Pourquoi moi ? C’était la question qui me taraudait depuis que j’avais été désigné pour être le médicomage de service ce jour-là. Et avec ma chance légendaire, évidemment, il était clair que je n’allais pas avoir une garde toute calme…
De fait, la nouvelle était tombée comme un couperet. Si j’avais su, bon sang, j’aurais plutôt essayé de m’éclipser et d’envoyer un jeune médicomage sans intérêt se faire trouer la peau à ma place ! La seule consolation que je pouvais trouver dans cette situation pour le moins déstabilisante, c’était la présence de Meredith Carrow.

Notre équipe était constituée de quatre membres. Phoebus Malefoy, un homme d’affaires spécialisé dans la fabrication et la vente de potions à grande échelle, Rose Cartwright, une auror que je ne connaissais pas mais qui, par le simple métier qu’elle avait choisi me donnait envie de m’en aller bien loin. Et puis, bien sûr, Meredith et moi. Un groupe disparate, en réalité, au sein duquel j’étais le seul à ne jamais mettre les pieds au Ministère de la Magie, puisque la politique avait tendance à me donner des nausées.

Depuis quand Sainte-Mangouste envoyait un médicomage spécialisé en pathologie des sortilèges pour un conflit ouvert avec des moldus ? Je me le demandais bien, ce n’était absolument pas logique ! Même si j’avais quelques connaissances en médecine moldue, je doutais fortement que le choix se soit porté sur moi pour cette raison. Mais soit, si je mettais la main sur un corps en bon état, je pourrais toujours l’apporter à Alexis, elle serait ravie d’avoir de quoi disséquer sans qu’il n’y ait de retombées sur le côté déontologique et éthique de tout cela.

Les rafales de tir, cela n’avait rien de rassurant. Je ne savais pas trop comment j’étais censé réagir, alors je restais naturellement en retrait. « Vous avez un plan ? » Je n’avais jamais été le genre de type à foncer dans le tas pour aller sauver quelqu’un. « Je reste ici et vous m’amenez les blessés ? »

Tactique peu courageuse, certes, mais je n’avais jamais été un exemple de témérité ou de bravoure. Et je ne m’en cachais pas. En tant que médicomage, mon rôle était de soigner et pas de me battre, je n’allais tout de même pas aller risquer ma vie pour en sauver d’autres. Surtout que je ne connaissais sans doute pas les gens qui se faisaient tirer dessus. Tout ce que je savais, c’était que j’aurais été bien mieux chez moi, avec un bon petit verre, au coin d’un vrai bon feu crépitant dans l’âtre… au lieu de cela, j’étais sur un terrain de chasse de moldus, apparemment, et ces derniers étaient bien remontés. Moi qui avais tendance à trouver plutôt agréables les inventions des non mages et leur capacité à pallier leur absence de magie, j’avais le sentiment d’être ici comme un cheveu dans la soupe. Ce n’était pas ma place et je ne comptais certainement pas chercher à impressionner qui que ce soit.

Dés:

Dans ce contexte un peu mouvementé, je ne me sentais proche que de Meredith. Malefoy était le genre de type que je ne supportais pas… En tout cas, il avait l’air d’être quelqu’un d’imbu de lui-même et il avait osé me parler comme si j’étais un simple petit sorcier de seconde zone. Je notais bien son visage. Le jour où ce pitiponk atterrirait à Sainte-Mangouste, je m’occuperais personnellement de son cas… et j’accompagnerais son foie avec des brocolis plutôt que des haricots, tiens.
A vrai dire, la seule présence de cet homme m’énervait déjà. Oh que j’aurais aimé posséder le don de mes ancêtres et contrôler un basilic pour l’envoyer sur son petit sentiment de supériorité mal placé. Et puis, qu’avait-il besoin de faire son malin avec son sortilège de protection ?

Je ravalais les paroles haineuses qui me venaient. Malefoy avait le sang pur, mais le cerveau inexistant. Il serait vite tombé en pâmoison s’il avait eu affaire à ma colère, c’était le moins que l’on pouvait dire !
Non, vraiment, je ne savais pas ce que Meredith pouvait bien fricoter avec un type pareil. Elle, au moins, comprenait la situation dans laquelle je me trouvais. Je n’étais pas du genre à me battre, cela ne m’avait jamais ni plu ni attiré. Je sauvais des vies, moi, je ne créais pas de l’emploi pour mes collègues médicomages.

« Ou alors, Malefoy, faites en sorte qu’il ne m’arrive rien, ou je vous jure que votre lignée sera à jamais entachée par votre incompétence. » Je savais pertinemment que cet homme était très attaché à la pureté du sang, aussi devait-il un minimum de respect à un représentant d’une lignée cousine de celle de Salazar Serpentard. Assurément.

Je regardais alors la jeune femme qui s’était lancée pour entamer les choses sérieuses. Elle n’avait pas froid aux yeux. Et c’était le genre d’aventureuse personne que je recevais assez régulièrement dans mon service pour des soins suivant une mission.
Elle avançait avec une assurance qu’elle était sans doute la seule ici à avoir. Et si l’autre imbécile ne m’avait pas énervé, je n’aurais jamais fait ce que je fis.

Mu par le désir de ne pas donner raison à ce pédant de Phoebus Malefoy, je suivis l’auror, songeant qu’elle pourrait sans doute me protéger en cas de nécessité. Mais elle avait été repérée. Et moi aussi, donc, par la même occasion.
Nous devînmes des cibles de choix, fallait-il croire, et nous fûmes donc tous deux visés. C’est alors que je songeai à Meredith. Il valait mieux qu’il ne lui arrivât rien… je n’avais rien à perdre, moi, j’avais déjà tout perdu…
Alors, sans réfléchir plus, je m’étais placé devant miss Cartwright. Un geste plus valeureux que je m’étais cru capable de faire, mais il ne fallut pas longtemps pour que nos adversaires se servissent de cela.

Un objet vola jusqu’à moi et, avant que j’eus le temps de réagir vraiment, le cylindre explosa. Mon bras gauche n’était plus que souffrance. Je ne pus faire autrement que pousser un cri, entre rage et douleur, tandis que la colère montait en moi.

Si je tenais le petit enculé qui m’avait lancé ça, je lui ferais bouffer ses gonades.

Spoiler:

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Je n’aimais pas la manière dont Malefoy semblait me considérer, aussi avais-je agi un peu sans réfléchir. Je préférais être loin de ce type. Je savais que ma lignée était bien plus ancienne que la sienne, nous étions purs depuis des siècles et notre histoire était bien trop glorieuse pour qu’un misérable lombric comme cet homme puisse me regarder sans être clairement ébloui par une pureté que lui-même n’aurait jamais. Tous ces petits parvenus dont la pureté ne remontait qu’à quelques générations, cela m’énervait de les voir s’octroyer une importance non méritée.
La véritable pureté remontait à l’Antiquité, au minimum… Mon illustre ancêtre, Herpo l’Infâme, fut l’un des premiers adeptes connus de la magie noire… et, à l’époque, c’était bien autre chose qu’aujourd’hui… Le premier sorcier à avoir créé un Basilic, à l’avoir élevé, à l’avoir maîtrisé… Le premier, aussi, à avoir créé un Horcruxe… Assurément, ma famille disposait d’une histoire digne de ce nom.

J’étais blessé, avec tout cela, mais ma chère Meredith était venue à mon secours. Elle m’avait récupéré et soigné, de quoi me retaper suffisamment pour que je puisse être opérationnel. Et voilà que Malefoy était réquisitionné pour se rendre utile auprès de la jeune auror. La pauvre jeune femme… elle allait devoir travailler en équipe avec un bien piètre élément.

« Merci, Meredith, mais vous devriez prêter main forte à nos alliés. Cette jeune femme mérite d’être soutenue par la meilleure d’entre nous. »

Puisque j’allais récupérer les blessés pour les soigner, autant mettre toutes les chances de notre côté et envoyer une équipe solide chercher les sorciers en perdition.
Le premier blessé n’était pas bien loin et je vis bientôt miss Cartwright le prendre en charge. Je n’avais jamais apprécié les aurors, mais il fallait bien reconnaître que celle-ci était peut-être d’un autre acabit que ceux-là. Ne m’avait-elle pas aidé, après tout ?

Mrs Carrow me permit de reprendre suffisamment de forces pour que je prenne la mesure de la situation. Pour être efficace, il allait me falloir un endroit un peu moins exposé. J’avisais un peu ce qui m’entourait.
Il n'y avait que bien peu de possibilités, mais je trouvais tout de même un espace où, en quelques sorts bien placés, je pus établir un pan de mur, avec des éléments glanés ça et là et assemblés.
Ce n'était pas exceptionnel, mais cela ferait l'affaire. Le mur nous protégerait, le blessé et moi, pendant que je m'occuperais de lui.

On ne tarderait sans doute pas à me l'amener. J'arrachais ce qu'il restait de la manche de ma chemise, il se pourrait que des chiffons soient les bienvenus.

Je sécurisais rapidement le lieu de soins. Il me fallait être sûr de pouvoir agir ici sans risquer de me faire plomber pendant que je soignerais les blessés.

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Avec tout cela, l’abri pour soigner les blessés était prêt et fonctionnel, pas aussi grand et sûr que je l’aurais voulu, mais cela allait faire l’affaire. J’avais toujours sur moi quelques fioles de potions Wiggenweld et du matériel de soin moldu, parce que dans des situations comme celles-ci, la magie ne faisait pas toujours tout.
J’avais de la chance d’avoir pour amie une femme comme Meredith, elle était toujours là, disposée à faire pour le mieux dans toutes les situations dramatiques. C’était véritablement une femme exemplaire. Elle se serait certainement très bien entendue avec Belisama, ma défunte épouse.

Je ne voyais pas bien pourquoi elle s’entêtait à garder une telle proximité avec ce m’as-tu-vu qu’était Malefoy, mais il était évident que je ne pleurerais pas si ce soi-disant sang pur devait perdre la vie durant cette mission. Un mangemort de moins sur cette terre, ce serait toujours ça de pris !
Il allait donc fanfaronner et faire le guignol tandis que les dames de notre équipe allaient se taper le reste du boulot. Eh bien... voilà qui était digne d’un vrai macho. Je détestais les gens comme ça.

Heureusement que les deux femmes étaient là pour relever le niveau. D’ailleurs, l’auror m’apporta bientôt un blessé à soigner.
Et pendant que mes coéquipiers partaient s’affairer pour essayer de ramener un maximum des nôtres, tombés dans le traquenard de ces chasseurs de sorciers, je commençais mon travail, en vérifiant les fonctions vitales de l’homme, l’une après l’autre, pour ensuite établir un diagnostic. Même s’il n’était que temporaire, il fallait bien évaluer la situation et faire en sorte de comprendre ce que le Blood Circle avait imposé à ce sorcier et, par extension, sans doute aux autres victimes également.

Les mutilations étaient importantes, mais réparables. Ce qui était plus inquiétant, c’était la quantité de sang qu’il avait perdu. Je n’avais pas le choix, pour le préserver, il lui faudrait être pris en charge rapidement dans de bien meilleures conditions que celles dont je disposais pour le moment.
C’est alors que je vis Rose Cartwright tenter quelque chose d’assez fou pour être remarquable. Et elle venait de sauver plusieurs personnes en faisant ce mur. Je voyais cela de loin mais il était évident que je devais, si pas les couvrir, au moins créer une autre zone protégée où elle et Meredith pourraient progresser sans courir de risques mortels. D’ailleurs, mon amie semblait avoir subi des dégâts.

A mon tour, donc, je sécurisais mon blessé et me déplaçais pour m’approcher des filles, je pris ma baguette pour lancer un sortilège de protection maximale, afin de permettre à mes alliées de revenir par ici plus facilement avec les blessés.

3m de rayon, cela faisait une bulle de 6m de diamètre. Si je bougeais trop, mon blessé n'était plus protégé. Il y avait donc encore un espace d'environ 5m qui séparait les filles de ma bulle.

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