Tellement de choses à penser, tellement de choses à faire. Avoir une réputation de nerd, de geek, de gamer voire de no-life et ne pas toucher un jeu vidéo depuis presque un mois, c’était le comble. Ce mois de février était… mouvementé. Un peu comme la vie de Raph depuis plusieurs mois, tout était chamboulé. Sorciers, magie, enlèvement, sauvetage, Ordre du Phénix, mission, secrets, mensonges, mangemorts, enregistrement, amnésie, Blood Circle, dispute, déménagement, offensive, séquestration, torture, entraînement, peur… Bordel ça ne se finissait donc jamais ? Et ben non. Ça ne se finissait jamais.

Raphaël n’avait pas repris contact avec Amber depuis leur discussion en décembre. Elle voulait parler avec son frère avant de recontacter le moldu et lui avait donc explicitement demandé de ne pas lui envoyer de message, que ça soit par téléphone ou par hibou, le temps qu’elle puisse “arrondir” les choses avec Tobias. Oh, ils s’étaient effectivement croisés à l’anniversaire de Nymphéa, mais ils n’avaient pas vraiment parlé. Seulement échangés quelques politesses, comme s’ils étaient de parfaits inconnus, ainsi que quelques signes de main amicaux. Les deux amis avaient accepté de faire le choix de s’éviter pour se protéger mutuellement. Pour une durée indéterminée en tout cas.

Depuis sa dernière rencontre avec Amber, Raphaël avait appris de nouvelles choses. Il savait qu’il était une victime. Il avait été approché en juillet par un sorcier qui l’avait torturé pour lui soutirer des informations sur le Blood Circle. Tout ce que le moldu avait pu lui apprendre c’était le nom du premier ministre et de son assistance qui étaient de notoriété publique. Il n’avait gardé aucun souvenir de cette expérience, si ce n’est que le lendemain il s’était réveillé en cellule de dégrisement avec l’écran de téléphone cassé. Ce n’est que pendant les vacances de Noël qu’il avait découvert l’existence d’un enregistrement audio sur son téléphone de cet interrogatoire musclé. Est-ce qu’il était possible de s’imaginer, tranquillement dans le train en train de consulter son téléphone, écouter un enregistrement inconnu et de s’entendre hurler, pleurer et supplier et surtout de n’avoir AUCUN souvenir de cet événement ? Raphaël n’avait pas besoin d’imaginer ça, il l’avait vécu. Avant de découvrir ça, et avant sa rencontre avec Tobias, le moldu pensait pouvoir rallier les mangemorts à sa cause. La paix, l’amour et la tolérance vaincrons ! Quelle naïveté pathétique. Ces gens étaient aussi coincés et fermés d’esprit que le Blood Circle. Ils n’étaient animés que par la haine de l’autre camp qu’ils devaient détruire.

Détruire ou être détruit. L’éternel schéma du cercle vicieux de la haine et de la vengeance. Les mangemorts avaient réussi à convaincre le Conseil d’Administration Sorcier de faire organiser une offensive contre une base du Blood Circle. Bougres d’ânes… Pourquoi attaquer ? Pourquoi provoquer le Blood Circle ? Pourquoi leur donner l’opportunité de rebondir sur cette offensive gratuite afin de présenter une nouvelle fois les sorciers comme des démons dangereux ? Raphaël s’acharnait à essayer de convaincre la Toile que le gouvernement britannique se trompait, que les sorciers n’étaient que des victimes d’une discrimination qui ne devrait même pas exister. Et qu’est ce que les sorciers faisaient ? ILS ATTAQUAIENT. Bien entendu, le moldu n’était pas non plus un parfait crétin naïf. Il savait très bien que à la guerre comme à la guerre, les mages ne pouvaient pas rester les bras croisés à attendre de se faire massacrer sans réagir. Il comprenait les raisons et les motivations de chacun ; donner un grand coup au Blood Circle, colère, fierté, vengeance bien entendu et peut-être pour certains : haine. Pas forcément une haine des moldus en général, mais une haine de ces extrémistes qui traquaient et tuaient les sorciers. Raphaël aussi les haïssait, mais il les combattait à sa manière, avec ses propres armes.

Quelques jours avant les derniers décrets du gouvernement Kane, le français avait fait la rencontre d’Ashley par l’intermédiaire de ses vidéos YouTube. La femme voulait le rencontrer. Elle avait des questions, elle voulait en savoir plus sur… certaines choses. Raph avait pris toutes les précautions nécessaires en organisant sa rencontre avec cette inconnue afin de préserver sa sécurité et son anonymat. Ça aurait pu être parfait s’il n’avait pas commencé la discussion en se présentant comme “Raphaël Millet, le propriétaire de la chaîne”. Un détail, trois fois rien. Cette rencontre a été très enrichissante pour le jeune homme. Du moins, si enrichissante était un synonyme de traumatisante ou perturbante. Ashley avait été enlevée par des sorciers et torturée pendant deux ans. Elle parlait de magie, et de mangemort. Elle connaissait des termes beaucoup trop précis pour qu’on la qualifie de menteuse et voulait en apprendre plus pour retrouver et libérer son fiancé qui était toujours prisonniers de ces gens.

Oui, la femme semblait sincère, mais il y avait beaucoup trop de choses qui n’allaient pas dans son histoire. Déjà, pourquoi elle avait eu le privilège ELLE de ne pas avoir la mémoire effacée ? Comment elle avait pu s’enfuir ? Les mangemorts avaient vraiment été incompétents au point de laisser la porte de sa cellule ouverte ? Et quand bien même la cellule était ouverte, elle a pu échapper à la vigilance de ces geôliers comme ça, aussi facilement ? Cette partie de l’histoire n’était pas nette, mais la suite faisait froid dans le dos. Sachant qu’elle a été enlevée, séquestrée et torturée, elle voulait y retourner seule pour libérer son fiancée ? Seule, sans aide parce que ses bourreaux la connaissaient et serait “indulgent”. Elle prétendait également avoir des “bienfaiteurs”, deux sorciers qui prenaient soin d’elle pendant sa captivité. Mais bon sang ?! Rien n’allait dans cette histoire. Rien ! Et pourtant, rien ne laissait présager que c’était un canular.

Même si Raphaël laissait le bénéfice du doute à cette “Ashley” et comptait bien l’aider en cherchant des informations sur cette histoire, il craignait que tout ceci ne soit un piège. Il voyait là un stratagème assez bien ficelé par un groupe de mangemort afin d’amplifier la haine des moldus à l’égard des sorciers. En effet, si cette Ashley racontait son histoire à pleins de moldus et au Blood Circle, les tensions entre Sorciers et Moldus allaient prendre une tournure bien plus agressive, du côté moldu, et les sorciers n’auraient pas d’autres choix que de donner plus de pouvoir encore aux mangemorts. Un peu comme ça s’est passé avec l’autorisation d’utiliser des impardonnables. Raphaël voulait enquêter sur cette affaire de séquestration, mais il fallait poser les bonnes questions aux bonnes personnes… Et il n’avait qu’un seul nom : “Malefoy”.

Le mois de février, c’était aussi l’anniversaire de Leah O’Malley, la meilleure amie de Raphaël. Elle appartenait à l’Ordre et était au courant du secret magique depuis bien longtemps puisque sa famille était sorcière. D’ailleurs, le moldu était allé sur le Chemin de Traverse avec Myrna, la maman de Leah, pour chercher lun cadeau d’anniversaire de son amie. Il voulait un truc spécial difficile à trouver pour lui. Le moldu attendait devant la banque des sorciers, pendant que Myrna échangeait les Livres Sterling du jeune homme contre de la monnaie sorcière. C’est à ce moment là qu’Amber et Raphaël se reconnurent devant la banque. La sorcière ne s’attendait probablement pas à croiser le moldu dans pareil endroit. Ils discutèrent un peu, échangèrent des banalités. Raph expliquait la raison de sa présence ici. Amber… Mangemorts… Si quelqu’un pouvait avoir des informations sur ce Malefoy et qui pouvait accepter de l’aider c’était bien elle ! Mais pas ici, pas maintenant, il n’était pas là pour ça. La fenêtre de discussion était bien trop courte et le sujet trop sérieux pour être abordé à la va-vite comme ça.

«Dis moi, j’aurais besoin de te parler d’un truc super important. Mais pas ici, ni maintenant on n’a pas le temps pour ça. On peut déterminer un jour et un endroit où se voir ? On se contacte par messages ? Je… Ça me dépannerait beaucoup. »

Ils s’étaient finalement donnés rendez vous quelques jours plus tard. Ils étaient censé se retrouver à Richmond Park. Au Sud-Ouest de la ville, c’était bien moins isolé que la plupart des lieux qu’ils auraient pu choisir. Isolé et sauvage. Une heure de transport pour arriver à la station de métro de Richmond, et après ils allaient devoir marcher un kilomètre environ jusqu’à atteindre l’entrée du Parc. Le trajet en transport en commun était long… Mais long… Et après ils allaient marcher ensemble. En temps normal Raphaël ne craignait pas de marcher. Marcher c’était tranquille. Ce n’était pas non plus le froid qui lui posait problème. Le froid on s’y fait si on est bien habillé. Non… Le soucis c’était l’entraînement de la veille. Ah son corps n’était pas encore habitué à bouger et la boxe c’était tout nouveau pour lui. Rien que les échauffement et les étirements pour ne pas se blesser, ça l’avait séché sur place et désormais, il allait devoir marcher avec des courbatures à chaque muscle. Oh bordel… Il y avait un muscle ici ? Il sortit de la station et marcha péniblement jusqu'au parc. Amber l’attendait déjà. Depuis combien de temps elle était là ? Le jeune homme alla la saluer.

«Hey ! Merci d’être venue.»

Amber avait l’esprit ailleurs ces derniers jours, mais elle n’avait pas besoin de se questionner mille ans sur la question de cette absence. L’offensive l’avait profondément changé, bien plus qu’elle ne l’aurait imaginé. Quand elle s’était rendue sur place, elle n’avait aucune idée d’à quel point les choses seraient difficiles pour elle. Ce n’était pas une combattante, ni une meurtrière, mais elle avait été contrainte de s’adapter à ces deux rôles sans qu’on lui demande son avis.

Elle qui s’était toujours proclamée loin des idéologies de sa famille avait tué des moldus… La jeune femme aurait dû se demander comment elle était censée vivre avec une mort sur la conscience, mais ce n’était pas le cas… Pas le moindre remord et c’était bien ce qui la terrifiait. Pourquoi ne se demandait-elle pas si ce membre du Blood Circle avait de la famille ? S’il avait des enfants et une femme qui pleuraient son absence ? Pourquoi la seule idée qu’elle avait en tête était qu’il l’avait mérité ? Son sang se glaçait à chaque fois qu’elle y repensait.

Thorfinn avait toujours raisonné de cette manière. Quand elle songeait au lièvre qu’elle avait dû torturer par sa faute, ses paroles tournaient en boucle dans sa tête : « Arrête de pleurnicher. Tu finiras par t’y habituer ». Était-ce ce qu’il était en train de se produire ? S’habituait-elle à faire couler le sang, à torturer et tuer ? Au fond, elle n’était pas si surprise que ça. Amber s’était toujours sentie bien plus proche de la nature que des êtres humaines. Seuls les créatures magiques semblaient la comprendre, sans jamais la juger. Ils étaient les seuls à avoir un pouvoir apaisant sur elle. Évidemment que la Serdaigle ne leur voulait aucun mal. Les humains, en revanche… Certains lui avaient pourri toute sa scolarité. Les rumeurs, les oreilles indiscrètes, les regards déplacés… Il y avait tant de choses qui la faisaient sortir de ses gonds, et malheureusement ce moldu avait subi les conséquences de sa haine et de sa colère refoulée. Il l’avait mérité. Ils l’avaient enlevée, lui et son groupe, et lui avaient fait subir des prélèvements de force. Ils avaient construit des armes contre des sorciers avec des méthodes peu orthodoxes.

Non. Elle ne devait pas penser ainsi. Elle n’était pas comme son père. Jamais elle ne prendrait de plaisir à tuer. Jamais. La culpabilité viendrait sans doute plus tard, quand la colère aurait disparu. N’est-ce pas ? La jeune femme entama alors les cent pas, à travers la forêt. Était-ce une bonne idée de voir Raphaël, alors qu’elle avait tué un moldu ? Il ne lui pardonnerait jamais. Amber savait qu’il avait envie de voir les deux mondes régnaient en paix et elle avait participé à une offensive qui avait détruit tous ces rêves-là et rendu la situation plus compliquée qu’elle ne l’était déjà. Malgré tout, on ne pouvait pas lui reprocher son honnêteté et si son ami lui posait la question, elle lui répondrait sans la moindre once de mensonge, parce qu’elle était comme ça. Amber préférait se fâcher avec quelqu’un, plutôt que de lui cacher la vérité. Elle estimait que si la personne voulait d’elle dans son entourage, elle devait l’accepter telle qu’elle était. Pourtant… La Serdaigle avait peur de perdre toute la confiance de son ami.

Ce soir-là, elle s’était rendue à l’offensive, parce qu’elle avait ressenti le besoin de laisser évacuer toute la colère qu’elle avait en elle, et envers les membres du Blood Circle. Elle avait agi avec le cœur, bien plus qu’avec son esprit. Elle s’était comportée comme le reste de sa famille, mais il y avait un point positif à tout ça : sa confiance en elle était revenue. Depuis des mois, elle s’entraînait à subir les Impardonnables, à combattre au corps-à-corps, mais aucune de ces démarches lui avait permis d’oublier la rage qu’elle avait au creux de son ventre. Rien, mise à part la vengeance. C’était terrible, mais si c’était à refaire, elle le referait, seulement pour se sentir à nouveau bien, à nouveau elle-même et en pleine possession de ses moyens. Amber en avait assez de vivre dans la peur, de se sentir faible. Son comportement était peut-être égoïste, mais elle ne demandait pas à ce qu’il soit compris. Elle avait agi pour son propre bien et elle ne regrettait rien.

Attendant Raphaël, elle s’assit sur un banc et observa les arbres. De petits écureuils grimpaient le long de tronc et entamaient des sauts majestueux, d’une branche à l’autre. De véritables petits athlètes, qui ne se souciaient pas de la difficulté du monde qu’il y avait sous leurs pattes. Ils vivaient simplement leur vie, là où personne ne viendrait les déranger. La jeune Towsen en était admirative. Elle aimait vraiment observer leur mode de vie, pour comprendre leur façon d’agir. Alors, elle fouilla dans son sac à dos et en sortit un petit carnet qui ne la quittait jamais depuis sa première année à Poudlard. Elle laissa filer les pages entre ses doigts, jusqu’à ce qu’elle tombe sur un parchemin vierge. Amber attrapa un crayon et dessina maladroitement un écureuil sur le côté de la page, avant de noter quelques anecdotes sur le côté. Elle avait fait ça avec tant de créatures, notamment sur les Botrucs. Elle en avait des pages entières, mais elle adorait étudier son environnement.

Amber le fit d’ailleurs de longues minutes, avant que Raphaël n’arrive dans le parc. Au moins, elle avait pu le rencontrer plus apaisée et plus optimiste qu’auparavant. Elle ne broyait plus du noir et son regard n’était plus aussi sombre qu’auparavant. Un doux sourire émergea au coin de ses lèvres, alors qu’elle rangea toutes ses affaires à l’endroit où elle les avait prises.

— Raph ! Comment vas-tu depuis le temps ?

Pourquoi avait-elle posé cette question ? Elle n’avait clairement aucune envie qui lui retourne la pareille. Que pouvait-elle lui dire ? « Alors, écoute, depuis la dernière fois, je n’ai pas pu parler à mon frère. Par contre, on m’a fiancée à un prépubère pour faire perdurer la lignée de sang-pur. J’ai aussi été entraîné par un mangemort pour supporter des sortilèges impardonnables. J’ai appris à me battre et du coup j’ai usé de toutes ces nouvelles compétences pour tuer un moldu lors de l’offensive. Passionnant, n’est-ce pas ? ». Flippant, ouais…

La vie d’Amber avait bien changé depuis leur dernière rencontre. Il s’était passé bien trop de choses pour qu’elle ne puisse savoir par où commencer. Voulait-elle au moins lui raconter ? Sa vie était un tel bordel qu’elle ne voulait même pas le mêler à tout ça. Malgré tout, elle ne voulait pas reprendre ses distances avec lui, parce qu’elle estimait que si elle n’avait pas d’amis autour d’elle, elle allait devenir complètement folle. Elle ne voulait pas laisser l’obscurité l’emporter sur elle. Cela faisait maintenant des années qu’Amber essayait de le repousser, de nier la part sombre qui vivait en elle. La jeune femme ne voulait pas la laisser gagner, comme elle avait gagné son frère et ses parents. Elle aspirait à tant d’autres choses. Elle avait un avenir radieux devant elle, seulement si elle y mettait de la bonne volonté. Elle ne voulait pas tout laisser tomber maintenant. Pas à la première difficulté.

Raphaël reconnut Amber à l’entrée du parc et se rapprocha d’elle. Elle était occupée à écrire dans un petit carnet en regardant les arbres. Il se manifesta en arrivant, pour la remercier d’avoir fait le déplacement pour lui. Il entendit du mouvement dans les arbres, après avoir parlé. Instinctivement il tourna la tête pour regarder ce que c’était mais ne trouva pas l'origine du bruit, il retourna son attention sur Amber qui rangeait ses affaires en souriant. Le jeune homme était intrigué par ce petit carnet et ce que son amie pouvait bien noter, mais il ne releva pas, ne questionna pas et ne chercha pas non plus à regarder. C’était le jardin secret de la sorcière, ça ne le regardait pas.

Amber lui demanda s’il allait bien. Une question basique. Souvent utilisée en forme de politesse simple et donc la seule réponse attendue c’était “Oh, ça va bien, et toi ?”.

«Et bien écoute… Plutôt… Enfin… En fait non… pas des masses. Sinon je n’aurais pas demander à te voir.»

Il allait répondre à la positive  mais se ravisa. C’était idiot de répondre “Oui” sachant pourquoi il avait demandé à rencontrer la jeune femme. Il avait des questions. Il était tourmenté. Il avait peur. Sans compter que sur le plan physique, il avait mal de partout à cause du sport de la veille. Quelle idée de se mettre au sport maintenant ? Il était trop vieux pour ça, son corps n'était pas prêt !

«Et toi sinon, ça peut aller ? Tu… y étais ? »

Si ça pouvait y aller. Raph savait que ça n’allait pas, parce que ça ne pouvait pas aller avec tout ce qu’il se passait depuis des mois. La situation générale empirait, les deux camps prenaient de plus en plus de mesures l'un contre l’autre. Mais il espérait qu’Amber soit dans une situation “pas si pire”. Il demanda de manière implicite si elle avait été présente lors de l’opération contre le Blood Circle . Est-ce qu’elle comprendrait qu’il parlait de l’attaque qui avait eu lieu au début du mois ? À priori, elle aurait dû être au courant de cette opération. Tout le monde l’était, mais y était-elle ? Est-ce que sa famille l’avait contrainte à y aller ? Est-ce qu’elle y était allée de son plein gré ? Si oui, pourquoi ? Raphaël savait qu’il avait affaire à une femme plutôt mystérieuse qui n’était pas du genre à se confier, mais il savait aussi que la sorcière avait été maltraitée par le Blood Circle. Et elle devait certainement craindre les moldus. Les gens pouvaient faire des choses terribles à cause de la peur, le Blood Circle en était le parfait exemple. Mais la peur pouvait également paralyser, et forcer quelqu’un à se réfugier dans le silence. Ce que Raph voulait réellement savoir, c’était comment se sentait Amber. Il n’oubliera jamais le ton sur lequel la sorcière avait dit “Putain, mais qu'est-ce qu'il fout ici, lui ?” en octobre lorsqu’ils s’étaient croisés dans les ruines de l’université magique alors qu’il était venu pour la sauver. Le moldu ne jugeait pas son amie, il essayait de la comprendre ; il était inquiet.

Raphaël dut expliquer pourquoi son moral n'était pas au beau fixe.

«Bah écoute… Le mois dernier, je me suis disputé avec mon meilleur ami, et colocataire. J’ai déménagé il y a quelques semaines parce que c’était devenu tendu. J’en étais même à payer l’hôtel pour dormir pour ne pas rentrer à la coloc.»

Le jeune homme se garda tout de même de parler de sa vie sentimentale. Tout n’était pas si sombre dans sa vie, mais… Il ne savait pas trop ce qu’il devait faire à propos de… certaines choses ; et il préférait éviter d’en parler. C’était un peu une forme de secret. Et puis… Il ne pensait pas Amber capable de comprendre ce genre de sentiments.

«Mais bon, ça c’est juste des conneries. J’ai appris certaines choses assez glauques que je ne peux, et ne veux pas aborder en détail.»

“Ouais alors, j’ai découvert que je me suis fait torturer, manipulé et qu’on m’a effacé la mémoire en juillet. Trop d’la balle”. Non, Raph n’avait pas trop envie d’inquiéter son amie à ce sujet là. Mais il voulait être franc avec elle, même s’il ne pouvait pas tout lui dire.

«Et plus récemment, une femme est venue me voir.»

Il commença à s’approcher du banc pour s’asseoir et grimaça au moment de se baisser. Il se releva.

«Ça te dit de marcher un peu ?»

C’était moins douloureux de marcher que de s’asseoir, sachant qu’après il allait devoir se relever.

«Je disais donc… Y’a une femme qui est venue me parler, elle m’a contacté grâce à des vidéos que je fais pour… Peu importe. L’histoire qu’elle m’a raconté est totalement flippante. Et… Je crois que ça concerne des mangemorts. J’ai un nom, mais je sais pas quoi en faire. T’es un peu la seule personne que je connaisse qui pourrait à la fois avoir des informations et qui accepterait de me les livrer… et accessoirement me laisserait en vie.»

Après… Ça ne voulait pas dire qu’elle pouvait forcément l’aider, ni qu’elle accepterait. Mais s’il voulait comprendre ce qui était arrivé à cette femme qu’il avait rencontrée, et savoir ce que signifiait le nom Malefoy, il fallait qu’il s’adresse à quelqu’un qui connaissait les mangemorts, qui connaissait bien leur pratique et leur activité. Peut-être que la sorcière était au courant de certaines choses sur cette affaire. Et puis… Même si c’était pas le cas, c’était quand même bien qu’ils se revoient, qu’ils fassent le point sur leur vie respective après les deux mois qui se sont passés depuis la dernière fois qu’ils s’étaient parlés.

«Le nom Malefoy ça te dit quelque chose ?»

Ce petit carnet était peut-être le jardin secret d’Amber, mais elle aurait sans aucun doute répondu à Raphaël s’il lui avait posé la question. En vérité, elle savait qu’il ne l’aurait pas jugé le moins du monde et il aurait même été passionnée de voir des créatures magiques dont il ne soupçonnait même pas l’existence entre ses pages. C’était ce qu’elle appréciait le plus en sa compagnie. Il était impressionné des choses pourtant banales et des activités que des sorciers auraient pu juger d’étranges. Mais bon… Etaient-ils un tant soit peu normaux, tous les deux ? Elle en doutait, mais à quoi servait la normalité en ce bas monde ? Autant profiter de la vie sans se poser de question.

Enfin… Profiter était un bien grand mot, surtout depuis l’arrivée du Blood Circle dans leur vie. Quel beau bordel ! Alors, sa question était quelque peu mal placée. Il allait répondre « oui », comme n’importe qui l’aurait fait, et aurait mis de côté tous ses troubles pour « ne pas déranger ». La vie était ainsi faite.

Glissant son carnet dans son sac à dos, elle rabattit la sangle sur son épaule et accorda toute son attention à son ami qui venait d’arriver. Étonnamment, il lui avoua que tout n’allait pas bien dans sa vie, surprenant la demoiselle par la même occasion. En voilà une réponse très peu commune.

Elle n’eut pas le temps de lui demander ce qui n’allait pas qu’il lui demanda directement comment elle allait et si elle avait été à l’offensive. Bon sang, il ne perdait pas de temps… Amber se figea sur place et un flot de mauvais souvenirs l’envahit.

— Pourquoi ? Je n’ai pas l’air d’aller bien ?

La jeune femme avait répondu avec rapidité et une légère froideur incontrôlée. Non. Rien n’allait et Raphaël pouvait tirer des conclusions rien qu’avec le ton qu’elle venait d’employer. Nerveusement, elle se gratta la peau des pouces et bascula d’une jambe à l’autre. Par quoi pouvait-elle commencer ?

Salut Raph. Alors depuis la dernière fois, j’ai commencé des entraînements pour supporter des sortilèges impardonnables. Tu sais, avec mon père, je préfère me préparer à toute éventualité. Après le lièvre, il jugera peut-être bon de m’obliger à torturer un moldu. Oh, j’ai failli oublié ! Il m’a aussi fiancé à un pré-pubère de treize piges qui ne comprend sûrement rien à la vie. J’aurais sûrement déjà la ménopause à l’âge où il se sentira prêt à devenir père. Et comme pour couronner le tout, j’ai tué par inadvertance un moldu pendant cette attaque. Mais t’inquiète, je vais bien. Trèèès bien. La vie est cool et on ne vit qu’une fois, après tout !

Ouais… Pas très concluant comme approche. Alors, elle se contenta de hocher la tête pour répondre à ses deux questions. Au moins le tremblement de sa voix ne la trahirait pas cette fois-ci. M’enfin, Raphaël la sauva de tout un tas d’explications et il prit la parole sur ce qui n’allait pas. Un beau bordel qu’il ne semblait pas lui dire en entier. Il avait ce regard qu’elle ne connaissait que trop bien pour l’avoir vu dans son propre reflet dans le miroir. Il avait la prunelle de ses yeux qui criait dans une telle détresse. Mais une détresse qu’il voulait gérer seul. Du moins, c’était ce qu’elle en avait conclu, parce qu’elle agissait elle-même de cette façon.

— Je suis désolé pour toi et ton coloc. Tu sais… Je commence à me dire qu’on devrait emménager ensemble, loin de tous nos problèmes.

Amber rit légèrement, sans un léger sarcasme derrière. Après tout, quand ils s’étaient rencontrés, la jeune femme avait mis une bonne partie de ses économies dans des auberges, là où elle pourrait éviter sa famille et tous les problèmes qu’elle lui apportait. Qu’il le croit ou non, la Serdaigle comprenait parfaitement son ressenti.

Elle resta donc silencieuse et l’écouta avec attention. Elle voulait savoir comment il se sentait par rapport à tout ça, mais elle comprenait également qu’il devait garder une part de mystère. Certaines choses demandaient du temps avant de pouvoir être dites. Visiblement, quelque chose l’avait marqué et faisait un beau remue-méninge là-haut, mais Raphaël resta discret à ce sujet. Elle comprenait.

— Je te suis.

Sur ces quelques mots, elle marcha à ses côtés, non sans avoir remarqué sa grimace lorsqu’il s’était penché. Soit il était courbaturé, soit il avait mal quelque part. Interloquée, sa curiosité reprit immédiatement le dessus et elle lui posa une nouvelle question.

— Tu as mal quelque part ?

Après tout, le fait qu’il ait commencé à faire du sport n’était pas un secret d’état. Amber avait elle aussi fini par s’y mettre alors qu’elle avait envie de se terrer sous sa couette juste à la mention du mot « effort », un an auparavant. Le Blood Circle avait fini par la faire revoir son mode de vie et elle avait décidé qu’il valait mieux être prête à les affronter avec ce qu’elle avait de plus nobles en armes : ses poings et ses pieds. Sans magie, elle ne voulait pas se sentir faible et elle se préparait du mieux qu’elle le pouvait.

À ce moment, Raphaël commença à lui faire mention d’une jeune femme et tout un tas d’hypothèses fusa dans l’esprit de la demoiselle. Au départ, elle voulut sourire et lui mettre un petit coup de coude en pensant qu’il allait lui parler d’une femme qui lui avait fait tourner la tête, mais en entendant la suite de l’histoire, elle laissa tomber. Son visage redevint grave et ses sourcils se froncèrent instantanément. Qu’est-ce que ces mangemorts avaient encore fait ? Plus elle en apprenait, plus elle était désabusée par de tels comportements. Raphaël ne lui narra pas les détails de cette histoire, mais étrangement elle sentait que quelque chose de malsain s’apprêtait à lui être raconté.

Il mentionna alors le nom de Malefoy. Ces mots suffirent à la faire cesser brutalement sa marche. Ok, cette histoire ne sentait décidément pas bon du tout. Elle voyait très bien de qui il s’apprêtait à parler. Elle l’avait croisé plusieurs fois au manoir. Il avait fait affaire avec son père et connaissait très bien Tobias. Elle ignorait dans quoi sa famille pouvait tremper, mais elle savait parfaitement qu’il n’y aurait rien de bon derrière ça.

— Je vois de qui tu parles, en effet. Qu’est-ce qu’il se passe ?

Raphaël ne s’attendait pas à ce qu’Amber lui saute à la gorge comme ça. Bon, elle ne l’avait pas réellement agressé, mais à la vitesse où elle avait répondu et le ton sur lequel elle s’était exprimée. Non, pour le coup ça n’avait pas trop l’air d’aller effectivement. Mais si elle ne voulait pas en parler, il n’allait pas la forcer.

«Je crois que par les temps qui courent, bien aller est un utopisme. »

La sorcière se contenta de hocher la tête une seule fois pour répondre à la positive à ces deux questions. Est-ce qu’elle allait vraiment bien, ou est-ce qu’elle ne voulait pas s’étendre sur le sujet ? Ne voulant pas la mettre mal à l’aise, il chercha à la mettre en confiance en racontant ses propres problèmes. Libre à elle de vouloir aborder ses propres soucis ou de parler de l’offensive de février. Amber était désolée pour Raph et ce qu’il s’était passé avec son coloc.

«Ne le sois pas, ça fait un an qu’il commençait à devenir peu à peu un connard» Depuis que Artémis avait rejoint la coloc en gros, plus ou moins. «Mais ces derniers mois il s’est renfermé sur lui même. Il doit avoir ses problèmes persos qu’il a du mal à gérer, mais c’est pas une raison pour que je devienne son défouloir. Après, j’ai un peu surréagit mais c’est trop tard pour revenir en arrière, trop de choses ont été dites et faites.» Il ria à la blague d’Amber à propos d’emménager ensemble. C’était bien une blague ? «Quel dommage, tu me proposes ça quelques semaines trop tard ! Cela dit… Après avoir fait l’expérience, je ne suis pas sûr que ça soit une bonne idée de vivre en colocation avec un ami. Ça crée des tensions qui n’ont pas lieu d’être.»

Raphaël allait s’asseoir pour discuter, mais ses courbatures lui firent comprendre que c’était pas un bon plan, il se ravisa donc et proposa à Amber de discuter en marchant. Elle acquiesça sans protester. Sans protester certes, mais elle avait dû remarquer les mouvements un peu patauds du jeune homme, ou sa grimace lors de sa tentative pour s’asseoir.

«Mal quelque part ? Pas du tout, je dirais plutôt que j’ai mal de partout.» Il rigola franchement «Disons que mon corps apprécie pas trop que je me mette au sport. Mais ça va moins se ressentir une fois que je serai chaud. La marche ça va me dérouiller tout ça. »

Finalement il lui parla de cette femme qui l’avait contacté et dont l’histoire était terrifiante. Qu’il pensait que ça concernait un groupe de mangemort et que de part sa position, Amber pouvait peut-être l’aider. Il lui demanda si le nom de Malefoy lui était familier. La sorcière se stoppa net.

«Quoi ? C’est si grave que ça ?»

La sorcière avoua qu’elle avait une idée sur la personne en question et demanda plus de détail.

«Okay, je vais te dire tout ce que je sais sur le sujet et ce que j’en pense personnellement. Par contre… En échange je ne veux pas que tu cherches à me ménager. Tout ce que tu peux me dire, je veux le savoir. Je ne veux pas que cherches pas à me couvrir, j’ai très bien conscience de ce dans quoi je trempe et je ne suis pas inconscient au point d’aller confronter des mangemorts.» Il soupira «Je te préviens, ça va être long.» C’est surtout la joueuse que je préviens

Il sortit son téléphone pour relire les mots-clés qu’il avait notés lors de son entretien avec la pauvre fille. “Malefoy”, “Mangemort”, “disparition”, “Blood Circle ?” “couple fiancé”, “enlèvement” “~ 2 ans”, “torture”, “séquestration”. Il n’avait pas vraiment besoin de ces notes pour se rappeler de tout ça. Mais ça lui donnait une forme de support pour l’aider, un peu comme des béquilles.

«Alors… Tu le sais probablement pas. Mais je tourne pas mal de petites vidéos que je diffuse sur internet. Dans ces vidéos ce sont des espèces de mini documentaires pour dénoncer les actions du Blood Circle et de sensibiliser un peu à la Magie. De montrer que les sorciers ne sont pas tous comme… » Tous les Mangemorts ? Comme ta famille ? Comme la plupart des gens que tu connais et que tu dois fréquenter ? «Comme le Blood Circle les décrit.» Bien rattrapé ! «Je ne suis pas très connu, peu de gens regardent mes vidéos. Bref suite à ces vidéos une femme est venue me demander des informations, des conseils.»

Raphaël marqua une courte pause. Par où commencer, comment continuer ?

«Elle ne veut pas que je donne son identité dans ma quête d’informations, donc on va la nommer Miss M, pour Moldue. Du coup Miss M m’a parlé de trucs un peu confus. C’était très désordonné. Mais elle utilisait des mots clés bien trop spécifique. Mangemort, Circle, Magie. Mais elle ne savait pas ce que ça voulait dire. Elle avait aussi ce nom, Malefoy. Elle voulait que je l’aide à trouver son fiancé.»

Dit comme ça, ça sonnait un peu comme s’il étant agent matrimonial qui devait aider la jeune femme à se trouver un fiancé.

«Encore une fois c’était assez confus mais de ce que j’ai compris. Elle et son fiancé ont été enlevés par des sorciers il y a deux ans, probablement des mangemorts. Elle a été séquestrée et torturée pendant deux ans. Non, je n’ai pas de détails sur ce qu’ils lui ont fait. Durant sa séquestration elle aurait été témoin de divers phénomènes magiques et elle a pu capter différents mots. Ces tortionnaires prétendaient que son fiancé appartenait à une organisation de chasseurs. Bref, je pense que cet homme appartenait au Blood Circle et que ces sorciers leurs sont tombé dessus à lui et sa fiancée et qu’ils voulaient en savoir plus. »

Jusque là, c’était pas amusant, mais c’était plutôt clair…  En comparaison de la suite en tout cas…

«Ensuite, si comme moi tu es curieuse, tu dois probablement te demander comment elle a pu s’enfuir ? Comment une simple moldue aurait pu échapper à la vigilance de ces geôliers magiques. Je pense que tu sais bien mieux que moi de quoi sont capables des sorciers malintentionnés et quels dispositions ils sont capables de prendre pour gérer quelqu’un qui n’a pas de pouvoir. Et bien c’est très simple… Tu veux savoir ?»

Raphaël rit jaune.

«La porte était ouverte. C’était ouvert, elle est partie. Du coup j’ai trouvé cette histoire assez étrange. Mais le pire reste à venir. Elle a parlé d’y retourner. Elle s’est enfuie mais elle veut retourner là bas pour retrouver son fiancé. J’ai gagné un peu de temps en me disant que je trouverai peut-être du soutien au sein de l’Ordre sur cette affaire. Mais faut savoir parler aux bonnes personnes et surtout savoir où aller. J’ai proposé de l’accompagner en me disant que je pourrais demander des renforts au dernier moment, pas très fair-play comme méthode mais je comptais pas la laisser se suicider. Elle a refusé mon offre de l’accompagner. Prétextant, je cite “Ils me connaissent, c’est moins risqué si j’y vais seule” et “Il y a deux personnes qui veillent sur moi”» Raphaël utilisait ses doigts pour mimer les guillemet de citations. Ils continuèrent de marcher dans le parc, un peu au hasard. Le moldu ne prêtait pas attention aux détails de leur environnement. Il aurait sûrement apprécié de voir le le givre recouvrir certaines fleurs mais il n’avait pas la tête à ça.

«Je sais pas trop ce que tu en penses toi, non réponds pas tout de suite. Mais moi, j’ai une théorie… Je pense que cette Miss M est contrôlée par des mangemorts avec l’aide de ce sortilège impardonnable dont tu m’as parlé en décembre. Et qu’ils l’utilisent pour raconter cette fameuse histoire, pour qu’elle raconte ça à un grand nombre de personne et que les moldus soient encore plus virulents à l’encontre des sorciers. S’il y a plus d’activités du Blood Circle contre nous, le Conseil d’Administration va être contraint d’accorder plus de liberté aux mangemorts dans leurs actions. »

Il suffisait de voir la mise en place de rafleurs et la nouvelle réglementation sur les Sortilèges Impardonnables. Ils devraient d’ailleurs s’appeler les Sortilèges Impardonnables Soumis À Conditions vu que visiblement, ils sont impardonnables, mais… Oh, bah ça va.

«Elle m’a aussi dit qu’elle s’en voulait de s’être enfuie. Bref toute cette affaire, je trouve ça bizarre. Après je lui ai promis de l’aider. Et si je ne fais rien alors que ce n’est pas une ruse… Bah je m’en voudrais toute ma vie. Et dans le fond… Même si c’est un piège je dois quand même le faire. La mission que je me suis confiée c’est pas juste de protéger les sorciers. C’est de faire ensemble que Sorciers et Moldus vivent ensemble.»

Ça faisait beaucoup de choses à encaisser. Mais il préférait raconter cette histoire en une fois. Parce que s’éparpiller en racontant ce genre de choses, ça rendait le truc encore plus compliqué que ça ne l’était déjà. Il soupira avant de s'apprêter à  laisser la parole à son amie.

«Voilà voilà… T’en penses quoi toi ? À part le fait que je mouille dans quelque chose de bien trop gros pour moi et que je ne devrais pas m’en mêler ? C'est qui Malefoy ?»

Il s’arrêta et regarda Amber. Il attendit qu’elle le regarde à son tour et juste avant qu’elle ne prenne la parole il la coupa.

«Parce que je compte aller jusqu’au bout. J’ai peur. Je flippe ma race. Je ne suis pas inconscient. Mais quoi qu’il arrive, les enjeux de cette affaire sont bien trop importants pour que j’abandonne.»

Il voulait éviter les effusions de larmes où chacun essayait de se protéger l'un l'autre. Il passait son temps à peser le pour et le contre sur cette affaire. Il devait aller jusqu’au bout.

Amber n’avait aucune envie de parler de l’offensive avec Raphaël. Elle connaissait son point de vue sur les sorciers et il avait une vision utopiste de l’avenir. Il voyait les sorciers et les moldus collaborer, main dans la main, alors que la demoiselle savait parfaitement que cela serait impossible. Elle aurait aimé que ça le soit, vraiment. Mais il y aurait toujours des mangemorts et des moldus qui adhèrent aux idées du Blood Circle. Rien ne pourrait stopper cette guerre. Les mages noirs existaient depuis la nuit des temps et leurs idéologies étaient bien trop ancrées pour être stoppées. La paix entre les mondes ne se ferait certainement jamais, mais Raphaël avait de bons espoirs et elle n’avait pas envie de lui briser tous ses rêves, comme son propre père avait pu le faire depuis son plus jeune âge. Amber baignait là dedans depuis qu’elle était née et son ami avait aucune idée de l’envers du décor. Ou du moins, il était loin de l’imaginer. Alors pourquoi irait-elle lui parler de l’offensive ? Il ne comprendrait peut-être pas sa façon de penser sur le moment, et encore moins le fait qu’elle ait tué un membre du Blood Circle, contre sa volonté. Malgré tout, elle n’avait aucun remord et juste pour ça, il aurait pris ses cliques et ses claques et elle ne l’aurait plus jamais revu. Il était l’un des seuls amis qu’elle avait et elle n’avait pas vraiment envie de le perdre, même si cela voulait dire qu’elle devait lui cacher les atrocités de sa vie. Elle était peut-être égoïste, mais elle savait qu’elle n’était pas une mauvaise personne malgré tout. Sauf que Raphaël sait très bien de quelle famille elle vient et elle n’avait pas envie qu’il fasse le raccourci « Famille Mangemort = Amber future mangemort avec les mêmes pulsions qu’eux, même si elle le nie ». Non. Très peu pour elle.

Finalement, Raphaël lui parla de son colocataire, et tant mieux ! Elle n’avait aucune envie de s’étendre sur le sujet qu’ils venaient d’entamer. Elle l’écouta raconter son histoire et agrémenta son discours de hochement de la tête et de « hum », de temps à autre, comme pour montrer qu’elle le suivait et qu’elle l’écoutait attentivement. Les colocations n’étaient pas simples et son histoire sonnait un peu comme des chamailleries frère-sœur qu’elle avait bien connu pendant son enfance. Sauf que là, en l’occurrence, ils étaient adultes et « matures ». C’était dommage qu’une colocation dégénère de la sorte. Alors, comme pour alléger l’atmosphère, elle lança une plaisanterie.

— Ça tombe bien, je n’ai jamais dit qu’on était amis, lança-t-elle avec un léger clin d’œil. Pus sérieusement, je comprends ta situation. Elle me semble assez compliquée. Je ne sais pas ce que tu comptes faire pour ton prochain logement, mais j’espère que ça se passera mieux.

Amber était sincère. Les lieux de vie étaient censées être un endroit convivial, où l’on décompresse après une grosse journée fatigante. Ils n’avaient pas vocation à être une zone de conflits permanents, comme avait pu l’être son propre manoir familial. Elle connaissait très bien cette sensation d’étouffement quand les difficultés se mêlaient aussi bien au travail qu’au domicile. À long terme, cela devenait tout simplement invivable.

— Tu es dans quel coin maintenant ?

Finalement, Amber constata les grimaces que retenaient Raphaël à chacun de ses pas et quand il lui avoua qu’il avait commencé à se mettre au sport, elle rigola. Évidemment, elle ne se moquait pas de lui, et elle lui expliqua assez rapidement ce qui l’avait amusé dans ses paroles.

— Je te comprends tellement… J’ai commencé des entraînements en novembre. Je ne pouvais plus m’asseoir pendant une semaine, plaisanta-t-elle de bon cœur. Pour des sportifs du dimanche, les lendemains d’entraînement ne sont pas les bienvenus. Mais ce n’est que temporaire si tu tiens le rythme, ne t’en fais pas !

Amber lui sourit doucement. Elle se demandait pour quelles raisons Raphaël s’était mis au sport. Peut-être que comme elle il ressentait le besoin de se prendre en main, d’être en capacité de se défendre envers et contre tout ? Il fallait dire qu’il était moldu et qu’il collaborait avec des sorciers. Il avait bien plus de clans à dos qu’Amber pouvait en avoir. Sans oublier qu’il se mettait constamment en danger, à participer à des missions ici et là. Elle ne lui avouerait jamais, mais elle se faisait du soucis pour son ami. Elle ne voulait pas qu’il lui arrive malheur parce qu’il s’était bien trop investi dans quelque chose de dangereux. Et cela ne manqua d’ailleurs pas… Il se mit à lui raconter une histoire qu’elle était loin de connaître.

Cette demoiselle avait peut-être un syndrome de Stockholm, mais il restait quelque chose de pas très net dans tout ce qu’il venait de lui dire. Jamais un mangemort laisserait la porte ouverte à un moldu. Ils n’étaient pas aussi stupides quand quelque chose les importait. Sans oublier qu’Amber en aurait forcément entendu parler. Des erreurs professionnelles de ce type ne passaient pas inaperçus et son père en aurait certainement fait mention au cours d’un dîner avec d’autres mangemorts. La demoiselle n’avait rien entendu de ce genre et cela lui laissait penser soit à une mission menée secrètement, soit à quelque chose que son père n’aurait même pas su.

— Qu’est-ce que Malefoy a à faire dans cette histoire ?

Ce sorcier venait souvent chez eux et elle voulait savoir à qui elle faisait face quand il s’arrêtait dîner à la maison. Néanmoins inquiète pour son ami, elle se fit tout un tas de théories aussi farfelues les unes que les autres et ne tarda pas à lui en faire part.

— Cette fille, tu l’as rencontré où ? Comment ? Tu es vraiment certain que ce n’est pas une sorcière ? Elle aurait pu être envoyée par des mangemorts pour obtenir des informations, non ? Parce que je ne comprends pas très bien comment elle a pu s’échapper aussi facilement et comment elle a pu avoir de l’aide si elle a été enlevée par des mangemorts.

Évidemment que l’histoire qu’il lui avait raconté pouvait être vraie, mais elle se faisait du soucis pour son ami. Si des mangemorts savaient qu’un moldu leur venaient en aide, ils l’accepteraient sans doute difficilement. Cela ne l’étonnerait pas vraiment qu’un complot se fasse contre Raphaël. Les mages noirs se méfieraient de lui et de ses intentions. Elle en était persuadée.

— Malefoy est un mangemort. Il vient souvent à la maison pour voir Tobias ou mon père, et on a eu quelques dîners en commun. Suffisamment pour que je vois quel genre de personne il est.

Elle expliqua calmement à Raphaël ce qu’elle savait, mais commença à vriller totalement quand il fit mention d’aller jusqu’au bout de cette affaire. Il n’abandonnerait pas, disait-il ! Amber eut du mal à garder son calme et lui répondit peut-être un peu trop sèchement.

— Non. Tu laisses tomber cette affaire.

Les amitiés, ça ne la connaissait pas tellement, il fallait dire ! Mais elle n’était pas du genre à laisser quelqu’un qu’elle aimait se mettre en danger. Cette affaire dépassait tout entendement et il mettait les pieds dans quelque chose de très dangereux.

— Je vais m’en occuper. Mais promets-moi de ne rien faire avant que je me sois renseignée davantage là-dessus.

Son ton était beaucoup plus doux et moins inquiet que précédemment. Amber savait qu’elle pourrait se renseigner bien plus facilement que lui, et sans encourir le moindre risque. Des mangemorts, il y en avait un bon nombre et Thorfinn attendait depuis si longtemps qu’elle commence sa formation. Si elle gagnait la confiance de Malefoy, elle pourrait aller directement sur les lieux que venaient de lui dire Raphaël. Elle pourrait voir de ses propres yeux ce qu’il s’y passe. Elle détestait les mangemorts, elle ne voulait pas les fréquenter, mais elle était prête à le faire si cela tenait Raphaël à l’écart. Il n’avait aucune idée de ce qu’il encourait si des mages noirs le surprenaient en train de fouiner et cela la mettait en colère. Il devait être conscient de ce qui l’attendait et elle ne voulait pas qu’il perde la vie pour une fille qu’il connaissait à peine et qui pouvait très bien se servir de lui pour arriver à ses fins. Après tout, qu’est-ce qu’il savait d’elle à part des explications loufoques sur une affaire que même Amber ignorait ? Absolument rien. Et elle n’avait pas envie qu’il mette les pieds dans quelque chose de dangereux.

Raphaël ne chercha pas à sonder davantage le moral de Amber. Si elle voulait en parler, il était là, si non, il respectait son silence. Il choisit donc de parler de ces propres soucis récents ; peut-être que la jeune femme se sentirait plus facilement en confiance en voyant que le moldu lui accordait la sienne. Il lui parla de ses problèmes de collocations et Amber suggérait de peut-être se mettre en colocation ensemble. Le jeune homme répliqua que d’après son expérience, c’était pas la meilleure idée d’avoir un ami en colocation, ça créait des nouvelles complications au sein d’une amitié qui ne devrait pas avoir lieu d’être. Amber rétorqua pour plaisanter qu’elle n’avait jamais précisé qu’ils étaient amis. Même si c’était pour rire, et qu’elle lui avait fait comprendre d’un clin d’oeil. Ça lui fit l’effet d’une douche glacée.

«En effet… Tu ne l’as pas dit.»

Elle continua sur une note plus sérieuse.

«Je sais pas trop non plus comment ça va se passer. Ils ont l’air cool, mais je pense pas essayer de devenir pote avec. J’veux dire ils auront leur vie, j’aurais la mienne, peut-être de temps en temps se faire des trucs ensembles… De toutes façons, c’est un peu con à dire mais j’ai plus trop de temps à accorder pour des banalités moldues… »

Après, ils étaient cool. Raph avait eu un peu peur de la présence du petit Cassandre. Il n’était pas un expert en enfants et ça le mettait mal à l’aise. Il craignait de devoir subir les caprices de l’enfant ainsi que de faire des fautes de langages en sa présence. Mais ça va, l’enfant était plutôt supportable, et même si de temps en temps l’étudiant lâchait un juron, ce n’était pas dramatique.

«J’habite pas trop loin de mon ancien appart, je suis vers le British Museum. Ça reste proche de ma fac en fin de compte, j’ai à peine plus de trajet.»

C’était un peu pour ça qu’il n’avait pas trop hésité en voyant l’offre. Il était pressé de se barrer de la coloc et ça ne le changeait pas trop de quartier.

Ils abordèrent ensuite le fait que Raphaël se soit mis au sport.

«C’est incroyable, j’ai mal à des endroits, je savais même pas que ça appartenait à mon corps. En tout cas, je sais pas si c’est temporaire mais… Ça donne pas trop envie de continuer. Et donc… Y’a des gens qui font ça pour le plaisir ? »

Raphaël lui expliqua ensuite les raisons de ce petit rendez vous, ainsi que ce qu’il attendait d’elle. Miss M., son fiancé, les mangemort, le Blood Circle, la torture, l’évasion. Mais aussi la théorie de Raphaël sur le sujet. Étant donné qu’elle appartenait à une famille de mangemort, il espérait qu’elle ait eu accès à des informations sur le sujet qui auraient fuitées. Elle lui demanda ce que Malefoy avait à faire dans cette histoire.

«Bah euh… C’est un peu ce que je te demande en fait… Qui c’est ? Qu’est ce qu’il manigance ? Tout ce que je sais, c’est que c’était un nom qu’elle avait entendu plusieurs fois. Est-ce que c’était un complot contre cette personne, ou si c’était le commanditaire, j’en ai aucune idée.»

Elle sollicita ensuite des détails sur la femme qui avait contacté Raphaël.

«Bah comme je t’ai dit, elle m’a contacté par internet. Je poste des vidéos sur internet, pour dénoncer le Blood Circle et ses actions. C’est comme ça qu’elle m’a trouvé. On a un peu correspondu en ligne, et comme elle était à Londres, j’ai accepté de la rencontrer. J’ai pris des précautions au moment de la rencontrer, j’avais une amie de l’Ordre pour surveiller que la rencontre se passait bien pour moi. A vrai dire, au début je pensais que c’était peut-être un piège du Blood Circle pour ens avoir plus sur ce French_Bahamut qui publiait ce genre de vidéos.» Le jeune homme se garda bien de lui dire qu’il avait s’était présenté en tant que Raphaël Millet quand il avait rencontré la femme «Pour le reste, je ne peux pas te dire. Je pense qu’elle était vraiment moldue. Elle semblait vraiment paumée. Ou alors c’est une excellente actrice et je devrais l’embaucher. Mais sinon oui, je suis un peu du même avis que toi. Cette histoire d’évasion, c’est vraiment étrange. Donc le fait qu’elle soit utilisée par des mangemorts, ça ne me choque pas… Enfin… Pas que ça soit quelque chose de normal hein. Mais… Je trouve le raisonnement cohérent. C’est crédible comme théorie. »

Après… Utilisée, mais pour quoi ? Amber suggérait que ça soit pour recueillir des informations, tandis que Raph supposait que c’était pour alimenter le conflit. Les deux raisonnements se tenaient, mais peut-être que c’était autre chose encore. Amber capta toute l’attention de Raphaël lorsqu’elle commença à lui parler de Malefoy.

«Et du coup, quel genre de personne il est ? C’est le genre de Mangemort tout gentil mignon qui s’est laissé embrigadé dans quelque chose qu’il ne comprend pas ?»

Il n’y croyait pas lui même. Il avait bien compris au ton que son amie avait employé qu’il n’était pas quelqu’un de vraiment recommandable. Avant qu’elle ne réponde de nouveau, il affirma qu’il comptait aller jusqu’au bout pour découvrir le fin mot de l’histoire mais Amber lui répondit sèchement de laisser tomber cette affaire et voulait lui faire promettre de ne rien faire avant qu’elle se soit renseignée là dessus.

«Je crois qu’on s’est mal compris Amber. Je compte juste dénicher des renseignements. Il n’a jamais été mon intention de confronter ce Malefoy ou un autre Mangemort. Je peux pas te promettre de ne pas continuer de fouiner pour trouver des informations. Mais je compte bien mettre le moins de personnes possibles sur l’affaire. Parce que justement je suis prudent. J’ai pas besoin que tu me maternes, je ne peux pas rester éternellement caché derrière toi ou Nymphéa. J’ai bien conscience d’avoir moins de force de frappe que vous en cas d’attaques, mais j’ai d’autres atouts qui peuvent être utiles pour qu’on puisse retrouver une paix durable. L’information aussi est une arme.»

Raphaël serra les poings.

«En terme de danger, je crois que je pourrais très bien te reprocher d’avoir été présente sur cette attaque. Je respecte tes choix personnels d’avoir voulu y aller alors que tu aurais très bien pu te faire tuer.» Raphaël frissona à cette idée. Il avait eu des échos du massacre que cette bataille avait été. Du massacre que ça avait été pour les deux camps. «J’ai bien compris que tu n’avais pas envie de parler de ça. Mais ne va pas croire que parce que je respecte ton mutisme sur le sujet que ça ne veut pas dire que je suis aveugle. Donc par pitié Amber, arrête d’essayer de m’empêcher d’être utile. Tu penses vraiment que je prends tout ça à la légère ?» Raphaël haussa légèrement le ton, il parla plus fort qu’à son habitude, et plus rapidement «Est-ce que tu penses une seule seconde que je ne prends pas la situation au sérieux ? Que je n’ai pas conscience du danger ?» Il parlait de plus en plus fort. «Est-ce que tu penses que je vois ça comme un jeu ? Je le fais parce que je dois le faire, parce que c’est mon combat et… » Il eut l’impression de recevoir un choc dans la poitrine puis sa voix se brisa pour finir sa phrase «… parce que c’est la seule chose que je peux faire pour être utile dans ce combat.»

La tension était retombée d’un seul coup et des larmes commencèrent à s’échapper de ses yeux. Putain. Il respira fortement pour tenter de contrôler ses émotions avant de continuer, beaucoup plus lentement, calmement.

«Tu te rends pas compte… Tu sais pas à quel point je sers à rien. Je peux pas faire jaillir magiquement du feu de nulle part. Je peux pas… me téléporter. Je peux pas… Je peux rien faire de ce que vous pouvez faire. Si le Blood Circle nous tombait dessu ici et maintenant, je devrais m’en remettre à toi pour qu’on s’en sorte. Alors par pitié, n’essaye pas de m’empêcher d’être utile quand je le peux. Je ne vais pas arrêter d’enquêter. Je peux juste te promettre de faire davantage attention dans le choix des personnes que je mêle à ça. Pour le moment y’a que toi et une amie de l’Ordre. Je n’en ai pas encore parlé à Nymphéa. Et j’estime ne pas avoir à te promettre de ne pas aller voir moi-même des mangemorts pour les interroger. J’ai suffisamment de bon sens pour que jamais ça ne me vienne à l’esprit.»

Il resta silencieux un moment avant d’ajouter, en baissant la tête honteusement.

«Désolé de t’avoir criée dessus… »

Amber lança sa blague à Raphaël, mais elle eut la drôle d’impression que celle-ci n’avait pas été bien réceptionnée. Peut-être n’avait-il pas conscience que la demoiselle le considérait réellement comme un ami ? Pourquoi douterait-il ? Elle n’avait pas été assez démonstrative ? Elle savait qu’elle n’était pas une personne très souriante, très chaleureuse et très expressive, mais cela ne voulait pas dire qu’elle ne montrait pas lorsqu’elle considérait quelqu’un comme un ami. Elle avait été présente pour ses tournages ; ils avaient eu des conversations qu’elle n’avait eues avec personne d’autre ; ils s’étaient confiés. Ce serait curieux qu’il ne comprenne pas cela, mais soit !

La jeune Serdaigle poursuivit tout de même sur l’histoire des colocations de Raphaël. Même si la dernière fois elle s’était mal terminée, cela ne signifiait pas pour autant que toutes ces relations avec ses colocs étaient vouées à l’échec. Pour sa part, elle avait vécu huit ans dans le même dortoir que les aiglons de Poudlard, et elle était toujours sur ses deux pieds. Pourtant, partager sa chambre qu’avec des filles n’était pas quelque chose qui l’avait fait sauter de joie au départ. Non pas qu’elle veuille se rendre dans le dortoir des garçons, loin de là. Simplement, elle s’était préparée aux potentiels crêpages de chignon. Il y en avait eu quelques uns, mais les conflits avaient toujours fini par s’apaiser.

— Au moins, c’est une bonne chose que tu ne sois pas très loin de ton lieu d’étude. Ça doit être tellement agaçant de prendre les transports en commun, le matin et le soir, à Londres.

Après tout, elle n’avait pas tort. Raphaël devait sûrement se prendre l’heure de pointe en pleine face, tous les matins. Amber n’avait pas ce genre de problème. Elle se contentait de descendre les nombreux escaliers qui menaient à sa salle de cours et elle était rendue. Mais évidemment, il avait d’autres avantages qu’elle n’avait pas, comme par exemple, il pouvait avoir son petit coin à lui. Lorsque la jeune femme était envahie de pensées noires, elle peinait à trouver un endroit apaisant et vide. Il y avait toujours des élèves qui passaient dans le coin et elle détestait cela. La Forêt Interdite restait toujours une excellente alternative, mais les points de sa maison en prenaient souvent un coup. Elle ne pouvait pas s’adonner à ce genre de comportement, chaque jour durant. Ses préfets et l’ensemble des élèves de Serdaigle lui taperaient sur les doigts et quand elle n’allait pas bien se prendre un sermon était la dernière chose qu’elle voulait.

Finalement, la conversation dévia vers le sport et Amber ne put s’empêcher de s’esclaffer à ses propos. Elle pensait exactement comme lui. Encore, il n’avait pas vu le Quidditch. Certains acceptaient de se prendre des Cognards, juste pour attraper un Souafle, visant à faire gagner des points à leur maison. Et encore… Le Vif d’Or était bien plus important que tout le reste, alors il valait mieux réfléchir avant de se prendre en objet aussi douloureux en plein dans son balai, si ce n’était ailleurs… Amber pouvait se plaindre, certains moldus n’étaient pas mieux. Elle avait fait une initiation au rugby et elle ne pouvait s’empêcher de trouver ça barbare, la manière d’où les joueurs se plaquaient au sol avec une violence inconditionnelle. Un frisson lui parcourut l’échine et elle secoua son visage, comme pour chasser ces mauvaises pensées.

— Ne t’en fais pas, les douleurs diminueront si tes efforts restent égaux à ceux que tu viens de faire. Si tu décides de repousser tes limites alors… Advienne que pourra !

Elle accompagna ses propos d’un haussement d’épaules et finit par rire. Bon sang, elle détestait le sport, mais elle y était bien contrainte. Si ce n’était pas pour sa santé physique, c’était pour sa santé mentale et son besoin de se conforter dans l’idée qu’elle pourrait mettre n’importe quel membre du Blood Circle à terre si elle le voulait. Malheureusement, elle était encore loin d’y arriver…

Raphaël finit par lui expliquer la raison de sa véritable venue et elle comprenait très bien le conflit interne dans lequel il se trouvait : aider quelqu’un malgré le danger et le manque d’informations ou ne rien faire et aller contre ses principes. Elle eut même un léger sourire à la mention de son surnom, même si ça ne la surprenait pas tellement. Nul doute que si Raphaël faisait partie du monde magique, ils auraient fait des escapades à deux dans la Forêt Interdite, à la découverte des créatures magiques. Il n’était pas un sorcier, mais elle était persuadée qu’il se serait épanoui si ça avait été le cas. Ils auraient même pu s’entendre sur ce point-là. La demoiselle se mit alors à imaginer à quel point leur relation aurait pu être différente de ce qu’elle était actuellement si Raphaël n’était pas un moldu. Son imagination commença à s’envoler, mais atterrit avec brutalité quand il refit mention de Malefoy. Avait-il vraiment envie de connaître la réponse ?

— Je pense que tu connais déjà la réponse à ta question.

Elle ne prit pas la peine de lui répondre. Il n’était pas stupide, il avait parfaitement compris qu’elle ne le portait pas dans son coeur et qu’il ne lui inspirait pas confiance. Il y avait toujours quelque chose dans son sourire qu’elle ne trouvait pas très net, sans trop savoir pourquoi.

Raphaël commença alors à aller contre le sens d’Amber et à lui faire comprendre qu’il agirait, qu’elle le veuille ou non. Elle s’apprêta à ouvrir la bouche, pour lui faire entendre son point de vue, mais elle ne loupa pas ses poings qu’il commençait à serrer. Bordel… Ça allait partir en vrille !

Et elle eut raison. Son intonation monta de plus en plus, la laissant bouche bée, clouée sur place. À quel moment avait-il commencé à aller si mal ? Il mentionna le fait qu’elle ait été à l’offensive et qu’elle restait muette à ce sujet.

— J’y suis allée parce que c’était mon combat, Raphaël. Toi, tu veux mener le combat de quelqu’un d’autre au risque d’y laisser ta peau. Pour lequel de tes principes un tel danger vaut-il la peine ?

Amber ignorait s’il avait entendu ses paroles. Il en débitait à une vitesse vertigineuse et elle n’était plus trop sûre de parfaitement le suivre. Il lui donnait trop d’éléments à digérer et lui même semblait vider son sac qui lui pesait depuis bien trop longtemps. Alors, la jeune femme croisa les bras sous sa poitrine et attendit qu’il finisse son plaidoyer.

Un long silence s’ensuivit et il fut forcé de constater qu’il avait été un peu loin dans ses propos. Les sourcils de son interlocutrice étaient froncés au possible. Elle détestait qu’on lève le ton contre elle, spécialement quand elle n’avait rien fait. Pour une fois qu’elle cherchait à protéger quelqu’un et pas à le provoquer… Il fallait que ça lui retombe dessus !

— Ne vas pas croire que j’ai plus de pouvoir face au Blood Circle, que tu en as toi-même ! Depuis des mois, j’entame des entraînements tous les week-ends pour ne pas ressentir ce que j’ai ressenti lors de mon enlèvement. Depuis des mois, j’essaie de reconstruire la confiance en moi qu’ils ont démolie en quelques heures seulement. Contre eux, il n’y a ni magie, ni baguette. Seulement nos têtes et nos poings.

Amber tourna rapidement son visage pour essayer de contrôler les larmes qui lui montaient elle aussi aux yeux et elle reprit, tout en calmant ses nerfs.

— Alors oui, j’ai été à l’offensive. J’ai combattu des moldus et sans doute aidé à détruire la paix entre nos deux mondes. Mais, tu sais quoi ? Je n’ai aucun regret. Chacun d’entre eux mérite de pourrir pour les douleurs et les chagrins qu’ils ont causés chez nous autres, les sorciers.

Sa voix s’était légèrement élevée, mais plus pour lui montrer son affirmation, sa détermination et l’adhésion à ses propos, plutôt que pour l’intimider.

— Mais je l’ai fait parce que c’est mon combat. Pas en me basant sur des ouïes-dires d’une inconnue débarquant de nul part. Et je pense que tu devrais mener une enquête sur quelque chose qui t’impacte personnellement, plutôt que de mener le combat de quelqu’un d’autre.

Il ne la comprendrait certainement pas, mais elle était assez remontée contre lui à cet instant. Elle n’aimait pas qu’on lui hurle dessus, surtout quand elle n’avait rien fait de spécial. Mais les deux semblaient à fleur de peau.

«Ah bah ouais, c’est insupportable. Des fois tu peux rater ton arrêt parce que tu as trop de gens et que tu n’as pas le temps de rejoindre la sortie.» Ça lui était arrivé une fois, ou deux, en heure de pointe. «Mais là ouais, je suis juste à côté de mon école. Enfin je dois être à 10 minutes à pieds quoi.» Mais bon, comme j’y vais pas, c’est encore moins contraignant. «Ça serait bien que je puisse avoir un appart juste pour moi… Mais financièrement c’est compliqué. Même si je suis pas à plaindre avec ma bourse d’étude d’étudiant étranger et l’argent que mes parents me filent, avoir un appart tout seul c’est chaud.» Mais ça serait cool quand même.

Amber avait remarqué ses grimaces quand il s’était baissé et lui avait demandé s’il avait mal quelque part. Le moldu expliqua assez honteusement qu’il se mettait au sport et qu’il en souffrait le martyr. Elle lui donna quelques conseils et tenta de le rassurer. Au début ça fait mal, mais avec l'habitude on devient invincible. Enfin, c’est comme ça qu’il avait interprété les choses.

«Advienne que pourra… »

Il se contenta de répéter cette dernière phrase, comme pour dire qu’il était d’accord avec elle et qu’il était prêt à faire l’expérience. Il ne comptait pas laisser tomber de sitôt. Ça prendrait du temps, mais il devait tenir bon. C’était un mal pour un bien, même si pour l’instant, il voyait pas trop où était le bien.

Il entra finalement dans le vif du sujet, à parler de Ashley, alias Miss M, des mangemorts et de Malefoy. Il apprit qu’Amber connaissait Malefoy et qu’elle savait clairement quel type de personne il était. Le moldu demanda, sans y croire, si elle voulait dire que c’était un gentil mangemort qui s’était laissé influencé… Mais le refus de répondre de la jeune femme ne laissait aucun doute.  Elle somma Raphaël de rester en dehors de ça, de rester loin de ce Malefoy et des Mangemorts.

Raphaël s’emporta. Il était hors de question qu’il reste en dehors de ça. Il n’était pas stupide au point de confronter Malefoy, ni de demander des informations sur cette affaire à n’importe qui. Il était prudent. Il avait conscience de sa propre faiblesse. Il ne voulait pas être une chose inutile. Il voulait faire bouger les choses et il avait conscience que cette affaire était peut-être quelque chose de capital à démystifier pour espérer établir la paix entre les deux mondes. Il balança au visage d’Amber le fait qu’elle soit allée à l’offensive et qu’elle évitait le sujet. Qu’en terme de danger elle était moins bien placée que lui pour lui reprocher quoi que ce soit. Amber lui répondit qu’elle y était allée parce que c’était son combat, que lui ne se battait pas pour lui. Il ignora la remarque d’Amber et haussa de plus en plus le ton, avant d’exploser. Il bloqua ses larmes du mieux qu’il pouvait mais c’était difficile. Trop d’émotions, trop de colère, trop de… douleur. Il savait qu’on attendait pas de lui d’être un homme fort, viril et protecteur. Lui même ne cherchait pas à l’être. Mais ça n’empêchait pas de souffrir d’être inutile. D’avoir l’impression de ne rien apporter. Il y avait enfin quelque chose où il pouvait se rendre utile et elle s’y opposait sous prétexte que c’était dangereux. C’était… C’était frustrant et infantilisant. Il n’était pas un enfant fragile qu’on devait protéger. Il était assez grand, mature et responsable pour prendre ses propres décisions.

Après un silence il finit par s’excuser de s’être emporté. Il n’osa pas regarder Amber. La dernière fois qu’il s’était disputé avec quelqu’un, c’était il y a un mois avec Samuel et ça avait brisé leur amitié. Est-ce qu’il venait de se mettre Amber à dos ? Est-ce qu’en janvier le problème venait vraiment de Samuel, ou est-ce qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas chez Raphaël ? La sorcière prit la parole. Raphaël s’attendait à ce qu’elle crie à son tour mais, bien qu'elle parla fortement elle ne s'exprimait pas de manière virulente comme il l'avait fait tantôt. Elle s’entraînait elle aussi, tous les week-end, depuis des mois. Elle affirmait que la magie était inutile contre le Blood Circle. Elle fit une légèrement pause. Raph avait des choses à répondre mais il n’était pas en position de la couper, pas après ce qu’il venait de déballer. Il préférait faire profil bas. Elle parla de l’offensive qui avait eu lieu plus tôt dans le mois. Elle parla de son absence de regret, même si elle avait contribué à la destruction de la paix entre les deux mondes, que les membres du Blood Circle méritaient de tous crever pour ce qu’ils avaient fait. Elle conclue sur le fait que ses motivations étaient personnelles, que c’était son combat à elle, basé sur des faits avérés et non sur des rumeurs et elle conseilla à Raphaël de faire de même.

«Et si je te disais que ça m’impactait personnellement ? Si je te disais que j’avais des raisons personnelles de me méfier des Mangemorts ?»

Raphaël en avait trop dit, ou pas assez. Est-ce qu’il devait vraiment parler de ça avec elle ? Qu’est-ce qui se passerait si elle apprenait qu’il avait été le petit jouet d’un mangemort ? Déjà, est-ce qu’elle le croirait ou est-ce qu’elle penserait que c’est un argument bidon pour qu’elle le laisse tranquille ? Il n’en avait jamais parlé à personne, pas même à Leah. C’était son secret, un secret lourd à porter parce que le divulguer pourrait totalement compromettre l’alliance entre Mangemort et Ordre Du Phénix. Raphaël s’adossa contre un arbre, il n’avait plus envie de marcher, mais ses jambes avaient du mal à le maintenir debout. Il était pris soudainement d’une immense fatigue, mais ses courbatures l’empêchait de s’asseoir par terre, ou sur un banc, sans avoir trop mal. S’adosser à quelque chose suffirait à lui faire garder l’équilibre.

«Ce que je vais te dire… Personne ne le sait. Ni Nymphéa, ni ma meilleure amie, ni ma famille. Surtout pas ma famille en fait, ils ne savent absolument rien de mes activités à Londres. Il pensent que je fais tranquillement mes études… S’ils savaient… Bref… Personne, tu es la première.»

Comment introduire ça ? Préserver l’Alliance n’était pas sa seule motivation pour garder ça secret… C’était surtout que ce n’était pas un sujet abordable facilement.

«Il faut que tu saches que… Rejoindre l’Ordre du Phénix et me ranger dans le camp des sorciers… Non…  Dans le camp de la Paix. Ben c’était pas une évidence. J’ai jamais été prédestiné à ça. Je n’ai pas d’amis sorciers depuis ma tendre enfance, je ne suis pas issus d’une famille de sorciers. Enfin bon, je vais pas te faire un cours sur ce que c’est de se faire entraîner par sa famille pour une Cause, tu es bien mieux placée que pour pour traiter du sujet.»

Et pour cause… Les parents de Raphaël s'intéressait à cette histoire de sorcier en Angleterre uniquement parce que leur fils y faisait ses études. Même si… Combien de temps avant que le Blood Circle ne puisse se développer en dehors de l’Angleterre ?

«Quand on s’est rencontré sur la terrasse de ce café. J’en avais rien à cirer des sorciers. Vous viviez votre vie, je vivais la mienne. Tout ce que je savais de vous c’était les messages du gouvernements, que je zaapais parce que je m’en contre-balançais. J’étais d’avis que la misère, la pauvreté et l’injustice existaient, mais que c’était pas mon combat, que je ne pouvais me permettre de me lamenter sur le sort de tout le monde.»

Et depuis qu’il avait choisi son camp, il n’avait plus du tout de temps pour lui. Est-ce qu’au final le Raphaël ignorant, égoïste et menfoutiste de cette époque n’avait-il pas raison ?

«Ce qui m’a fait réagir… C’est quand j’ai vu un enfant utiliser de la magie. Enfin… j’en sais trop rien, maintenant que je connais un peu mieux la magie. Mais ce qui compte c’est ce que je pensais avoir vu un enfant le faire. Un boutchou de 6-7 ans à tout casser… Je devais faire quoi ? Je devais dénoncer un môme ? Et après ? Il allait lui arriver quoi ? Un gosse putain. Un adulte je me serais posé des questions aussi, mais avec tout ce qu’on nous disait à propos des sorciers… Je sais pas… Mais un putain de môme. le truc il sait même pas ce qu’il fait. Il est pas gentil, ni méchant, c’est un enfant. Ouais, je tourne un peu autour du pot, tu dois pas trop voir où je veux en venir, mais je dois contextualiser le truc. Mais j'y viens t'en fais pas.»

Raphaël soupira… Il n’y avait pas que cet évènement qui l’avait poussé à réfléchir. Sa toute première rencontre avec Soledad, alors que le moldu la pensait simplement moldue, avait poussé le jeune homme à commencer à se poser les bonnes questions. Est-ce que le Blood Circle n’allait pas trop loin ? Qu’était la magie ? Il était vraiment mal à cette période. Il ne savait pas à qui parler de ça, et finalement il avait accepté de se confier, très partiellement, à Leah et la meilleure amie de cette dernière, Deirdre. Les deux femmes avaient su aider Raph à faire un choix sur ce qu’il devait faire.

«Du coup… Quand on s’est revu, pour le tournage… J’étais déjà un peu plus dans l’optique de… je sais pas, de vouloir faire quelque chose. Et le scénario du film collait pas mal avec un message à faire passer, en modifiant les passages. Dire que ce truc était simplement un projet que je voulais faire à la va-vite et qu’au final c’est un peu la clé de ce que je suis maintenant.»

Raphaël continua de parler. Il était sérieux. Peut-être beaucoup trop sérieux pour le Raphaël Millet qu’on avait l’habitude de côtoyer.

«Je ne sais pas si tu as reparlé avec elle mais… C’est Elise qui est venue me chercher quand tu as été capturée. Eu début, elle ne savait pas où tu étais, et tu lui avais parlé de ce moldu que tu avais croisé. Elle était inquiète et elle espérait que tu sois chez moi.»

Le moldu resta silencieux un moment en s’interrogeant. Qu’est ce que Elise pouvait bien imaginer de ce qu’Amber aurait pu faire chez lui ? Il reprit.

«Peu importe. Elle est revenue ensuite me prévenir de ce qui t’étais arrivé - Nymphéa m’avait également prévenu par message au même moment. Et je n’ai pas hésité une seconde pour venir. J’ai compris qui vous étiez toutes les trois.»

Le français frissonna. À cause du froid déjà, parce que ça faisait un moment qu’ils étaient immobiles dehors à discuter. Mais aussi d’émotion parce que ça lui rappelait des souvenirs compliqués. Et surtout pour ce qu’il allait maintenant raconter…

«Pour le reste, tu connais les grandes lignes. Voilà pour le contexte. Maintenant… Si je te disais que tout ça, ça n’aurait pu jamais se produire ? Si je te disais que juste avant qu’on ne se rencontre, j’avais déjà rencontré un sorcier, probablement un mangemort, qui m’avait fait des choses affreuses mais que je n’en avais aucun souvenir. Que la seule trace de cette rencontre soit un enregistrement sur mon téléphone que j’ai découvert à Noël ? Tu sais ce qu’il se serait passé si ma mémoire n’avait pas été altérée ou si j’avais entendu cet enregistrement avant de savoir qu’il y avait des sorciers et des sorcières géniaux ? Parce que moi non… En toute franchise, je n’en ai aucune idée… Et je pense très sincèrement que ce n’est pas sûr du tout que le Raphaël que tu as devant toi aurait existé.»

Il osa enfin regarder directement Amber à nouveau. Après tout ce temps à regarder ses pieds, ou détourner le regard, il la regardait elle. Il guetta sa réaction. Est-ce qu'elle allait le détester pour ce qu'il venait de révéler ?

«C’est pas seulement le combat le combat que je mène pour une random qui sort de nulle part. C’est la voie que j’ai choisie. J’ai besoin de savoir ce qui lui est arrivé, ce qu’il m’est arrivé. Je ne suis pas pour ou contre les sorcier ni contre ou pour les moldus. Je suis contre les criminels qui s’en prennent à des innocents. La guerre est la guerre, que quelqu’un tue un soldat ennemi sur un champ de bataille, ce n’est pas un crime. Il n’y a pas d’éthique là dedans. C’est l’un ou l’autre. Par contre, s’en prendre à des innocents, à des civils. Ça s’est un crime. Provoquer cette guerre pour anéantir l’autre pour l’unique raison qu’il est différent. Ça s’est un crime. Ce n’est pas parce que les Mangemorts sont différents que je les crains et que je les vois comme des potentiels ennemis. C’est parce que je sais que établir un chemin vers la paix avec eux sera une tâche difficile, voire impossible. Et que je sais que je ne suis que du gibier pour eux.»

Et encore… Raphaël ne lui avait rien dit des détails de sa “discussion” avec Tobias. Ni de ce qu’il avait ressenti quand des mangemorts étaient venus en renfort lors de sa mission avec lui. Du regard de cette sorcière mangemort…

«Tu veux écouter l’enregistrement ?»

“Ça te dirait de m’entendre hurler ? Pleurer ? Supplier ?  De me savoir tellement désespéré que j’en était réduit à menacer et insulter mon bourreau dans l’espoir qu’il m'achève ?”

Amber ne connaissait pas tellement les difficultés de Raphaël. Les moyens de déplacements sorciers évitaient ce type de contraintes. Heureusement d’ailleurs, parce qu’elle n’était pas certaine de pouvoir supporter des embouteillages ou la foule. Rien que l’idée que quelqu’un la colle, avec une transpiration abominable, lui donnait envie de vomir. Elle n’aimait pas toucher des inconnus et encore moins respirer le même oxygène qu’eux. Quelque part, elle comprenait l’agacement que pouvait ressentir Raphaël. Si elle avait été un peu vilaine sur les bords, elle lui aurait peut-être décrit comment les sorciers se déplaçaient, mais elle ne voulait pas le dégoûter davantage. Tout le monde aimerait avoir du transplanage (sauf pour les premiers essais) ou de la poudre de cheminette dans sa vie. Elle se contenta donc d’écouter ce qu’il avait à dire et d’acquiescer de temps à autre, pour montrer qu’elle était toujours attentive à ce qu’il lui disait.

Finalement, ils dérivèrent sur le sport et Amber ne put s’empêcher de sourire. Elle connaissait très bien ce qu’il pouvait vivre, contrairement à l’histoire des transports en commun. Elle était passée par les mêmes étapes que lui et elle pouvait confirmer que ce n’était pas la joie. Elle avait détesté sentir les courbatures dans tout son corps. Elle peinait à s’asseoir et, en tout honnêteté, enjamber les bancs de la Grande Salle pour s’asseoir n’était pas une partie de plaisir. Ses cuisses se rappelaient encore de ce moment douloureux… Et elle ne prenait même pas en compte les escaliers de Poudlard qui étaient tout bonnement interminables… Enfin, bien plus qu’ils ne l’étaient en temps normal.

— À l’occasion, on pourra peut-être s’entraîner ensemble !

Elle sourit et ne parvint pas à rester sérieuse sur sa proposition. Un rire résonna dans la forêt et elle fut obligée de partager la vision qu’elle venait d’avoir à son ami. Elle voyait très bien le genre d’entraînement qu’ils feraient à deux et ce n’était pas glorieux. Aucun d’entre eux ne pourrait rattraper l’autre. Si un était fatigué, l’autre le suivrait et s’allongerait à même le sol. Clairement pas une bonne idée !

— Une belle brochette ! Mais on pourrait allier les jeux-vidéos et le sport pour ne pas nous décourager. Qu’en penses-tu ? J’ai entendu parler que les moldus utilisaient des casques qui diffusaient des images ou des machines pour danser.

Bon… Amber n’avait pas le vocabulaire pour parler des casques de réalité virtuel et des tapis de danse dans les salles d‘arcade. Ses connaissances en jeux-vidéos et en nouvelles technologies égalisaient celles qu’elle avait en sport et ce n’était pas glorieux. Il fallait dire qu’elle n’avait jamais pris le temps de s’intéresser à « l’autre monde », en particulier parce qu’elle avait bien trop à apprendre du sien. Pourtant, il était riche en idées et en nouveautés. Elle était certaine qu’elle serait surprise de découvrir certaines choses dont elle ignorait l’existence. Elle devrait sérieusement prendre le temps de s’y pencher quand le temps et la motivation la prendraient d’assaut.

Ils auraient très bien pu rester sur une conversation aussi légère que celle-ci, mais le destin en avait décidé autrement et les deux amis s’étaient aventurés sur un terrain fâcheux. Amber ne se prenait pas souvent la tête, tout simplement parce qu’elle n’avait pas beaucoup d’amis, mais la façon dont Raphaël s’emporta l’impactait profondément. Tout ce qu’elle voulait, c’était son bien. Il n’y avait rien de mal dans ses propos. Elle lui demandait simplement de rester à distance d’un sorcier qui pourrait très bien le tuer d’un simple mouvement de poignet. Où était le mal ? Pour une fois qu’elle faisait quelque chose de bien et qu’elle ne pensait pas à sa propre personne.

Elle s’emporta à son tour, principalement quand il parla de l’offensive. Elle détestait se remémorer cet événement auquel elle n’aurait jamais dû assister. Au moins son destin n’aurait pas été scellé à jamais. Elle était terrorisée de l’avenir depuis ce qu’elle avait fait. Elle vivait constamment dans la peur que son père apprenne qu’elle avait tué son premier moldu. Et s’il décidait d’accélérer sa formation ? Elle n’était pas sûre de pouvoir torturer, manipuler et tuer sur commande. Elle avait eu des raisons personnelles de s’en prendre à lui. Il était membre du Blood Circle, il avait tué son peuple. Il faisait peut-être même partie de ceux qui l’avaient enlevé en novembre dernier. Il était hors de question pour elle qu’elle vive avec ce poids sur sa conscience et c’était cet instinct primitif qui avait guidé sa baguette ce jour-là. Amber ignorait encore ce qu’elle devait en penser : devait-elle s’en vouloir ou au contraire assumer pleinement la nature de son acte ?

Il ne faisait aucun doute que Raphaël ne voudrait plus être son ami si elle lui avouait la nature de ses actes. Elle était peut-être égoïste, mais elle préféra rester silencieuse sur ce sujet, avant que d’autres malheurs lui tombent dessus. Elle en avait déjà eu plein la tête. Elle s’arrêterait là pour le moment. Quelque part, elle avait envie de lui parler, de son mariage arrangé, de sa formation auprès de William, mais elle s’en trouva impuissante. Tout particulièrement parce qu’il s’emporta avant de retrouver un tant soit peu de calme. Elle ne comprenait pas totalement les sentiments qui animaient Raphaël en cet instant, mais il ne tarda pas à éclairer sa lanterne en l’informant des actes atroce qu’il avait vécu avec un sorcier.

Il disait avoir une raison valide pour s’impliquer dans cette mission et Amber ne le crut pas. Avant qu’il ne lui raconte son histoire… Son interlocuteur parla de l’Ordre, de sa famille et elle ne comprit pas où il voulait en venir, jusqu’à ce qu’il fasse mention de leur rencontre et de ce qui avait suivi. Il parla d’un enfant, un sorcier qu’il avait croisé, et elle hocha lentement la tête quand il lui expliqua ce qu’il pensait de la magie et de l’âge de ce dernier. Elle le comprenait. C’était un môme et à cet âge-là, ce serait totalement odieux de la part du Blood Circle de s’en prendre à lui. Raphaël ne faisait pas de jactance, il ne cherchait pas à pointer du doigt qui que ce soit. À cet instant, il racontait son histoire et tout ce qu’il avait ressenti et vécu. Il ne mélangeait pas ses préjugés et sa haine à son récit. Il racontait simplement ce qu’il avait vu et ce qu’il avait subi.

— C’est vrai. J’ai parlé de toi à Elise, le jour de notre rentrée à Poudlard. Mais je n’imaginais pas qu’elle serait venue te voir lors de ma disparition. À vrai dire… On a très peu échangé à ce sujet. J’ai très peu échangé avec tout le monde.

Amber se remémora un instant tout cette histoire et un frisson lui parcourut l’échine. Elle ne voulait plus jamais vivre un tel épisode de sa vie. Cela avait été une épreuve abominable et traumatisante. Dans cette cellule, elle s’était sentie plus seule que jamais… Mais là n’était pas la question. Raphaël lui révéla avoir rencontré un mangemort dont il n’avait aucun souvenir. Soudainement, son sang se figea dans ses veines. Il n’avait pas tort. S’il n’avait pas fait la connaissance de personnes aussi sympathiques que Nymphéa, il aurait pu passer dans l’autre camp et il aurait également pu être celui qu’elle aurait tué lors de l’offensive.

Il avait tout un tas de raisons de haïr les sorciers, mais il n’en avait rien fait et fort heureusement d’ailleurs. Raphaël en valait la peine. Mais cela lui fit se poser une autre question : et si les membres du Blood Circle n’avaient pas eu de main tendue comme lui ? S’ils étaient tous des Raphaël en quête de réponse, de vengeance ou d’un lieu où ils se sentent en sécurité ? Personne ne naît fatalement mauvais. Les événements de la vie façonnent la personne que l’on devient. Il ne faisait aucun doute que les rencontres fortuites influençaient tout ça, tout ce qu’on devenait.

Alors, Amber acquiesça quand il lui proposa d’écouter son enregistrement. Elle savait qu’il se sentirait terriblement mal à l’aise à l’idée que l’on puisse entendre cette rencontre, mais elle avait besoin de savoir, de comprendre tout ce qu’il avait pu endurer. Elle attendit donc qu’il sorte son téléphone et s’ensuivit un son qui lui glaça le sang.

Raphaël semblait si désespéré sur cet audio et cela lui déchira littéralement le cœur. Elle l’entendait répondre à des questions, d’une voix tremblotante, qui exprimaient tout l’effroi qu’il avait en cet instant. Son regard empli d’interrogation s’affaissa et elle ressentit un énorme chagrin pour son ami qui avait dû vivre un événement traumatisant auquel il n’aurait jamais de réponses. Elle s’apprêta à lui demander de couper son téléphone, pour reprendre la conversation et éviter le malaise qui s’était installé depuis de longues secondes maintenant, mais il avait suffi d’un nom. William. Un seul nom pour que la demoiselle perde tous ses moyens. La Towsen lui prit littéralement le téléphone des mains pour le plaquer à ses oreilles, mettant le son au maximum pour tenter d’un peu mieux percevoir la voir de son interlocuteur. Les murmures étaient bien trop bas pour qu’elle puisse obtenir une quelconque information, mais son cerveau tentait déjà de faire la liste du nombre de William, mage noir, à Londres. Elle n’en connaissait que deux et elle espérait terriblement que ce ne soit pas celui qu’elle avait à l’esprit.

D’un geste vif et rapide, elle coupa cet enregistrement, fourra le téléphone entre les mains de Raphaël et recula de quelques pas. Cela ne pouvait pas être le William qu’elle connaissait. Il avait une symbolique si importante à ses yeux. Il était son mentor, celui qui la protégeait de sa famille, celui qui lui avait permis de repousser ses limites. Il ne pouvait pas s’en prendre à un moldu au hasard, seulement pour obtenir des informations. Elle le voyait comme quelqu’un de réfléchi et de non-impulsif.

William… Elle devrait avoir une conversation avec lui, mais elle se retrouva incapable de dire quoi que ce soit à Raphaël. Les secondes de silence furent longues et Amber mit un moment à se mettre un bon coup de pied aux derrières, encore à demi-sonnée par cet audio.

— Je… Tu n’aurais jamais dû vivre ça. Je suis désolé pour toi.

Elle fit quelques pas dans la direction opposée à Raphaël et se passa les mains sur le visage. Elle n’était pas nécessairement d’accord avec lui, malgré les preuves fournies par ce téléphone. Certes, il aurait pu plongé du côté obscur et il ne l’avait pas fait, mais tout le monde n’avait pas sa force mentale, ni sa personnalité. Après quelques secondes de réflexion, elle se tourna dans sa direction et reprit la parole.

— Je sais que tu es pour la paix entre nos mondes. Mais il y a des personnes que l’on ne peut pas sauver, Raphaël. Et il y en a qui ne mérite pas de l’être.

Amber souffla doucement, laissant son souffle chaud caresser ses fines lèvres rosées. Elle ne disait pas ça sans preuve à l’appui. Nerveusement, elle se gratta le bras et se dandina d’une jambe à l’autre.

— Et je pense que je fais partie de ces personnes.

Voyant le visage de son ami, elle se sentit obligée d’en dire davantage. Elle lui devait bien ça. Il vivait dans un monde où il imaginait encore que la paix était possible, mais parfois le destin rattrapait les individus, qu’il le veuille ou non. Amber était persuadée qu’elle ne rejoindrait pas les mangemorts, et à présent, elle était prise dans un mariage arrangé et elle avait tué un moldu de sang-froid. Elle pouvait bien se dire ce qu’elle voulait pour se déculpabiliser, elle était comme son père et comme son frère. Elle deviendrait comme eux et elle était vouée à devenir une mangemort. Peut-être repoussait-elle trop cette part sombre en elle, mais qu’elle n’était faite que pour s’agrandir de jour en jour ? Peut-être était-elle vouée à ce destin, telle une fatalité ? Encore un léger soupir et elle s’autorisa à balancer la bombe qui allait mettre fin à son amitié avec Raphaël.

— J’ai tué un membre du Blood Cicle, au cours de l’offensive.

Amber lui proposa de s’entraîner tous les deux ensemble, à l’occasion.

«Ouais euh… J’suis pas trop convaincu, je viens juste de commencer… J’pense que je vais juste être un boulet.»

Ils rirent tous les deux. Amber en rajouta une couche en affirmant que les deux feignasses qu’ils étaient seraient capables de s’encourager à procrastiner. Elle fit ensuite référence aux casques de Réalité Virtuelle.

«Tu parles de casques VR ? J’crois pas que ça soit terrible pour faire du sport. Mais après oui tu as raisons y’a pas mal d’autres jeux qui permettent de faire du sport.»

Raphaël pensait aux consoles où il y avait besoin de reproduire des mouvements que ça soit pour la danse ou pour jouer au tennis ou au golf. Il y avait aussi des jeux d’arcades, les plus connus étaient les courses de moto ou de voiture, avec une imitation de levier de vitesse, mais il y avait aussi les courses de vélo où le véhicule était très réaliste ; sauf que contrairement à un vrai VTT, il n’y avait pas besoin de se soucier du dérailleur qui pouvait parfois ne faire que des siennes.

Le reste de la conversation fut beaucoup plus lourd. Le moldu avait besoin d’informations que Amber pouvait lui donner, mais cette dernière cherchait à le protéger. Frustré qu’on le materne, il s’emporta en mettant sur le tapis le fait que lui ne s’était pas opposé à ce que son amie se mettent en danger lors de l’attaque contre le Blood Circle. Il savait que c’était probablement un sujet épineux et il regretta rapidement ses paroles. La sorcière ne se laissa pas marcher sur les pieds, et répliqua que elle, elle menait ses propres combats, ce qui n’était pas le cas de Raph qui se battait pour les dires d’une inconnue dont il ne savait absolument rien. D’un point de vue extérieur, Amber avait raison… Personne ne savait ce qui lui était arrivé. Il n'avait parlé très brièvement à Soledad du fameux enregistrement, pour qu’elle se laisse plus facilement convaincre de l’aider à trouver un moyen de se protéger du sortilège de contrôle mental, mais la voyante ne connaissait pas enocre les détails de ce qui était dessus. Jusqu’à présent, elle avait respecté le choix du moldu de ne pas vouloir s’étaler sur le sujet, mais il se doutait bien que tôt ou tard, il devrait parler carte sur table avec la cartomancienne.

Raphaël avait décidé de tout raconter à Amber. Absolument tout ce qu’il savait à propos de la magie. La seule chose qu’il s’était abstenu, c’était de parler d’Artémis. Mais pour le reste… Ce qu’il avait vécu, ses ressentis, ses questions, ses doutes. Il déballa tout. Du début jusqu’à son intégration dans l’Ordre du Phénix. Lorsqu’il parla d’Elise, Amber prit la parole.

«C’est pas forcément le genre de trucs dont on se vante… En général, les gens ont honte d’avoir été faible et sans défense. Même si ce n’est pas leur faute.»

Même si ce n’était pas leur faute…  Les victimes se sentaient souvent responsables de leur sort. Et si elles étaient plus fortes ? Et si ils n’avaient pas été là ? Et s’il était passé à un autre moment ?  Raphaël entra enfin finalement dans vif du sujet, de pourquoi il avait raconté toute sa vie concernant le monde sorcier, afin de contextualiser. Il voulait que Amber sache ce qui le poussait à se méfier des Mangemorts, tout en lui montrant qu’il savait faire la part des choses entre les différents sorciers. Il voulait qu’elle sache que ce que Raph avait vécu, d’autres auraient pu le vivre aussi, d’autres bien moins chanceux que lui, qui n’auraient pas eu l’occasion de croiser le chemins de sorciers formidables pour compenser une telle révélation. Raphaël avait rejoint l’Ordre du Phénix dans le but d’aider à préserver, ou plutôt de restaurer, la paix entre sorcier et moldu. Il n’avait pas choisi le camp des sorciers, les moldus n’étaient pas ses ennemis, seul le Blood Circle l’était. Quant aux sorciers, les mangemorts n’étaient pas ses alliés, ils se toléraient juste les uns les autres mais Raphaël savait que tôt ou tard, cette trêve se briserait.

Il proposa à Amber d’écouter l’enregistrement. Il espérait qu’elle refuse, qu’elle se contente de le croire sur parole, mais elle acquiesça. Putain. Raphaël sorti son téléphone, et lança l’écoute. Au début il ne se passait pas grand chose. Il accéléra de quelques minutes. On pouvait entendre Raphaël répondre à quelqu’un. On pouvait entendre le murmure d'une autre voix, comme un bruit incompréhensible, inaudible, elle est là mais on ne peut pas la comprendre, c'est comme un bruit parasite. Le geek se présentait, parlait de ses études puis de la magie. Il tendit son téléphone à Amber, décidant de la laisser juger par elle même. Un bruit sec se fit entendre dans l'enregistrement, suivit peu de temps après par un raclement de gorge et ce qui ressemblait à un crachat. Un autre bruit sec qu'on pouvait distinctement interpréter comme une claque. Après quelques échanges, Raphaël parlait du Blood Circle et du gouvernement qui coopérait avec, seulement des banalités qu’il avait apprises dans les journaux, des choses de notoriété publique. Sa voix était tremblante et il commençait à supplier la personne de le laisser partir, juste après on l’entendit hurler le nom du premier ministre et de sa femme. Dans l’enregistrement, Raphaël réalisa qu’il avait affaire à quelqu’un qui utilisait la magie, et qu’il était dans la merde… Il supplia ensuite l’homme d’abréger ses souffrances, puis lui demanda son nom. C’était frustrant, pas une seule fois on ne pouvait entendre la réponse de l’homme dans l’enregistrement. Il vit que Amber cherchait à monter le son. Il se contenta de lui murmurer d’une voix un peu brisée.

«C’est déjà à fond… »

La suite était presque ridicule quand on connaissait Raphaël. On sentait bien tout le désespoir qui pouvait l’habiter à ce moment. Ce désespoir qui l’avait poussé à menacer, insulter et provoquer son tortionnaire. «Si tu me tues pas, je te vais te pourchasser, je vais te trouver et je vais te tuer, je vais te tuer jusqu’à ce que tu sois mort. Je veux juste te prévenir… “William”. Je n’ai aucun contact dans le cercle, pour le moment, mais les choses changeront un jour, et ce jour là je serai là pour t'faire la peau.» Le véritable Raphaël eut un rire amer de s’entendre parler ainsi… Amber coupa l’enregistrement et tendit le téléphone dans les mains de Raphaël. Ce dernier la défia.

«Bah alors ? Je croyais que tu voulais écouter ?» Il se reprit en soupirant. «De toutes façons il n’y a rien de plus à écouter. Juste après on peut m’entendre parler docilement à ce type puis plus rien d’intéressant. Je n’ai aucun souvenir de cette discussion, la date correspond à un soir où j’ai été retrouvé saoul sur la voie publique. Je bois déjà pas souvent, mais depuis… Bah encore moins haha…  Je me suis retrouvé en cellule de dégrisement avec une amende à payer… Un écran de téléphone à faire réparer, et un énorme black-out… Ce n’est que récemment que je suis tombé sur ça. Je pense que ce “William” devait être un mangemort et qu’il m’a fait subir le sort impardonnable qui contrôle les gens. Je peux pas passer de la menace à la soumission comme ça, sans aucune transition. À mon avis, le nom qu'il a donné devait être un pseudonyme. »

tandis qu’il parlait, Amber s’éloignait de lui, elle lui tournait le dos en se passant les mains sur le visage. Elle pleurait ? Elle se retourna finalement vers lui pour lui dire qu’il y a des gens qu’on ne pouvait pas sauver et d’ajouter nerveusement qu’elle pensait en faire partie.

«Ne raconte pas n’importe quoi Amber. Ouais, il y a des gens qui ne méritent pas d’avoir davantage de chance que ce que l’on leur a déjà accordé. Mais ça ne veut pas dire que… »

Amber soupira avant de le couper en lui disant qu’elle avait tué un membre du Blood Circle. Raphaël la regarda, interdit. Il attendait la chute. Il devait bien y avoit une suite à cette information. Mais visiblement non.

«Et… ? Je ne comprends pas. J’veux dire… Comme on dit en France, t’es pas venue pour beurrer les tartines. Et je préfère largement que ce type soit mort plutôt que toi. Tu sais, pendant notre mission, ton frère aussi a tué des membres du Blood Circle. De sang froid. Alors même si c’est pas la méthode que j’aurais choisie par défaut… C’était eux ou nous. Tuer son ennemi sur le champ de bataille c’est… Bah c’est le concept d’une guerre… Si chaque bataille pouvait se régler par une partie d’échec sur un jeu de plateau, ou un match de quidditch, le monde se porterait bien mieux, c’est clair. Mais ça n’arrivera jamais. Ça ne fait pas de toi un monstre. Le Blood Circle t’a mis en cage, ils t’ont… Bon tu sais mieux que moi ce qu’ils t’ont fait… Tu penses vraiment qu’à toi place j’aurais pas la haine contre ces types ? Même sans être à ta place j’ai déjà la haine contre eux. Je suis juste d’avis que… » Il était d’avis que s’attaquer au Blood Circle, c’était leur donner l’occasion de montrer au monde que les sorciers étaient un danger, et de leur fournir davantage de moldus prêts à se battre contre les sorciers «Peu importe mon avis. Ce que le Blood Circle fait est horrible. Cet homme avait probablement tué plus de Sorcier que tu ne tueras jamais de moldu. Peut-être pas tu me diras, on ne sait pas. Le jour où tu seras dans le monde moldu, que tu auras envie de massacrer tous ces civils juste parce qu’ils ne sont pas des sorciers, que tu voudras lancer un impardonnable sur quelqu’un pour le forcer à faire des mauvaises choses, ce jour là tu pourras venir me voir et me dire. “Raphaël, je ne mérite pas d’être sauvée”. Mais pour l’heure, j’ai entièrement confiance en toi. Tu as juste moins eu de chance que moi dans tes rencontres… »

En tout cas, Raphaël comprenait mieux pourquoi son amie évitait soigneusement le sujet de l’attaque contre la base du Blood Circle. Il resta planté là face à elle, ne sachant pas s'il devait la prendre dans ses bras pour la consoler, lui tendre les bras pour lui laisser le choix de s'y blottir. Il ne savait pas trop quoi faire, surtout qu'il savait que Amber était plutôt réservée. Alors il se contenta de demander.

«Et sinon… Physiquement, tu n’as pas été blessée là bas ? Tobias va bien ?»

Amber rit doucement à sa remarque concernant le sport. Il fallait dire que lorsqu’elle avait commencé ses entraînements, elle avait autant de force qu’un coléoptère. A présent, elle ne pouvait pas se vanter d’avoir la force d’une boxeuse, mais elle était déjà un peu moins mauvaise. Elle pouvait espérer faire quelques prises pour déstabiliser ses adversaires et mettre quelques coups bien placés s’il n’était pas très doué en combat. Ce n’était pas la folie, mais elle en était plutôt satisfaite.

— Eh bien, Millet, tu as peur qu’une fille te mette par terre ?

Elle lui offrit un petit clin d’oeil, après son léger air provocateur, pour lui faire comprendre qu’elle rigolait. Jamais elle ne s’aventurerait dans un concours de ce type avec Raphaël. Il était son ami et elle n’avait pas envie qu’un de leur ego en prenne un coup. En vérité… Elle ne voulait même pas le frapper. Ce serait gênant qu’il voit Nymphéa avec un énorme coquard qu’elle lui aurait fait avec son propre poing. Amber n’avait pas envie de devoir se justifier ensuite sur la raison de cet hématome. Même si la situation pouvait être inversée et là elle serait obligée de dire qu’un homme l’a frappé au visage… Pas très glamour, ni pour elle, ni pour son ami. Ce n’était vraisemblablement pas une bonne idée.

Finalement, la conversation dévia vers les casques VR, disait-il. Quelle étrange appelation, mais qui prenait tout son sens une fois que l’on savait ce que chaque lettre signifiait. Mais là n’était pas le plus intéressant. Raphaël lui fit mention de son ami Elise, après son rapide emportement. Elle n’aurait jamais cru, en rencontrant Raphaël, qu’il prendrait une telle place dans son existence. Après tout, un jeune étudiant avec sa caméra, filmant des court-métrages, avec la plus grande insouciance… Qui aurait pu penser qu’il finirait par prêter main forte à l’Ordre du Phénix ? Après tout ce qu’il avait vécu avec des sorciers, cela lui paraissait invraisemblable. Elle l’aurait imaginé tomber en pâmoison à la première des difficultés, mais ce n’était pas le cas. Il s’était toujours battu pour ce qui lui semblait être juste et elle le saluait grandement pour ça. Il avait une force mentale qu’elle aurait avoir envers son paternel.

— Tu as sans doute raison, marmonna-t-elle entre ses lèvres.

Non. Il avait totalement raison. Elle avait terriblement honte d’avoir été sans défense face à des moldus qui se pensaient plus forts qu’eux. Pendant des années, elle avait tenté de s’éloigner de la haine de sa famille envers les non-sorciers, mais elle ne parvenait plus à le faire… Le Blood Circle nourrissait une colère démesurée en elle et elle ne parviendrait bientôt plus à la maîtriser. Elle voulait les voir tomber, alors qu’elle aurait aimé la paix, il y a un an de cela.

Raphaël, quant à lui, n’était pas tombé dans les filets du clan opposé. Il aurait pu rejoindre le Blood Circle à n’importe quel moment au vu de ce qu’il avait vécu. Mais il ne l’avait pas fait. Il n’avait pas tenu son aventure comme acquis, alors qu’Amber ne parvenait pas à faire de même. Sa haine grandissait de jour en jour. Elle ne parvenait plus à dormir correctement et elle savait que cela perdurerait jusqu’à ce qu’elle puisse en abattre d’autre. Cette pensée était terrible et elle ne voulait pas la partager à son ami, qui ne la regarderait plus jamais de la même façon.

Il lui fit alors écouter son enregistrement, qui lui glaça littéralement le sang. Elle avait pu très facilement distinguer le bruit d’une gifle et elle eut terriblement de peine pour ce qui suivit. Raphaël semblait à la fois désespéré et à bout. Il ne manqua pas de faire entendre sa voix, d’une tonalité qui ne lui ressemblait pas. Il avait la haine contre son interlocuteur et elle le comprenait. En vérité, elle comprenait également ce que son frère avait pu ressentir lorsqu’il a appris que leur père avait effacé quelques uns de ses souvenirs. Amber n’avait pas eu le temps de lui en parler, mais elle pouvait un peu mieux les comprendre, tous les deux. Ce n’était pas quelque chose qu’elle voulait vivre et la jeune femme estimait en avoir d’ailleurs vu bien assez, en même pas une année. Elle était fatiguée et voulait juste mettre son esprit sur pause et se centrer sur les trucs normaux d’étudiants : les examens et les devoirs à rendre…

Quand elle lui renvoya littéralement le téléphone entre les mains, il ne manqua pas de lui lancer une pique qu’elle prit extrêmement mal. Bien sûr qu’elle voulait écouter son enregistrement. Elle voulait mieux comprendre ce qu’il avait pu endurer, mais également récolter des informations pouvant être précieuses pour la suite. Cela n’avait d’ailleurs pas manqué et si ce William était bien celui qu’elle connaissait, les choses allaient se compliquer pour la suite.

La jeune femme entama les cent pas, incapable de penser à autre chose qu’à l’immense déception qu’elle ressentait au fond d’elle. Si cette personne s’avouait réellement être William Ombrage, elle ne savait pas si elle aurait la force de poursuivre les entraînements avec lui après ça. Comment lui faire confiance pour subir des Doloris ou Impérium quand il les utilisait sans aucune raison sur d’autres personnes, moldus ou non ? Elle l’ignorait… Raphaël ne pouvait comprendre son ressenti actuel et elle ne préféra même pas lui en parler. A quoi bon ? Qu’est-ce que celui lui apporterait de savoir qu’elle connaissait son assaillant ? Absolument rien.

Amber pensait qu’en lui avouant avoir tué quelqu’un, Raphaël prendrait ses distances, mais ce n’était pas le cas. Il se lança dans un long discours visant à lui démontrer par A plus B qu’elle n’était pas un cas désespéré, qu’elle avait juste pris une bonne décision. Ce n’était pas le cas. Elle n’y croyait pas une seconde et elle comprenait pas pourquoi tout le monde banalisait son acte. On la félicitait presque, alors qu’elle aurait préféré qu’on la sermonne quelque part. Amber ne comprenait pas son absence de culpabilité et voir que les personnes qui l’entouraient validé son meurtre ne l’aidait absolument pas. Pire, elle avait l’impression qu’on la plaçait sur un chemin plus périlleux encore…

— Tu ne comprends pas, Raphaël… Il avait peut-être une famille, des amis… Peut-être qu’il aurait pu lui aussi ne pas avoir eu de chance dans ses rencontres ? Pourtant, ça ne me fait ni chaud ni froid de savoir ça. Et ce dit-William en est peut-être passé par là, lui aussi ? Qu’est-ce qui te dit que je ne vais pas me familiariser avec tout ça et devenir une adepte des sortilèges impardonnables ? Si ça se trouve, je vais finir comme mon père, malgré tout ce que j’ai fait pour ne pas y parvenir.

Elle haussa les épaules et soupira brusquement, comme si elle tentait d’évacuer toute la pression qu’elle ressentait en elle à cet instant. Elle ne voulait pas devenir comme Thorfinn. Elle avait de la peine pour lui, véritablement. Il ne ressentait aucun amour, aucune empathie et c’était tout ce qu’elle refusait de devenir. Mais elle ne parvenait pas à lutter contre ça.

— Nous avons eu quelques égratignures à cause de l’explosion, mais rien de grave. Tobias… Reste Tobias. Ce n’est pas ça qui risque de l’arrêter.

Amber se gratta l’arrière de la nuque, n’osant plus rien ajouter d’autre. Elle ressentait un immense poids dans sa poitrine qui ne parvenait pas à diminuer depuis l’offensive. Émotionnellement, elle était exténuée. Elle ne faisait que réfléchir, réfléchir, réfléchir. La jeune Towsen entamait sans cesse des introspections, sans queue ni tête, qui ne donnait rien d’intéressant. Elle ne savait pas vraiment où elle allait en faisant ça, mais peut-être espérait-elle trouver des réponses à ses questions ? Ce n’était pas le cas. Et sans n’en trouverait-elle jamais.

— Je vais voir ce que je peux obtenir comme informations, concernant ton affaire.

La demoiselle estimait qu’il s’agissait d’une bonne conclusion à la discussion virulente qu’ils venaient d’entamer. Elle n’aurait pas pu imaginer qu’ils passeraient par autant d’émotions, par autant de sujets différents. Raphaël comme Amber n’étaient plus les deux personnes qui s’étaient rencontrés dans ce café londonien. Ils avaient changé et évolué ces derniers mois, à cause des événements et des obstacles qui s’étaient mis en travers de leur route. Ils avaient été forcés de grandir, sans doute un peu trop vite, et ils devaient faire face à des responsabilités qu’Amber n’était pas encore prête à assumer.

Amber chercha à le taquiner en lui demandant s’il craignait de se faire rétamer par une fille.

«Houla, c’est bien mal me connaître si tu me penses capable d’avoir autant d’estime de moi. J’ai absolument pas peur de me faire mettre à terre par une fille, parce que je sais que tu peux me battre où tu veux quand tu veux.  »

Raphaël fit comprendre à Amber qu’il comprenait son silence sur ce qu’il lui était arrivé en octobre. La honte d’avoir été faible, d’avoir été Piégée, sans défense, livrée à elle-même jusqu’à ce que des hommes et des femmes risquent leur vie pour la secourir. Le moldu savait que c’était quelque chose de difficile à assumer, pour avoir lu, écouté et retransmis différents témoignages de sorciers et, surtout, pour avoir lui-même vécu une expérience inavouable.

Après un échange un peu mouvementé à propos de Malefoy, des mangemorts et de Ashley, il lui expliqua ce qu’il avait appris en décembre, et lui proposa de lui faire écouter le mystérieux enregistrement. Amber accepta, mais ne tint pas jusqu’au bout de l’écoute, ce qui lui valut une réplique cinglante et gratuite de la part de Raphaël. Leur petite dispute qu’ils ont eue précédemment l’avait rendu un peu amer, mais il se reprit et continua un peu plus calmement. Finalement, la sorcière lui fit comprendre que ça ne changeait rien, que certaines personnes ne méritaient pas d’être sauvées et elle lui avoua ce qu’il s’était passé pour elle lors de l’attaque du QG du Blood Circle. Le moldu tenta de la consoler comme il pouvait. Étrangement, il ne lui en voulait pas, il comprenait qu’elle se sente mal vis-à-vis de ça, mais il comprenait aussi les circonstances de l’acte. Amber refusait le pardon, elle semblait vouloir se morfondre dans un voile de culpabilité.

«Je comprends pas quoi ? J’ai l’impression de mieux comprendre que toi, au contraire. Il avait très certainement une famille et des amis. Peut-être que, effectivement, il n’a pas eu la chance que j’ai eue. Mais dans tous les cas il a fait son choix. Comme toutes ces personnes de l’Ordre du Phénix, et… ça me fait chier de l’admettre… tous ces mangemorts, qui étaient présents. Ceux qui étaient également rangés sous aucune bannière, mais qui ont simplement répondu à l’appel du conseil. Tous ces gens, ils étaient également prêts à mourir pour leurs idéaux. Tous connaissaient le danger. Il en va de même pour le Blood Circle, ils sont prêt à tuer et être tués. Si cette personne avait eu l’opportunité de le faire, c’est toi qui serait restée à terre ce jour là.» La voix de Raph se brisa légèrement sur la fin. Il se racla la gorge avant de reprendre. «D’après les retours que j’ai eus, c’était pas joli à voir… Franchement… Y’a pas à débattre sur si c’est bien ou mal. Ce n’est ni l’un, ni l’autre. C’était juste lui ou toi. C’était un évènement précis, dans un contexte précis. J’ai confiance en toi. Je fais peut-être erreur, je n’ai pas la science infuse, mais tant pis j'assume. Je pense que tu n’as pas assez de gens dans ta vie qui témoignent de leur confiance en toi, ou de leur affection.» Raphaël songea aux menaces de Tobias, en décembre. Il adorait sa sœur, ça crevait les yeux, et il était prêt à tout pour la protéger, mais il avait des manières assez étrange de témoigner son affection. Quant à la confiance… Si son propre père était contraint de la soumettre au sortilège de manipulation, ça en disait long. «Moi ce que je vois, c’est que tu penses avoir mal agi, tu as l’air de vouloir te complaire dans ta culpabilité. Le fait que tu t’en veuilles prouve que ton cas est loin d’être désespéré. T’es pas un monstre. T’es peut-être un peu perdue, t’es probablement pas entourée des meilleures personnes pour te réconforter. Tuer ou être tuée… C’est pas un choix facile à faire. »

Et Raphaël espérait n’avoir jamais à faire ce choix un jour. Même s’il avait commencé à s’entraîner à se battre, et se défendre. C’était uniquement dans le but de neutraliser quelqu’un qui s’en prendrait à lui, de manière non létale. Ça demandait beaucoup de force physique, et de technique, pour tuer quelqu’un à mains nues. Mais ça en demandait probablement plus pour neutraliser quelqu’un qui était prêt à mourir pour vous tuer… Amber ne voulait pas finir comme son père ; le moldu ne voyait pas comment elle pourrait devenir comme lui. Elle haïssait tellement cet homme, même Raph le ressentait, et elle méprisait tellement ses méthodes qu'il était inconcevable qu’elle l’imite de sa propre volonté. Il décida finalement de changer de sujet, en demandant si elle n’avait pas été blessée, ainsi que des nouvelles de Tobias. Elle lui répondit qu’elle n’avait eu que quelques égratignures.

«Vous avez pu échapper au sérum ? Même si c'est “juste” pour une courte durée, je sais que c’est assez traumatisant pour beaucoup.»

Encore une fois, les témoignages des sorciers et ce qu’il avait pu voir de lui même lui permettaient d’avoir une bonne interprétation de la situation. Priver un sorcier de sa magie, même pour une durée limitée, c’était comme couper les ailes d’un oiseau, c’était… marquant.

Finalement, elle conclut leur “discussion” en promettant d’essayer de voir ce qu’elle pourrait récupérer comme information concernant “son” affaire. Mon affaire ? L’Enregistrement, ou Malefoy ? Ne voulant pas relancer un sujet épineux, il ne demanda pas de précision.

«Pas de soucis, tu peux m’envoyer un texto, ou alors un hibou. Il devrait savoir comment me trouver. Putain, tu m’avais pas menti, tu utilises vraiment des oiseaux messagers. Bon, c’est pas vraiment un pigeon, d’accord, mais on n’en est pas si loin que ça.

Il rit de sa propre remarque, en espérant que ça fasse retomber la pression qui s'était installée entre eux deux à mesure qu'ils discutaient de sujets beaucoup trop sérieux et marquants.

«Tu veux rentrer, ou qu’on continue de faire un tour ? Perso, je pense rester encore un bon moment, je suis jamais venu ici et puis le trajet était un peu long. Je rentabilise ! »

Amber ne put s’empêcher de rire aux propos de Raphaël sur le sport et sur le fait qu’il était persuadé qu’elle pourrait le mettre par terre quand elle voulait. Elle n’avait aucune envie d’essayer : déjà parce qu’il était trop courbaturé ; ensuite parce que cela n’apporterait rien si ce n’était de satisfaire son propre ego. Ce jeune homme était son ami et elle ne voulait pas perdre son amitié pour nourrir son esprit un peu trop compétitif. Alors, elle ne surenchérit pas sur ses propos. Un simple sourire suffit à clore le débat, avant de laisser place à une discussion plus houleuse.

La Serdaigle ne parvint même pas à écouter l’enregistrement de son ami jusqu’au bout. Ce qu’il semblait subir était tout bonnement odieux. Elle ne comprenait pas pourquoi ni comment on pouvait faire subir cela à un moldu. Tout simplement parce qu’il n’était pas né dans la bonne famille. Cela la désolait. Quelques fois, elle se demandait comment réagirait une famille de mangemorts face à leur enfant cracmol. Seraient-ils prêts à le tuer ou à l’abandonner ? Elle se demandait où étaient leurs limites. Visiblement, ils en avaient s’ils s’en prenaient même à un moldu lambda dans la rue. Où allait le monde ?

La jeune femme avait des idéaux et renier un membre de sa famille à cause de ses capacités magiques n’en faisaient pas parties. Malheureusement, tout le monde ne pensait pas comme elle et cela pouvait donner lieu à des situations étranges et déplaisantes. Ne pas tuer faisait également partie de ses principes généraux et pourtant… Elle avait été à contre courant et l’avait fait. Sans le moindre scrupule, alors qu’elle avait constamment éviter de se retrouver dans une telle situation. Le monde était terrible et elle se rendait compte que pour y survivre, elle ne pourrait pas toujours aller du sens de sa volonté.

Raphaël lui fit d’ailleurs bien comprendre en mentionnant le fait que s’il en avait eu la possibilité, ce serait elle qui ne serait plus de ce monde. Un frisson lui parcourut l’échine. En allant à cette embuscade, elle n’avait pas craint la mort une seule seconde. Comme si cette éventualité était inexistante et pourtant elle était belle et bien présente. Ils étaient en guerre. Ce n’était plus un jeu et elle devait s’en rendre compte. Tuer n’était pas un acte monstrueux, mais un acte de survie. Si ce n’était pas pour elle, c’était pour tous les sorciers. Son ami mit exactement le doigt sur ce qu’elle avait besoin d’entendre pour ne pas plonger totalement dans la noirceur.

— Tu as raison… Je n’avais pas vu les choses de cette manière.

Ses propos encourageants qui suivirent firent naître un léger sourire aux coins de ses lèvres. Raphaël avait vraiment trouvé les mots pour apaiser sa conscience à cet instant. Il était vrai qu’elle n’avait pas vraiment eu de modèle dans sa famille. Elle n’avait pas connu l’affection et le regrettait parce qu’aujourd’hui, elle ne parvenait pas à l’exprimer à son tour. Dès qu’on lui donnait de l’amour, elle le repoussait à quinze kilomètres ou faisait quelque chose pour le gâcher et ne pas prendre le risque d’être blessée ou dans une situation de faiblesse. La vérité était qu’elle ne comprenait rien à l’amour, à ses bienfaits dans la vie quotidienne. Pourquoi certaines personnes le recherchaient éperdument ? Quel était l’intérêt ? Elle était totalement largué sur ce point-là.

— Je suis censée faire quoi à ton avis ? Si une nouvelle offensive a lieu ? J’ai peur de m’enfoncer davantage dans la noirceur en m’y rendant, mais je veux y prendre part pour dissoudre le Blood Circle un jour. Je sais que si je m’y rends, je vais devoir me défendre et peut-être tuer de nouveau. Je suis totalement larguée là-dessus… Je ne sais pas quoi faire.

Finalement, Raphaël finit par la questionner sur l’offensive qui avait eu lieu et ses conséquences sur les sorciers. Il était vrai que le sérum avait fait des ravages psychologiques. Il suffisait de voir Helios. Il n’avait pas du tout apprécié de se retrouver dépourvu de sa force magique. Il avait même subi des moqueries d’étudiants crétins.

— Je n’ai pas été touchée, mais je sais que plusieurs personnes l’ont été. J’ai vécu la même chose en novembre dernier et ce n’est pas agréable.

Sauf qu’elle avait connu les bracelets magiques et que leur technologie avait assez évolué pour permettre de les retirer rapidement. Un sérum… C’était autre chose et plusieurs avaient cru ne jamais pouvoir repratiquer la magie. C’était abominable.

N’ayant pas grand-chose à ajouter, elle préféra clore le débat pour ce jour-là et parler une dernière fois de l’affaire Malefoy, bien qu’en vérité elle irait également voir William. Elle avait besoin d’avoir le coeur net sur le genre de pratique qu’il pouvait avoir en dehors de son manoir. Elle cogita un moment avant que Raphaël ne lui fasse remarquer qu’elle n’avait pas plaisanté avec l’histoire du pigeon. Elle se mit soudainement à rire, de bon cœur et avec sincérité. Elle avait oublié cette histoire.

— Je t’enverrai Ballyhoo dans ce cas. Il n’est pas très futé, mais d’une extrême gentillesse.

Son hibou était un ami à part entière de la demoiselle. Il était toujours à proximité quand elle se sentait seule et qu’elle voulait parler. Elle n’était pas folle, mais parfois songer auprès d’un volatile était moins curieux que parler à un mur. Mais soit…

— J’ai encore une petite heure devant moi. Tu aimerais que l’on tue le temps comment ?

Amber n’était pas très douée pour trouver des activités à faire en groupe. À vrai dire, elle passait la majorité de son temps en solitaire ou à jouer à des jeux sorciers. Elle espérait que Raphaël ait plus d’inspiration qu’elle. Si ce n’était pas le cas, ils pourraient faire un foot ou une partie de tir à l’arc improvisée. Amber n’avait qu’à sortir sa baguette et faire quelques mouvements de poigner pour voir apparaître l’objet convoité. Elle se doutait également que son ami n’y verrait aucun inconvénient, maintenant qu’il connaissait son secret, qu’elle était une sorcière.

Amber demanda à Raph sur la marche à suivre si une nouvelle offensive devait avoir lieu. Elle avait peur de devoir commettre l’irréparable et d’enfoncer davantage son cœur dans les ténèbres.

«Tu sais, je ne suis pas ta conscience. Si tu veux y aller, malgré tes craintes. Vas-y. Cette dernière offensive, j’étais contre. Elle n’avait rien à voir avec celle d’Octobre pour vous libérer, ou les mini raid qui ont suivi. Là c’était de la violence gratuite. On savait pas pourquoi on frappait. Le seul but c’était de casser du Blood Circle, c’était de la violence gratuite. Encore une fois, je comprends le concept de ne pas vouloir se laisser marcher sur les pieds. Œil pour œil et tout le tralala. Mais… Le sentiment que j’en ai, c’est qu’en agissant ainsi, on se comporte comme nos ennemis. On est pas plus intelligent qu’eux. Je ne sais pas si ça peut t’aider. Mais pour ma part, je pourrais participer à une offensive, être présent sur le terrain et être utile d’une manière ou d’une autre. Mais tout dépend des enjeux de l’attaque. Attaquer pour attaquer, c’est donner la main à l’ennemi pour riposter.»

Raphaël haussa les épaules.

«Tout ça pour dire que, pour moi, c’est pas juste une question de “est-ce qu’il faut y aller ou ne pas y aller ?”. Je m’interroge plutôt sur les raisons d’une telle attaque. Est-ce qu’on fait ça dans le seul but de tout démolir, pour se venger ? Ou est-ce qu’on cherche à libérer des amis, ou récupérer des informations pour pouvoir les contrer ? Cela dit, la vengeance contre le Blood Circle, c’est quelque chose que je peux comprendre, même si perso j’approuve pas. Tant que ça ne touche pas des innocents.»

Raphaël changea un peu l’orientation de la discussion, en demandant comment s’était passée la dernière offensive, si elle et Tobias allaient bien et s’ils n’avaient pas subi les effets du sérum.

«Plutôt flippant comme machin… Heureusement que ce n’est que temporaire, mais leur détermination fait froid dans le dos.»

La sorcière conclut le sujet en promettant qu’elle essaierait de mettre du clair dans cette affaire, Raph proposa qu'elle lui envoie un hibou, en songeant que grâce à sa corbeille à courrier dans l’Ordre, il pourrait réceptionner les hiboux postaux. Il nota d’ailleurs que lors de leur rencontre, elle ne lui avait pas menti en affirmant qu’elle utilisait des oiseaux postaux pour discuter. La remarque fit rire Amber de bon cœur.

«C’était lui qui t’avait foutu la frousse lors de notre rencontre ? Effectivement, il avait pas l’air fute-fute de se montrer comme ça en terres moldues ! »

Le sujet principal de leur rencontre touchait à sa fin, et Raphaël sentait que c’était également la fin de leur petite sortie. Il proposa de prolonger ça un peu plus longtemps, si elle le souhaitait, en affirmant que de toute façon il comptait rentabiliser son temps ici en restant encore un peu. Amber lui indiqua qu’elle avait encore une heure devant elle, et l’interrogea sur ce qu’il voulait faire.

«Euh, bah je connais pas l’endroit, je pensais marcher tranquillement. Et voir ce qu’il y a.»

Raphaël vit une canette vide sur le sol et la désigna d’un mouvement de tête.

«Après… C’est un peu débile comme proposition, mais si vraiment tu veux qu’on fasse une activité. On peut ramasser les détritus qu’on voit. Bon, si on nous voit faire, on va passer pour des cinglés qui baisent des arbres, mais ça nous occupe, et c’est utile. De ramasser les déchets, je veux dire, pas de baiser les arbres. Par contre je sais pas si on trouvera des poubelles en chemin pour virer ce qu’on ramasse.»

Raph n’était pas du genre écolo. La nature nous protège, préservons là, c'était pas spécialement sa philosophie de vie. C’est juste qu’un détritus sauvage, c’était dégueu. Il n’allait pas s’amuser à ramasser tous les jours ceux “des autres”. Mais il fallait se rendre à l’évidence, quand on voit un déchet, on en devient responsable. On sait qu’il est là, pourquoi ne pas se baisser pour le ramasser ? Pourquoi attendre qu’un autre le fasse ? Voir un déchet et volontairement l’ignorer, ça revenait à l’avoir jeté soi-même. Mais Raph n’allait pas se mentir à lui-même. Même s’il pensait comme ça, il savait pertinemment qu’il avait plus d’une fois refusé de se baisser, comme tout le monde. Cette proposition, c’était un peu sa Bonne Action de la journée.

«Désolé, j’ai rien trouvé de plus romantique que de te proposer de ramasser les poubelles. T’es quand même partante ? J’sens que tu ne l'avais pas vue venir celle-là, Cassandre !»

Amber écouta silencieusement Raphaël. Il n’avait pas tort. Ils attaquaient pour attaquer. Il n’y avait pas vraiment d’objectifs derrière tout ça. En vérité, ils n’y avaient pas réfléchi, tout simplement parce que leur désir de vengeance était bien plus grand que tout le reste. Le Blood Circle avait démoli leur confiance en eux et cela depuis des mois. Ils avaient attaqué leur université composé d’étudiants, mais également des zones fréquentées par des sorciers adultes. L’université n’était pas Poudlard, mais elle était censé être protégée. Même si ce n’était pas au même niveau… Maintenant, ils avaient dû retourner au château et même si Amber appréciait ce décor, elle n’était pas plus rassurée. Poudlard était-il leur prochain itinéraire ? Que s’apprêtaient-ils à faire d’autre ? Ils l’ignoraient. Ils ignoraient tout un tas de choses et c’était ce qui les mettaient en rogne. Les sorciers ne savaient pas à quoi s’attendre et ils étaient obligés d’agir comme eux s’ils voulaient s’en sortir.

Pour autant, Raph avait raison. Ils se rabaissaient à leur niveau et agissaient exactement comme eux. Ils attaquaient pour le faire du mal, pour réduire leur effectif, mais ils n’avaient toujours pas trouvé un moyen de contrer leur sérum anti-magie. Ils étaient obligés de subir leurs effets jusqu’à ce qu’ils s’estompent. Leurs sciences dépassaient la leur sur ce point là et les sorciers avaient tout intérêt à travailler là dessus avant une nouvelle offensive, qui pourrait leur coûter leur magie pour le restant de leur jour…

— Temporaire, oui. Mais jusqu’à quand ? Jusqu’à ce qu’il trouve quelque chose de plus performant qui nous prendra notre magie jusqu’au restant de nos jours ?

Le Blood Circle était déterminé à les faire tomber et elle était certaine que ce type de sérum était le prochain sur leur liste et que les futures offensives risquaient de faire mal, très mal. Helios n’avait pas tort. Elle n’avait pas la haine contre l’ensemble des moldus, mais comment réagirait-elle si l’un d’entre eux puisait toutes ses forces magiques ? Elle n’était plus trop certaine de pouvoir les défendre après ça…

— Tu sais, tu n’es pas né dans ma famille. Mais je ne sais pas comment mes parents réagiraient si leur fille n’avait plus de pouvoirs magiques. Cela reviendrait au même qu’une cracmol et ce n’est pas vraiment dans l’idéal des familles de mangemorts….

Elle souffla doucement entre ses lèvres, s’imaginant les conséquences désastreuses que cela aurait, non seulement sur sa famille, mais sur les autres qui pourraient être touchées. Sans magie, ils redeviendraient des moldus, en quelque sorte… Comment Thorfinn réagirait à cela ? Sans doute moins violemment qu’elle, mais quand même. Elle y pensait parfois et cette possibilité lui faisait froid dans le dos.

— Oh, des cracmols, ce sont des personnes qui sont nés sans pouvoirs magiques, mais qui ont des parents sorciers.

Elle avait failli oublier que Raphaël n’était pas sensible à tous les termes magiques. Alors elle voulait faciliter sa compréhension en lui expliquant ce petit détail. Au moins, il comprendrait l’enjeu de ses propos. Finalement, la conversation dévia sur son hibou et elle ne put s’empêcher d’éclater de rire à la description qu’il en faisait. Fute-fute était presque trop faible comme mot.

— Ballyhoo est un imbécile. Mais je l’ai depuis que je suis petite et je tiens à lui malgré ça.

Son hibou était vieux et peut-être un peu bigleux, mais il avait toujours été d’un réel soutien quand Amber avait des parchemins à envoyer en urgence. Même si le sorcier était au milieu de la rue, il était prêt à se jeter sur lui pour lui donner le bout de parchemin. Si ce n’était pas un animal fidèle ça…

Raphaël partit dans un discours écologique en lui proposant de ramasser des ordures et Amber ne put s’empêcher de faire une légère moue. Ce n’était pas qu’elle n’était pas du genre à se salir les mains, mais elle n’était pas spécialement emballée par l’idée. Et puis, de son côté, des elfes de maison auraient pu s’occuper de ce genre de choses. Les sorciers n’étaient pas responsables, peut-être, mais grâce à l’aide de ces créatures magiques, ils avaient des rues propres, sans des mégots au sol ou de vieux chewing-gum qui avait viré au noir. En vérité, Amber n’aimait pas demander de l’aide aux elfes de maison pour tout et n’importe quoi. Elle aimait faire certaines choses elle-même, comme son lit ou son café. Mais là, ramasser les cannettes, ça dépassait tout sa motivation. Et puis, elle avait encore un tas de révisions qui l’attendait chez elle… Très bonne excuse, et valable d’ailleurs !

— J’aurais adoré ramasser les détritus avec toi, mais Cassandre doit peaufiner ses connaissances en Protection Magique. Elle doit améliorer ses prestations pour les prochaines personnes qu’elle va croiser, tu comprends ?

Amber rit doucement et se gratta l’arrière de la nuque. Elle allait aussi devoir penser à William et à ce qu’elle allait faire par rapport à cet enregistrement. Dur dur…

— Ça m’a fait plaisir de te voir, Raphaël. Porte-toi bien et j’espère qu’on se reverra bientôt. Avec des activités plus fun, plaisanta-t-elle pour conclure cette entrevue.