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Les moldus et élèves de Poudlard du forum se sentent cruellement seuls au milieu de tous ces sorciers adultes,
alors pensez à les privilégier pour vos personnages

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Abigail MacFusty
Abigail MacFusty
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Lumos
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Mon allégeance : Ordre du Phénix
Sam 6 Fév - 22:20
Ce matin, je quittais Soay non sans avoir une légère boule au ventre. Plus les jours passaient pour me rapprocher de la date fatidique, moins je me sentais bien. D'ailleurs, transplaner devenait dangereux pour moi, et sûrement que bientôt, je devrais plutôt préférer la poudre de cheminette. Je tâcherais d'y songer pour la prochaine fois, mais là, la fatigue l'avait emporté sur ma raison, comme d'habitude.
De vilaines cernes sous les yeux, j'avais déjà beaucoup maigri du fait que j'avais presque totalement cessé de manger. Brutale avec mon corps fragile, ce dernier essayait au mieux de puiser dans ses maigres ressources pour me faire tenir le coup, mais c'était au détriment d'autre chose. Comme une vieille machine rouillée, réparer un endroit en faisait sauter un autre. Il y avait toujours quelque chose, et aujourd'hui, c'était un rhume carabiné. J'avais attrapé froid dans le vent frais et incessant de mon île, sans surprise, c'était mon lot quotidien en allant là-bas. Ça n'enlevait en rien l'amour que j'avais pour ma terre natale.

Après m'être assurée que tout le monde chez moi était bien tranquille, moutons, poules, Sombral et phénix, je quittais l'île pour me retrouver au chemin de traverse. De là, slalomant rapidement et avec agilité entre les passants, je me rendais dans diverses boutiques pour faire des achats rapidement, dont un perchoir adapté à la taille de Grishkin ainsi qu'à ses besoins de phénix, à savoir, le jour où il reprendra feu, de pouvoir récolter ses cendres sans encombre.
Les emplettes magiques faites, je passais dans les rues moldus pour me rendre à la librairie de mon cousin. Il m'avait rendu un fier service en prenant ma guitare pour la faire réviser auprès d'un spécialiste. Il l'avait réceptionnée depuis peu, alors, je m'étais empressée d'aller la rechercher. Cette guitare me manquait, la musique me manquait, c'était mon seul exécutoire en ce moment, avec l'étude que me donnait Grishkin puisque je profitais de sa présence pour l'observer et prendre bons nombres de notes. Soigneusement, j'évitais de répondre à ses questions quant à mon état, et je détournais plutôt son attention sur des ouvrages concernant les phénix. J'avais besoin de me documenter un minimum pour pouvoir prendre convenablement soin de mon nouveau compagnon. Tout le moins, s'il désirait rester avec moi, car je ne le retenais pas (et je ne le pouvais pas), mais depuis sa venue, l'animal se contentait de voler autour de l'île ou de me suivre lorsque je sortais me promener.

Livres empruntés, guitare dans sa fourre accrochée à mes épaules, je quittais un peu précipitamment la librairie, toujours dans l'optique de fuir les questions d'Aïko. Il connaissait la raison de mon état, mais je refusais son aide, d'ailleurs, je refusais l'aide de tout le monde ou presque.
En réalité, mon corps et mon esprit étaient en veille, comme un ordinateur qui attendait qu'on le rallume. Je me contentais de faire mes tâches quotidiennes sans enjouement. J'attendais là, le jour où j'irais à l'encontre de Thomas pour le faire voyager chez moi et pour que nous puissions passer du temps ensemble jusqu'à la date fatidique.
Rien que d'y penser, à cette cérémonie, j'en avais la gorge nouée, et mes pensées se troublèrent. Là, un vertige vint m'assaillir et je me voyais alors dans l'obligation de faire une pause avant de devoir repartir sur le chemin de traverse afin de transplaner à nouveau.
Alors je faisais le choix de m'asseoir sur un banc dans le Regent's Park, un peu à l'abri du soleil, là où un ensemble de fleurs aux mille couleurs chatoyait devant moi, de l'autre côté du chemin en petit gravier. Main devant le visage, je reprenais lentement mes esprits, attendant que la nausée passe. Ceci fait, je soupirais tout en essayant de rassembler mes idées. Plus vite je retournerais chez moi, mieux ce sera, mais je savais que me précipiter n'était pas non plus une solution, surtout dans mon état. Je me devais de reprendre des forces avant de repartir.
Voilà pourquoi je sortais ma guitare de son étui, et, après m'être mouchée, je la mettais sur mes jambes, doigts se positionnant avec précision. Sans réfléchir, j'entamais un début de gamme, enchantée par la révision de l'expert. L'instrument avait retrouvé une seconde jeunesse, c'était absolument merveilleux. Enjouées, mes mains glissèrent par reflexe et habitude pour faire s'envoler des notes folles au rythme dynamique, contrastant totalement avec mon état. Sorcière sur son banc, courbée, les yeux cernés, le nez rouge, le teint pâle, la peau amaigrie.

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Lumos
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Mon allégeance : Ordre du Phénix
Dim 7 Fév - 12:20
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Un juron t’échappe tandis qu’une pointe de douleur fuse de ton bras. Tu déposes le carton dans la réserve là où Aiko pourra réceptionner les livres qu’il contient et les intégrer au fonds de la librairie avant de jeter un coup d’œil. Le poids du carton et son frottement contre la peau fragile de ton bras ont fait sauter les croûtes encore légères et quelques gouttes de sang tachent ton tee-shirt. Tu y es allé un peu trop fort la nuit dernière, tu as mal contrôlé ton geste et l’entaille s’est révélée plus profonde que tu ne le voulais. Rien de grave en soi, rien de douloureux non plus, il faudra juste que tu fasses un peu plus attention. Heureusement, la journée se termine, tu achèves ta dernière tache.
Une fois la réserve en ordre, tu récupères ton précieux sac à dos, un simple sac de toile vu de l’extérieur, mais grâce à un sortilège d’extension indétectable, tu peux y ranger l’intégralité de tes affaires – et même ta malle scolaire. En prenant soin de garder ton bras près de ton corps, tu salues Aiko et Ielena, elle aussi sur le départ, et tu quittes la librairie. C’est un plaisir d’y travailler, cela fait des années que tu fréquentes l’endroit en tant que client – même si ça a été moins le cas ces dernières années –, que tu aimes sa double vitrine, sorcière et moldue, que tu t’y sens bien. Et c’est un soulagement d’y passer l’été plutôt que dans un café trop bondé et trop bruyant, qui te hérisse les nerfs, aiguise ta vigilance et te laisse épuisé – plus encore que tu ne l’es –, au bord de la crise d’angoisse. Tu doutes d’être encore capable de le faire, alors que là, au Part Chemin, c’est presque reposant. Tu as toujours aimé te retrouver au milieu des livres.

Un poids quitte cependant tes épaules une fois que tu te retrouves dans la rue, sous le soleil de l’été. Tu vas pouvoir arrêter de faire semblant, de jouer la comédie pour la soirée et la nuit. Autant tu as grandement perdu en sécurité et en confort maintenant que tu n’es plus à Poudlard, autant… eh bien, tu apprécies de ne plus avoir de condisciples autour de toi, de ne plus jouer la comédie pendant les repas, le soir dans la salle commune. Avantage aussi, tu ne réveilles plus tes camarades de dortoir avec tes cauchemars ; tu n’as plus à prêter attention à leurs mouvements et à leurs respirations. Même si évidemment tu ne baisses pas ta garde. Tu ne la baisses jamais. Hors de question de laisser le Blood Circle te mettre la main dessus.
Tes pas te mènent jusqu’à Regent’s Park. Ce n’est pas très sérieux, tu devrais chercher un endroit pour la nuit – tu changes régulièrement pour ne pas créer de routine, naviguant entre les bâtiments abandonnés et squattés, et les maisons à louer ou à vendre visiblement inhabitées, l’option que tu préfères. Mais tu es… fatigué. En général, marcher, profiter du parc, de la nature, sans pour autant oublier de garder un œil sur les passants, t’aide à te vider la tête. Ça ne marche pas toujours, et tu finis par t’échouer sur un banc. Il a plu dans la journée et quelques flaques s’attardent. Parfois, souvent, tu aimerais te dissoudre sous l’eau, t’y fondre et disparaître. Ce serait plus simple, peut-être. Si seulement tu arrivais à dormir… Même loin de Poudlard, les cauchemars ne te quittent pas, te réveillent toutes les nuits, et impossible de te rendormir ensuite. Sans les cours, les devoirs, la nécessité de porter un masque en permanence pour faire semblant que tout va bien, tu le supportes un peu mieux, mais au fond, la fatigue t’écrase et te brouille les pensées. Tu as l’impression de te débattre dans un brouillard permanent les bons jours, et de couler le reste du temps, sans arriver à retrouver le chemin de la surface.
Ça ne devrait pas être aussi difficile pourtant. Ta mère t’a élevé pour que tu sois capable de te débrouiller seul, parce que vous avez toujours su que cette situation pouvait se produire. Alors… tu ne sais pas. Tu vas avoir vingt ans dans un peu moins de deux mois. Enfin, Nathan fêtera ses vingt ans le 31 août, mais Eirian les aura eus un mois plus tôt. Tu devrais être capable de te gérer comme un adulte, ne pas galérer autant. Bon sang, vingt ans, pas quinze ! Parfois, tu te demandes si tu as bien fait de continuer à l’université, il aurait peut-être été plus simple de trouver directement du travail. Mais tu ne voulais pas… perdre Poudlard, le seul endroit familier que tu avais, ni tes rares amis. Ni cette sécurité, dix mois par an, là où tu es sûr que ton père ne te trouvera jamais.

Mais tu n’y arrives pas, c’est de pire en pire même. En sus des cauchemars, tes problèmes alimentaires sont revenus, tu te forces à manger quand tu y penses, seulement pour éviter le malaise, mais ce n’est pas assez et tu as perdu du poids, ça commence à se voir, tes vêtements sont un peu trop amples. Au moins, tu n’auras pas trop de mal à te nourrir jusqu’à la fin du mois, sur l’argent gagné pendant l’année, sans avoir besoin de demander une avance sur salaire à Aiko – tu ne l’aurais pas fait de toute façon : ne jamais attirer l’attention, ne jamais te faire remarquer par un comportement qui détonne. Sans parler des cernes qui te bouffent et te creusent le visage. Le sortilège que tu utilises pour les masquer finit par s’estomper au fil de la journée, mais maintenant ça n’a plus d’importance. Et bien sûr… ton regard tombe sur les gouttes brunies qui marquent ta manche, seul moyen à ta portée de calmer tes angoisses lorsqu’elles deviennent trop violentes et te noient. La douleur aiguë, fugitive, éphémère t’aide à reprendre pied, à écarter les tourbillons noirs, à te rendre une illusion de contrôle – cette douleur-là, tu sais d’où elle vient, ce qui la provoque. Comment la déclencher et comment l’arrêter. Et tu peux te focaliser dessus, espérer que les quelques gouttes de sang qui s’écoulent emporteront le reste avec elles. Illusion bien sûr, mais tu as quand même besoin de ces quelques minutes. Le reste du temps, tu as l’impression de fonctionner à coups d’injonctions basiques, « va travailler », « n’oublie pas de manger », « trouve-toi un endroit pour cette nuit si tu ne veux pas finir sur un banc » et rien que les exécuter te demande déjà trop d’énergie.
En vérité, la seule chose qui te fait encore tenir, c’est ta mère. L’espoir toujours là de la retrouver bientôt. Robin va avoir des informations, tu en as recueilli aussi sur le Blood Circle, tu devrais pouvoir agir. Au fond, peu importe ce qui t’arrive tant que tu restes prêt à tout pour la retrouver. Mais ce ne sera pas ce soir.

Tu te secoues, te redresses, sur le point de sortir du parc lorsqu’une musique te parvient, une mélodie jouée à la guitare. Vif et enthousiaste, l’air t’attire. Sans doute un musicien de rue, tu peux t’arrêter quelques secondes pour écouter avant de repartir.
Un petit chemin en gravier te mène dans un autre coin où brille un parterre de fleurs. Sur un banc, quelqu’un joue de la guitare. À ta grande surprise, tu reconnais Abigail. Tu l’as vaguement aperçue dans la librairie un peu plus tôt, elle discutait avec Aiko. Elle n’a pas l’air en forme elle non plus, malgré l’énergie qui se dégage de son instrument, elle a l’air malade. Tu t’arrêtes à quelques pas d’elle, hésitant à la déranger, mais tu ne veux pas non plus donner l’impression de l’ignorer si elle t’a aperçu, ni de la fuir. Même si tu ne l’as jamais eue comme enseignante, elle t’a bien aidé à ton entrée dans l’Ordre et vous vous entendez bien. Après une dernière tergiversation, tu finis par t’approcher.

— Bonjour ! La musique m’a attiré, mais je ne pensais pas tomber sur vous. Vous jouez vraiment bien.

Une pause, le temps de te rappeler que tu n’es pas doué non plus pour les interactions et que ça ne s’arrange pas avec le temps.

— L’été se passe bien ?

Ça te paraît plus général comme question qu’un « est-ce que tout va bien ? ». Ça n’a pas l’air d’être le cas, tu es bien placé pour t’en rendre compte.
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Mon allégeance : Ordre du Phénix
Lun 8 Fév - 21:24
Mes doigts dansaient au son qu'ils engendraient sur les cordes de mon instrument. Je n'avais pas les yeux fermés, mais le regard baissé sur le bois du manche de la guitare. À tel point emportée par la mélodie que j'étais en train de jouer, je m'enfermais dans une petite bulle d'introspection, allant jusqu'à oublier où je me trouvais. C'était comme si j'étais enfin en train de prendre soin de moi alors que cela faisait des jours que je me négligeais de manière plus ou moins prononcée. J'ignorais combien de temps cela faisait que je m'étais assise sur le banc ni combien de temps cela faisait que je jouais, mais ce fut une voix qui me tira de ma bulle. J'en sursautais tant le retour à la réalité fut brutal, mes mains tremblant sur le coup, de fausses notes en sortirent, me faisant grimacer un peu. Pourtant, lorsque je levais les yeux vers la personne qui m'avait abordée, je ne pouvais m'empêcher de sourire. Ce sourire bienveillant et calme qui me caractérisait si bien, et qui, en les faits actuels, contrastait terriblement avec mon état.

- Bonjour. Merci pour le compliment, mais j'espère ne pas vous avoir dévié de votre route. Vous savez en jouer ?

Cœur encore palpitant par la surprise, je ne regarde pas le jeune homme dans les yeux. À dire vrai, je ne l'avais pour ainsi dire jamais fait avec lui. Bien que nous nous connaissions par notre allégeance à l'Ordre et que souvent je l'ai croisé dans les couloirs de Poudlard, ce n'était pas pour autant que je le connaisse bien. Cela ne suffisait donc pas à me mettre à l'aise en sa présence, et comme si mon état n'était pas déjà assez minable ainsi, je me recroquevillais un peu sur moi comme une petite mamie malade. Après tout, j'étais en vacances, ici, je me fichais de l'image que je pouvais donner de moi. La professeure que j'étais avait une vie à côté des cours, et voilà à quoi cela ressemblait, surtout en été.
Hésitation visible sur mes mimiques corporelles, je me poussais un peu du banc afin de laisser au jeune homme la possibilité de prendre place s'il le désirait.
Là, je redressais un peu la guitare pour la poser contre mon épaule.
Bien que je ne le fixe jamais vraiment, aucun détail ne m'échappait, aussi étrange que cela puisse paraître. Je vivais ainsi depuis si longtemps, recluse sur moi-même, que j'en étais venue à exceller dans l'observation d'autrui. C'était ainsi que j'essayais de mieux comprendre les rapports humains, car pour une personne si étrange que moi, c'était une véritable énigme. Alors, j'essayais de percer les autres par leurs mimiques, leurs manières de se tenir, les traits de leurs visages, les légères crispations, ou au contraire, les muscles détendus. Tout ça, je le voyais, non pas parce que j'étais une empathe ou une légilimence, mais tout simplement parce que j'étais extrêmement aux aguets et sensible. Sens exacerbé par mon travail de dragonologiste, s'en était devenu un véritable atout pour moi. Ainsi, il ne m'était pas compliqué de voir que le jeune homme semblait peut-être aussi fatigué que moi. Quelque chose me troublait dans ce qu'il dégageait, mais je n'arrivais pas à deviner de quoi il s'agissait au juste. Qui plus est, est-ce que j'avais véritablement envie de me mêler de ce qui ne me regardait pas ?
En général, la réponse était non, mais il n'était pas dans ma nature de laisser les autres dans le besoin, et Eirian était non seulement un élève, mais aussi un membre de l'Ordre. J'avais ce devoir d'aider l'autre qui commençait à crier au fond de mes tripes.

- L'été… ne se passe plus très bien depuis deux ans. Je baissais les yeux sur mes cordes de guitare, laissant mon index les parcourir les unes après les autres pour les laisser sonner distraitement. J'étais franche, ce n'était pas mon genre de mentir, à quoi bon ? Et même si j'étais observatrice, il fallait être sot pour ne pas voir que je n'étais pas dans mon meilleur jour. Et le vôtre ? Retour simple de la question, je ne m'attendais pas à une réponse aussi sincère que la mienne. Là, je levais les yeux vers les fleurs disposées un peu plus loin face à nous. Leurs parfums, poussés par le vent, vinrent m'enivrer les narines, me faisant inspirer profondément et avec délectation. C'est pourtant une jolie et plaisante saison.


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Mar 9 Fév - 21:23
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
En suivant le son de la guitare, tu ne t’attendais pas à tomber sur Abigail – ou n’importe quel sorcier de ta connaissance, d’ailleurs. Ils ne sont pas si nombreux à se promener dans le monde moldu en temps normal, encore moins en ce moment avec le conflit qui menace. C’est presque étrange de la voir là sur ce banc, avec une guitare, si loin des animaux magiques. Après avoir hésité, tu te décides à la saluer. Ce que tu regrettes aussitôt en voyant son sursaut : elle était vraiment partie loin, et tu t’en veux d’avoir brisé sa bulle. Tu aurais sans doute mieux fait de passer ton chemin. Des fausses notes s’échappent de la guitare, tu grimaces un peu, mais Abigail te sourit, son sourire habituel qui contraste avec sa mine fatiguée. Elle n’a pas l’air de t’en vouloir, mais c’est parfois si difficile d’arriver à fuir le monde, de grappiller assez d’instants pour fermer la bulle et arriver à s’y reposer… Ce n’est pas pour que le premier idiot venu la fasse éclater. Tu y cédais parfois, à Poudlard, dans le parc ou dans les recoins déserts du château, mais en dehors il est hors de question de te montrer aussi vulnérable. Quoi qu’il en soit, Abigail est peut-être comme toi, trop polie pour montrer son agacement. Tu lui retournes un sourire un peu incertain.

— Pardon, je ne pensais pas vous déranger à ce point. Je profitais du parc, alors ce chemin-là plutôt qu’un autre, ça ne change rien. Non, du tout, je n’ai jamais appris.

En dehors de quelques dessins sans grande prétention, tu n’as jamais vraiment eu de talent artistique. C’est surtout le sport qui occupait une grande partie de ton temps libre plus jeune – le sport et les livres. Cette dernière passion t’a mené sur le seuil d’Aiko il y a un moment déjà, avec ta mère au début puis seul ensuite, même si elle t’accompagnait régulièrement. Elle tenait à ce que tu gardes quand même une certaine culture moldue, que tu continues de te sentir à l’aise dans ce monde, malgré les dix mois passés ailleurs. Et tu aimais ces moments partagés pendant les vacances, ces jours où tout avait l’air normal. Où tu pouvais croire que ta vie l’était vraiment.

Abigail ne te regarde pas en face. Tu as l’habitude et ça t’arrange plutôt, de toute façon. Tu as du mal à soutenir le regard des autres trop longtemps, tu te sens très vite agressé, disséqué. Alors, ne pas avoir à faire cet effort te convient parfaitement. Elle n’a vraiment pas l’air en forme, le soleil de l’été fait d’autant plus ressortir son teint pâle et son nez rouge. Elle se décale un peu sur le banc comme pour te faire de la place. Tu hésites, redoutant de la déranger encore plus. Mais tu es justement celui qui l’a interrompue ; mettre fin à la conversation dès maintenant serait sans doute encore pire. Et si tu la gênes vraiment, elle saura sans doute te le faire comprendre. La comédie peut bien reprendre pour quelques minutes. Tu finis par te poser au bout du banc, toujours un peu perdu, ton sac calé avec soin à tes pieds, une main toujours posée sur les bretelles. Ainsi, tu as moins l’impression de la dominer. Une fois de plus, tu mesures à quel point c’est devenu compliqué dès que tu n’es plus en terrain connu, à Poudlard ou dans des situations que tu maîtrises, avec des schémas plutôt simples. À l’école, avec les cours et la météo, tu peux remplir quatre-vingt-dix pourcent des conversations et presque atteindre cent pourcent en y ajoutant l’actualité. Là, tu ne sais pas vraiment ce que tu es censé faire – à part maintenir les apparences. Ce sera déjà bien assez pour aujourd’hui.

Elle répond à ta question avec des mots qui laissent entendre quelque chose de grave. Sentiment appuyé par sa mine et la façon dont ses doigts courent sur les cordes. La période a l’air de lui rappeler de mauvais souvenirs.

— Je suis… désolé.

Tu ne sais pas quoi offrir de plus ; elle a certainement des proches qui lui apportent le soutien adéquat. Elle te retourne rapidement la question, en soulignant que l’été est une belle saison. Mouais. Pour toi, elle est surtout peuplée de mauvais souvenirs. Bien sûr, dans tes premières années, elle était synonyme de bonheur, de vacances, de jeux sans fin – d’entraînements, aussi. Et il y avait tes anniversaires, les journées passées avec Carl et Robin, dans une insouciance bienheureuse. Mais c’est au mois de juillet que tes parents ont découvert tes pouvoirs, il y a si longtemps maintenant, et que ta vie a volé en éclats. C’est au début de juillet également que ta mère a disparu et que tu t’es retrouvé seul et à la rue. C’est l’été que survivre devient encore plus compliqué. C’est l’été aussi que… Non. Pas ces souvenirs-là. Tu chasses les ombres.
Tu souris à Abigail.

— Le mien se passe bien, merci. Je travaille dans la librairie d’Aiko, j’aime beaucoup.

Ton regard dérive vers les fleurs. L’été pourrait être une belle saison. S’il n’était pas aussi dur dans ses couleurs, aussi froid, paradoxalement. Plein de promesses qu’il ne tient pas. Il est rouge pour toi, un rouge profond, trop prégnant, qui te met mal à l’aise, sans que tu saches à quel point tes propres sentiments viennent brouiller ta perception. Tu n’es pas sûr que tu le voyais ainsi, enfant, avec cette aura menaçante, bienveillant au premier regard comme un soleil dont la chaleur te caresserait les épaules, puis agressif ensuite, capable de brûler. Tu te secoues. Cette façon d’expliquer les choses n’aurait sans doute pas grand sens pour elle.

— Je ne la trouve pas si belle pour ma part. Elle est trop dure, elle manque de nuances… elle est un peu écrasante à côté du printemps par exemple. Même si elle a ses avantages bien sûr. Ça fait plaisir de profiter d’un peu de chaleur.


Même si ça reste tout relatif. Enfin, Londres a quand même un meilleur climat que l'Écosse.

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Ven 26 Fév - 12:19
Aux excuses du garçon, je me contentais de lui sourire en secouant légèrement la tête afin de lui signifier que je n'étais absolument pas dérangée par son intervention. Petit être très rêveur, ce n'était pas la première fois ni la dernière fois que ma bulle de pensée explosait ainsi à l'irruption d'un étranger. Mais ces moments de retraite me faisaient du bien, car les sollicitations extérieures étaient trop nombreuses, puis chacun y apportait son poids, alors elles devenaient trop lourdes, puis trop bruyantes, alors enfin trop envahissantes. Voilà pourquoi je pratiquais très régulièrement la méditation. Faire le vide dans mon esprit, c'était un peu comme avoir accès aux étoiles. L'immensité de la noirceur du néant avait quelque chose qui me rassérénait. Pour la plupart du commun des mortels, c'était sûrement angoissant, mais pas pour moi, étrange petite sorcière que j'étais.
Du coin de l'œil, je regardais le jeune homme prendre place à côté de moi, son sac entre ses jambes, les mains ne lâchant pas les bretelles de son bien. Cela pouvait paraître anodin pour n'importe qui, mais pas pour moi. J'avais cru observer un peu plus tôt qu'il semblait fatiguer, peut-être un peu comme moi, et à présent je le voyais là comme crispé et prêt à s'enfuir. Je me trompais, éventuellement, mais c'était l'impression qu'il me donnait.
Pourtant, je n'avais jamais mangé personne, c'était plutôt les autres qui pouvaient me manger toute crue tant j'étais craintive des individus de ma propre espèce. Dans un sens, il me faisait un peu de peine. Je n'avais pas de pitié, ce sentiment, je le gardais pour les animaux fantastiques. C'était davantage une émotion de compassion, et un peu, de compréhension, car il me faisait penser à un petit oiseau. Cette créature qui est toujours sur le qui-vive, à observer autour de lui avec cet air inquiet lorsqu'il est en terrain inconnu.
Comme je pouvais le comprendre oui…

Un nouveau sourire rempli de bienveillance illumina mon visage rapidement tandis qu'il s'excusait, à son tour avec cette empathie qui lui était propre. Je ne souhaitais pas m'avancer dans les détails, ça ne le concernait pas, et après tout, nous entretenions toujours une relation professeur-élève. Le privé, tout le moins de cet ordre-là, n'avait pas à être touché. Bien sûr je pouvais me prendre d'affection pour une personne de son âge, d'autant plus qu'il faisait partie de l'Ordre, mais j'avais davantage envie de le protéger que de me confier à lui.
Comme simple réponse, je me contentais de hausser les épaules. On n'y pouvait rien, personne n'y pouvait rien, et malgré ça, je me laissais quand même dépérir, c'était plus fort que moi. C'était comme si j'avais perdu une partie de moi, un bout de mon cœur, et il m'était impossible d'oublier ça et d'en faire fi. La douleur était bien trop intense. Je savais que je devais plutôt combattre et faire face au lieu de me laisser envahir par le désarroi, mais je n'y arrivais tout simplement pas. Peut-être que… ne plus pleurer, faire mon deuil, c'était l'oublier, dans un sens. C'était hors de question.
Un frisson glacial, qui contrastait effroyablement avec la température de la saison, me fit tressaillir. Même si mon regard était obstinément dirigé en direction des fleurs en face de nous et que je m'étais perdue dans mes pensées et mes souvenirs, je n'avais pas perdu les paroles d'Eirian. Laissant un silence s'installer entre nous un temps, je me concentrais sur le chant des oiseaux qui vivaient dans le parc. Mélodies qui s'étaient enroulées autour des mots de l'élève de Serdaigle, puisqu’à mes yeux, il était un peu comme eux, un oiseau.

- Aïko est un excellent libraire et il arrive à trouver des livres extrêmement rares. C'est un endroit très riche. Je suis très contente si tout se passe bien pour vous. Je marquais une pause avant d'oser demander. Vous réussissez à vous épanouir ?

Car épanoui, il ne le semblait guère, un peu comme moi en ce moment en réalité. Par ailleurs, la froide secousse que j'avais ressentie un peu plus tôt contrastait étonnamment avec son point de vue concernant la saison. En pleine réflexion, je laissais tomber ma guitare pour la reprendre convenablement, et, sans même y réfléchir, je laissais mes doigts gratter les cordes pour laisser échapper des notes tranquilles, uniformité mélodieuse et douce qui rejoignait les piaillements des créatures ailées du parc.
Encore un instant, je me permettais de rassembler mes idées avant de répondre, ma voix contrastant avec les chants.

- Le printemps est très vif et complexe à cerner, car il s'exprime de tant de manières qu'il est difficile de tout voir, de tout sentir et de tout ressentir. Ce sont des explosions qui peuvent saturer les sens… la plupart du temps c'est avec délice, mais l'été peut apporter son lot de repos. Cela dit, vous n'avez pas tort… je cessais de jouer de mon instrument avant de continuer. Le soleil peut être lourd et écrasant et cela peut paraître… épuisant et dur, oui. Mais je ne la trouve pas en manque de nuance. Je glissais mon pouce pour faire vibrer à nouveau chacune des notes les unes après les autres pour laisser entendre les accords. C'est juste que… après le printemps, ça nous semble plus… fade. Là, je jetais un œil au sorcier avant de lui faire un petit signe du menton pour l'encourager à regarder les fleurs en face de nous. Elles étaient pleines d'éclats, bien ouvertes, tirées vers le haut comme si elles voulaient perdre racine et s'envoler. En lieu et place, elles laissaient leur pollen s'en aller et voguer à leurs places. Nuances merveilleuses de jaune, d'orange, de rouge, de rose. Il y avait aussi les couleurs moins chaudes, vert, violet, bleu… toutes mises ensemble, elles ressemblaient à un petit arc-en-ciel tangible. Quoiqu'il en soit, je la préfère à l'hiver. L'hiver… est très mordant. Puis, je me permettais de sourire en laissant échapper un petit gloussement sous forme de soupir exprimé par le nez. Mais passer du temps sous un plaid, devant un feu de cheminée et un bon thé, ça n'a pas de prix.


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Lun 1 Mar - 9:01
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Abigail accepte tes excuses d’un sourire, elle n’a pas l’air plus dérangée que cela – ou trop polie pour te le faire remarquer. Tu ne cherches pas plus loin. C’est rare que tu aies l’occasion de croiser des connaissances pendant l’été – cela le sera peut-être un peu moins cette année, comme tu as rejoint l’Ordre et que les missions et la guerre ne s’interrompent pas pendant les vacances. En général, tu t’efforces de faire profil bas pour ne pas attirer de questions. Mais pour l’heure, ta présence en ces lieux n’a rien de réellement surprenant, ton lieu de travail n’est pas si loin et rien ne trahit ta situation. Et, comme toi, Abigail est plutôt du genre calme. Pas de sollicitation trop intense, pas de conversation à bâton rompu. Si tu apprécies de temps à autres ces conversations, comme avec Kayla, à d’autres moments, tu préfères des interactions plus calmes. Comme aujourd’hui.
À son invitation muette, tu prends place à côté d’elle, trop crispé, presque recroquevillé. Tu ne devrais pas te tenir ainsi, il faudrait montrer plus d’assurance. Mais tu es… fatigué. Fatigué de faire semblant, fatigué de jouer la comédie, fatigué de porter des masques, fatigué de… tout. Alors, tant pis. Si elle t’interroge, tes excuses sont prêtes, le rythme du travail un peu difficile à trouver en ces premiers jours, une mauvaise nuit, comme cela peut arriver parfois. Tu éviteras de jouer sur les retrouvailles avec ta famille et tes écarts pour veiller tard, ce n’est pas le même genre de fatigue. Au pire, une mission un peu compliquée, la tension avec la guerre et ça passera sans mal. Comme toujours, la liste des mensonges s’égrène pour cacher la vérité, tout ce que tu ne peux pas dire. Même au sujet de quelque chose d’aussi anodin qu’un peu de fatigue. C’est devenu une seconde nature, un réflexe si profondément ancré que l’idée de dire la vérité ne te vient que dans un second temps, après réflexion, après t’être assuré que cela n’aurait pas de conséquences. Et ça aussi, c’est épuisant, cette vigilance constante, ces précautions qui font que tu n’es jamais toi-même. Il n’y a qu’avec Carl et Robin que tu laisses un peu tomber les masques, même si à eux aussi tu caches beaucoup de choses. Parfois, souvent, tu aimerais tout lâcher, arracher ces couches de dissimulation, arrêter de mentir, les yeux dans les yeux, aux personnes que tu apprécies, à tes amis qui ne méritent pas ça, redevenir un. Mais ce n’est qu’une illusion. Et tu n’es pas prêt à perdre tes quelques relations pour cela.

Toujours en alerte, un œil sur les promeneurs tranquilles qui ne vous prêtent pas attention, tu te concentres sur Abigail, qui n’a pas l’air en meilleure forme que toi. Elle ne s’épanche pas, ce n’est pas vraiment ton rôle de recueillir ses confidences, tu es encore un élève de Poudlard, elle t’a aussi un peu guidé à ton arrivée dans l’Ordre. Tu espères que les siens prennent soin d’elle, qu’elle est bien entourée, quoi qu’elle traverse. Et ce sont ces mots qui viennent compléter ta pauvre expression d’empathie.

— J’espère que vous n’êtes pas seule pour affronter cela.


Mots teintés de ta propre expérience, de cette solitude que tu apprécies, mais qui devient parfois insupportable. Tu es le seul responsable des murs dont tu t’entoures, de tous ces remparts dont tu t’assures que personne ne pourra voir au-delà. Que ce soit nécessaire, vital ne rend pas la chose plus aisée. Autrefois, c’était à ta mère que tu te confiais, la seule qui savait tout ; à l’époque, cela t’allait de ne pas vraiment avoir d’amis, tu t’en accommodais, puisqu’elle était là. Ton ancre. Maintenant… tu ne peux pas défaire des années de mensonge. Tu ne peux rien livrer de ce qui te ronge. Même à Carl ou à ton cousin. Ce ne serait pas juste pour eux de leur infliger ça en plus de ce qu’ils ont déjà à affronter.

Un bref silence s’installe, guère gênant. Le parc bruisse et vit autour de vous, tu as toujours aimé te retrouver dans la nature, tu t’y sens plus libre qu’ailleurs, moins écrasé. À Poudlard, tu profites au maximum du parc du château et des abords du lac ; ici, il y a plus de monde, mais tu savoures quand même le vent frais, les trilles des oiseaux, les parfums des fleurs… Impossible de faire abstraction des promeneurs, mais ils sont assez discrets pour ne pas gâcher l’atmosphère de Regent’s Park. Tu approuves ses paroles lorsqu’Abigail revient sur Aïko.

— Cela fait des années que je fréquente la librairie et je n’ai jamais été déçu par ce qu’il propose.

Bien sûr, tes recherches étaient plutôt classiques, tu n’as jamais eu l’occasion de lui demander quelque chose de plus rare, mais tu ne doutais pas qu’il y arrive – encore moins maintenant que tu découvres l’envers du décor. Tu te redresses en entendant sa question.

— Oui, c’est vraiment très intéressant et je m’y plais beaucoup ! Je ne souhaite pas devenir libraire, mais j’aime travailler avec les livres, chercher celui qui conviendra le mieux au client… Et sa librairie est très… paisible.


De fait, ce ne sont pas les magasins les plus animés en règle générale, et ça te convient parfaitement. Évidemment, il y a parfois quelques clients pénibles, mais par bonheur ils restent très minoritaires.
Les doigts d’Abigail jouent doucement sur les cordes tandis que vous discutez de la saison et de l’impression qu’elle te donne. Ses notes s’accordent bien avec les chants des oiseaux. D’ailleurs, l’un d’eux vient vous tourner autour. Tu rejoins son ressenti sur le printemps, sur cette explosion de couleurs et de sensations qui, malgré son exubérance, te paraît quand même plus douce que l’été. Plus pastel. Épuisant et dur, elle résume bien l’été. Quant aux nuances… Elle te désigne les fleurs multicolores qui s’étalent devant vous. L’été a toutes les couleurs, mais elles sont trop nettes, trop… dures, oui, ça reste le mot.

— C’est plus fade, oui, les nuances sont trop tranchées, moins subtiles. Tout est déjà figé en quelque sorte, il n’y a plus vraiment d’élan. Je comprends que cela puisse être reposant après l’explosion pastel du printemps, mais ça reste lourd.

Au fond, tout cela demeure une question de ressenti ; la plupart des gens aiment l’été et tu comprends pourquoi. Abigail fait la comparaison avec l’hiver. Tu souris, c’est sûr que ce n’est pas la même chose.

— Le plaid et la cheminée sont les meilleurs atouts de l’hiver. Mais je préfère quand même les entredeux, le printemps et l’automne, qui est plus apaisant et plus riche, tout change de nouveau, il garde les dernières traces du soleil sans que ce soit écrasant. Là où l’été est rouge sombre, l’automne est orangé…


Il est rare que tu le formules de cette façon, mais sa propre manière de parler des saisons et de les comprendre te rassure. Tu es quasi sûr qu’elle ne se moquera pas de toi – ce n’est pas son genre de toute façon, mais tu préfères rester prudent. Parler des saisons avec des couleurs qui ne correspondent pas à la réalité, en leur donnant des traits de caractère, attire plus souvent les plaisanteries qu’autre chose – de même pour les sortilèges, la plupart n’ont pas la couleur qu’ils devraient avoir et c’est toujours perturbant.

Un peu gêné malgré tout, tu désignes la guitare – après tout, c’est ce qui t’a amené là en premier lieu – dans une tentative guère subtile de dévier la conversation. L’oiseau de tout à l’heure s’est un peu éloigné pour picorer.

— Vous venez souvent jouer ici ? Les oiseaux ont l’air d’apprécier.



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On the run,
falling to the depths

Do you know what it's like when
You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
Do you know what it's like
To wanna surrender ?
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Sam 6 Mar - 8:32
Dans le moment de calme que j'essayais d'obtenir en étant là assise dans le parc, je trouvais une certaine sérénité parce que j'avais de la facilité à me fondre dans le décor. C'était un art que j'avais su développer depuis mon plus jeune âge, je savais me rendre parfaitement invisible, ou simplement profiter de ce qui m'entourait, surtout lorsqu'il y avait de la nature. Ici, je me sentais presque à ma place. Presque, parce qu'il y avait beaucoup d'allées et venues d'autres personnes, ce qui pouvait nuire à mon apaisement. Voilà pourquoi je m'étais sensiblement crispée à la venue du garçon, pourtant, je ne lui en tenais pas rancune, car il revenait à moi de convenablement m'isoler si je voulais à ce point être tranquille. J'avais cette facilité à absorber ce qui faisait mon environnement, ici, le chant des oiseaux, l'odeur des fleurs, le bruissement des feuilles secouées par le vent chaud de l'été. J'arrivais à me fondre dans cet espace et à y trouver de quoi me détendre totalement malgré la présence des passants.
Ce calme profond me permettait néanmoins de saisir l'angoisse passablement visible chez Eirian. Comme s'il craignait que quelque chose surgisse soudainement. J'ajoutais à cela la fatigue que je percevais en lui, et voilà que mon accalmie fut davantage dérangée ce qui me fit sensiblement froncer les sourcils. Cela dit, je ne lui en tenais pas rancune, car si je pouvais incarner, ne serait-ce que l'espace d'une après-midi, un recueil dans lequel il pouvait se reposer, alors j'endosserais ce rôle sans la moindre hésitation. J'étais ainsi faite à vouloir sans cesse aider mon prochain même s'il n'appartenait pas à mon allégeance, comme c'était le cas avec William Ombrage avec qui j'entretenais des relations très étroites. Ainsi, j'avais d'autant plus envie de venir en aide à l'étudiant de Serdaigle qu'il était dans le même ordre que moi, celui du Phénix, et que même si je n'étais pas un membre éminent de cette faction (si je pouvais l'appeler ainsi), je voulais que les autres affiliés puissent être dans leurs meilleurs états d'esprit possible.
Je crois que ce qui m'amusait le plus dans cette situation, c'était qu'il semblait penser la même chose, puisqu'il en venait à être attentif à mes besoins en ces temps difficiles. Presque attendrie alors, je souriais tendresse non sans un voile de regret dans le regard.

- La douleur est partagée avec ma famille.

Nul besoin de lui expliquer les raisons dans les détails, ce que je venais de dire là devait sans doute suffire. Il y avait peu d'événements qui mettaient toute une famille dans une situation de tristesse profonde et je savais mon interlocuteur intelligent. Il aurait peut-être même pu percevoir quelques faiblesses aux côtés d'Aïko qui, même s'il était moins touché que moi, subissait malgré lui la situation.
Cela dit, même si je n'étais pas seule à ressentir cette grande douleur (je pensais surtout à ma mère), j'étais bien seule pour ce qui était d'y faire face. Parce que je n'avais ni le courage ni la force de la confronter avec les miens. Avec personne même. Car faire mon deuil, c'était, dans un sens, faire mes adieux définitifs, et ça, je n'arrivais pas à m'y résoudre. Ce qu'il restait de mon frère, je ne voulais pas le perdre…

Œillade en coin même si je pinçais les cordes de mon instrument (je le faisais sans réfléchir), je continuais à être attentive à l'état de santé du garçon, ce qui ne cessait de m'alarmer quelque peu. Certes j'étais peut-être en train de m'imaginer des choses, le tout accentué par mes propres émotions de la journée, mais j'étais aussi une personne se voulant avenante et inquiète de nature. Alors, lorsqu'il vint à me parler de mon cousin, je souriais tranquillement, le regard adouci par la description qu'il en faisait. Je le reconnaissais bien là, ce cousin japonais. De plus, enfin, maintenant qu'il me parlait de la librairie, il me semblait réussir à percevoir comme une pointe de soulagement. Il ne faisait aucun doute qu'il appréciait profondément cet endroit.

- Aïko n'a pas vraiment hérité du don que je dispose avec les animaux. J'omettais volontairement de préciser quel type d'animal du fait que nous étions installés dans un lieu moldu. En revanche, il a un talent certain pour tout ce qui touche la littérature. Je le vois un peu comme ces chercheurs d'or, qui arrivent à dénicher des trésors malgré tout, à peu près n'importe où. Je dois dire que je suis à chaque fois étonnée. Cessant la mélodie de ma guitare, je me permettais un instant de fermer les yeux tout en inspirant calmement avant de reprendre en rouvrant les yeux. Les bibliothèques et les librairies ont une atmosphère bien particulière je trouve… comme… s'il s'agissait de sanctuaire. Je ressens un peu la même chose lorsque je me rends dans un lieu sacré, comme une église par exemple. Là, je tournais franchement la tête en direction d'Eirian, non pas pour le regarder dans les yeux, mais pour le fixer dans son ensemble, comme si je réussissais à percevoir son âme. Vos paroles me touchent, je suis vraiment heureuse pour vous que vous vous sentiez si bien là-bas, je comprends que vous aimez à ce point cet endroit. Je marquais un temps de pause en clignant des paupières puis en rajoutant, l'air de rien. J'espère que, comme moi, cela vous aide, pour que vous ne soyez pas seul pour vivre ce que vous avez à vivre.

J'essayais de choisir les mots justes afin de ne pas le froisser. Je ne voulais pas paraitre indiscrète ou trop m'avancer sur la manière dont il paraissait et se tenait. Bien que maladroitement, je venais d'essayer de lui signifier que, quoiqu'il se passe, je l'avais remarqué et que, s'il en avait besoin, il n'était pas seul. Il y avait Aïko, et il y avait moi à présent.
Non pas que je veuille le couver comme un petit poussin (même s'il m'évoquait cet animal), mais, prendre une main tendue permettait, souvent, de traverser les obstacles que nous ne parvenons pas à franchir seul.

Pour signifier que je n'insistais pas sur la confidence, je détournais à nouveau le regard pour reprendre une mélodie tranquille, accompagnant les chants des oiseaux et l'ambiance environnante du parc, nous enfermant ainsi tous les deux dans ces bulles de tranquillité que j'adorais tant. Comme s'il n'était plus possible de nous atteindre, ce qui était faux bien évidemment.
Attention portée sur les fleurs devant nous, j'écoutais avec une attention toute particulière le jeune homme me parler des saisons et de ses ressentis. Je les respectais bien sûr, et plus encore, je comprenais parfaitement ce qu'il était en train de me dire. La comparaison avec les couleurs ne me choquait absolument pas puisque j'avais eu, dans mon enfance, un ami dit synesthèse. J'avais appris les notions de sensibilité relationnelle entre les couleurs, les chiffres et voire encore par exemple, la musique. Ainsi, loin de moi l'idée de venir à me moquer d'Eirian, d'autant plus que ce comportement était extrêmement rare chez moi, voire inexistant. Je préférais comprendre et discuter plutôt que de juger ou moquer. La différence des autres faisait souvent leurs forces, et je n'étais pas dupe : je faisais partie de ces autres.

- Il est vrai que de manière générale les entre saisons sont plus apprêtées pour la poésie. Là où le printemps est une véritable explosion après le silence menaçant et froid de l'hiver, l'automne est un peu cette annonce légère que l'été fut… lourd. Je reprenais volontairement les propos de mon interlocuteur avant de reprendre. Je crois que ce que je préfère dans toutes les saisons, ce sont les nouvelles promesses et les projets que nous pouvons en faire. Le printemps se marie parfaitement bien avec la botanique, cultiver son jardin est un véritable accomplissement. Il est aussi l'instant de l'amour voire des naissances. L'été promet de nous accompagner de sa chaleur, il enveloppe et peut aussi bien rassurer qu'être angoissant, mais après l'avoir apprivoiser, il est un compagnon de tous les jours formidables. Jusqu'à ce qu'il cède sa place à l'automne qui enivre de ces diverses odeurs de feuilles et de sève, tout cela est presque sucré, le tout ajouté aux couleurs extraordinaires des arbres. C'est un ballet dont je ne me lasse jamais. Là, je fis retentir la note de la corde la plus grave de ma guitare en prenant un air quelque peu contrarié, nez retroussé. La seule qui me pose encore de véritables problèmes, c'est l'hiver…. Il n'y a rien à faire, je n'y arrive pas. Même si je reconnais sa beauté, je ne peux m'empêcher de me rappeler qu'elle est fatale.

Je marquais un temps de silence tout en penchant légèrement la tête sur le côté. L'hiver, c'était la saison des virus qui circulaient en libre passage. Évidemment, avec ma santé fragile, ils appréciaient tous venir loger chez moi durant de longues semaines. Il me fallait ensuite l'année entière pour m'en débarrasser ou presque et quand enfin je me sentais bien, l'hiver était à nouveau de retour. C'était un cycle sans fin qui m'épuisait franchement, mais pourtant je n'en montrais rien, parce que je ne voulais pas être la victime de ma maladie et des faiblesses de ma naissance.
Je faisais avec tout simplement.
La question de l'élève de Serdaigle me fit sortir de mes pensées, et j'en vins à rire sensiblement. Non pas que je me moquais, mais son compliment un peu dissimulé me touchait.

- Non ce serait mentir, je ne viens que rarement. Je suis plus à l'aise dans des lieux plus… Je regardais des passants marcher non loin. Intime. Mais, sans vouloir me vanter, je reste sensible à la nature et aux animaux, alors j'arrive facilement à… m'accorder avec eux, sans mauvais jeu de mots. La musique, vous savez, c'est une autre sorte de langage. Il est possible de parler en musique, avec les notes, les intonations, et même en cryptant les partitions. C'est juste… subtil.

Remuant les épaules comme si tout ceci semblait facile, j'avais conscience qu'il n'en était rien. Il fallait maitriser le langage de base de la musique pour la comprendre véritablement. C'était l'apprentissage de toute une vie. Un apprentissage parmi tant d'autres.


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Lun 8 Mar - 18:50
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Tu ne sais pas bien ce qui te pousse à prendre place auprès d’Abigail, plutôt que de poursuivre ta balade après l’avoir saluée. Il y a quelques minutes encore, tu étais plutôt soulagé de te retrouver seul, de ne plus avoir besoin de faire semblant face à Aiko et Ielena, de laisser tomber les apparences pour la soirée. La solitude te convient bien en général, ce sont les rares moments où tu peux relâcher un peu de la tension qui t’habite, à décrisper tes muscles noués, même si évidemment ton hypervigilance ne se met jamais en veille. Mais bien que l’isolement t’évite de supporter l’attention et les regards des autres, celui-ci est aussi lourd à endurer. Parce que ce n’est pas chez toi que tu rentres, tu ne retrouves pas un lieu familier, accueillant, cette sensation intime, chaleureuse du foyer, d’un endroit où tu es protégé. Non. Juste des squats froids, inconnus, jamais trop souvent les mêmes, jamais totalement sûrs. Au moins la magie t’aide-t-elle à rendre les lieux plus agréables. Mais en tête-à-tête avec toi-même, les heures sont longues le soir, avant d’aller dormir, longues aussi celles qui précèdent l’aube une fois que les cauchemars t’ont réveillé et que le sommeil ne te prend plus, tu connais par cœur ou presque les manuels de l’année précédente et les quelques livres que tu n’as pas eu le cœur de revendre. L’avantage de travailler à la librairie, c’est que vous pouvez emprunter certains ouvrages pour les lire sur votre temps personnel et mieux conseiller les clients, mais tu redoutes de les abîmer. Calés avec soin, les tiens restent en bon état, mais on ne sait jamais.
Alors, finalement, un peu de compagnie avant de repartir, ce n’est peut-être pas si mal, comme un moyen illusoire de repousser l’échéance. Ce ne sera pas la même tension qu’à la librairie. Pour autant, tu ne peux t’empêcher de scruter les alentours. Assis sur un banc au milieu d’une allée, tu te sens exposé. La plupart des promeneurs ne vous prêtent évidemment aucune attention, mais tu redoutes toujours la rencontre surprise avec un membre du Blood Circle capable de te reconnaître. C’est l’été, eux aussi doivent profiter des espaces verts de la capitale. Heureusement, la taille du parc rend peu probable une rencontre fortuite. Tu espères ne pas mettre Abigail en danger par ta présence, qu’on ne l’identifie pas comme sorcière parce que vous êtes ensemble. Malgré toi, presque inconsciemment, parce que tu ne sais pas faire autre chose que survivre, tu restes prêt à bouger au moindre signe de danger.

Tout en gardant une part d’attention sur votre environnement, tu t’inquiètes d’Abigail, qui ne te paraît pas en meilleure forme que toi. Elle ne se livre pas vraiment, mais tu comprends lorsqu’elle t’apprend que sa douleur est partagée avec sa famille, lorsque tu vois l’ombre dans son regard. Un deuil, sans doute, si cela touche également ses proches. Ce qui explique peut-être aussi certaines attitudes d’Aiko, que tu n’as pas vraiment comprises. Tu hoches la tête, lui retourne un sourire que tu veux encourageant, sans oser aller plus loin. Au moins n’est-elle pas seule, c’est déjà l’essentiel.

Tu sens son attention sur toi tandis que quelques accords s’échappent de sa guitare. Tu ne renvoies pas ce qu’il faudrait, mais tant qu’elle ne t’en parle pas… tu peux faire comme si tout était parfaitement normal. La discussion glisse sur le terrain de la librairie, où tu te sens plus à l’aise. Tu apprécies réellement ton travail, même si tu prends encore tes marques, et Aiko fait tout pour vous faciliter les choses et vous mettre à l’aise. Abigail souligne son talent pour trouver la perle rare parmi les grimoires, tu n’as pas encore eu beaucoup l’occasion de le voir à l’œuvre, mais sa passion ne laisse aucun doute. De nouveau, tu approuves de la tête, les mots te fuient un peu.
Sa comparaison avec les lieux sacrés te parle beaucoup.

— Je ressens la même chose. Ce sont des lieux où on est en paix, loin du fracas du monde, où on peut… se ressourcer.

La bibliothèque de Poudlard est un refuge depuis longtemps ; en digne Serdaigle, tu te perds sans mal parmi les immenses étagères, toujours à l’affût d’un nouveau grimoire. Mais tu en savoures aussi le silence, le calme, comme un repli loin du monde, le temps de reprendre ton souffle avant de plonger de nouveau. Là-bas, tu ne te sens pas agressé en permanence, et c’est un peu pareil à la librairie. Quant aux églises… tu y allais, enfant, pour les grandes fêtes, plus par tradition qu’autre chose, mais tu appréciais aussi cette solennité, cette atmosphère particulière qui s’en dégageait même si tu ne la comprenais pas réellement. Maintenant, sans les éviter, tu ne t’y rends guère ; à tes yeux, elles restent le domaine de Robert Terry.
Abigail t’observe et tu prends sur toi pour ne pas broncher. Oui, tu te sens vraiment bien là-bas, et c’est sincère. En revanche, la suite te plaît moins. Pour que tu ne sois pas seul… Sa phrase te touche plus que tu ne l’aurais pensé, parce qu’elle te rappelle à quel point tu l’es, que tu n’as pas de famille vers qui te tourner. Tu l’es beaucoup trop, et par ta propre faute, incapable d’abaisser tes défenses. Incapable d’affronter les réactions de tes amis s’ils savaient la vérité. Incapable d’accepter l’idée de les perdre et de te retrouver encore plus seul. Tu n’es pas certain de tenir sans eux, et tu t’en veux, parce que retrouver ta mère devrait être une motivation suffisante pour tenir debout et que ce n’est pas complètement le cas.
Tu ne sais pas ce qu’elle lit en toi. Pas trop, tu l’espères. Tu ne peux pas la laisser approcher. Tu te redresses, raffermis ta position, te forces à te détendre, à lui sourire, à balayer sa remarque d’un geste désinvolte de la main. Incapable aussi de saisir les mains qu’on te tend.

— Oh, ne vous en faites pas, tout va bien pour moi. Je suis bien entouré… et je ne traverse pas pire que la plupart des gens en ce moment.

Le stress du conflit, mais rien d’autre. Tu as déjà bien assez semé de bouts de toi ces dernières semaines. À Garnet, tu as dit l’essentiel de la vérité, il ne lui manque que ton véritable nom de famille pour faire les derniers liens, comprendre ce que tu impliques par « fuir le Blood Circle ». À Raphaël et Nymphéa, tu as parlé de ta capture en octobre dernier, en omettant évidemment les détails sur ton identité, mais aussi et surtout de l’agression par le Mangemort, du doloris, de ce qu’il voulait t’infliger parce que tu es né-moldu. Et à Aidan, tu as laissé entendre que le cercle détenait un membre de tes proches. Trop d’éléments échappés, trop de pièces de puzzle éparpillées, qui mettent en péril tes mensonges sur ta famille. Tu ne peux pas en laisser échapper d’autres. Ni montrer à quel point tu es tordu, fissuré, fracturé, à quel point les failles s’étendent, se répandent, te fragilisent. Le mécanisme s’enraye et tu ne sais pas comment arrêter cette course, il n’en faudrait pas beaucoup plus pour qu’elles se rejoignent et ne fassent qu’une, trou béant qui te fera voler en éclats. Et pour lui dire quoi ? Elle porte un deuil, tu ne vas pas répondre avec tes angoisses pathétiques et tes atermoiements ridicules. Une seconde, ton regard tombe sur ta manche, sur les marques brunes qui restent visibles, et en faisant mine d’ajuster ta position, tu les dissimules mieux.

— Merci de vous en inquiéter, c’est gentil.

La conversation dérive vers les saisons et tu essaies de décrire au mieux la façon dont tu les ressens, allant jusqu’à risquer les comparaisons avec les couleurs qui peuplent ta vie. Dire qu’au départ, tu as cru que c’était une caractéristique des sorciers, qu’eux aussi voyaient les lettres et les chiffres en couleur, que chaque signe avait son petit caractère, que pour eux aussi, les émotions et certains éléments comme les saisons avaient des couleurs, de même pour les sortilèges et leurs éclats parfois paradoxaux. Mais non, pour eux, tout est noir ou sans teinte particulière, et ils ne comprennent pas qu’un Protego par exemple est bleu mêlé d’or, pas seulement doré. L’idée de lire un texte entièrement noir te met mal à l’aise.

Ton regard court sur les parterres de fleur. Cela fait longtemps que tu n’as pas pris le temps de réellement les observer, de te poser simplement. En balade, tu restes en mouvement, toujours attentif à ce qui se passe autour de toi. Évidemment, tu vois les arbres et les fleurs, tu te sens bien parmi eux, mais jamais tu ne t’arrêtes pour de bon, jamais tu ne savoures simplement le fait d’être là, présent, vivant, entièrement dans l’instant. Le parc de Poudlard est plus sûr, mais il offre moins de couleurs, entre le climat écossais, le lac noir et la Forêt interdite. Tu aimes aussi ses escarpements, son côté sauvage. Tu te sens étranger au milieu de la quiétude du parc, comme une ombre qui viendrait obscurcir les alentours. Même ça, tu ne sais plus comment faire, les nerfs trop tendus, trop aiguisés. Le paysage passe à l’arrière-plan, tu donnes la priorité aux promeneurs, aux mouvements. Qu’est-ce que tu deviens ? Mais est-ce que tu as le choix d’agir autrement ?
Abigail t’écoute sans jugement ni moquerie, développe à son tour son avis sur la ronde des saisons. Oui, leur harmonie générale nuance leurs teintes particulières. C’est rare de croiser quelqu’un qui prête tant d’attention aux ressentis autour des saisons, tu as plus l’habitude du « trop froid, trop chaud » des gens qui se plaignent – tu ne leur jetteras pas la pierre, ça t’arrive aussi de râler.

— C’est vrai, elles fonctionnent ensemble, elles se nuancent et s’harmonisent les unes avec les autres pour former un tout. Et qu’on les aime ou pas, elles sont toutes très riches. Elles font beaucoup de promesses, mais elles ne les tiennent pas toutes…

Rien à faire, l’été reste ta bête noire.

— J’aime les contrastes de l’hiver, sa beauté et son intransigeance, le froid qui tue mais rapproche aussi en nous rassemblant devant les cheminées… L’hiver est plus franc que l’été dans ses menaces, même si ça reste des saisons dures.

Et il a ses moments de réconfort. Lire au coin du feu tandis que la neige tombe reste pour toi une image du bonheur.
Ta remarque sur la guitare la fait rire, pas de façon moqueuse, et tu souris.

— Je comprends pour les lieux plus discrets, je préfère aussi. Mais ça reste agréable de pouvoir profiter de la nature en pleine ville. Par contre, j’ai du mal à m’accorder avec la nature.

Un petit rire t’échappe, comme si tu te moquais de toi-même.

— Je dois être un peu trop fermé et je n’ai pas d’intermédiaire comme la musique. Je n’en écoute pas beaucoup, mais c’est incroyable la puissance et les émotions que peuvent transmettre quelques notes… C’est plus vrai, plus intime et plus profond que la plupart des mots. Je ne peux qu’imaginer le temps qu’il faut pour en maîtriser les subtilités et arriver à créer cet accord.



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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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Jeu 11 Mar - 15:53
Ce partage avec le jeune homme était particulièrement enrichissant pour moi, et pas uniquement à cause de nos goûts en communs pour les saisons d'hiver, la solitude ou encore l'odeur des livres neufs. En réalité, ce que j'appréciais présentement, c'était nos différences visibles, mises parfaitement en avant, sans aucun jugement de la part de l'autre, à l'écoute, accueillant avis et argumentation sans jamais se froisser.
Cette rencontre est d'une douceur hors norme dont mon cœur avait cruellement besoin, je devais bien le reconnaître.
Toutefois, il y avait toujours ce truc… ce je ne sais quoi qui m'empêchait de totalement m'épanouir dans notre conversation. Sa nervosité était en train de réveiller la mienne, et même lorsqu'il se redressait pour regagner contenance, je n'arrivais pas à me persuader que tout allait bien pour lui. Ce n'était pas mes affaires, et je ne souhaitais pas particulièrement qu'il se confie à moi, car je n'étais pas une sorcière qui forçait quoique ce soit. Quelle magizoologiste et dragonologue serai-je en usant de la méthode forte ? Pour en être actuellement très entourée, je savais qu'il ne fallait forcer aucun oiseau à venir manger dans sa main. La confiance se gagnait lentement, petit à petit, et j'étais loin d'avoir celle d'Eirian, comme lui était loin d'avoir la mienne. Ce n'était qu'une question de temps, de bonne volonté de chacun, et surtout d'envie.

Mais l'envie d'aider, elle, était belle et bien présente en moi. Voyant bien que ce n'était pas une personne épanouie, voyant bien qu'il esquivait avec une habilité hors du commun les mains que je lui tendais, je décidais alors de ne pas insister, tout le moins, pas de cette manière. Autant changer de stratégie, car ainsi était fait mon métier. Chaque individu animal était constitué différemment. Pour chaque individu, je me devais de trouver de nouvelles manières d'aborder, d'observer, de me cacher sous le vent ou des regards. À chaque individu je me devais de réinventer tout ce que j'avais appris, de tout remettre en question, voire des fois, de tout oublier pour trouver de nouvelles solutions.
Non pas que je vois Eirian comme un animal, bien que j'ai un avis extrêmement acerbe sur le genre humain. L'espère humaine était celle dont j'avais le plus honte de par ses agissements, et donc celle que j'abhorrais le plus. Davantage un esprit de la nature, devenir animagus avais été pour moi une évidence, celle d'échapper à ce que j'étais vraiment : un être humain.
Alors, le Serdaigle, en finalité, je le voyais comme cet oisillon qui avait besoin d'aide, qui essayait de voler alors que ses ailes étaient encore trop petites et trop atrophiées.

Le garçon me remerciait de l'inquiétude que je lui portais, et je le voyais remuer sur place comme si je venais de toucher juste. Bien sûr, rien ne m'indiquait véritablement que j'avais raison, et si ça se trouvait, j'étais totalement à côté de la plaque, et qu’en fait, Eirian avait tout simplement mal au ventre, pris d'une effroyable gastro-entérite, et si telle était le cas, je savais que demain, je serais malade à mon tour. Youpi.
Réalisant que je m'égarais, je levais les yeux au ciel comme si je me faisais ma propre morale avant de sourire tranquillement au jeune homme. Là, ma joue vint s'appuyer contre le manche de ma guitare que j'avais à nouveau redressée à la verticale. Prunelles tranquillement posées sur le sorcier, j'écartais volontairement le sujet sensible pour en trouver un autre, plus à même de le mettre à l'aise en ma compagnie.

- Avez-vous déjà visité la bibliothèque de l'abbaye d'Admont, en Autriche ?

Lorsque j'avais vécu en Hongrie pour étudier les Magyars à Pointes, j'avais tout de même pris le temps de faire quelques visites. Un week-end, je m'étais décidée à quitter la Hongrie pour aller dans ce pays voisin qu'était l'Autriche. Bien que peu férue des lieux sacrés moldus, comme les églises ou autres monastères, j'appréciais m'y rendre et les visiter pour assouvir une certaine curiosité touristique. L'abbaye d'Admont m'avait particulièrement séduite, positionnée à côté de son cours d'eau, entourée des montagnes typiques de cette région. Les murs blancs rendaient le lieu incroyablement solennel, et les peintures et sculptures à l'intérieur m'avaient toutes fait trembler, aussi bien de joie que d'effroi. Je n'avais hélas que peu voyagé dans ma vie, tout le moins, pas autant que je le souhaitais, mais ce lieu-ci fut l'un des plus marquants, sans nul doute.
Un peu rêveuse de ce souvenir si prenant qui me remuait les tripes, je me raclais doucement la gorge avant de m'éclaircir la voix.

- Il existe tant de variété de bibliothèques ou de librairies… nous, nous connaissons la méthode humaine… mais il y en a d'autres, sans aucun doute. Et bien oui je m'étais déjà souvent fait la réflexion, la plupart du temps avec Aïko naturellement. Admettons que les êtres de l'eau, doués d'intelligences comme nous, aient aussi leurs propres sanctuaires ? Possibilité bien peu accessible pour le commun des mortels, ceux aux esprits trop étroits pour comprendre, j'osais néanmoins partager cette extravagance de mon imagination au jeune homme, dans l'espoir qu'il ne trouve pas cette idée trop saugrenue. Un peu naïvement, je lui posais alors la question, certaine alors qu'il ne viendrait pas à se moquer de moi. Ne seriez-vous pas curieux de les connaître et de les voir ?

J'aimais l'eau, j'aimais nager, et j'entretenais d'assez bonnes relations avec les êtres de l'eau qui vivaient autour de mon île. Il était toujours plus agréable de bien s'entendre avec son voisinage. Toutefois, je n'avais jamais été entraînée jusqu'à leurs habitations, et je n'avais jamais eu la prétention de croire que j'étais digne qu'ils me les montrent. Peut-être qu'un jour cela arriverait, qui sait ?
Avec un sourire presque ironique, je reprenais la parole tandis que le jeune sorcier me faisait part de son appréciation de l'hiver.

- Là où je vis, il neige rarement, environ deux semaines par an. J'avoue que cela me convient très bien, les températures ne sont jamais très basses ou très hautes non plus. Disons que… ce qui est le plus dérangeant, c'est la pluie et le vent, mais… on s'habitue. Là-bas, il n'y a pas vraiment de saisons. Je vivais dans ces lieux rares où le défilement du temps semblait figé sur les falaises, puis avalé par les vagues, telle Andromède enchaînée et offerte en sacrifice.
Enfin, je lâchais comme un soupir las, avant de ranger ma guitare dans son étui et de garder celui-ci proche de mes pieds ensuite, lanière entre les doigts. Sans jamais perdre patience, je partageais une nouvelle fois mon avis à mon interlocuteur, les yeux levés vers le bleu du ciel.

- Me concernant, je trouve que la nature n'a rien à faire en pleine ville. Bien sûr il y a besoin d'un certain écosystème, mais les parcs comme celui-ci, aussi beaux soient-ils, ne sont pour moi que de la poudre aux yeux et une grande farce. Cela permet aux gérants des villes et aux politiciens de bien se faire voir en prétendant qu'ils ont une cité "verte". Je levais mes doigts pour imiter les guillemets. Cela permet également aux touristes de se faire un avis positif sur les lieux et de recommander d'y voyager, et cela donne l'impression aux habitants qu'ils sont proches de la nature alors qu'ils en sont complètement coupés en réalité. Je baissais le regard pour observer à présent tout à fait les passants, les désignant à chaque fois discrètement du menton. Elle, par exemple, a le nez dans son téléphone, toute absorbée elle ne réalise même pas la beauté qui l'entoure. Lui, les écouteurs dans les oreilles, il ne s'enchante pas des chants des oiseaux. Et lui là-bas qui fume et jette ses mégots par terre, je n'ai même pas envie de parler de lui. Bien sûr, je faisais des généralités et j'en avais conscience. Il y avait aussi cette maman non loin de nous qui laissait son enfant courir pieds nus et tomber dans la terre. Lui, profitait pleinement des biens faits de la nature. Tout cela attire certaines espèces, elles n'ont plus de prédateurs naturels, donc elles abondent... et que fait l'Humain ? Il les tue, soit disant pour son bien-être, pour éviter la surpopulation... Non vraiment, Mère Nature n'a rien à faire en ces lieux...

Revenant sur Eirian, je reprenais.

- Alors, je doute que vous soyez trop fermé à ce qui vous entoure, ou trop fermé aux intermédiaires comme la musique. Ce sont simplement de nouveaux langages, de nouvelles manières de voir tout ce qui est autour de nous et de… je fronçais les sourcils, comme si ce que j'allais dire était complètement absurde. Et de réaliser que nous en faisons pleinement partie, qu'on le veuille ou non. Je me permettais un temps de réflexion avant de reprendre. Vous savez, il y a des musiciens qui ne saisissent jamais vraiment les subtilités des mélodies et des notes. Une vie ne suffit pas toujours.

Par ces mots, je ne prétendais pas moi y arriver, au contraire, je m'incluais dedans. Tout ce que j'appréciais dans la musique, c'était de chanter ce que mon cœur hurlait. Exutoire puissant, je réussissais à me confier à la musique, puisque je n'arrivais pas à me confier à ceux qui me ressemblaient, à ces humains si proches de moi, mais aussi si lointains.
Iris sombres suivant la marche distraite d'un vieil homme passant devant nous, je les glissais ensuite à nouveau sur Eirian pour essayer de faire tomber l'un des nombreux murs qui nous distanciaient alors que nous étions assis l'un à côté de l'autre.

- Souhaitez-vous vous rendre dans un endroit similaire, mais avec moins de passants ? Je me taisais une fraction de seconde avant de sourire, voire rire timidement, avant de corriger. Beaucoup moins de passants.

C'était une offre à prendre ou à laisser, je lui offrais l'une de ces églises dont nous avions évoqués plus tôt, l'un de ces sanctuaires. Mon sanctuaire.


Never Ending Circles
ANAPHORE


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Sam 13 Mar - 21:25
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Tu as toujours été différent – ou du moins, tu le ressens comme tel. Parmi les moldus d’abord, après la découverte de tes pouvoirs, lorsque tu as cru que tu étais un monstre et que tu cauchemardais en craignant de faire du mal aux autres. Tu as passé des mois à lutter contre tes pouvoirs, contre cette force obscure que tu ressentais en toi, terrifié à l’idée de la libérer, avant que ta mère ne parvienne à te rassurer, que tu acceptes que tu n’étais pas une abomination. Mais la différence était là quand même, tu étais un sorcier en cavale, tu ne pouvais pas te lier aux autres, de crainte de les mettre en danger. Tu avais bien conscience qu’on voulait ta mort. Ensuite, Poudlard est devenu ton grand espoir, l’endroit où tu serais réellement à ta place, chez toi et en sécurité. Même si tu as adoré tout ce que tu as découvert, la désillusion s’est quand même frayé un chemin rapidement, lorsque tu t’es trouvé confronté à l’idéologie sang-pure. Ou lorsque tu t’es rendu compte que pour les sorciers aussi, les lettres n’avaient qu’une couleur, de même que les sortilèges. Et toi, tu ne connaissais rien de leur vie, de ce que ça signifiait être un sorcier, grandir dans un monde peuplé de créatures magiques… la bibliothèque t’a aidé à combler une bonne partie de ton retard, mais ça a été long et difficile. Mais il y a toujours cette drôle de sensation, ce petit nœud au creux du ventre qui fait que tu es incapable de savoir où est ta place, ni même si tu en as vraiment une. Tu risques ta vie chaque fois que tu mets les pieds dans le monde moldu et les sorciers te rejetteraient s’ils savaient qui était ta véritable famille. Sans parler des autres différences, d’orientation notamment, que tu as comprises et acceptées sans trop de mal, mais qui tracent toujours une mince ligne entre toi et les autres.

Alors, quand tu te retrouves avec quelqu’un à part d’une autre manière que la tienne, que vous vous écoutez sans jugement, en vous comprenant, comme si tout était normal, alors qu’une autre personne trouverait sans doute cela surréaliste, c’est… reposant, d’une certaine façon. Tu n’es pas sûr d’être encore capable de te sentir vraiment bien ni de te détendre, mais c’est au moins une bulle, un petit refuge, où tu peux t’arrêter, prendre ta respiration avant de replonger. Sans pour autant baisser ta garde, ni tes murailles. Même si tu le voulais, tu n’y arriverais pas. Là, sur ce banc, tu te sens exposé, une voix te souffle de bouger, de rester en mouvement, tu n’es pas à l’abri, mais tu t’efforces de la faire taire.
Tu essaies surtout de faire illusion devant Abigail, mais elle doit percevoir ta nervosité, et tu t’emploies à la rassurer, à affirmer que tout va bien, que tu vas bien, parce que tu ne peux laisser personne approcher, fouiller, creuser, comprendre que non, ça ne va pas. Tu es fatigué de toujours bâtir de nouveaux mensonges, de bricoler des explications, de baratiner sans fin. Alors, c’est plus simple que personne ne vienne assez près – une ligne de conduite qui s’est fracturée ces dernières années, parce que, sans ta mère, tu as été incapable de rester complètement seul. Des amis à qui tu mens deux fois plus et que tu refuses de perdre, un cercle vicieux qui devient infernal. Ici, face à Abigail, tu veux juste te poser un peu avant de repartir, et elle le comprend peut-être parce qu’elle n’insiste pas, et le soulagement t’envahit. Tu n’auras pas besoin de te battre.

Elle te sourit en appuyant sa joue contre le manche de la guitare redressée, comme si elle dansait un étrange ballet avec son instrument. L’abbaye d’Admont ? Tu n’en as jamais entendu parler.

— Non, je ne suis jamais allé en Autriche. Comment est-elle ?

En dehors du Royaume-Uni, tu n’as vécu qu’en France, lorsque vous vous cachiez du Blood Circle. Vous avez fait quelques visites, bien sûr, ta mère essayait de te donner la vie la plus normale possible – même si vous gardiez toujours un œil par-dessus votre épaule, même si tu avais toujours ton sac avec le minimum vital à portée de main, même si vous n’oubliiez jamais le danger, prêts à fuir en laissant tout derrière. Paris et ses monuments sublimes, sa cathédrale et les merveilles éparpillées aux quatre coins de la ville, Lyon aussi, le sud, les randonnées dans la nature, saoulés de beauté, ressourcés.
La bibliothèque évoquée par Abigail a l’air de la replonger dans ses souvenirs et tu ne l’interromps pas. D’autres types de librairies et de bibliothèques… oui, tu n’auras pas l’arrogance de croire que les humains sont les seuls à engranger les connaissances. Les sorciers se jugent tellement supérieurs aux autres peuples, sans s’intéresser vraiment à eux, sans essayer de les comprendre.

— Oui, ce serait orgueilleux de penser que nous sommes les seuls… Et la nature est déjà une sorte de bibliothèque pour ceux qui savent la lire. Je pense aux centaures qui tirent leurs connaissances des étoiles, qui savent les déchiffrer et les interpréter, ils ont des savoirs bien plus vastes que les nôtres en astronomie… Sans parler de leur connaissance des plantes. Et il doit en aller de même pour chaque peuple. J’aimerais les connaître, voir tout cela, mais…

Tu cherches comment formuler au mieux.

— Je ne suis pas sûr que nous le méritions, en fait. Les sorciers les méprisent depuis des décennies, c’est normal qu’ils veuillent préserver leurs savoirs. De quel droit pourrais-je leur demander d’accéder à des connaissances qu’ils ont accumulées pendant des siècles et des siècles, juste pour satisfaire ma curiosité ? Tout ne nous est pas dû. Cela demanderait une vie entière de compréhension et d’échanges.

Et tu sais que ce n’est pas ton chemin. En tant que magizoologiste, Abigail en est sans doute plus proche.

— C’est sans doute un peu brutal comme avis…

Du moins pour certains qui soit mépriseraient les savoirs des autres peuples, soit estimeraient qu’ils devraient y avoir accès en tant que sorcier pour valoriser tout cela. Comme si les autres avaient besoin d’eux.
La discussion glisse sur la météo. Tu aimes bien l’hiver malgré tout, regarder la neige tomber depuis la tour de Serdaigle, près de la cheminée, ce côté glaçant et apaisant à la fois. Elle évoque l’endroit où elle vit. La pluie… autant admirer un orage depuis l’intérieur, c’est bien, autant la petite bruine qui s’insinue partout, tu t’en passerais bien, sentiment hérité de tes étés passés dehors et la difficulté à te sécher lorsque tu n’étais pas encore majeur. Cela ajouté au vent… il y a de quoi finir gelé. Mais tu t’es bien habitué aux températures écossaises en fin de compte, comme souvent, c’est une question d’état d’esprit.

— C’est un bon équilibre comme températures. Entre la pluie et le vent, cela doit être assez sauvage comme endroit ?

Elle range sa guitare, signe qu’elle va y aller. Toi qui n’osais pas t’asseoir au début, tu en es presque déçu. Mais elle a d’autres choses à faire que discuter avec un étudiant rencontré par hasard.

Son avis sur la nature t’ébranle. Elle a raison bien sûr, ce n’est pas la véritable nature qui se déploie devant vous, celle-ci a été façonnée et agencée par l’homme, tout est calculé et mesuré, chaque parterre est dessiné pour offrir la plus belle vue, la meilleure harmonie. Même si on est très loin des squares rachitiques qu’on peut croiser au coin d’une rue, l’endroit reste artificiel, contrôlé et maîtrisé d’un bout à l’autre. Mais si c’est tout ce qu’il y a à portée de main, tu le préfères encore à rien. C’est un peu facile sans doute, tu pourrais transplaner hors de la capitale, essayer de trouver de vrais endroits intouchés, en Écosse peut-être, voire en Irlande,  cette terre si sensible à la magie. Ce qui impliquerait de réfléchir, de chercher le bon lieu, de s’organiser, arriver à profiter une fois sur place. En vérité, tu n’en as plus l’énergie.
Tu tritures les bretelles de ton sac d’un geste nerveux, machinal. Au fond, tu es un peu comme ces personnes qu’elle décrit, incapables de faire vraiment attention, de s’abandonner à l’espace autour d’elles, de regarder. Toi, tu te concentres sur les humains, profites de la tranquillité du parc, un peu des chants d’oiseaux et des fleurs, mais tu ne les savoures pas, c’est plutôt un arrière-plan agréable. Impossible de relâcher ta vigilance, cette hyper-attention permanente à ton environnement, cette quête perpétuelle et majoritairement vaine d’une menace – mais tu ne peux pas prendre le risque d’en rater une vraie.

— Malgré tout, cela permet quand même un contact avec la nature pour ceux qui ne peuvent pas vraiment s’éloigner de la capitale. Même si c’est minime, c’est déjà quelque chose, mieux que rien du tout. Après, bien sûr, c’est leur faute s’ils ne savent pas en profiter, s’ils n’arrivent pas à savourer seulement l’instant présent, au lieu d’être ailleurs dans leur tête, déjà projetés dans la suite de leur journée… C’est terrible de ne plus savoir s’arrêter, comment prendre le temps. De courir dans un monde qui va déjà trop vite, sans se permettre de ralentir.

Il y a une part de responsabilité de chacun, une part de facilité à céder au tourbillon du monde, à se laisser entraîner sans vraiment réfléchir. Il y a la plupart des gens, et puis il y a tous les cas particuliers, si difficiles à prendre en compte. Cela ne les dédouane pas de tout, évidemment, et c’est un équilibre sans doute impossible à trouver.

— On a oublié l’humilité, on croit qu’on peut tout maîtriser et contrôler, même la nature… Par rapport à ce dont on parlait tout à l’heure, ce n’est pas plus mal qu’on n’ait pas accès à tout, je doute de notre capacité à ne pas faire n’importe quoi de ces nouvelles connaissances.

Tu n’as pas vraiment l’occasion d’écouter de la musique, tu n’as pas assez de forfait sur ton téléphone. Mais tu te rappelles avoir été touché par l’émotion de certains morceaux qui te bouleversaient, qui exprimaient bien mieux que tu n’aurais pu le faire ce que tu avais dans le cœur. C’est peut-être un langage qu’il t’aurait plu d’apprendre ? Mais tu n’en aurais pas eu le temps, c’est mieux de laisser le soin aux autres de mettre en note des états d’âme universels.

— Quel que soit le langage, je crois que c’est toujours difficile d’en saisir toutes les subtilités, toutes les nuances, il y a toujours quelque chose à découvrir, à comprendre, à regarder sous un angle différent. Ça peut être frustrant de savoir qu’il y aura toujours quelque chose au-delà de nous, que la perfection n’existe pas vraiment… mais c’est rassurant aussi.

Sa proposition te prend au dépourvu. Aller ailleurs ? Tu avais compris qu’elle était sur le départ, mais tu n’aurais jamais imaginé qu’elle te proposerait de venir. Pour aller où ? Un endroit isolé, vraisemblablement. Sur l’instant, tu ne sais pas quoi dire, les yeux vrillés sur ton sac, les bretelles tordues entre tes doigts. Non que tu te méfies d’elle, mais… Tu te secoues intérieurement. Si tu commences à redouter tes propres alliés, tu n’es pas tiré d’affaires. Est-ce qu’elle apprécie réellement sa discussion avec toi ? À part supporter son contact en transplanant ensemble, qu’est-ce que tu crains à accepter ? L’alternative, c’est retrouver les rues de Londres, chercher un immeuble abandonné ou en travaux et… tu n’en as pas envie. Pas tout de suite. On n'est que début juillet pourtant. Tu le regretteras sûrement tout à l’heure, lorsque tu seras de retour à la case départ. Ça ne changera rien.
Il faut que tu lui donnes une réponse ou ton silence risque d’être mal interprété.

— Je veux bien. Ça ne vous dérange pas ? Où est-ce ?



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Mer 17 Mar - 10:15
Me remémorer mes rares voyages fit voyager mon cœur, et pour cela, j'en étais presque reconnaissante envers Eirian. La simplicité et la candeur de cette conversation me faisaient du bien, et c'était presque étrange de songer à cela. Effectivement, c'était à croire que tous mes autres échanges avec d'autres personnes étaient compliqués, cela dit, ce n'était pas si faux. À Poudlard, la plupart du temps je n'avais que des échanges professionnels, soit avec mes collègues, soit avec les étudiants. En dragonologie, je devais sans cesse faire entendre ma voix pour mes idées nouvelles et jugées saugrenues. À l'Ordre du Phénix, les conversations tournaient autour de la guerre et de la situation actuelle, des missions qui attendaient et des plans à élaborer. Et à côté ? Et bien, j'étais dans une période où je prenais garde à mes échanges avec Thomas car la situation était celle qu'elle était entre nous. J'essayais d'échapper à Harper pour épargner mon cœur qui était déjà bien assez brisé ainsi. William quant à lui était bien trop occupé pour que j'aille le déranger. Qui me restait-il ? Luca ? Même si nous pouvions parler de tout et de rien avec Luca, dernièrement, je préférais également l'éviter puisque le sujet des sentiments revenait régulièrement sur le tapis. Encore une fois, ce n'était pas le bon moment.
Constat simple et pourtant aussi tranchant qu'une lame de rasoir : en ce moment, tout était compliqué, même mes échanges avec les personnes les plus importantes de mon cercle.
Eirian n'en faisait pas partie (tout le moins pas encore), et il n'empêchait que là, en cet instant, je ne voulais être avec personne d'autre que lui, ou alors seule. J'avais cette image de deux blessés au combat, tombés l'un sur l'autre par hasard sur le champ de bataille, et qui, bras dessus, bras dessous, essayait de s'extirper l'un et l'autre de leurs guêpiers pour tenter de continuer à survivre.
Triste image n'est-ce pas ?
Malgré le voile terne qui traversa mon regard, sans que je cherche à le camoufler, je souriais, pensive, à la question du jeune homme.

- Comment est l'Autriche ?... Vaste question. Je me mordais la lèvre inférieure. Mmmh… elle est surtout montagneuse, je dirais que les Alpes recouvrent une bonne moitié du pays. Il y a aussi le Danube qui la traverse, ça m'a très souvent inspiré de nombreuses poésies, contes ou histoires urbaines. La neige qui saupoudre les sommets des monts semble immortelle, comme si le froid là-haut ne pouvait pas être vaincu, ni leurs beautés énigmatiques. Les villes et villages ont gardé une certaine authenticité, vous savez, l'apparence de ces maisons typiques de cette région de l'Europe, la plupart avec des poutres apparentes, ou qui ressemblent carrément à des chalets. La lumière y est vive, le soleil est bien plus chaud et omniprésent que nous l'avons ici, en Angleterre ou en écosse, quoique son exposition est peut-être moindre puisque les montagnes ont tendance à très vite les camoufler. Tranquillement, je glissais un regard presque rêveur en direction d'Eirian avant de reprendre. L'abbaye d'Admont est l'un de ces édifices qui rappellent à quel point l'être humain peut être merveilleux d'ingéniosité et de beauté. Elle siège non loin d'Enns, qui va se jeter ensuite dans le Danube. Elle a une grande cour intérieure, un peu comme des jardins, avec l'église d'un côté et la bibliothèque de l'autre. Ce qui m'avait frappé, c'était la couleur nacrée des murs, comme si tout restait pur, intouchable par les méandres du temps. Elle a un nombre incroyable d'ouvrages, de manuscrits et d'incunables, et bien sûr, elle garde des œuvres très rares, voire uniques. Je me taisais un instant, presque épuisée d'avoir autant parlé. Ça m'arrivait peu lorsque je ne parlais pas de dragons, un exploit dont Eirian pouvait se targuer. Après avoir poussé un long soupir par les narines, je reprenais. J'ai bien conscience qu'il doit y avoir d'autres bibliothèques spectaculaires dans le monde, mais je ne les ai pas vue et… petit haussement d'épaules. Celle-là m'a particulièrement séduite. Prunelles fuyantes, comme si j'avais honte d'avoir eu un coup de cœur pour un tel lieu, je me permettais d'observer obstinément les fleurs devant nous, comme si leurs présences me permettaient de garder mes moyens. Et vous ? Avez-vous voyagé un peu ? Avez-vous pu voir des lieux similaires ? Où… est-ce qu'il y a un endroit qui vous a particulièrement plu ?

En dehors de Poudlard bien sûr, mais ça, je me gardais bien de le dire. Je savais que le côté château et extraordinaire de Poudlard en séduisaient plus d'un, et quitter cet endroit à la fin de ces études, ça avait toujours un arrière-goût de regret et de manque. Pour moi, ça avait d'autant plus une saveur âcre et amère en lien avec un événement qui n'était pas totalement lié à la fin de mes études. Ironie du sort était que j'y étais retournée aujourd'hui en tant qu'enseignante, et le destin avait décidé apparemment de bien se moquer de moi puisque je n'avais pas uniquement retrouvé le château, mais bien plus.
Mais ce qu'il y avait d'extraordinaire dans cette école, tout le moins à mes yeux, c'était tout le monde magique qui l'entourait. Avec ces créatures fantastiques, mais aussi ces êtres doués d'intelligence, comme nous, et qui avait un savoir tout aussi grand, mais différent. J'avais eu la chance d'échanger un peu avec des fées ou des centaures. Prétendre qu'ils étaient devenus mes amis serait naïf et mentir, tout le moins, le peu que j'avais pu apprendre d'eux, et qu'ils avaient appris de moi, avait tout bonnement été extraordinaire et fascinant pour moi. Néanmoins, j'avais conscience que j'étais l'une de ces rares privilégiées, parce que j'avais passé mon temps dans la forêt interdite malgré les instructions de la direction de l'école. Parce que j'étais l'une de celle qui était à part. Alors, le discours du garçon assis à côté de moi ne pouvait que me faire sourire et me satisfaire. Humain vaniteux qui pense que tout est à ses pieds, que tout lui est dû. Dans le fond, nous étions que des mammifères comme les autres, et certes même si nous avions une grande intelligence, ce qui faisait que nous étions aussi omniprésents dans le monde était que nous avions réussi à éradiquer une majeure partie de nos prédateurs naturels, et notre vitesse de reproduction et d'apprentissage fulgurante en comparaison des autres espèces.

- Je suis bien d'accord avec vous. Mais… je pense, non, je suis sûre, qu'il y a des centaures, ou des êtres de l'eau, ou qu'importe comme autre être, comme nous. Je veux dire, comme vous et moi. Qui sont simplement curieux de l'autre espèce, et qui veulent juste partager, sans vanité. Juste… pour apprendre continuellement.

J'en étais persuadée puisque j'en avais croisé, notamment chez les centaures. Ce n'était pas pour autant que j'allais me vanter de ces discussions ou que j'allais trahir l'identité du centaure en question ou nos diverses conversations. À mes yeux donc, il n'y avait rien de brutal de la part de mon interlocuteur, ou alors, je l'étais tout autant que lui.
Brutal comme ces corps entrechoqués des maux qui nous étaient propres.
Brutal comme les contrées sauvages de mon archipel natal.
Réussissant à reposer mon regard sur l'étudiant de la maison Serdaigle, je souriais en coin.

- Ça l'est. Il y a des îles qui sont uniquement peuplées d'oiseaux qui y nichent. Il ne reste pas un centimètre carré de libre, tout est occupé de becs et de plumes. Et dans les terres… et bien… dans les terres, il est possible d'observer l'intrépide loutre qui se cache avant même de nous entendre, mais ce que je préfère, ce sont les cerfs. Là, je penchais un peu la tête tout en ramenant mon corps en avant pour venir m'accouder sur mes genoux. Suivant la saison, ils traversent les larges fleuves et lacs qui séparent les différentes îles, pour trouver à manger, ou un endroit plus approprié pour les naissances. J'avais toujours été émerveillée par ce spectacle aquatique et cette majesté des cervidés à nager pour rejoindre une autre rive, comme si franchir un cap était d'une simplicité enfantine. Et bien sûr il y a les créatures aquatiques, quand on ose s'aventurer sur les îles lointaines, des fois on peut observer des baleines.

Nature pleine et sauvage, elle était pure et puissante. Elle n'était pas en cage, privée de son épanouissement ou contrôlée, comme ici dans ce parc. Pourtant elle n'en restait pas moins énigmatique et belle à mes yeux qui savaient s'émerveiller de ce qui m'entourait.
Attentive, j'écoutais la tirade d'Eirian, en étant, encore une fois, du même avis que lui. Poudre aux yeux, cela n'empêchait qu'il y avait de bonnes choses, comme cette mère qui voulait faire profiter à son enfant des biens faits que l'air frais pouvait lui donner. Bien défaitiste ou trop sombre en ce moment, je n'arrivais guère à avoir un sentiment optimiste en ce qui concernait mes semblables moldus. Eirian semblait plus mesuré, même s'il exprimait très clairement avoir des doutes. Là, je grimaçais légèrement avant d'oser lui répondre.

- Au sens large du terme, je suis plutôt d'accord avec vous. Mais peut-être que ce n'est pas la masse qu'il faut regarder, mais ce qui est à côté ? Comme ceux qui savent voir, ou entendre.

Un peu comme nous en sommes, êtres doués de sensibilité et d'assez d'ouverture d'esprit pour en rester tolérants et bienveillants, sans vouloir nous jeter des fleurs. Et malgré les conflits qui animaient les moldus et les sorciers, il y avait sûrement du bon chez ceux qui n'avaient pas de pouvoirs magiques aussi, comme cette femme et son bébé non loin de nous. À cette pensée, je leur jetais un coup d'œil presque attendri.

- Moi je ne trouve pas frustrant de ne jamais pouvoir atteindre la perfection. Ça ne me rassure pas non plus. En fait, je n'ai pas ce rapport compétitif à l'esprit. C'est davantage l'envie de découvrir, d'en apprendre plus, et du coup, de ne jamais pouvoir être rassasiée ou de ne jamais avoir le risque de m'ennuyer. J'ai espoir, peut-être naïvement, de toujours m'émerveiller de certaines découvertes sur les dragons lorsque mon âge aura atteint le siècle. J'espère continuer à apprendre les animaux fantastiques, la musique et certains langages musicaux même lorsque je serai vieille.

Parce que j'étais ce puits sans fond d'ouverture d'esprit et de curiosité. Mais aussi de bienveillance et de bonté, à toujours vouloir aider mon prochain malgré mon propre bien-être. Quoique, présentement, j'étais à peu près certaine de faire le bon choix.
Secouant négativement la tête à la question d'Eirian, jugeant que je n'avais pas besoin de prendre la parole pour répondre, je me levais, saisissant mon sac et l'étui de ma guitare, quittant alors le banc et le parc, laissant le jeune homme me suivre à sa guise.
Plutôt sereine, je marchais d'un pas tranquille, déambulant avec agilité entre les passants, réussissant sans le moindre mal à les éviter, ou à emprunter des trottoirs et autres chemins moins bondés, comme si je voulais éviter la foule (ce qui était le cas).
Une fois la barrière magique franchie, retrouvant nos origines sorcières à l'abri des regards moldus, je posais une main douce sur le bras d'Eirian avant de nous faire transplaner.
Ici, le vent vint immédiatement frapper mon visage et secouer mes cheveux. Sous la différence drastique de la météo, je plissais légèrement les paupières, grimaçant une nouvelle fois en maugréant à l'attention de mon invité.

- Merde, ça s'est levé depuis tout à l'heure.

Jetant un regard presque amusé à Eirian, je lui fis signe du menton de me suivre. Où étions-nous ? Hé bien, avec le grondement sourd des vagues qui se fracassaient contre les falaises, le vent, l'humidité ambiante (sans doute allait-il bientôt pleuvoir), nous étions clairement sur une île. Une vague, plus importante que les autres, vint s'écraser sur les roches, et sa puissance la fit s'élever jusqu'à nous. Les gouttelettes retombant presque sous forme de pluie lourde à côté de nous, je nous éloignais des limites de l'île. Bien que petite, une fois en son centre, la météo frénétique aux extrémités était on ne peut plus clémente. S'y trouvaient ici, derrière un gros rocher, quatre petits moutons qui essayaient de s'abriter. Au loin, une maison, semblant petite et simple. Sans hésitation, je m'approchais des animaux laineux sans hésitation jusqu'à pousser l'une des femelles pour essayer de les bouger. Têtu, le mâle secoua la tête dans l'intention de me repousser, mais je m'adressais à lui comme si je m'adressais à n'importe qui.

- Zeus, fait pas le con, vous allez être pris dans la tempête. Aller zou, à la grange.

Comme s'il s'était décidé à obtempérer, l'animal prit la direction de la maison, suivi des trois brebis. Une fois entré dans la grange collée à la maison, je m'assurais que mes deux poules étaient aussi à l'abri, ainsi que le jeune Sombral. Ce dernier, couché au chaud dans la paille, hennit joyeusement en me voyant. Le gratifiant d'une tendre caresse, je refermais la grande porte pour mettre tout le monde à l'abri et au chaud, avant d'inviter Eirian à me suivre. Faisant le tour de la demeure, je poussais la porte de la maison pour laisser le jeune homme entrer en premier. Le suivant, je fermais la porte derrière nous. Soudainement au calme, je m'exprimais, soulagée.

- Ah bordel de merde quel temps de chiotte. Retirant ma veste, je m'adressais à mon jeune invité. Désolée pour ça, c'est habituel ici. Vous êtes ici chez vous.

L'intérieur de la maison était sobre, mais bien plus grand que ce que l'apparence extérieure semblait suggérer. Nous étions chez moi.
Loin de tout, éloigné des regards indiscrets et mal intentionnés. Ici, les secrets étaient emportés par l'océan pour ne jamais être révélés, nourrissant les bibliothèques énigmatiques des êtres de l'eau.


Never Ending Circles
ANAPHORE


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Sam 20 Mar - 17:42
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Tu profites de la conversation avec Abigail, même si tu ne relâches pas ta garde. En un certain sens, c’est plus simple qu’avec tes amis. Tu sais que certains s’inquiètent, tu as surpris quelques regards soucieux, mais ce n’est pas encore allé plus loin que cela pour le moment, et tu comptes sur les vacances pour continuer sur cette lancée. Et avec elle, tu es moins en représentation qu’avec tes proches : vous parlez moins de vos vies privées, tu n’es pas obligé de la regarder en face en mentant sur ta famille, sur tes projets pour l’été… L’atmosphère de mensonges qui t’entoure se fait moins prégnante et c’est un soulagement. Tu supportes de moins en moins de mentir en permanence aux personnes auxquelles tu tiens, mais dire la vérité étant hors de question… tu n’as pas le choix. Tu ne sais toujours pas si te rapprocher des autres, créer des liens était vraiment une bonne idée, mais tu ne supportais plus la solitude complète. La situation t’a un peu échappé cette année, avec ton entrée dans l’Ordre, qui a démultiplié ton cercle de relations, le fait d’accepter Kayla en tutorat… Tu ne le regrettes pas, mais cela te force à marcher sur des œufs en permanence, à surveiller tout ce que tu laisses échapper sur toi. Ici, c’est plus simple. Tu n’as pas à jouer celui qui va bien, à être rassurant – oh, tu fais attention, pour éviter les questions, mais c’est moins strict que face à tes amis.

Abigail évoque l’Autriche où tu n’es jamais allé, et tu lui demandes de t’en parler. Cela te fera quitter Londres pour quelques minutes. Tu te laisses porter par ses paroles, tandis qu’elle décrit le pays. Les montagnes, le fleuve, la neige… Les villages de cartes postales. Ça te fait penser aux Alpes françaises, où vous êtes passés également – en un peu moins de trois ans, vous avez déménagé plusieurs fois, que ce soit à cause du Blood Circle, d’une manifestation intempestive de tes pouvoirs ou simplement parce que ta mère estimait que vous aviez déjà passé trop de temps au même endroit et qu’il valait mieux aller vous perdre ailleurs avant d’en venir au premier cas.
Sa description te fait rêver, de même que celle de l’abbaye d’Admont que tu ne connais pas. Un jour peut-être, lorsque tout cela sera terminé, si jamais tu survis jusque-là. Tu visualises les murs nacrés, les étagères couvertes d’ouvrages précieux, les reliures de maroquin, les manuscrits… Le lieu semble magnifique, tu comprends sans mal son coup de cœur. Coup de cœur dont elle semble presque s’excuser, arguant qu’il existe d’autres bibliothèques exceptionnelles dans le monde. Sans doute, mais cela n’ôte rien à ce qu’elle ressent pour celle-ci.

— Je vous comprends, votre description fait vraiment voyager et donne envie de s’y rendre, de voir tout cela de ses propres yeux. J’espère que j’aurai un jour l’occasion de la découvrir.

Quant à tes propres voyages… Il y a Poudlard évidemment, un coup de cœur qui ne se dément pas depuis tes onze ans, depuis que tu as aperçu pour la première fois ses hautes tours depuis le lac. Le château a été ton foyer ces dernières années, le seul endroit où tu te sens relativement en sécurité, où tu sais que ton père ne te trouvera pas. Lui dire adieu à la fin de l’année prochaine sera un crève-cœur et tu t’efforces de ne pas trop y penser. Tu peux mentionner la France sans trop de risque, tu as déjà évoqué devant certains une branche française de ta « famille » pour expliquer le fait que tu parles français – même si tu as pas mal perdu ces dernières années. Vous êtes allés un peu en Écosse et en Irlande, également, mais tu ne peux évoquer tous ces lieux, les Howl ne sont pas censés voyager autant. Restant dans la lignée de ce dont tu as parlé par ailleurs, tu réponds :

— Similaires, non, je n’ai jamais eu l’occasion de visiter une telle bibliothèque. Mais je suis allé en France, à Paris surtout. J’ai beaucoup aimé Notre-Dame et la Sainte-Chapelle. Je ne suis pas croyant, mais elles dégagent vraiment quelque chose, dans leur atmosphère, dans la paix qui en émane… L’afflux des touristes gâche un peu les choses cependant, c’est difficile de réellement profiter des lieux. Et côté nature, j’ai beaucoup aimé les côtes bretonnes, cette impression d’être au bout du monde, face à l’immensité de l’océan… On se sent vraiment petit face à la puissance de la nature.

Abigail et toi partagez le même point de vue sur l’attitude des humains face aux autres espèces. Les sorciers ne font pas mieux que les moldus de ce point de vue.

— Oh, oui, je pense aussi que certains sont curieux aussi et dans ce cas, ça peut mener à des échanges très enrichissants. Seulement, je comprends qu’ils soient peu nombreux et que la majorité reste méfiante.

Quand on voit la façon dont le ministère les traite, avec le « Département de contrôle et de régulation des créatures magiques », qui met tous les peuples dans le même sac, tu comprends qu’ils gardent leurs distances. Tu es curieux du monde magique et des êtres qui le peuplent, mais ce n’est pas une réelle passion, tu n’as jamais envisagé d’études dans ce domaine.

L’endroit où elle vit te paraît sauvage, ce qu’elle ne tarde pas à confirmer. De nouveau, elle te fait rêver. Les loutres, les cerfs, les îles désertes… c’est une échappée hors du temps et du monde, et tu crois sans mal qu’après cela, les parcs londoniens paraissent bien pauvres.

— Cela fait rêver et c’est sûr que la nature ici apparaît bien triste en comparaison. Tout est contrôlé et calculé ; les animaux ne sont pas vraiment en cage… mais presque. Elle n’a rien de la puissance et de la beauté qu’on imagine ailleurs.

Pour autant… eh bien, c’est tout ce que certains ont à disposition, et on peut regretter que le monde ait à ce point choisi de se détourner de la nature pour s’enfermer derrière du verre et du béton, au point que ceux qui choisissent de revenir à la terre soient considérés comme des marginaux ou des illuminés. Tu es toi-même un enfant de la ville, tu ne le nieras pas, mais tu apprécies les échappées en dehors.

— Oui, l’effet de masse peut être trompeur, il y a toujours beaucoup d’exceptions… et c’est heureux.


Il y a toujours du bon, que ce soit chez les moldus et les sorciers, malgré les conflits. Qui, comme souvent, sont le fait d’une minorité extrême. La majorité des deux mondes n’a que pour seul but de mener sa vie tranquillement et en paix, d’étudier, gagner sa vie, passer du temps en famille ou entre amis… Vous n’êtes pas différents. Tu suis le regard d’Abigail, vers une femme et son enfant, tranquillement en train de profiter de l’air frais. Ça te tire un sourire, ils ont l’air heureux, et c’est tant mieux que de tels moments existent encore.

Tu t’es sans doute mal exprimé sur ton rapport à la perfection, tu rejoins complètement les paroles d’Abigail. La compétition avec les autres peut être drôle, dans un rapport de camaraderie, mais elle n’a pas vraiment de sens, ce n’est pas elle qui fait grandir et évoluer. Le plus important, c’est de savoir rester ouvert au monde, de continuer de s’émerveiller.

— Je suis d’accord. Je disais plutôt rassurant dans le sens où on ne pourra jamais enfermer le monde, en faire le tour complet. Il y a toujours un domaine où nous resterons comme des enfants, curieux de tout, l’esprit grand ouvert pour mieux comprendre… Je plains les personnes qui estiment ne plus rien avoir à apprendre ou à découvrir. Et j’espère que vos vœux se réaliseront.

De ton côté, ce sont surtout les sortilèges qui te passionnent, tu aimes toujours autant en découvrir en traînant dans la bibliothèque de Poudlard pour t’y exercer ensuite, et tu es curieux des avancées dans ce domaine.

Sur le départ, Abigail te propose de venir chez elle. Elle ne te répond pas lorsque tu lui demandes si ça ne la gêne vraiment pas et commence à s’en aller. Tu hésites, puis tu finis par lui emboîter le pas, ton sac de nouveau bien calé sur ton dos, en te disant que tu le regretteras dans quelques heures. Mais il n’y a pas grand-chose qui égaie tes soirées, tu peux bien faire un écart pour une fois. Tu la suis dans les rues de Londres, évitant les passants à ton tour, avec la facilité que donne l’habitude. Ils sont moins nombreux, ce n’est pas plus mal, tu n’aimes pas qu’on te frôle de trop près. Les sens en alerte, tu guettes le moindre mouvement suspect, le moindre bruit inhabituel, le moindre changement d’atmosphère. Rien ne se dresse en travers de votre route, et vous regagnez le monde magique sans encombre. Juste avant, tu sors ton téléphone et fais mine d’envoyer un message, comme si tu prévenais tes parents que tu rentrerais plus tard que prévu.

Même si tu t’y attends, tu ne peux t’empêcher de te crisper lorsqu’elle pose une main sur ton bras et tu prends sur toi pour ne pas te dégager brutalement. Le tourbillon du transplanage s’empare de toi, tu serres les dents, le cœur battant. Dès que tu touches terre, tu t’écartes, en prenant la mesure des lieux, prêt à réagir. Ce qui te frappe d’abord, littéralement, c’est la force du vent, qui s’engouffre dans tes cheveux et joue avec ton tee-shirt. La température n’est pas la même qu’à Londres ; sans veste, un frisson te traverse. Puis le paysage sauvage, elle ne t’a pas menti pour le coup. Les falaises, le grondement sourd de la mer qui s’écrase à leurs pieds, l’air chargé d’embruns et d’humidité que tu respires à plein poumon… Tu pivotes sur toi-même. Vous êtes seuls et clairement sur une île.

— C’est génial !


Les conditions ne sont pas très clémentes, mais tu essaies d’embrasser tout le paysage du regard, de profiter au maximum de ce qui s’étale sous tes yeux. Tu aurais dix ans de moins ou tu serais en meilleure forme, tu serais déjà en train de cavaler vers le bord de l’eau. C’est pratiquement un autre monde. Tu inspires profondément.
Une vague vous éclabousse presque. Sur un geste, tu suis Abigail vers l’intérieur de l’île. Le vent y souffle un peu moins. Un sourire t’échappe devant les moutons blottis à l’abri d’un rocher, puis la maison au-delà. Si tu vivais ici, est-ce que tu serais encore capable de supporter Londres ? Tu en doutes, et tu comprends d’autant mieux les remarques faites au parc. Forcément, à côté de ce spectacle sublime, le reste doit paraître bien pathétique et les efforts de l’homme pour maîtriser la nature, outrageants.
Agibail interpelle l’un des moutons. Zeus ? Tu te demandes comment s’appellent les autres. Ils finissent par obéir. Sur le pas de la porte, tu aperçois les poules, mais aussi… c’est bien un Sombral, étendu là dans la paille. Un jeune, sûrement. À peine as-tu le temps de te remettre de ta surprise qu’Abigail t’invite à la suivre. Cette fois, vous gagnez la porte principale. Tu entres le premier avec un brin de soulagement. Sans veste, le vent commençait à devenir glacial et tu préfères ne pas imaginer à quoi ressemblent tes cheveux – tu t’en moques un peu, il faut dire.

Ton regard balaie rapidement la pièce – réflexe de sécurité plus qu’autre chose. L’intérieur est plus grand que ne le laisse entendre l’extérieur de la maison, la magie y est certainement pour quelque chose. Les fenêtres au fond, les portes sur le côté qui doivent mener vers la chambre et la salle de bains – ton point sur les issues est brusquement interrompu par un mouvement. Un hibou, logique, et à côté… tu restes bouche bée devant l’oiseau de la taille d’un cygne, au plumage d’un rouge flamboyant. Un phénix. Abigail héberge un phénix. Tu marques un léger mouvement de recul, presque timide face à l’oiseau. Ils sont sensibles à la pureté de l’âme de ceux qui les entourent et tu doutes que ta présence lui plaise. Tu t’efforces de te reprendre, continues ton petit tour d’analyse sécuritaire.
Le silence règne, il n’y a sans doute personne d’autre que vous. Le grand canapé, les bibliothèques, trop loin pour que tu déchiffres les titres des ouvrages, et les tableaux animés dessinent un intérieur agréable, confortable. Tu imagines sans mal les soirées au coin du feu sous les hurlements du vent et le ruissellement de la pluie contre les carreaux. Un peu gêné de te retrouver ainsi chez Abigail, tu te retournes vers elle.

— C’est vraiment un endroit magnifique ! C’est un vrai havre de paix, cela doit vous faire drôle de retourner à Poudlard après des mois ici ou même d’aller à Londres… Merci beaucoup de m’accueillir chez vous.


Les murs de pierre ont l’air d’avoir affronté toutes les tempêtes.

— Cela fait longtemps que vous habitez ici ?



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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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On the run,
falling to the depths

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You wish you were someone else
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Do you know what it's like
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Abigail MacFusty
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Lumos
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Ven 26 Mar - 11:51
À défaut de pouvoir faire le tour du monde présentement, j'étais en train de me remémorer des souvenirs avec Eirian, ce qui, dans un sens, faisait aussi voyager. J'avais pris l'habitude de photographier un peu tout, et j'étais souvent triste par compassion pour les moldus, qui devaient se contenter de clichés figés. La magie avait ça de magnifique de rendre certaines choses vivantes, et les photographies étaient ce que je préférais. Comment était-il possible de mieux se remémorer un souvenir via une image prise à l'instant T ? Et quoi de mieux alors lorsqu'elle pouvait bouger, lorsque le souvenir restait totalement tangible, ainsi que les mouvements, les sourires, les regards, les petites mimiques propres à chacun d'entre nous.
Alors, le regard planté devant moi, je réussissais sans mal à m'imaginer la cathédrale de Notre-Dame, au plein centre de Paris, se dresser telle une reine face à ses sujets, entourée par un millier de ces petites fourmis curieuses que nous étions, nous, pauvres touristes.
Je hochais la tête, compréhensive lorsqu'il fit mention de l'atmosphère particulière qui émanait des lieux de culte. Je n'avais jamais visité Notre-Dame, je n'étais hélas jamais allée en France alors que je le désirais au plus profond de moi, souhait que je n'avais jamais pu exaucer jusque-là. À dire vrai, avant la mort de Kyle, je ne m'étais jamais trop rendue dans les églises ou les cimetières. Aujourd'hui, même si ce n'était pas une habitude, j'appréciais les visiter lorsque je faisais du tourisme ou tout simplement lorsque j'avais besoin de me confier à quelqu'un, ou à quelque chose. Que ce soit Merlin, Dieu ou Bouddha, je m'en contre fichais, car j'avais simplement besoin de parler, de sortir le flot des pensées qui réduisait à néant mon cerveau, et puisque je manquais cruellement de confidents et d'amis, alors, je m'adressais à celui (ou celle) qui voulait bien de moi chez lui, dans sa maison ouverte à tous. Là-bas, je me sentais en paix, et non pas surveillée, mais davantage protégée par quelque chose de plus grand. Quelque chose qui me dépassait, et qui dépassait tout le commun des mortels, sorciers et moldus confondus.
Lorsque la conversation me mena au bord des côtes bretonnes, je pouvais sans mal m'imaginer la puissance de l'océan (ce n’était rien de le dire). Cette sensation d'être au bout du monde et que l'eau, là-bas au loin à l'horizon se jetait dans un vide immense. Alors humble, je hochais une nouvelle fois la tête, ne pouvant que pleinement comprendre les ressentis du jeune homme, puisque c'était ce que je vivais tous les jours lorsque j'étais établie chez moi, sur mon île.

- Mais en réalité, nous sommes petits face à la nature. Mais c'est dans le caractère de l'être humain de se sentir grand et de vouloir tout contrôler. Ce n'est pourtant qu'une image fardée. Pas tant que cela lorsque nous pouvions voir certaines villes érigées, comme Londres, où nous nous trouvions à l'instant. L'Homme était capable de grandes choses, du pire et du meilleur. Néanmoins, je restais persuadée qu'un raz-de-marée, une tempête ou une autre quelconque catastrophe naturelle pouvait venir à bout sans trop de mal de tous ses édifices de béton. Je le comprends aussi, et je le déplore, moi qui suis une curieuse dans l'âme et qui ne veut que la paix. Les échanges que je peux avoir avec certains peuples de l'eau sont uniques. Nous avons tellement à apprendre d'eux… mais voilà… c'est ainsi.

Je gardais mon aigreur contre le Ministère et le Macusa pour moi, ça ne servait à rien de refaire le monde sur nos autorités alors que je n'y prenais pas part moi-même. Si je désirais tant faire changer les choses, il me faudrait m'engager auprès du Ministère et ça, je ne m'en sentais ni capable, ni désireuse. Alors voilà, j'essayais de faire de mon mieux à mon échelle, en proposant de nouvelles techniques en magizoologie et en dragonologie. J'avais la naïveté de croire que mes méthodes, ma façon de penser et ma douceur, un jour peut-être, toucheront quelqu'un qui saura reprendre le flambeau de mes convictions. À son tour ce quelqu'un touchera d'autres personnes, puis le tout ira se répandre comme une trainée de poudre. C'était simplement que ces choses-là prenaient du temps, comme le grand chêne devient fort après des siècles à prendre convenablement racine en terre.
J'eus un sourire entendu en direction d'Eirian alors qu'il semblait comprendre ce que je voulais dire plus tôt en décrivant la nature ici comme de la poudre aux yeux, domptée, en cage, alors qu'elle semblait libre. Ça n'avait rien de comparable à chez moi ou dans les contrées où j'avais pu m'aventurer, où là, la nature nous tue sans la moindre hésitation, où nous sommes obligés de faire corps avec elle pour la comprendre et en réchapper, non pas la combattre. Cela dit, il avait raison, il y avait toujours les exceptions qui confirmaient la règle.

- Oui, vous avez raison, et comme vous dites, heureusement qu'il y en a. C'est aussi ainsi que nous apprenons, avec les exceptions. Je me considérais, sans me vanter, moi-même comme une exception puisque je me savais très à part de par mes comportements parfois étranges, et par cette solitude que j'aimais cultiver et garder très proche, comme si le monde autour de moi me faisait trop peur et me dérangeait trop. C'est pourquoi je posais timidement mes prunelles sombres sur le jeune homme afin de l'observer tandis qu'il clarifiait ses paroles précédentes, celles que j'avais un peu mal interprétées, maladroite que j'étais. Dans ce sens, oui, effectivement, ça a quelque chose de rassurant. Encore faut-il savoir garder son âme d'enfant. Je baissais le regard à mes pieds pour venir jouer un peu avec les graviers avec ma chaussure. Des fois, la vie d'adulte va trop vite, elle est trop intense, d'autant plus avec les conflits d'aujourd'hui, et on en oublie l'essentiel. Je… je soupirais un peu, mes épaules s'affaissant, comme si j'étais un peu las. Je ne veux pas que tous ces événements puissent me changer, ou me détourner du chemin que j'ai décidé de suivre… mais essayer de suivre sa lumière dans toute cette obscurité des fois c'est… difficile. Puis je revenais sur lui en souriant doucement. Merci, vous aussi.

Espérer avec bienveillance le bonheur de l'autre, voilà qui pouvait passer pour une simple formalité, comme demander à quelqu'un comme il va après l'avoir salué. C'était devenu une forme de politesse plutôt que d'un véritable acquis de conscience. Cela dit, lorsque je prononçais ses paroles à l'intention du jeune homme, elles étaient sincères, parce que je n'étais pas dupe ni une simple d'esprit : je voyais bien que quelque chose n'allait pas pour lui, et je comprenais bien qu'il n'allait pas m'en parler si facilement. Ce qui était normal, nous ne nous connaissions que peu, et je n'étais pas Mère-Theresa, cette moldu si extraordinaire. Alors, encore une fois, comme pour les créatures fantastiques, je faisais ce que je pouvais à ma propre échelle, en lui offrant des paroles qui se voulaient réconfortantes, en lui offrant de voyager durant notre discussion, et même véritablement.

Voilà que mon île était foulée par une nouvelle personne, ce qui m'amusait, mais m'apeurait aussi. Ici, c'était chez moi, c'était mon sanctuaire, et j'appréciais ma solitude. Que de plus en plus de personnes en connaissent son existence m'angoissait quelque peu. Néanmoins, Eirian était, est et sera toujours le bienvenu sur ces terres. Mes terres.
Son enthousiasme à notre arrivée m'arracha un petit rire franc. À dire vrai, c'était une réaction tellement inhabituelle qu'elle m'avait fortement étonnée. En effet, la plupart de mes invités plissaient yeux et nez en sentant le vent les fouetter ainsi et ils s'empressaient de rentrer dans ma chaumière pour se mettre à l'abri. Voilà alors que j'eus la sensation de donner cette bouffée d'air si précieuse et importante dont Eirian avait tant besoin. Alors rassérénée par mon choix, je l'emmenais un peu plus au centre de l'île pour rassembler mes quatre moutons et mes animaux avant de l'inviter à entrer plus au chaud. Nous pourrons faire le tour du lieu un peu plus tard lorsque tout sera apaisé. L'on parle toujours de calme avant la tempête, mais jamais de celui qui arrive après. C'était un oubli important et regrettable.
Sentant le garçon sur ses gardes une fois à l'intérieur, je le laissais prendre ses marques comme il le souhaitait. Ici, il ne risquait rien, ici, il n'y avait jamais rien ni personne. Quoique si, de temps en temps un bateau s'aventurait sur l'île voisine, à Sainte-Kilda, car c'était une île encore touristique. Par ma magie, Soay semblait inhabitée pour les moldus. Sa réaction en apercevant Grishkin ne m'échappa pas, mais je la mettais sur l'effet de surprise de voir un animal si rare chez une personne si… et bien, chez moi. Quelqu'un de si indifférent et si aisément oubliable. Lorsqu'il se retourna vers moi pour m'adresser la parole, je laissais à nouveau échapper un petit gloussement amusé.

- Drôle, ce n'est pas vraiment le mot. Je me sens comme déchirée, parce que c'est ici que sont mon cœur et mes poumons. Je retirais ma veste et vins la suspendre avant de reprendre, lui répondant sans détour ni hésitation. Je vous en prie, ce n'est rien, je vous accueille avec plaisir et en tout temps, sachez-le. Encore une fois, ce n'étaient pas des paroles de simples formalités, je le pensais vraiment. L'invitant à s'avancer plus à l'intérieur de la demeure, je me rendais directement à la cuisine pour faire chauffer de l'eau. Je vis ici depuis… oula… Je dirais depuis que j'ai environ vingt ans. Ma famille veille sur les Noirs des Hébrides, les dragons, depuis de nombreuses générations. Les îles Hébrides sont le berceau de ma famille. Je suis venue m'installer ici en particulier pour diverses raisons. En effet, il n'y avait pas que l'aspect lieu reculé qui m'attirait à Soay. Ouvrant un placard, je sortais deux tasses. Du thé ? À son refus, j'allais poser la boite à thé et ma tasse sur la table trônant non loin avant de lui indiquer la porte la plus à droite, la plus en direction de la porte d'entrée. La salle de bain est là-bas si vous avez besoin. N'hésitez pas utiliser la douche si vous le voulez, ce n'est pas comme si l'eau me coutait cher. Petite plaisanterie que le garçon n'allait peut-être pas tout à fait comprendre du fait que j'utilisais directement l'eau de l'océan, filtrée par magie. Que puis-je donc vous servir dans ce cas ? Passant une main dans mes cheveux comme pour les arranger, je me dirigeais vers la cheminée pour allumer un feu, dans l'intention de réchauffer la pièce afin que le jeune homme n'ait pas froid. Sa tenue vestimentaire ne m'avait pas échappé, et les conditions de notre venue n'avaient pas aidé à le maintenir au sec. Ici c'est ma chambre. Dis-je en pointant de manière négligée la dernière porte. Derrière les oiseaux, car Gerard s'était collé à Grishkin comme un amoureux, diverses plantes étaient entreposées, dont une qui s'ouvrit en voyant le visiteur, montrant des dents semblant particulièrement acérées. En la voyant s'agiter, je la fixais, puis ensuite Eirian. Oh euh, prenez garde à celle-là. Elle… n'apprécie pas trop les visiteurs. Je remuais un peu les épaules non sans cacher un sourire amusé. C'est elle qui me débarrasse des visiteurs non désirés lorsque je suis absente. En réalité elle gobait davantage des insectes ou des petits mammifères comme les souris, mais ça lui arrivait de vouloir croquer un doigt ou deux.


Never Ending Circles
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Dim 28 Mar - 12:25
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
La discussion avec Abigail te fait voyager et te renvoie loin en arrière, à cette époque avant Poudlard, lorsque, en compagnie de ta mère, vous vous créiez des souvenirs au milieu de la cavale. Paris et sa cathédrale, la France et ses paysages… Tu étais jeune alors, dix ans la dernière année, mais c’était assez marquant pour que des images te restent. Ces moment prenaient toujours un relief particulier, avec la conscience que tout pouvait s’arrêter d’un instant à l’autre, que chaque jour risquait d’être le dernier, et vous essayiez d’en profiter au maximum tout en tâchant de construire la vie la plus normale possible. La plupart des photos d’alors sont encore sur ton téléphone, tu as transféré les fichiers d’un appareil à l’autre au fil du temps. Tu ne les as pas rouverts ces dernières années, c’est mieux de les laisser enfouis plutôt que de raviver la nostalgie. Mais tu as toujours les petits personnages que vous utilisiez lorsque vous vouliez vous prendre en photo. Une idée de ta mère, pour ne pas que tu apparaisses dessus – il n’existe aucune image de toi entre tes sept et tes dix-neuf ans, sauf celles volées par des caméras de surveillance. Une précaution, une de plus, pour égarer au mieux le Blood Circle, pour qu’ils aient le moins de chance possible de te reconnaître au fil des années, si, lors d’une nouvelle fuite éperdue, ils parvenaient à mettre la main sur l’un de vos téléphones. Alors, deux personnages qui en ont vécu des aventures, de l’escalade des côtes de granit de la Bretagne à l’ascension des clochers de Notre-Dame, en passant par la campagne française. Tu leur inventais mille péripéties en cherchant le meilleur emplacement. Avec le retour en Angleterre, vous avez cessé les voyages, surtout que tu as repris ta véritable apparence, sans teinture ni lentilles colorées. Et avec vos faux papiers, ta mère préférait limiter les risques au maximum. Hors de question d’attirer l’attention de policiers trop zélés. Même si le dossier de ta disparition a été fermé depuis des années et que tu es considéré comme mort aux yeux des autorités, la prudence restait de mise.

Évoquer ces souvenirs, raviver les images du passé te serre le cœur, surtout dans cette période si proche de la date de sa disparition. Bien que tu t’efforces de tenir à distance une partie de tes ressentis, c’est dans ces moments que tu prends conscience à quel point elle te manque. À quel point tu aimerais qu’elle soit encore à tes côtés. À quel point… Pourvu qu’elle aille bien, que ton père ne lui ait pas fait de mal ! Qu’il veuille t’éliminer, toi, d’accord, mais qu’elle ne prenne pas pour toi. Lorsque les souvenirs reviennent en force, tu te sens désespérément seul. Tu as rarement été autant entouré, mais tout n’est que mensonge. Même à Carl et Robin, tu n’as pas tout dit, tu n’oses pas confier ce qui te hante, désireux de ne pas perturber l’image qu’ils ont de toi. Vous avez déjà tant à reconstruire, tu ne veux rien gâcher.
Tu bats des paupières, te forces à revenir au présent lorsqu’Abigail te répond. Il te faut quelques secondes pour raccrocher les wagons. La nature… Oui, la Bretagne, la puissance majestueuse des éléments, cette beauté qui prend à l’âme.

— L’être humain ferait mieux d’apprendre un peu d’humilité. C’est cette soif de grandeur et de contrôle qui pose une bonne partie des problèmes que nous rencontrons…

Alors, certes, quand elle est bien orientée, l’homme peut en tirer des choses sublimes. Tu ne nieras pas la beauté de certaines capitales, de nombreux monuments… Mais une bonne partie des plus beaux d’entre eux ont été érigés pour louer les puissances supérieures, non pour les hommes. Tu penses aux temples et aux cathédrales dont la construction prenait des décennies, des hommes pouvaient travailler toute leur vie sur un chantier sans en connaître le résultat, sachant seulement qu’ils œuvraient pour quelque chose de plus grand qu’eux, qui les dépassait tous.

— Heureusement qu’il y a des personnes comme vous pour créer et maintenir des liens. Petit à petit, on peut avancer dans la bonne direction.

Même s’il y a encore tant à faire… Comme dans la compréhension entre sorciers et moldus. Si les deux se connaissaient et se comprenaient mieux, il n’y aurait pas tant de conflit. Mais le chemin du moment n’est pas celui de la compréhension, encore moins de la paix, et tu le regrettes. Pourtant, les sang-mêlés ou les nés-moldus montrent bien que les deux mondes peuvent se mélanger sans souci. Que tout le monde a à y gagner.
Abigail et toi vous rejoignez sur la nature, tu réponds à son sourire. Heureusement qu’il y a des exceptions, ça évite de perdre tout espoir. Surtout qu’il y a toujours des milliers de choses à découvrir, pour peu qu’on sache où regarder et qu’on ne se focalise pas seulement sur son petit coin de lorgnette. Abigail n’a pas l’air à l’aise tandis qu’elle évoque la vie d’adulte, et pourtant ses paroles résonnent profondément en toi. C’est exactement ce que tu ressens. Souvent, tu te demandes si c’est toi qui as un problème, s’il y a quelque chose que tu ne comprends pas. Tu devrais être capable de gérer bien mieux ce qui t’arrive. Et pourtant, ça devient de plus en plus difficile de garder le cap, de ne pas renoncer. Quant au conflit… tu redoutes aussi qu’il te change ou du moins qu’il te fasse perdre tout ce que tu essaies de construire. Imaginer tes amis des deux camps s’affronter et s’entretuer te mine. Bon sang, pourquoi est-ce qu’ils ne peuvent pas comprendre qu’il y a un autre chemin à suivre ? Mais tout est de la faute de la poignée de psychopathes aux commandes du Blood Circle et des Mangemorts.

— Je… ressens la même chose que vous. Le fait que tout va trop vite, qu’il y a trop de choses qui s’accumulent, avec l’impression qu’on ne s’en sortira pas. C’est difficile de rester soi-même dans ces circonstances. On n’est pas si nombreux à vraiment vouloir la paix, mais c’est important qu’on soit là pour le dire. Et s’il y a des moments où ça devient trop difficile… personne ne peut nous en vouloir de prendre du recul, le temps de nous retrouver, pour revenir en étant plus affermi. Aucune guerre ne vaut que vous vous perdiez.

Si c’est pour perdre ses idées en se battant, à quoi bon ? Déjà que tu acceptes de moins en moins l’alliance avec les Mangemorts, tu refuses que d’autres se perdent dans ce conflit. Pour ce qui te concerne, ça n’a pas vraiment d’importance, mais quand tu penses à certains membres de l’Ordre et à tous les projets qu’ils essaient de mettre en place… ça doit continuer. Le monde sorcier aura besoin de gens comme Abigail pour se reconstruire ensuite.
Tu lui réponds d’un sourire lorsqu’elle te souhaite à ton tour d’être heureux, même si tu n’y crois pas. Non que tu mettes en doute sa sincérité, mais c’est surtout que tu n’es pas sûr d’y avoir droit. Tout ce que tu veux, c’est retrouver ta mère. Le reste… ce sont des rêveries, ça t’aide à tenir d’imaginer un potentiel futur, mais comment est-ce que ça pourrait se concrétiser ? Trop de pièces en vrac et cassées pour que ça fonctionne.

— Merci.

Tu hésites avant d’accepter le voyage qu’elle te propose – cette angoisse irrépressible à l’idée de transplaner avec quelqu’un, de la sentir si proche pendant ces quelques secondes, de te retrouver seul tu ne sais où. Cette incompréhension aussi, qu’est-ce qu’elle peut bien te trouver ? Mais elle ne te proposerait pas ça si votre conversation ne l’intéressait pas. Et tu délires complètement, tu ne cours aucun danger avec elle. Mais ça se saurait si tu arrivais encore à rationaliser.

Quoi qu’il en soit, tu ne regrettes nullement ta décision lorsque tu découvres l’île. Wow. Le décor est si différent de Londres que tu pourrais aussi bien avoir changé de planète. Ton enthousiasme ne lui échappe pas et la fait rire. Tu t’en fiches, tu te gorges de l’air marin, du paysage sauvage qui vous entoure, des vagues qui battent les falaises, du vent qui s’enroule autour de vous, glacé, humide, mais si vivant… Tu n’aimes pas assez la pluie pour t’imaginer vivre dans le coin à l’année, mais à cet instant, c’est précisément ce dont tu avais besoin, une bouffée d’air, une secousse, comme quelqu’un qui touche le fond et donne le coup de pied salvateur qui le ramènera vers la surface. Tu es toujours sous l’eau, mais tu as moins l’impression de t’enfoncer. Ça ne durera pas longtemps, sans doute, mais c’est déjà bien plus que ce que tu attendais.

Tu suis Abigail vers le centre de l’île. Une fois les animaux à l’abri, c’est votre tour. Tu parcours rapidement les lieux du regard. Après le mauvais temps, tu as l’impression de te retrouver dans un nid – et c’est sans doute un peu ce qu’est la maison, apte à affronter les tempêtes à l’extérieur, mais chaleureuse à l’intérieur. Tu te sens emprunté, déplacé ici, marques un mouvement de recul devant le phénix, qui ne semble pourtant pas broncher devant ta présence. S’il te fallait une preuve supplémentaire qu’Abigail n’a vraiment aucune mauvaise intention, tu viens de la trouver. Lorsqu’elle mentionne le déchirement que représente le fait de quitter l’île, tu hoches la tête. Ton mot de base était mal choisi, il faut que tu fasses un peu plus attention à ta façon de parler.

— Je vous comprends. Ça doit être un tel havre de paix… Le monde doit paraître complètement chaotique à côté. Et… un peu absurde.

Tu ne sais pas quoi répondre lorsqu’elle te dit que tu es le bienvenu en tout temps, pris au dépourvu. Un banal « merci » est tout ce qui te vient. Tu déposes ton sac à dos sous les patères tandis qu’elle commence à faire chauffer de l’eau. Qu’est-ce qui l’a poussée à venir sur cette île en particulier ? C’est sûrement trop privé pour que tu poses la question.

— Ce doit être impressionnant de pouvoir voir ces dragons de près et de les protéger. Enfin, du moins pour ceux qui n’ont pas l’habitude d’en fréquenter. Vous ne travaillez plus avec eux maintenant ?

Elle te propose du thé.

— Non merci.


En général, ça fait toujours un peu hausser les sourcils, un Anglais qui ne boit pas de thé. Tu aimais ça, avant. Maintenant, c’est surtout un coup à te faire replonger dans tes souvenirs et tu y sombres bien assez souvent pour ne pas chercher d’autres occasions.
Elle désigne une porte un peu plus loin. La salle de bains, d’accord. Tu ne sais pas trop comment prendre sa précision sur la douche – tu n’en as pas vraiment besoin, pas plus que n’importe qui sortant d’une journée de travail, en tout cas. Tu arrives à te débrouiller avec les douches publiques ou avec la magie au pire des cas. Aucun des deux n’est vraiment agréable, mais ça fait l’affaire. Tu regrettes surtout de ne pas avoir changé de tee-shirt, mais tu ne vas pas en sortir un autre maintenant.

— Ça va pour le moment, merci.

Elle te demande ce que tu préfères boire. Un chocolat ne passera pas non plus, trop lourd, et tu es bien assez sur les nerfs pour ne pas en rajouter avec du café.

— Vous auriez du jus de fruits, s’il vous plaît ? J’aime à peu près tout. Ou de l’eau sinon, ce sera très bien.

Tu te décales vers la cheminée lorsqu’elle y allume un feu. La flambée te fait du bien, surtout avec ton tee-shirt humide. Malgré la beauté de l’île, la température y est aussi rude que le reste, surtout en arrivant directement de Londres et avec ta veste au fond de ton sac. Tu tends les mains vers la chaleur, tandis qu’elle continue de te faire l’honneur des lieux. Un sourire t’échappe en voyant les deux oiseaux l’un contre l’autre, le hibou collé au phénix. Derrière, une plante ouvre brusquement ce qui ressemble un peu trop à une gueule emplie de dents particulièrement aiguisées. Tu n’es pas sûr que tes doigts y résisteraient. Ce que confirme l’avertissement d’Abigail.

— Je vois ça. Je n’ai pas l’air de déranger le phénix, par contre.

Tu te retournes vers elle lorsqu’elle mentionne les exploits de la plante.

— Il y a beaucoup d’indésirables qui s’aventurent jusqu’ici ? J’ai l’impression que c’est très protégé avec les éléments, en plus de la magie.

T’enhardissant quelque peu, un peu réchauffé, tu t’approches de la bibliothèque qui ploie sous le poids des ouvrages. Beaucoup de dragonologie, ce qui n’a rien de surprenant, beaucoup aussi qui donnent envie de s’y plonger.

— J’ai l’impression que c’est l’endroit parfait pour faire vos recherches sans être dérangée. Et pour être tranquille et se reposer lorsque la vie va trop vite…

Un vrai refuge. Tes sentiments mêlés percent dans ta voix. C’est ça qui te manque aussi, un endroit où poser tes affaires, où te poser en sachant que le monde restera à l’extérieur, que tu seras en sécurité et protégé pour quelques heures. Que tu pourras relâcher un peu de cette tension affreuse qui te tient debout. Ici, loin de tout, au chaud, avec Abigail devant qui tu as en partie renoncé à entretenir l’illusion que tout va bien, tu sens d’autant plus le poids de l’épuisement, trop lourd, sur tes épaules. Le contraste est brutal, violent. Tu t’efforces de te reprendre. Hors de question de craquer.


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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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On the run,
falling to the depths

Do you know what it's like when
You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
Do you know what it's like
To wanna surrender ?
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Abigail MacFusty
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Lumos
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Lun 29 Mar - 16:10
Sans chercher à être particulièrement égoïste, je ne m'étais jamais véritablement imaginé que quelqu'un d'autre puisse ressentir ce que je ressentais vis-à-vis de la guerre. J'étais entourée de combattants, d'idéalistes, de genre de paix, courageux et guidés par leurs convictions. Depuis des années ma famille est du côté de l'Ordre du Phénix, mon père avait été gravement blessé lors de la guerre contre Voldemort à l'époque, et je remerciais le ciel tous les jours de me l'avoir ramené vivant. Souvent, j'en étais venue à me demander si le décès de mon frère n'avait pas été un prix juste à payer. Dans le fond, je ne préférais pas y songer, car choisir entre mon père et mon frère était entre choisir de me séparer de mon cœur ou de mes poumons. Alors, par tradition et allégeance, j'avais rejoint les rangs de l'Ordre même si j'aurais préféré être neutre. Après tout, j'avais un ami très proche parmi les Mangemorts, et peut-être quelqu'un au sein de Blood Circle, bien qu'aujourd'hui je l'ignore. L'affiliation, j'y portais peu d'attention puisque j'étais davantage tournée vers la personne, néanmoins, je n'étais pas sans savoir que tout le monde ne réfléchissait pas ainsi. William traitait certaines personnes, ou êtres, comme des esclaves, ce que je ne pouvais absolument pas cautionner. En ce qui concernait les autres, en dehors de ma famille, je devais admettre que je ne les connaissais pas assez, moi, petite sorcière qui s'obstinait à rester recluse et solitaire.
Alors oui, lorsqu'Eirian me confia son point de vue, je réalisais à quel point je n'avais jamais vraiment imaginé la possibilité que d'autres puissent penser comme moi, vouloir la paix en mettant tout le monde sur un point d'égalité. Allait-on s'en sortir ? Allait-on en être victorieux ou perdants ? Si nous étions victorieux, qu'adviendrait-il des moldus ? Et si nous étions perdants, qu'adviendrait-il de nous ? Nous étions peu nombreux à souhaiter la paix, et cette perspective, maintenant que j'en prenais toute la mesure, me faisait terriblement peur. Pourquoi nous nous complaisions toujours dans le conflit et l'affrontement ? Pourquoi n'existait-il pas de solution pacifiste ? Tout cela me fatiguait et me rendait soudainement nauséeuse, me rappelant dans l'état précaire dans lequel je me trouvais. Comme toute réponse dans l'immédiat, je me contentais de hocher gravement du menton tout en me passant les doigts sur le front pour essayer de ne pas sombrer dans les abysses d'un potentiel évanouissement, et pour reprendre tout à fait contenance, il me fallait retourner chez moi.

C'était apparemment aussi ce dont l'étudiant de la maison Serdaigle avait besoin aussi, car une fois Soay foulée, je croyais voir comme un poids libérer ses épaules, comme si, d'un coup, il avait trouvé l'oxygène dont il manquait. Sans me gratifier d'avoir pu lui venir en aide au moins de la sorte, je restais fidèle à moi-même tout en l'invitant dans ma demeure et en l'encourageant à faire comme s'il était chez lui. Après tout ici, je n'avais pas grand-chose à cacher, cette maison était le reflet de ce que j'étais. Chaleureux, un peu hasardeux et désordonné, de part et d'autre un peu vide, comme si combler les murs (ou mon âme) était devenu impossible. La roche rappelait une certaine froideur qu'il était possible de réchauffer (reflet de ma timidité et de ma solitude), et la présence des animaux, enfin, pouvait être la représentation de ces milliers de pensées et de rêveries qui m'habitaient, et qui, de temps à autre, s'enflammaient ou s'envolaient, simplement.

- Chaotique oui, pour sûr. Absurde… je haussais les épaules, un peu amusée. Peut-être des fois oui. Il n'en reste pas moins intrigant et… frénétique. Vivre ici à l'année ne me dérange pas malgré la solitude, parce que je sais que je ne suis pas totalement seule, et je ne parle pas là de fantôme. Je désignais du menton les deux oiseaux perchés. J'étais de ceux qui arrivaient à trouver en les créatures fantastiques la présence nécessaire pour me satisfaire. Si le besoin de parler à quelqu'un me venait, je leur parlais à eux. Après tout, j'étais une personne de surface sans aucune profondeur dans le sens où je n'avais aucun secret, aucun instant de ma vie particulièrement palpitant. Si le Blood Circle venait à me capturer un jour, il serait très déçu de cette prise sans aucune importance pour personne, puisque j'étais trop seule, trop insignifiante. Disons que… pour une personne comme moi, c'est un lieu de repos complet que je ne peux trouver ailleurs. Dans aucune jungle, aucun champ, pas même dans la forêt interdite. Je suis très attachée à ma terre natale, et je sais que mon sang y était pour quelque chose.

Terre protégée et héritée des différents chefs de clan de l'époque, jusqu'à ce que MacFusty parvienne à sortir son épingle du jeu. Jusqu'à ce qu'il conquière toutes les terres et que, par devoir, il en vint à protéger la race de dragons natifs de ces terres. Quel meilleur protecteur pouvaient avoir les Noirs des Hébrides sinon celui qu'il côtoie depuis des décennies ? L'interrogation du jeune homme me fit perdre tout sourire et mes épaules s'affaissèrent comme s'il venait d'absorber mon âme. Ne plus travailler avec les dragons ? Mon regard vint se poser sur une photo dont le cadre était posé sur l'une des bibliothèques. Mon propre portrait s'y trouvait, mes traits étaient très facilement reconnaissables puisque je n'avais guère changé en une quinzaine d'années. À mes côtés se tenait un garçon dont la chevelure était un peu anarchique, au sourire fier. Il avait un bras passé autour de mes épaules, l'air goguenard, tandis que moi, je semblais presque boudé. Entre nous, il y avait un air de famille évident.
La dragonologie, ça avait toujours été ma raison de vivre, mais aujourd'hui j'étais un simple professeur de l'école de sorcellerie. Mes travaux prenaient indéniablement du retard ainsi que mes recherches. Je me plongeais dans un métier qui n'était pas taillé pour moi du fait que j'étais effrayée par la simple présence d'un seul élève (alors, imaginons une classe entière…). Mais puisque le sang draconique continuait à faire battre mon cœur, pouvait-on dire que j'avais cessé de travailler avec eux ? Je ne trouvais pas immédiatement de réponse, et c'est en clignant maintes fois des paupières que je souriais maladroitement avant de reprendre la parole.

- Si je vis ici c'est aussi pour continuer à travailler avec eux. Lorsque la tempête sera passée, je peux vous montrer, si vous le souhaitez. Me tournant en direction de la cuisine pour tenter de cacher mon état, j'ouvrais une boite aux fines dorures pour y chercher un sachet de thé. Mais il est vrai qu'être enseignante me prend du temps. J'en ai donc moins à leur accorder.

Oui, mais voilà, j'étais pourtant l'héritière de la branche principale des McFusty, celle qui devrait encore porter le nom plus loin, pour que jamais il ne s'éteigne, pour que les dragons puissent continuer à avoir leurs protecteurs. Cette responsabilité était revenue à mon frère avant l'accident… Le simple fait de songer à me marier et perdre mon nom était un véritable cauchemar.
Tant bien que mal, j'essayais de garder les pieds sur terre tandis que mon invité me fit part de ses goûts en matière de boisson. Opinant du chef, j'ouvrais un frigo presque vide (ce qui pouvait en partie expliquer ma maigreur du moment).

- Mmh, il me reste du jus de pomme du verger de mes parents. J'attrapais la bouteille en verre et allais la poser sur la table, accompagnée d'un verre. Pour l'eau, il vous suffit de vous servir au robinet.

Laissant la liberté au garçon de se promener chez moi et de se servir comme il le souhaitait, je venais m'asseoir sur le canapé, sentant mes forces m'abandonner petit à petit. Parler de ma famille et de mon travail de dragonologiste pouvait être particulièrement éprouvant pour moi, surtout en cette période. Et, parce que je sentais, par empathie, les nerfs du garçon lâcher aussi, comme si nous étions deux marins perdus en mer depuis trop longtemps, à bout de force, j'eus la délicatesse de détourner mes prunelles de son dos tandis qu'il regardait ma bibliothèque. Ramenant la théière et ma tasse de thé jusqu'à moi d'un petit coup de baguette, je plongeais mon regard sombre dans les flammes dansantes dans le foyer de la cheminée avant de sourire tranquillement.

- Pourquoi pensez-vous que vous dérangeriez Grishkin ? L'Oiseau de feu, en entendant son nom, redressa majestueusement la tête, et, comme s'il était mes yeux, il regarda Eirian sans osciller, restant impérieux et mystérieux. Le Phénix était une créature très rare, mais aussi très énigmatique. Il se présentait aux personnes les plus purs, tout le moins, de ce que l'on disait d'eux. Est-ce que mon jeune invité ne se sentait-il pas légitime d'être en présence d'une telle créature ? À sa nouvelle question, je souriais une nouvelle fois tout en étendant mes jambes sur le canapé, me mettant à l'aise. Non en général ma famille vient s'occuper des animaux lorsque je suis à Poudlard. Les indésirables sont surtout les insectes et les petits rongeurs qui pourraient s'en prendre à mes diverses plantes ou réserves. J'essaye de faire en sorte que cet endroit reste le mieux entretenu possible durant mon absence. Parce que je ne m'étais jamais totalement établie à Poudlard, parce que Poudlard n'avait jamais totalement été ma maison. Ma véritable maison, c'était les Hébrides. D'une œillade entendue, j'osais revenir un instant sur Eirian avant de reprendre. Vous n'avez pas idée. Ici, il n'y a pas de voisins, pas de bruits différents que celui de la nature environnante. Ici, j'arrive à me mettre en condition pour mes recherches et mes diverses expériences et thèses. Je suis cachée aux yeux du monde et ça me va très bien d'être oubliée. Aussi, il n'y a que ici que je parviens à me ressourcer, quelle que soit la situation.

Ou presque, car c'était ici que je me terrais depuis le début de l'été pour pleurer la mort de mon frère. La présence du garçon chez moi était juste une pause, une petite parenthèse dans ce flot continu de larmes qui noyait mes joues et mes iris.
Observant un instant de silence, je plongeais mes lèvres dans mon thé tandis que le feu attirait à nouveau toute mon attention. Sans le surveiller, le laissant se promener et se servir comme il le désirait, je tournais délibérément le dos à Eirian, montrant que je lui faisais pleinement confiance. Bien que la fatigue commençait à s'imposer à moi, je luttais contre, parce que je ne réussissais pas à trouver une quelconque once de repos en cette estivale période. Alors, j'en vins à songer à notre conversation dans le parc à Londres, à ce qu'il avait dit à propos de la guerre. Enfin, je me décidais à y répondre, sans être certaine qu'il comprenne le rapprochement après de si longues minutes.

- Peut-on seulement rester inchangé, peut-on seulement ne pas se perdre alors que nous sommes en guerre, à votre avis ? J'abhorre la violence, pourtant j'ai été obligée de faire du mal à certaines personnes, soit pour accomplir à bien une mission de l'Ordre, soit pour me défendre. Ces simples actes m'ont déjà profondément changée, je le sais, et je pense qu'il en va de même pour chacun d'entre nous. Cette perspective est… vertigineuse et effrayante, vous ne trouvez pas ?


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Mar 30 Mar - 22:17
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Force est de constater que vous n’êtes pas si nombreux à vouloir la paix, une véritable paix, non la simple conclusion des conflits avec deux sociétés qui ressassent les événements et n’attendent qu’une nouvelle occasion d’en découdre. Ce que tu veux, toi, c’est une pleine acceptation de l’autre, de la compréhension, de la tolérance, tout ce qui permettrait de construire une société véritablement apaisée. Que les sorciers étudient le monde moldu à Poudlard, que ce ne soit pas une option pour quelques marginaux, et que les moldus connaissent l’univers sorcier. Les bases de l’un et de l’autre pour se connaître, sans que ça oblige à aller plus loin. C’est possible, ça se voit au nombre de sang-mêlés, même si la majorité d’entre eux vivent davantage dans le monde magique. Et il y a les nés-moldus, comme toi – alors, certes, ton cas est tout sauf un exemple, mais vous montrez bien qu’on peut grandir dans les deux mondes. Sauf qu’à cause de cela, on te reproche de prendre systématiquement la défense des moldus, « c’est normal, tu as grandi avec eux, tu leur cherches des excuses, tu te voiles la face, tu ne comprends pas ce que vivent les sorciers ». Comme si tu étais forcément biaisé.

Pourtant, plus que d’autres, tu aurais de quoi haïr les moldus, entre ton père qui veut ta mort et a capturé ta mère, et… l’autre, celui qui s’en est pris à toi. Mais ce sont des cas particuliers, tu n’en tires pas des généralités à l’emporte-pièce, comme le font certains sorciers. Pour autant, tu as bien conscience que cette idée de paix a du mal à faire son chemin, notamment du côté des sang-pur. Trop souvent, tu as entendu leurs insultes, les sang-de-bourbe qui résonnent toujours à Poudlard même si tu as fait ravaler leurs paroles à la plupart d’entre eux. Pour certains, tu n’es pas un véritable sorcier, tu n’aurais jamais dû aller à Poudlard, tu n’avais rien à y faire. Tu repenses à ce Mangemort en avril, prêt à te torturer, à te graver l’injure dans la peau, pour te rappeler où se trouvait ta « véritable place » : à ses pieds. Sans parler de la façon dont ils considèrent les moldus, qu’il faudrait réduire en esclavage d’après eux. Entre eux et les dirigeants fanatiques du Blood Circle, ton idée de la paix paraît bien risible, presque pathétique, trop naïve et idéaliste. Pourtant, tu as toujours envie d’y croire. D’imaginer que c’est possible. Il y a Raphaël qui travaille avec l’Ordre, Carl et Robin qui se posent des questions et remettent de plus en plus en question leur allégeance et l’attitude du Cercle. Il y a de l’espoir, et tu veux t’y raccrocher de toutes tes forces.

Tu n’es pas naïf, tu te doutes que ça demande un énorme travail de négociation pour que les deux parties en sortent satisfaites, que personne ne se sente lésé et rumine sa vengeance. Que c’est plus simple de se battre, en un sens. Il y a tellement à construire pour avancer, pour faire justice sans se laisser emporter… Mais ce n’est pas avec le triumvirat et le trio paternel Kane, Mackenson et Terry que vous allez vous en sortir.
En soi, c’est un soulagement de voir que d’autres partagent ce point de vue. Abigail ne revient pas sur le sujet, peut-être trop lourd, alors que vous n’êtes déjà pas bien vaillants tous les deux.

L’arrivée sur l’île est une bouffée d’air frais, au sens propre comme au sens figuré. Vous êtes seuls au monde ou presque, la mer et le vent dansent autour de vous, puissants et vivants, et pendant quelques secondes, tu te sens plus léger. Tu suis Abigail jusqu’à chez elle en essayant de profiter au maximum de ce que tu vois, les rochers âpres, la maison petite de l’extérieur, mais qui ne l’est pas tant que cela une fois à l’intérieur. Tu soulignes le contraste entre l’endroit et la capitale dont vous venez. « Frénétique », c’est le mot en effet, ce monde qui va beaucoup trop vite et où tu te sens perdu la plupart du temps, toujours en décalage, comme si tu n’évoluais pas tout à fait sur la même ligne que les autres, légèrement placé en parallèle, sur le bord du chemin, sans savoir comment les rejoindre.

— Un peu trop frénétique, parfois. La plupart des gens ont du mal avec la solitude, mais du moment qu’elle est voulue et choisie… elle n’est pas dérangeante.

Et ça ne te surprend pas que la compagnie des oiseaux lui convienne. Souvent, c’est le rôle que tient Nox l’été. Tu le laisses libre puisque tu ne peux pas vraiment trimballer sa cage partout et il serait malheureux d’y rester trop souvent, mais il revient toujours quémander ses friandises et te tenir compagnie. La plupart du temps, c’est très bien. Et d’autres fois, ça ne suffit pas. Tu aimerais qu’il soit capable de te répondre. La solitude devient de plus en plus difficile, surtout dans ces conditions. Mais tu n’y peux pas grand-chose pour le moment. Dire que pendant l’année, tu aspirais presque à te retrouver tant il était difficile de gérer tes condisciples de dortoir. Tu ne sais vraiment pas ce que tu veux.

— Je crois que je comprends. Vous êtes pleinement chez vous ici, vous pouvez vraiment vous y ressourcer.

Au sens le plus intime et le plus profond, ces terres lui appartiennent autant qu’elle leur appartient. Tu ne l’as jamais vécu, enfant de la ville quand tu étais petit, et déraciné ensuite. Aucun des multiples appartements où tu as vécu n’a jamais vraiment constitué un chez-toi, vous saviez que vous pouviez déménager du jour au lendemain – non, même pas déménager, simplement partir pour ne plus revenir, avec juste le minimum vital, en laissant tout derrière vous. Même pendant tes premières années à Poudlard, où vous avez eu un peu de stabilité, tu n’as jamais pu te défaire de ce sentiment de qui-vive, ni de l’impression que cet appartement, comme tous les autres, n’était que temporaire. Un lieu de passage.
Tu te rends tout de suite compte que ta question sur les dragons était plus que malvenue. Abigail se recroqueville presque devant toi. Tu as touché une corde sensible, et tu ne sais pas comment faire marche arrière.

— Pardon, c’était indiscret.


Elle s’est tournée vers des photos posées sur l’une des bibliothèques. Tu la reconnais sans mal, elle n’a pas beaucoup changé – l’inconvénient de faire plus jeune que son âge. Le garçon à côté lui ressemble, indéniablement quelqu’un de sa famille. Le silence s’étire, tu fais mine de regarder ailleurs pour lui laisser le temps de se reprendre. Travailler avec eux ici ? Tu ne comprends pas vraiment, l’île est trop petite pour en abriter. Bien sûr, il y a toujours le transplanage, mais dans ce cas être ici ou ailleurs n’y changerait pas grand-chose. Tu n’as jamais eu l’occasion de voir des dragons en chair et en os, mais tu t’imposes déjà bien assez chez elle sans en rajouter.

— Non, faites comme vous le sentez, je ne veux pas vous déranger davantage.

Face à ton refus de boire un thé, elle ouvre le réfrigérateur – guère rempli, de ce que tu peux en voir, et elle n’a pas l’air d’avoir profité de son tour à Londres pour compléter ses courses. Des soucis avec la nourriture ?

— Du jus de pomme, c’est parfait, merci.


Tu as tendance à abuser du jus de fruits, au moins ça te donne du sucre. Elle te laisse te servir, et ça te soulage. Au moins, tu n’auras pas l’air étrange à la regarder faire – comme si elle allait glisser le moindre produit dedans. Tu vrilles complètement, et des réflexes absurdes dont tu pensais t’être débarrassé ne cessent de revenir.

Le verre rempli à la main, tu reviens vers les bibliothèques tandis qu’elle s’assoit dans le canapé. Tu ne peux t’empêcher de glisser une remarque sur le phénix, rassuré qu’il t’accepte. Le déranger… Le phénix te regarde comme s’il lisait en toi, pouvait voir ton âme. Ça doit être particulièrement moche. Tu baisses machinalement le regard sur tes manches, ce qu’elles cachent et les taches brunes qui sont toujours là. Et tout ce magma noir et informe qui bouillonne en toi, les souvenirs et les cauchemars, les horreurs qui te hantent et que tu n’arrives plus à garder enfouies, tous les mensonges qui te constituent et que tu supportes de moins en moins… Tu n’es qu’une coquille vide, un assemblage de bric et de broc, qui tient debout avec tous les mensonges que tu entremêles en permanence. « Eirian Howl » n’a pas grand sens en soi.
Un tremblement t’échappe, tu resserres les doigts sur ton verre pour te reprendre. Bon sang, tu n’as pas à te retrouver au bord des larmes juste pour ça ! On n’est qu’au début juillet, qu’est-ce que ça va être si tu dois tenir deux mois comme ça ? Tu ne sais même pas si tu vas y arriver. Ce ne serait pas très grave en soi, s’il n’y avait ta mère. Si tu n’es plus là… personne ne se souciera d’elle. Il faut que tu tiennes pour elle. D’un autre côté, la réaction du phénix est plutôt rassurante, c’est sans doute ta tendance à voir les choses plus noires qu’elles ne sont, ce n’est pas tant ta situation qui est grave que ton incapacité à gérer alors que tu devrais y arriver. Tu souffles, la voix un peu vacillante :

— Les phénix… ne se montrent qu’aux âmes pures, n’est-ce pas ? Je ne pense pas que ce soit mon cas. Mais ce n’est pas non plus aussi sombre que je l’imaginais. Non que je sois un criminel, tu ajoutes en hâte, c’est juste que… je ne m’y attendais pas.

À ce stade, il vaut mieux que tu la fermes, tu racontes n’importe quoi. Dès que tu te relâches un peu, plus rien ne va. Tu frissonnes toujours, tu te rapproches de la cheminée. La chaleur te fait du bien.
Elle sourit lorsque tu l’interroges sur la plante combative.

— Heureusement qu’elle monte la garde alors.


Même si l’imaginer s’en prendre à des rongeurs n’est pas des plus agréables. Tu prends une gorgée de jus de pomme – absolument délicieux – même s’il peine à franchir ta gorge nouée. Tu la rejoins complètement sur le silence et le calme. Sans présence pour te hérisser les nerfs et te mettre en alerte.

— Ce doit être le bonheur de travailler dans le silence, sans personne pour vous déranger, sans bruit indésirable. C’est très reposant.

Ton regard se perd vers la cheminée.

— Moi aussi, j’aimerais bien me faire oublier, disparaître un peu… Échapper à la course du monde quand ça va trop vite et trop fort, et juste… fermer les yeux et me laisser aller. Me reposer.

Tu ne l’as jamais dit à voix haute. Prononcer les mots te fait prendre conscience à quel point ils sont vrais. À quel point tu aimerais disparaître, te fondre, te dissoudre dans le paysage, que plus personne ne s’intéresse à toi. Qu’on te fiche la paix pour de bon, que tu n’aies plus à maintenir les façades, les apparences, à faire semblant d’aller bien, à t’épuiser à essayer de gérer sans y arriver. Dormir sans cauchemars, ni même de rêves, un sommeil de néant où tu pourrais tout oublier.

Tu hésites devant Abigail qui te tourne le dos – tu apprécies qu’elle ne cherche pas à tout prix à te regarder –, puis tu la rejoins, t’installes de l’autre côté du canapé, profitant toujours de la chaleur du feu. Ses premières phrases te prennent au dépourvu avant que tu repenses à la conversation entamée dans le parc.
Tu hoches la tête. Tu as appris à tracer la limite, mais il ne suffirait pas de grand-chose pour transformer les coups que tu portes pour blesser en frappes mortelles. Ta mère te l’a appris parce qu’elle n’avait pas le choix ; toi, tu as toujours fait en sorte de seulement blesser, de ne jamais faire plus que mettre hors de combat. Tu n’es pas ton père, tu n’es pas le tueur qu’il voulait que tu deviennes. Tu ne veux pas ajouter de sang à celui qui a déjà été versé. Même si tu sais aussi qu’un jour, tu n’auras peut-être pas d’autre solution. Est-ce qu’on peut vraiment s’y préparer ? Tu en doutes.

— C’est effrayant, oui. On affronte des choses qu’on n’aurait jamais dû avoir à affronter, les batailles, les blessures, toute cette horreur de la guerre.

Même si en un sens, elle a toujours fait partie de ta vie. Tu avais sept ans quand les balles du Blood Circle te sifflaient aux oreilles et tu en portes encore les marques, tu en avais huit quand ta mère a tué sous tes yeux pour te sauver.

— On ne peut pas en sortir indemnes. Mais on n’est pas obligés de s’y perdre non plus. Vous abhorrez la violence, pourquoi ne pas chercher une autre façon de participer à l’Ordre ? Je veux dire… les combats sont la face la plus visible, mais il y a tellement de choses à faire à côté pour que nos deux mondes se comprennent, pour réfléchir à l’après… On peut se battre de différentes manières, sans que ce soit moins bien, ou moins important. C’est juste… différent.

C’est globalement aussi ce que tu as dit à Raphaël et Nymphéa en mai. S’ils ne sont pas à leur place sur le terrain, ils ont plein d’autres manières d’aider, notamment avec la chaîne de Raphaël pour dénoncer le Blood Circle, leurs actions communes… Toi, ça ne te dérange pas de te battre, c’est le seul endroit où tu peux te rendre utile, au moins tes compétences servent à quelque chose, même si elles étonnent un peu.


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falling to the depths

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You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
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To wanna surrender ?
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Dim 4 Avr - 23:18
Il y avait cela d'étrange que de parfois, ma route pouvait croiser celle de quelqu'un qui, apparemment, n'était pas prédestiné à me rencontrer, ou plutôt, que je ne sois pas prédestinée à le rencontrer. Nous en étions là avec Eirian, de mon point de vue. Même s'il avait pu être mon élève lors de mes remplacements, même s'il était un collègue au sein de l'Ordre du Phénix, il n'en était pas moins un parfait étranger pour moi. On ne peut pas connaître le monde entier (sauf lorsqu'on s'appelle William Ombrage). Pourtant, nous voilà là, lui chez moi en train d'essayer de se mettre à l'aise, la conversation se poursuivant un peu plus en profondeur. De temps à autre des questions respectivement posées semblent déranger l'un ou l'autre, alors nous faisons marche arrière en continuant de marcher sur des œufs afin de ne pas froisser l'autre. Cela dit, je n'étais pas quelqu'un qui était blessé facilement par les conversations, au contraire, plus les avis divergeaient, plus les débats étaient riches, lorsque bien sûr chaque parti avait l'intelligence de mettre sa fierté de côté et d'écouter les divers arguments de l'opposition.
Aujourd'hui avec le jeune étudiant de Serdaigle c'était encore différent. En lui, je voyais un confrère tout aussi blessé et mal au point que moi, mais également tout aussi las. Fatigué par la situation de guerre entre nous, accablé par le comportement de l'espèce humaine, curieux de ce que les autres (êtres, créatures ou non) pouvaient nous offrir sans vouloir en abuser. Dans un sens, j'étais soulagée, en ces temps difficiles, de trouver comme un allié pour réconforter mon âme. Peut-être était-ce aussi pour ça que j'avais souhaité l'inviter, pour que, une fois, une soirée, voire une nuit, je ne sois pas seule. Je ne sois pas abandonnée à un nouveau désarroi, à une nouvelle crise de larmes, même si la boule dans la gorge restait bien présente et était toujours aussi douloureuse.
Un monde frénétique, trop dur en général pour deux êtres comme nous, simples, bons vivants, tranquilles, qui pouvaient faire face aux tempêtes, mais qui préféraient les éviter. Un fin sourire complice illumina mon visage tandis qu'il me parlait de mon habitation et de ce que je pensais du monde extérieur, de ce retour à la normale.

- Merci de me comprendre. Vous savez, tout cela parait tellement étrange à bien des personnes qui me côtoient. Ils acceptent que j'apprécie l'endroit, mais ils n'en comprennent pas le sens profond. Au contraire, s'ils pouvaient m'expatrier ils seraient heureux. Comme si… la civilisation était une forme de survie, qu'elle était devenue obligatoire.

Bien sûr, je pouvais comprendre qu'être entouré, avoir au moins quelques voisins avait quelque chose de rassérénant. S'il arrivait quelque chose au moins on savait à qui s'adresser. Moi, ici, je n'avais vraiment personne. S'il m'arrivait un quelconque accident, rien ni personne ne m'entendrait. Fort heureusement, les parents d'Aïko (mon oncle et ma tante) vivaient sur une île non loin. C'était d'ailleurs eux qui venaient s'occuper de mes poules, de mes moutons et de mes fleurs lorsque j'étais absente, car en séjour à Poudlard.
Jetant un coup d'œil au jeune homme, je m'osais à une question peut-être indiscrète.

- Et vous ? Où êtes-vous pleinement chez vous ?

Sûrement allait-il me répondre à Poudlard, ou là où résidaient ses parents, mais je voulais en avoir le cœur net. Je n'étais pas certaine de ce que j'avais vu comme marques sur ses manches, j'avais même peut-être décidé de feindre ce que j'avais cru remarquer. Toutefois, je ne pouvais pas laisser ce garçon dans la détresse s'il y était en plein cœur.
D'un petit geste de la main doux, je lui signifiais que sa maladroite question était toute excusée. Après tout, il ne pouvait pas deviner à quel point le sujet de la dragonologie pouvait me toucher des fois, surtout lorsqu'il s'agissait de mon véritable métier. J'avais été particulièrement heureuse lorsque j'étais une dragonologiste à plein temps. Ça n'avait pas été une question financière qui m'avait arrêtée. Pourquoi étais-je devenue professeure, moi, petite sorcière bien timide, c'était surtout ça la véritable question à se poser. Mais moi-même n'avais pas totalement la réponse, ou alors je ne voulais pas la voir. Ainsi, comment Eirian pouvait-il le deviner à ma place, c'était absurde. Ses excuses étaient donc tout à fait acceptées, puis, à son refus, je plissais légèrement les yeux d'une œillade compréhensive, mais aussi un peu grave pour lui démontrer à quel point j'étais sérieuse.

- Puis-je me permettre un avis ? Je n'attendais pas son approbation pour continuer. Si vous êtes né, c'est pour une raison précise, je pense, même si vous ignorez encore aujourd'hui de quoi il s'agit. Qu'importe, les faits sont là. Vous êtes ici, parmi nous en ce bas monde. Alors… essayez de cesser de vous excuser de prendre de la place, aussi petite soit-elle. Vous avez tout à fait le droit d'être là où vous êtes aujourd'hui, et donc, si je vous fais une proposition, ce n'est pas par simple gentillesse ou abnégation : c'est parce que ça me fait plaisir.

Il était rare que je prenne une quelconque place de psychologue, ce n'était de loin pas une science que je maitrisais. En revanche, j'avais beaucoup travaillé la pleine conscience et je croyais dur comme fer à certaines choses qui n'étaient pas uniquement dues au hasard comme beaucoup pouvaient le croire. Ainsi, j'étais profondément persuadée qu'Eirian avait sa place dans ce monde, malgré les difficultés qu'il devait traverser en ce moment, et s'il était chez moi présentement, c'était aussi parce que je souhaitais l'aider. La dragonologie n'était pas pour moi uniquement une passion qui faisait battre mon cœur et qui gonflait mes poumons, c'était aussi une activité que j'appréciais énormément partager. Avec les conversations que nous avons eues jusque-là, j'étais persuadée qu'au fond, Eirian serait curieux. Après tout, peu de sorciers pouvaient se targuer d'avoir côtoyé un grand saurien, même si pour le coup, côtoyer était un grand mot.  
Car embrouillé, le jeune garçon l'était, et il fallait être sot pour ne pas le voir, car à constater sa gêne face à Grishkin, je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter davantage pour lui, néanmoins, je n'en laissais rien paraître. Tranquillement, je tendais la main en direction du phénix qui détourna alors son regard mystique de mon invité vers moi. Après un instant, il remue (dérangeant Gérard au passage), pour, d'un coup d'aile gracile, s'envoler jusqu'à moi et prendre place sur le canapé non loin de ma tête. Prunelles tournées vers lui, je le fixais un glissant un index tendre sur son poitrail, ce que le volatil de feu semblait apprécier.

- C'est ce qui est dit, qu'ils se montrent aux âmes pures, mais rien ne le prouve. Ce qui est certain, c'est qu'ils peuvent se déplacer d'un lieu à l'autre en s'embrasant tout simplement, un peu comme un Dirico. C'est ce qui les rend si rares et si impossibles à domestiquer. Peut-être un jour Grishkin ne reviendra plus jamais vers moi. J'osais jeter un regard à Eirian avant de revenir sur l'Oiseau de feu. Il est dit que Dumbledore lui-même était accompagné d'un phénix nommé Fumesec. Cela dit, même s'il était un éminent sorcier, je ne crois pas, d'après les dires, que nous puissions le considérer comme un homme à l'âme pure. Qu'en pensez-vous ? Encore une fois, mes prunelles sombres vinrent sur mon invité, sans insister, avant de se détourner une nouvelle fois. Les licornes sont des êtres absolument purs… mais j'avoue ignorer si un humain, en dehors d'un petit bébé, peut rester bien longtemps très pur… en dehors d'effectuer des meurtres, nous nous entendons.

J'ignorais si le jeune homme de la maison Serdaigle avait déjà pris la vie d'autrui, et quand bien même ça aurait été le cas, ça n'aurait rien changé l’avis que je me faisais de lui. En finalité, la question était si vaste qu'elle ne pouvait obtenir de réponse, c'était comme de voir répondre de manière censée à la question de qu'est-ce que la normalité. Tout dépendait des critères initiaux. À quoi donc se fiait la pureté ? Dans le fond, la licorne marchait par terre et pouvait détruire des pousses de plantes. Elle empêchait donc éventuellement un cycle de vie. Devait-on la blâmer pour ça ? Il y avait des critères que je ne saisissais guère tant ils étaient vastes et discutables, toutefois, je pouvais aussi en saisir une partie du sens.
D'un petit sourire amusé, je caressais les plumes rougeoyantes de mon phénix tandis que le jeune garçon continuait de déambuler chez moi sans que cela ne me dérange. Oui, heureusement que j'avais une plante gardienne même si, clairement, elle n'empêcherait pas à elle seule l'invasion du Blood Circle dans ma maison. Toutefois, maintenant qu'il était non loin, je pouvais sentir et constater davantage qu'il était au bord de la rupture, tout le moins c'était la sensation qu'il en dégageait alors que je voyais bien les efforts qu'il faisait pour garder contenance. Mais n'était-ce pas une presque rupture que j'avais cru voir à l'instant tandis qu'il regardait les flammes danser dans la cheminée ? N'était-ce pas un ersatz de confidence que j'entendais tandis qu'il m'avouait vouloir juste s'arrêter et prendre le temps de savourer le silence.
Battement de paupières tranquilles et paisibles, je détournais à mon tour les yeux dans la cheminée pour y observer les flammes.

- Ici, vous le pouvez.

Il n'y avait pas grand-chose à rajouter, tout le moins, je ne voyais guère quoi. Je n'étais pas très douée pour les grands discours, alors autant aller à l'essentiel. Ici, il était en sécurité, loin de tout, et ici il pouvait se faire oublier. Il n'appartenait qu'à lui de profiter de cette opportunité ou non.
Alors, je décidais de détourner un peu la conversation sur celle que nous avions plus tôt dans le parc, histoire de ne pas remuer le couteau dans une plaie encore à vif.
Alors qu'il me faisait part de son avis que je trouvais extrêmement intéressant, je lui fis signe de la main pour l'inviter à s'installer à son tour sur le canapé. Bientôt il allait me donner le tournis à rester ainsi debout, et s'il y avait bien une chose que je voulais éviter, c'était de m'évanouir devant lui, déjà que je devais constamment me battre avec ma fatigue actuelle. Déjà, si je me décidais à manger, c'était sûr que j'allais mieux me sentir, mais le simple fait de m'imaginer mâcher un aliment, ne serait-ce qu'une soupe, m'épuisait davantage, sans compter que j'avais une flemme monumentale. Par ailleurs, j'en venais à m'en vouloir un peu, car j'avais invité Eirian sans penser à un quelconque repas. S'il voulait manger, il allait devoir se contenter d'air frais et de pluie… et un nouveau transplanage serait trop risqué dans mon état. Je poussais un soupir avant de répliquer, l'air las tandis que, comme s'il comprenait mon état, Grishkin vint frotter son bec contre mes cheveux.

- C'est déjà ce que je fais en réalité, essayer d'aider autrement. J'essaie d'éduquer les créatures pour qu'ils soient d'un soutient inattendue… mais ne serait-ce que pour ça, j'ignore si je dois me haïr puisque je mets en danger les animaux fantastiques à la place de nous… humains imbus de nous-mêmes, et de moi qui, trop égoïste, décide de ne pas combattre, mais d'envoyer d'autres au casse-pipe… J'étais constamment tourmentée par mon allégeance depuis que j'avais rejoint l'Ordre, pourtant, je ne me plaignais jamais et je faisais ce qu'on me demandait. Parce que j'étais persuadée au fond de moi que ma cause était juste, et parce que je croyais en ma famille, qui était membre de l'Ordre depuis de très nombreuses années. J'avoue que jusque-là je n'ai pas trouvé d'autre alternative… je ne suis pas une excellente oratrice ni une sorcière particulièrement douée.

En gros, j'étais un boulet malgré mes excellentes compétences en magizoologie et en botanique. Certes, je savais aussi me débrouiller en sortilèges, mais ça n'avait rien de comparable à un épéiste émérite. Et puisque j'étais sur la pente glissante du ridicule, je décidais de continuer. Tant qu'à faire.

- Au fait je viens d'y songer, mais… je n'ai fait aucune course… nous n'avons donc rien à manger pour ce soir… auriez-vous voulu quelque chose ? Je peux encore me déplacer dans le commerce le plus proche si vous le souhaitez.

Me déplacer, m'évanouir, puis revenir et me reévanouir. La soirée s'annonçait pour le moins originale.


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Eirian Howl
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Serdaigle OP
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Lumos
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Mon allégeance : Ordre du Phénix
Jeu 8 Avr - 20:58
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Cette conversation te déstabilise plus que tu ne le pensais – et tu n’imaginais pas qu’en t’arrêtant pour écouter Abigail jouer de la guitare, tu atterrirais chez elle. Tu as l’impression d’osciller sur une corde raide et le moindre souffle de vent peut te précipiter dans le vide, sans que tu aies de quoi te raccrocher. D’un côté, elle t’offre à peu près tout ce que tu espérais, un peu de compagnie, quelqu’un qui te comprend, de l’apaisement, un changement d’air plus que bienvenu qui t’aide à respirer de nouveau, un endroit où te poser pour quelques instants et tu en as terriblement besoin. Et de l’autre… elle t’offre à peu près tout ce que tu espérais et ça t’angoisse. Parce que tu ne sais pas comment le prendre, ni y réagir convenablement, parce que tu n’étais pas prêt à cela et que même si c’est un changement positif, ça n’en reste pas moins un bouleversement de tes plans et tu as du mal à reprendre pied. Parce que vous vous comprenez et que, malgré toi, tu abaisses une partie de tes barrières, alors que tu ne la connais que très peu. C’est peut-être la bonne distance finalement : pas une inconnue complète, pas assez proche pour que ta brusque faiblesse attire trop l’attention, pour que ton attitude dénote trop par rapport à d’habitude. Tout chez elle t’invite à baisser les digues, et pourtant, tu ne le peux pas. Si tout craque, tu ne te relèveras pas, tu n’es pas capable d’affronter le déferlement, alors mieux vaut tout ravaler au fond de toi. Espérer que ça tienne encore quelques semaines. Quelques mois. Elle comprendrait ce que tu portes, peut-être. Mais vous êtes aussi fragiles, aussi blessés l’un que l’autre. Tu n’as pas à lui imposer un poids en plus. Alors, tu prends son invitation pour ce qu’elle est : un perchoir abrité pour quelques heures avant de reprendre ton vol dans la tempête. Et c’est déjà beaucoup.
Tu espères que ta présence lui fait du bien, soulage un peu la peine qu’elle porte, ne serait-ce qu’en lui changeant les idées, en la forçant à se concentrer sur autre chose. Si tu peux lui apporter quelque chose en échange de ce qu’elle fait pour toi… tu en seras heureux. Comme toi, elle a peut-être besoin de quelqu’un qui comprenne, sans trop la solliciter, qui n’ait pas besoin de poser dix mille questions pour cela. Qui n’ait pas besoin non plus de tout savoir. Juste de partager un moment de paix à deux, rompre un moment la solitude, avant de se relever et de continuer.
Quoi qu’il en soit, vous partagez le même ressenti face au monde, trop frénétique, trop bruyant, trop rapide pour vous. Son entourage ne saisit pas son besoin de solitude, ni pourquoi elle aime tant son île – le simple fait que ce soit une île suffit déjà pour toi.

— Comme si la civilisation était le remède à tout… C’est rassurant, mais ça enferme aussi, elle nous oblige à être toujours en action, nous fait oublier le silence et la solitude, et ce qu’ils peuvent nous apporter. Vivre ici, c’est accepter de se retrouver seul avec soi-même, de se voir sans concession, tel qu’on est… et j’ai l’impression que les gens aujourd’hui… ont peur du silence, d’avoir de nouveau du temps sans courir partout, de se retrouver face à eux-mêmes. Du coup, oui, la civilisation est un moyen de survie pour eux, elle leur évite ça.

Alors, certes, tu comprends aussi l’envie d’avoir des voisins en cas de problème, pour discuter parfois… mais de ce point de vue-là, la magie offre l’immense avantage d’abolir les distances. Et il est aussi facile d’appeler à l’aide avec une baguette qu’avec un téléphone. Abigail te jette un coup d’œil. Où est-ce que tu es chez toi ? Parce que c’est elle, parce que ça ne sortira pas d’ici, parce que tu n’as pas envie de mentir encore, tu lâches un morceau de vérité.

— Nulle part.

Que tu amendes aussitôt.

— Je suis très bien chez mes parents et à Poudlard, ce n’est pas la question. Mais… c’est prétentieux et égoïste, j’ai tout ce qu’il me faut… mais c’est comme s’il manquait toujours quelque chose. Je ne sais pas quoi.

Un endroit pleinement à toi, sûrement. Tu adores Poudlard et ce sera un crève-cœur de dire adieu au château à la fin de l’année prochaine. Il t’a offert sécurité et protection, t’a ouvert les portes du monde magique, tu y as grandi et un morceau de toi restera toujours là-bas. Il a été un foyer, plus encore ces dernières années où il a été ta seule maison, d’une façon différente d’avec ta mère. Le seul problème, c’est le dortoir, la proximité des autres. Votre appartement… ta mère et toi en avez fait votre chez-vous, mais ce n’était pas vos meubles, il n’y avait que peu de choses qui vous appartenaient vraiment, et tu n’as jamais pu te défaire de cette sensation de provisoire, qu’un jour ou l’autre vous partiriez parce que ton père vous aurait retrouvés. Là-bas, tu ne défaisais jamais complètement ta valise, tu étais prêt à déguerpir à n’importe quelle heure du jour et de la nuit avec le minimum vital – ta malle de Poudlard, en gros. Il n’y a qu’à Poudlard où tu pouvais la vider sans crainte, sûr que rien ne se passerait au cours des dix mois à venir. C’est ton vœu le plus cher, en dehors de retrouver ta mère et de vouloir la paix : avoir un endroit à toi, où tu pourrais poser tes affaires sans crainte, où tu serais à l’abri. Qui serait chez toi au sens le plus profond. Mais ça non plus, tu ne peux pas en parler.

— Sans doute un peu plus de calme. À Poudlard, il y a les dortoirs. Et à la maison… on est cinq, il y a toujours du mouvement. Je ne m’en plains pas, mais c’est parfois… fatigant.

Elle excuse ta question maladroite sur les dragons d’un geste de la main. Mal à l’aise cependant, tu n’oses pas accepter sa proposition. Elle te retourne un coup d’œil, l’air sérieux. Tes doigts se crispent sur ton verre. Ses paroles te prennent au dépourvu. Touchent terriblement justes aussi. Pourquoi est-ce que tu es né ? Surtout, pourquoi est-ce que tu es encore là ? Est-ce que c’est pour voir ta famille se déchirer par ta faute, ton père s’ancrer davantage dans sa haine de la magie, ta mère changer d’avis sur ses convictions ? Si c’est seulement pour ce dernier point, tu en es déjà heureux, tu n’aimes pas l’imaginer en tueuse ou chasseuse de sorciers. Mais est-ce que tu valais vraiment tous les sacrifices qu’elle a faits pour toi, toutes ces années de cavale, guidée par la seule idée de te protéger ? Est-ce qu’elle n’aurait pas été plus heureuse, mieux du moins, autrement ? Quand tu as osé lui poser la question, elle t’a assuré que non. Qu’elle recommencerait sans hésiter.
Quant à ta place… tu n’as aucune idée de ce qu’elle est, ni même si tu en as une. Et le fait est que tu ne sais plus quel espace occuper. C’était plus simple avant. Maintenant… tu te demandes parfois ce que tu fais encore dans ce bas monde. Ce que tes amis peuvent te trouver. Kayla, si vive et solaire, Elise toujours à tes côtés, Carl si heureux de retrouver son ami d’enfance, parce que tu maintiens avec soin ta façade devant eux… S’ils savaient… Tu as toujours l’impression de les déranger, tu essaies de peser le moins possible sur eux, de ne pas leur ajouter des problèmes. Tu crains plus que tout leur rejet.
Tu n’arrives pas à concilier tes deux identités, à donner du sens à tout ça. « Nathan Lancaster » est mort depuis des années, tragique victime d’un fait divers familial – tu te souviens des unes de journaux, ça faisait bizarre de voir ton nom s’y étaler en grandes lettres à côté du constat simple et définitif. « Eirian Howl » n’est qu’un assemblage de mensonges auxquels tu t’efforces de donner corps. Un corps flottant, mouvant, dont tu n’es même pas sûr qu’il t’appartienne encore vraiment. On te l’a déjà pris, comme on a pillé tes souvenirs, sans vergogne, sans scrupules. Comme si ça ne te faisait rien – comme si on se moquait de ce que ça te faisait, plus probablement. Comme s’il n’y avait qu’à se servir. Tu avais réussi à te débarrasser de ce sentiment, mais il revient avec d’autant plus de force ces derniers temps. Et ta lame, la douleur que tu t’infliges et que tu contrôles, le sang qui coule ne suffisent pas à le chasser. Les cicatrices non plus ne suffisent pas pour te dire que tu maîtrises tout.
Alors, l’entendre dire que tu as le droit d’être là, que si elle te propose quelque chose, ce n’est pas seulement pour être polie… Que tu comptes, d’une certaine manière, ça te remue et ça te serre le cœur, ça secoue toute cette partie de toi que tu n’arrives pas à gérer. Pour cette fois, tu ne déranges pas.
Tu ne sais pas combien de temps tu es resté silencieux, perdu, secoué, toujours aussi crispé. Tes doigts te font mal à force de te cramponner au verre – c’est presque étonnant que tu ne l’aies pas déjà brisé sous la pression. Les larmes te montent aux yeux et tu les ravales de quelques battements de paupières. Non, non, non. Pas maintenant. Il te faut quelques instants encore pour arriver à parler.

— Je ne sais pas vraiment pourquoi je suis né, ni quelle est ma place. Je finirai sûrement par trouver. Mais vous avez raison. Je suis désolé. Enfin… je serais ravi d’accepter votre proposition.

Ta voix vacille un peu. Et le phénix n’arrange rien à ton fouillis émotionnel. Tu es complètement en vrac et ça doit transparaître malgré tes efforts pour garder une allure normale. Abigail tend la main vers Grishkin. Tu le suis des yeux tandis qu’il va se poser à côté d’elle, suis le geste d’Abigail. Même sans y connaître grand-chose aux phénix, ça se voit qu’il est content.
Rien ne prouve qu’ils se montrent aux âmes pures, mais ils restent exigeants, et bien peu nombreux sont les humains qui peuvent les côtoyer et s’attacher leur fidélité. Quant à Dumbledore… Oui, c’est vrai. Tu as beaucoup lu sur la guerre contre Voldemort et le fait est que l’ancien directeur de Poudard dissimulait pas mal de choses et avait une certaine tendance à la manipulation.

— Je suis d’accord. Il était assez retors… Fumseck avait sans doute d’autres raisons de rester à ses côtés. Il paraît que c’est de lui que vient le nom de l’Ordre du Phénix. J’espère que vous vous plairez encore longtemps dans la compagnie l’un de l’autre.

L’Ordre porte bien son nom, même s’il est malheureux qu’il ait encore à renaître de ses cendres pour affronter un nouveau danger.

— Je ne pense pas pour l’être humain… Il y a des choses pires que d’autres, bien sûr, mais qui pourrait se targuer de n’avoir jamais menti, jamais eu de pensée colérique, ou tout ce qu’on peut imaginer… C’est une vaste question, et qui pourrait décider des critères et des limites ?

Les licornes et les phénix ont sans doute leurs critères bien à eux. Et encore… quid des licornes capables d’embrocher un être humain s’il s’approche trop d’elles ? Au moins, cela te rassure vis-à-vis de Grishkin – et si ta présence ne lui plaisait vraiment pas, il n’aurait pas eu de mal à te le faire sentir.
Tu souris tandis qu’elle caresse doucement le phénix, qui a l’air toujours content. Cela t’offre un peu de répit aussi, tu te sens toujours instable, au bord de la rupture, ballotté sur cette corde raide, et tu n’arrives pas à te ressaisir pour de bon. Tu n’y parviendras sans doute pas ici où tout te touche beaucoup trop, où tu trouves ce que tu cherchais, où la douceur et la compréhension d’Abigail t’apportent du baume au cœur. Te reposer… oui, ici, tu le peux. Tu es en sécurité, au chaud et au sec, dans un endroit accueillant et confortable, silencieux, à l’opposé des immeubles gris et sinistres où tu t’échoues d’ordinaire. Personne ne te trouvera. Un autre nœud se dénoue dans ta poitrine, une pointe de soulagement naît, presque douloureuse sous toute la tension qui te traverse. Tu penseras plus tard à tout ce qu’il te faudra reconstruire et remettre en place pour ne rien laisser transparaître. Mais ce soir, tu peux être un peu plus toi-même.

— Merci pour tout ce que vous m’offrez. C’est… exactement ce qu’il me fallait, cette pause loin du monde. La période est un peu compliquée et j’avais besoin de prendre un peu de distance.

Compliqué, le mot derrière lequel tu entasses tout ce qui ne va pas, mais que tu ne prononces pas à voix haute d’ordinaire. Tu as déjà croisé les regards inquiets de certains, entendu les questions muettes, choisi de ne pas y répondre. Parfois, tu aimerais qu’ils les posent à voix haute. Entendre ce « qu’est-ce qui ne va pas ? Pourquoi ? ». C’est absurde, tu ne pourrais pas y répondre. Mais depuis le temps, tu n’es plus à une contradiction près. Comme tu aurais voulu entendre tes condisciples de dortoir te demander « pourquoi ces cauchemars » au lieu de se contenter de grommeler parce que tu les as encore réveillés. Ils ne l’ont jamais fait. C’est d’autant plus idiot que vous n’êtes pas proches et que tu ne pourrais pas non plus dire la vérité.

Tandis que vous revenez sur l’Ordre, elle te fait signe de t’asseoir et tu prends place sur le canapé. Tu as toujours ton verre à la main, mais tu n’es pas allé au-delà des quelques gorgées déjà bues. Il est pourtant délicieux, ce jus de pommes. Mais ta gorge est trop serrée.
Il n’est pas simple de trouver sa place dans le conflit qui se joue. Enfin, non, c’est peut-être le seul endroit où tu sais à peu près où est ta place. Sur le terrain. Tu en as l’habitude, tu aimes bien et si ta présence fait en sorte que quelqu’un de moins préparé ne se retrouve pas sur le champ de bataille, c’est parfait. Quant à éduquer les créatures… le fait est que tu aurais tendance à les tenir à l’écart. Mais tout dépend de quoi on parle, un dragon est presque invulnérable face aux armes moldues – à moins de sortir le canon anti-aérien, on ne sait jamais avec le Blood Circle.

— Je me dis qu’il est difficile de forcer une créature à faire ce qu’elle ne veut pas faire… mais ce n’est pas simple comme choix, entre les préserver et peut-être aboutir à davantage de pertes humaines, ou les impliquer et prendre le risque de les voir blessées ou pire, même si elles sont plus résistantes que nous.

Sans même parler de leurs ressentis. Quant aux autres possibilités…

— Je ne sais pas trop non plus ce qu’il est possible de faire, il y a des projets entre moldus et sorciers qui se préparent, pour que les deux mondes apprennent à se connaître et à se comprendre, mais je ne sais pas bien où ça en est. Ce n’est pas une question d’être doué ou pas, on a tous des compétences différentes… je serais très nul comme orateur ou botaniste, mais je me débrouille en sortilèges, alors ça équilibre. J’espère que vous trouverez quelque chose qui vous convient parfaitement.

Elle confirme l’état du frigo en soulignant qu’elle n’a pas fait de courses. Ce n’est pas toi que ça dérangera. Et tu préfères qu’elle n’y aille pas, elle n’a pas l’air bien plus vaillante que toi. En fait, ça t’arrange même, tu aurais été bien embêté de te retrouver devant une assiette pleine – et avec un temps de retard, tu percutes que tu es invité pour le dîner aussi – enfin, pour le dîner qu’il y aurait pu y avoir.

— Non, non, n’y allez pas. Ça ne me gêne pas, je n’ai pas très faim en ce moment. Mais si vous voulez quelque chose, je peux aller vous le chercher.

Maintenant que tu as vu l’endroit, tu devrais pouvoir y revenir en transplanant sans trop de mal.


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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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On the run,
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Abigail MacFusty
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Lumos
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Dim 11 Avr - 15:22
Comme si la civilisation était le remède à tout… oui, c'était bien ainsi que l'on pouvait qualifier la chose, mais malgré tout, elle restait aussi l'origine de bien des maux, bien des préjugés et des horreurs du monde. Je pouvais comprendre que pour les autres, la foule, être en groupe, ça avait quelque chose de rassurant, mais pour moi, c'était tout ce qu'il y avait de plus oppressant. Là où j'étais née, à Uachdar, il y avait très peu d'habitants, et c'était surtout des membres de ma famille. Non loin il y avait le village de Balivanich qui comptait que cinq cents habitants, environ. Autant dire que les lieux où j'avais grandi ne m'avaient pas été favorables à m'habituer à la foule. De plus, là-bas la vie restait globalement calme et sereine, le peuple était habitué aux forts vents et aux vagues immenses qui pouvaient subvenir en période de mauvais temps. En dehors de cela, nous nous connaissions tous au moins de nom de famille. Moi, j'avais toujours été la petite solitaire des MacFusty. Tout ça pour dire que la civilisation n'était en rien une obligation pour moi, et j'avais du mal avec le fait de vivre en ville. Avoir des voisins, devoir croiser tous les jours des gens. Si un jour ma vie me mène à une telle situation, c'était que je l'aurai choisi, et non pas par obligation. De cela j'étais certaine.
Tasse de thé portée à mes lèvres, je savourais le liquide délicieusement floral dans ma bouche avant que je ne réponde à Eirian.

- C'est ça. Se retrouver seul, face au silence, ça a quelque chose d'incroyablement angoissant pour la plupart des gens. Ils se sont enfermés dans un rythme si frénétique qu'ils passent à côté de bien des trésors, comme nous l'avons déjà évoqué tout à l'heure au parc. J'imagine que c'est une situation qui dure depuis la nuit des temps. D'un coup d'œil complice, je le regardais rapidement. À croire que nous sommes un genre d'anachorètes.

Rapide et simple rapport vis-à-vis de notre conversation plus tôt alors que nous avions évoqué les églises. Bien que nous n'étions (apparemment) pas pratiquant ni l'un ni l'autre, nous étions ce genre de religieux qui appréciaient vivre en recul du monde pour nous consacrer à nos prières. Ces prières sous forme de contemplation fascinée de ce qui nous entourait, de nos passions et de nos sensibilités. Nous étions ouverts au monde en le regardant tout en étant à l'écart, sans jamais tomber dans le jugement, ou très rarement.  
Alors, était-ce normal pour nous, ermites, d'avoir une demeure dans laquelle nous pouvions nous sentir bien ? Moi, j'avais eu la chance de pouvoir posséder un bout de terre qui appartenait auparavant à ma famille et dont j'ai été une légitime héritière. J'y avais bâti ma maison à la sueur de mon front en m'aidant bien peu de la magie, afin que chaque pierre déposée soit le symbole de mon dur labeur, de celui que je n'abandonnerais jamais, signe de mon acharnement à vouloir obtenir quelque chose. En cela, la réponse de mon invité ne me surprenait que très peu, mais ce qui m'intrigua davantage était cette fragilité de plus en plus palpable que je ressentais ne serait-ce qu'en lui jetant de furtifs coups d'œil. Loin de moi l'idée de vouloir être indiscrète, mais le voir aux abois de la sorte me faisait un peu mal au cœur je devais le dire. Réaction normale de ma grande empathie envers mon prochain, j'avais la naïveté de croire qu'en l'ayant mené ici je lui apportais un minimum de consolation. Continuant de feindre que je ne voyais rien, je répondais le plus naturellement du monde après avoir sensiblement gloussé.

- Comme je vous comprends. Poudlard n'a jamais été très reposant pour moi, même si j'y ai vécu de belles années. Surtout en compagnie de Harper. Quel recoin du château ne nous avait pas vus en train de nous bécoter ? Encore aujourd'hui lorsque j'arpentais ces lieux dans la peau d'une enseignante, j'en souriais d'émotion. Dans le fond, nous risquions sans cesse de nous faire attraper par les autres élèves ou les professeurs de cette époque. Quant aux dortoirs… Ne pas avoir sa chambre à soi, pouvoir la décorer comme on l'entend, se faire… se faire son petit coin, ça avait été quelque chose qui me manquait en ce temps. Aujourd'hui, j'avais mon propre appartement à Poudlard puisque j'étais enseignante, cependant, je ne m'étais jamais véritablement installée puisque ma vraie maison était ici, à Soay. J'imagine du coup que chez vous, en étant cinq, ça doit être vaguement similaire aux dortoirs de Poudlard ? Même si vous avez votre propre chambre, ce n'est jamais silencieux et dans le fond… oui… vous n'êtes pas chez vous, mais chez vos parents. J'avais ressenti cette sensible (mais non pas moins profonde) nuance lorsque j'avais emménagé ici pour de bon et que j'avais enfin quitté le nid familial. Bien que je l'aimais de tout mon cœur, il n'y avait plus de grand-frère pour entrer dans ma chambre sans frapper pour venir se vautrer sur ce lit que je venais de faire avec application. Il n'y avait plus ma mère qui me hurlait depuis la cuisine que je devais dresser la table. Il n'y avait plus ce père qui m'ordonnait d'aller me brosser les dents. Vagues de souvenirs submergeant mon cœur, je souriais avec une certaine mélancolie heureuse. Être chez soi c'est avoir ses propres règles. Faire ce que l'on désire quand on le désire sans que personne n'intervienne. Je poussais un grand soupir théâtral avant de reprendre sur une note humoristique. Puis l'on trouve sa moitié, on vit avec, on apprend à vivre à deux dans un seul chez-soi. Puis on fonde une famille, et le cycle recommence.

Bien loin d'en être à ce stade-là puisque ma relation avec Thomas n'en était aujourd'hui qu'à ses balbutiements, la simple idée d'avoir des enfants ne me frôlait qu'une fois tous les tremblements de terre à Londres, à savoir, rarement. Pourtant un jour j'allais devoir y songer, mon frère ainé décédé, c'était à moi d'assurer la lignée principale de mon nom. Mais ce n'était pas maintenant que je voulais y songer, alors, comme d'habitude lorsque cette responsabilité s'évoqua à mon esprit, je la remettais à plus tard.
Pourtant, le sujet de conversation ne restait jamais bien loin puisque j'en étais venue à évoquer la raison de l'existence. Même si tout cela était très flou et hasardeux, c'était tout de même ma propre logique, ma propre croyance, et j'avais trouvé bon à l'instant de partager tout cela avec Eirian puisqu'il semblait en détresse perpétuelle.

- Trouver notre place… ce grand questionnement de la vie. J'en ai pris conscience à mon adolescente et… Je levais les yeux au plafond avant de rire sensiblement, essayant de détendre l'atmosphère. Bah en fait… je crois que je n'ai pas encore trouvé. Regard complice et amusé à l'étudiant des Serdaigles, je développais. Aujourd'hui ma place est ici, auprès de mes créatures, à aider mon prochain, à être présente pour ma famille et mes élèves. Mais qui sait ? Peut-être que demain tout changera. Peut-être que je serai capturée par le Blood Circle et torturée et ainsi finira ma vie. Ou alors… Je levais l'index, démontrant que j'étais sur une lancée davantage ironique que dramatique. Ou alors que je rencontrerai un oiseau-tonnerre qui m'emmènera loin d'ici. Oui, car être emmenée par un dragon, c'était surfait puisque c'était totalement pour servir de casse-croûte. Rêve d'enfant de disparaître ainsi du jour au lendemain, emmenée par une créature (car ceci avait quelque chose de très romantique), je n'arrivais pas à me faire à l'idée que j'allais pouvoir inquiéter des gens ou même que l'on remarquerait mon absence. Sauf peut-être au sain de Poudlard puisque je ne donnerais plus de cours et qu'il faudra me remplacer. Manque qui sera donc comblé rapidement et constaté que le temps d'un battement de cil. Personne n'est irremplaçable. D'un petit clin d'œil, dans l'espoir d'avoir pu raccrocher mon invité à quelques racines dans la glissade de sa longue descente aux enfers, je concluais. Alors je vous montrerai demain à l'aube.

Instant magique que j'appréciais tout particulièrement sur cette île, je montrerai à Eirian pourquoi j'avais choisi de vivre ici, pourquoi je n'avais pas mis  tout à fait de côté la dragonologie. Car il y avait toujours des raisons aux agissements, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Comme Dumbledor avait eu ses raisons à l'époque durant la bataille contre Lord Voldemort. Malgré tous ses agissements contradictoires et tout à fait discutables, Fumesec était resté un allié et un compagnon irréprochable auprès du grand sorcier. Le nom de l'Ordre découlait de sa simple présence par ailleurs. La venue de Grishkin auprès de moi aurait pu gonfler mon cœur de motivation pour davantage faire vivre mon allégeance, pour encore mieux servir les miens et enfin me motiver à me battre. Égoïstement j'aurais même pu en venir à me dire que si Grishkin m'avait choisie, c'était peut-être pour symboliser que j'étais une héritière spirituelle de Dumbledor ? Pourtant cette simple idée me fit rire tant c'était ridicule et absurde, et c'était bien pour ma pureté d'âme, ma simplicité et mon humanisme que Grishkin semblait m'avoir choisie aujourd'hui. Pour combien de temps, je l'ignorais cela dit. Ce dont j'étais certaine en revanche, c'était que Fumesec avait disparu au jour de la mort de son ami, après avoir tristement chanté autour de Poudlard.
Regard brun posé sur l'Oiseau de feu à mes côtés, je le contemplais tandis que les paroles du jeune homme me percutaient avec douceur comme un millier de perles de pluie.

- J'espère qu'il me fera l'honneur de sa compagnie encore de nombreuses années, mais dans le fond… ce n'est pas moi qui choisis. Ce n'est pas un animal domestiqué.

Même si la présence de Grishkin prouvait que je possédais quelque chose de spécial, je me refusais à essayer de lui attacher une corde autour du cou. Il était libre d'aller et venir comme bon lui semblait, il n'était pas un animal que je voulais dresser. Il était mon ami, et si un jour il décidait de partir et de m'abandonner, je ne l'en empêcherais jamais. Comme je n'avais jamais imposé à qui que ce soit ma présence malgré toutes les souffrances que l'abandon pouvait engendrer en moi. Épouvantable épouvantard qui rôdait derrière chaque Êtres pour qui je pouvais me prendre d'affection.

- Une vaste question en effet, à laquelle je ne peux apporter aucune réponse puisque cela fait partie des grandes lois de l'univers. Celles qui sont impénétrables. Mais disons que… je pense, qu'il faut que nous devons faire de notre mieux. C'est tout. Du mieux que nous le pouvons, en notre âme et conscience.

À l'évidence, rester pur était une chose parfaitement impossible de nos jours, et même avant l'époque que nous étions en train de vivre. Néanmoins, nous avions toujours le choix de nos actes et de nos paroles. C'était ça qui faisait de nous des gens bien, ou des gens mauvais. Ce n'était même pas la pratique de notre magie, car cette règle était la même pour les moldus. Même si des situations pouvaient nous pousser devant des choix à faire, nous avions toujours le choix. Toujours. C'était d'une fatalité si simple qu'elle en était effroyablement déconcertante.  
Tout comme Eirian avait eu le choix de me suivre jusqu'ici ou non. Tout comme il avait eu le choix de se reposer ou de continuer à s'occuper de ses, apparemment, vastes préoccupations. Et maintenant qu'il était ici, il avait le choix de repartir tout de suite ou de me rejoindre sur le canapé, se poser, encore une minute, au coin du feu, et détendre cette boule de muscles tendus qu'était son corps si jeune et fluet. À ses remerciements, je me levais alors, laissant un instant mes oiseaux en compagnie du garçon tandis que, sans un mot, j'entrais dans la salle de bain pour apparemment fouiller dans un placard. Je revenais bien vite, un flacon, des compresses et des bandages dans les mains. Le plus naturellement du monde, je les posais sur la table basse devant nous avant de répondre sur ce ton tranquille qui me caractérisait tout en reprenant ma place à côté du phénix.

- Ce n'est rien, ça me fait plaisir de vous venir en aide. Et votre compagnie me met du baume au cœur je dois bien l'avouer, alors, merci à vous. Osant le regarder une fraction de seconde dans les yeux, le temps de le remercier à mon tour, je revenais bien vite sur le flacon précédemment cherché avant de le désigner du menton. Je ne suis pas médicomage et j'ignore ce qui vous est arrivé, mais ceci doit pouvoir vous aider à atténuer les douleurs. Ou au moins les saignements. Je baissais mes prunelles sur ses avant-bras, là où j'avais cru voir ces taches brunâtres si reconnaissables sur du tissu. Je connaissais l'odeur et l'apparence du sang pour y avoir moi-même été énormément confrontée. Même si je craignais qu'Eirian se fasse du mal, preuve d'une détresse dont je ne pouvais peut-être même pas mesurer la gravité, je ne pouvais ni l'empêcher d'arrêter ni le lui interdire. Je peux vous aider si vous voulez même si je suis davantage habituée à bander avec des poils, des écailles ou des plumes.

Mais voilà, je pouvais au moins essayer de continuer à l'aider. Tout ceci était un appel de détresse évident qui avait un nombre d'explications très vastes. Aujourd'hui, je décidais d'accueillir ce garçon dans mon foyer pour lui apporter soin et douceur à l'âme, mais aussi au corps. Je n'allais pas le juger pour ce qu'il infligeait à son corps, puisque moi-même ne faisais pas mieux en cessant de me nourrir et en continuant de vivre à cent à l'heure. Contradiction flagrante dont mon être arrivait à son paroxysme, chose visible de par mes cernes et ma maigreur évidente. Le jeune homme voyait sûrement la différence entre aujourd'hui et les jours où nous nous étions croisés dans les couloirs de Poudlard ou même au sein de l'Ordre. Ça sautait sans nul doute aux yeux.

- Vous pouvez rester le temps que vous le souhaitez, votre présence ne me dérange pas. Prenez le temps de vous ressourcer comme vous le devez.

Car ici tout était naturel et tout se faisait sans effort, simplement, en laissant les choses arriver quand elles devaient arriver. Si Eirian avait besoin d'un jour de repos, alors il resterait un jour. S'il avait besoin d'une semaine, je lui donnerais une semaine. Tout cela m'était égal. Même si je n'étais pas Mère-Theresa, j'étais volontiers cette oasis de repos qui s'offrait aux naufragés. Le problème étant que l'oasis en question se mourrait de l'intérieur.
Pour changer de sujet, mes narines furent à nouveau traversées d'une longue expiration d'air, soupir du sujet qui me torturait depuis des années.

- Je ne cherche pas à les forcer à faire quoique ce soit, et je ne veux pas non plus avoir leurs morts sur la conscience, une seule c'est déjà beaucoup trop. Ma voix trembla davantage que ce que j'avais souhaité en prononçant ses quelques mots. Paupières un instant fermées, j'osais reprendre, non sans mal. Elles peuvent aider à du transport, à nous échapper, à passer des passages sans elles inaccessibles. Elles ont des dons que nous ne possédons pas… mais pour qu'elles soient enclines à agir avec nous, il faut se lier d'amitié avec elles. Autant dire que c'est un travail long et abscons. Mais… peut-être devrais-je totalement m'abstenir et me contenter de ma baguette. Ce sera sans doute plus sage.

Mes agissements étaient pour la plupart incompris de mes camarades de l'Ordre, et je ne leur jetais pas la pierre puisque tout cela était difficile à comprendre surtout avec le manque de résultat comme preuve. Peut-être devrais-je me forcer à faire ce que j'abhorrais, pour sauvegarder ce que j'aimais. Mais n'était-ce pas là le risque de me perdre ? De faire en sorte que cette guerre me change ? À la conclusion d'Eirian, je ne pouvais m'empêcher de sourire de manière ironique.

- Quelque chose qui me convient… Je levais les yeux pour regarder l'ensemble de ma maison. Ici, ça me convenait. Mais je n'étais pas sotte au point de croire que si je n'agissais pas, j'allais être oubliée du monde. Non, un jour, qui sait, mes ennemis me trouveront et viendront me capturer pour me plier à leurs volontés. Alors j'agissais, dans l'espoir que ma baguette et mes maigres actions puissent peser, au moins un minimum, dans la balance de ce conflit que nous vivions. Former la jeune génération en étant professeur, ne jamais fermer mon esprit aux possibilités, continuer sans relâche mes recherches, vouloir sans cesse m'améliorer. Je me dis que… c'est déjà mieux que rien. Nouveau coup d'œil complice, j'osais le questionner. Et vous ? Que faites-vous pour aider l'Ordre à votre manière ?

Rares étaient les possibilités pour moi d'échanger de la sorte avec un autre membre de la même caste. Peut-être allait-il pouvoir m'aider à sa façon, avec ses idées et suggestions qui jusque-là étaient inaccessibles à mon esprit.
Inaccessibles comme la nourriture dans mon frigo vide. Soulagée que le jeune garçon ait aussi faim que moi (c'était à dire pas faim du tout), je lâchais un énième soupir, mais de soulagement celui-là.

- Ah ouf… je suis une bien piètre hôte, je vous prie de m'excuser. Mais demain matin en sortant nous pourrons aller chercher quelque chose de simple. Si le cœur, et l'estomac vous en disent, bien évidemment.


Never Ending Circles
ANAPHORE


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Lun 12 Avr - 22:20
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Tu as beau être un enfant de la ville, tu as du mal avec le mode de vie frénétique actuel, la course perpétuelle, la foule qui se bouscule en permanence dans les rues… tu le supportais mieux avant, mais tes escapades dans la nature te sont toujours apparues comme une échappée, une occasion de prendre une bonne respiration avant de replonger. C’est aussi sans doute lié à la méfiance que tu as toujours entretenue – difficile de se sentir à l’aise dans la foule lorsque n’importe qui peut soudain se retourner pour s’en prendre à toi. Tu as toujours gardé un œil par-dessus ton épaule, surveillé les faits et des gestes des personnes à proximité… au point que la foule est finalement devenue une sorte d’ennemi mouvant et incertain, quelque chose qui recélait forcément des dangers, oppressant. Tu t’es toujours senti en marge de ce monde-là, de ces foules insouciantes l’été ou pressées de fuir le froid l’hiver, comme si une fois de plus, il y avait un léger décalage entre ta vie et la réalité des autres.
Tu comprends cependant que la civilisation puisse être rassurante pour une majorité de gens, c’est la possibilité de tenir son cerveau occupé en permanence, de fuir le silence et l’immobilité, de ne jamais se retrouver seul, de se saouler de bruit et de mouvement pour ne pas penser, pour oublier aussi. Mais tu connais aussi bien la face sombre, toute l’horreur qui peut se cacher derrière ce vernis de civilisation. Comme souvent, tout est une question d’opportunité : si on t’offrait celle de vivre en paix, un peu à l’écart tout en te laissant la possibilité de fréquenter le monde quand tu le veux, à ton rythme, ce serait parfait.
Abigail approuve tes paroles, tu hoches la tête. Tu ne saisis pas vraiment cette angoisse face au silence ; même à Poudlard, ça se voit parfois, les gens ont du mal à rester silencieux à la bibliothèque, il y a toujours quelqu’un pour faire un peu de bruit. Tu ne connais pas le mot qu’elle utilise pour vous désigner.

— Qu’est-ce que c’est ? Des sortes d’ermites ? Mais oui, le silence les angoisse et ils ne comprennent pas que d’autres personnes aient, elles, besoin de ce silence pour se sentir bien. Je crois que l’être humain est assez doué pour se perdre dans la surface des choses au lieu d’aller voir plus loin.

Mais c’est plus simple, plus facile. Tu ne juges pas, tu as bien conscience d’entretenir des illusions, toi aussi. Parce que ça aide à vivre, en attendant de trouver quelque chose de plus solide. Parfois, tu as l’impression que la civilisation qui vous entoure est bâtie sur du vide, et que les autres se jettent dans la frénésie pour ne pas le voir.
Pour une fois, tu réponds franchement quand elle te demande si tu as un lieu où tu es pleinement chez toi. Non, il n’y en a jamais eu, même si Poudlard est ce qui s’en rapproche le plus pour toi, que tu aimes ses vieilles pierres et ses recoins, la beauté et la délicatesse de la tour de Serdaigle, tout ce qu’il t’a offert – un nouveau monde et un refuge, un endroit où tu pouvais être un peu plus toi-même, où ta nature n’était plus un secret ni une catastrophe, où tu as pu rencontrer d’autres personnes qui te ressemblaient, parmi lesquelles tu étais normal et non plus l’exception, même si pour certains sang-pur, tu n’avais rien à faire là.
La question est douloureuse en un sens, parce qu’elle te rappelle tout ce que tu n’as pas, bien que tu ne sois pas du genre à fuir la réalité. Et tu restes tendu, crispé, ébranlé par la discussion, même si paradoxalement, tu as l’impression que pour ce soir, c’est le meilleur endroit où tu aurais pu être. Parce qu’elle te comprend sans que tu aies besoin de trop développer. Parce qu’elle touche à tout ce que tu gardes enfoui au fond de toi et que tu livrerais si tu pouvais. Pour Poudlard aussi elle comprend, cela a l’air de lui rappeler de bons souvenirs. Tu hoches la tête quand elle évoque les dortoirs. Cela ne te gênait pas tant au départ, même si entendre les uns et les autres se houspiller, courir après leurs affaires, se battre pour être le premier à la salle de bains, sans parler des blagues et des plaisanteries en tout genre… c’était un peu lourd à la longue. Tu te mêlais parfois à eux, dans cet exercice d’équilibre qui consistait à évoluer près d’eux sans jamais devenir proche ni avoir l’air trop renfermé.

— Oui, voilà, pour se faire un petit coin, il faut quitter les dortoirs et la salle commune, mais on retombe sur des lieux beaucoup plus impersonnels, les salles de classe…

Oh, il y a bien la Salle sur Demande, mais ça reste particulier – tu y as passé quelques nuits en septième année, sur l’idée d’Elise, lorsque c’était trop compliqué de supporter les autres. Tu ne l’as pas tant refait cette année, parce que même si tu y gagnes un peu en tranquillité, les cauchemars, eux, te suivent partout. Tu ne peux pas te fuir toi-même et c’est bien le problème.

— Oui, c’est tout à fait ça. Je suis content de les voir et eux aussi, comme on ne se voit pas beaucoup pendant l’année, en plus je travaille… du coup, mon frère et ma sœur veulent qu’on en profite au maximum, mes parents aussi, mais il y a des moments où j’en ai… moins envie.


Quant à suivre ses propres règles… pour le coup, tu es servi, tu n’as personne pour te dire quoi faire, tu peux littéralement faire tout ce que tu veux, sans que quiconque s’en soucie, sans avoir de comptes à rendre. Tu sais que pas mal d’étudiants envieraient cette prétendue liberté. Toi, au contraire, tu aimerais bien que de temps en temps, quelqu’un soit là pour te dire quoi faire, comment t’en sortir mieux, redresser un peu l’axe tordu de ta boussole. Ce n’est pas vraiment ce que tu recherches dans l’idée d’être chez toi. C’est plus… quatre murs, un toit, qui soient toujours les mêmes, pas les murs gris, sinistres et glauques entre lesquels tu te retrouves, sans la poussière, le danger, l’humidité, les bruits et les craquements. Un endroit où tout dirait sécurité, protection, refuge, foyer. Un endroit où tu pourrais défaire ta valise, tout ranger, sans te dire que tu dois te tenir prêt à fuir. Un endroit où tu pourrais te reposer, laisser tomber les masques et les apparences.
Abigail enchaîne en parlant de la suite. Trouver une moitié, vivre à deux… Tu réponds à son sourire, mais c’est plus un automatisme qu’autre chose. L’idée te crispe. Déjà, avant, c’était compliqué, parce que ton orientation n’est pas toujours simple à comprendre et parce qu’il était hors de question pour toi de mentir à la personne que tu aimerais, hors de question de l’entraîner dans tes ennuis. Hors de question aussi de lui dire la vérité. La seule fois où ça aurait pu marcher, tu es parti avant que ça n’aille trop loin. Et maintenant… tu ne supportes même plus qu’on te touche, même un contact amical ; tu fais durer les poignées de main le moins longtemps possible. Alors, imaginer que quelqu’un… Non. Non. Tu chasses les images qui commencent à s’imposer, te forces à revenir à ce qui t’entoure, à la réalité, pas à ce qui rôde dans ta tête. Tu es chez Abigail. Tu ne crains rien. Tu lui réponds d’un ton faussement léger :

— On ne sait jamais quand ça tombe, mais je pense que j’ai encore quelques années devant moi avant.

Quant à ta place dans ce monde… non, vraiment, tu ne sais pas ce que tu y fais. Tu n’as pas grand-chose à apporter aux autres – à part des ennuis. C’est rassurant en un sens qu’Abigail n’ait pas trouvé ou de savoir que sa place peut changer. Tu comprends qu’elle doit plaisanter à la façon dont elle termine sa phrase.

— Je crois qu’on n’a pas une place fixe, qui ne bougera plus une fois qu’on l’aura trouvée, même si ça aurait un côté rassurant. C’est plus… le fait de se sentir bien là où on l’est à l’instant T, comme un puzzle enfin complet. Mais nos aspirations peuvent changer, évoluer, et alors, on trouve une autre place qui n’est pas forcément mieux ou moins bien que l’ancienne, mais juste différente, parce qu’elle correspond davantage à la personne que nous serons devenus… Ce n’est pas forcément un grand écart, un petit pas sur le côté peut suffire à trouver une autre place. J’ai encore besoin de quelques ajustements. Ou peut-être qu’un oiseau-tonnerre débarquera aussi, tu ajoutes avec un sourire.

Tu acceptes sa proposition. Demain à l’aube ? Est-ce que ça veut dire qu’elle te propose aussi de passer la nuit chez elle ? Ou tu peux simplement revenir à l’heure qu’elle te donnera. La curiosité l’emporte, tu te demandes ce qu’elle va te montrer. À l’aube… quoi que ce soit, le lever du soleil sur cette île doit être magnifique – s’il ne pleut pas – et rien que pour cela, cela vaudrait déjà le coup.

— J’ai hâte de voir ça.

En attendant, l’île a de quoi réchauffer le cœur. Tu ne t’attendais pas à croiser un phénix en venant et, maintenant que tu te sens plus rassuré quant à ta présence, tu savoures pleinement la chance que tu as de pouvoir en voir un d’aussi près. C’est peut-être absurde, ou superstitieux, même si tu ne l’es pas vraiment, mais tu ne peux t’empêcher d’y voir un signe d’espoir – et le fait que pour ce soir au moins tout ira bien. Et c’est déjà pas mal, maintenant que, pour deux mois, ton horizon s’est étréci à quelques jours. Tu ne cherches pas à anticiper quoi que ce soit. Alors, certes, vous avez prévu de passer du temps ensemble avec Kayla, mais tu verras quand ça se précisera. Quoi qu’il en soit, tu ne peux que souhaiter une belle et longue route commune à Abigail et Grishkin.

— Domestiquer un phénix… ça sonne comme quelque chose de contre-nature. C’est à lui de choisir, mais pour un oiseau comme lui, j’ai l’impression qu’il a vraiment tout pour se plaire ici.

Même si ça ne l’empêchera évidemment pas de repartir pour d’autres horizons le jour où il le sentira. Quant à ce qui fait la pureté d’une âme… il vous est compliqué d’en décider – et tu ne t’aventureras pas à juger en fonction de ce que tu sais des autres. Tu es bien placé pour savoir que la surface peut cacher quelque chose de totalement différent, que des sourires peuvent dissimuler des abysses. Une fois de plus, ses paroles résonnent en toi, et tu ne peux qu’être d’accord. Faire de son mieux, au mieux de ses possibilités et de ses capacités. Même s’il peut être facile de se leurrer, de se dire qu’on en fait assez. Ou, au contraire, qu’on pourrait toujours faire un peu plus, qu’il reste toujours un peu d’énergie pour un pas de plus.

— Je suis d’accord. C’est déjà beaucoup, de s’appliquer à faire de son mieux, d’essayer de toujours choisir ce qui nous paraît le mieux.

Choisir la paix, choisir de s’engager… tant d’actes à poser, qui peuvent décider de tant de choses. Impossible de savoir à l’avance toutes les conséquences de tes choix et de tes décisions. Oh, certaines sont visibles, évidemment, mais les autres… Mais oui, faire de ton mieux, décider en ton âme et conscience à tel instant, avec les données que tu as… faire en sorte de ne pas avoir de regrets ni de remords. C’est déjà immense. Mais ça t’interpelle aussi, parce que tu sais que tu devrais faire mieux, mais que tu as beau essayer, tu n’y arrives pas. Tu as juste l’impression de gaspiller tout ce que ta mère a sacrifié pour toi, les années d’entraînement, de ne pas essayer assez fort. Il y a la fatigue, bien sûr, le poids des cauchemars et des insomnies, le tout accentué par tes problèmes avec la nourriture. Mais tu devrais parvenir à dépasser tout ça. Ça ne devrait pas ressembler à quelque chose d’impossible.

Tu rejoins le canapé. T’asseoir te fait du bien, te montre avec d’autant plus de force à quel point tu es tendu, une boule de nerfs à qui il n’en faudrait pas beaucoup plus pour exploser. Tu es perdu entre la nécessité de tenir coûte que coûte et l’invitation au repos, tu ne sais pas comment concilier les deux. De toute façon, Abigail doit déjà bien se douter de l’état pitoyable dans lequel tu es, ce n’est pas comme si tu faisais beaucoup illusion. Tu la remercies, encore. Elle se lève ; tu la suis du regard, comprends en la voyant entrer dans la salle de bains – elle a l’air de chercher quelque chose. Tu reviens aux oiseaux, à Grishkin perché de l’autre côté du canapé, dont les plumes de feu scintillent doucement à la lueur de la cheminée. Tu t’enfonces un peu plus dans le canapé. Abigail ne tarde pas à revenir. Tu retiens de justesse un tressaillement lorsque tu vois ce qu’elle transporte, ton verre manque de t’échapper et tu t’empresses de le déposer sur la table basse avant qu’il ne finisse par terre. Tu la regardes, elle, et les oiseaux, le cœur battant, pour comprendre lequel d’entre eux a besoin… Parce que ça ne peut pas être pour autre chose, n’est-ce pas ? N’est-ce pas ? Tu as l’impression que tes battements de cœur s’entendent dans toute la pièce. Tu te forces à lever les yeux vers Abigail tandis qu’elle reprend sa place. Tu ne vois pas bien en quoi tu lui mets du baume au cœur, mais peut-être qu’elle aussi a juste besoin de quelqu’un qui comprend un peu ce qu’elle porte. Son regard croise le tien une seconde, tu baisses de nouveau les yeux sur la table.
Ses mots confirment ce que tu redoutais. C’est bien pour toi. Dans un réflexe, tu refermes les doigts sur les bords de tes manches comme si… quoi ? comme si elle allait se ruer sur toi pour dévoiler ce que tu caches depuis des semaines ? Tu baisses les yeux sur les taches. Tu aurais définitivement dû te changer avant de partir. Faire plus attention en manipulant ces cartons. Mieux contrôler tes gestes la nuit dernière. Te soigner un peu plus, cette fois.
Mais elle ne te pose pas de questions, ne te demande pas ce qui s’est passé – même si ta réaction a sans doute dû confirmer ses soupçons, tu n’aurais pas à ce point tenté de dissimuler une blessure banale. Elle parle, encore, et tu te concentres sur les mots, incapable de la regarder, la tête baissée sur le flacon et les bandages. T’aider ? Non, surtout pas. Tu fixes de nouveau tes manches, comme si tu pouvais voir à travers elles le fin réseau de cicatrices qui courent sur tes bras, trop nombreuses. Tu ne peux pas lui montrer ça. La honte te noue le ventre. Tu croises les bras contre toi, comme pour cacher un peu plus ce qu’elle sait déjà, et cette maudite entaille te picote en réaction à la pression. Un frisson te traverse. Il n’y a pourtant pas de jugement dans ses paroles, ni d’accusation, ni de colère ou de curiosité.
Juste une proposition d’aide.
Une sensation chaude sur tes joues. Quelques larmes ont réussi à s’échapper finalement. Tu les essuies d’un revers de manche. Une inspiration profonde et, la voix nouée, tu t’obliges à répondre.

— C’est vraiment très gentil de vous en soucier, mais ce n’est rien de grave, vraiment. C’est juste des… des égratignures, ça ne saigne plus du tout. Je suis un peu fatigué et j’ai été maladroit aujourd’hui. Mais ça va passer, ça ne nécessite pas autant de soins. C’est juste… un peu compliqué cet été.

L’aveu sort presque sans que tu t’en rendes compte. Tu n’essaies pas vraiment de mentir, c’est juste une coupure un peu plus profonde que d’habitude, ça ne demande pas de sortir le grand jeu. Tu feras simplement plus attention. En revanche, maintenant, tu n’es pas sûr que ce soit une bonne idée de rester. Elle non plus n’est pas au mieux de sa forme, tu vois les changements chez elle – les mêmes que les tiens, les cernes, sa maigreur. Mais au moment où tu ouvres la bouche, hésitant sur le choix des mots, elle te devance. Rester le temps que tu veux ? Un instant, ton regard court sur la maison chaleureuse, confortable, te rappelant que tu n’as pas dormi ailleurs que dans un sac de couchage posé au sol dans des immeubles abandonnés depuis ton départ de Poudlard, puis revient sur Abigail et Grishkin.

— Ce soir et cette nuit… ce sera très bien. Je n’ai pas besoin de plus.

Elle peut comprendre que tu ne veuilles pas rentrer chez toi dans cet état. Tu t’efforces de te ressaisir, puis la conversation dérive, revient sur ce que vous pouvez faire dans cette guerre. Tu comprends son dilemme à l’idée d’impliquer des créatures magiques dans des conflits purement humains, elles n’ont pas à payer pour vos erreurs. Sa voix tremble en les imaginant blessées.

— Je vous comprends et je comprendrais aussi que cette voie vous semble trop lourde. Le risque aussi, c’est que quelqu’un d’autre essaie de faire la même chose en s’y prenant par la contrainte. On en revient un peu à ce qu’on disait sur notre place, est-ce que je suis le mieux placé pour cela, est-ce qu’il n’y a pas quelqu’un qui ferait mieux, ou quelqu’un qui ferait pire ? Je ne suis pas sûr qu’il y ait de bonne ou de mauvaise réponse… le plus important, c’est de ne pas se perdre, de rester fidèle à nous-mêmes et à nos valeurs, même si on se sent parfois à contre-courant des autres.

Et ses objectifs sont déjà bien importants.

— C’est beaucoup. Vous pouvez amener vos élèves vers davantage d’ouverture d’esprit, de respect et de compréhension pour le monde qui nous entoure… c’est primordial pour la suite.

Elle te retourne la question. Ce que tu fais… tu veux croire que ta conversation avec Raphaël sur le sort des nés-moldus, ce dont il a ensuite parlé avec Elyssa Rosier, a aidé au changement en ce qui les concerne, mais c’est surtout lui qui a géré. Tu espères aussi que la défense de tes idées ne tombe pas toujours dans l’oreille d’un sourd. Tu aimerais faire bien davantage, mais tu n’oses pas te faire remarquer, de crainte qu’on ne s’intéresse trop à toi et aux tiens.

— J’aimerais bien arriver à développer davantage mon point de vue sur la paix, mais en attendant, c’est sur le terrain que je suis le plus utile. Comme j’étudie pour devenir Auror… je commence à connaître un peu le terrain et je me débrouille en sortilèges, donc ce n’est pas plus mal que ce soit moi, plutôt que quelqu’un de moins bien formé. Je ne cherche pas à tuer mes adversaires, certains disent que ça ne sert à rien du coup… mais que ça tourne chaque fois au bain de sang n’aidera pas à apaiser les choses.

Un adversaire épargné sera peut-être moins enclin à faire du mal la fois d’après. Du moins c’est ainsi que tu conçois les choses – en dehors bien sûr des fanatiques, tant chez les Mangemorts que chez le Blood Circle.

Abigail s’excuse de n’avoir rien pour le dîner, mais ça t’arrange, tu n’aurais pas réussi à jouer la comédie devant une assiette pleine. Demain, ça ira sûrement mieux – et de toute façon, tu auras besoin de sucre pour tenir la journée à la librairie.

— Demain matin, ce sera très bien. Ou je prendrai quelque chose sur le chemin de la librairie si cela ne vous dit pas.



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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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Mar 13 Avr - 13:57
Férue de littérature, j'en oubliais que des fois je pouvais utiliser des mots peu communs que mes interlocuteurs ne pouvaient pas toujours comprendre. L'interpellation d'Eirian me rappela alors ceci, et, par réflexe, comme une enfant qui aurait été grondée, je m'enfonçais dans mon canapé, comme honteuse. Maladroite en dialogue, je le resterais toujours, toutefois, je savais que le jeune homme ne me tenait pas rancune de ma formulation. Alors, d'un sourire un peu maladroit, je lui donnais la définition désirée, les yeux plongés dans mon thé à la couleur brunâtre.

- C'est un genre oui. Ou pour être plus précise, un anachorète est une personne qui s'est retirée de la société pour des raisons religieuses. Osant lui jeter un bref coup d'œil, je rajoutais. Je trouve ce mot exquis dans le sens où notre religion n'est pas forcément divine. Elle se contente humblement de nos croyances respectives.

Quant au reste, je ne le commentais pas, je n'y voyais plus spécialement d'intérêt. Nous avions la même opinion du reste du monde, de la société et de la civilisation. Salutaire pour certain, elle pouvait être un poids pour d'autres, comme nous deux en cet instant précis. Si ce matin je m'étais rendue à Londres pour aller à la librairie d'Aïko, c'était avant tout pour récupérer ma guitare. Ce n'était pas la période estivale qui allait m'ouvrir au monde et me donner envie de me fondre dans la masse de la foule. Trop endeuillée, j'étais davantage à pleurer sur le triste sort de mon frère, à endurer mille tortures mentales sur ce que j'aurai dû et pu faire au moment de l'accident. Tout le monde me le disait : un accident est un accident, et on ne peut rien y faire. Mais voilà, il y avait dans ces paroles une vérité si cruelle et nue que je n'arrivais pas à me faire une raison. J'avais été là, j'avais tout vu, et je n'avais pas agi. Je n'avais rien fait, alors oui, j'avais le décès de la personne que j'aimais le plus au monde sur la conscience, et pour l'heure, rien ne parvenait à me faire changer d'avis. Rien ne réussissait à me consoler de cette tragédie qui était survenue dans ma vie. Je la portais à bout de bras comme un boulet enchaîné à mes chevilles.
Au fond, tout ce qui importait dans nos choix de vie, d'être en exil ou non, c'était d'être en accord avec soi. Quelque chose n'allait pas et ça ne nous convenait pas ? Alors il fallait agir pour le changer, à comprendre, déménager, changer de point de vue pour pouvoir changer de perception, changer d'entourage, changer de métier. Les solutions étaient vastes. Et si quelque chose n'allait pas, mais que ça nous convenait, et bien, que nos volontés soient faites. Que notre choix soit respecté, que nous préférerions trainer dans la merde plutôt que de vouloir en sortir.
C'était exactement dans ce schéma que je m'étais perdue au décès de Kyle, et dans lequel je ne parvenais pas à m'extirper. Même la présence du reste de ma famille n'arrivait guère à me rassurer. Je fuyais Aïko alors que je l'appréciais de tout mon cœur, et je passais très peu de temps avec mes parents, car j'avais honte de leur montrer mon état. J'avais honte de croiser le regard azuré de ma mère, femme bien plus forte que moi, qui arrivait à faire face à la mort de son propre fils tant à moi je me laissais aux abois. J'avais la prétention de croire que je prenais leurs chagrins et que je pleurais pour eux. Ça avait quelque chose d'un peu déculpabilisant.

- De même. Je les aime de tout mon cœur, mais il y a des jours où je préfère ne pas les voir, où j'ai davantage besoin de me ressourcer avec ce qui m'entoure qu'avec eux. Ça ne retire rien à l'amour que je leur porte cela dit. Juste que, en été… ce n'est tout simplement pas la bonne période. Regard toujours posé sur ma tasse de thé, je venais à caresser les rebords aux fines dorures du bout de l'index, pensive. Si je puis me permettre… tâchez de profiter d'eux. De votre frère et de votre sœur, si bien sûr vous vous entendez bien avec eux. On… on ne sait jamais ce qui peut arriver.

Non, on ne pouvait jamais savoir. Mais devait-on pour autant vivre avec la peur au ventre et l'angoisse de perdre ses proches à tout instant ? À vrai dire, ça ne m'avait jamais effleuré l'esprit avant ce jour, car ça n'arrive qu'aux autres n'est-ce pas ? Pourtant ces épreuves difficiles je pouvais les partager avec William qui me comprenait, car il avait aussi perdu un frère, ou alors avec Thomas qui lui avait perdu son père. Toutefois, c'était un sujet tellement difficile à évoquer pour moi que je ne faisais toujours que l'éluder, trop lâche pour faire face d'une quelconque manière. Quant au mariage alors là. Mon esprit en était à des années-lumière, et les réflexions d'Eirian m'arrachèrent un sourire presque douloureux, mais non pas moins salutaire. La présence de ce garçon me faisait réellement du bien, comme s'il avait ce talent d'éclairer ma journée, de me sortir de mes torpeurs, moi qui avais à ce point tendance à me laisser engloutir par les ténèbres de mes pensées. Sa voix à chaque fois m'en hissa, me permettant alors de prendre ce bol d'oxygène dont j'avais à chaque fois besoin.

- Oula, oui ne soyez pas pressés, profitez du reste de votre vie d'abord. Tout le moins, c'est ce que je fais, et je ne m'en porte pas plus mal. Je lui adressais un nouveau coup d'œil amusé et complice. Aux grands damnes de mes parents.

Non pas qu'ils me pressent, mais ils voulaient me voir heureuse avant tout, et quand bien même je n'étais pas malheureuse dans ma vie actuelle, je ne pouvais pas non plus dire que j'étais totalement épanouie. Ma vie de couple avait été réduite à néant et même si aujourd'hui j'essayais de me redonner une chance avec Thomas, rien ne pouvait encore dire que tout ira bien à l'avenir. Je faisais un métier que j'appréciais, mais non pas qui me transcendait comme lorsque j'étais dragonologiste indépendante. J'avais trop peu d'amis sur qui compter, et à dire vrai, lorsque j'avais besoin d'eux, je préférais me cacher derrière une façade fardée.
Ma vie, ma place, n'était-elle donc pas qu'une illusion ? Alors que je me plaisais à faire croire que le contraire à tout le monde ? Là où je rejoignais Eirian, c'était que tout était sans cesse en mouvement, même notre place dans ce monde. Relevant les yeux sur le jeune homme puis Grishkin, je remuais les épaules, apparemment sans avoir trop d'avis, avant que je n'ose reprendre la parole, hasardant un peu, non sans avoir souri lorsqu'il suivit ma plaisanterie avec l'oiseau-tonnerre.

- Hé bien… je pense qu'effectivement tout est fait de mouvement, même ce qui semble être immobile. Alors, oui, notre place dans ce monde doit être en perpétuel changement, mais… je poussais un rapide soupir timide. Je crois que ce qui compte le plus au final… c'est la place que nous avons dans le cœur de ceux que nous aimons.

Être simplement entouré de personnes qui nous aiment comme nous sommes. Sur qui l'on peut compter à tout moment. Ces gens dont l'amitié ne s'érode même pas un peu malgré le passage du temps. C'était là où la solitude pouvait être diablement perturbante. Car même si je me savais aimée de ma famille, j'étais globalement très seule le reste du temps, et même si je le vivais bien, il y avait des fois où une simple compagnie, du genre, celle rencontrée dans un parc et qui accepte une invitation chez moi, faisait le plus grand bien. Même si vivre au cœur de la société n'était pas fait pour tout le monde, être seul en revanche avait presque irrémédiablement des conséquences. La compagnie de mes animaux me suffisait la plupart du temps, mais à un moment donné, le contact humain me manquait, et ce, bien malgré moi. C'était d'autant plus vrai depuis la mort de mon frère qui avait une présence qui ne m'avait jamais perturbée ni dérangée.

En coin, je regardais Eirian alors qu'il se disait impatient de découvrir les raisons de mon installation sur l'île, et, pour garder la surprise d'autant plus réaliste, je gardais soigneusement mes lèvres fermées. Il était aussi vrai que je ne voulais pas le faire fuir par ce qui nous attendait. Dans le fond, il allait peut-être trouver tout cela parfaitement ridicule et transplaner sans même attendre la fin de la démonstration. Dans tous les cas, je préférais ne rien dire, ni pour le décevoir lui ni pour me décevoir moi.
Pourtant, lorsque je le voyais poser des yeux presque inquiets sur Grishkin, j'avais bon espoir que demain matin, tout irait bien. Si tentés que nous restions ensemble jusque-là, il y avait encore de nombreuses heures à traverser, et je savais que le sommeil n'allait pas venir me prendre de sitôt. Je sentais une très grande fatigue, et maintenant que j'étais assise, ne serait-ce que me lever était une véritable épreuve, mais ce n'était pas pour autant que je réussissais à dormir. Souvent, mon cerveau s'éteignait. Alors je pouvais regarder les flammes de mon feu de cheminée danser de longues minutes durant. Mais je ne dormais pas pour autant. Sombrer dans le sommeil me faisait peur, car sans cesse je rêvais de l'accident, de ce qui était arrivé, je revoyais tout comme lorsqu'on met en boucle le passage d'un film jusqu'à ce qu'on le connaisse à ce point par cœur il en devient écœurant. En rêve, je voyais ce que j'aurais pu faire. Je me voyais agir et sauver mon frère, j'étais à ce point emportée par l'émotion de joie que je m'en réveillais, les bords des yeux humides par les larmes de bonheur. Mais, réalisant que ce n'était qu'une illusion, j'en pleurais de détresse pour le reste de la nuit ou de la journée.
Non, dormir n'était pas une bonne idée, et pourtant je sentais que mon corps me criait de me reposer.

À ce point plongée dans mes pensées et absente, comme si une partie de moi s'était enfuie, je n'avais pas entendu les paroles d'Eirian, ou si, mais les mots m'étaient parvenus déformés, comme si je les avais entendues sous l'eau. Je n'avais donc rien compris, et je me contentais de sourire comme toute réponse, avant de me lever et d'aller chercher de quoi l'aider dans la salle de bain.
Sa réaction m'émouvait sincèrement et si j'avais été une personne plus démonstrative, peut-être aurais-je essayé de le consoler en le prenant dans mes bras. Malheureusement (ou heureusement) pour le garçon, je n'étais pas de ce genre, et d'autant plus que, puisque je venais de me lever, j'étais tout à fait vidée de mes forces. Tendre la main vers ma tasse de thé n'était pas envisageable, alors je restais là à côté du garçon, parfaitement immobile comme une momie qu'on aurait déjà mise dans son sarcophage, le regard éteint et presque vide en le voyant pleurer. Dans un sens, j'étais bien heureuse de ne pas m'être trompée sur ce que je croyais voir et comprendre dans sa gestuelle depuis le début de notre rencontre, mais en aucun cas, à aucun moment j'avais eu le désire d'être trop intrusive. Alors d'autant plus, je me permettais de ne rien faire, me contentait de détourner les yeux pour regarder les plumes chatoyantes de mon phénix. Paupières un instant fermées, je humais discrètement l'odeur de l'Oiseau de feu, avant que la voix de mon invité s'éleva à nouveau. Là, je rouvrais les yeux avant de soupirer pour répondre d'une voix tout aussi absente que le reste de mon être.

- Ce n'est pas ce que le monde vous réserve qui est important, c'est ce que vous pouvez y apporter. Osant le regarder un peu plus franchement cette fois-ci, je ne lui imposais pas mes prunelles bien longtemps, car je n'avais pas non plus la force de soutenir son propre regard si d'aventure il venait à me fixer. Maladroitement, je souriais tout en remuant à nouveau les épaules. Je vais vous le redire : n'ayez pas peur d'occuper la place qui vous est due en ce monde. Prenez soin de vous, parce que vous êtes une bonne personne et que vous le méritez.

Qu'importe qu'il me mente ou non. Qu'importe qu'il se soit fait du mal ou qu’effectivement il se soit blessé à la librairie (j'ignorais que ce métier était aussi dangereux soit dit en passant). Les faits étaient là : Eirian était blessé, et il avait besoin d'un minimum de soin. Raisonnablement, peut-être pas de bandage ni d'une boite entière de compresses, certes, mais une potion anti douleur et cicatrisante, pour aider à éviter les infections et aider à refermer la peau n'était, à mon sens, pas superflu. Néanmoins, je ne pouvais pas le forcer, alors j'essayais de me contenter à le décider par les mots sans être certaine que cela ait un quelconque effet.

- Sale période l'été… pourtant si belle. Mais si brûlante.

Accord avec les couleurs que nous avions évoquées dans le parc en discutant des saisons, je venais lever ma main pour me masser un peu la nuque non sans pousser un petit gémissement las. Tout mon corps trainait et je semblais avoir littéralement fondu dans mon canapé. Je ne me tenais plus, comme si j'étais soudainement dépourvue de colonne vertébrale.
La conversation dériva presque naturellement sur nos actions au sein de l'Ordre, et pour mieux me concentrer sur les paroles du garçon, je refermais les paupières. À présent parfaitement immobile, la tête posée sur le dossier de mon canapé, je pouvais donner l'air que je m'étais endormi. Seule ma main contre le pelage du phénix, qui ne cessait ses caresses sur son poitrail, démentait cette impression. D'une voix trainante, j'essayais de répondre du mieux que je pouvais.

- Malheureusement il y aura toujours des gens pour leur faire du mal. Est-ce pour autant que je dois leur imposer une bataille qui n'est pas la leur ? Ce qui est certain c'est que je ne les force pas à aller sur le terrain s'ils n'en ont pas envie. Depuis la nuit des temps, l'être humain dresse l'animal pour qu'il lui vienne en aide. Le destrier du chevalier n'avait pas comme unique fonction d'être une monture. Le destrier était un cheval connu pour sa force et son courage, et bien souvent il se sacrifiait pour la survie de son cavalier. Même si cela peut sonner comme un romantique mélodrame, il n'en reste pas moins une frissonnante vérité. Mais est-ce pour autant une excuse pour moi de les entraîner de la sorte ? Je l'ignore… Ce qui est vrai en revanche, c'est que je fais de mon mieux pour sensibiliser mes élèves, même s'ils ne sont qu'une poignée puisque mes cours ne sont qu'optionnels. Ce sera une poignée de plus.

Et il y avait les élèves spéciaux. Nymphea, Eponine, Kayla et Septima, entre autres. Ces élèves qui s'étaient adressés à moi pour me demander de l'aide, pour qui j'étais aujourd'hui une sorte de mentor, que j'aidais du mieux que je le pouvais, et que je sensibilisais à mon monde et au monde qui nous entoure. Que je sensibilisais à l'absurdité de nos relations et de nos conflits.
Malgré mon immense fatigue, je réussissais à sourire en entendant les actions d'Eirian. À l'entendre de la sorte, il semblait bien plus actif que moi, et j'en étais presque rassérénée, dans un sens. L'image de Sean vint apparaître derrière mes paupières closes, peut-être le connaissait-il ? Sûrement oui puisque nous faisions tous partie de l'Ordre du Phénix, et si en plus l'étudiant des Serdaigles cherchait à être Auror, alors il devait connaître Sean.

- J'ai aussi l'espoir de croire qu'en épargnant le plus d'ennemis possible, cela puisse apaiser les choses… néanmoins, je suis aussi certaine qu'en face il y a de dangereux fous pour qui le seul remède est la mort… Même si je ne peux décemment pas souhaiter à quelqu'un de mourir. Je ne suis pas non plus idiote au point de croire que parmi les sorciers il n'y a pas de personne de ce genre. Nous avons tous notre part de responsabilité, c'est certain… Ma fois, j'essaie surtout de je penser que les jours les plus beaux et les plus agréables ne sont pas ceux où il se produit un évènement splendide ou extraordinaire, mais ceux qui nous apportent de petites joies simples l'une à la suite de l'autre, comme des perles glissant d'une ficelle.

De petites victoires accumulées, pour gratter discrètement du terrain. Gagner une bataille, mais pas la guerre comme dit l'adage. Tout comme ne pas devoir me lever pour aller chercher à manger était une victoire et j'en soupirais presque de soulagement en entendant que mon invité n'avait besoin de rien. Je réussissais à ouvrir de petits yeux pour le regarder tranquillement, aussi un peu vaseuse.

- Il y aura sûrement quelque chose dans le potager, sinon sur le chemin du retour nous passerons dans une boulangerie, il y en a sur l'île voisine. Laissant trainer mon souffle, je pris la peine de la réflexion que je devais rester honnête et droite avec Eirian. Pardonnez ma soudaine fatigue et lassitude. Le fait d'être à nouveau ainsi confortable fait sauter toutes les barrières. Je ne vais pas dormir pour autant. Mais si vous voulez vous plonger dans une lecture, ou toute autre activité, ne vous gênez pas. Je suis décidément une bien piètre hôte, mais je prends des notes, dans ma tête. Pour m'améliorer. Un petit sourire illumina mes traits fatigués. Même dans cet état je m'essayais à l'humour.


Never Ending Circles
ANAPHORE


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Jeu 15 Avr - 22:39
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Abigail a presque l’air de s’excuser lorsque tu lui demandes ce que désigne le terme « anachorètes ». Elle n’y est pour rien, c’est toi qui ne le connais pas et ça ne t’a jamais dérangé d’admettre que tu ne savais pas. Tu te coucheras un peu plus renseigné, et voilà. Tu lui souris avant qu’elle ne baisse le regard sur son thé. Ton hypothèse n’était pas totalement à côté de la plaque, c’est déjà ça. Des gens qui se sont retirés du monde… oui, c’est un peu votre cas, même si tu n’entres pas vraiment dans la case religieuse.

— Merci, je vois mieux. Mais je n’irais pas jusqu’à qualifier mes croyances de religieuses.

Ça reste un domaine que tu connais peu. Tu n’as jamais vraiment creusé au-delà de ce que tu as appris dans ton enfance, il y avait bien les cérémonies pour Noël et Pâques, mais c’était plus par tradition qu’autre chose. Et au fil des années, tes réflexions et tes centres d’intérêt t’ont mené ailleurs.
Abigail et toi vous entendez sur vos difficultés avec la civilisation – sur vos difficultés tout court d’ailleurs. Tu ne sais toujours pas quel malheur la frappe, mais il entraîne le même besoin de repli que de ton côté, le même genre de fatigue d’après ce que tu peux constater… le même genre de relâchement quant au fait de prendre soin de vous. Tu as l’impression que le moindre geste quotidien devient trop lourd, trop difficile – dominé par cette question : « à quoi bon ? ». Ce n’est pas comme si quelqu’un allait le remarquer. Affronter chaque jour te demande beaucoup trop d’énergie, mais tu te forces à fonctionner malgré tout, à te lever. Parce qu’il n’y aura personne pour t’obliger à le faire. Parce que le jour où tu commenceras à renoncer… ce sera encore pire. Tu as bien conscience que la limite n’est pas loin, même si tu ne l’as pas encore franchie. Tu ne comprends pas comment font les gens qui ont l’air de toujours s’en sortir, ces « quand on veut, on peut » qui te hérissent, tu ne sais pas d’où ils tirent cette force et cette énergie quand toi, tu as l’impression que tout t’échappe, que la surface se fait de plus en plus loin. Non que tu ne veuilles pas changer ta situation, que tu te complaises dans ce qui t’arrive. Loin de là. Tu essaies. Mais tu n’y arrives pas.
Et faire semblant devient de plus en plus difficile aussi, maintenir la façade, faire comme si tout allait bien, comme si tout était normal… Mais tu n’as pas d’autre choix que de poursuivre sur cette route. Tu ne peux te confier à personne – tendre un bout de la pelote de laine, c’est prendre le risque de dénouer tout l’écheveau d’un coup, et tu n’es pas prêt à affronter ces conséquences-là.
Alors tu parles avec Abigail dans un étrange mélange de mensonge et de vérité, un entremêlement de tes ressentis et des fausses raisons qui les provoquent, d’aveu sur le fait que tu n’es chez toi nulle part, même si tu enrobes cela avec ta famille fictive. C’est rare que tu t’épanches, même si ça reste peu. Que tu évoques tes difficultés, parce que tu redoutes les questions qui vont forcément suivre. Mais avec Abigail ce n’est pas le cas. Elle partage ses ressentis avec sa propre famille. Tu hoches la tête, tout en te sentant un peu coupable qu’elle se confie sur ce qui n’était que mensonge de ton côté.
Elle revient sur l’été, cette saison qui a l’air si compliquée pour elle. Insiste sur tes relations avec tes cadets. « On ne sait jamais ce qui peut arriver ». Tu avais songé à un deuil, au parc, parce que sa famille souffrait aussi. Est-ce qu’elle aurait perdu un frère ou une sœur ? Tu repenses aux photos aperçues un peu plus tôt. Tu n’oses pas poser la question, ce serait trop brutal.

— On s’entend très bien, eux et moi. Vous avez raison. J’essaie de les préserver de tout ce qu’il se passe, mais ça ne remplace pas non plus ma présence à leurs côtés…

Tu parles sans la regarder. Tu te hais de mentir sur ce sujet-là, de continuer à inventer alors que cela semble la toucher profondément. Mais ses paroles restent vraies. Après votre fuite, tu as regretté de ne pas avoir mieux et plus profité du temps passé avec Victor, Carl et Robin. Ils faisaient partie des repères inamovibles de ta vie ; dans ton esprit d’enfant, ils seraient toujours là, ton meilleur ami, ton cousin protecteur, ton grand-frère pénible et compétitif, mais ton grand-frère quand même. Tu n’avais jamais imaginé autre chose. C’est venu avec la découverte de tes pouvoirs, la peur d’être séparé d’eux, qu’on t’emmène loin parce que tu étais un monstre et qu’il faudrait qu’on te tue, mais tu as tout fait pour essayer de préserver ce que tu avais. Est-ce que tu aurais pu agir autrement ce jour-là ? Retenir ton pouvoir ? Tu ne maîtrisais rien. Tu voulais moins que tout que cela arrive, mais c’est arrivé quand même.

— On a tendance à croire que ceux qui nous entourent seront toujours là, à oublier que tout peut être complètement bouleversé du jour au lendemain. Que rien, jamais, n’est assuré.

C’est logique, on ne peut pas passer sa vie à envisager le pire. Mais le jour où ça arrive, la fracture est d’autant plus dévastatrice. Comme le jour de la disparition de ta mère. Tu avais beau savoir que ça pouvait arriver, vous aviez beau avoir anticipé autant que possible… ta vie a quand même explosé. Vous étiez à peu près tranquilles depuis quelques années ; sans toi, ta mère se fondait plus facilement dans la vie londonienne. Vous auriez presque pu vous croire tirés d’affaire, ton père occupé par autre chose. Oh, vous avez fait attention à ne jamais tomber dans ce piège, à ne jamais vous relâcher. Ça n’a pas suffi. Même si la nécessité de survivre a pris le dessus, même si tu es profondément convaincu que ta mère n’est pas morte, tu comprends ce sentiment déchirant de perte, du monde qui semble soudain s’ouvrir sous toi pour t’engloutir.

Le sujet du mariage amène un peu de légèreté, même si ton cœur reste serré. Tu te doutes que ce n’est pas vraiment pour toi. Qui est-ce que tu pourrais ainsi faire entrer dans ta vie ? À qui serais-tu capable d’infliger le poids de tes ennuis ? Ce serait une inconnue de plus dans cette équation complexe qui constitue ton existence et que tu ne parviens pas à résoudre.
Abigail t’encourage à profiter de la vie d’abord et ça te fait sourire.

— Oh j’en ai bien l’intention ! Je vais prendre exemple sur vous.

Quant à la place à occuper dans le monde, tu l’imagines mouvante, sans cesse changeante pour s’adapter à la personne qui évolue. Tu n’es pas le même qu’à seize ans, loin de là. Et ton « moi » de seize ans était déjà bien différent de l’enfant que tu étais. Le tout est de trouver le bon ajustement, le bon équilibre – et c’est quelque chose qui te semble si fragile, si indicible que tu as l’impression que le moindre souffle de vent suffirait à faire osciller la balance. Abigail hausse les épaules avant de répondre. La place qu’on occupe dans le cœur de ses proches… Tu baisses les yeux. C’est là que tu sens d’autant mieux ta solitude. Tu as des amis, oui, et tu tiens énormément à eux. Mais tu n’as aucune idée de la place que tu occupes pour eux. Si tu disparaissais, s’il t’arrivait quelque chose, à quel point cela les affecterait-il ? Ils te sont essentiels, mais tu doutes de l’être pour eux – ça sonne terriblement prétentieux, orgueilleux, égoïste, présenté comme ça – tu ne cherches pas réellement à devenir essentiel, tu espères surtout compter un peu, ne pas être juste… un élément du décor. Tu aimerais être celui vers qui on peut se tourner. Stupide. Tu ne peux même pas te débrouiller par toi-même, alors aider les autres ? Encore heureux qu’ils aient d’autres personnes à qui s’adresser, il faudrait être vraiment désespéré pour se tourner vers toi… Tu chasses les pensées. Tu t’efforces de faire du mieux que tu peux quand tu en as l’occasion, en espérant ne pas être trop à côté de la plaque. Tu n’as pas à chercher plus loin, tu ne pourras jamais leur offrir toute la confiance qu’exige une véritable amitié, ni leur rendre tout ce qu’ils font pour toi et dont ils n’ont sans doute pas conscience ; tu ne pourras jamais aller au-delà des apparences. Alors, c’est mieux qu’il reste toujours une certaine distance. Le jour où tu disparaîtras, ça ne leur fera pas trop mal. La gorge nouée, tu souffles :

— Oui, sûrement.

Ta voix sans timbre trahit toute ton incertitude.

La perspective du lendemain matin te met du baume au cœur. Abigail ne te dit rien de plus, ce qui attise ta curiosité. Pour autant, tu ne cherches pas à réfléchir à ce dont il s’agit : tu auras la réponse en temps voulu, t’interroger maintenant ne te mènera rien et tu aimes bien ce petit côté de surprise.
En revanche, la nuit t’inquiète un peu. Tout au fond de toi, ça ne te dérangerait pas de rester ici, de profiter encore quelques heures de la maison chaleureuse d’Abigail, et de sa propriétaire. Okay, si tu es honnête avec toi-même, tu en as même très envie. Malgré tout ce que brasse la conversation, tu te sens bien ici. Revenir sur des sensations que tu consacres tant d’effort à enfouir d’ordinaire t’aide malgré tout à y voir plus clair, bien que le tableau d’ensemble ne soit pas rassurant. Et tu es à l’abri du reste du monde, tu n’as pas besoin de réfléchir – ou moins qu’ailleurs. Alors ce n’est pas grave si tes barrières sont moins hautes. Tu as surtout l’impression que partir là serait la pire des erreurs. Tu ne veux pas te retrouver seul. Pas maintenant. Mais il y a la nuit… et au vu des précédentes, ça risque de ne pas être très glorieux. À quel point est-ce que tu t’agites et fais du bruit avant de te réveiller ? L’insomnie n’est pas un problème en soi, tu as l’habitude de rester des heures éveillé en attendant l’aube, mais tu préfères éviter de la déranger. Quoique, tu n’es pas sûr que ce soit le cas, en fait. Si elle a perdu quelqu’un en cette période… tu imagines sans mal les cauchemars à l’arrivée de la date et ses cernes parlent pour elle.

Les doigts toujours crispés sur les bords de tes manches, tu ne sais pas comment réagir, pétrifié à l’idée qu’elle ait compris, des questions qui ne vont pas manquer de suivre… Qui ne viennent pas. Et cela te met du baume au cœur. Elle a repris sa place sur le canapé, sans essayer de venir vers toi. C’est heureux, tu aurais du mal à supporter que quelqu’un envahisse ton espace à cet instant. Brûlantes, quelques larmes s’échappent, tu te mords les lèvres en t’efforçant de te reprendre. Il ne manquait plus que ça.
Ne pas t’effondrer là, tout de suite, te demande un immense effort qui achève de t’épuiser. Qu’Abigail se concentre sur Grishkin et non sur toi t’aide. Elle aussi a l’air ailleurs. Tu profites de ces quelques instants pour te ressaisir, ravaler les larmes qui ne demandent qu’à sortir. Les bras croisés contre toi, tu inspires profondément. La pointe aiguë sur ton bras te tire une grimace, plus d’ennui que de douleur. Tu auras du mal à te dispenser de soins plus approfondis si tu ne veux pas achever de ruiner tes vêtements. Abigail reprend la parole, tu ne la regardes toujours pas.
Ce que tu peux apporter au monde… un rire nerveux t’échappe. Ta voix est lasse lorsque tu lui réponds :

— Je n’ai pas grand-chose à lui apporter, à part des soucis peut-être. Je ne suis pas quelqu’un de bien non plus, même si j’essaie de faire des efforts.

C’est dit sur le ton du constat, un avis neutre sur la situation. Et je ne mérite rien de ce que vous faites pour moi. Tu retiens les mots de justesse. Frémissant, plus pour t’occuper les mains que par réelle envie, sans la regarder, tu attrapes le flacon et une compresse. Les dents serrées, tu verses un peu de potion sur la gaze, hésites sur la façon de procéder… finis par la glisser sous ta manche en relevant celle-ci le moins possible. La blessure n’est pas trop haut, tu plaques la compresse dessus. La potion mord la plaie, mais le soulagement vient presque aussitôt. Tu maintiens la compresse appuyée à travers ta manche.

— Un peu trop brûlante. Elle enflamme tout sur son passage et ne laisse que des cendres.

Un gémissement échappe à Abigail, tu relèves aussitôt les yeux sur elle. Elle a surtout l’air épuisée, enfoncée dans le canapé comme si elle essayait d’y disparaître. Malgré toi, tu l’imites, t’abandonnes un peu plus contre les coussins. Tu pourrais presque sombrer sans le souvenir que tu n’es pas seul – mais pour la première fois depuis… longtemps, ce ne sont pas tes sens qui le hurlent. D’ordinaire, tu es toujours à suivre les mouvements des autres, à percevoir le danger potentiel dans toutes tes fibres, à rester en alerte sans pouvoir te détendre, prêt à… réagir. Là, c’est comme si ton corps lui aussi baissait ses barrières, quittait cette hypervigilance qui t’épuise. C’est presque inquiétant. Mais malgré l’incertitude une petite pointe chaude de soulagement naît dans ton ventre. Tu renifles, les yeux toujours humides.

La conversation dérive vers l’Ordre et à la place que peuvent occuper les créatures magiques dans le conflit. Question difficile, épineuse. Tu n’arrives plus vraiment à réfléchir, à ordonner tes idées.

— C’est le plus important, de ne pas les forcer et de les traiter en amis… Je crois qu’il n’y a pas de réelle bonne réponse à cette question, malheureusement. Et comme on disait, chaque petit geste compte, même si vos élèves ne sont pas nombreux, c’est toujours autant qui vous auront entendue, qui pourront en parler avec d’autres… Poignée après poignée, cela finira par faire un certain nombre.

À ton tour, tu parles de tes propres actions. Ce n’est pas grand-chose en vérité ; courir sur un champ de bataille et lancer des sortilèges, ce n’est pas ce qui apporte le plus au conflit. Tu as juste assez l’habitude pour être plus difficile à éliminer que d’autres.
Tu hoches la tête, il y a des fanatiques des deux côtés, malheureusement.

— Oui, il y a des Blood Circle qui ne rêvent que d’éradiquer les sorciers, qui nous voient comme des abominations… De même qu’il y a des mangemorts pour qui les moldus devraient être tués ou réduits en esclavage, comme les nés-moldus. Ce n’est pas avec eux qu’il faut discuter, ça ne servira rien. Mais j’espère que les autres sont assez… intelligents, arrivent à prendre assez de recul pour s’interroger. Et peut-être envisager d’autres solutions. La majorité de chaque côté a juste envie de vivre en paix.


Tu approuves également la fin. C’est comme ça que tu as toujours vécu, en savourant les pauses entre deux moments de tension et de peur. Les promenades avec ta mère, les cafés ou les glaces dégustés ensemble, perdus dans la foule, les après-midi passées au soleil dans le parc de Poudlard, un mot, une phrase, un rire, un regard, un geste… tous ces petits riens de tous les jours, comme autant d’éclats de lumière, qui t’aident à tenir et à avancer. Tu as du mal à les voir maintenant, dans la brume perpétuelle qui te noie, à travers tes angoisses et tes craintes, mais ils sont quand même là. Et tu en vis un en ce moment même.

— Je suis d’accord. Si on attend seulement l’extraordinaire, on passe à côté de plein de choses… de choses qui nous aident à vivre. Et parfois, on a la chance de découvrir une perle un peu plus grosse que les autres.

Allusion à tout ce qu’elle t’offre. C’est une perle rare et précieuse.
Aucun de vous deux n’a réellement envie de bouger ni de manger, tant mieux. Elle s’excuse pour sa fatigue, alors que c’est toi qui débarques chez elle, et pour ses qualités d’hôte. Tu secoues la tête avec un sourire.

— Je fais un invité bien plus déplorable, avec mes états d’âme. Mais très sincèrement, je n’aurais pas pu rêver meilleur endroit et meilleure hôte. Ne vous gênez surtout pas pour moi, si vous voulez un peu plus de calme.

Tu peux très bien rester seul, en tout cas ne pas l’obliger à te faire la conversation toute la soirée. Qu'est-ce qu'elle attend de toi ? Tu espères ne pas commettre d'impair. Ton regard s’égare vers la bibliothèque. Tu n’auras sans doute pas l’énergie de lire beaucoup, encore moins de tout comprendre, c’est davantage pour t’occuper les mains. Tu désignes le meuble.

— Vous permettez que je regarde ? Qu’est-ce que vous conseilleriez à quelqu’un qui ne s’y connaît pas trop en créatures magiques ni en dragonologie ?


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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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On the run,
falling to the depths

Do you know what it's like when
You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
Do you know what it's like
To wanna surrender ?
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Abigail MacFusty
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Ven 16 Avr - 17:42
Même si le terme que j'avais employé venait certes d'une racine religieuse, je n'étais pas croyante pour autant, ou alors comme je l'avais spécifié à Eirian, c'était ma propre religion. Celle de l'amour, de la nature, des créatures magiques, de la tolérance. Je n'avais aucune croyance divine quelconque, et pourtant, vu mon état, je devrais peut-être. Éventuellement que prier pour le salut de l'âme de Kyle, supplier de me donner un dernier accès à son esprit me ferait du bien… mais je n'en faisais rien, car je savais que ça ne changerait fondamentalement rien, que ça ne ramènerait pas mon frère. La magie était puissante, mais elle ne pouvait ni soigner les maladies incurables (comme celle que j'avais), ni faire revenir les morts. Par ailleurs, l'existence même des fantômes était une parfaite énigme pour moi. Pourquoi certains et pas d'autres ? La théorie moldu disant qu'ils étaient restés parce qu'ils avaient encore quelque chose à accomplir de leurs vivants ne me séduisait pas en totalité. Mon frère avait une multitude de choses à accomplir, alors je ne le voyais guère trouver satisfaction à rester tranquillement endormi dans sa tombe sans essayer de devenir un fantôme. Il y avait forcément autre chose.

- Moi non plus et je dirais même que je n'ai aucune culture de la religion même si elle est le fondement de bien des événements de l'existence humaine.

Tuer au nom de Dieu, c'était une excuse depuis des millénaires et ça n'avait guère changé. Malgré tout l'église restait extrêmement puissante encore aujourd'hui même si d'autres autorités, pas forcément plus sages, avaient vu le jour.
Cela dit, je me demandais qui arriverait à gérer parfaitement en étant dans les hautes sphères. La critique était aisée, mais, pour la plupart, ne faisaient-ils pas de leur mieux comme ils le pouvaient avec ce qu'ils avaient en main et surtout avec ce que nous, pécores, leur donnions ? Personnellement, je n'étais pas certaine de pouvoir mieux diriger un pays ou une ville qu’eux, surtout vu mes handicapes sociaux évidents.
Peut-être que dans le fond, c'était comme de devenir parents et devoir gérer une famille. Il y avait forcément des moments de doutes, des moments plus forts de conflits avant d'essayer de retrouver un certain calme. Le calme avant la nouvelle tempête.

Sans grandes difficultés je me souvenais de l'ambiance familiale à la maison alors que nous n'étions que des enfants Kyle et moi. Bien souvent nous nous battions pour des broutilles, compétition normale entre un frère et sa petite sœur, et c'était ce qui avait contribué à faire de nos des personnes aussi proches que nous l'avions été. Au point de travailler avec les créatures main dans la main, et même si Kyle ne projetait pas d'être un dragonologiste comme moi, il n'en était pas moins dévolu à la cause de notre famille, à la protection des Noirs des Hébrides, et à celle des autres espèces. C'était ce qui l'avait perdu.
Alors que les paroles d'Eirian résonnaient à mes oreilles comme un lointain écho qui me parvenait sous l'eau, je revoyais son visage plein de gentillesse envers moi, protecteur et plein de cet amour qu'il me portait. Ce fut à cet instant qu'une larme perla le long de ma joue, ce qui me surprit. Non pas que je pleure, je savais que j'étais quelqu'un de très émotionnel donc pleurer ne me dérangeait plus, mais j'étais davantage étonnée que mon corps ait encore des larmes à faire couler. J'avais donc encore assez d'eau pour en produire, je n'avais donc pas encore tout évacué ? Pourtant je me sentais à ce point vide… Glissant un index distrait sur ma joue pour l'essuyer, sans chercher à me cacher parce que je ne ressentais aucune honte de me laisser aller ainsi à mes états d'âme, je soupirais, le souffle coupé par un sensible hoquet.

- Non… rien n'est assuré hélas, je peux en attester. Et vous avez raison, rien ne remplace votre présence à leurs côtés, tout comme leurs présences ne peuvent pas être remplacées à vos côtés. Essayant de reprendre contenance (sinon j'allais pleurer toute la nuit), j'inspirais profondément pour continuer. Une perte d'un être proche reste terrible. Elle laisse un vide immense dans lequel il est facile de se perdre.

Ce gouffre dans lequel je m'étais égarée il y avait deux ans de cela. D'ordinaire j'arrivais à me repérer dans le noir sans trop de difficulté, mais pas en été. En été, les ténèbres étaient plus puissantes, elles m'englobaient avec plus de sévérité, me rendant totalement aveugle à n'importe quelle lumière. J'étais seule, et mon entourage, même s'il vivait la même chose que moi, ce n'était qu'une voix au loin qui me parvenait avec peine.
La voix d'Eirian pourtant, elle, me parvenait de manière plutôt limpide présentement, et je tentais tant bien que mal de m'y raccrocher pour ne pas tomber et me perdre une énième fois. Alors au sujet du mariage, je ne pouvais m'empêcher de pouffer un peu de rire ce qui vint violemment contraster sur ses larmes qui perlaient le long de mes joues.

- Attention, je n'ai jamais dit que j'étais un exemple à suivre ! Je m'essuyais une nouvelle fois le visage du dos de la main. Je crois juste… que je ne suis pas faite pour ça.

Mes histoires d'amour avaient toutes été un fiasco et je ressentais une certaine réserve avec Thomas O'Malley de crainte de tout gâcher. Mais le fait d'être sur la réserve me disait déjà que je risquais de tout faire exploser entre nous. C'était un équilibre délicat que je ne parvenais pas à trouver, de par mes barrières sociales, ma très grande timidité et le fait que je sois quelqu'un de très solitaire. C'était un mélange qui ne plaisait pas à tout le monde, pourtant, je n'étais pas sans savoir que je pouvais attirer bien des regards sur moi de par mon apparence. Je ne cherchais cependant jamais à attirer l'attention. Ceux qui me remarquaient voulaient me remarquer, ce n'était jamais l'inverse.
Adviendra ce qui devra avec Thomas, je n'allais pas me prendre la tête avec ça maintenant d'autant plus que j'allais le recevoir ici même dans les jours à venir. L'ambiance ne sera pas la même qu'avec Eirian, pour sûr.
Par ailleurs bien peu inquiète de la place que me faisait Thomas dans son cœur, je remarquais sans le moindre mal le changement de comportement de mon jeune invité qui sembla soudainement perdre un peu de contenance pour me parler d'une voix si neutre qu'elle n'était pas naturelle. Je reconnaissais bien là toute l'incertitude qui m'habitait moi aussi. Alors, d'un faible sourire aux coins des lèvres je me permettais de commenter.

- Vous savez en ce qui me concerne, en dehors de mes parents, je ne suis pas certaine d'être dans le cœur de qui que ce soit. J'étais une âme solitaire, et malgré la paix que cela m'offrait, il y avait aussi un prix à payer : celui de ne laisser plus aucune trace chez quiconque. Ce n'était pas le cas de Kyle qui avait beaucoup d'amis et qui était très attendu dans bien des filiales professionnelles. Quand bien même aujourd'hui Harper était ma meilleure amie et que je savais être importante pour elle, je n'étais pas certaine que la place que je portais à son cœur était aussi immuable que ça. C'est… sûrement le prix à payer lorsqu'on aime vivre reclus de la société et qu'on cherche à ne pas attirer l'attention sur nous.

Il y avait toujours un équilibre, un prix à payer à nos comportements, à toutes choses. À l'instar que nous avions toujours le choix, il y avait toujours le bien et le mal dans ce que nous faisions. C'était une règle indiscutable de l'univers et de la nature. Le moindre grain de poussière engendrait de l'ombre, aussi petite soit-elle, ainsi, la lumière originelle ne pouvait rester pure. Tout comme la licorne qui foulait l'herbe de ses sabots n'était jamais certaine de ne pas écraser un petit insecte.
C'était ainsi, et c'était une règle élémentaire qu'il fallait apprendre à accepter, tout simplement. Nous n'avions pas le choix que de vivre avec, tout comme nous n'avions pas le choix que de subir les saisons et la météo. Mais l'être humain avait cette étonnante faculté à s'adapter, et alors que je regardais Eirian ravaler ses larmes tout en se soignant, je restais profondément silencieuse jusqu'à ce qu'il eut un rire nerveux et qu'il vint répondre à mes théories sur un ton se rapprochant presque du sarcasme à mes oreilles. Les prunelles perdues sur le plumage de Grishkin, je secouais sensiblement la tête.

- Je ne pense pas que ce soit vrai. Encore une fois, si vous êtes en ce monde c'est forcément pour lui apporter quelque chose, aussi petite soit cette chose. Peut-être à une personne que vous connaissez, peut-être à quelqu'un que vous connaissez peu, en lui offrant tout simplement un peu de votre temps et de votre compagnie, l'espace de quelques heures. D'un furtif regard en coin j'osais revenir sur le jeune homme un court instant. Vous me dites faire partie des Aurors, vous avez prêté allégeance à l'Ordre du Phénix, vous poursuivez vos études, vous êtes bien habillé sur vous et je vous vois au bord des larmes. Je m'interrompais pour que le jeune garçon puisse sentir le poids (bénéfique) de mes paroles. J'ai beau vous observer, je ne vois pas quelqu'un qui ne mérite pas sa place ni quelqu'un de mauvais. Vous dites que vous faites des efforts, je ne peux donc que vous encourager à continuer, parce que je suis certaine que vous essayez de faire ce qui est juste. Je penchais un peu la tête en avant pour glisser une main dans mes cheveux avant de tout à fait m'appuyer dans mon canapé. Si vous avez besoin de vous laisser aller aux larmes, faites donc sans honte. Je suis la première à pleurer devant un bourgeon qui fleurit, je ne vous jugerais pas. Ce n'est pas bon de tout garder comme ça pour soi. Profitez peut-être d'être ici pour relâcher la pression, vous vous sentirez mieux ensuite.

Émotive petite sorcière, qu'y avait-il de plus beau qu'une fleur qui grandissait et s'embellissait ? Même mon frère s'était moqué de moi à l'époque en me voyait en larme devant les romans imaginaires que je lisais ou en voyant un dragonnet tout juste sorti de sa coquille. Cela dit, je ne voulais pas avoir l'air de donner des ordres, alors, j'enchainais bien vite.

- Pardonnez-moi je ne voulais pas avoir l'air de vous commander, ce ne sont là que d'humbles suggestions.

Alors, je refermais les yeux tandis que l'étudiant des Serdaigles en vint à me redonner son avis sur la saison estivale. À son dernier mot, cette image de mon frère que j'avais eue plus tôt en tête, celle où il me souriait, s'embrasa subitement. Je ne vis plus que des flammes avant de pouvoir apercevoir ce qui restait de lui. Un corps calciné, traits déformés par la douleur et l'horreur qu'il avait eu le temps d'entr’apercevoir avant de quitter ce monde. Ce corps noirci et brûlant que j'avais tenu tout contre moi tandis que je hurlais ma détresse, que je perdais ma voix à crier sa perte.
Le souvenir fut si violent que j'en sursautais à en faire réagir Grishkin qui, comme dérangé par ma présence, préféra se laisser tomber tout à fait par terre pour roder alors autour du foyer de la cheminée devant nous. Me mordant la lèvre de honte, je me recroquevillais comme une enfant apeurée par les démons tapis dans les ombres. Genoux rassemblés contre ma poitrine, j'essayais de ne pas me perdre dans les méandres de mon esprit en gardant la voix d'Eirian comme repère. Ce phare à ce point bienvenu.
Il me parlait de nos rôles au sein de l'Ordre, du Blood Circle et de ce qui peut être envisagé comme solution pour venir en aide à ceux qui le méritent. Tout le moins, ceux que nous pensions avoir du mérite. Un peu tremblante par cette terrible vision que j'avais eue, je me contentais d'abord de hocher la tête tout en me forçant à déglutir ma salive pour parvenir à m'éclairer la voix. Esprit un peu ailleurs, je faisais toutefois l'effort de donner une réponse un peu intéressante.

- Je ne connais aucun moldu, à dire vrai. Même si je n'ai rien contre eux, je n'ai jamais vraiment cherché à m'intégrer. Sorcier ou moldu, c'est du pareil au même dans la foule. Je crois… effectivement qu'il pourrait y avoir des personnes un peu plus raisonnées et raisonnables. J'en connais parmi les Mangemorts. Peut-être qu'ils ne donnent pas de leurs voix aujourd'hui, mais qui sait ? Un jour en grandissant, avec l'évolution des événements, ils pourront être entendus un jour, et réussiront à calmer les choses. Si… si des gens comme nous ne cessent de les encourager en leur venant en aide comme nous le pouvons. L'histoire humaine nous l'a déjà montré à plusieurs reprises que… dans un conflit, la personne de tête ne reste qu'un temps au pouvoir. Je marquais un temps de pause, et comme si je liais la conversation de la perte des proches à celle-ci, je rajoutais. Tout arrive… même ce à quoi l'on s'attend le moins.

Le principe même du lâcher prise était de faire confiance aux événements et de ne jamais cesser de croire que toute chose avait une raison d'être. Qu'un jour, tout irait mieux, je n'en étais pas forcément persuadée, car, encore une fois, tout n'était fait que de changement, tout comme les saisons qui ne cessaient de défiler. Il y avait des instants propices pour chacun et pour chaque chose. Il fallait juste réussir à composer avec ce que nous avions du mieux que nous le pouvions. J'en revenais encore une fois à cette conclusion avec un fatalisme qui me faisait presque froid dans le dos.
Alors, bien épuisée à nouveau par tous les efforts que je devais faire, en repoussant le souvenir de mon frère, en tenant simplement la discussion animée, j'osais refermer les yeux. À la différence avec tout à l'heure c'était que cette fois-ci je fis le vide dans mon esprit pour éloigner le plus de pensées possible.
Mais même ainsi je réussissais tout de même à continuer à suivre la conversation avec Eirian, et à son appellation je ne pus m'empêcher de sourire. Était-ce moi qui me faisais des idées ou alors venait-il d'imager sa propre situation avec moi en cet instant précis. Je mettais ça sur le compte de mon grand esprit aux mille possibilités imaginatives avant de me permettre de pousser un léger rire par les narines.

- Vos états d'âme ont parfaitement leurs places ici ne vous en faites pas. J'accueille et je prends ce que vous voulez bien m'offrir. Mais… si vous avez le cœur trop lourd, vous savez que vous trouverez en ma personne une oreille attentive et sans jugement.

Voilà, c'était fait. Depuis le temps que je devais le lui dire, cette fois-ci c'était officiel. Je venais de lui tendre la main et de lui proposer mon aide. Même si je me l'étais interdite jusqu'ici, je savais bien que je ne pouvais pas spécialement résister à mon instinct premier de venir en aide à autrui. Alors qu'il désignait ma bibliothèque, je me permettais de rouvrir les yeux avant de regarder les piles de mes livres tout en hochant la tête.

- Bien sûr, prenez ce qui vous sied, je n'ai rien à cacher. Je me permettais un nouveau petit instant de réflexion avant de reprendre. Tout dépend de ce que vous souhaitez découvrir. Si ce ne sont que des bases, donc habitats et nourritures, je vous conseille "Vie et Habitat" par monsieur Scamander. Si c'est pour en savoir un peu plus sur les créatures, leurs spécificités donc, je peux vous orienter sur "Les origines" de monsieur Knight. Enfin pour les dragons et bien… "Journal d'une dragonologiste" par Ellen MacFusty fera peut-être l'affaire. D'un petit regard rieur, je fixais Eirian. Oui cette femme est mon aïeul. Et comme elle avant moi, j'étais en train d'écrire des livres sur mes découvertes et mes différents voyages. Le travail de toute une vie. De toute une passion. Parce qu'à défaut d'être dans le cœur des gens, je me noyais dans mon travail.


Never Ending Circles
ANAPHORE


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Lun 19 Avr - 23:05
Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas
« juillet 2020 »
Tes connaissances en matière de religion sont plus que lacunaires. Tu as les bases de la religion chrétienne, tu admets qu’il peut exister une force supérieure, qu’on l’appelle Dieu, hasard ou destin, mais au fond tu crois surtout aux valeurs humaines, la justice, l’acceptation de l’autre, la paix, ce genre de choses, si naïf que cela puisse paraître, surtout dans un monde en guerre. Mais justement, c’est celles-là qu’il importe de préserver pour ne pas laisser des idées délétères l’emporter. Tu sais bien que leur application n’est pas parfaite, qu’elle ne le sera peut-être jamais, cependant… il y a des choses à faire, le tout est d’arriver à les faire avancer, et si tu peux changer quelque chose à ta petite échelle, eh bien, ce sera toujours ça de pris. Tu es déjà tombé sur une phrase d’un philosophe moldu qui expliquait que pour l’emporter, le mal avait seulement besoin que les gens bien ne fassent rien. D’autres soulignaient la banalité du mal, le fait qu’il n’y a pas besoin d’être un monstre assoiffé de sang pour le commettre. Des idées qui t’ont marqué et que tu partages. Tu hoches la tête en entendant les paroles d’Abigail.

— De même pour moi, je n’ai que quelques bases, alors qu’elle garde une grande influence sur le monde.


Mais tu n’as pas vraiment le temps – ni l’envie – pour le moment de creuser le sujet. Même s’il y a souvent ce côté rassurant de se dire que la mort n’est pas définitive, qu’il y a quelque chose après. C’est peut-être cela, la force des religions, l’espoir qu’elles donnent, cette certitude qu’on n’est jamais seul pour affronter la vie. Qu’une force autre vous protège et vous guide… cela aussi doit aider. Mais il y a aussi tous les revers que cela comporte, les guerres au nom de Dieu, prétexte bien utile pour les assoiffés de pouvoir qui détournent les textes à leur avantage et leur font dire ce qu’ils veulent afin de correspondre à leurs idées. Les valeurs sont souvent les mêmes d’une religion à l’autre, l’amour, la paix, la justice. C’est sans doute un travers humain de les pervertir, de s’en servir pour faire le contraire de ce qu’elles représentent. Certainement, même, puisque les dirigeants laïcs tombent souvent dans les mêmes problématiques. Tu ne prétendras pas être capable de faire mieux qu’eux, mais il faut bien dire que même dans les démocraties, les dirigeants voient souvent leur propre intérêt et non le service des autres.

À mots détournés, tu abordes une partie de ta situation, évoques plus ou moins ta fratrie inventée. Cependant, tu penses souvent à Victor. À ce qu’il devient. À ce qu’il peut penser de toi maintenant, son frère sorcier qui lui a volé sa mère – ça a toujours été le grand regret de celle-ci de ne pas avoir pu vous emmener tous les deux, d’avoir dû le laisser derrière ce jour-là, sous l’emprise de votre père. Ils ont dû se revoir depuis que ton père l’a retrouvée. Est-ce qu’ils ont pu parler, s’expliquer ? Tu l’espères. Bien sûr, tes rêves d’enfant d’avoir une famille unie, de retrouver ce que tu avais quand tu étais petit n’ont pas de sens, cela fait longtemps que tu n’y crois plus, mais si vous pouviez trouver un chemin… que ton père soit la seule ombre au tableau, et pas ton frère… ce serait déjà bien. Mais là non plus, tu ne te fais pas beaucoup d’illusions sur le sujet. Victor n’a aucune raison de te pardonner ce qu’il s’est passé.
Le sujet est sensible pour Abigail, tu le vois d’autant plus lorsqu’une larme roule sur sa joue. Tu te mords les lèvres. Quel idiot d’amener un tel sujet, sur lequel tu ne lâches que des mensonges en plus. Ses paroles confirment ce que tu soupçonnais.

— Je suis désolé pour ce que vous avez traversé… et traversez encore.

Les mots paraissent toujours faibles dans ce genre de circonstances. Tu espères que le temps parviendra à apaiser un peu cette douleur, l’aidera à apprivoiser ce vide, à défaut de le combler – ce n’est pas le genre de pertes dont on peut vraiment se remettre, on apprend seulement à vivre avec, à avoir un peu moins mal.
L’été doit raviver tous ses mauvais souvenirs, comme cela le fait pour toi. Les dates anniversaires sont toujours des moments compliqués à traverser avec leur cortège de cauchemars, d’angoisses et d’insomnies. Ce n’est pas simple de les affronter seul, mais accepter la présence de quelqu’un n’est pas évident non plus. Tes mensonges t’obligent de toute façon à ne rien partager avec qui que ce soit, mais tu comprends pleinement aussi l’envie de repli, ces moments où on veut juste exprimer sa peine sans regard extérieur, sans réconfort qui peut paraître absurde parce qu’il ne peut rien changer, parce qu’il n’est pas la hauteur de ce qu’on éprouve.

La conversation se poursuit malgré tout, prend un tournant plus léger. Le mariage, si loin de tes préoccupations. Un sourire pointe sur les lèvres d’Abigail, comme un arc-en-ciel sous la pluie. Tu souris doucement.

— Mais c’est un exemple que j’ai envie de suivre. À dire vrai, je ne suis pas sûr d’être fait pour ça non plus.

Le regret teinte un peu ta voix. Trop de mensonges, trop de non-dits pour que tu acceptes une relation. Trop de danger aussi. Tu n’es déjà pas sûr de survivre à l’été, alors, imaginer le futur… ce ne sont que des rêveries, des illusions dont tu te berces parfois mais que tu ne laisses jamais grandir. À quoi bon ? Qui voudrait de quelqu’un comme toi de toute façon ? Tu n’as rien à donner, juste des mensonges, des refus et des peurs. Rien qu’imaginer que quelqu’un puisse te regarder ainsi suffit à te mettre mal à l’aise, à te rendre nauséeux. Là comme ailleurs, tu préfères être invisible, ne jamais attirer l’attention. C’est mieux pour tout le monde.

Quand Abigail souligne que l’important, c’est la place qu’on occupe dans le cœur de nos proches, tu ne parviens pas à cacher ta réaction. En dehors de ta mère, tu ne sais pas pour qui tu comptes vraiment – ce n’est pas plus mal, tu as longtemps tout fait pour garder tes distances, même si tu as rompu avec cette ligne de conduite ces derniers temps. Mais malgré tout, tu restes à la périphérie… et tu ne peux pas demander ni exiger plus, tu es déjà bien assez hypocrite, regarder tes amis dans les yeux en leur débitant tes mensonges, du plus anodin au plus lourd, devient de plus en plus difficile. Mais impossible de faire marche arrière. C’est une situation inextricable et ça te noue le cœur.
Abigail évoque ses parents. Oui, ta mère, bien sûr. Ton père veut juste te coller une balle dans la tête – ou te faire souffrir le plus possible avant d’en finir, le connaissant. Ça doit être de lui que vient une partie de cette incertitude quant à ce que les autres éprouvent pour toi. Quand l’une des personnes censées t’aimer de façon inconditionnelle ne songe qu’à se débarrasser de toi, comment imaginer que d’autres puissent t’apprécier ? Tous tes remparts ne font qu’ajouter au problème, ces remparts que tu ne peux pas faire disparaître sous peine de voir ta vie s’effondrer. Tu ne supporterais pas le rejet de tes amis.

— Je ne crois pas être dans le cœur de grand monde non plus. Mais comme vous dites, j’essaie de ne pas trop attirer l’attention. Alors, c’est normal. Juste un peu douloureux à certains moments.

Tu te perds dans tes envies contradictoires, celle d’être seul et celle d’exister au moins un peu pour les autres, de ne pas rester sur le bord du chemin – en vérité, tu te fais parfois l’impression d’être un vampire, à espérer ainsi compter pour les autres, un vampire qui se gorgerait de ce qu’on lui donne sans rien proposer en retour. C’est de la lâcheté, surtout. Mais tu as fait tes choix depuis longtemps, la vie te les a imposés, c’est ce qui t’a permis de survivre autant d’années. Alors, tu n’as d’autre solution que de continuer ; imaginer que tout aurait pu être différent ne t’apportera rien. Tu es le seul responsable de ce qui t’arrive.

Tu finis par accepter les soins proposés par Abigail, bouleversé, remué jusqu’au plus profond de toi, soulagé malgré tout de te trouver entre ces murs chaleureux. Tu essuies les larmes sur tes joues, en ravales une bonne partie, même si tu sens les gouttes d’eau perler encore. Les mots sortent, quelque peu ironiques, sur ce que tu peux apporter au monde – pas grand-chose. Tu as détruit ta famille, ton meilleur ami a grandi en essayant de faire son deuil de toi, tu n’as d’autre espoir que réussir à survivre un peu plus longtemps, pour ne pas gâcher les efforts déjà faits, en tâchant de te donner des objectifs un peu plus consistants. Survivre pour survivre, ça ne sert à rien, tu ne veux pas d’une vie vide de sens. Alors, il y a l’Ordre, les Aurors… Ordre auquel tu mens autant qu’aux autres. Aurors que tu as déjà trahis parce que Towsen te fait toujours chanter. Rien de tout ça n’a de sens. Tout ce que tu construis repose sur du vide, ça s’écroulera fatalement un jour. Le plus tardivement possible, c’est tout ce que tu peux souhaiter.

Abigail souligne que tu peux forcément apporter quelque chose au monde, si petit soit ton apport. Tu ne sais pas, tu ne sais plus. Tu aimerais que ce soit vrai, arriver à donner du sens à tout ça, trouver une raison d’être autre qu’essayer de ne pas te noyer et de maintenir les apparences. Tu te demandes si elle fait allusion à votre discussion. Son énumération te serre le cœur parce qu’elle dessine un portrait qui n’est pas le tien, qui n’est que la façade positive que tu essaies de renvoyer, mais qui masque tout le reste. Ton allégeance était une évidence dans l’idée, parce que tu partages entièrement leur point de vue, un peu moins dans les faits parce que tu redoutais d’attirer l’attention, qu’on s’intéresse à ta famille. Tu l’as rejoint parce qu’il devenait beaucoup trop dangereux de rester seul, sans camp, parce que tu espérais que, d’une certaine façon, ils assureraient tes arrières, il y aurait des gens pour venir te chercher en cas de problème. Et même si tes vêtements trahissent ton manque de moyens, tu mets un point d’honneur à rester présentable. Même si elle doit se douter que tout n’est pas si joli derrière la façade, sinon elle n’aurait pas eu à vider une partie de son armoire à pharmacie pour toi, ça fait du bien de l’entendre.

— On dirait quelqu’un de bien présenté comme ça… Je ne fais pas partie des Aurors, je suis encore étudiant, mais j’aimerais bien, oui. Mais les examens sont très difficiles, je ne sais pas si j’aurai les compétences pour les réussir. Je verrai bien.


Tu feras de ton mieux, en tout cas.

— Merci pour tout ce que vous me dites, c’est vrai que j’y pense rarement de cette façon-là, c’est… un peu trop flatteur par rapport à la réalité, mais ça fait quand même du bien de l’entendre. J’essaie d’agir au mieux avec ce que j’ai… je ne pense pas que ce soit assez.

Pas assez en tout cas pour compenser tes dissimulations et les crimes de ton père. Si la vérité se sait, rien de ce que tu auras fait ne comptera plus et tout prendra une allure de traîtrise. Tu croises les bras tandis qu’elle t’invite à te laisser aller aux larmes, les doigts crispés sur le tissu comme si tu t’y raccrochais. Tu frissonnes. Non. Les larmes sont toujours là, quelques-unes roulent sur tes joues. Non. Si tu vas plus loin, si tu baisses ces barrières-là… tu redoutes ce que tu laisseras échapper, les conséquences. Tu ne tiens que parce que d’ordinaire, tu verrouilles tout cela au fond de toi. Si tu ouvres le barrage… Tu te mords les lèvres de toutes tes forces, bats des paupières. Non.
Abigail se corrige presque aussitôt. Tu secoues la tête, la gorge nouée, la poitrine gonflée de larmes qui ne demanderaient qu’à sortir.

— Vous avez raison dans l’idée, je sais que vous ne jugerez pas.

Mais je ne peux pas. Elles s’échappent pourtant, les rebelles, malgré tout ton corps tendu pour les retenir, continuer de résister.
Abigail évoque l’été, et tu ne retiens pas une phrase sur le goût amer qu’a cette saison pour toi. Mais tu ne t’attendais à la réaction de l’enseignante. Son sursaut brutal te fait aussitôt relever les yeux vers elle. Elle te semble ailleurs, très loin de là, perdue… tu ne sais pas, dans ses pensées, dans un souvenir ? Est-ce que c’est la mention du feu qui a déclenché ça ? Elle te fait penser à ces moments où un mot, une allusion, un geste te renvoient trois ans en arrière, dans ces reviviscences qui n’attendent pas les cauchemars pour se manifester. Tu déglutis, te redresses vers elle tandis que le phénix saute au bas du canapé.

— Pardon, je suis désolé, je n’aurais pas dû dire ça…

Recroquevillée sur le canapé, elle finit cependant par revenir un peu. L’inquiétude ne te quitte pas, tu ne la fixes pas, mais ton attention reste tournée vers elle, tu lui laisses le temps de se reprendre, mortifié de l’impact de tes paroles, sans savoir ce qui pourrait l’aider, si elle attend du réconfort, un geste, si elle préfère que tu passes outre ou que tu la laisses tranquille.

La conversation se poursuit, tournée vers l’Ordre cette fois-ci. Des Mangemorts raisonnables… il doit y en avoir, oui, même si tu dois avouer que tu ne les as pas croisés. Pas dans le triumvirat déjà : on ne se hisse pas à la tête des Mangemorts sans avoir trempé ses mains dans le sang. Des gens comme William Ombrage doivent bien cacher leur jeu. Quoi qu’il en soit, si certains d’entre eux trouvent qu’ils vont trop loin, il serait temps qu’ils se fassent entendre – à moins qu’ils ne préfèrent se taire par crainte des représailles. Tu as de plus en plus de mal avec ce silence implicite qui règne autour de leurs méfaits. Cela te renvoie à la discussion avec Raphaël et Nymphéa en mai, tous trois victimes des Mangemorts, vous n’en avez pas parlé pour ne pas risquer de mettre l’alliance en péril. Mais est-ce que vous associer à des bourreaux et des assassins est vraiment une bonne idée ? Est-ce que ce n’est pas cautionner leurs idées ?

— Ma famille est moldue, il me reste des amis d’enfance aussi. Et eux par exemple acceptent pleinement les sorciers, même s’ils ont du mal à comprendre notre monde. En ce qui concerne les Mangemorts… j’avoue que j’ai du mal à imaginer des voix raisonnables parmi eux. Et leurs idées comme celles des membres extrémistes du Blood Circle me font craindre le pire, j’ai l’impression qu’on entend beaucoup plus les non-raisonnables aujourd’hui et que les raisonnables laissent beaucoup trop dire, peut-être par crainte des représailles ou pour ne pas créer de nouveaux conflits. Mais ça veut dire qu’on laisse beaucoup de pouvoir à ceux qui refuseront d’écouter et même s’ils ne le gardent qu’un temps, ils peuvent déjà faire beaucoup de dégâts. L’histoire se répète souvent, même si ce n’est jamais exactement de la même façon, on pourrait espérer qu’on finisse par apprendre de nos erreurs…

Tu veux croire que la situation finira par s’arranger, qu’une solution pourra être trouvée. Mais de fait l’histoire humaine est faite de soubresauts, d’alternance de paix et de conflits. Ce n’est pas vraiment un cercle, puisque les circonstances ne sont jamais exactement les mêmes… c’est sans doute utopique d’espérer que les hommes finissent par savoir reconnaître les signes qui amènent droit à la crise. Heureusement qu’il y en a et qu’il y en aura toujours pour se dresser contre face aux crises.

Tu soulignes à quel point tu fais un invité déplorable à venir répandre tes malheurs ici, mais Abigail répond qu’elle est prête à t’écouter. Si seulement tu avais des secrets avouables ! Qu’elle te tende la main cependant desserre un peu le nœud dans ta poitrine. Même si elle le fait depuis le début de votre discussion, en t’amenant ici, l’entendre à voix haute te fait du bien. Un soupir t’échappe. Tu ne peux rien dire et quant à ta situation actuelle… tu ne sais même pas ce qui la provoque. Au début de l’année, tu gérais encore ; il y avait certes les cauchemars et les insomnies, mais pas à cette fréquence, pas avec cette intensité. Tu tenais à peu près la route. Towsen ? Qu’il viole tes souvenirs n’a pas dû arranger les choses. Mais ça n’a pas commencé tout à fait au même moment. Alors quoi ?

— À dire vrai… je ne sais même pas ce qui ne va pas. J’ai… Je n’ai rien vécu de traumatisant ces derniers temps ou qui explique tout… ça.

Ta fatigue, tes cauchemars, cette phobie du contact de plus en plus prégnante, cette angoisse permanente. Tu désignes tes bras d’un mouvement de tête pour donner un peu plus de corps à ce « ça » elliptique.

— L’Ordre, les missions, tout se passe bien, j’ai eu la chance qu’il ne m’arrive rien. Mes proches, mes amis vont bien. Ça rend la situation d’autant plus stupide. Je… ça ne va pas bien, et je n’ai aucune idée du pourquoi !

Tu plonges ton visage dans tes mains. Tu as beau réfléchir, tu ne comprends pas. Qu'est-ce qui a bien pu te dérégler à ce point ? Ne pas avoir de réponse te désempare et t'inquiète aussi, tu te sens presque comme un étranger face à tes propres réactions.

Elle te propose de t’occuper autrement. Serdaigle oblige, c’est vers la bibliothèque que ton attention se tourne. Le Scamander, bien sûr, toujours une référence, tu as parcouru son ouvrage à Poudlard dès le début ou presque pour découvrir toutes les créatures du monde magique, un panorama qui t’a été bien utile pour comprendre certaines conversations. Le dernier titre retient ton attention, Abigail confirme que c’est bien une de ses ancêtres. Journal et dragonologiste, de la famille de la sorcière, trois éléments qui emportent ta décision.

— Le dernier me tente bien. Est-ce que vous avez des projets de ce genre, vous aussi ?


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Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] 21013008104866668 Il arrive que nous trouvions de l'aide là où on ne s'y attend pas [Eirian] M-daille-Eirian

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On the run,
falling to the depths

Do you know what it's like when
You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
Do you know what it's like
To wanna surrender ?
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Abigail MacFusty
Abigail MacFusty
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Mer 21 Avr - 22:08
Je n'étais pas étonnée qu'Eirian n'avait qu'une maigre culture de la religion. De mon point de vue, la religion avait été créée par les moldus lorsqu'ils en avaient le plus besoin, lorsqu'ils avaient besoin de croire en quelque chose, par ailleurs, ça avait été étendu par les guerres et la soumission, car bien avant le monothéisme, il y avait différentes croyances, soit de diverses divinités, soit de divers esprits. À un moment donné de son existence, l'Homme a fait ce qu'il savait le mieux faire c’est-à-dire, tout écraser sur son passage et détruire ce qui devint ensuite tabou, hérétique… sorcier.
Ainsi de base, ceux qui possédaient des pouvoirs magiques n'avaient pas à croire en ces choses puisque la culture fut (et est toujours) différente. Moi venant d'une longue lignée de sang sorcier, je n'avais pas été éduquée dans la religion biblique même si j'en connaissais quelques lignes et que je fêtais divers événements comme Pâques ou Noël. Je supposais que lorsqu'un enfant venu d'une famille moldu découvrait ses pouvoirs magiques, tout était chamboulement, pas uniquement au niveau de la vie des gens, mais aussi des croyances. Et la religion faisait partie de cesdites croyances. Je n'étais pas aux faits de l'orientation de la famille d'Eirian, ça m'était bien égal au fond, mais voilà, lorsque nous sommes sorciers, il est rare que la religion devienne une priorité. Merlin n'avait rien à voir là-dedans puisque nous avions des preuves tangibles de son existence. Cela dit, je ne remettais pas non plus en question les soi-disant preuves de Dieu ou de son fils, comme les tablettes des commandements ou le Saint-Suaire.

- Ce n'est pas étonnant, je pense que les sorciers n'ont que faire de la religion humaine… cela dit, je pense qu'elle doit être fascinante à étudier.

Je croyais, peut-être naïvement, que beaucoup de réponses pouvaient se trouver dans les divers ouvrages de religions puisque c'était une base du fondement de l'humanité. Des peuples, encore aujourd'hui, se tapaient dessus au nom de leurs dieux. C'était tout de même incroyable lorsqu'on y songeait. Si un jour peut-être je ne trouvais plus mon bonheur auprès des créatures, je me pencherais sur l'humanité en lisant la Bible, la Torah ou les textes bouddhistes. Il y avait de quoi être occupé.
Sûrement même que je devrais m'y mettre immédiatement afin de ne pas broyer du noir, mais voilà, je n'en avais pas la force. Ce serait pourtant bien plus sage que d'aborder une énième fois le sujet familial qui, cette fois, me fit pleurer tant mes limites étaient atteintes et usées. Épaules secouées de quelques soubresauts, je ne me gênais pas pour pleurer devant le garçon, sans honte et sans chercher à me cacher. La période était ainsi faite depuis maintenant deux ans, et je n'étais pas prête de m'y faire pleinement. Sans doute l'année prochaine je pleurerai autant, et la suivante et encore, ainsi que la suivante. Mais, face à l'apparence compassion de l'étudiant de Serdaigle, je ne pus m'empêcher de sourire doucement tandis que j'essuyais une nouvelle larme avec mon pouce.

- Merci…

Il n'y avait rien d'autre à dire ou à ajouter. Je voyais bien qu'il n'avait pas pitié de moi, simplement qu'il semblait comprendre ou tout le moins prendre part un peu à ma peine. C'était suffisant pour moi, et je ne désirais pas m'épancher davantage. À quoi bon ? Décrire la mort de Kyle ne m'avancerait strictement à rien, et encore moins à un garçon comme Eirian. Il semblait déjà porter un assez lourd fardeau, il se passera bien du décès de mon frère. Qui plus est, il était, dans le fond, qu'un garçon presque étranger que je connaissais à peine, car jusqu'à aujourd'hui nous n'avions jamais véritablement discuté. Peut-être était-ce le début d'une amitié, je n'en savais rien, mais ce dont je pouvais être certaine, c'était que commencer une relation en parlant de l'accident qui mena mon frère à la mort n'était pas de bon ton.  
Je n'étais pas non plus sûre que suivre mon exemple après une si courte rencontre était une bonne idée, mais l'idée m'amusait fortement surtout lorsque je songeais au sujet. L'amour, le mariage, la famille. Bien sûr quand j'étais petite j'avais rêvé de pouvoir posséder tout cela, mais en grandissant, je n'avais vécu que des désillusions. Aujourd'hui, je m'étais fait une raison, mais pas mes parents. Qui plus est, maintenant le sort des McFusty reposait sur mes épaules, et un jour j'allais devoir prendre une décision, et ce, avant que mon horloge biologique tourne une fois de plus (celle de trop). Même si j'étais certaine que ma potentielle moitié pourrait être comblée avec moi, sachant que j'étais une personne sans histoire et très passionnée, je savais d'avance que j'avais de l'amour à revendre. Néanmoins, je doutais fortement qu'une personne puisse supporter mes étrangetés. Quoique peut-être que Thomas le pourrait, nous verrons bien avec le temps, mais je le craignais fortement. À dire vrai, il y avait sûrement une personne, et rien qu'à y songer, mon regard devint tout aussi tendre que pensif. Doux souvenirs dans lesquels je me plongeais alors que le visage de mon amie d'enfance parcourut mes rêveries.

- Connaissez-vous le mythe de l'androgyne Eirian ?

J'avais lu cette histoire lorsque j'étais petite, et elle m'avait toujours fascinée dès lors. En cela, je doutais fortement que ni lui ni moi n'étions véritablement pas faits pour l'amour sachant que, en partant du principe du mythe, il y avait forcément quelqu'un qui nous attendait et nous cherchait. Il nous fallait simplement nous rencontrer. Oui, simplement.
Car trouver "simplement" quelqu'un lorsque nous sommes solitaires est en réalité un défi de tous les instants. Pour le coup, j'étais certaine que nous étions sur la même longueur d'onde ave le jeune homme assit à mes côtés, et je ne pouvais qu'approuver ses paroles tandis que je m'abreuvais de mon thé, les yeux fixés en direction du feu de cheminée. Dans le fond, je déplorais un peu cette situation, tout le moins, je la regrettais pour lui. Moi, comme dit, ce n'était pas important ni très intéressant. Lui, il avait la vie devant lui, et je ne souhaitais pas qu'il la gâche. Je savais ce que c'était que de vivre en solitaire à son âge, je ne pouvais pas lui conseiller de faire de même, égal si j'avais bien vécu la situation de mon temps.

- J'imagine que c'est le prix à payer pour avoir une vie solitaire et rester passablement tranquille comme nous l'avons évoqué plus tôt. Je repassais un doigt sur ma joue pour essuyer encore une larme qui perla, reste de ma sensible crise de tout à l'heure que j'avais dans le fond du mal à calmer. C'est comme tout, c'est un équilibre. Mais si je peux me permettre un conseil… essayez de vous entourer pour ne pas rester trop seul. Je pense que dans le fond… vous aurez tout à y gagner.

Oui, pas comme moi qui avais sans doute perdu beaucoup en restant à l'écart des autres. À côté de cela j'avais aussi gagné énormément, comme de véritables amis, même s'ils se comptaient sur les doigts d'une seule main. Qualité contre quantité. Non pas que je souhaite qu'Eirian soit mal entouré, mais qu'il puisse rencontrer du monde et l'aider à se sociabiliser (pas comme moi) ne pouvait que lui garantir des choses bénéfiques, des armes dont il aurait besoin, ne serait-ce qu'en devenant Auror ou dans l'Ordre, ce qui n'était bien évidemment pas mon cas.
Dans le monde de la dragonologie, j'étais cette petite sorcière bizarre qui travaillait étrangement et qui réussissait à ensorceler les créatures les plus réticentes. Les plus terre à terre diraient que j'ai un don. Les autres seront juste mesquins par pure jalousie, mais en réalité, j'avais toujours su mieux comprendre les animaux que les êtres humains. C'était un véritable problème lorsque je devais présenter mes recherches et que je devais les argumenter. On me prenait toujours de haut, ne serait-ce d'abord que par ma petite taille. Faire mes preuves était extrêmement difficile pour moi, mais je ne me décourageais pas. J'étais certaine qu'un jour, tout cela portera ses fruits, néanmoins, sans mes handicapes sociaux, peut-être aurais-je pu travailler plus rapidement et plus efficacement, avec, pourquoi pas, une équipe à superviser pour compléter mes compétences.
Mais qu'importe. Tout cela était aujourd'hui presque inaccessible puisque j'étais professeur à temps plein à Poudlard.
Enfermée dans une cage dorée, petite sorcière aux ailes brûlées.
Voilà pourquoi je peignais un portrait assez élogieux d'Eirian. Non pas parce que je souhaitais le flatter, mais parce que je croyais sincèrement en ces capacités, en celles que je n'avais pas moi-même. Un doux sourire vint accrocher mes lèvres tandis que d'une voix qui se voulait encourageante, je lui répondais sans prendre trop le temps de réfléchir, pour une fois.

- Nous sommes souvent trop habitués à voir ce qui ne va pas et nous oublions ce qui va. Je ne cherche pas là à vous flatter, mais à vous rappeler les bonnes choses. Comme vous le dites, ça fait du bien à entendre. Il était toujours facile et aisé de critiquer, de s'arrêter aux apparences sans chercher à véritablement comprendre le fondement d'une action. C'était l'histoire de ma vie, car souvent j'avais été bien trop hâtivement jugée. Je reprenais. Moi non plus je ne suis jamais vraiment satisfaite de ce que je fais, moi aussi je veux toujours faire plus… mais… encore une fois, ce qui compte, c'est de donner le maximum et de faire de son mieux. De n'avoir ni remords ni regret. Je remuais un peu les épaules. Et personnellement, j'en ai plein.

Dans le fond, qui ne vivait pas avec des remords pleins le sac à dos ? Cela dit, je savais que j'avais laissé filer beaucoup de situations qui étaient pourtant présentes juste sous mon nez. Mais j'avais été trop craintive, trop timide pour les saisir au vol et en profiter. Peut-être que dans le fond, j'étais un peu lâche. En tout cas, en voyant l'état du garçon non loin de moi, je n'avais définitivement plus aucun doute que quelque chose de fort n'allait pas pour lui non plus, et qu'il avait le cœur gonflé d'attritions. Je l'invitais alors à se laisser aller, parce que je ne le jugerais pas et parce que ça ne sortirait pas des quatre murs de cette maison. Toutefois, je voyais bien qu'il essayait encore et toujours de résister malgré que son corps, lui, exprime tout l'inverse. Petit à petit, je le voyais perdre le contrôle, mais ce n'était pas à moi de lui dire quoi faire, ce n'était pas moi non plus qui allais pouvoir lui dire ce qui était le mieux pour lui ou non. Il était assez grand.
Je ne pouvais pas l'obliger à se confier et à se laisser à ses émotions alors que moi-même je n'évoquais pas l'existence de Kyle, et pourtant, la douleur était bien là, vive et profonde, car un seul et unique mot suffisait à tout réveiller en moi, tout embraser. Je ressentais encore la chaleur des flammes du dragon sur mon visage, et ce fut si effroyable que je n'eus d'autre choix que de me recroqueviller sur moi-même, comme une petite fille apeurée qui venait de faire un terrible cauchemar. Hélas, rien de tout cela n'était fictif. Mon frère avait été bel et bien brûlé vif… À ses excuses, je ne fis que secouer la tête, le regard fixant Grishkin qui était à présent par terre, trainant derrière lui sa longue et magnifique queue rouge et dorée. Le jeune garçon ne pouvait pas savoir, alors, je ne lui tenais pas rancune d'avoir utilisé ce mot. Qui plus est, il n'y avait aucun mot tabou dans les événements que j'avais vécus. Le mot "feu" je le voyais et en usais moi-même une bonne dizaine de fois par jour ne serait-ce que par mon métier de dragonologiste. Mes réactions semblaient comme tirées au hasard, par un être supérieur qui s'amusait à tirer les ficelles de mon âme pour m'horrifier quand ça lui chantait. Vivement que je réussisse à dénouer les fils, me libérer de son emprise. Vivement que l'été passe.

Presque avec soulagement, je l'écoutais me parler des divers conflits qui nous entouraient actuellement. L'Ordre, les Mangemort, le Blood Circle. Cela eut pour effet de rassembler mes esprits et d'endormir mes douleurs, de réussir à passer outre l'horreur de la mort de mon frère en second plan. Je parvenais à me concentrer sur autre chose, alors, petit à petit je retrouvais contenance, néanmoins, je restais recroquevillée sur mon canapé, les genoux contre ma poitrine, entourés de mes bras aux airs frêles. Je hochais de temps en temps la tête à certaines paroles bien précises du garçon, comme pour les souligner et souligner mon accord avec ce qu'il disait.

- Je crois dans le fond que… c'est très souvent que ce sont les plus raisonnables et raisonnés qui crient le moins fort, alors forcément, on les entend moins. Je pouvais me prendre moi-même comme exemple même si je ne faisais aucune politique (encore heureux). Les bons orateurs ne sont pas toujours les plus attentionnés et c'est eux qui sauront le mieux rassembler les foules hélas. Encore une fois, c'était une base dans l'histoire de la vie de l'humanité, et je le regrettais. Ce serait en effet magnifique si quelqu'un de censé pouvait taper du poing sur la table et se dévouer pour essayer d'imposer un autre point de vue…. Là, je plissais les yeux, comme en pleine réflexion, que je décidais de partager tout de suite. Mais je ne vois pas vraiment qui… vous avez une idée vous ?

C'était bien beau dans le fond de rester en retrait, de faire ce que nous pouvions, et d'espérer que quelqu'un comme nous se mette en avant…. Mais oui, mais qui ? J'avais beau chercher parmi la liste de personnes que je connaissais, je ne voyais guère qui pouvait correspondre à ces nombreux critères.
En tout cas, vu notre état ce soir, ce n'était ni lui ni moi. Je penchais sensiblement la tête en avant, posant mon menton sur ses mains posées sur mes genoux tandis que le jeune homme en vint à un peu se confier à moi. Attentive comme une religieuse, je ne cessais de regarder le phénix ou de fermer les paupières tant j'étais épuisée, pourtant je ne perdais rien de ce qu'Eirian me confiait. Il prétendait ignorer ce qui n'allait pas. Étrangement, j'avais un peu du mal à le croire. J'étais quelqu'un de profondément persuadé qu'avec l'ouverture d'esprit dont il était capable, il était, par extension, aussi ouvert d'esprit envers son propre corps et envers ses besoins. Je devinais aussi qu'il ne me disait pas tout, ce qui était bien normal, cela dit, soit il était un très bon comédien, soit il était véritablement perdu alors que je le voyais plonger son visage dans ses mains. Prenant le temps de réfléchir après avoir détourné à nouveau mes prunelles sur le feu, je soupirais un peu avant de répondre.

- Hé bien… j'imagine qu'il faut dans ce cas éviter de trop chercher à trouver le déclencheur. Des fois… c'est quand on n'y pense plus que l'évidence nous frappe… Mais il y a forcément eu quelque chose oui. Soit un événement en particulier au moment précis… soit c'est quelque chose qui est en vous depuis longtemps et qui, devenu trop colérique en vous, arrive enfin à s'exprimer.

Ces fameux vieux démons que l'on ne peut faire taire aussi longtemps qu'on le souhaiterait. Ils finissaient toujours par revenir en force, par frapper violemment lorsqu'on s'y attendait le moins. Voilà pourquoi il était nécessaire d'y faire face et d'enfouir le moins de choses possible en soi. Évidemment, j'avais conscience que c'était plus facile à dire qu'à faire, surtout pour quelqu'un comme moi qui abhorrait toutes formes de conflits et qui vivait en retrait de la société.

- Auriez-vous envie que l'on cherche ensemble ?

Je me hasardais à lui proposer mon aide d'une façon un peu différente que précédemment avant qu'il ne me demande des conseils pour une potentielle lecture. Bien heureuse qu'il veuille s'instruire sur le sujet le plus fascinant au monde (à mes yeux) je lui indiquais quelques titres alors qu'en réalité, j'aurais pu lui indiquer la bibliothèque entière. Alors qu'il m'indiquait son intérêt pour le livre de mon ancêtre, j'eus un sensible sourire avant de réussir à rouvrir les yeux et le regarder, le laissant alors se lever pour aller chercher l'ouvrage.

- Vous le trouverez sur la gauche du piano, il a une reliure rouge et dorée. N'ayant rien à cacher, je ne m'inquiétais même pas qu'il puisse tomber sur la photo qui était posée entre deux piles de livres. Celle de Kyle et moi au début de l'année 2018, quelques mois avant l'accident. La ressemblance était frappante, et notre complicité évidente. Refermant les paupières, ayant pleinement confiance en Eirian, je me décidais enfin à répondre à son interrogation. Oui, j'en ai plusieurs à dire vrai. J'ai déjà publié quelques nouvelles et ma thèse universitaire, je l'ai améliorée pour en faire un livre. Il est non loin de celui que vous cherchez, le titre est "L'amphiptère doré". Et j'ai d'autres projets en tête… ce qui existe sur les Noirs des Hébrides est moyenâgeux, malgré tout le respect que je dois à ma famille. Je veux remettre au goût du jour certaines choses. Car avec la responsabilité d'être l'héritière des McFusty il n'y avait pas qu'assurer ma descendance. Je devenais officiellement la protectrice en cheffe des Noirs des Hébrides, natifs de l'archipel où nous nous trouvions actuellement Eirian et moi.


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