Ta vie se barrait littéralement en couille… Tu ne contrôlais plus rien, tu avais cette sensation que plus rien ne t’appartenait, qu’une personne extérieure tirait les ficelles de ta vie et que cela t’échappais totalement… Les traces de ce qui venait de se passer quelques jours plus tôt commençait à disparaitre sur ta peau, mais les marques ce n’était rien par rapport au reste… Par rapport à ce que cela avait coûté à Dora, à ce que cela t’avait coûté à toi… Anjelica ne t’adressait plus la parole depuis, tu sais qu’il faut que tu t’expliques, tu sais que tu dois t’excuser, mais ce n’était pas simple de trouver le bon moment… Avec toute cette merde, tu avais néanmoins compris à quel point ils avaient creusés loin. Tu comprenais que chaque chose risquait de te péter à la gueule et tu te devais de sauver le peu qu’il te restait. Ton amitié si précieuse avec Toni en faisait partie… Elle était au courant de ce qui s’était passé en Italie, en revanche elle ignore que le procès a eu lieu, elle ignore ce que vous avez enduré avec Théodora et à quel point ta vie ressemble à l’enfer depuis ce jour-là. Serait-elle la prochaine sur la liste ? Après tout ils avaient creusé sur toutes les personnes qui t’étaient cher, avait vu que tu avais menti, il leur faudrait combien de temps pour aller creuser ailleurs ? Tu n’avais plus rien à te reprocher, mais à présent tu n’avais plus la conscience tranquille. Trop de personne était impliquée, Soledad était au courant pour la Cosa Nostra et Toni… Tu ne savais pas si elle était autant en sécurité que tu aurais aimé le penser. Tu devais la prévenir. Tu avais donc attaché un petit parchemin à la patte de Marella, l’harfang des neiges qui appartenait à ta mère quelques heures plus tôt, c’était toujours elle que tu utilisais lorsque tu avais besoin d’envoyer du courrier, pour prévenir ta meilleure amie de ton passage chez elle. Tu avais bu, tu avais fumé, mais bon elle t’avait déjà connu au fond du trou n’est-ce pas ?

Ne pas pouvoir être près d’Anjelica était déjà compliqué, mais ce n’était même pas tout, même Luca refusait de te voir pour le moment… Et évidemment tu t’étais arrangé pour croiser personne d’autre de la Cosa Nostra pour le moment. Tu sais ce que tu vas lire dans leur visage et tu n’es pas prêts. Oui tu as merdé et tu le sais, mais tu n’es pas prêt à subir leur jugement et leur déception à ton égard. Cela pouvait bien attendre un jour ou deux de toute façon n’est-ce pas ? Tu es dans le couloir de vos appartements, avant de partir tu te diriges vers celui d’Anje… Ta main glisse sur sa porte, tu ne sais pas si elle est là et tu voudrais frapper pour le savoir, mais tu n’oses pas… A la place tu laisses ta main pendant un moment et puis tu transplanes. Tu sais que dès lors que tu vas frapper et qu’elle viendra t’ouvrir elle saura que quelque chose s’est produit, ton regard ne trompe pas et ton état non plus… Tu voudrais la laisser en dehors de tout ce merdier, mais de toute façon c’est déjà trop tard, elle a un pied dedans depuis cette fameuse affaire de laquelle elle t’avait sauvé après que tu avais dû tuer deux personnes pour sauver Anjelica… Trois petits coups se font alors entendre et puis derrière tu peux entendre le bruit de ses pas jusqu’à sa porte, chacun deux sont en parfaite harmonie avec les battements de ton cœur.

« J’ai tué personne. » Lâches-tu alors quand elle ouvre enfin la porte parce que tu sais qu’elle va te demander encore dans quoi tu t’es fourré. « Pas cette fois en tout cas. » Précises-tu. « Il faut qu’on parle… Je sais que je t’ai prévenu un peu tard est-ce que… Je ne te dérange pas ? » Demandes-tu tout de même parce que tu ne voulais pas tomber au mauvais moment. A vrai dire tu avais besoin d’elle, tu avais besoin d’épancher tout ce que tu avais vécu ces derniers jours, le problème c’est qu’une fois la soupape ouverte, il serait bien difficile de la refermer…

Précisé que tu n’avais tué personne t’avait semblé opportun en revanche, tu n’avais pas prévu qu’elle s’imagine l’inverse… Et comment dire que ça n’était pas passé si loin que ça… Luca avait sauvé vos fesses, sinon vous auriez pu y passer… Cela dit avec les marques tu avais un peu partout tu aurais dû te douter qu’elle aurait pu en venir à cette conclusion également. Même si tu lui as envoyé une lettre par hibou pour la prévenir de ton arrivé, tu voulais être certains que tu ne la dérangeais pas. Tu ne voulais pas donner cette sensation que tu te pensais en droit de débarquer à n’importe quelle heure et de la nuit quand bien même c’était ta meilleure amie et que vous étiez là l’un pour l’autre. Sa réponse te réchauffe néanmoins le cœur. Tu rentrais à l’intérieur de son appartement tandis qu’elle fermait ensuite la porte derrière toi. Tu vas t’installer comme elle te le propose, t’assoit sur son canapé, tu secouais la tête pour toute réponse à sa question, tu ne voulais rien, juste sa présence. Elle ne tarde pas à te rejoindre ramenant tout de même de quoi grignoter mais tu n’avais pas le cœur d’avaler quoique ce soit en cet instant et puis la question tombe…  « Qu’est-ce qui se passe ? » Les mots se bloquent dans ta gorge, tu as envie de toute déverser en même temps, mais cela est également très douloureux, tu ne sais même pas par où commencer… Alors pendant les secondes qui suivent tu gardes le silence essayant de mettre des pensées en ordre… Finalement toi qui n’est pas si tactile que ça, tu viens chercher sa main, tu l’amène sur ta jambe et doucement tes doigts jouent comme pour t’occuper l’esprit afin d’essayer de formuler tout ce que tu as en toi…

« Tu te rappel de ce qui s’est passé en Italie ? » Demandes-tu alors la voix enrouée. Tu lui laisses quelques secondes pour se remémorer votre discussion… « Le procès est tombé il y a quelques jours… Ils ont découvert quelque chose… » Tu prends ton temps parce que ce secret tu n’en avais même pas parlé à Toni, encore une fois pas par manque de confiance, mais simplement parce que moins il y avait de personne au courant et moins vous étiez en danger… De plus comme pour les autres, te taire la mettait en sécurité. « J’ai menti sur la façon dont Théodora est entrée dans la Cosa Nostra, ce n’est pas elle qui a fait couler le sang… » Et alors que tu crains que ta meilleure amie t’en veuille tu ajoutes « Je ne voulais pas que ça puisse te retomber dessus, j’ai préféré te tenir éloignée de cette information. » Et tu avais bien fait… Allez savoir ce qu’il lui aurait fait… Voir l’une de tes plus proches amies souffrir par ta faute c’était déjà bien assez. « Et vue ce qu’ils lui ont fait subir… Je suis content de ne t’avoir rien dit Toni… Je n’aurais pas supporté qu’ils te fassent le moindre mal. » Dis-tu tandis que tes prunelles de glace viennent croiser les siennes qui étaient à l’opposé des tiennes. « C’est aussi pour ça que je viens aujourd’hui… Je veux te mettre en garde, il est possible qu’ils viennent fouiller jusqu’à toi et aussi… Soledad… » Avoues-tu un peu piteux. « Je suis vraiment désolé… » Lâches-tu alors, tu savais combien Toni tenait à sa cousine et d’ailleurs Soledad était aussi l’une de tes amies, tu ne voulais pas qu’il lui arrive quoique ce soit non plus… Bon sang toi qui avait toujours cru que la Cosa Nostra était ce qui t’était arrivé de mieux, aujourd’hui tu commençais à te demander si tu n’avais pas fait une énorme connerie… Alors que tu lâches la main de ta meilleure amie, un soupire s’échappe de tes lippes…

« Allez, tu peux le dire… Je t’avais prévenu Jaeden… » C’est vrai, elle n’avait jamais caché qu’elle ne cautionnait pas toute cette histoire et à présent que c’était pas loin de toucher tous tes proches tu te rendais compte qu’elle avait peut-être eu raison… « Anjelica ne m’adresse plus la parole… » Finis-tu alors par glisser dans un souffle tandis que ta gorge se serre encore plus. Oh tu sais que ça n’a jamais été le grand amour entre Toni et elle, mais Toni savait que tu l’avais demandé en mariage, que tu aurais dû l’épouser cet été, elle l’était même l’une de tes témoins ! Et à présent tout était remis en cause, tu n’avais plus aucune certitude et celle-là encore moins… Tout était venu t’exploser à la gueule… « Toni… » Dis-tu en ayant du mal à formuler ta phrase… « Sans elle je… » Tu n’arrives même pas à formuler la fin de ta phrase qu’une larme coule le long de ta joue, il est rare que tu laisses des personnes te voir dans un tel état de faiblesse, tu étais toujours celui qui était fort pour les autres, cette fois… Tu avais besoin qu’elle soit forte pour toi…

Il t’était difficile de te confier en cet instant, les mots butant contre ta gorge, comme si… Quelque chose les retenait ne voulant pas qu’ils sortent… Tes prunelles sont fixées sur vos mains, jouant toujours avec la sienne, c’était une façon pour toi de pouvoir canaliser ton attention quelque part sans avoir à croiser son regard car tu n’étais pas certains de pouvoir le soutenir. « Nous avons dû répondre de nos actes… Ils ne m’ont rien fait qui ne guérira pas. » Indiquais-tu. Rien de grave en soit, les coups tu allais t’en remettre, c’était sans doute le cadet de tes soucis quand bien même se faire passer à tabac par son meilleur ami et sa fiancée n’avait rien d’agréable… « En revanche, Théodora j’ai peur que ce soit plus compliqué… Comme elle n’avait pas fait couler le sang pour entrer dans la Cosa Nostra ils lui ont fait… Rattrapé cette erreur. » Pas besoin de détail n’est-ce pas ? Toni allait trouver la conclusion toute seule tu lui faisais assez confiance pour cela et puis surtout les souvenirs étaient encore trop vifs pour arriver à exprimer des mots sur tout cela… Tu te concentre alors sur ta première raison de ta venue ici, la prévenir qu’elle allait peut-être avoir de la visite et peut-être que Soledad aussi… Bordel ce que tu t’en voulais pour toute cette merde… Ta main finie par lâcher la sienne et tu attends les mots qu’elle aurait dû prononcer… je t’avais prévenue Jaeden mais effectivement comme elle le dit si bien, tu le savais déjà… Est-ce que tu regrettais tout ce qui s’était passé pour autant ? Peut-être pas non… En revanche oui, tu aurais fait les choses bien différemment si tu avais su…

Un aveu s’échappe d’entre tes lèvres, tu sais qu’entre Toni et Anje’ ce n’est pas l’amour fou, mais tu as tout de même besoin de son soutient, tu as l’impression que ton myocarde se déchire de l’intérieur en cet instant… « Je suis désolé… » Réponds-tu lorsqu’elle reprend la parole, ne sachant pas quoi dire d’autre… Tu avais merdé, tu avais sacrément merdé… Comment est-ce que tu pourrais tout réparer ? « Je te dirais bien que si ya quoique ce soit que je puisse faire je suis là… Mais je… Je comprendrais que tu préfères que je ne m’en mêle pas. » Toi-même tu aurais bien peur d’ajouter de l’huile sur le feu… Toi qui d’habitude tiens solidement sur tes deux jambes sans sombrer, aujourd’hui tu n’es plus sûr de rien… Aujourd’hui tu laisses ta faiblesse s’afficher et une larme coule sur ta joue tandis que l’hypothèse d’un avenir sans celle que tu aimes te fait défaillir… Ta meilleure amie revient rapidement à tes côtés, t’assurant alors que sans elle tu allais t’en sortir… Tu aimerais la croire, mais en cet instant tu te sens vide, en cet instant tu as l’impression qu’on a arraché une part de toi… Tu n’as jamais aimé personne comme tu l’aimes elle, cela devait bien vouloir dire quelque chose n’est-ce pas ? Allais-tu réellement t’en sortir ? Ou ne serais-tu plus que l’ombre de toi-même ? Tu hoches la tête lorsque Toni te dit de lui laisser de l’espace, c’est bien ce que tu fais de toute façon, tu n’es pas du genre à harceler une personne, bien au contraire…

« Mais elle peut aussi ne pas me pardonner du tout, même avec du temps… » Et cette réalité tu avais du mal à l’imaginer… Tu avais du mal à te dire que tu l’avais peut-être perdue et pour de bon… « Est-ce que je… Je peux rester là ce soir ? » Demandes-tu finalement à ta meilleure amie. En ce moment moins tu te trouvais au garage et mieux tu te portais… Tu ignorais comment cela se passerait par la suite et pour le coup tu ne préférais pas y penser… Ces derniers temps tu allais devoir réapprendre à vivre au jour le jour comme cela avait déjà été le cas pendant plusieurs années avant que tu ne tombes dans la Cosa Nostra… Quant à Toni tu espérais te tromper, tu espérais qu’ils n’allaient pas fouiller sa vie, ni celle de sa cousine, mais tu avais bien peu d’espoir.