à nouveau la peur me gagner. Putain de merde. Mon cœur se mit à nouveau à cogner fortement dans ma poitrine et à nouveau je me courbais comme pour me faire plus petite que je ne l’étais déjà.

- Je… n’ai pas besoin de parler, en fait. Tout… Tout va très bien. Je t’assure.

Me rappelant son air soucieux et son regard sur mes mains quelques minutes plus tôt, je fermais un instant les paupières pour reprendre mes esprits. Un soupir rapide s’échappa d’entre mes lèvres avant que je ne plante mon regard dans les yeux de l’italien.

- Ne te mets pas en colère, s’il te plait… J’ai rendez-vous dans une boutique tout à l’heure, pour mes essais de robe. Pour le mariage. Et j’avais envie de passer ce moment avec toi. Je fus tentée de détourner les yeux, mais je gardais mon courage avant de continuer. Mais si tu n’as pas envie, je comprendrais et j’irai seule. C’est juste que… Je me suis juste dit que ça te ferait peut-être plaisir… un peu. C’était trop difficile, je baissais les yeux. Je sais que tu ne vois pas cette union d’un bon œil… comme tout le monde d’ailleurs… mais… Je soupirais en essayant de trouver mes mots, avant de secouer légèrement la tête. J’ai pas osé te prévenir avant parce que je me suis dit que… Je sais pas, je crois que je voulais te faire la surprise, mais… je ne sais pas si c’est une bonne idée… Je remuais les épaules, nerveuse. Je me sentais misérable… alors que je parlais là de mon mariage, d’une perspective d’avenir joyeuse et rayonnante, d’un événement dont j’avais rêvé toute ma vie, et avec la seule et unique femme que je voulais épouser de mon existence. Pourquoi donc était-ce si difficile ? Pourquoi donc personne ne pouvait tout simplement pas se réjouir ? Je me passais une main dans mes cheveux déteints en blond, légèrement tremblante. Enfin voilà. Si tu veux, viens, si tu veux pas, je ne serai pas offusquée, je débarque comme ça sans prévenir et je bouscule toute ta journée… et pour un truc nul en plus. Désolée.



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Sam 29 Jan - 14:54

Tu sais quand la mariée arrive et qu’elle fait sa superbe entrée ? J’aime jeter un coup d’œil à l'autre fou qui va s’marrier.

LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse
Luca le sent, quelque chose cloche. Rien n’est habituel dans la manière d’agir d’Abi. Certes, même s’il lui avait dit une fois qu’elle pouvait passer au garage ou au bar quand elle le souhaitait, ils avaient toujours finalement maintenu une sorte de limite entre eux, s’envoyant des hiboux pour convenir de rendez-vous. C’était la première fois qu’Abi débarquait ainsi sans prévenir et l’italien se questionne sur les raisons qui l’ont poussées à agir de la sorte. Sa présence en elle-même suffit à interpeller Luca mais lorsqu’elle commence à parler et qu’elle bafouille, bégayant comme une enfant qui apprend à parler alors qu’elle a toujours été très intelligible, même alcoolisée, Luca fronce davantage les sourcils et s’inquiète aussitôt. Où est la femme entreprenante et confiante qu’il a rencontré dans ce bar ? Cette femme qui lui a plu au-delà de son physique atypique et de ses réparties amusantes ? Luca ne prétend pas avoir découvert toutes les facettes de la personnalité de la jeune femme, cela serait prétentieux de dire cela ; pour autant, il pense en savoir suffisamment pour comprendre lorsque quelque chose la tracasse ou pas. N’ayant pas de rendez-vous avec des clients programmés dans l’après-midi, Luca n’a absolument aucun scrupule à quitter son poste. Puis de toute manière, c’est lui le patron. Qui va venir l’engueuler ? Anje ? Manquerait plus que cela. Ayant soudainement très envie de comprendre la raison des mystères qui planent autour de la jeune professeure, Luca décide de prendre les devants en annulant son entrevue comptabilité avec Théodora. Luca rit à la réponse de son amie et dit : « Théodora te fait peur maintenant ? T’inquiète pas, j’en fais mon affaire. » Elle l’avait pourtant appelé lors de l’épisode chez Jack la Ripaille, non ? Luca n’a qu’un vague souvenir de la fin de soirée, étant complètement torché, tout comme Harper ailleurs, tout cela demeurait flou dans son esprit mais il n’avait pas perçu d’animosité particulière entre les deux femmes mais peut-être que son radar de détection n’était pas aussi performant qu’il ne l’aurait souhaité, l’alcool ayant embrumé son cerveau et perverti la plupart de ses réactions ce soir-là.

Luca emmène ensuite Abi dans son antre, dans son jardin secret, l’endroit où peu ont le droit de pénétrer car Luca tient à son intimité, il tient à conserver une part de lui-même intacte, une part de lui-même qu’il prend soin de conserver en ces lieux. Son appartement est la représentation du capharnaüm qui règne dans sa tête et pourtant, Luca y est très attaché. Ici, il peut être lui-même. Il dit à Abi de faire comme chez elle et de se mettre à l’aise le temps de se rafraîchir. La douche efface les stigmates de la réparation de la moto sur laquelle il bossait avec Khris et il sort de la douche une serviette autour des hanches. Alors qu’il s’avance vers elle pour lui ébouriffer les cheveux (sachant qu’elle déteste cela), elle est plus rapide que lui et tire sur la serviette, dévoilant sa nudité. Ne s’en offusquant pas du tout, Luca se contente de rire et cela couvre l’air courroucé d’Abi. Se déplaçant jusqu’à l’armoire sans aucune honte, il commente en choisissant ses vêtements, sentant le regard de la jeune femme sur lui : « Tu peux toujours mater mais tu peux plus toucher, tu sais, les liens sacrés du mariage tout ça tout ça. » Luca secoue la tête, amusé et absolument pas perturbé par la situation. Il n’a jamais été très pudique et qu’une femme le voit nu ne lui a jamais posé problème. Encore moins une femme avec qui il a couché. Encore moins une femme qui a une bague au doigt et spoiler, ce n’est pas lui qu’elle épouse. Il s’habille rapidement et regagne le milieu de la pièce pour se tenir face à elle. Maintenant qu’il est auprès d’elle à nouveau, Luca ressent encore une fois toute l’incertitude de son amie et alors qu’elle lui dit que tout va très bien, il n’en croit pas un mot. Le jeune italien a toujours eu le nez pour flairer les mensonges et quand bien même il ne comprend absolument rien à Théodora parce qu’il est trop impliqué, concernant les autres membres de sa famille ou de son cercle proche, il estime qu’il est en mesure de saisir lorsqu’on lui ment. C’était aussi l’un des avantages à travailler dans une mafia, il fallait apprendre à cerner les gens très vite parce qu’au-delà de tout cela, des vies sont en jeu.

Aujourd’hui, aucune vie ne semble en jeu mais pourtant Abi transpire tellement la nervosité que celle-ci atteint partiellement le trentenaire. Encore plus lorsqu’elle ferme soudainement les paupières, comme si elle cherchait ses mots, comme si elle cherchait le moyen de lui annoncer quelque chose. Luca s’approche et s’installe sur l’accoudoir du canapé, craignant d’entendre quelque chose qu’il ne pourra pas encaisser. « T’en as pas l’air du tout Abi. » dit-il doucement. Elle soupire et ose enfin planter son regard dans les yeux clairs de l’italien. Ne te mets pas en colère. Ses mots transpercent Luca et il se tend immédiatement. Qu’a-t-elle fait ? Qu’a-t-elle dit ? Est-elle allée parler à Théodora ? Luca cherche dans sa mémoire quelque chose qu’elle pourrait faire qui le mettrait vraiment en colère. Certes, Luca n’était pas de compagnie facile, mais avec Abi, il avait toujours été très respectueux et n’avait jamais vraiment dépassé les limites qu’il ne s’impose absolument pas dans le cadre de ses autres relations, des relations qui concernant le Cosa Nostra. Mais avec Abi, il était juste Luca l’homme, et non pas Luca le dirigeant d’une mafia. Ce double-jeu pouvait s’avérer pesant parfois mais jamais il n’avait cru laisser sous-entendre à Abi qu’il pouvait s’agacer réellement contre elle. D’accord, ils avaient des divergences d’opinion mais que pouvait-elle à ce point craindre de lui dire ?

Lorsqu’elle annonce la couleur, Luca hausse les sourcils, sa mâchoire se décroche, il ouvre la bouche et la referme immédiatement. Le premier réflexe qui lui vient est de refuser. Franchement, lui ? Aller dans une boutique pour essayer des robes ? Jamais de la vie. Mais alors qu’Abi continue de parler, Luca perçoit sa détresse, sa crainte, ses angoisses concernant son mariage, concernant l’avis des gens sur cette union. Tel un douloureux parallèle, Luca se retrouve encore une fois dans la relation que partage Abi et Harper ; s’il ne peut pas être avec Théodora, c’est aussi parce qu’il se refuse d’imaginer être dans une relation de couple mais aussi parce que personne ne croit que cette relation soit possible. Pas après le procès, pas après la séparation d’Anjelica et de Jaeden. Alors Luca comprend, il comprend et son cœur se serre parce qu’Abi ne mérite pas ça. « J’ai jamais dit que je voyais ce mariage d’un mauvais œil. » Il hausse les épaules, tentant de rétablir la vérité sur ce qui l’avait réellement blessé. « J’aurai préféré l’apprendre par toi, c’est vrai. » Il le lui avait fait comprendre chez Jack la Ripaille. Lorsqu’Harper le lui avait craché à la figure, il n’avait pas apprécié du tout. « Mais au final, ce que j’ai retenu de cette soirée de merde, c’est qu’Harper t’aime. Et elle regrette. Le reste, j’en ai rien à carrer, c’est pas mon problème. Les autres, faut que t’en aies rien à foutre toi aussi, s’ils ne sont pas contents, bah tant pis pour eux. » Les doigts de Luca viennent serrer l’épaule d’Abi, tentant de la soutenir comme il peut. « Tu l’aimes Harper, non ? » C’est plus une question rhétorique qui n’attend pas de véritable réponse. « Le regard des autres n’a donc aucune importance. » C’est bien Luca, donne des conseils que tu n’appliques pas toi-même… lui chuchote la petite voix dans sa tête. « Pour ta proposition… Je ne sais pas si je suis le mieux placé pour donner mon avis sur des robes de mariée. » dit-il doucement, honnête. Il n’est pas certain que ses goûts en la matière plaisent à la jeune femme. « Mais je veux bien t’accompagner. » ajoute-t-il. La détresse d’Abi n’a pas d’égal et si personne ne croit en elle, Luca a envie de lui montrer que lui, si. Il a confiance en son jugement et en ses décisions. « Quant à bousculer ma journée… Tu crois que je bosse pour de vrai ? Voyons, je délègue tout à mes subordonnés pendant que je vais m’amuser avec de jeunes et belles jeunes femmes. » dit-il d’un ton qu’il espère sarcastique. C’est totalement faux bien sûr, Luca est occupé du matin au soir et n’a jamais une seconde de répit entre la gestion du garage et du bar, ainsi que des activités « annexes » et totalement illicites. Pour autant, n’ayant pas envie qu’Abi se sente encore plus mal qu’elle ne l’est déjà, il préfère mentir un peu. Il se relève et dit : « Bon, par contre, va me falloir des munitions. » Il se dirige vers le mini-bar et sort une bouteille de Whiskey-pur-Feu ainsi qu’une bouteille de Champagne. « On peut boire dans ta boutique ? » L’air taquin, Luca garde le sourire, parce qu’il a envie qu'Abi retrouve le sien, tout simplement.
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Lun 31 Jan - 14:59

Février 2021

Je me contentais d’un haussement de sourcils et d’épaules un peu circonspect alors que Luca me disait qu’il se chargeait de Théodora. Oui, mais quand même… ma situation était déjà délicate avec la jeune femme, je ne voulais pas risquer d’envenimer les choses, et encore moins de compliquer la situation entre Luca et elle. Quand bien même je n’avais pas eu les dernières nouvelles entre eux, je savais par avance que ce n’était pas si simple. Parce que Luca n’était pas un homme simple. Enfin, j’étais moi aussi à la tête d’une entreprise, tout le moins, ce qui s’en rapprochait, et je savais donc mieux que ce qu’il croyait qu’annuler un rendez-vous de dernière minute avait toujours des conséquences par la suite. Fort heureusement, j’étais certaine que nous en aurions terminé avant, mon rendez-vous ne devrait durer que quelques heures seulement. Ainsi, mon ami serait libéré bien avant, il aurait même sans doute le temps de retourner se salir avec ses motos.

Une fois à l’étage et le sujet de la jeune comptable écarté, je respectais le lieu de Luca avec religion, n’osant à peine bouger, ne touchant à rien, pas même au dessin qui rappelait mes traits. Il ne devait sans doute pas se sentir bien au moment où il avait dessiné ça, quelle idée de faire mon propre portrait, je devais polluer ses pensées d’une manière terrible pour qu’il l’exorcise de cette manière, quand bien même je devais reconnaître que son coup de crayon était fin et délicat. Je n’arrivais pas à comprendre véritablement tout l’enjeu qui se cachait là derrière, et je n’eus pas vraiment le temps de m’y attarder puisque déjà mon ami sortait de sa douche, une simple serviette autour des hanches.
Alors qu’il essaya d’avoir un geste envers moi que je n’appréciais pas, je lui retirais son linge, ce qui eut pour simple effet de le faire rire. Bien que piquée au vif et stressée, je n’avais pas perdu mon sens de l’humour aujourd’hui, je tenais vraiment à ce que ce soit une bonne journée, alors je souriais sans mal aux paroles de l’italien avant de lui répondre avec une franchise et une simplicité déconcertante.

- Oohoho ne t’inquiète pas je le vis très bien, et c’est pareil pour toi, tu peux mater, mais plus toucher. Tu ne crois pas si bien dire Abigail, si d’aventure il décidait de me suivre, il risquerait peut-être de se mordre les doigts que je sois fiancée. Non pas que je veuille le provoquer, surtout que je savais que je n’étais plus la fille qui l’intéressait. Mais regarder rappelle de bons souvenirs.

Je lui souris avec une douce sincérité. Bien que notre relation soit aujourd’hui purement amicale avec aucun geste déplacé, je gardais tout de même très chaudement les moments intimes que nous avions passés ensemble. Ils avaient été salvateurs durant une période de ma vie passablement compliquée moralement, et Luca avait été la bouée de sauvetage à laquelle j’avais pu me raccrocher dès que je le lui demandais. Il ne s’en était sans doute jamais rendu compte, et c’était pour tout ce qu’il avait fait pour moi qu’aujourd’hui je le considérais comme un être cher, en qui je tenais vraiment et pour qui je donnerais beaucoup s’il me le demandait.
Alors que je lui assurais que je n’avais pas besoin de parler et que tout allait bien (ce qui fondamentalement était vrai), je le regardais s’installer, un peu grave, sur l’accoudoir de son canapé et de me fixer apparemment sans me croire. Je me mordais alors la lèvre, confuse, avant de me décider à tout lui raconter.
Il n’y avait rien de grave, rien de dramatique. Juste une petite idiote (moi) qui avait maladroitement essayé de faire plaisir à quelqu’un, sans y parvenir, bien évidemment. Juste une sorcière sans importance qui allait se marier avec quelqu’un que son entourage désapprouvait un peu, et qui ne savait plus à qui s’adresser pour se sentir pleinement comprise, pleinement soutenue.
Par Merlin que Kyle pouvait me manquer…
Au moins, la surprise que je voulais faire avait fonctionné puisque Luca ouvrit la bouche de surprise avant de bien vite la refermer. Sur ce point, je ne m’étais pas trompée, il fallait me reconnaître ça.
Qualifiant l’événement de ma vie comme « un truc nul », je concluais, le cœur serré. Mon entourage venait presque à me pousser à penser que je n’avais pas pris la bonne décision, que je faisais la plus grosse erreur de ma vie et que je devais me raviser. Pourtant, même fiévreuse j’avais voulu épouser Harper, même aujourd’hui alors que je pensais à elle je sentais toute l’affection que je lui portais, ce nœud agréable qui me serrait tendrement les tripes.
Quand Luca prit enfin la parole, je réussissais à détourner mes prunelles sombres dans sa direction pour l’écouter attentivement, craignant véritablement de me faire engueuler encore une fois. Pourtant, aucun mot ne fut prononcé plus haut que l’autre, et je crus même deviner quelques encouragements derrière ce qu’il disait. Accablée par la culpabilité de n’avoir pas eu le temps de lui annoncer moi-même mes fiançailles, j’affaissais mes épaules.

- Pardon…

Suite à la soirée chez Jack la Ripaille, j’avais envoyé plusieurs missives à mon ami pour lui expliquer pourquoi je n’avais pas pris le temps de le lui dire tout de suite. J’avais manqué de temps, je n’avais pas trouvé les mots… et j’avais eu peur. Peur de sa réaction, comme j’avais eu peur de la réaction de tout le monde… et apparemment, à juste titre.
Encore une fois aujourd’hui, je m’excusais, sachant très bien que je n’allais rien pouvoir faire pour réparer cette erreur, et alors qu’il me disait devoir m’en fiche de l’avis d’autrui, je fis silencieusement un parallèle ironique. Il m’avait engueulée parce que je ne lui avais rien dit. Oui, mais voilà, c’était mon mariage et je faisais ce que je voulais quand je le voulais, non ?
Cela ne revenait-il pas au même ?
Je n’en savais rien, je ne comprenais rien. Les relations humaines étaient bien trop compliquées pour moi.
Alors qu’il serrait mon épaule avec douceur, j’osais poser mes prunelles dans les siennes.

- Tu sais aussi bien que moi que je ne peux pas juste m’en foutre de l’avis des autres, encore moins s’il s’agit de ma famille et de mes amis proches. Mais, merci.

Je n’étais pas une princesse en détresse qui était acculée et qui n’avait plus aucune solution. Ainsi, je restais pleinement maitresse de mes actions et de mes pensées, ce qui faisait que je n’étais pas dupe. Luca pensait peut-être ce qu’il venait de me dire, mais il n’en était pas convaincu. Je comprenais néanmoins sa démarche, moi aussi je donnais des conseils qu’il m’était difficile de suivre.
Avec délicatesse, je venais poser ma main droite sur celle de l’italien qui se trouvait sur mon épaule. Il eut alors tout le loisir d’admirer de plus près la bague de fiançailles en or rouge qui ornait mon annuaire avant que je ne poursuive.

- Tu sais Luca, si j’ai envie que tu m’accompagnes, c’est justement parce que je te juge être le mieux placé. Tu… tu es quelqu’un qui réussi à me voir dans la foule, et surtout, qui a réussi à me voir au-delà de … Je fis un geste avec mes mains. Juste mon corps. Et tu es sincère, si jamais quelque chose ne me va pas, je sais que tu me le diras. Je levais l’index comme si j’allais sortir l’argument de choc que je gardais comme dernière arme. En plus je ne vais pas forcément porter une robe. On a décidé avec Harper qu’on s’habillerait bien, mais comme on en a envie. Alors si ça se trouve, je vais porter un tailleur trois pièces. Je haussais les sourcils frénétiquement d’un air provocateur, démontrant que je plaisantais : je ne porterais certainement pas de tailleur (quelle horreur). En revanche, j’avais dit la vérité, avec Harper nous n’avions aucun dress code au-delà de vouloir se faire plaisir. Nous deux, nous cassions toutes les traditions et les codes, nous ne faisions jamais comme les autres, et Luca en avait déjà, malgré lui, fait les frais. En vrai… je veux juste passer un bon moment avec toi. Tu sais… comment avant.

Comme lorsque nous nous retrouvions tous les deux, que nous étions la bulle de l’autre, le refuge accueillant la détresse de l’autre avec douceur, compréhension et candeur.
Le souvenir d’un Luca blotti contre ma poitrine, ses bras protecteurs entourant mon petit corps alors que je veillais son sommeil en lui caressant tendrement les cheveux et le dos me revinrent en tête tandis qu’il m’évoquait ses devoirs.
Encore une fois, je n’étais pas dupe, et je savais mieux qu’il le pensait ce que c’était que d’avoir des responsabilités. Je n’étais plus qu’une « simple » enseignante rencontrée dans un bar. Ma situation avait changé depuis, et aujourd’hui j’avais de lourdes responsabilités qui pesaient sur mes épaules. Néanmoins, je me permis de ne rien répondre, en dehors de lui accorder un sourire doux et plein de compréhension. Si je ne pouvais plus offrir par mon corps un instant de tendresse à Luca pour le tirer de ses affaires et de ses soucis personnels, alors je m’y prendrais tout simplement autrement.
C’était ce que j’étais présentement en train de faire.
Le laissant se relever et se diriger vers son mini-bar, je ne pus m’empêcher de pouffer de rire avant de m’avancer vers lui pour admirer les bouteilles, comme si je jugeais de leurs qualités (comme si Luca pouvait avoir de mauvaises bouteilles).

- Il te faudra des munitions pour t’éviter de me sauter dessus parce que je suis trop belle, ou parce que ce que je te demande est au-dessus de tes forces ? Je le fixais avec une lueur taquine dans le regard avant de continuer. On doit pouvoir oui.

Puis, sans crier gare, avec douceur, je m’approchais du sorcier pour le prendre dans mes bras, passant mes bras derrière sa nuque, comme je l’avais fait durant de nombreux mois. Là, je me blottis un instant contre lui avant de murmurer, pleine de sincérité.

- Merci Luca. Merci d’être là pour moi.

Après un instant, je me redressais pour le regarder en souriant puis j’allais attraper mon sac, le fouillais et en sortais un paquet emballé avec un petit nœud doré. Revenant auprès de lui, je le lui tendais en le fixant tendrement. Apparemment, le stress et l’angoisse commençaient à s’évaporer de mon corps, je redevenais celle que Luca connaissait.

- Tiens, on n’a pas eu le temps de se voir depuis Noël alors… c’est en retard, comme mon annonce de fiançailles. Je fronçais les sourcils avant de renifler rapidement par le nez. Tu… t’y feras. À mes retards.

Glissant mes mains dans mon dos alors que je lui laissais l’occasion d’ouvrir son cadeau, il y trouvera un porte-clés en cuir finement ouvragé, le tampon de la Route 66 apposé dessus. En son centre se trouvait une boussole, mais l’aiguille ne semblait pas forcément indiquer la direction que ces instruments étaient censés donner. Avec un petit sourire, je me permis un simple petit commentaire.

- Pour… que tu ne t’égares plus.

Pour qu’il ne perde plus le Nord, ni la tête, ni la conscience de qui il était. Pour qu’il ne perde pas de vue qu’il était entouré (le cercle de la boussole) et aimé. Sa famille, ses amis, ce qu'il aimait étaient ces points gravés tout le long de la circonférence. Il avait ses secrets, mais je savais, comme moi, qu'il pouvait se perdre.



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Dim 6 Fév - 16:06

Tu sais quand la mariée arrive et qu’elle fait sa superbe entrée ? J’aime jeter un coup d’œil à l'autre fou qui va s’marrier.

LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse
Alors qu’il laisse entrer Abi dans son appartement, Luca se demande si ses anciennes habitudes sont à jeter à la poubelle. En effet, auparavant, il ne laissait personne pénétrer dans ces lieux en dehors de certains membres privilégiés de la Cosa Nostra, sa sœur, sa cousine, Jaeden, Rose. Récemment, Théodora avait elle aussi franchi la porte de ce jardin secret qu’il cherchait pourtant coûte que coûte à lui dissimuler mais il ne regrette rien. Tout comme il sait qu’il peut sans hésiter laisser Abi découvrir ce qu’il dissimule derrière son caractère impétueux. Abi en sait plus sur lui et sur ce qu’il est vraiment que certains membres de la Cosa Nostra et c’est avec plaisir qu’il lui offre cette place. En réalité, il n’aurait jamais pu imaginer que ce petit brin de jeune femme prendrait une place aussi déterminante dans sa vie, une place qu’il lui a donnée sans se poser de question après avoir compris qu’il pouvait lui faire confiance. Il subsiste des secrets, des deux côtés probablement, mais pourtant, Luca sait qu’au-delà de ça, elle a pu toucher du doigt sa véritable personnalité, ses craintes et ses angoisses. Théodora n’est qu’une partie du problème, elle n’est que la manifestation évidente des appréhensions qui animent Luca. Luca dirait que le tournant de leur relation s’est joué à Soay, nus dans un lit, après qu’il n’ait pas pu s’acquitter de leurs exercices physiques réguliers. C’était là qu’ils avaient, l’un comme l’autre, pris conscience de ce qui les tourmentaient depuis déjà des mois. Alors aujourd’hui, si Abi nécessite une fois de plus son appui, il le lui offre sans se poser de questions.

Une fois passé sous la douche, Luca se dirige vers son armoire pour s’habiller, cherchant au passage à ébouriffer les cheveux d’Abi -sans succès d’ailleurs-, il se fait violemment attaquer par la petite furie et elle lui vole sa serviette. Pas pudique pour un sou, Luca se contente de rire et traverse la pièce en tenue d'Adam et il lui dit qu’elle peut toujours regarder si elle le désire et sa réplique le fait sourire, il se tourne vers elle et dit : « Y a rien à regarder, t’es toute habillée ! » Il plaisante en réalité, il n’a nul besoin de cela pour se rappeler ses formes délicieuses, formes qu’il a si souvent déshabillées du regard, qu’il a si souvent touchées, si souvent embrassées. Lorsqu’elle lui dit que cela lui rappelle quelques souvenirs, Luca ne peut s’empêcher d’accentuer son mouvement de hanches et de faire quelques déhanchés avec son postérieur pour lui rappeler ce qu’elle loupe désormais. À vrai dire, Abi est probablement la seule femme au monde avec laquelle il a couché et avec laquelle il continue d’avoir une relation privilégiée, sans se sentir obligé de se forcer. Cette femme avait une influence certaine sur lui, bien qu’il ne s’en rend pas toujours bien compte. « Je t’enverrai une photo de moi nu, tu pourras la regarder avant de te coucher. » dit-il en riant à nouveau tout en enfilant une tenue propre.

Revenant vers elle, s’installant sur l’accoudoir du canapé, Luca ne croit pas un traitre mot de ce qu’elle vient de lui dire. Certes, il ne la connait pas depuis longtemps, moins d’un an en réalité, mais il sait déceler quand elle lui ment. Ou du moins, lorsqu’elle ne lui dit pas tout, ce qui semble être le cas aujourd’hui. L’évocation du mariage tend légèrement Luca. N’allant pas jusqu’à dire qu’il était contre cette union, après tout il croit son amie suffisamment intelligente pour savoir ce qu’elle a à faire, Luca regrette néanmoins les conditions dans lesquelles il a appris son mariage. Après tout, ils étaient allés jusqu’à monter ce stratagème ridicule ensemble lors de la soirée à Poudlard pour rendre jalouse Harper, et Luca n’était pas mis au courant lorsqu’elles se fiançaient ? En temps ordinaire, Luca n’en aurait rien eu à faire, mais Abi possède une place dans son cercle restreint qui lui est propre, une place particulière que lui-même ne sait définir, alors oui, c’est vrai, il aurait aimé qu’elle soit plus honnête. Mais il comprenait aisément pourquoi elle n’avait pas osé le lui dire, probablement par crainte de sa réaction. Elle avait de la chance que lorsqu’il l’a vu chez Jack la Ripaille, il était bien trop saoul pour s’énerver et s’agacer. Il s’était même servi de l’excuse de la potion de gentillesse d’Arrondie pour expliquer son comportement inapproprié avec Théodora. La base. « Arrête de t’excuser, tes lettres me suffisent. » Puis en réalité, que pouvait-il exiger d’elle ? Elle avait sa liberté d’expression et d’opinion, il n’avait pas à s’immiscer au milieu de tout cela. « Je comprends que tu sois dans un entre-deux délicat. » Où sa loyauté doit-elle aller ? Envers sa famille ou envers sa future épouse ? Luca n’a pas la réponse à cette question, elle devra probablement la trouver seule.

Se perdant dans ses propres réflexions, Luca se reconnecte avec la réalité lorsque la main d’Abi vient se poser sur la sienne, toujours sur son épaule. Ses yeux sont immédiatement attirés par la bague de fiançailles de celle-ci, et même s’il n’est clairement pas un expert en la matière, il peut dire qu’elle de bonne manufacture. Finalement ça paye bien Prof se dit-il en repensant à sa réflexion au bar d’Arrondie. « Abi, tu as si peu confiance en toi ? Te remarquer au travers de la foule ? Mais regarde-toi un peu. Qui ne te remarquerait pas ? Dis-le moi. » La suite de sa phrase le fait sourire. Voir au-delà de son physique ? C’est étrange, c’était exactement ce qu’il pensait d’elle. « Je crois que je peux aisément te retourner le compliment. » Qui peut se targuer d’avoir su voir au-delà du corps d’Appolon du beau rital ? Qui peut se targuer d’avoir su voir que derrière cette montagne de muscle et ce physique avantageux, cet air assuré et franchement pas toujours avenant, pouvait se dissimuler un homme plus torturé qu’on ne le penserait ? Abi. Elle a su tout ça. Il l’écoute évoquer pourquoi elle souhaite qu’il l’accompagne et il se sent un tantinet soulagé de savoir qu’elle ne portera pas de robe conventionnelle. Même si Anjelica et Jaeden avaient rompu leurs fiançailles, Luca n’a vraiment pas envie d’imaginer qui que ce soit dans une robe blanche.

Voyant la volonté farouche d’Abi pour passer du temps avec lui, allant presque au-delà de cette histoire de robe, Luca sourit doucement. « D’accord, je viens avec toi. Tu peux compter sur mon expertise franche et sincère, comme d’habitude. » Luca n’est franchement pas du genre à jouer les langues de bois, au contraire et elle le sait bien, voilà pourquoi elle le veut à ses côtés lors de ce moment important de sa vie. Si Luca se demande pourquoi lui et pas un autre, il se contente d’acquiescer. Il aura bien le temps de se poser toutes ces questions plus tard. Pour le moment, il se doit d’être soutenant. L’attitude d’Abi lui montre qu’elle est loin d’être sûre d’elle et Luca ne veut pas qu’elle se sente encore plus mal. Sentant qu’il aurait besoin de plus que de sa sympathie pour survivre à une séance d’essayage en bonne et due forme, Luca se dirige vers le mini-bar et demande à son amie si l’alcool est autorisé dans la boutique. Sa réponse le laisse perplexe, mais amusé, il répond : « Peut-être un peu des deux ahah ! » Luca attrape un de ses sac-à-dos, y fourre les deux bouteilles et son carnet de croquis, une idée lui venant en tête. Alors qu’il réfléchit aux fusains qu’il souhaite prendre, les bras d’Abi l’encerclent et Luca accepte cette étreinte sans se poser de question, posant doucement sa tête sur la cime de ses cheveux après y avoir déposé un léger baiser. « T’as été là pour moi quand j’en ai eu besoin, c’est normal de te rendre la pareille. Je ne te laisse pas tomber. » dit-il doucement, comme si cela expliquait tout. Mais ce n’est pas du tout qu’une question de dette, qu’une question d’être redevable, il a réellement envie d’être là pour elle, même si se retrouver dans cette fichue boutique ne l’enchante pas tant que ça. Il fera cet effort, et la boisson pourra l’aider à tenir. Elle le relâche et Luca attrape sa boîte à fusain qu’il glisse dans son sac. Les yeux attirés vers la silhouette d’Abi qui revient vers lui avec un cadeeau, il ouvre la bouche avant de la refermer. « C’est pas mon anniversaire. » dit-il en plaisantant, ému qu’elle ait pensé à lui pour Noël. Ne sachant absolument pas à quoi s’attendre en ouvrant la boîte, il tire sur le nœud doré. Un sourire s’installe immédiatement sur ses lèvres tandis qu’il découvre le porte-clé en cuir. Il le retourne doucement, admirant l’œuvre délicate, pas du genre qu’on trouve dans un magasin de souvenirs ; il observe la fine boussole et se demande si celle-ci indique réellement le Nord ou non. Sans dire un mot, Luca se dirige vers son blouson de cuir accroché sur l’un des porte-manteaux de l’entrée et sort les clés de sa moto. Accrochant immédiatement le porte-clé à celle-ci, c’est tout un symbole. Sa moto, c'est l’un de ses biens les plus précieux ; qu’il ose mettre le cadeau d’Abi sur cette clé est lourd de signification pour Luca. « Merci, vraiment. Cela me touche beaucoup. » Il ajoute : « Je n’ai rien pour toi mais… » Se dirigeant vers la table basse, il attrape l’un des dessins qu’il a fait d’elle et le lui donne. « J’offre pas souvent mes dessins mais comme ça tu penseras à moi toi aussi. » Ce n’était rien, c’était même presque ridicule mais pour Luca, cela voulait dire beaucoup. Il n’est pas très expansif sur ses mots et encore moins sur ses sentiments, il espère qu’elle saura lire en lui et en réalité, il n’en doute pas un seul instant.

« On y va ? » Redescendant de l’appartement, les clés de sa moto toujours dans la main, il regarde Abi d’un air malicieux. « Elle est où la boutique ? » Elle lui donne l’adresse et Luca l’entraîne dans l’atelier, se dirigeant vers l’endroit où la Cosa Nostra expose ses propres motos. Passant devant celle de Jaeden puis d’Anjelica, Luca montre du doigt la sienne et lui dit : « Prêt pour un baptême de l’air ? » C’est un jour particulier, autant faire les choses en grand non ? Jetant un sortilège sur son sac à dos pour que celui-ci puisse tenir dans sa poche, Luca évalue la circonférence du crâne d’Abi, choisit un casque neuf dans la boutique et l’aide à l’enfiler, vérifiant que la taille soit bonne. Il attrape l’une des vestes d’Anja accrochée à l’un des porte-manteaux, en prenant soin de ne pas prendre sa fétiche, au risque de s’attirer les foudres de celle-ci. « Mets ça pour le trajet. C’est à ma sœur, c’est ta taille je pense. » Il enfile ensuite son propre blouson et son casque d’un noir mat, avec le symbole de la Cosa Nostra gravé dessus. Il grimpe sur sa moto, attendant qu’elle s’installe derrière lui. Il ouvre la porte du garage et dit : « Accroche-toi. » Il démarre en trombe, le bruit du moteur vrombissant est caractéristique. Luca actionne le réacteur d’invisibilité et ils s’élancent dans les airs, surplombant le Londres sorcier puis le Londres moldu. L’italien ne pouvant résister à l’idée de lui faire découvrir une partie de son monde, ils volent durant de nombreuses minutes avant de retrouver le chemin de la boutique qu’elle lui a indiqué. Une fois au sol, il retire son casque et lui demande : « Alors, c’est mieux que de chevaucher un dragon ou pas ? » Avec Abi avec lui, il avait été particulièrement prudent et ne s’était pas embarqué dans des figures acrobatiques, il n’avait pas non plus poussé la vitesse à son maximum mais elle avait pu tout de même avoir un avant-goût de ce qui le passionne tant dans la moto : l’adrénaline, le vent sur le visage, la sensation de vitesse, de liberté.
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Jeu 10 Fév - 21:07

Février 2021

Je me contentais d’éclater de rire alors que Luca tenait ses propos concernant ma tenue vestimentaire qui était sur ma peau – pauvre de lui – et davantage alors qu’il mima ses coups de reins. Alors, certes, cela éveillait toujours d’excellents souvenirs, mais, étrangement, je ne me sentais pas en manque de son corps. Quand bien même l’aventure avait été délicieuse et précieuse, dans le fond, ce n’était pas de lui que je rêvais la nuit, et aujourd’hui, je pouvais me targuer d’être complètement épanouie avec la femme de ma vie. En effet, il y avait des soucis, mais rien d’assez grave pour entacher la relation profonde que nous avions établie depuis notre enfance avec ma fiancée. La main devant la bouche pour cacher l’immense sourire qui traversait mon visage, je hochais la tête tandis qu’il proposait de m’envoyer une photo de lui nu. Chiche. Ironiquement, il ne s’imaginait pas à quel point nous pourrions en rire avec Harper. Quand bien même il y a de la possessivité et de la jalousie dans notre couple, nous étions aussi assez complices pour nous amuser de ce genre de choses.

Également, nous étions assez complices pour affronter les gens autour de nous qui étaient plus ou moins joyeux de notre union. Comme le disait Luca, j’étais dans un entre-deux délicat, et je faisais mon possible pour contenter tout le monde, comme j’essayais toujours de le faire. Je n’étais pas naïve cependant et j’avais conscience que ce n’était peut-être pas possible. Cela dit, j’avais la chance d’avoir une famille aimante et soudée, et j’étais persuadée qu’avec le temps, ils accepteraient Harper à juste titre en faisant table rase du passé. Concernant mes amis, c’était une autre paire de manches, et heureusement que je n’en avais pas beaucoup.
Me contentant de hocher la tête à ses mots, je remuais également les épaules, démontrant que la situation était ainsi, et que nous ne pouvions rien y faire pour le moment. C’était un peu une fatalité que seul le temps pouvait éroder.

Remarquant bien que l’italien avait détourné le regard sur le bijou promettant mon union, je ne me permettais aucun commentaire, préférant l’écouter avec attention tandis qu’il essayait de démentir, pourtant, une vérité fondamentale. Nous n’avions pas grandi ensemble, c’était pour ça qu’il ne pouvait pas comprendre, et il ne me connaissait pas assez sur le terrain pour véritablement saisir comment j’étais d’habitude. La preuve en était qu’il avait semblé véritablement inquiet tout à l’heure en me voyant à ce point gênée, alors que pourtant, c’était ma façon d’être la majorité du temps. Mais évidemment, Luca, lui, il avait connu une Abigail joyeuse, buvant dans des verres et plutôt très dévergondée une fois l’alcool ayant terminé de faire sauter les dernières barrières, c’était donc normal qu’il tînt de tels propos, et ce fut avec des yeux brillants de douceur que je le corrigeais, tout aussi délicatement.

- Je t’assure Luca, je suis passée maîtresse dans l’art de me cacher dans la foule, c’est un peu mon métier aussi. J’élargissais mon sourire. Ce n’est pas une question de confiance en moi, ce sont des faits… et tu sais, dans le fond, j’ai attiré le regard de ceux qui le valaient vraiment, et c’est tout ce qui importe pour moi.

Peut-être effectivement qu’il en allait de même pour moi. Peut-être effectivement que j’étais également un courant d’air salvateur pour Luca, mais il ne me l’avait jamais dit, alors je ne pouvais que supposer. Dans le fond, je savais comment il était avec moi, et un peu avec Théodora, mais à côté de cela, j’ignorais sa manière de faire ou d’agir. Nous avions toujours mis un point d’honneur à respecter nos jardins secrets, mais j’avais la naïveté de croire qu’avec moi, il était un homme entier, et non pas qu’il me faisait voir un aspect fardé de lui. C’est pourquoi les mots qu’il eut là eurent pour effet de me rasséréner quelque peu.
Je voulais lui faire confiance et lui montrer qu’il était important pour moi, et cela signifiait vraiment beaucoup qu’il vienne avec moi aujourd’hui. Après avoir insisté un peu, je fus soulagée de le voir céder à ma requête, ricanant un peu à ses propos.

- Tu essayeras quand même de ne pas me dévaloriser hein, sinon je risque de pleurer je te préviens.

Lui adressant un clin d’œil, je masquais ainsi une réalité toute franche : l’émotion était si forte aujourd’hui pour moi qu’il ne serait pas impossible que je pleure pour un rien tout à l’heure. Si Luca était trop franc (ce que je lui demandais dans le fond) je craignais aussi de perdre un peu courage de trouver la tenue adéquate pour mon union avec l’aînée de la famille Auburn.
Cela dit, c’était aussi à moi d’assumer mes choix. Je savais comment était Luca, et je ne voulais pas le changer, qui plus est, il avait toujours été relativement doux avec moi. Relativement oui, car il y a eu des nuits bien plus agitées que d’autres, mais c’est un autre détail qui n’avait rien à voir avec mon rendez-vous de tout à l’heure.
Amusée par ses remarques, je profitais d’un petit instant pour le prendre dans mes bras, et j’accentuais mon étreinte alors qu’il m’assurait vouloir ne pas me laisser tomber. Sans trop savoir pourquoi, ces quelques paroles eurent pour effet de me mettre du baume au cœur.
Avec tendresse, je lui souriais lorsque je me redressais, puis allais chercher son cadeau de Noël. Sifflant entre mes dents alors qu’il prétendait que ce n’était pas son anniversaire, je le laissais découvrir le contenu, joignant mes mains dans mon dos.

J’avais eu un peu peur de ne pas avoir fait le bon choix, cela dit, à Las Vegas, au départ (ou arrivée c’était selon) de la route 66, j’avais eu la prétention de croire qu’il y avait peu de risques pour que je me trompe vraiment.
En silence, il admirait l’œuvre, le cuivre frappé du numéro 66, attestant ainsi de son authenticité, et la boussole, elle, dans les mains de l’italien, se mit à tourner lentement, comme si elle cherchait une destination. Moi, je me contentais de regarder le sorcier qui semblait ne pas feindre être touché par ce présent, puisqu’il allait directement l’accrocher à la clé de sa moto (tout le moins, c’était ce que je présumais). Voyant bien qu’il était touché, je le suivais du regard alors qu’il fouillait dans ses croquis. Il était en train de faire quoi là ?
En me tendant mon portrait, je ne pus m’empêcher de rougir, saisissant tout le sens de la symbolique cachée derrière ce geste d’apparence simple. C’était pour ça que, pour une fois, je n’objectais pas.

- Oh… merci beaucoup, ça me touche vraiment. Je m’admirais (que c’était étrange), avant de revenir sur mon ami. Je suis contente que ça te plaise à toi aussi. Puis mes prunelles sombres se reposèrent sur le dessin. J’aime beaucoup… il y en a une qui sera contente à la maison.

D’une œillade entendue, je regardais Luca en coin avec un petit sourire, avant de hocher la tête alors qu’il annonçait le départ.
J’avais hâte… et au même temps, la boule qui s’était formée dans le creux de mon ventre revint. Oh non, pitié je ne veux pas y aller… sûrement que la dame de la boutique allait me manger… ou que ses robes allaient me manger… oh non… je ne peux pas me marier dans mon pyjama ? Pitié ?
Remarquant bien l’air malicieux de Luca, je lui donnais les coordonnées de la boutique avant de le suivre, ma curiosité à présent piquée au vif. Qu’est-ce qu’il me pr… Je me figeais devant les motos alors qu’il me posa une question à laquelle je n’étais pas certaine de vouloir répondre, voilà pourquoi je balbutiais.

- Euh oh je et bien c’est-à-dire que…

Cause toujours, tu m’intéresses. En réalité, voler ne me dérangeait pas. Je faisais souvent des escapades avec les hippogriffes ou les Abraxans, ça ne me posait véritablement aucun problème. En revanche, je détestais poser mes fesses sur un balai. Un balai, c’était fait pour faire le ménage, pas pour voler. En plus, ce n’était même pas vivant, c’était un objet. Un objet de ménage ! En plus, le Quidditch, c’est dangereux, merde.
Mais une moto ?
Et celle de Luca en plus !
Oh misère pourquoi je suis venue ici moi… ?
Pour autant, je voyais bien tout le plaisir que cela engendrait chez Luca, et je n’eus pas le courage ni le désir de le contrarier maintenant. D’autant plus que je lui coupais sa journée et je lui en demandais beaucoup en me suivant dans une boutique de tissus. Voilà pourquoi je le suivais jusqu’aux casques et le laissait me les enfiler les uns après les autres jusqu’à ce qu’il ait trouvé celui qui épousait (haha) au mieux ma petite caboche.
Néanmoins, lorsqu’il me présenta le blouson de sa sœur, j’eus un mouvement de recul.

- Ah non ça, je ne mets pas, c’est à ta sœur, je ne vais pas me permettre de…. Devant le regard insistant de Luca, je me ravisais une nouvelle fois. Bon ok… rappelle-moi de lui offrir une boite de chocolats…

J’aimais le chocolat. Ça avait des vertus aphrodisiaques, et du coup, ça calmait de potentielles crises de nerfs. Je ne voulais pas attirer d’ennuis à l’italien, et ce fut un peu à contrecœur que j’enfilais le blouson de sa sœur, sans être surprise qu’elle soit légèrement trop grande pour moi. Enfin, un peu hésitante, j’embarquais dans le dos de mon ami en m’accrochant à sa taille, et, une fois sorti du garage, je le laissais nous emporter dans les airs, sans pour autant être trop crispée, ce qui me surprit moi-même. J’adorais voler. Mais avec des animaux. Voler avec des véhicules c’était quelque chose de très rare pour moi, et je devais bien admettre que ce n’était pas totalement déplaisant, ou tout le moins, c’était plus agréable que d’être sur un balai. Il y avait aussi que j’étais une casse-cou née (coucou Moïra) et que prendre des risques ne m’avait ne m’avait jamais dérangée. Ainsi, si Luca désirait m’entendre hurler à la mort et m’agripper à lui comme une moule à son rocher, c’était perdu, puisque j’admirais avec calme la Londres d’en bas.
Sentant que l’italien ne mettait pas toute la puissance de sa bécane, sans doute pour ne pas m’effrayer (haha), je souriais alors qu’il amorçait la descente pour nous faire atterrir juste devant la boutique. Son commentaire m’arracha un nouveau petit rire franc alors que je retirais mon casque (on étouffe là-dedans purée).

- Haha, jamais tu ne me feras dire ça !! Mais ! Ce n’est pas désagréable. La prochaine fois, vas-y à fond, tu sais comment je suis.

Étincelles pleines de sous-entendus dans le regard, je descendais avec aisance de la moto avant de me tourner en direction de la boutique. Là, mon cœur se remit à battre la chamade. Ok Abigail, tu es super zen sur une moto volante, mais tu as peur devant une boutique de froufrou. T’es pas normale Abigail, t’es pas normale.
Inspirant profondément en fermant les yeux pour rassembler mes idées, Luca dut attendre quelques secondes avant que je ne me décide enfin à pousser la porte de la boutique. Rapidement, une vendeuse s’approcha de nous avec un sourire professionnel, mais sincère (ce qui me surprit).

- Bonjour, vous aviez rendez-vous ?

Je déglutissais nerveusement ma salive avant de bredouiller.

- O… oui… A…bigail M…M…MacFusty.

Toujours aussi pro, la femme hocha la tête sans me regarder de travers et s’en alla voir son agenda avant de rapidement rétorquer.

- Effectivement, suivez-moi, je vous prie.

Est-ce que je peux la suivre dans le sens de la sortie ? Mal assurée, je reculais d’un pas pour buter contre le bras de Luca. Crotte… c’était aussi pour ça que je lui avais demandé de venir : pour m’éviter de m’enfuir.
Asociale petite Abigail.
Poussant un léger gémissement, j’avançais donc dans la boutique, qui, au final, était plutôt charmante. La décoration était sobre, il y avait des tenues de mariage, oui, mais rien de pompeux, ni aux couleurs si éclatantes qu’on ne sait plus où donner de la tête. Contre le mur du fond, une étagère exposait des bijoux tous plus scintillants les uns que les autres, ce qui, tout à fait entre nous, ne m’intéressait guère. Je n’accordais que peu d’importance à tout cela, quand bien même je reconnaissais sans mal la beauté et le travail d’orfèvre.
Suivant la femme derrière un rideau, nous accédions à une nouvelle aile de la boutique, agrandie par magie, donnant une profondeur presque vertigineuse à l’endroit. Des elfes de maison, ornant tous un vêtement à l’effigie de la boutique, attendaient devant de grandes penderies contenant sans doute une multitude de vêtements.
Combien on parie que je ne trouverais quand même pas ce que je veux ?
Aller, je parie une bière.

- Alors, que vous faudrait-il ? demanda la vendeuse qui accorda une œillade à Luca, comme si elle se demandait s’il s’agissait de mon témoin ou du futur époux. La question était simple, pourtant, il m’était difficile de répondre.
- Je… j’en ai aucune idée… quelque chose de simple, mais qui sort quand même de l’ordinaire ? Je jetais un coup d’œil mal assuré à l’italien. Mais peut-être, évitons le classique également.

La vendeuse haussa cette fois un sourcil circonspect. Ah, elle comprenait enfin que j’étais bizarre. Pourtant, elle fit signe aux elfes de maison qui se mirent alors en branle.
Bon aller, juste cinq minutes, et ensuite on se barre, ça marche ?



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Mar 1 Mar - 20:51

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LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse
Lorsque Luca songe aux mois qui viennent de s’écouler, il doit l’admettre, il n’aurait jamais pensé se lier d’amitié avec une fille comme Abi. Non pas qu’elle n’était pas son genre, ce n’était pas vraiment la question. Mais il faut dire que Luca a baigné dès la tendre enfance dans l’idée qu’il devrait donner son existence toute entière pour la Cosa Nostra ; les liens familiaux et la mafia passant avant tout le reste. La jeune femme lui était tombée dessus vraiment par hasard ; Luca n’a vraiment pas pour habitude de revoir ses « conquêtes » mais pourtant avec Abi, il y a eu ce petit quelque chose en plus, ce truc qui a fait qu’ils sont allés au-delà d’une relation charnelle. Il l’a laissé s’approcher de lui, lui qui s’évertue à demeurer hermétique aux sollicitations venant de l’extérieur de son cercle restreint. Mais Abi est arrivée dans sa vie au moment où il en avait probablement le plus besoin. Son retour à Londres l’avait plongé dans une anxiété certaine, avec la volonté de ne pas reproduire les erreurs du passé. Pour autant, la drogue était rapidement redevenue la norme dans sa vie et Luca le sait bien, afin de ne pas sombrer totalement, il avait besoin de trouver des espaces n’ayant pas de rapports avec la mafia, afin de préserver un certain libre-arbitre. Abi lui avait apporté cela et au-delà des nuits endiablées qu’ils avaient passées ensemble, Luca avait appris à connaître la femme derrière la silhouette avantageuse. La personnalité de la jeune femme lui est rapidement apparue comme étant celle d’une femme engagée, passionnée, et attentionnée. Abi savait maintenant lire en lui comme dans un livre ouvert et depuis cette discussion à Soay, il semble qu’il y ait un tournant dans leur relation.

D’une simple amie, Abi était devenue une confidente pour Luca, un soutien certain face à ses propres sentiments qu’il ne comprend pas et qu’elle s’évertue à souhaiter décrypter pour lui. Ses conseils lui permettent a minima de réfléchir plus aisément à la situation, il n'est pas toujours d’accord avec ce qu’elle lui dit parce que souvent, elle tape dans le vrai, l’obligeant à aller puiser dans ses ressources, dans ses émotions et ses sentiments. La tâche n’est pas aisée pour l’italien qui a toujours été habitué à les dissimuler. Pour autant, si Luca n’est pas doué avec ses propres sentiments, ceux des autres lui importent parfois, ceux d’Abi lui importe. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’embarras d’Abi se perçoit à des kilomètres. Se libérant de ses contraintes professionnelles pour quelques heures, amenant son amie dans son appartement, il cherche à comprendre les raisons qui l’ont poussée à venir jusqu’ici. Lorsqu’elle lui dit qu’elle a plutôt l’habitude de la discrétion, il hausse un sourcil. « Ravi de faire partie de ceux qui ont su déceler le diamant brut parmi les cailloux. » En tout cas, quoi qu’il en soit, il ne la laissera pas seule affronter cette épreuve, surtout si cela suffisait pour la mettre dans tous ses états. Luca n’est pas un grand habitué des mariages. Le dernier qu’il avait osé envisager s’est terminé par la séparation des deux protagonistes et depuis qu’Anja et Jaeden avaient rompu leurs fiançailles, il doit l’avouer, le mot mariage et tout ce qui a attrait à l’engagement l’angoisse plus que de raison. C’est bien là un effort considérable qu’il fait pour elle et il ne sait pas si elle s’en rend compte. « Te dévaloriser toi, pas possible. Par contre je peux critiquer les robes aisément. »

Préparant son sac, il ne vit pas Abigail venir avec son cadeau. Pris au dépourvu, sentant son cœur se serrer face à la délicate intention qu’elle avait eu pour lui, Luca s’enquiert de lui offrir, à son tour, une petite partie de lui. Un de ses dessins, un de ses parchemins noircis par les fusains. Luca n’a pas pour habitude de laisser qui que ce soit les regarder, c’est intime. Trop peut-être. Mais pour elle, cela lui a semblé naturel en réalité. « Edition limitée. » dit-il un sourire aux lèvres alors que le regard d’Abi se pose à nouveau sur le dessin. Se préparant pour le voyage, Luca l’emmène dans la pièce où les membres de la famille entreposent leurs motos volantes et après avoir trouvé le casque adéquat pour protéger la tête de son amie, il lui dégotte un des blousons de protection d’Anja. Alors qu’elle tente de refuser, le regard sombre de Luca semble la dissuader. Si l’italien est plutôt du genre casse-cou, il ne lésine pas sur la sécurité, encore plus depuis l’accident d’Anjelica, encore plus depuis le décès d’Andréa… Ces blousons sont ce qui se fait de mieux sur le marché en termes de qualité et de sécurité, il est hors de question qu’ils s’envolent sans qu’elle n’en porte un. « Du prosecco sera plus apprécié. » dit en ricanant. t’as un pb toi à vouloir offrir des chocolats à tout le monde hihi, c’est ton côté suissesse ? Une fois sortis du garage, Luca lance sa bécane dans les airs et ils s’envolent après avoir activé le sortilège d’invisibilité. Même si Abi semble être habituée au vol dans les airs, Luca se surprend à demeurer prudent alors qu’il a bien envie de lâcher les gaz et d’aller à toute allure mais la présence d’Abi derrière lui l’en empêche. Ils volent pendant de nombreuses minutes avant que Luca amorce la descente vers la boutique. Il prend l’air horrifié lorsqu’elle réplique qu’elle ne pourra jamais comparer ce vol à un vol sur dragon. « Comment oses-tu !» dit-il en ricanant. « Je prends bonne note de votre demande Madame MacFusty. Je me suis dit que pour ta première fois, valait mieux y aller tranquillement, ce n’est pas exactement les mêmes sensations qu’un vol sur balai. » Faisant disparaître leurs casques à l’aide de la magie à l’endroit prévu à cet effet, Luca jette un sortilège anti-vol sur sa moto avant de suivre Abi devant la boutique.

Restant scotché quelques instants devant la devanture, se demandant sérieusement ce qu’il faisait là et envisageant éventuellement de repartir, Luca se tourne vers la future mariée et en l’observant quelques instants, en proie aux doutes qui l’assaillent, Luca se résout à rester. D’un air enjoué, il dit : « Bon ? On y va ? Mes bouteilles vont se réchauffer. » Un air railleur sur les lèvres, il montre la porte du doigt et Abi s’élance courageusement lol. À peine à l’intérieur de la boutique, une femme les aborde et Luca regarde son amie d’un air amusé alors qu’elle bredouille de manière malhabile son nom. S’en allant vérifier cela auprès de son agenda, elle les invite ensuite à la suivre. Alors que Luca s’apprête à lui emboîter le pas, Abi recule et butte contre son bras. « Tu fais quoi là ? Allez en avant si tu ne veux pas mon pied au cul. » lui murmure-t-il d’un ton qui s’évertue à être menaçant mais son sourire en coin offre à Abi une violente contradiction. Ils s’avancent enfin et le jeune homme prête enfin attention à la boutique. Des robes en veux-tu en voilà, exposées de part et d’autre, des accessoires disposés à certains endroits stratégiques et Luca soupire faiblement alors qu’ils passent dans l’arrière-boutique, probablement pour que les futures mariées puissent essayer leurs tenues en toute discrétion, sans être dérangées.

Lorsque la vendeuse demande à Abi ce qu’elle souhaiterait, la réponse d’Abi est sans appel. Confusionnante. Disons tout et son contraire en même temps en réalité. Luca fronce les sourcils en même temps que la vendeuse qui pourtant, agite sa main en direction des elfes de maison qui s’affèrent dans la pièce. « Je recommande une robe bouffante avec laquelle on peut mettre une veste de motard par-dessus. Style rock’n’roll. » Sentant le regard abasourdi d’Abi sur lui, il éclate de rire. « Vous avez qu’à nous proposer différents styles et déjà on élimine les formes de robe que tu ne veux absolument pas ? » suggère-t-il en questionnant Abi du regard. Il n’y connait rien, il ne sait pas. Il se tourne vers l'employée. Après tout, c’est elle la vendeuse, c’est à elle de faire son job non ? Cela semble la décider car elle acquiesce et s'avance vers Abi. « Venez Madame MacFusty, nous allons pouvoir commencer à vous préparer pour les essayages. » Entraînant Abi dans une cabine, un des elfes ramène une première robe que Luca n’a pas bien le temps de voir, trop occupé à sortir sa bouteille de son sac. La vendeuse revenant vers lui, il demande : « Vous avez des coupes de champagne ? » dit-il tout sourire. La jeune femme lui offre un sourire éclatant, il ne doit pas être le premier à faire ça. D’un coup de baguette magique, deux verres à pied apparaissent, elle lui dit : « Ce n’est pas si souvent que le futur époux accompagne la future mariée pour ses essayages. Certains veulent garder la surprise. » Luca ouvre la bouche pour rétablir la vérité, puis la referme. « Oh vous savez, en Italie, ces traditions sont totalement désuètes. Et j’estime avoir le droit de le dire si ma future femme ressemble à un boudin. » La mâchoire de la vendeuse se décroche et ses pommettes deviennent roses, envahies par la gêne qu’il lui procure. Lui souriant à pleines dents, Luca s’évertue ensuite à déboucher la bouteille et le bruit caractéristique du bouchon le satisfait tandis qu’il remplit les deux coupes. D’une voix plus forte, il demande : « Abi chérie, tu veux du champagne ou c’est mauvais pour le bébé ? » La femme sursaute et laisse échapper un cri d’horreur. Luca se demande s’il en fait trop. Mince. C’était pas prévu au programme cette mascarade.
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Ven 4 Mar - 17:43

Février 2021

J’accordais un sourire triomphant doublé d’une lueur taquine dans les yeux alors que l’italien se targuait de m’avoir repérée dans la foule, et il pouvait ! À force d’avoir été dérangée par les autres élèves durant ma scolarité à Poudlard, et à ce point timide, je m’étais habituée très tôt à me fondre dans les ombres, à me faire discrète au point de passer inaperçue à ce point que, dans la foule, on me marchait régulièrement dessus, et c’était sans compter sur ma petite taille. J’avais pris l’habitude de disparaître aux yeux des gens tant j’appréciais la solitude. J’en étais même venue à aller vivre sur une île perdue pour avoir la paix, le comble de l’ermitage.
Alors oui, ceux qui m’avaient remarqué pouvaient se compter sur les doigts d’une seule main, et Luca en faisait partie. C’était lui qui était venu m’aborder dans ce bar tandis que j’avais eu seulement l’intention de me saouler un peu pour oublier la date à venir si dramatique que j’avais à affronter chaque été depuis maintenant trois ans. Certes, il avait été intéressé par mon tatouage, mais y avait-il eu que cela ? La suite de notre relation prouvera que non, même les cours de langue que nous avions voulu mettre en place, pour qu’il m’enseigne le français, n’avait pas tenu la route bien longtemps. Oh, j’avais appris quelques mots et phrases, certes, mais rien de manière très studieuse, ou disons que c’était tout relatif.
Après avoir ricané au fait qu’il ne se gênerait pas de dévaloriser les robes et non pas moi, je cachais mon soulagement en regardant son dessin. J’étais flattée et gênée qu’il ait pu me dessiner de la sorte, et surtout avec autant de détail. À ma connaissance, personne ne m’avait jamais dessinée jusque-là, et j’étais profondément touchée que le premier soit Luca. Notre relation n’avait jamais franchi quelques barrières avant notre nuit à Soay, et d’autant plus après la soirée estudiantine à Poudlard. Depuis ce soir-là, nous étions devenus insortables, à improviser des conneries à tout bout de champ. C’était aussi pour ça que j’avais souhaité qu’il vienne avec moi aujourd’hui, parce que j’étais certaine que d’une manière ou d’une autre, il arriverait à me détendre.

Notant que sa sœur préférait le prosecco au chocolat (c’est quoi ces gens qui n’aiment pas le chocolat ?) j’enfilais le blouson avant d’enfourcher la moto et de m’agripper à mon ami. Durant le voyage, je le sentais prudent, et pourtant, cela me permettait aussi de profiter du paysage. En général, j’étais toujours sur mes gardes lorsque je sortais un animal pour voler, car il y avait toujours une part d’imprévu avec eux, quelque chose qui, normalement, arrivait moins souvent avec une mécanique bien huilée comme l’était la moto de Luca.
Voilà pourquoi je me permettais une remarque innocente (ou presque) une fois que nous étions à terre et le moteur coupé. Un large sourire fendant mes lèvres, je lui tendais le casque que je venais d’enlever pour qu’il le range avant de rétorquer.

- Non, vraiment pas les mêmes sensations que sur un balai. Je n’aime pas voler en balai, je préfère les animaux, mais la moto, c’est bien aussi. Puis je le regardais en coin avec une lueur presque salace dans les yeux. Est-ce là ta nouvelle manière de nous envoyer en l’air puisque nous ne le faisons plus au sens propre ?

Je le poussais un peu du coude avant de faire face à la devanture du magasin et de perdre totalement ma superbe. Bordel de merde… déjà, demander quelqu’un en mariage c’est chaud (et encore, je ne dis pas ça parce que j’avais quarante de fièvre), mais quand ça devient concret à ce point-là, c’est vraiment difficile à gérer pour moi !
Les pieds ayant pris racine, je serrais nerveusement mes mains entre elles pour essayer de faire passer le stress qui ne cessait de monter, jusqu’à ce que Luca me coupe dans mes hésitations et me pousse à entrer. Ah, oui. Pauvres bouteilles, où avais-je donc la tête ?
Ce fut donc presque à contrecœur que je rentrais dans le magasin, et c’était en bégayant comme une véritable handicapée (ce que j’étais) que j’indiquais mon nom pour le rendez-vous à la tenancière de la boutique. Cette dernière, après avoir vérifié son agenda, nous invite à la suivre dans l’arrière-salle, ce que je faisais. Mais à reculons. À nouveau, la présence de Luca s’avéra plus qu’utile puisqu’il me poussa en avant alors que j’avais buté sur son bras. Son ton de voix ne me laissait pas le choix, et ce fut d’autant plus apeurée que je tournais un regard paniqué dans sa direction. Ce fut seulement à ce moment que j’aperçus son sourire et compris la plaisanterie.
Le sens de l’humour d’Abigail MacFusty était apparemment resté avec la moto sur le trottoir. D’un sourire crispé, je poussais un tout petit couinement avant de m’élancer lentement dans la grande arrière-salle de la boutique.

Les murs étaient presque tous constitués de penderies qui s’étendaient de long en large. Dénombrer la quantité de vêtements présents ici était sans doute impossible, sauf peut-être pour la propriétaire. Contre toute attente, j’en venais à halluciner devant la base de données qu’elle devait avoir et mettre constamment à jour pour ses habits. Ce travail de titan !
Prise au dépourvu par la question de la vendeuse, question tout à fait censée, il fallait quand même le souligner, je répondais avec toute la splendeur de ma maladresse. Encore une fois, ce fut Luca qui prit les devants en recommandant quelque chose qui me surprit un peu. Quoi ? Rock’n’roll ?
Évidemment qu’il n’y avait que lui pour proposer une telle tenue, après tout, c’était avec ma veste en cuir que nous nous étions connus, et son goût prononcé pour les motos l’influençait forcément. Enfin, lorsqu’il suggéra de nous soumettre plusieurs styles, je me contentais de hocher la tête en direction de la vendeuse comme si j’étais une enfant à qui l’on proposait un gros gâteau. Que dire d’autre en réalité ? Je n’étais absolument pas à l’aise, j’avais la tête enfoncée dans mes épaules, ces dernières à ce point crispées qu’elles étaient parfaitement parallèles au sol. En la voyant s’avancer vers moi, je réprimandais un nouveau geste de recul avant de la suivre, poussant un nouveau petit couinement, alors qu’à l’intérieur, je hurlais pour qu’on vienne me sauver.

Enfermée dans la cabine, je commençais à me dévêtir, toujours nerveuse, réalisant même que je tremblais, tandis qu’un elfe de maison m’apportait la première tenue. Amusée, car elle reflétait la demande de Luca, je l’enfilais sans rechigner. C’était certain qu’il allait adorer.
Puisque j’étais silencieuse derrière le rideau, j’écoutais la conversation entre mon ami et la vendeuse, et j’eus un arrêt cardiaque aux dires de cette dernière… puis je me sentis passer de vie à trépas à la réplique complètement déplacée et osée de Luca. L’elfe de maison qui était en train de m’habiller dut claquer des doigts devant mon nez pour que je revienne à moi, et lorsque l’italien s’adressa à moi d’une voix plus forte, je ne pus m’empêcher de pouffer de rire tout en murmurant.

- Mais putain, mais qu’il est con lui. Puis j’élevais la voix. Oh, crois-tu que ce soit vraiment raisonnable avec les bières et la vodka de ce matin mon p’ti sucre ?

Je roulais des yeux dans mes orbites à ce surnom parfaitement ridicule que je venais d’inventer pour mon ami et au dialogue que nous avions présentement. Qu’avais-je dit plus tôt ? Ah oui, que nous étions insortables. Sans nul doute que la vendeuse était en train de vivre sa pire vie, car elle fonça dans ma direction pour ouvrir le rideau juste assez pour y passer uniquement sa tête.

- Madame MacFusty, je ne veux en rien me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais vous ne devriez…
- Pas boire pendant le service ? Je sais, mais tout va bien ne vous en faites pas, je suis au repos là.

Je souriais de manière totalement innocente à la jeune femme, avec un aplomb si nouveau et soudain que mon interlocutrice en fut totalement déboussolée. Voyant toutefois que j’étais prête, elle s’écarta pour me laisser sortir. À nouveau nerveuse à l’idée de me montrer à l’italien, je mis quelques secondes pour me décider avant de sortir et de me montrer, vêtue d’une robe blanche légère à dentelle qui épousait parfaitement mes formes, le tout, relevé d’un blouson en cuir, comme il me l’avait demandé. Mes hanches étaient entourées d’une ceinture noire ornée de chainette relevant une certaine grâce rebelle à tout l’ensemble.

Spoiler:

Avant qu’il ne puisse dire quoique ce soit, je souriais, de manière forcée, en montrant toutes mes dents avant de me rapprocher de lui et d’attraper la bouteille de champagne.

- Je prends celle-là, tu prends l’autre hein…

Spoiler:

Et sans attendre, je bus directement au goulot de la bouteille de grandes lampées. Apparemment, c’était moi qui avais besoin d’encouragement, et non pas lui en fais. Qui l’eût cru ? Autant continuer sur notre lancée du n’importe quoi, je le regardais avant de rétorquer.

- Puisque je risque de prendre du poids, je risque d’être boudinée dans cette robe le jour du mariage tu ne crois pas ?
- Nous pouvons la retoucher quelques jours avant si vous le souhaitez.
- Ah, c’est bon à savoir, merci

Je souriais à la vendeuse qui proposait apparemment d’excellents services, et qui essayait tant bien que mal de ne pas trop paniquer devant nos propos et nos bouteilles d'alcool. Je reposais la bouteille de champagne à côté de Luca. Mes paroles avaient en réalité un sous-entendu : c’était que je n’étais pas convaincue par mon allure. Pour sortir dans la vie de tous les jours, c’était presque ce genre de vêtements que je mettais en effet, et quand bien même nous n’avions aucune règle dans nos tenues avec Harper, je tenais à marquer un peu le coup ce jour-là. Après tout, ce serait aussi son anniversaire. Une idée me vint alors.

- Mmmh… peut-être essayer avec de la couleur qu’en penses-tu mon poupinou ?

Alerte aux surnoms débiles.



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Mer 13 Avr - 22:41

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LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse
Quitter le Thestral Motor pour se rendre de manière volontaire dans une boutique de prêt-à-porter féminin, voilà une journée pas comme les autres pour Luca Zabini, peut-être même à marquer dans les annales. Il faut l’avouer, le jeune italien n’a jamais eu pour habitude de se plier aux volontés des autres, préférant être le seul décisionnaire de sa vie et de ses activités. Pour autant, lorsqu’Abi est venue le trouver avec cet air des mauvais jours, il n’a pas pu se résoudre à refuser sa proposition. Après tout, la jeune enseignante a été là pour lui lorsqu’il a traversé des heures plus sombres et il lui apparaît normal de lui rendre la pareille. Le mariage d’Abi et d’Harper approchait à grand pas et même si la date ne semblait pas encore fixée, c’était suffisamment proche pour qu’Abi cherche sa tenue pour le grand jour. Luca n’estime pas être la personne la mieux placée pour parler chiffons, voile de mariée et bouquet de fleurs. La seule chose qu’il apprécie dans les mariages, c’est le buffet et les femmes qui cherchent le prince charmant à qui il se fera un plaisir de briser le cœur après une partie de jambe en l’air inopinée et expéditive entre le fromage et la pièce montée. De quoi passer une belle soirée. Pour autant, il sait qu’en terme de loyauté, on ne lui arrive pas à la cheville et le lien qu’il entretient avec Abigail est suffisamment tangible pour qu’il daigne lui accorder une confiance presque aveugle. Certes, si Abi ne sait rien de sa double-vie, c’est aussi parce qu’il souhaite la protéger de tout cela et conserver son jardin secret. Avec elle, c’est une autre existence qu’il touche du doigt, l’existence plus simple d’un trentenaire chef d’entreprise. En ôtant la pression qui lui incombe en tant que dirigeant de la Cosa Nostra, il redevenait ce gars ordinaire. Loin de l’idée d’oublier qui il est, ce clivage lui permet surtout d’avoir une soupape, d’avoir des moments où il peut être Luca, ce mec qui aime les motos et qui apprécie faire des blagues graveleuses. Pour autant, quoi qu’on puisse en dire, il s’agit bien là d’un homme en qui on peut avoir confiance s’il se décide à accorder la sienne. Entre Luca et Abi, il s’agit bel et bien d’une amitié née autour d’un verre, autour d’une conversation bien banale autour d’un tatouage et si Luca n’avait pas imaginé que cette simple discussion le mènerait sur de tels sentiers, il ne regrette aucun instant.

Après avoir survolés le ciel londonien, les deux comparses atterrissent devant la devanture du magasin et Luca ne peut s’empêcher de réclamer les premières impressions de son amie. Certes, de part son métier, elle est une grande habituée des vols sur les animaux mais il apparaît différent de s’envoler dans les airs avec une moto ; Luca ne sait pas si c’est mieux ou non, cela semble juste être différent. Semblant d’accord avec lui, Abi précise que les sensations en moto étaient meilleurs que sur un balai et cette réponse le satisfait. Un sourire carnassier s’installe sur son visage tandis qu’elle lui demande si c’est leur nouveau moyen de s’envoyer en l’air. Amusé, il ajoute : « Ne me tente pas, je ne suis pas contre un plan à trois avec ta future femme. » Luca est plutôt du genre volage, il l’a toujours été. Même si son lien avec Théodora demeure particulier parce qu’ils finissent toujours par revenir l’un vers l’autre, ils ne s’interdisent pas -l’un comme l’autre- de gouter à d’autres plaisirs éphémères. Plus simple, moins contraignant. L’esprit de Luca le revendique haut et fort tout en sachant bien qu’au fond de lui, rien n’est plus attirant pour lui que les bras de sa comptable. Pour autant, ses mécanismes de défense piqués à vif, il préfère se dissimuler derrière cette image frivole, plus simple à supporter et à assumer. Cela leur convient désormais.

Une fois arrivés dans l’arrière-boutique, et non sans mal (car Abi ne semblait pas disposée à y entrer sans quelques encouragements bienveillants), Luca laisse son regard vagabonder sur les étalages tous aussi imposants les uns que les autres. Probablement qu’Abi n’avait pas choisi cette boutique par hasard, celle-ci doit probablement détenir les parts du marché londonien en termes de robe de mariée. La manière dont les vendeuses et les elfes de maisons s’affairent à leurs tâches montre bien que cette affaire est rondement menée et que tout est millimétré comme sur du papier à musique. Bien décidé à enrayer la machine à l’aide d’un seul grain de sable, une fois Abi à l’intérieur d’une cabine, Luca s’évertue à mettre une des employées mal à l’aise avec ses propos extrêmement gênants. N’ayant absolument aucune pudeur, aucune honte, il continue son cirque jusqu’à impliquer Abi dans ses conneries, sans savoir si elle va y répondre ou si elle va l’engueuler d’être aussi immature. Mais alors qu’elle entre dans son jeu, un sourire s’installe sur les lèvres de l’Italien tandis qu’une lueur effrontée s’anime dans ses yeux clairs. « Comme tu veux, mais le champagne c’est moins fort que la Vodka, j’pense que ça passe ma poussinette. » Aucune idée si ce surnom existe en anglais, Luca se contente de traduire Pulcina dans la langue de Shakespeare en espérant que cela passe. La réponse de Luca ne semble pas satisfaire la vendeuse qui se précipite vers la cabine d’essayage et y passe sa tête pour réprimander Abi. Du moins c’est ce qu’il présume étant donné qu’il n’entend pas ce qu’il se dit de l’endroit où il se situe mais il imagine plutôt bien la scène. Elle disant que son état nécessite une vigilance constante et Abi répliquant par un commentaire encore plus déboussolant. Et lorsque l’employée se redresse en refermant soigneusement la cabine, Luca sait qu’il a vu juste étant donné son regard dérouté et ses joues encore rosies par l’embarras qu’ils lui procurent. Parfait. Elle n’est pas au bout de ses peines.

Portant pour la première fois la coupe de champagne à ses lèvres, Luca fixe le rideau qui s’agite, attendant que sa femme daigne en sortir. Au bout d’un moment, Abi apparaît devant lui, une robe blanche que Luca trouve affreuse et qui aurait pu être portée par sa grand-mère maternelle (riposa in pace nonna) mais qui est superbement réhaussée par ce veston en cuir qui ne semble pas être de très bonne facture mais qui fait l’affaire. Une ceinture noire à chainette donnant un côté rock’n’roll à cette robe bien sage, Luca scrute Abi sans vergogne de haut en bas avant d’ouvrir la bouche pour commenter en disant que c’était largement insuffisant mais il n’en a pas le temps, elle s’approche de lui pour attraper une bouteille de champagne et boire directement au goulot. « Faisons fi des convenances, c’est ça mi amor ? » Forçant le trait, Luca termine cul sec son verre de champagne pour suivre Abi au goulot. Insortables ? Ils le sont. La vendeuse les regarde d’un air décontenancé en tentant tant bien que mal de garder une certaine neutralité bienveillante qui ne transparait pas du tout. Au contraire, elle semble tellement outrée de leurs comportements respectifs qu’elle en reste sans voix. « J’ai bien fait d’en prendre plusieurs… » dit-il alors qu’elle vide déjà un tiers de la bouteille en une seule gorgée. « T’as soif bébé, prends en plus. » suggère-t-il tandis qu’il regarde du coin de l’œil la vendeuse bondir sans oser dire quoi que ce soit. En tout cas, le comportement d’Abi est suffisamment parlant pour que Luca comprenne qu’elle est relativement angoissée par ses essayages alors il décide de ne pas en rajouter une couche avec la tenue qu’elle porte qui ne correspond pas vraiment à l’idée qu’il se fait d’une robe de mariée -du moins pas pour Abi-. Pour autant, il ne peut s’empêcher de dire : « Ouais probablement, tu seras énorme comme une baleine. Une baleine avec un blouson de cuir, ça va faire mauvais genre, on va avoir GreenPeace au cul. » Luca secoue la tête aux propos de l’employée. « Les retouches ne camoufleront pas le fait que nous vivons dans le pêché. » Luca lève les yeux au ciel et fait un signe de croix en se trompant dans l’ordre (il n’a aucune idée de ce qu’il fait) et dit : « En espérant que je ne finirai pas en enfer. » Attrapant la bouteille, il boit une longue gorgée à son tour tout en haussant les épaules : « Un vice de plus ou de moins… » Il ricane en portant à nouveau le goulot à ses lèvres. Finalement, cette séance d’essayage promet d’être un moment d’anthologie. Son regard se reporte sur Abi tandis qu’elle l’appelle d’un surnom qu’il ne comprend pas, n’étant pas très au fait de ce type de mot. Comprenant quand même qu’il s’agit probablement de quelque chose de totalement ridicule, il fait mine de réfléchir. « La couleur c’est bien. Essaye une robe verte, banche et rouge. » Vivie l’Italia.  

Spoiler:

Et alors qu’Abi essaie successivement trois robes, Luca donne son avis sur chacune d’elle : « Sympa les épaules mais tu vas transpirer là-dedans, ça sera pas glam. » Puis : « Les fleurs c’est marrant mais c’est pas très rital, y a moyen de les échanger contre des petites pizzas ? » Et : « J’aime bien la dentelle, et ça te fait un de ses culs. » Alors qu’Abi retourne se changer, Luca demande à la vendeuse, au bout de sa vie : « On fait un mélange des trois et on a la robe parfaite j’pense. Vous avez ça ? » Alors qu’elle bredouille qu’il est peu probable qu’ils trouvent une robe à la fois verte, rouge et blanche, Luca adopte une moue marquant sa déception. « Et moi qui croyais que vous étiez les meilleurs, nous devrions peut-être aller dépenser notre fortune ailleurs. » Secouant la tête, claquant la langue, il boit une autre giclée avant de demander à Abi en train de se changer : « Tesoro, quelque chose te plaît dans ce que tu as essayé ? »
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Mar 19 Avr - 21:07

Février 2021

J’avais préféré ne rien dire quant à la suggestion pour le moins déplacée de Luca. Je ne l’avais pas mal prise, je le connaissais assez bien pour savoir que c’était considéré à la légère, mais que cela pouvait être tout à fait considéré. C’était ce qui m’avait renfrogné. J’étais terriblement jalouse et possessive de nature, mais d’autant plus lorsqu’il s’agissait de ma fiancée. Harper était tout pour moi, et ce, depuis mes onze ans. Je savais cela extrêmement dangereux, mais je n’arrivais pas à faire autrement avec elle. Elle m’avait comme emprisonnée, et quand bien même la situation s’était améliorée entre nous, je gardais une profonde crainte, bien enfouie, une peur sourde, qu’elle disparaisse à nouveau, d’une manière ou d’une autre. Cela dictait ma conduite et m’interdisais de trouver amusant la proposition de mon ami italien.
C’était sans compter l’angoisse que générait le rendez-vous d’aujourd’hui. Il devait être plaisant et merveilleux, à défaut d’être intéressant, mais il était en fait tout l’inverse. Fort heureusement pour moi, j’avais misé sur le bon cheval en la personne de Luca. Il avait la force de caractère nécessaire pour m’emmener jusque dans la boutique et me pousser (me trainer) pour y aller et confronter mes peurs sociales.

La pauvre femme devenait chèvre avec nous, et elle n’était pas au bout de ses peines. J’avais presque envie de m’excuser pour cela, mais peut-être qu’il était encore possible de s’amuser un peu ? Après tout, nous ne faisions aucun mal, nous étions simplement en train de parler. Si elle nous croyait, cela ne tenait qu’à elle, n’est-ce pas ?
Ah non, ce n’était vraiment pas dans ma manière d’être que d’agir ainsi. Luca et moi, on était insortable, et le pire dans tout ça, c’était que j’avais la sensation que si Harper avait été là, elle en rajouterait une couche.
L’idée du plan à trois traversa alors à nouveau mes pensées, et ce fut habillée d’une robe blanche aux airs rock and roll que je sortais de la cabine pour m’enfiler une bonne partie d’une des bouteilles de champagne que l’italien avait amené avec lui. Évidemment, les commentaires de ce dernier fusèrent et je ne pus m’empêcher de plisser les yeux, amusée, avant de regarder discrètement la vendeuse qui semblait être au bord de la syncope. La pauvre…
Non vraiment, il fallait lui dire.
Le fait que Luca me surnomme « bébé » me hérissait les poils de bras tant je trouvais ce surnom ridicule, mais c’était tout à fait approprié à la situation, alors je n’osais rien dire.

- Depuis quand on se soucie des convenances toi et moi ?

Dis-je avec une certaine désinvolture dans la voix. Je me découvrais des talents de comédienne que je ne me soupçonnais pas. Reprenant une gorgée alors que mon ami m’encourageait, sous le bond outré de la vendeuse, je pouffais de rire alors qu’il mentionnait Greenpeace. Le pire étant que ce ne serait pas si faux, en dehors du fait que je ne portais pour ainsi dire jamais de cuir véritable. Si aujourd’hui était l’exception, le blouson n’était pas à moi.
En voyant ensuite Luca essayer de tracer une croix religieuse sur lui, mais reprendre un peu d’alcool. Je pouffais une nouvelle fois.

- Avec tout l’alcool que tu t’enfiles, tu seras un véritable lampadaire aux enfers, tu vas cramer plus longtemps que l’éternité, t’as tellement de carburant…

Une lueur amusée traversa mon regard avant que je ne pose la bouteille à ses pieds avant de m’approcher du miroir pour contempler mon allure dans la robe. Bon… passons aux choses sérieuses. En vrai, tout ça n’était pas si mal, la coupe n’était pas mauvaise, la dentelle jolie, même la ceinture me plaisait, mais… mais il y avait un truc qui manquait. Un je ne sais quoi qui m’empêchait d’être convaincue. Et dans le fond c’était très bien, puisque c’était pour ça qu’on était ici, pour les essayages. Dans le fond, j’espérais vraiment trouver mon bonheur ici, je n’étais pas certaine que mes nerfs puissent supporter une autre journée comme celle-ci.
Ce qui était fait n’était plus à faire.
Puisque je n’étais pas convaincue, je proposais de la couleur. Luca rétorqua avec une logique profondément italienne, et les couleurs qu’il me proposa me firent à nouveau rire.

Aller go pour la verte, mais je n’étais pas convaincue par les épaules, malgré le fait que la couleur était excise et faisait ressortir la couleur blonde de mes cheveux déteints. Cela dit, je n’appréciais guère le vert quand bien même j’étais une femme de la nature. Lorsque je me présentais à Luca, je hochais la tête à sa remarque. Ouf, lui non plus n’était pas convaincu, et heureusement.
Retournant en cabine, j’enfilais à présent une robe à nouveau blanche, mais les fleurs accrochées dessus donnaient une nuance de couleur plutôt élégante et discrète. Cela dit, je trouvais dommage qu’il n’y ait pas une touche plus magique sur le tissu, et en me présentant à Luca, sa remarque me décontenança tellement que je partis en fou rire.

- Des pizzas ? Voyons p’ti chat, on en a mangé hier et ce matin, me dit pas que tu en veux encore. Attention, je vais finir par être jalouse.

Ça y est. J’avais envie de manger une pizza maintenant. Bravo Luca, pas merci hein. Purée… et c’est en riant toujours que je retournais à la cabine. Au moins, l’angoisse de me présenter dans la boutique s’était envolée avec nos conneries, même si la vendeuse commençait à être blanche comme un cul tant elle prenait sur elle pour ne pas appeler les services judiciaires.
Adoptant la robe rouge, je me présentais à nouveau à mon ami, peu convaincue cette fois-ci par la coupe, néanmoins, j’adorais la couleur puisque le rouge était ma préférée. Le compliment de Luca drapé de sa bêtise constante me fit plaisir. Peut-être était-ce idiot, mais ça avait au moins le mérite de me rendre désirable, et si Luca le voyait, alors sans doute que Harper le verrait aussi.

- Mon corps est constitué d’autre chose que de mon cul et de mes seins je te rappelle.

Je ricanais tout en retournant à la cabine, réfléchissant rapidement alors que je me déshabillais une énième fois. L’oreille tendue, j’entendais mon ami discuter avec la vendeuse et se mettre limite à insulter sa boutique. Non, mais fallait pas pousser le bouchon trop loin non plus Maurice, la vendeuse allait nous foutre dehors avant même que je n’aie trouvé ce qui me convenait. Enfin, à supposer que je trouve quelque chose, je pouvais dire adieu à la petite réduction de générosité de la vendeuse « parce qu’on a été sympathique ». Même moi je savais ça alors que je ne travaillais pas dans la vente, contrairement à Luca qui tenait un garage de motos. Enfin cela dit, il avait peut-être des oursins dans les poches quand il s’agissait de son travail.
Ainsi, de la cabine, je me permettais une petite remarque.

- Sois pas si exigeant mon minou, on va bien finir par trouver quelque chose ici, on a déjà trouvé des choses bien !

Une chose était claire à mon esprit, je refusais de porter du noir. C’était mon mariage, pas un enterrement.
Un elfe de maison m’apporta alors une robe rose, une jaune et une panthère. Bon, pourquoi pas, essayons, on moins, on verra les coupes.

les robes:

La rose me plaisait bien, mais elle était du même acabit que la première blanche. Il manquait un truc.
Dans la jaune, j’avais la sensation d’être devenue un rideau. Alors certes, j’étais douée en camouflage, mais là c’était peut-être un peu trop poussé.
La panthère épousait très bien mes formes, mais clairement, ce n’était pas approprié pour un mariage.
Malgré le fait que je ne sois pas convaincue, je les présentais successivement à Luca en attendant ses avis avec curiosité, avant de retourner en cabine et pousser un long soupir. Après l’angoisse et la joie, je commençais à ressentir un peu de désespoir. Étais-je donc si difficile à habiller pour un événement aussi important que mon mariage ? Je fermais les yeux en m’asseyant sur la petite banquette située dans la cabine pour réfléchir. L’elfe de maison posté avec moi attendait tranquillement mes instructions et il fallut quelques secondes de plus pour que je sois traversée par une idée. Je le regardais et lui partagea mon idée. La vendeuse, professionnelle, était restée non loin et avait entendu ma demande.

- Je devrais pouvoir vous trouver ça. Attendez.

D’un coup de baguette magique, elle fit venir une robe qui, cette fois, dès le premier coup d’œil me plus. Avec un sourire, je remerciais la tenancière de la boutique et enfilais la robe. Tout de suite, le touché du tissu m’avait séduite, mais une fois sur moi, je ne pouvais être que convaincue. La coupe était parfaite. Peut-être faudrait-il quelque retouche, mais un rien trop exigeant.
Prise d’un petit regain d’espoir, je bondissais hors de la cabine pour me présenter à Luca dans mon nouvel atour, une angoisse pointant dans le creux de mon ventre. Elle me plaisait, j’espérais qu’il en irait de même pour lui.



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Mer 4 Mai - 21:24

Tu sais quand la mariée arrive et qu’elle fait sa superbe entrée ? J’aime jeter un coup d’œil à l'autre fou qui va s’marrier.

LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse
« Depuis quand on se soucie des convenances toi et moi ? » Un sourire s’installe sur les lèvres de Luca qui n’en pense pas moins. « Devant les gens, j’essaie de me tenir, tu sais bien. » Amusé qu’elle rentre dans son jeu aussi facilement, cela lui rappelle à quel point il apprécie la jeune femme. Abi l’accepte comme il est, avec son caractère insupportable, ses défauts, ses fêlures. Elle n’a jamais essayé de le changer, tout au mieux, elle a tenté de l’aider dans son cheminement de pensées, de l’aider à y voir plus clair avec ses questionnements qui n’en finissaient jamais. Elle est entrée dans la vie de Luca sans crier gare et pourtant, maintenant qu’elle y est, Luca a du mal à se l’imaginer sans cette petite bonne femme. Petite par la taille, mais avec une personnalité qui dénote, une personnalité atypique. Après tout, il fallait au moins cela pour que Luca la remarque. Balançant quelques insanités tout en s’enfilant une autre gorgée d’alcool, Luca avale de travers aux propos d’Abi sur les enfers, s’étouffant de rire devant la comparaison qu’elle ose faire. « La métaphore est belle, et malheureusement, elle est vrai. » dit-il après avoir toussé quelques instants pour ne pas mourir en riant. Quoi que, ce serait une belle mort.  

Regardant Abi dans la première robe, faisant quelques commentaires sur celle-ci, Luca prend les choses en main en demandant à la vendeuse -toujours aussi coincée d’ailleurs- d’aller chercher quelques robes à son goût et à la moda milanese s’il-vous-plaît. S’exécutant à satisfaire les désirs de l’italien, les elfes ainsi que l’employée s’évertuent à transmettre plusieurs robes à Abigail. La future mariée, en réalité. Future mariée… Ces mots tournent dans la tête de Luca comme une litanie sans fin, une litanie dont il a du mal à se défaire tellement cette idée lui semble encore surréaliste. Il n’imaginait pas devoir se confronter de sitôt à de nouvelles épousailles. Depuis la rupture des fiançailles d’Anja et Jaeden, la perception du mariage de l’italien avait quelque peu changé, pour ne pas dire qu’elle avait fait une brusque embardée à 90 degrés. Si avant l’idée d’accompagner sa sœur à l’autel et la laisser au bras de son meilleur ami lui paraissait acceptable, depuis qu’ils avaient rompu, Luca ne croyait plus vraiment aux histoires d’amour. Non pas qu’il y ait un jour véritablement cru, même si leurs parents ont toujours été un modèle de perfection inattaquable en matière de couples. Luca ne s’est jamais vraiment senti à la hauteur du poids que cela ferait porter encore une fois sur ses épaules. Le poids de la mafia lui incombait déjà alors l’idée même qu’on lui ajoute le poids d’une famille, de sa propre famille lui est insupportable. Il sait bien que ses ennemis s’en donneraient à cœur joie si un jour il venait à porter son dévolu sur une femme et qu’il accepte d’avoir une descendance. Il n’y a jamais eu de pression du côté parental mais Luca sait à quel point le besoin d’un héritier est primordial lorsqu’on dirige une mafia de cet ordre. Il faudra bien quelqu’un pour prendre la relève, comme lui a pris la relève de son père, et son père encore avant lui.

Luca pousse un long soupire tandis qu’Abi est en proie avec ses essayages, quittant la robe verte pour la robe « pizza ».  Alors qu’elle est en cabine, Luca sort son carnet de croquis et commence à dessiner d’un air distrait les robes successives essayées par Abi, si jamais elle a besoin de faire un choix après, elle pourra aisément se les remémorer… Sa remarque sur la robe pizza lance la jeune femme dans un fou rire dans lequel Luca a bien du mal à ne pas se laisser emporter et il pince ses lèvres tandis que quelques soubresauts s’emparent de son corps qui tente comme il peut de ne pas succomber. « J’ai faim. » se contente-t-il de répondre. À force de boire et de parler de pizza, le voilà affamé ! Il tourne la page de son carnet lorsqu’Abi réapparait dans la robe rouge, la préférée de Luca jusqu’alors. « Ah bon ? Ah oui, de tes belles hanches prêtes à m’accueillir, c’est ça ? » dit-il dans un murmure pour ne pas que la vendeuse n’entende, n’ayant pas envie de mettre Abi mal à l’aise avec ses remarques graveleuses. S’arrêtant de dessiner un instant pour réclamer d’autres robes plus jolies, Luca se plaint de ne pas trouver quoi que ce soit à leur goût et Abi le réprimande à demi-mots au travers de la cabine et l’italien stoppe ses âneries. Il ne fallait pas non plus qu’elles refusent ensuite de vendre une robe ou de faire des retouches si Abi parvenait enfin à trouver son bonheur. Il dit simplement : « Perdonami, signora, je suis un peu stressé, vous savez ce que c’est, les préparatifs d’un grand mariage, cela me monte un peu à la tête. » Un sourire charmeur sur les lèvres, la vendeuse lui adresse un sourire coincé en retour et elle se sent obligée d’ajouter : « Ne vous en faites pas, nous avons l’habitude. » Mon cul, pense immédiatement Luca. Personne n’arrive à la cheville du duo infernal qu’il forme en ce moment avec l’héritière des MacFusty. Un duo remarquable. Insortable. Intenable. Mais qui permet au moins à Abi d’être plus détendue. Et c’est tout ce que Luca espérait. Qu’elle puisse profiter du moment sans être stressée comme elle l’était lorsqu’elle est venue le chercher au garage.

Abi essaye successivement trois robes. Les trois laissant Luca totalement pantois, n’étant vraiment pas certain de ce soient des robes appropriées pour une cérémonie de mariage, même pour Abi ; il donne néanmoins son avis sur chacune d’entre elles. Pour la robe rose : « Tu pourrais presque mettre ça tous les jours. Trop simple. » tranche-t-il. Pour la robe jaune : « Moi Dio, è orribile ! » Et transparent de surcroît. « Sauf si tu veux aller à la plage après le mariage. Limite comme ça t’es déjà habillée. » décrète-t-il. Quant à la dernière robe, la robe panthère, il secoue la tête : « J’aime pas trop… » Alors qu’Abi se change pour la énième fois, Luca feuillette les croquis de toutes les robes essayées depuis le début et à ses yeux, seules la première robe blanche ou la rouge pourrait faire l’affaire mais ce sont des robes qu’Abi pourrait aisément porter pour aller à une soirée quelconque. Il s’agit de son mariage et Luca n’a nullement l’impression d’avoir eu le « Whaou » qu’il est en droit d’attendre à la vue de sa future femme. Abi mettant davantage de temps à se décider cette fois, Luca regarde soudainement la vendeuse s’activer et ramener une robe dont la couleur lui plaît au premier coup d’œil. Peut-être parce que celle-ci lui rappela les yeux d’une certaine jeune femme blonde… Luca soupire pour la seconde fois en quelques minutes et il termine grossièrement le tachetée de la robe panthère sur son dessin en attendant qu’Abi sorte encore une fois de la cabine.

Lorsque le bruit du rideau se fait entendre pour la énième fois, Luca relève la tête et avant même de voir la robe, c’est le visage d’Abi qui l’interpelle. Cette robe lui plaît, il le sent. Cela suffit pour qu’il appose plus sérieusement son regard sur la silhouette de son amie, ses yeux mettent un certain temps à détailler le tissu de la tenue, la coupe de la robe. « Cazzo. » Putain. Restant bouche bée, sans trouver d’autres mots pour décrire ce qu’il voyait, il ajoute : « T’es superbe. » Pas de fioriture, pas de bébé ou de poussinette. Pas de conneries, pas de moqueries, pas de remarques acerbes. Un commentaire reflétant simplement la stricte vérité. Une tenue qui lui ressemble, une robe qui la met en valeur et qui tombe juste. Et le sourire d’Abi sur ses lèvres lui intime qu’elle n’en pense pas moins. Sans perdre de temps et avant qu’elle ne se cache à nouveau dans sa cabine, Luca tourne à nouveau une feuille de son carnet. Furieusement, sa main s’active sur le papier et pour la première fois depuis le début des essayages, Luca y ajoute le visage de son amie, vibrante de vie, ravie de trouver enfin une robe qui lui convienne. Ses yeux faisant de rapides aller-retour entre Abi et sa feuille de papier, le croquis prend forme en un éclair entre ses doigts experts. Cherchant à capturer cet instant, Luca va vite mais ses gestes sont précis, aussi précis qu’ils peuvent l’être. Luca n’a pas véritablement son mot à dire sur le choix définitive de la tenue mais il ne peut s’empêcher d’ajouter : « C’est celle-là que je préfère. » Comme si cela n’était pas suffisamment clair vu la rapidité à laquelle le fusain dessine Abigail sur sa feuille. C’est simple, mais c’est dit. Il se tait, usant de toute sa concentration sur son œuvre. Et alors qu’il dessine, une autre idée vient lui traverser l'esprit et s’impose avec brutalité dans ses pensées ; il devra user de ruse pour cela, certain qu'Abi ne se laissera pas faire. Il faudra peut-être qu'il demande cela à la vendeuse lorsqu'Abi sera dans la cabine. Cela ne lui plaira probablement pas, mais maintenant qu'il y songe, cela lui semble vraiment naturel de le faire.
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Lun 9 Mai - 21:11

Février 2021

Le moins que l’on puisse dire, c’était que l’ambiance était au beau fixe, ce qui n’était pas pour me déplaire, moi qui étais en plein stress il y avait moins d’une heure de cela. Je savais que je pouvais compter sur les frasques de Luca pour me venir en aide, et j’étais fière du choix que j’avais fait pour être accompagnée lors de ce rendez-vous. J’aimais Aiko de tout mon cœur, mais elle était souvent trop sérieuse (sans doute son côté littéraire). Rory avait été mon second choix, mais il était, malgré tout, moins jovial que Luca. Quand bien même j’aurai pu compter sur la présence et la légèreté de mon frère de cœur, j’avais trouvé plus astucieux de me tourner auprès de l’italien avant tout. Voilà longtemps que nous ne nous étions plus revus, c’était ainsi une jolie manière de renouer.
C’était donc le cœur allégé de mes angoisses que je ricanais tandis que je me changeais dans la cabine en entendant mon compagnon prétexter avoir faim.

- Et moi donc. Je n’ai rien avalé depuis hier soir.

Je vis que la vendeuse leva un sourcil circonspect. Quelques minutes plus tôt, j’avais prétendu avoir bu jusqu’à plus soif. Commencerait-elle à comprendre qu’on faisait les clowns ?
Confession à demi-mot qui démontrait que j’avais été tellement stressée que je n’avais rien réussit à avaler ce matin. Harper avait bien essayé de me convaincre, mais les efforts avaient été vains, j’avais par ailleurs été étonnée qu’elle n’ait pas mangé ma part. Cette femme mangeait comme un ogre et gardait sa ligne, c’était incroyable, et j’osais à peine m’imaginer les quantités de nourriture qu’elle ingérera si d’aventure un jour elle serait enceinte.
En parlant de progéniture, Luca ne cessa ses insanités, me faisant lever les yeux au ciel tout en secouant légèrement la tête.

- Alors oui, mais non. Je te rappelle qu’en ce moment ma libido est en berne à cause du polichinelle que tu as flanqué dans mon tiroir.

Amis de la poésie, c’est par ici.
Ressortant de la cabine après avoir calmement râlé sur Luca qui râlait lui aussi (Inception), je le surprenais entrain de dessiner un peu. Je ne pus m’empêcher de me sentir curieuse et je levais un sourcil intrigué, néanmoins, je ne le questionnais pas puisque je savais à quel point il avait besoin d’espace lorsqu’il crayonnait sur une feuille blanche, et surtout, à quel point c’était chasse gardée. Je me contenterai donc d’attendre qu’il me propose de venir voir, adressant un sourire angélique et plein de désinvolture à la vendeuse qui essayait de garder son professionnalisme devant nous. La pauvre, sans doute ne s’attendait-elle pas à un tel rendez-vous lorsque je l’avais contacté. Elle s’en souviendra longtemps, détaillant toute l’horreur de cet instant pour elle à son mari, ce soir autour d’un bon repas consolateur. Je la plaignais, vraiment, mais dans le fond, étions-nous véritablement les pires clients qu’elle ait déjà reçus ?
Franchement, j’en doutais. Pour avoir visité quelques lieux de vente spécialisés dans les mariages, j’avais vu et entendu des gens abjects, des femmes totalement hystériques, des hommes follement minutieux.
Avec Luca, nous étions là, à boire, à dire des idioties, et à chercher calmement ma robe sans hausser le ton de voix un seul instant.
Non vraiment, la vendeuse avait dû connaître bien pire. Quel métier plein de surprise elle faisait !

Sortant de mes pensées, j’essayais successivement trois robes, et Luca semblait tout aussi indécis que moi, heureusement. L’avantage aussi d’avoir demandé à mon ami de m’accompagner, c’était que nous avions vaguement les mêmes goûts vestimentaires. Alors, certes, nous nous étions davantage habitués à nous déshabiller mutuellement qu’à nous habiller, mais nous nous connaissions assez pour nous être observé et savoir ce qui allait sur les épaules de l’autre, et ce, même pour un événement aussi spécifique qu’un mariage.
Remuant des épaules, obligée de reconnaître qu’il avait raison, je répondais dans un petit soupir qui traduisait du désespoir qui commençait à pointer dans mon cœur.

- Ouais, je suis d’accord.

Retournant à la cabine, je me changeais à nouveau tout en réfléchissant. Maintenant que j’avais fait plusieurs essayages, je savais ce que je ne voulais pas. J’avais un peu fait du lèche-vitrine et m’étais renseignée dans les revues et sur internet (l’avantage d’être une sorcière qui se débrouillait avec la technologie moldu), et j’avais vu quelques modèles qui m’avait plu, sans savoir exactement si j’allais bien les porter ou non. Tout cela mis bout à bout me permit d’y voir on ne peut plus clair. Alors, j’osais formuler une demande à la vendeuse qui s’activa immédiatement, suivie de ses efficaces elfes de maison. Les tissus allaient et venaient dans un rythme effréné grâce à la magie, les garde-robes étaient littéralement sans fond. Tout cela me donnait le vertige, toutefois, j’étais heureuse d’avoir choisi cette boutique.
Mon cœur avait balancé avec une concurrente moldu, car je ne voulais pas renier mon sang non magique, mais, pour mon mariage, j’avais envie de me faire plaisir. J’avais été privée de ma magie à cause du Blood Circle durant de nombreux mois, et tout cela m’avait rendue d’autant plus humble que je ne l’étais déjà. Néanmoins, j’avais aussi appris que je devais profiter de la chance que j’avais de posséder des pouvoirs magiques.
Mon mariage ne ferait donc pas exception.
Rapidement, la vendeuse revint avec un tissu aux nombreux reflets chatoyant. Immédiatement, l’étoffe me plus, et ce fut avec davantage d’entrain que mes essayages précédents que je l’enfilais.

En découvrant mon reflet dans le miroir qui se tenait devant moi, je me sentais émue. Bien sûr, il faudrait arranger quelques détails, que je songe à rajouter un bijou, comme un bracelet, par exemple, mais globalement, cette robe était celle que je voulais et que j’avais secrètement désirée.
Réapparaissant aux yeux de l’italien, son air bouche-bée me conforte dans mon choix, et sa réaction, sans remarque idiote, en est la meilleure preuve. Même la vendeuse sourit enfin de manière presque décontractée. En le voyant tourner une page de son carnet, je le laisse me tirer le portrait avant de continuer à fixer mon reflet dans le miroir tout en faisant quelques petits commentaires et en posant quelques questions à la vendeuse. Elle me répondait avec professionnalisme, usant de sa magie pour replier quelques ourlets de la robe afin de me montrer les retouches qu’elle jugeait nécessaire de faire. Je les approuvais toutes, suggérant moi aussi quelques idées. C’était enfin un échange normal qui se déroulait sous le regard artistique de Luca.
Pour finir, je me permettais de faire quelques pas afin de m’assurer que je sois véritablement à l’aise en mouvement dans la robe, et, une fois convaincue, je revenais vers mon ami. Je passais dans son dos et glissais mes mains sur ses épaules pour finir par me laisser complètement glisser contre lui. Ma joue collée à la sienne, je le regardais sans m’attarder sur le dessin, respectant toujours l’intimité de l’italien.

- Je crois que c’est celle-là que je vais prendre, oui. Elle me plait vraiment.

Avant qu’il ne puisse répondre quoique ce soit, je lui déposais un baiser sur la joue avant de me redresser et de filer en cabine, laissant l’italien seul avec la vendeuse qui rangea alors sa boutique, limite soulagée qu’on ait enfin trouvé quelque chose, ce qui sous-entendait qu’on allait bientôt partir et la laisser tranquille.
Après avoir laissé ma robe aux bons soins des elfes de maison, je me rhabillais de mon charmant chemisier turquoise aux broderies blanches et mon jean.
Ressortant de la cabine, je regardais Luca en train de discuter avec la vendeuse et, sans trop chercher à connaître leurs messes basses (sans doute était-ce encore des conneries de la part de Luca), je les rejoignais, guillerette. Le stress totalement envolé, je fixais alternativement mon ami, puis la vendeuse.

- Alors, comment on s’organise ?
- Hé bien, je sais déjà quelles premières retouches je vais devoir effectuer. Je vous propose donc de revenir dans un mois pour un nouvel essayage. Nous verrons à ce moment s’il faut encore changer quelques petites choses.

J’hochais la tête tranquillement avant de revenir sur Luca. J’attrapais ma bouteille de champagne et suivait la vendeuse jusqu’à la première partie de la boutique. Soucieuse de saluer convenablement son travail, surtout celui d’aujourd’hui, je m’adressais à nouveau à elle.

- Est-ce que je règle tout de suite ?



Never Ending Circles
ANAPHORE


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Sam 21 Mai - 18:20

Tu sais quand la mariée arrive et qu’elle fait sa superbe entrée ? J’aime jeter un coup d’œil à l'autre fou qui va s’marrier.

LUCABI III - Février 2021, Chemin de Traverse

Lorsqu’Abi lui a demandé de l’accompagner dans cette boutique de robe de mariée, Luca n’était pas certain d’être d’un quelconque soutien pour l’aider à trouver la tenue idéale pour le jour des festivités. Certes, l’italien a un goût très sûr pour sa propre garde-robe, -bien qu’il porte souvent le même type de vêtements (jeans, tee-shirt noir basique, veste en cuir)-, il a toutefois la langue affûtée pour les critiques, n’hésitant pas à donner un avis tranché et tranchant. Pour autant, aujourd’hui, la préoccupation de Luca n’était pas de dénigrer chacune des tenues qu’elle essayait -même si franchement, la plupart d’entres elles l’auraient mérité ardemment- mais plutôt d’aider Abi à se détendre. Les perspectives de son mariage semblent accentuer son anxiété, Luca l’a perçu dès qu’elle a franchi les portes du Thestral Motor, venant pour la première fois le trouver sur son lieu de travail alors qu’il s’était toujours efforcé de la maintenir à distance du garage. Non pas parce qu’il ne souhaitait pas qu’elle entre dans sa vie de manière plus officielle, mais plutôt parce qu’il voulait la tenir éloignée de la Cosa Nostra pour des raisons qui tombent sous le sens. Pour autant, le jeune homme se sent privilégié qu’elle ait voulu que ce soit lui qui la guide dans ses essayages même si elle devait probablement se douter que cela partirait en vrille. Luca et Abi n’ont jamais été très matures lorsqu’ils sont ensemble, on pourrait presque croire qu’ils sont encore des enfants comme lorsqu’ils ont joué à ce jeu stupide à la soirée à Poudlard et lorsqu’ils continuent d’embrouiller la vendeuse du magasin ; celle-ci d’ailleurs, fronce régulièrement les sourcils. Peut-être que le petit pois qui lui sert de cerveau arrivera enfin à comprendre qu’ils s’amusent d’elle depuis déjà de nombreuses minutes ? Peut-être, ou peut-être que non. Rien n’est moins sûr. « Libido en berne, tu parles. Passer de trois rapports sexuels à un seul par jour, ça reste bien au-dessus de la moyenne non ? » dit Luca sans s’embarrasser du reste. Tentant de calmer ses ardeurs pour ne pas effrayer davantage l’employée, Luca commence à dessiner pour se vider la tête et éviter d’en rajouter davantage. Pourtant, il y aurait tant à dire sur chacune de ces tenues. Les essayages se succèdent et pour Luca, se ressemblent. Rien de ce qu’elle n’essaye ne trouve grâce à ses yeux et pire, rien ne semble trouver grâce aux yeux d’Abi. Désemparé, se contentant de griffonner d’un air distrait les robes portées, Luca laisse l’inquiétude grandir en lui, de peur que son amie ne trouve pas ce qu’elle désire. Jusqu’à cette robe.

Immédiatement, l’émotion qui transparait dans les yeux de l’enseignante est suffisant pour que Luca comprenne qu’elle a enfin trouvé. Elle a trouvé la robe. Celle qui la fera se sentir belle et désirable devant sa future femme. Celle dans laquelle elle dira Oui. Celle qui recevra mille compliments de la part des convives. Aussitôt, l’âme artistique de Luca s’active et le fusain qu’il tient entre ses doigts glisse rapidement sur la feuille de papier, désireux de conserver à jamais cette image à la fois dans sa tête mais aussi sur son carnet. Concentré, il n’intervient pas du tout alors que la vendeuse répond aux questions d’Abi sur les retouches qu’il faudra éventuellement effectuer même si pour l’instant, Luca n’y voit aucun intérêt, tout lui semble parfait. Levant les yeux vers son amie qui se dirige vers lui, un sourire s’installe sur ses lèvres tandis qu’elle s’approche de lui, lui offrant une étreinte que qu’il accepte volontiers, lâchant pendant quelques instants son dessin. Elle dépose un baiser sur sa joue et il lui murmure à l’oreille : « Tu aurais tort de ne pas la prendre, effectivement. » La laissant s’échapper pour remettre ses propres vêtements, l’idée de tout à l’heure lui revient en tête.

Il se lève du fauteuil dans lequel il a élu domicile depuis le début des essayages et se dirige vers la vendeuse, qui s’affaire à ranger les cinquante milles robes qu’Abi a portées. S’assurant d’être assez éloigné d’Abi afin qu’elle ne puisse l’entendre, il lui demande à voix basse : « Le paiement se fait-il maintenant ou aux retouches ? » L’employée, qui s’attendait probablement à une autre question, semble surprise mais demeure néanmoins professionnelle. Elle lui répond : « En règle générale, les clients règlent le jour des retouches effectivement. » Un sourire mutin s’installe sur les lèvres de l’Italien et il exige : « Parfait, ne la laissez pas payer aujourd’hui si elle le demande s’il-vous-plaît. Je viendrai régler demain. » Entendant Abi revenir vers eux, il effectue un clin d’œil à la vendeuse afin qu’elle soit de connivence avec lui. Abi, vêtue à nouveau normalement, pose exactement les questions auxquelles Luca s’attendait. Surveillant d’une oreille attentive l’échange, Luca fait néanmoins comme s’il n’en avait rien à faire de cette discussion en commençant à ranger son carnet de croquis dans son sac. Enfilant son blouson de cuir et attrapant celui d’Anje d’Abi, il les suit tandis qu’elles continuent d’échanger sur les modalités de paiement. Fidèle au jeune homme, la vendeuse répond : « Vous pourrez régler une fois les retouches faites, c’est ainsi que nous procédons la plupart du temps. » Parfait. Sachant très bien qu’Abi le tuera lorsqu’elle se rendra compte de ce qu’il a fait, il est tout de même prêt à prendre ce risque. C’est un cadeau qu’il souhaite lui faire, en souvenir de cette après-midi passée ensemble. L’employée se charge de fournir à Abigail un autre rendez-vous pour les dites-retouches et une fois sortis de la boutique, Luca tend le blouson à son amie. « Bon, Madame Zabini. » dit-il, continuant leur manège. « Où est-ce que je vous dépose ? Et cette fois-ci, je ne vous ménagerai pas. » Prêt à lâcher les chevaux dragons, Luca compte bien faire de cette fin de journée un moment impérissable dont elle se souviendra à jamais. Avec Luca, il y avait rarement de demi-mesure ; c’était toujours trop. Et c’était ainsi qu’on le détestait, ou qu’on l’aimait.
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