Il y avait des gens qui passaient leur dimanche à faire du sport, d’autres qui s'amusaient avec leurs amis, il avait ceux qui dormaient. Raphaël, lui, avait décidé de travailler sur des articles et des témoignages qu’on lui avait envoyé par mail, mais aussi quelques messages qu’il avait reçu par hibou. Le 12 Square Grimmaurd était un endroit sécurisé pour lui. Il pouvait recueillir et stocker des informations utiles sans risquer de se faire prendre. Il ne savait pas trop comment les sortilèges de protections fonctionnaient, mais il savait que les moldus non invités ne pourraient jamais pénétrer ici. La magie, c’était fascinant tout de même. On pourrait presque croire qu’il n’y avait pas de limites.

Le moldu arrivait à recevoir pas mal de témoignages, surtout de moldus qui étaient accusés d’avoir aidé des sorciers. À vrai dire, il ne s’attendait pas à ce qu’il y ait une augmentation de personnes qui s’opposerait au Blood Circle, il pensait qu’il y aurait plus de gens qui se rangeraient du côté de la loi, mais apparemment non. Il semblerait qu’il y avait eu pas mal d’abus et d’accusations à tort, ce qui poussait les proches des victimes, ainsi que les victimes elles-mêmes, à se ranger du côté de l’opposition. Bien sûr, en proportion Raphaël continuait de recevoir plus de mails d’insultes et de menaces de morts que de soutien, mais il semblerait que même si ses soutiens étaient moins nombreux, ils avaient moins peur de s’exprimer. Peut-être qu’il pourrait organiser, avec l’aide de sa petite communauté une marche pacifique, un sit-in ou un quelconque événement pacifique pour faire entendre leur voix, montrer qu’ils sont des partisans de la paix et que le camp violent, ce n’était pas forcément celui que les médias désignaient. Mais il devrait préparer ça à l'avance... Peut-être pour avril, ou mai, quand il fera assez chaud pour rester longtemps dehors.

Du côté sorcier en revanche, seulement quelques parchemins dans sa corbeille à courrier. Il faut dire que les sorciers victimes du Blood Circle n’avaient pas spécialement envie de faire part à un moldu de leurs expériences passées. Raphaël comprenait tout à fait, et c’est pour cela qu’en général c’était surtout sa belle Nymphéa qui se chargeait de recueillir ce genre de témoignage de la part des mages. Et même parmi ceux qui étaient coopératifs parmi ces derniers, peu comprenaient l’intérêt de partager ce genre de témoignages. Qu’est ce que ça changeait en fin de compte ? Le Blood Circle ne se posait pas autant de questions… La propagande allait à coeur joie chez les moldus, Raphaël avait pu le constater la veille en allant au cinéma avec Eirian. Le petit spot d’information du gouvernement pendant les publicités et bandes annonces qui appelait une fois de plus à dénoncer les sorciers. Ça aurait presque été pas trop grave si ça n’était pas pendant une séance d’un film destiné aux enfants…

Le français savait que les jours de sa chaîne YouTube étaient comptés. Ça faisait un mois que le gouvernement britannique faisait la chasse aux personnes qui aidaient les sorciers ou qui avaient des informations sur eux. Il avait beau prendre le plus de précautions possible, tôt ou tard ça allait lui tomber dessus. Il prévoyait de retourner chez ses parents une à deux fois par mois pour publier ses vidéos en se disant que ça restait tout de même plus fiable que de simplement utiliser un VPN, l’un n’empêchant pas l’autre. Il récupérerait les informations à Square Grimmaurd, téléchargement d’articles, de photo, de vidéos ou autre. Il pouvait faire le montage de vidéos chez lui, mais le mieux c’était de publier en France. Il savait qu’il devrait probablement se recréer de nouveaux comptes, même si French_Bahamut avait été épargné… Pour le moment.

Il avait bien bossé, il était temps de partir. Raphaël rangea ses affaires et se dirigea vers la sortie du bâtiment en consultant son téléphone et les nouveautés qui défilaient sur ses fils d’actualités. Ah le 8 mars et ses polémiques sur les réseaux sociaux. Il n’avait pas trop d’avis sur le sujet et s’en fichait pas mal. Cette journée existait, ça ne lui posait aucun problème, point. C’était le genre de chose qui ne devrait pas exister… Créer une journée pour la reconnaissance de quelque chose d’aussi basique que l’égalité de chacun, et chacune pour le coup, c’était aberrant. Ça devrait être quelque chose d'acquis de naissance, il ne devrait pas y avoir de combats pour ça.

Un raclement de gorge le tira de ses pensées, il leva les yeux de son téléphone. Il était immobile, et bloquait le passage. Merde…

«Désolé ! Je ne faisais pas attention. C’est ma faute.»

Il s’écarta pour laisser passer la femme. Il la connaissait de vue, de nom et surtout de réputation. Elyssa Rosier. Elle siégeait au Conseil d'Administration, elle était une des représentante de l’Ordre du Phénix. Il avait entendu quelques hommes dire qu’elle était plutôt castratrice vis à vis des sorciers. Ça voulait à peu près tout et rien dire.

«Bonne journée de la Femme à vous, Mrs Rosier.»

La sorcière s’arrêta. Bordel, pourquoi est-ce qu’il avait dit ça ? Il s’était laissé influencé par ce qu’il venait de lire sur les réseaux. Il voulait pas se montrer lèche-cul, ni arrogant, ni rabaissant, ni… Il voulait juste être poli. Il aurait pu juste dire bonjour, au revoir et fermer sa gueule. Mais non… Toujours plus… Surtout qu’en plus… Plus précisément, ce n’était pas “La journée de la femme”, mais…

«Je veux dire, Bonne Journée Internationnale des Droits des Femmes à vous… Désolé pour le raccourci… »

Raphaël se força à sourire, pour avoir l’air plus détendu, mais intérieurement il se disait “Me tue pas, me tue pas, me tue pas, je voulais bien faire, me tue pas”. Mrs Rosier arqua un sourcil.

Raphaël s’excusa de bloquer le passage. C’était des choses qui arrivaient, certes, mais en l’occurrence c’était juste qu’il était trop occupé sur son téléphone pour faire attention à son environnement. Que la sorcière soit pressée ou pas, c’était naturel que le jeune homme s’excuse et reconnaisse sa faute. Par contre… Ce qu’il aurait pu s’abstenir de faire c’était de lui souhaiter une “Bonne journée de la Femme”. Surtout que bon, c’était pas non plus un truc comme Noël, Nouvel An ou la Saint Valentin, un truc que l’on “fête”. La membre du conseil se stoppa net et lui demanda de répéter.

Évidemment, elle allait probablement le lyncher. Elle devait penser qu’il se payait sa tête, ou qu’il prenait ça à la légère. “Vous avez fait de bonnes soldes aujourd’hui ? Il y avait de sacré promos pour les femmes”. Non Raph n’avait pas eu de mauvaises pensées en lui souhaitant ça. Il n’était clairement pas Féministe avec un grand F, il ne se revendiquait pas du mouvement mais il comprenait tout de même le sens de cette journée. En partie en tout cas. Il ne s’offusquait pas comme certains hommes qu’on ne parle pas d’une journée des droits des hommes. Il ne cherchait pas non plus à se faire pardonner son comportement du restant de l’année. “Allez ma chérie, c’est ta journée, aujourd’hui c’est moi qui fait le ménage”. Après Raph n’était probablement pas irréprochable, mais il s'efforçait du mieux qu’il pouvait de ne pas être un connard.

À la demande de Mrs Rosier, Raphaël se répéta, en prenant soin de se corriger en précisant que c’était la “Journée Internationale des Droits des Femmes” et de s’excuser pour le raccourci. Il ne s’attendait plus à faire bonne impression auprès de la sorcière. Il pensait vraiment qu’il allait se faire massacrer. Après lui avoir fait perdre son temps, il passait pour un bouffon. Mais étrangement, ce n’était pas un problème de raccourcis, mais plutôt de compréhension. Cette femme n’avait pas connaissance de cette journée ? Il n’était même pas venu à l’esprit de Raphaël que Moldus et Sorciers avaient des calendriers différents. Du moins, jusqu'à présent.

«Et bien… Nous sommes le 8 mars. Dans le monde Moldu, c’est la Journée Internationale des Droits des Femmes. Pour être franc, je ne suis pas trop au courant de tous les enjeux de cette journée. Mais je dirais que c’est un moyen de rappeler aux habitants de tous les pays le chemin qui a été fait pour que les droits des Femmes, mais surtout, le chemin qu’il restait encore à faire.»

Raphaël n’était pas trop à l’aise avec le sujet. Il avait voulu faire l’intéressant et il se retrouvait maintenant à être le porte-parole moldu d’un concept qu’il ne maîtrisait vraiment pas. Il pria pour ne pas gaffer.

«Je n’avais pas pensé que c’était une journée qui était propre aux moldus. Dans la culture populaire, ça a été réduit au terme “Journée De la Femme” qui porte pas mal à confusion. Le concept de “Droit” est peu à peu oublié et l'événement devient de plus en plus commercial et hypocrite.»

Au final, c’était toujours un peu comme ça pour tout… Dès qu’un engagement social commençait à être reconnu, il était récupéré à des fins commerciales. Si le “combat” de Raphaël et la “Cause” qu’il défendait prenait de l’ampleur. Si les sorciers et sorcières venaient à être reconnus et tolérés… Est-ce qu’ils auront le droit à une journée internationale pour faire valoir leurs droits dans le monde moldu ? Et si oui...Est-ce qu’ils auront le droit à des réductions sur différents produits en magasin en l’échange d’un petit tour de magie ?

Raphaël observa la réaction de Mrs Rosier. Elle semblait plus intriguée qu’en colère. Était-elle surprise d’apprendre que les moldus avaient instaurés une journée pour faire valoir les droits des femmes ? Ou alors, était-elle scandalisée en s’imaginant que les femmes moldues n’avaient le droit qu’à un seul jour de parole dans l’année ?

«Pardon, je ne me suis pas présenté. Je suis Raphaël Millet. J’appartiens à la branche Moldue de l’Ordre. Je suis français.»

Ce dernier détail n’était pas spécialement utile, mais c’était au cas où la femme se demandait d’où venaient l’accent de Raphaël. À force de vivre à Londres, il était bien moins prononcé qu’avant, mais c’était quelque chose qui allait le poursuivre, c'était sûr.

Raphaël décida de se présenter. Déjà par politesse et puis aussi pour se mettre sur un pied d’égalité. Il savait à qui il s’adressait, la moindre des choses était que le réciproque soit vraie. La sorcière se présenta à son tour. Avocate… Ça le faisait sourire d’imaginer des avocats dans le monde magique. Les lois sorcières devaient totalement différer des lois moldus mais le jeune homme était persuadé que le cursus devait être tout aussi chiant. C’était amusant de voir qu’un tel corps de métier puisse avoir une branche dans le monde de la magie. Quand on pense sorcellerie, on pense baguette, chaudron, balai, potions. Bref tout ce qui était propre à la Magie. Même les confiseurs, photographes, écrivains touchaient à la Magie dans leur métier. Mais avocat ? Quand est-ce qu’ils utilisaient la magie ? Est-ce qu’il y avait des sortilèges qu’on utilisait uniquement dans le cadre de la loi ? Ou est-ce que les avocats sorciers avaient exactement le même travail que les avocats moldus, avec juste des lois différentes ? Il répondit à la sorcière en souriant.

«Je ne vais pas vous mentir, votre réputation vous précède Elyssa.»

Elle avait choisi de se présenter uniquement avec son prénom. Le moldu vit cela comme une invitation à l’appeler par son prénom. Elyssa lui avoua ensuite que cette journée n’existait pas dans le monde sorcier. Et qu’il n’y avait pas non plus d’équivalence pour les Né-Moldu ou les Hybrides. Raphaël ignorait de quoi elle parlait en parlant d’Hybrides. Elle parlait des sang-mêlés ? C’était un peu rude comme terme, non ? Il décida de ne pas relever ce détail. Déjà qu’il ne se sentait pas très à l’aise avec le sujet de base. Surtout que son interlocutrice était une femme. Avocate de surcroît. Donc il pouvait difficilement tomber sur plus calée qu’elle sur ce qu’étaient les droits des femmes. Ce que Raphaël redoutait se produisit : elle lui demanda son avis sur le sujet. C’était quoi la bonne réponse ? Qu’est ce qu’il pouvait répondre sans que la sorcière ne soit offusquée par ses propos ? Finalement, il se dit que le plus simple, c’était de dire le fond de sa pensée. Si ça n'allait pas, bah tant pis, il n'avait pas été hypocrite.

«J’en pense pas grand chose. C’est important pour beaucoup, et je respecte ça. C’est comme un anniversaire. On souhaite un joyeux anniversaire à la personne. On fête sa naissance. C’est pas elle qu'on doit féliciter, mais les parents. Mais on souhaite quand même un Joyeux Anniversaire parce que c’est important.»

Il ne sait pas trop si sa comparaison était vraiment pertinente. Mais il aimait bien essayer de présenter sa visions de choses de certains concepts avec des exemple à la portée de tout le monde.

«Je pense que ça ne devrait pas exister. Dans un monde idéal, on ne devrait pas à avoir à se battre pour le droit des femmes. Parce que ça devrait être acquis de naissance. Au même titre que l’Ordre du Phénix ne devrait pas exister parce qu’on devrait être capable de tous vivre ensemble, sans avoir à revendiquer quoi que ce soit. Mais on n’est pas dans un monde idéal… Je pense que… »

Il fit une courte pause pour choisir un peu ses mots, il parlait un peu plus lentement que d’habitude. Il avait beaucoup de chose à expliquer, et il n’avait pas trop envie de se répéter parce qu'il allait trop vite ou qu'il n'était pas clair.

«Je pense que d’un point de vue utilité, ça ne doit pas servir à grand chose. C’est important, parce qu’il faut montrer qu’un tel combat existe. Que ça soit pour les femmes ou d’autres personnes. je le pense sincèrement, mais je ne suis pas trop persuadé de son impact réel. Quelqu’un qui est contre ce genre de revendications ne va pas cesser de l’être juste parce que la journée existe. À la limite il aura une pensée hypocrite pour la journée, et reprendre le cours de sa vie le lendemain. Quand aux personnes qui sont déjà convaincues, elles n’ont pas besoin d’un tel symbole. Au final ça ne peut donc toucher que les personnes indécises, les personnes qui se sentent isolées face à ça. Et ça je pense que c’est important, de montrer que y’a réellement unt ruc qui va pas dans ce monde. Mais est-ce que ça apporte suffisamment de lumière dans le brouillard pour leur ouvrir un chemin ? Est-ce que au final il y a vraiment des résultats… Je l’ignore. »

Il conclut finalement avec un grand sourire plein d’ironie.

«En revanche elles ont droit à des supers réductions sur la lingerie pour faire plaisir à leur homme ! »

Raphaël décida de jouer la carte de la franchise. De toutes façons, il dérangeait pas mal de gens avec ses idées loufoques de chercher à rassembler Sorciers et Moldus, alors il n’en était plus à froisser une personne près. Il finit de d’évoquer son point de vue sur une note un peu ironique. Mrs Rosier trouva intéressant ce que le moldu avait à lui raconter. Elle ajouta même que c’était bien plus intéressant que l’avis de la plupart des sorciers à qui elle avait eu affaire. Elle fit une courte pause avant de réagir de manière un peu plus précise. Elle semblait d’accord avec la réaction du jeune homme. Ce dernier apprit que le féminisme n’existait pas dans le monde des sorciers ; aucun combat officiel pour les femmes, bien que Elyssa fasse de son mieux pour améliorer les condition des sorcières mais c’était compliqué. Ce n’était pas quelque chose de très ancré dans l’esprit des sorciers.

«Dire qu’il n’existe pas, je pense que ce n'est pas tout à fait vrai. La preuve, vous faites ce que vous pouvez pour changer ça. Quelque part, est-ce qu’il ne suffirait pas d’une seule personne pour y croire pour que ça existe ? Cela dit, je pense que la situation n’est pas aussi désastreuse que vous me la décrivez. Même si beaucoup de sorciers ont une vision rétrograde et misogyne de la situation des sorcières, elle n’est pas aussi archaïque qu’on pourrait le croire. Par exemple, vous occupez tout de même un poste assez prestigieux. Et je ne vous parle même pas des mangemorts qui ont accepté de prêter allégeance à l’Augurey. Même si elle est la fille de… son père… elle reste tout de même une femme et tous ces hommes ont plié le genou devant Elle. Et je ne pense pas que les mangemorts soient un parfait exemple de tolérance. Je ne dis pas que la vie des sorcière est l'égale des hommes au quotidien. Mais je pense que vous avez les moyens de changer ça.»

Hybride… C’était un autre terme pour les sang-mêlés ? Elyssa avait encore prononcé ce mot… Et elle parlait également du statut des nés-moldus. La sorcière conclut finalement qu’une telle journée n’aurait qu’un impact très faible dans le monde sorcier, pour le moment, mais elle garda tout de même l’idée en tête, tout en rebondissant sur le message plein d’ironie de Raphaël à propos de la lingerie.

«Oh, je suis sûr que vous pourrez en trouver qui vous convienne dans des boutiques Moldues. Ça serait dommage de chambouler le train-train quotidien des Sorciers pour une paire de Culotte / Soutifs assortis. »

L’avocate lui fit une offre plutôt inattendue. Celle de devenir Ambassadeur du Conseil et de représenter officiellement les Moldus. Enfin, ce n’était pas une offre à part entière, puisque Raph savait très bien que ce genre de décision ne dépendait pas que d’elle mais elle avait un certain poids dans la décision finale. Cependant…

«Vous savez, j'appartiens à l’Ordre que depuis pas longtemps. Même si j’ai des projets, et que je suis motivé… Je pense qu’au sein de la branche Moldue, d’autres seraient bien mieux qualifiés que moi. Je rends régulièrement des comptes à Anita McThrew, je pense qu’elle a bien plus sa place que moi. Cependant, je garde quand même cette proposition dans un coin de mon esprit, si j’ai besoin d’être entendu.»

Raph avait extrêmement besoin d’être entendu, mais il ne pensait pas être le mieux placé pour ce poste. Anita était l’une des supérieures du français, même s’il n’y avait pas vraiment de hiérarchie à proprement parler. C’était elle qui gérer la branche moldue et était en étroite collaboration avec Harry Potter et Raphaël lui faisait souvent part de ses idées et de ses avis. Si quelqu’un méritait sa place à l’Ambassade, c’était elle. De toutes façons le jeune homme n’avait pas le temps pour ça.

«Dites moi Elyssa… Vous avez abordé le sujet des Né-Moldus un peu plus tôt… » Il ne pouvait pas refuser une perche pareille… Surtout après tout ce que Eirian lui avait dit la veille. «J’ai cru comprendre que les enfants sorciers issus de familles moldues étaient livrés à eux même. Je me demandais… Il y a des projets quelconque pour venir en aide à ses enfants qui sont complètement perdus ? Vous l’ignorez peut-être mais le Blood Circle diffuse des message public incitant ouvertement la population Anglaise à dénoncer tout acte de magie. Je crains que les parents moldus ne se laissent trop facilement influencé par ces messages de propagandes et ne se lancent dans des infanticides de masse. L’Information et la sensibilisation est un aspect de cette guerre qu’on ne doit pas prendre à la légère, et le Blood Circle a une avance considérable sur ce terrain là. »

Peut-être brassait-il du vent en parlant de ça ici et maintenant. Mais il ne pouvait pas laisser passer une occasion comme celle ci. Surtout qu’il était encore à chaud de sa discussion avec Eirian au cinéma et il était quand même pas mal remonté contre la sphère politique Sorcière avec ce qu’il avait appris récemment.

Raphaël savait parler ? Bah… Il se contentait simplement de formuler des phrases avec des mots, comme n’importe qui, oui. Raphaël rit doucement lorsque Elyssa affirma ne pas aimer être comparée à l’Augurey. Il ajouta à voix basse pendant qu’elle parlait. «Ce que je peux comprendre oui… » Raphaël également comprenait le point de vue de Elyssa, le Poids des femmes dans le monde des sorciers prenait de plus en plus d’importance au sein de la politique, mais ça ne voulait pas dire pour autant que leurs conditions étaient égales à celles des hommes. Les choses évoluaient , mais il n’y avait pas de “combat” en ce sens, pas d’étendard, pas de porte-parole : seulement des voix muettes.

Étrangement, Raphaël comprenait ce ressenti, c’était un peu ce qu’il vivait tous les jours. Il voulait que les moldus et les sorciers cessent de se battre les uns contres les autres et vivent ensemble. Même si plusieurs personnes étaient d’accord avec lui, il n’avait que très peu de soutien et ses messages de paix étaient noyés dans les flots de haine et d’hostilité que les différents camps s’échangeaient. Ses messages n’étaient que des fifrelins, des bagatelles, par rapport aux messages que diffusaient le gouvernement Kane, quant aux mangemorts ils avaient assez d’influence pour endoctriner les sorciers contre les Sorciers. Quand il voyait que même au sein de l’Ordre, il y avait des sorciers qui se méfiaient, voire détestaient, les moldus, ça lui faisait perdre tout espoir. Raphaël ne voulait pas leur jeter la pierre, il comprenait les raisons principales et il ignorait tout du vécu des autres membres de l’Ordre du Phénix… Il ne voulait juste pas que l’on jette toutes les pommes d’un panier parce qu’une seule était pourrie… Tout comme il ne blâmait pas tous les sorciers pour les erreurs de quelques mangemorts.  

«Je comprends ce que vous voulez dire… Enfin… Pas exactement dans le sens où je sais comment vous vivez les choses. Mais disons que je vois très bien ce que c’est que c’est que d’avoir l’impression de hurler pour s’exprimer, sans qu’aucun son ne sorte de ma bouche, sans que quiconque puisse entendre ce que je veux dire… Et que la vie continue son cours en s’en moquant royalement… »

L’avocate lui suggéra une place en tant qu’ambassadeur. L’offre le prit de court, ils venaient de se rencontrer et ils parlaient depuis… allez quoi ? Dix minutes ? Si elle proposait des places d’ambassadeur au premier connard à la gueule sympathique qui se présentait, il ne fallait pas s’étonner que la politique sorcière n’avance pas. C’était comme accrocher une chaîne de tronçonneuse à un dérailleur de vélo en espérant que ça fonctionne… À part risquer de se mutiler les jambes en pédalant, on n’avance à rien. Le jeune homme refusa l’offre, pour plusieurs raisons, mais Elyssa ne lâcha pas l’affaire. La sorcière rejeta ses arguments en prétendant que l’ancienneté n’était pas importante ou qu’il n’y avait pas vraiment de supérieurs hiérarchiques au sein de l’Ordre. Au final, elle n’insista pas davantage, de toutes façons elle ne pouvait pas forcer Raphaël à accepter un poste qu’il ne voulait pas.

«Désolé… Mais je ne suis pas d’accord. Peut-être que pour vous, ou pour les autres membres du Conseil, l’ancienneté n’a pas d’importance, mais ce n’est pas le cas de tout le monde ici. J’ai peut-être du potentiel, comme vous dites, mais les gens n’écouteront jamais un jeune moldu qui vient seulement de mettre un pied votre monde. Ce n’est pas une supposition, c’est une affirmation. Je pense que je suis mieux à ma place, si je peux glisser mes idées, mes avis, à des personnes qui sauront parler aux bonnes personnes, cela me suffit amplement. Mais m’accorder plus d’importance que ce que j’en ai actuellement… Je pense que… À mon avis ça serait mal vu au sein de l’Ordre. Je pense que ça créerait des tensions, ou des dissidences. Peut-être que je réfléchirai à cette offre si plusieurs personnes me le suggèrent, mais dans l’état actuel des choses… Je pense que ce n’est pas une bonne idée.»

Il réfléchit un instant à ce qu’il voulait dire à propos de la hiérarchie au sein de l’Ordre.

«Vous avez peut-être raison à propos du fait qu’Anita n’est pas ma supérieure, et que vous n’êtes pas la sienne. C’est un avis qui n’engage que moi, mais je pense qu’avoir une système hiérarchique, c’est quand même important. Je suis d’accord sur le fait que chaque membre ait une importance, et j’en profite pour vous remercier de l’intérêt que vous me portez, mais il faut des leaders capables de trancher pour certains désaccords. Même si Anita n’est pas ma supérieure officielle, je me fie à son expérience et à ses relations dans le monde sorcier pour ses décisions.»

Il changea ensuite de sujet, profitant de l’occasion pour parler des conditions d’intégrations des enfants né-moldus dans le monde magique. L’Histoire de Eirian, était vraiment pas des plus joyeuses, même s’il s’en était plutôt bien sorti. La réponse d’Elyssa était des plus vaseuse. “Nous avons conscience du problème” “C’est difficile, on doit se mettre d’accord” “Je ne peux rien vous dire de plus, mais nous faisons de notre mieux” “C’est compliqué”. Tellement prévisible… Eirian ne lui avait décidement pas menti, la politique sorcière ressemblait très étrangement à celle des moldu. N’empêche, quelle veine que juste au moment où il évoque les conditions des enfants né-moldus, dont le Ministère de la Magie se contrefiche totalement depuis des décennies, le Conseil d’Administration était en train de délibérer dessus. Pour une sacrée coïncidence, c’était une sacré coïncidence. Raphaël répondit d’un ton un peu sec.

«Je vois… Bon je vais pas vous déranger plus que ça Elyssa. Vous devez surement avoir des choses à faire. Bonne journée à vous.»

Ce n’était pas parce qu’il était amoureux d’une Poufsouffle qu’il fallait se permettre de le prendre trop pour un blaireau.

Elyssa exprima son désaccord. Elle n’était pas d’accord sur le fait que les gens se moquaient de l’avis de Raphaël.

«Oui oui, vous avez raison. C’est une façon de parler, je sais bien que je ne suis pas réellement seul contre tous. Je sais que y’a des gens qui croient en moi, mais faut je sais surtout que je ne fais pas l’unanimité. »

Et les sorciers avaient de bonnes raisons de se méfier des moldus. Le françaisne pouvait pas leur rentrer dans le lard en leur disant que non, tous les moldus n’étaient pas des monstres et qu’il fallait agir pour la paix. Pour beaucoup qui avaient de réserves, ils se prétendaient prêt à agir pour la paix, mais que c'étaient les moldus qui les en empêchait et qu'ils ne pouvaient donc pas attendre de se faire massacrer pour agir. Encore une fois, Raph ne blâmait personne, il se sentait juste impuissant. Il voulait rallier peu à peu un maximum de personne à sa cause, lentement mais sûrement, et pacifiquement. Le soucis était que de plus en plus de personnes considéraient qu’un point de non-retour avait déjà été atteint.

Être ambassadeur pouvait être un moyen comme un autre de donner plus de poids à ses paroles. De parler plus facilement aux bonnes personnes aux bons moments, de gagner en crédibilité auprès d’autres. Mais à ses yeux, il ne méritait pas cette place. Enfin, ce n’était pas qu’il ne la méritait pas, mais il considérait que d’autres étaient plus méritants. Elyssa clarifia les choses ; non elle ne lui faisait pas d’offre, elle n’en avait pas le pouvoir, elle lui suggéra juste cette alternative. Pour le reste : advienne que pourra.

«Oui oui, je comprends bien que ce n’est pas une “offre d’emploi” que vous me faites. Vous avez raison en bien des points, j’avoue. Je ne sais pas si les gens sont prêts à voir un moldu dans un poste d’ambassadeur. Après comme on le disait plus tôt, le monde bouge, les moeurs changent. J’y songerai… Mais je ne vous cache pas que vous êtes la première à me suggérer ça, et que l’avis d’autres personnes me rassureraient quand même. Mais dans tous les cas… Merci pour votre soutien.»

Même si ce soutien sortait un peu de nulle part, qu’il venait seulement de rencontrer l’avocate, cela lui faisait chaud au cœur. Mais cette chaleur bienveillante ne resta pas longtemps lorsqu’il aborda le cas des né-moldus. À la bonne heure, ils étaient, comme par hasard, justement en train de débattre sur le sujet. Ah il manquait juste le petit “Merci de votre compréhension” et il avait eu la réponse cliché de la personne qui voulait pas qu’on l’emmerde avec des questions gênantes. Le sang de Raph ne fit qu’un tour. Il avait mal. Ça lui faisait mal de sentir qu’on le prenait pour le dernier des pigeons, et de manière aussi grossière. Pourtant, il savait à quoi s’attendre, il avait suffisamment parlé de Politique avec Eirian la veille pour comprendre qu’ils étaient tous corrompus. Le cœur décisionnel du monde sorcier était maintenant régi par le Conseil Administratif, mais visiblement, ça ne changeait pas grand chose à la corruption et au mensonge. Il voulut mettre un terme à cette discussion qui allait s’annoncer stérile. Il n’avait probablement pas su mettre les formes pour prendre congé car Elyssa le retint ; il faut dire qu’il n’avait même pas essayé de cacher son agacement. Elle le sermonna à propos du fait qu’il critiquait ceux qui sacrifiait de leur temps et de leur énergie pour trouver des solutions qui conviennent à tout le monde tandis qu’il restait le cul assis sur une chaise. Il fronça les sourcils.

«Il ne me semble pas vous avoir fait la moindre remarque. Mais effectivement, je suis terriblement déçu par… »

Elyssa le coupa, elle n’avait pas fini. Son ton était cependant redevenu plus calme, elle le complimenta sur son investissement dans l’Ordre, mais... Mais elle ne pouvait pas tolérer qu’il bafoue ainsi ce pourquoi beaucoup ici se battaient. En fait, plus la sorcière parlait, et plus il avait l’impression qu’elle était sincère. Est-ce qu’elle était en train de lui retourner le cerveau ? Après tout, elle était avocate et siégeait au conseil où elle devait convaincre des mangemorts butés de se rallier à sa cause. Parler, c’était son métier. Elle avait un charisme que le jeune homme n’aurait jamais. Ses arguments étaient valides. De ce qu’il en savait, la mère de Harry était une né-moldu, quant à Hermione Granger… Ce nom lui disait quelque chose. Il l’avait lu quelque part. C’était pas elle qui avait fait les annotations dans la version moldue des “Contes de Beedle le Barde” pour que ça soit compréhensible pour un public moldu ?

«Je pense que je vous dois des excuses. Vous avez raison en tout points. Pardonnez ma réaction mais… J’ai eu vent hier de la situation des sorciers issus de familles moldues, ainsi que du laxisme du ministère ces dernières décennies sur ce sujet là. J’avais un peu le sentiment que la sphère politique moldue ainsi que la sphère politique sorcière se ressemblait un peu trop, et ce n’est pas un compliment. Je dois avouer que quand vous m’avez dit que c’était un sujet sur lequel vous travailliez, je ne vous ai pas cru. Je suis d’accord avec vous, en tout point. et j’espère vraiment que vous ne m’aviez pas menti. Je me permet juste de vous contredire sur un point. Je ne critique pas votre travail. Je sais que chacun ici fait de son mieux, et je suis loin de me sentir au dessus de tout le monde, aussi bien courage, qu’en intelligence ou qu’en implication. Oui, je vous ai mal jugée, parce que la coïncidence me semblait bien trop grande, et c’est pour ça que j’avais préféré mettre fin à cette discussion que j’imaginais stérile. Encore une fois, je me dois de vous présenter des excuses. Nous sommes dans le même camp, et nous partageons le même combat, je n’avais pas à remettre votre parole en cause.»

Il espérait ne pas faire erreur cette fois, et que son Mea Culpa soit la bonne chose à faire. En tout cas, il se sentait bien honteux de ce quiproquo. À vouloir bien faire, il s’était laissé emporter et il avait manqué cruellement de tact. Cela dit, c’était ce même manque de tact qui avait donné l’opportunité à Elyssa de remettre le point sur les i.

Elyssa avait bien raison. Quand on se lançait dans un combat, il y avait forcément des gens en désaccords. Si ça en valait la peine, ça il ne saurait pas le dire. Vu le peu de résultat qu’il avait, il avait l’impression de “pisser dans un violons”, comme disait souvent sa mère. Il avait l’impression de simplement brasser du vent et de faire chier les gens. Il ne lâchait pas prise, il avait quelques personnes qui comptaient sur lui. Mais ces quelques personnes n’étaient que quelques gouttes de miel dans un océan de sel. J'sais pas d'où je sors ça, mais j'trouve ça beau La douceur de leur foi n’était qu’un maigre réconfort en comparaison du venin corrosif que pouvaient lui cracher certains.

L’avocate lui glissa l’idée de se présenter en temps qu’ambassadeur. Même si Raphaël était touché par la suggestion, il ne la considéra pas comme étant une bonne idée. Il avait le sentiment qu’une telle initiative créerait davantage de tensions au sein de l’Ordre. Et puis, qui écouterait l’avis d’un moldu ? Probablement pas grand monde… Mais d’un autre côté, si le dît-moldu avait le statut d’ambassadeur, peut-être qu’il serait un peu plus pris au sérieux ?  Il refusa tout de même la proposition, dans un premier temps, tout en promettant d’y réfléchir si quelqu’un d’autre abordait le sujet avec lui. Elle l’encouragea finalement à prendre son temps à y réfléchir.

Raphaël profita d’une perche qui lui était tendue pour évoquer la situation des sorciers issus de familles moldus. Le moldu surinterpréta la réponse d’Elyssa et lui répondit donc un peu froidement avant de tenter de mettre un terme à la discussion. Mais l’avocate ne lâcha pas l’affaire, et mit les choses au clair afin de dissiper tout malentendu. Le haussement de ton de la sorcière ainsi que ses arguments permirent au français de comprendre son erreur. Il expliqua son point de vue, et les raisons de sa réaction disproportionnée et s’excusa auprès de la femme. Cette dernière accepta ses excuses en éclaircissant un peu la situation qu’elle même vivait au sein du conseil. De son aversion pour la Politique et des sacrifices qu’elle devait faire, pour le bien de tous, pour pas laisser les pleins pouvoirs aux Mangemorts.

«Oui… C’est vrai qu’on n’a rien sans rien. On peut être amené à agir contre nos principes pour pouvoir justement mieux se battre pour eux.»

Raphaël soupira longuement, pour relâcher la pression tandis que Elyssa en profita pour reprendre la parole.

«L’Histoire de Poudlard ? Je note ça dans ma tête. Mais je suis au courant de l’histoire de Harry Potter et de Voldemort. Enfin, peut-être pas des détails, mais je connais les grandes lignes, après tout c’est un peu grâce… ou plutôt à cause de ça, vu les circonstances, que l’Ordre du Phénix existe.»

Le moldu se fit toutefois la réflexion qu'avoir un livre qui porte le nom “Histoire de Poudlard” dans le Londres Moldu, ce n’était peut-être pas la meilleure idée au monde, et ce même si l’ouvrage était “Moldu-Friendly”. À quel point le Blood Circle connaissait le monde sorcier ? Cependant, Raphaël réfléchit à l’idée d’avoir un genre de bibliothèque en libre-service à Square Grimmaurd. Un petit début de projet commençait à germer dans sa tête. Il n’était pas le seul moldu de membre de l’Ordre du Phénix à qui le monde sorcier était inconnu. Quant aux sorciers… Il n’avait aucun doute sur le fait qu’ils étaient nombreux à ignorer totalement ce qu’était le monde Moldu. Il hésita à parler de cette histoire de bibliothèque à Elyssa, et se dit que ça pourrait faire un bon sujet pour un autre RP qu’il valait mieux éviter un autre malentendu, pour aujourd’hui, et profiter que la conversation soit apaisée pour se quitter en bon termes.

«Et bien… J’espère que vous parviendrez rapidement à un accord pour faire bouger les choses. Je suis content d’avoir fait votre connaissance Elyssa, et que vous ayez eu la sagesse de dissiper ce malentendu. Encore une fois, je suis désolé pour ma réaction un peu hostile.»