Linked paths, intertwined hands

S’il y avait une chose qui n’avait jamais été au goût d’Hestia, c’était bien les surprises. Se retrouver confrontée à une situation inconnue, inattendue et, de surcroit, non désirée n’avait jamais été sa tasse de thé. L’improvisation, ce n’était définitivement pas pour elle et la plupart du temps son fort caractère et sa fâcheuse tendance à l’impulsivité faisaient qu’elle réagissait souvent de la mauvaise façon. Elle se sentait mise au pied du mur, presque piégée, et dans ces cas-là il ne fallait pas s’attendre à ce qu’elle réagisse bien. Ses amis, les rares qu’elle possédait, avaient appris au fil du temps à éviter ce genre de démonstration sous peine de devoir se confronter à son humeur massacrante, sa famille quant à elle n’avait jamais été friande de surprises -ou même de démonstration d’affection d’ailleurs- alors elle n’avait jamais eu de soucis à se faire de ce côté-là. Seule sa sœur, Thalia aurait pu tenter de mettre quelque chose en place pour sa cadette mais heureusement elle la connaissait assez bien pour savoir qu’il était plus sage de s’abstenir. Hestia avait toujours été plus indulgente avec son aînée mais elle appréciait tout de même cet effort de sa part pour composer avec les particularités de son caractère. En y réfléchissant bien, Noël était le seul moment où la verte acceptait les surprises, enfin où prendre sur elle était moins difficile que d’habitude, peut-être parce que l’évènement revenait tous les ans alors au fond ce n’était plus vraiment une surprise. Mais toutes les autres situations n’étaient pas pour elle. Alors parfois, vivre dans un monde où la magie était omniprésente, et souvent complètement imprévisible, pouvait se révéler compliqué. Hestia faisait avec au quotidien, rarement sans râler et pester quand les choses n’allaient pas dans le sens qu’elle voulait, mais parfois c’était tout simplement insupportable.

Aujourd’hui était un de ces jours. Définitivement. Si la journée avait plutôt bien commencée, les choses s’étaient corsée une fois le déjeuner terminé. La vipère avait dû faire face à un escalier particulièrement récalcitrant qui avait apparemment décidé de la déposer partout sauf dans le couloir où elle avait besoin de se rendre pour aller à son cours. Malgré ses protestations, et la bordée de jurons qui avait franchi ses lèvres, l’escalier n’avait rien voulu entendre et elle avait dû effectuer un détour affreusement long au pas de course pour ne pas arriver en retard et faire perdre des points à sa maison. Tout ça pour, au final, assister à un cours soporifique qui ne fit que renforcer encore plus sa hâte de pouvoir se spécialiser dans les potions. Heureusement tous les cours de son cursus n’étaient pas ainsi, la plupart du temps ils se révélaient véritablement intéressants, mais c’était frustrant pour elle de ne pas pouvoir se concentrer pleinement sur sa passion. Son objectif ne lui avait jamais paru si loin et si proche à la fois. Et si Hestia avait bien une qualité manquante, c’était la patience. Heureusement, le cours fini par prendre fin et avec, la journée entière. Pressée de pouvoir se consacrée à son art le plus cher, la verte ne s’était pas fait prier pour se rendre dans les caves, prenant soin d’utiliser un passage secret pour s’y rendre et non pas les capricieux escaliers. Malheureusement le destin semblait s’acharner contre elle et, arrivée devant la salle qu’elle utilisait d’habitude pour travailler sur ses potions, elle se rendit compte que celle-ci était déjà occupée. Et pas par n’importe qui, par un groupe de Poufsouffles piaillantes et gloussantes qui semblaient tenter de préparer un filtre d’amour. Dans d’autres circonstances, Hestia n’aurait pas hésité à les chasser de la salle, mais elle n’avait pas la patience d’écouter leurs plaintes et encore moins celle d’attendre qu’elles nettoient le bazar qu’elles avaient mis derrières elles. La journée lui avait déjà été assez désagréable comme ça, merci bien.

C’était ainsi que Hestia s’était retrouvée dans les étages de l’université, bien décidée à utiliser la salle dédiée à leur cursus pour travailler comme bon lui semblait. Au moins elle était sûre que l’endroit serait inutilisé et que aucune gamine ne viendrait l’y déranger. Mais, alors qu’elle était si proche de son but, sa journée empira encore. Elle passait près d’Ethan Prewett quand une sensation étrange se fit sentir dans sa main gauche. Presque aussitôt elle se sentit tirée en arrière, comme si sa main voulait partir dans une autre direction. Sourcils froncés, elle s’arrêta et tira sur sa main, si son bras obéit bien à son ordre, sa main, elle ne vint pas seule. Elle découvrit avec horreur que celle-ci se trouvait désormais dans celle d’Ethan, toutes deux emprisonnées dans cette situation aussi gênante que désagréable. De toute évidence, elles étaient liées par un sortilège qui avait dû paraitre très drôle à celui qui l'avait lancé. Et à qui Hestia ne manquerait pas d’expliquer sa manière de penser dès qu’elle aurait retrouvé une totale liberté de mouvement. « C’est quoi ce bordel ?! » Pesta-t-elle d’une voix étouffée en tentant encore une fois de séparer leurs mains. Mais c’était peine perdue, sa main ne lui répondait plus et elle sentait la colère monter. Au fond elle doutait que le Gryffondor ait une réponse à lui fournir mais c’était l’instinct qui parlait. Elle ne chercha pas à demander au sorcier si c’était lui qui était à l’origine de cette affreuse situation, vu son air stupéfait et ses tentatives pour décoller leurs mains, il était évident que non. « J'en sais rien moi pourquoi ça fait ça ! Tu crois que si je le savais je resterais là parce que ça m'amuse ?! » Hestia souffla bruyamment. De toutes les personnes de l’école il avait fallu qu’elle tombe sur Ethan. Le sort s’acharnait vraiment sur elle aujourd’hui elle ne voyait pas d’autre explication. Si le karma voulait se retourner contre elle pour lui faire payer son sale caractère alors elle aurait préféré qu’il trouve une autre manière de le faire. Mais apparemment, il avait choisi de la torturer et n’avait pas fait les choses à moitié.

Hestia réalisa brusquement avec qui elle se retrouvait prise au piège. Ethan Prewett. Il ne fallait pas que d’autres élèves les voient ainsi, main dans la main. Elle ne craignait pas les remarques et rumeurs désobligeantes, elle saurait y répondre avec son mordant habituel et faire regretter d’être né à ceux qui osaient médire sur elle. Mais elle craignait que cet épisode ne parvienne jusqu’aux oreilles de ses parents. Si elle pouvait gérer les bruits de couloirs, elle ne faisait pas preuve d’autant d’assurance quand il s’agissait de ses géniteurs. Et quand ils lui avaient ordonné de ne plus s’afficher avec Ethan, un sorcier au sang souillé indigne de leur si précieux nom, leurs menaces avaient été particulièrement claires. Et elles concernaient toutes celui que Hestia avait des années durant appelé son ami. Elle se décida en un instant. « Reste pas planté là. » Lâcha-t-elle d’une voix sans appel tout en poussant le Gryffondor sans ménagement dans la première salle qu’elle trouva. Celle de sciences magiques, son objectif premier. Après s’être assuré que l’endroit était bel et bien vide, elle s’éloigna du jeune homme. Du moins elle fit de son mieux pour mettre un peu de distance entre eux, ce qui n’était pas aisé considérant leurs mains jointes. Contemplant l’étrange -et désagréable- situation dans laquelle ils se trouvaient, Hestia s’efforçait de réfléchir à une solution. Mais l’irritation et le comportement d’Ethan n’étaient pas pour l’aider. « Tu as une idée de comment régler ce problème à part devoir nous couper les mains ? » Hestia poussa un grognement irrité en réponse à la remarque du rouge. Il ne l’aidait pas et s’il commençait à jouer avec les nerfs de la verte la situation ne tarderait pas a réellement déraper. Au fond la Carrow savait qu’elle méritait son ton piquant. C’était elle qui avait coupé les ponts brutalement sans lui donner la moindre explication. C’était elle qui avait mis fin à leur amitié et s’était appliquée à se faire détester du sorcier en multipliant les provocations et en prononçant les mots qui faisaient mal. Mais elle n’aurait jamais pu lui expliquer qu’elle faisait tout ça pour le protéger des menaces de ses parents. Elle connaissait Ethan, elle savait que son côté Gryffondor le ferait braver le danger que représentaient les Carrow et elle ne pouvait le laisser faire. Hestia ignorait si ses parents auraient réellement mis leurs menaces à exécution, mais elle savait que c’était un risque qu’elle refusait de courir. Qu’elle refusait de laisser Ethan courir. Alors elle avait pris la décision difficile de briser toute forme d’amitié qu’il y ait pu avoir entre eux. Et encore aujourd’hui, même des années plus tard, elle s’y appliquait toujours. « On pourrait commencer par couper la tienne et voir ce que ça donne. » Siffla-t-elle sur le même ton que le sorcier. Elle le provoquait, encore et toujours, mais c’était la meilleure manière de le tenir éloigné. Se rendre insupportable, méprisante et méprisable. Et ça marchait.

Finalement, la verte poussa un long soupir résigné. Il fallait qu’ils fassent quelque chose, ce n’était pas en se bouffant le nez qu’ils se sortiraient de là. Puisque Ethan semblait plutôt d’humeur à lui faire des reproches, Hestia décida de prendre les choses en main. « Bouge pas. » Marmonna-t-elle. De sa main libre, elle laissa tomber son sac au sol et sorti sa baguette de sa poche. Au moins, elle avait toujours sa main droite de libre, elle pouvait toujours lancer des sorts sans risquer de mettre le feu à toute l'école avec des gestes maladroits. Elle lança un coup d’œil à Ethan et pointa sa baguette sur leurs mains. « Finite incantatem » Rien. Il ne se passa strictement rien. Elle maîtrisait ce sortilège, elle l'avait déjà utilisé de nombreuses fois, il aurait dû annuler le charme qui les liait. Elle ne comprenait pas ce qu'il se passait. Sentant une nouvelle fois la frustration monter en elle, Hestia ferma les yeux un instant. Elle devait rester calme. Et aussi se rendre à l’évidence. « Bon. Allons voir un prof, ce sera plus simple. » Lâcha-t-elle d’un ton las. Ce n’était pas une solution qui l’enthousiasmait, loin de là, mais à ce stade c’était certainement la plus aisée à mettre en œuvre.

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Oh, comme il était facile de faire sortir Ethan de ses gonds. La moindre remarque, la moindre provocation, même les plus infimes, semblaient l’enflammer. Le lion partageait le même défaut que la plupart de ses camarades de maison, il était à la fois trop susceptible et trop rancunier. Les rouges étaient braves, mais ils étaient aussi souvent incapables de faire preuve d’un peu de maîtrise de soi. Et Ethan n’échappait pas à cette règle. Il ne laissait rien passer, ne parvenait pas à se montrer au-dessus des autres, un rien le faisait réagir. A partir de là il était tellement simple de l’irriter, même pas besoin de choisir ses mots avec soin, faire preuve d’un peu d’arrogance envers lui suffisait amplement. Il démarrait au quart de tour, comme si son égo était la chose la plus importante à protéger. Comme si le moindre rapport de force était à gagner pour montrer qu’il ne se laissait pas marcher sur les pieds. C’était comme s’il avait besoin de prouver au château entier qu’il était un sorcier digne de ce nom, qu’il était fort et que rien ni personne ne pouvait l’ébranler. Et ça, Hestia l’avait bien compris, et ça l’arrangeait grandement. De leurs années d’amitié passées, la verte avait appris de nombreuses choses sur son camarade, et notamment son incapacité à rester de marbre face aux provocations. Depuis, cette information lui avait servi de nombreuses fois pour s’assurer que le Gryffondor ne veuille plus rien avoir à faire avec elle. Ça n’avait pas été simple au début, Hestia n’avait jamais voulu faire du mal à son ancien ami, mais ses parents ne lui avaient pas laissé d’autre choix que de mettre de la distance entre eux. Et l’entêtement d’Ethan à vouloir sauver leur amitié, ou du moins en comprendre la fin, l’avait forcé à se montrer de plus en plus mauvaise. Ça n’avait pas été son intention de base, mais la verte s’était retrouvée pied au mur et puisqu’elle ne pouvait pas révéler au lion les véritables raisons de son éloignement il avait bien fallu qu’elle fasse le nécessaire. Se faire détester d’Ethan avait été sa seule option, elle l’avait regretté, tout comme elle regrettait encore leur amitié passée. Mais elle savait que c’était pour le mieux. Le temps avait atténué la douleur et rendu plus facile chaque parole acide qui s’échappait de ses lèvres. C’était un mal nécessaire, c’était ce qu’elle s’était répété le jour où elle avait prononcé les mots les plus cruels à son encontre. Elle faisait de même à chaque fois qu’ils se bouffaient le nez en plein couloir. Peut-être qu’il comprendrait un jour, peut-être que l’occasion de lui expliquer viendrait et alors il pourrait avoir toutes les cartes en main et décider si elle méritait toujours qu’il la haïsse. Mais ce jour n’était pas arrivé, alors Hestia faisait ce qu’elle avait à faire pour s’assurer qu’il cesse de creuser. Et c’était tellement facile.

Pour Hestia, il était si simple de jouer avec les nerfs du lion. Elle connaissait ses failles et savait exactement où appuyer pour faire mal. Alors chacun de ses mots était dirigé en ce sens, même quand ils se trouvaient attachés l’un à l’autre par un sortilège. Et elle ne manquait jamais de le faire réagir. « Toujours aussi charmante à ce que je vois. » Et voilà, il était franchement énervé, c’était même encore plus facile que prévu. Depuis qu’elle s’était assuré que leur amitié soit définitivement morte et enterrée, le lion ne supportait plus la moindre de ses remarques -ce qui était compréhensible vu les paroles affreuses qu’elle lui avait asséné. Ça aurait pu peiner Hestia, mais elle savait pourquoi elle faisait tout ça, et même des années plus tard elle savait que son paternel n’oubliait pas ses menaces. Alors elle se contenta de lui adresser un sourire ironique. Un sourire qui ne parvenait pas jusqu’à son regard qui continuait de fixer le sorcier avec un dédain parfaitement maîtrisé. Heureusement, aujourd’hui elle semblait être la seule à jouer la corde de la provocation. Ethan paru surpris mais ne fit aucun commentaire quand son contre-sort échoua. En revanche, entendre la verte proposer d’aller trouver un professeur ne s’avéra pas à son goût. Hestia, qui avait déjà pris la direction de la porte d’un air résolu sentit rapidement une résistance au niveau de sa main. Avec un soupir, elle se tourna vers son camarade. « Hors de question qu'on passe dans les couloirs main dans la main comme ça, j'ai pas envie qu'on raconte n'importe quoi à notre sujet ! Tu connais pas les gens toi. » La sorcière leva ostensiblement les yeux au ciel. Il était ridicule de croire que ça ne la dérangeait pas d’être vue ainsi, main dans la main, en train de se balader dans les couloirs avec le Gryffondor. Non mais franchement, que croyait-il ? Qu’elle n’avait jamais eu à souffrir des rumeurs qui courraient sur son compte et celui de sa famille ? Avec un nom tel que le sien les élèves avaient commencé à murmurer sur son passage dès ses premiers instants dans le château. Et c’était sans parler de sa relation avec Katelyn qui avait été exposée à la vue et aux remarques de tous. Elle savait parfaitement le mal que pouvaient faire les rumeurs, mais elle ne pouvait pas l’avouer au lion. « Oh, tu as peur d’une pauvre rumeur ? Il ne te faut vraiment pas grand-chose. » Railla-t-elle avec une petite moue déçue. Elle devait bien se l’avouer, l’idée de se trouver dans cette situation sous les regards de toute l’école était loin de lui plaire. Hestia aimait son intimité et elle pouvait déjà entendre quels chuchotements envahiraient les couloirs si des élèves les voyaient se tenir par la main. « Avec un peu de discrétion on pourrait passer inaperçus. Mais ça tu ne dois pas connaître. » Reprit-elle sur le même ton. Après tout ils étaient nombreux dans l’école et avec un peu d’ingéniosité il aurait été possible de camoufler leur état. Le pan d’une cape, un sac habilement placé, un sortilège, les options ne manquaient pas. Elle n’avait jamais eu l’intention de foncer dans le tas en espérant que les étudiants détourneraient le regard au bon moment, mais Ethan devait être trop habitué à la force brute de ses camarades de maison pour imaginer faire preuve de subtilité. Cette fois-ci les Serpentards avaient l’avantage.

Sans un mot, Hestia regarda son camarade sortir sa baguette. Elle espérait qu’il était gaucher, vu que c’était sa main de libre, il aurait été embêtant qu’il aggrave leur cas en utilisant une main à laquelle sa baguette n’était pas habituée. La verte s’abstint cependant de toute remarque, il pointait sa baguette sur leurs mains et elle ne voulait pas provoquer un accident en le déconcentrant. « Laisse-moi faire, je vais essayer...Emancipare ! » Rien. Le second sort échoua tout comme le premier, sans la moindre conséquence. Pourtant Hestia savait que le jeune homme était plus doué qu’elle en sortilèges. Elle ne dit rien, il avait eu la décence de ne pas faire de remarque quand sa propre tentative avait ratée, elle pouvait en faire de même. Elle se contenta de pincer les lèvres, déçue de voir qu’ils ne pourraient pas s’en sortir aussi facilement. « Je comprends pas, les deux contre-sorts auraient dû marcher ! Ou alors il est tellement puissant que notre magie est inefficace... » Elle secoua la tête. Elle n’avait pas plus d’explication. La plupart des élèves de l’école étaient incapable de produire un tel sortilège et si certains professeurs aimaient bien se mêler des affaires des élèves elle espérait qu’aucun n’aurait eu l’idée d’agir de manière aussi stupide. Enchainer deux élèves qui se détestaient cordialement depuis des années, c’était vraiment pousser au meurtre. Et clairement ça ne risquait pas d’arranger les choses entre eux. Du moins, Hestia continuait à tout faire pour. Ça ne pouvait même pas être l’œuvre de Peeves, il se trouvait à Poudlard et ne pouvait pas utiliser le réseau de cheminette pour rejoindre l’université. La verte soupira, ça n’avait pas de sens, mais au milieu de ce chaos une chose était claire à ses yeux. « Dans tous les cas celui qui a fait ça va s’en mordre les doigts. » Lâcha-t-elle avec un éclat féroce dans le regard. Au fond, elle se fichait bien de savoir qui avait fait ça, ou même pour quelles raisons, le résultat était le même et elle comptait bien lui faire payer son sale petit tour. Elle ne laissait personne se moquer d’elle de la sorte. Et quelque chose lui disait que pour une fois Ethan serait d’accord avec elle. « D'accord c'est bon tu as raison, on va voir un prof ! De toute façon quoique je dise, je suis trop stupide pour toi. Les sang-mêlés sont débiles après tout. » Hestia haussa un sourcil en voyant son camarade baisser finalement les bras. Si le sorcier ne paraissait pas très combatif aujourd’hui il n’en maniait pas moins les mots avec habileté. La sorcière accusa le coup mais s’appliqua à ne laisser aucune émotion filtrer sur son visage. Ethan ne faisait qu’utiliser ce qu’elle lui avait balancé au visage quelques années plus tôt pour s’assurer qu’il tire un trait sur leur amitié. Ce n’était pas vraiment étonnant qu’il lui ressorte ça maintenant, alors qu’elle s’appliquait toujours à ce qu’il la déteste. C’était le signe qu’elle avait plutôt bien réussi son coup. Une part d’elle se sentait peinée de voir qu’elle lui avait fait tant de mal, mais elle la repoussa le plus loin possible. Il n’était pas question de se laisser aller au sentimentalisme, elle ne pouvait pas détruire tout ce qu’elle avait fait, tous ces sacrifices avaient une raison. Alors elle se mura derrière son masque glacial et posa sur le Gryffondor un regard irrité. « Oh arrête un peu de chouiner, tu m’empêches de réfléchir. » Lâcha-t-elle froidement, en bonne sorcière sans cœur qu’elle était.

Elle se détourna du sorcier pour observer la salle de classe où elle les avait menés. Quand le Gryffondor avait refusé de partir chercher un prof elle avait commencé à réfléchir à une autre option et maintenant une idée commençait à germer dans son esprit. Dans leur malheur il y avait au moins un bon point : ils se trouvaient dans la salle de classe de leur cursus et ils en connaissaient les moindres recoins. Si les souvenirs d’Hestia étaient bons, la salle comportait tout le nécessaire pour faire des potions. Les réserves présentent ici n’étaient certainement pas aussi fournies que ses propres possessions ou celles de la salle de potions mais avec un peu de chance elle pourrait se débrouiller. Tout en ignorant royalement leurs mains toujours liées -ce geste était terriblement intime à ses yeux et ça la mettait franchement mal à l’aise d’y penser- elle coinça sa baguette dans sa ceinture. « Il y a un autre moyen de nous libérer. » Reprit-elle finalement. Toujours sans se tourner vers le rouge, elle se dirigea vers le fond de la classe, tirant sur leurs mains pour le forcer à bouger. Elle entreprit alors d’ouvrir les placards de la salle pour vérifier le matériel présent. Elle ne tarda pas à trouver le chaudron de taille moyenne que le leur professeur utilisait pour ses démonstrations, ainsi que tout un assortiment d’ingrédients rangés dans une vieille boite en bois. D’autorité, elle fourra le chaudron dans la main libre d’Ethan et attrapa la boite. Elle mena le lion vers la table la plus proche et y déposa son fardeau. « On va faire une potion de désincarcération. C’est encore plus efficace que les contre-sorts et ici on a tout ce qu’il faut. » Expliqua-t-elle tout en sortant les ingrédients pour les examiner. Heureusement les réserves de la salle étaient plutôt bien fournies et les ingrédients paraissaient en bon état. Hestia était persuadée qu’elle pouvait faire une potion pour les sortir de là. Elle avait déjà vu une potion de désincarcération à l’œuvre et il était impossible que le sort qui attachait leurs mains y résiste. Le seul point noir c’était qu’elle n’avait pas ses deux mains pour préparer correctement la potion. Au moins elle avait toujours sa main droite de libre, comme elle était droitière c’était un soulagement. Mais ça voulait dire que Ethan allait devoir participer, qu’il le veuille ou non. « Mais pour ça il va falloir que tu fasses ce que je te dit. A moins que ça ne te pose un problème ? » Lança-t-elle en croisant finalement le regard du sorcier. Au fond il n’avait pas vraiment le choix. Des deux c’était elle qui maîtrisait l’art des potions et elle ne pourrait rien faire seule -même si cette simple idée l’irritait affreusement. Puisqu’ils étaient coincés ensemble il allait falloir qu’il y mette du sien.

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C’était dans des instants tels que ceux-ci que Hestia trouvait enfin un intérêt à être née dans une famille telle que les Carrow. Jouer un rôle, se faire passer pour plus important, voilà la nature même des Carrow, ils respiraient la tromperie et les coup-bas, comme à peu près tous les sang-purs d’ailleurs, ça n’avait rien d’une exception. Manier les mots, tisser habillement des mensonges, Hestia l’avait appris dès son plus jeune âge. Elle n’avait jamais été encouragée à être elle-même ou à laisser ressortir sa personnalité sans retenue, non, elle avait appris à être la petite héritière parfaite, à être la sang-pur digne de son nom. A être froide et hautaine, à se sentir supérieure et à bien le montrer à quiconque se trouvait à ses côtés. Ce rôle était devenu le sien au fil des ans, elle n’en avait jamais voulu mais elle n’avait pas non plus eu le choix, alors elle l’avait endossé et maintenant il lui collait à la peau. Elle n’aimait pas ça, Hestia, ça lui donnait l’impression d’être devenu le jouet de ses parents -ce qui au fond était vrai- alors elle s’en débarrassait dès qu’elle quittait leur demeure de Godric’s Hollow. Sauf quand elle se trouvait près d’Ethan. Auprès du Gryffondor il était plus sage qu’elle conserve son masque de froideur et d’arrogance, elle le blessait de ses mots et de son attitude, elle le savait et n’en retirait absolument aucune satisfaction, mais au moins elle le tenait à distance. Plus elle se montrait détestable, plus il était en sécurité. Qu’il en vienne à la haïr n’était qu’un faible prix à payer pour que sa famille ne vienne pas lui faire regretter son amitié passée avec le lion. Cela faisait des années maintenant qu’elle s’appliquait à se montrer acide envers le Prewett et elle devait bien reconnaitre que son petit jeu fonctionnait à merveille, elle avait toujours été une bonne menteuse après tout, alors l’inverse aurait été étonnant. Habituellement, Hestia préférait se montrer distante envers son ancien ami, elle n’avait aucun intérêt à venir le provoquer volontairement, pour faire taire ses questions quant à la fin de leur amitié il valait mieux éviter de se trouver trop proche. Elle avait beau avoir fait s’écrouler leur amitié de son propre choix ce n’était pas pour autant qu’elle voulait le torturer avec son attitude désagréable. Elle n’agissait ainsi que quand elle n’avait pas le choix, quand elle était trop proche pour faire comme s’il n’existait pas. Et vu la situation dans laquelle ils se trouvaient, il lui était tout bonnement impossible de réfuter la présence du rouge.

Au fond, il était facile pour Hestia de se montrer déplaisante. Elle n’avait qu’à laisser ressortir un peu plus les pires traits de sa personnalité. Son impatience, son arrogance, son insolence, tout ça faisait un joli mélange parfait pour repousser n’importe qui. Et Ethan ne faisait pas exception. Sa volonté de conserver leur amitié s’était heurté au mauvais caractère de sa camarade et il avait été le premier à renoncer. Tant mieux car ça avait été exactement ce que Hestia avait voulu. Contrairement à son camarade, elle savait pourquoi elle agissait ainsi, les raisons de son revirement de comportement, et ça n’avait fait que renforcer sa résolution. Alors même maintenant, deux ans plus tard, elle se montrait inflexible et continuait de chercher à énerver Ethan dès que l’occasion se présentait. Se retrouver la main jointe à celle du lion ne changerait rien, elle en était déterminée. Plutôt que de tenter d’encourager au calme, elle choisissait ses mots pour piquer la fierté du lion et agissait sans le prévenir pour l’agacer un peu plus. Et ça marchait. « J'ai pas vraiment le choix en même temps. » Hestia leva ostensiblement les yeux au plafond. Elle venait de leur trouver une solution pour délier leurs mains, il n’allait pas en plus s’en plaindre. Ce n’était pas de sa faute si son sortilège avait échoué. S’il était déçu de ne pas pouvoir se positionner en sauveur tant pis pour lui, ses états d’âme ne concernaient pas la Serpentarde. « Non. » Lâcha-t-elle sans prendre la peine de le regarder. Elle allait lui prendre des mains le pot qu’il examinait, juste pour l’irriter un peu plus, mais il le reposa à temps. Apparemment la verte jouait son rôle de sorcière détestable à merveille car même la perspective de pouvoir libérer leurs mains ne semblait pas réjouir le rouge. Au moins Hestia n’avait pas besoin de déployer beaucoup d’efforts pour l’énerver. C’était vraiment trop facile, surtout si son égo froissé s’y mettait aussi.

Sans plus prêter attention à son camarade, Hestia entreprit de sortir les derniers ustensiles dont ils avaient besoin. Comme si chacun de ses mouvements ne forçait pas Ethan à la suivre, elle dénicha une balance,  une planche à découper et un set de couteau. Ceci fait, elle entreprit d’examiner les ingrédients qu’elle avait trouvés un peu plus tôt. Heureusement ils étaient bien conservés et étiquetés, au moins ça allait leur rendre la tâche plus facile. La verte plaça certaines fioles devant eux avant d’en laisser d’autres de côté. A ses côtés elle pouvait sentir Ethan s’impatienter, mais elle fit comme si de rien n’était. « Vas-y je t'écoute, puisque c'est toi la pro des potions. » Hestia s’arrêta pour lui adresser un regard froid. Eh bien voilà, ça n’avait été qu’une question de minutes avant que la fierté malmenée du lion ne vienne s’ajouter à son agacement. Il était vraiment prévisible. Hestia leur trouvait une solution qui leur évitait de devoir exposer à un professeur leur situation et il trouvait tout de même le moyen de râler parce que ce n’était pas lui qui avait eu l’idée en premier. Il était vraiment désespérant. La verte haussa un sourcil, peu impressionnée par son attitude. Il rugissait, le lion, mais Hestia voyait bien sa frustration de s’être fait dépassé. Il allait devoir vivre avec. « Oui, c'est moi la pro des potions. Tu veux qu'on se lance sur un débat là-dessus ou on peut avancer ? » Lui assena-t-elle avec un petit sourire satisfait. Le truc du Prewett c’était les sortilèges, tout le monde le savait, mais puisque cette solution n’avait pas donné de résultat c’était les potions qui leur restaient. Or si le lion se débrouillait dans cette matière, c’était bien Hestia qui se démarquait dans cet art, et ça elle le savait parfaitement. Et Ethan aussi, sauf que l’admettre avait l’air de lui faire du mal. Encore une chose avec laquelle il allait devoir vivre. Parce que cette potion de désincarcération, c’était Hestia qui la maitrisait. « Bien. » Lança-t-elle en voyant qu’il n’avait pas d’autre argument que sa mauvaise volonté de se faire guider par la Serpentarde. Bon au moins il avait déjà allumé un feu sous le chaudron, il allait pouvoir se montrer utile.

Hestia prit la peine de réfléchir un instant pour se remémorer la composition de la potion. Finalement, elle poussa vers Ethan la balance qu’elle avait trouvée ainsi qu’un pot rempli de poudre marron clair. Il y avait bien des choses qu’ils pouvaient faire avec une seule main. « Tiens, pèse 137 grammes de poudre de corne de bicorne. Et pas un gramme de plus si on ne veut pas faire fondre nos mains. » L’avertit-elle. La Carrow s’exprimait avec le détachement de quelqu’un qui avait l’habitude de manier de tel produit mais elle n’exagérait pas. Entière, la corne de bicorne était inoffensive, mais mélangée à des potions elle se révélait extrêmement corrosive. Un mauvaise dosage et le liquide ne tarderait pas à s’attaquer à leur peau. L’art des potions demandait minutie et patience alors le rouge avait intérêt à faire des efforts. Elle lui lança un regard d’avertissement. Quelque part lui confier cette tâche c’était lui accorder une part de confiance et elle espérait vivement qu’elle n’aurait pas à le regretter. Mais après tout il ne s’agissait pas que de sa main à elle alors le rouge serait bien obligé de faire attention, peu importe l’animosité qu’il avait envers elle. Pendant ce temps elle plaça des morceaux d’écorce de sorbier dans un récipient et les réduisit en poudre en un sort. Une fois les deux ingrédients prêt, elle les versa dans le chaudron, l’eau qui y chauffait pris une teinte beige. Elle mélangea le tout d’un coup de baguette. « Okay il faut qu’on coupe la racine de mandragore en fines tranches. Sauf qu’il va falloir qu’on s’arrange. » Elle leva leurs deux mains jointes pour expliquer ses paroles. Pour cet exercice elles leur étaient complètement inutiles, en fait si elle tentait de quand même se servir de sa main Hestia était sûre de courir à la catastrophe. Elle avait déjà une main en moins elle n’avait pas envie de se blesser en plus. Non, cette fois-ci ils allaient devoir travailler de concert avec Ethan. Ça n’allait pas être simple mais c’était faisable. Du moins si chacun parvenait à garder son calme. Elle lança un regard entendu au Gryffondor avant de lui tendre la racine de mandragore et de se saisir d’un couteau. « Si tu bouges ne vient pas te plaindre que je t’ai coupé un doigt. » Lança-t-elle tout de même pour faire bonne mesure. Au moins il était prévenu.

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S’il y avait une chose que Hestia aimait faire par-dessus tout, c’était bien de préparer des potions. Elle était encore toute jeune quand elle s’était prise de passion pour cet art, elle n’avait même pas encore fait sa première rentrée à Poudlard, et à partir de cet instant il s’était gravé en elle pour ne jamais s’en effacer. Elle se souvenait encore de ses premières expéditions dans la forêt qui bordait la demeure familiale à la recherche de plantes et d’ingrédients qu’elle pourrait mélanger ensemble. Elle revenait couverte de terre et d’éraflures, les cheveux dans un sale état mais les mains pleines de plantes fascinantes. Bien sûr ça lui avait valu les remontrances de ses parents mais ça ne l’avait jamais arrêté. Elle avait simplement appris à être plus discrète, et puis elle avait pu compter sur Thalia pour la couvrir dans ces moments-là. Ses souvenirs de ces instants elle les chérissait plus que tout et malgré les années ils ne s’estompaient pas. Parce qu’ils étaient le balbutiement de quelque chose de bien plus grand qui la marquerait à jamais. La rencontre avec une partie d’elle, la naissance de cette sensation d’être enfin complète, de s’être trouvée. Elle se rappelait de ses mélanges ratés, comme la fois où elle avait manqué de mettre le feu à sa chambre ou qu’elle avait tellement remplie la demeure familiale de fumée que Thalia et elle avaient dû appeler leur elfe de maison à la rescousse pour effacer les dégâts avant le retour de leurs parents. Mais elle se souvenait aussi et surtout de ses réussites, sa première potion de soin parfaitement réalisée, les préparations plus complexes qu’elle avait réussi à maitriser après plusieurs essais. Sa passion ne l’avait jamais quitté, au contraire elle l’avait entretenue avec les années jusqu’à en faire un véritable art dont elle chercherait la maitrise parfaite sans relâche. Hestia saisissait chaque occasion qu’elle avait de préparer la moindre potion, s’il y avait bien une tâche devant laquelle elle ne rechignait jamais c’était celle-là. Alors réaliser une potion de désincarcération était exactement le genre d’opportunité devant laquelle elle ne reculait jamais, le genre de défi qu’elle appréciait. Et qu’elle aurait certainement apprécié encore plus si elle n’avait pas été forcée de le relever tout en étant attaché à Ethan.

Mais voilà sur ce dernier point elle n’avait pas le choix, sinon cette potion n’aurait eu aucune raison d’être. Elle devait composer avec la présence envahissante d’Ethan à ses côtés, essayé d’occulter sa main dans la sienne et les regards noirs qu’il lui adressait. Surtout que ces regards, agrémentés de ces paroles acides qu’il lui jetait à la figure, n’étaient que le résultat du comportement d’Hestia. Une réaction de cause à effet qu’elle savait parfaitement comment provoquer et dont elle ne se privait pas. Parce que s’attirer la haine du Gryffondor était facile et infiniment plus sûr pour lui que de conserver leur amitié passée. Il y avait trop de risque désormais à ce qu’ils continuent de s’afficher comme des amis, les parents de la Carrow le lui avaient bien fait comprendre. Alors Hestia avait pris sa décision seule, elle avait enterrée leur amitié sans prévenir le lion et face à son incompréhension elle s’était mise à lui opposer froideur et arrogance. C’était un petit jeu auquel elle excellait, au moins toutes ses années d’amitié gâchées avaient servies à quelque chose. Elle n’y prenait aucun plaisir mais elle continuait parce que c’était la seule chose à faire. Ces instants ne faisaient pas exception. Même en préparant une potion la Serpentarde continuait de saisir toutes les opportunités de provoquer le lion. Et c’était tellement facile. Il suffisait de voir comment il se vexait de ne pas maitriser la situation, de ne pas être celui en capacité de trouver la solution. Ethan se trouvait obligé de suivre les directives d’Hestia, celle à qui il en voulait depuis si longtemps et la verte voyait bien que c’était là quelque chose qui lui restait en travers de la gorge. Et bien tant pis pour lui, s’il avait été un peu plus maitre de ses émotions face à elle il ne lui aurait pas offert sur un plateau en argent une nouvelle manière de s’assurer qu’il ne chercherait plus à l’approcher.

Préparer une potion avec le Gryffondor aurait pu être une expérience agréable, Hestia le savait, Ethan était un sorcier sympathique et elle avait véritablement apprécié leur amitié, mais les choses étant ce qu’elles étaient c’était exactement ce qu’elle devait éviter. Alors elle s’était contentée de débiter ses instructions d’une fois distante et assurée, exactement le genre d’autorité qui hérissait le fier Gryffondor. Et encore une fois elle atteignait son but sans le moindre mal. Ethan soupirait, râlait et la fusillait du regard à chacune de ses paroles. C’était vraiment trop facile. « Bah écoutes t'as qu'à faire gaffe aussi, y'a pas que moi. » Hestia leva les yeux au plafond en lâchant un soupir parfaitement audible. Au milieu de toutes ces provocations, le lion ne semblait même pas se rendre compte qu’au final ils étaient obligés de se faire confiance s’ils voulaient que ça fonctionne. La verte n’avait même pas vérifié la quantité de corne de bicorne en poudre qu’il avait pesé, non seulement parce qu’il n’avait aucune raison de se tromper volontairement mais aussi parce qu’au fond d’elle, elle savait que même si elle s’attirait volontairement son mépris, le Gryffondor était quelqu’un sur qui elle pouvait compter. Mais bien sur ce ne furent pas de telles paroles qui franchirent ses lèvres. « Alors ne me déconcentre pas. » Lâcha-t-elle à la place d’un ton blasé qu’elle maitrisait à la perfection. Heureusement que malgré les piques qu’ils s’envoyaient ils étaient tous les deux déterminés à réussir cette potion. La découpe de la racine de mandragore se passa sans incident et Hestia pu ajouter les derniers ingrédients dans le chaudron. Elle remua le tout de quelques coups de baguette et se pencha à son tour au-dessus du chaudron pour surveiller le résultat. La préparation s’était changée en un vert très pâle et était maintenant d’une texture fluide et homogène.

Hestia eu un petit hochement de tête satisfait, malgré les difficultés le résultat obtenu était celui escompté. Apparemment même en se bouffant le nez les deux étudiants étaient capable de travailler ensemble. Un vrai miracle. « Si j'en crois la recette, on devrait être bon non ? » La verte acquiesça distraitement. Sans prêter attention à Ethan et à leurs mains toujours liées, elle sortit de nouveau sa baguette et commença à ranger les ingrédients et ustensiles dont ils n’avaient plus besoin. Par Merlin, elle n’aurait jamais cru qu’ils puissent réussir à faire quelque chose ensemble sans -trop- s’engueuler. Depuis le temps qu’elle forçait le mépris du rouge elle s’était toujours dit que leur ancienne amitié était véritablement condamnée. Après tout c’était ce qu’elle cherchait depuis le début et elle savait combien le lion était rancunier. « Oui, on a fait tout ce qu’il fallait. Il n’y a plus qu’à verser quelques gouttes sur nos mains et on sera libérés. » Confirma-t-elle en lançant un nouveau sort pour que leur préparation aille remplir les quelques fioles vides qu’elle avait sorti un peu plus tôt. Elle se hérissa néanmoins en entendant un bruit de verre brisé. Elle regarda, consternée, l’une de ses fioles remplie de potion éclatée sur le sol. Ignorant la grimace d’Ethan, la verte souffla bruyamment et tira d’un coup sec sur leurs mains jointes. Tout se passait trop bien, il fallait bien que ça coince à un moment ou à un autre, à croire que le rouge ne pouvait pas s’en empêcher. « Sérieux ? Tu peux pas faire gaffe un peu ? Encore heureux qu’on ait plusieurs fiole sinon tu te serais débrouillé seul pour recommencer. » Siffla-t-elle brusquement. En fait, même si Ethan n’était pas mauvais en potions, elle ignorait s’il aurait pu réussir un tel mélange seul et surtout si elle aurait pris le risque de lui en confier la préparation. Mais heureusement la question ne se posait pas puisqu’ils avaient fait assez de potion pour remplir plusieurs fioles. Par Merlin s’il avait brisé leur seule préparation ils auraient surement fini par détruire la salle. Après un nouveau soupir, Hestia se détourna. Il n’aurait qu’à nettoyer les dégâts, elle n’était pas là pour réparer ses bêtises. Un nouveau sort lui permis de s’assurer que la potion de désincarcération n’était plus brûlante. Elle coinça sa baguette dans sa ceinture avant de s’emparer d’une des fioles. « Prêt ? » Demanda-t-elle en levant leurs mains. Elle croisa le regard du lion. C’était le moment de vérité, et peut-être aussi celui de leur libération.

CODAGE PAR AMATIS

Linked paths, intertwined hands

Un véritable stéréotype, voilà ce qu’ils étaient. Le cliché en puissance des Serpentards et Gryffondors incapables de se supporter et qui n’avaient nulle intention de faire le moindre effort. Les dignes représentants des maisons ennemies qui continuaient à se bouffer le nez à la moindre occasion juste parce que c’était ainsi depuis des siècles et qu’ils ne voyaient pas l’intérêt de dévier de cette route toute tracée. Comme si c’était plus confortable de suivre le chemin qu’on attendait d’eux, de juste suivre le courant. Si la situation avait été différente entre Ethan et elle, tout ceci aurait certainement irrité Hestia. La guéguerre à laquelle se livrait sa maison et celle du lion depuis des décennies, elle n’en voyait ni le sens, ni l’intérêt. Tout ça la dépassait et, très franchement, elle n’avait aucune envie de se prendre la tête pour chercher à comprendre comment les jeunes sorciers pouvaient entre prendre l’inimité des fondateurs de la maison tant à cœur. Les querelles qui avaient existés entre Godric Gryffondor et Salazar Serpentard n’étaient pas leur problème après tout, ça n’avait pas à avoir le moindre impact sur leur vie et encore moins dicter leur comportement. Mais certains prenaient ça autant à cœur qu’une tradition et se contentait de suivre aveuglément les actions de sorciers qui étaient morts depuis plusieurs siècle. C’était à ça que ressemblait la relation entre Ethan et Hestia. La Serpentarde aurait certainement trouvé ce comportement parfaitement ridicule si en réalité il n’était pas provoqué de toute pièce par sa propre personne. Chaque mot lancé d’une voix méprisante, chaque provocation jetée à la figure du Gryffondor, tout était calculé, rien n’était laissé au hasard. Avec de telles réactions, Hestia représentait parfaitement les pires travers de sa maison, la manipulation et l’orgueil poussé à son extrême, mais peu lui importait parce que c’était le seul moyen d’obtenir le résultat attendu : qu’Ethan la déteste alors qu’il n’avait eu auparavant jamais eu la moindre raison de le faire. Et la Serpentarde remplissait plutôt bien son rôle.

Malgré tout ce qui jouait contre eux, les deux étudiants étaient parvenus à préparer la potion de désincarcération qui les libérerait. Pourtant personne n’aurait parié sur leur réussite, et si Hestia n’avait pas été aussi sûre de son talent en potion elle aurait certainement émis des doutes aussi. Une potion délicate préparée par deux sorciers qui ne pouvaient pas se voir en peinture était déjà un véritable défi en soit. Mais si en plus les deux sorciers en question se retrouvaient liés par les mains et donc obligés de coopérer encore plus étroitement là ça revenait presque à demander un miracle. Et Hestia n’avait jamais été du genre particulièrement optimiste. Pourtant il lui semblait qu’ils étaient venus à la fois au bout de cette étrange mission et de celle -personnelle et secrète- de la Serpentarde qui revenait à s’assurer que l’antipathie du lion à son égard ne change pas. Oui, vu l’expression du Gryffondor et les remarques qu’il sifflait entre ses dents, elle avait bel et bien réussi. Mais le plus important restait la potion que la Serpentarde s’apprêtait à verser sur leurs mains. Ils y étaient enfin, le moment de vérité. « Prêt ! » Hestia hocha la tête et pris une profonde inspiration avant de verser quelques gouttes de leur mélange sur leur peau, prenant bien garde à viser les endroits où leurs mains étaient liées. Si cela ne marchait pas alors ils n’auraient pas d’autre choix que d’aller voir un professeur et c’était une option qui ne réjouissait toujours pas la verte, surtout qu’elle n’avait pas vraiment l’intention d’expliquer à qui que ce soit qu’ils s’étaient servis dans les réserves de l’école pour préparer une potion. Elle observa avec une pointe d’anxiété leurs mains jointes avant de sentir le soulagement l’envahir, peu à peu leurs peaux se décollaient et elle pouvait déjà sentir la poigne du lion se desserrer. « Nom d'une gargouille, ça a marché !! » Hestia fit jouer ses doigts, ils étaient libres. Elle retint de justesse un parce que tu en doutais ? lâché d’un ton méprisant calculé et se contenta de hausser un sourcil en réponse à l’exclamation du rouge. Au fond elle savait que le lion ne pensait pas à mal, que c’était sa manière brute d’exprimer son soulagement, et puis elle aussi elle était bien contente de voir que sa potion était parvenue à venir à bout du sortilège qui les avait liés contre leur gré. Alors pour une fois elle ravala son attaque gratuite et garda le silence, se contentant de laisser un vague sourire satisfait venir orner ses lèvres.

En silence, la Serpentarde observa son camarade réparer les dégâts qu’il avait causés un peu plus tôt. Toute cette aventure avait été moins pire que la verte ne l’avait craint et elle sentit son cœur se serrer en songeant aux souvenirs de leur amitié passé que ça lui rappelait. Si les choses avaient été différentes ils auraient sûrement pu créer cette potion dans la bonne humeur, en échangeant des plaisanteries et avec la sensation qu’ils en garderaient un bon souvenir. Là Hestia se disait surtout que même quand ils affrontaient l’adversité ensemble, Ethan n’aurait d’elle que l’image d’une garce égocentrique. Elle soupira, c’était mieux ainsi elle le savait, tout ça c’était elle qui le provoquait sciemment et elle ne devait surtout pas perdre de vue qu’elle agissait pour le lion. Et surtout qu’il ne devait jamais en apprendre les raisons. Lentement, elle passa une main -celle récemment libérée- dans ses cheveux pour les remettre en place. Remuer les raisons de son comportement ne servirait à rien, ça ne changerait rien, elle le savait. Tout comme elle savait que les menaces de ses parents n’étaient pas des paroles en l’air. A ses côtés, Ethan avait commencé à ranger les ustensiles qu’ils avaient sortis. Elle hésita une seconde, ils n’avaient pas échangé un mot depuis qu’ils avaient séparé leurs mains et elle se demandait si elle devait rester pour aider à remettre de l’ordre et tenter de camoufler le fait que les réserves de la salle avaient descendues. Ethan sembla saisir ses doutes. « Tu peux y aller si tu veux. Je m'occupe de tout remettre en place. » Hestia fixa le dos du Gryffondor avant de reporter ses prunelles ambrées sur les fioles qu’elle avait remplies de potion de désincarcération un peu plus tôt. Il en restait deux pleines en plus de celle entamée qu’elle avait utilisé pour libérer leurs mains. Elle hésita à partir sans rien dire et amorça même un mouvement vers la porte avant de se raviser. « Tiens, gardes en une. » Lâcha-t-elle en potion une des fioles pleine sur la table où ils avaient travaillé. « Si jamais tu as encore la brillante idée de te retrouver collé à quelqu’un d’insupportable. » Reprit-elle en empochant les préparations restantes. Après tout ils avaient travaillé ensemble, même si c’était grâce à ses connaissances et son habileté qu’ils avaient réussi à s’en sortir. Hestia était peut être insupportable avec le rouge mais elle n’était pas non plus un monstre d’égoïsme. Cependant il manquait quelque chose, quelque chose qui la dérangeait bien plus qu’elle n’aurait voulu le reconnaitre. Alors elle s’arrêta sur le pas de la porte pour se tourner une dernière fois vers Ethan. « Inutile de me remercier surtout. » Conclut-elle d’une voix qu’elle voulait condescendante mais qui mêlait étrangement reproches et regrets. C’était peut-être un peu des deux. Mais ça elle ne l’avouerait pas.

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