Sainte Mangouste, un hall bondé, des sorciers qui apparaissaient avec des gens blessés ou avec un bracelet au poignet, puis qui repartaient dans la seconde pour ramener d’autres personnes. Théo eut besoin déjà de quelques secondes pour se remettre dans le bain, son regard scrutant les personnes autour de lui comme si un moldu allait être présent ici et de nouveau, tout foutre en l’air. Sa main dans celle de Sélénya qu’il n’avait pas lâché depuis tout ce temps, il lui fit un signe de tête pour montre qu’ils bougeaient. Se déplacer entre toutes les personnes choquées ici, ce n’était pas une mince affaire et puis il n’osait bousculer personne, de peur que ça effraie Sélénya. Arrivé à l’accueil, il fit la moue, les personnes entassées devant les standardistes étaient nombreuses, trop nombreuses, ce ne serait pas ainsi qu’il aurait la réponse à sa question. Il cherchait donc Adèle, Alcyone et Hestia du regard parmi toutes les personnes mais impossible de les apercevoir, il y avait trop de monde. Sauf que rester dans le flou, c’était encore plus insupportable. Il entraîna donc une nouvelle fois Sélénya dans son sillage, comptant aller directement dans le bureau de sa mère pour se renseigner.

En réalité, il n’en eut pas du tout besoin, alors l’idée était bonne mais la réalisation foireuse puisque ce fut sa mère qui lui tomba dessus plutôt qu’autre chose. Passé la surprise du câlin en public… bonjour le manque de respect et le surnom balancé devant plein de monde, il questionna « Alcy est ici ? On a été » Elle le coupa mais sans pression « Tu veux dire Alcyone ? » Ah ça y est ça commençait c’était parti, la lourdeur de la mère qui n’avait pas tellement digéré le coup des enfants Greengrass lors du repas. Théo prit une profonde inspiration, montrant déjà toute l’étendue de son agacement, il était épuisé, ses nerfs étaient pour le moins à vif, ce n’était peut-être pas le meilleur moment pour lui casser les pieds. Elle sembla le comprendre puisqu’elle hocha la tête avant de lui dire qu’elle avait pris une balle. Bien entendu, il n’eut pas besoin de lui demander de l’accompagner, ça coulait de source qu’il voulait rejoindre sa sœur, probablement même que ses traits s’étaient tirés instantanément à la seconde où le cerveau avait percuté qu’elle avait été blessée, gravement. Il était dans l’incapacité de parler, serrant juste la main de Sélénya dans la sienne, écoutant la voix, pas du tout apaisante pour l’occasion, de sa mère. Ça, il se doutait assez bien qu’elle s’était inquiétée pour lui en voyant Alcyone dans cet état, il aurait bien aimé faire le fier et dire qu’il avait géré de son côté mais étant donné qu’elle venait de balancer dans la phrase d’avant qu’il avait une sale tête il garda le silence. Elle enchaînait, rare qu’elle parle autant, le stress d’avoir craint pour la vie de ses enfants à coup sûrtu remarqueras que j’ai pas dit son enfant ^^ c’est voulu, je suis sûre qu’elle kiff sa fille au fond… très au fond. Lorsqu’elle parla du fait que leur père avait craint pour la vie d’Alcyone, Théo se retint de faire de l’humour, plus parce que Sélénya était à côté que par sensibilité envers ses parents, en demandant s’il c’est parce que ça faisait tâche sur la tombe de marquer tué par des moldus. Ce n’était pas ça, c’était pire, il s’immobilisa en l’écoutant dire mais normal que ça aurait fait capoter leur arrangement avec les Dimitrov si elle était morte. Wouahou… tant d’amour de la part d’un père, ça faisait chaud au cœur. Théo persiffla « Ah c’est vrai, que c’est directement la chose à laquelle j’ai pensé… ciel une alliance en moins… comment la famille va s’en remettre. » Pourvu qu’il ne vienne pas la voir, elle allait devenir folle sa soeurette si elle était clouée dans son lit et qu’elle était obligée de se farcir le genre de phrases bien ringarde que son père pouvait sortir.

Il laissa Sélénya sur un banc, non loin de la chambre, avec un verre d’eau même s’il n’était pas certain qu’elle boirait. Puis, il posa sa main sur la poignée avant de regarder sa mère. « Il vaut mieux que j’y aille seul. » A la vérité, la dernière discussion qu’il avait eu avec sa sœur s’était soldée par le fait qu’elle lui avait fait comprendre que le fait qu’il essaie de protéger des gens l’ayant obligé à se fiancer n'était pas apprécié et elle l’avait laissé. Il n’était donc pas certain qu’elle ait très envie de le voir et si c’était le cas, il n’avait pas envie qu’il y ait des témoins. Ce que sa mère comprit en revanche, il n’en savait rien et s’en moquait pertinemment, dans tous les cas, il eut gain de cause puisqu’il fut le seul à pénétrer dans la chambre.

Son regard se posa immédiatement sur le lit de la demoiselle. Bien qu’il ait eu conscience durant tout le temps de son trajet qu’elle avait été en danger, ce n’est qu’à cet instant précis qu’une boule se forma dans sa gorge tandis qu’il se rendait compte qu’il avait faillit la perdre. Il resta immobile quelques secondes sur le pas de la porte avant de s’avancer vers le lit, cherchant ses mots à chaque pas. Et si aucun mot n’était assez fort pour exprimer ce qu’il ressentait, la peur, le soulagement, l’amour, la culpabilité. C’est donc un baiser qu’il déposa en tout premier lieu sur sa joue, essayant de lui transmettre tout ce qu’il ressentait. Son regard croisant alors brièvement celui de sa sœur, il se lança « Je suis venu dès que j’ai su. » Il fit une légère pause tandis qu’il réfléchissait avant de continuer « Je suis désolé pour ce que je t’ai demandé. Si c’était à refaire, je ne te demanderais rien et je resterais avec toi. » Il planta son regard dans le sien, bien plus sûr de lui « Tu es bien plus importante qu’eux à mes yeux, je regrette de t’avoir sûrement laissé penser le contraire tout à l’heure. J’ai eu tort. »

Que c’était étrange de se retrouver ici non pas comme praticien mais bien en tant que frère. Ne rien pouvoir faire, être arrivé après la bataille. Elle s’était retrouvée seule, il ne se méprenait pas, leur mère avait beau être un médicomage tout ce qu’il y a de plus talentueux, elle n’avait certainement joué la carte figure maternelle, sûrement qu’aucune main n’était venue se glisser sur celle d’Alcyone pour l’aider à supporter tout ça, pour la rassurer, pour lui transmettre de l’affection. Il aurait voulu être là pour l’envelopper de ce lien familial, lui montrer qu’elle n’était jamais seule, même lorsqu’elle pensait qu’il l’avait abandonné. Le soulagement, le véritable soulagement se glissa doucement en lui lorsqu’il entendit le son de sa voix. Elle ne le chasserait pas en se sentant toujours trahie par les actions précédentes de son frère. Il eut une légère grimace en entendant que leur mère n’avait même pas essayé de la réconforter. Il ne servait à rien d’essayer de défendre cette dernière, elle était véritablement catastrophique lorsqu’elle s’adressait à Alcyone sans que Théo ne comprenne pourquoi. Au moins, ils étaient ensemble, pas des plus en formes, mais en vie et c’était tout ce qui comptait. « ça fait longtemps que tu es ici ? Elle parlait beaucoup, je n’arrivais pas à en placer une et à lui poser des questions. »

Tandis qu’il s’excusait pour son comportement, elle vint prendre sa main. Leurs regards se croisèrent, enfin. Elle avait l’air abattue, dure journée pour elle, entre la douleur de s’être pris une balle et d’avoir vu son sang couler en grande quantité d’après ce qu’avait cru comprendre Théo, non parce qu’il n’avait pas non plus eu tous les détails. Il se doutait juste que si elle était encore couchée, c’est que ça avait été assez grave. En plus de la douleur, la peur de perdre la vie, la peur pour ses amis et en arrivant ici, le constat que sa mère ne serait pas cette épaule sur laquelle se reposer. Elle était impulsive, comment le lui reprocher, comme s’en étonner puisqu’il était exactement le même. Il ne s’y était peut-être pas pris de la meilleure des manières pour lui demander cela. Au moins, elle avait conscience qu’il n’avait pas à chercher à couvrir les agissements de son père par amour envers celui-ci. Non, ce n’était pas le cas mais faire tout exploser pour des convictions qui différaient, il en était bien incapable. Quelque part, ne leur devait-il pas aussi loyauté, ni lui, ni Alcy n’avait était déshérité, quand bien même leurs parents les trouvaient insupportables et décevants au possible, s’ils faisaient l’effort. Théo pouvait aussi faire le sien et fermer les yeux sur les pratiques douteuses, sauf que si ça s’était su aujourd’hui, le raz de marée serait pour toute la famille sans exception, pas uniquement le paternel. « J’aurais du m’y prendre différemment, je sais que c’est pas facile pour toi avec eux en ce moment. » Disons que ça ne l’avait jamais été, mais depuis les fiançailles, c’était encore pire.

Il répondit à la demande silencieuse et s’installa à ses côtés, écoutant la suite de ses propos. Comment auraient-ils pu prévoir ce qu’il adviendrait lorsqu’ils se sépareraient. Ça les avait probablement desservis de s’inquiéter l’un pour l’autre. C’était une réaction tout à fait normale de s’inquiéter mais si elle l’avait cherché autant qu’il l’avait cherché, forcément elle avait été moins concentrée sur sa personne et elle terminait avec une balle dans le ventre. « J’ai eu peur aussi. Ce n’est qu’en ouvrant la porte et en te voyant que la peur a disparu, parce que j’avais enfin la preuve sous les yeux que je n’avais pas perdu ma sœur. » Il l’observa, crispé lorsqu’elle se redressa, elle était extrêmement raide. A quel moment personne ne lui avait donné de potions ? Son regard balaya rapidement l’espace autour d’eux pour voir s’il n’y avait pas une potion qui traînait dans les parages pour la fournir à sa sœur. Sauf qu’elle le prit au dépourvu, ce n’était pas tant le fait qu’elle le prenne dans ses bras, ça, ça arrivait régulièrement. Non, ce qui le surprit c’était les mots qu’elle prononça. Il passa ses bras autour d’elle tout attendri. Ce n’était pas une surprise, quelque part il l’avait toujours su qu’elle l’aimait, ça se voyait dans leur entente, dans leur complicité mais c’est une chose de le savoir, c’en est une autre d’entendre Alcyone le dire « Je t’aime aussi. » La perdre aujourd’hui, il ne s’en serait remis, alors il savourait ce moment qui n’appartenait qu’à eux.

Lorsqu’elle s’écarta, elle parla des moldus, de  ces emmerdeurs en puissance qui devaient avoir bien des vies merdiques pour avoir comme objectif dans la vie de casser les pieds à tout le monde… Oui, un peu comme leur père comme c’est étrange. Il compléta les dires de sa sœur « Un cauchemar. »  En parler ne les aiderait pas, faire comme si rien ne s’était passé non plus bien sûr mais en parler c’était pour le moment légèrement compliqué pour Théo qui avait l’impression que son monde venait de s’effondrer et qu’il demeurait aussi impuissant que les autres face à la violence de moldus armés, son moral en avait pris un coup et encore plus en constatant qu’il n’avait pu venir en aide ni à sa sœur ni à la Poufsouffle qui n’était certes pas blessée mais qui ne respirait pas franchement la joie de vivre.

Pour les trois personnes qu’elle citait, Théo n’en avait pas la moindre idée, en revanche, il voyait mal sa mère dire des choses fausses juste pour faire taire Alcyone, il y avait bien des moyens de réduire la Serpentarde au silence, nul besoin de lui faire croire des choses fausses. « Je ne suis sûr de rien mais je pense qu’elle t’a dit la vérité les concernant, sinon elle t’aurait dit la même chose qu’à moi, je ne peux pas me souvenir de tout le monde. » S’il ne pouvait pas lui donner de nouvelles des camarades avec qui elle avait vécu cette épreuve, il pouvait lui donner des nouvelles d’une autre demoiselle qu’elle connaissait et avec qui elle s’entendait plutôt bien puisque Sélénya avait été mise au courant des fiançailles entre Alcyone et Dimka, c’est donc qu’elles se côtoyaient encore « Moi, je peux te donner des nouvelles de Sélénya, j’étais avec elle. Elle n’a pas été blessée, physiquement elle va bien… moralement en revanche, je n’en suis pas sûr. » Il était plutôt sûr de l’inverse en fait.

Observant sa sœur, son regard suivit le regard de cette dernière pour voir le flacon contenant la potion… remplie. Ah, il allait falloir qu’elle se force un peu la mistinguette si elle voulait ne plus souffrir à chaque mouvement. Il n’eut pas le temps d’essayer de la convaincre qu’elle reprit la parole pour parler de leur mère. Difficile de comprendre comment c’était possible une telle différence, nul besoin de faire souffrir Alcyone en lui disant qu’à la seconde où elle l’avait vue, elle lui avait sauté dessus. Il ne pouvait pas non plus prétendre qu’elle avait été comme ça parce qu’elle n’avait qu’un enfant sur deux, si ça avait été lui, elle n’aurait déjà pas quitté la pièce, il le savait. Il lia ses doigts à ceux de sa sœur « Je sais à quoi tu penses. Ils ont tort de croire que je vaux mieux que toi sous prétexte que je suis un homme. Je ne vaux pas mieux que toi Alcy, loin de là. » Oh ça non, au vu de se relation avec Sélénya, il valait beaucoup moins que sa sœur. Il reprit la parole, la regardant dans ses yeux « Je ne serais jamais l’héritier qu’ils attendent de moi, ils peuvent s’accrocher pour que je transmette le nom, ils misent sur la mauvaise personne depuis le début. Et tu sais quoi, si eux ne sont pas capable de te reconnaître à ta juste valeur, sache que moi je suis heureux de t’avoir pour sœur.  Je t’ai attendu impatiemment, j’ai cru que tu n’arriverais jamais et je crois que je n’ai jamais eu de plus grand sourire que le jour où tu es venu au monde et que j’ai pu te tenir dans mes bras. » Il poussa un soupir « Je sais que c’est injuste, que tu ne mérites pas ça et que ça ne te consolera sûrement pas mais moi je suis là pour toi, je serais toujours là pour toi, tu es ma famille. »

Alors Le A c’était pas Alcyone du coup ! que sa sœur parlait du fait qu’elle était dans un état pour le moins second depuis qu’elle était ici, ce qui voulait dire que leur mère avait été prévenante avec sa fille et qu’elle avait dû lui jeter un sort pour qu’Alcyone dorme afin de reprendre des forces, et que les médicomages avaient retiré un machin argenté de son bras, le regard de Théo se posait sur cet étrange objet. Il n’avait jamais reçu ça dans son corps mais d’après ce qu’il savait, c’était extrêmement douloureux et que sa sœur ait dû subir cela, son sang se glaça. Il aurait donné n’importe quoi pour échanger les rôles, quoi que non, il ne lui aurait pas donné le bracelet qu’il portait à son poignet, juste se prendre sa balle, lui épargner sa douleur et ce teint si pâle. Malheureusement, il ne pouvait revenir en arrière et devait juste attendre qu’elle se rétablisse tout en étant soulagé qu’elle soit en vie. Son regard revint se poser sur elle tandis qu’elle constatait qu’un si petit bidule pouvait faire autant de dégât. « Peut être qu’on va devoir en venir à ces extrémités là nous aussi. Si la magie n’arrive plus à tenir les moldus à distance, il va falloir qu’on prenne leurs armes pour les retourner contre eux. » Clairement, ce discours, s’ils n’avaient pas été que tous les deux, jamais il ne se serait permis de le dire à haute voix. Et en disant cela, il avait l’impression de ressembler à son père et, cela lui déplaisait fortement, c’est pourquoi il demanda « Tu crois que détester les moldus ça me rapproche un peu des idéaux de Papa et que je lui ressemble ? » Il n’avait pas envie de l’entendre dire oui, pas envie de ressembler à cette personne qu’il trouvait archaïque, mais qui de mieux que la personne vivant sous le même toit que Papa Greengrass pour dire si oui, ou non, il commençait à songer comme ce dernier.

La suite restait centrée sur la famille Greengrass, s’il pensait que c’était tendu entre Alcyone et leurs parents depuis les fiançailles avec Dimka, elle lui rappela la vérité. Ça avait toujours été difficile pour elle. Pourtant, il était le premier témoin des efforts qu’elle faisait pour essayer de correspondre à cette image qu’ils attendaient d’elle, sans que jamais ça fonctionne. Longtemps, il avait craint qu’en voyant la différence entre elle et lui, Alcyone finisse par reporter toute sa frustration sur lui et qu’elle le tienne responsable de cela. Ce n’était pas le cas, elle ne l’avait jamais traité en ennemi et il lui en était infiniment reconnaissant. Il n’avait pas encore répondu à sa phrase, comme s’il culpabilisait un peu que l’amour ne soit pas partagée à cinquante pour cent entre les deux enfants, mais la main d’Alcyone vint se saisir de la sienne tandis qu’elle le faisait s’asseoir à ses côtés, ce qui le poussa à répondre « Ils sont insupportables, je reconnais. J’espère que tu ne seras jamais comme ça avec tes enfants. »
Si elle ne termina pas sa phrase, il percuta ce que ça voulait dire et serra doucement ses doigts, pour lui apporter le réconfort nécessaire. Oui, probablement que sans eux, elle serait morte, et pourtant, au fond de lui, Théo aurait préféré que ce soit l’un d’eux qui se prenne cette balle plutôt qu’Alcyone mais c’était injuste. La seule note positive qu’il tirait d’aujourd’hui c’est qu’ils étaient en vie tous les deux, qu’ils pouvaient se faire un câlin et se dire qu’ils s’aimaient. Mais qu’avait-il fallu pour qu’ils se le disent, des blessés, des morts et cette peur viscérale de se perdre et que leur dernier moment ensemble soit une dispute pour des broutilles.

Le sujet dévia sur les amis d’Alcyone et tandis qu’il parlait de cette amie qu’il avait laissé sur un banc le temps de parler à sa sœur, son cœur se serra en entendant Alcyone soulever le fait que Sélénya devait revivre certains souvenirs pas des plus agréables. Il souffla « En rajouter de nouveaux. Elle a vu quelqu’un mourir, elle m’a vu me faire taper par un moldu. La nuit va être compliquée. » Il poussa un soupir avant de réfléchir à haute voix « A moins que je lui demande si elle veut qu’on dorme ensemble. » Oui, il ne serait pas tout seul, chose dont il n’avait pas vraiment envie et avec un peu de  chance, il permettrait à la demoiselle de dormir paisiblement, il ne trouvait pas l’idée mauvaise du tout.

Le fait de parler de leur famille, de son amour pour cette sœur qui existait chez lui depuis le premier jour, tout ça fit que les défenses de sa petite sœur cédèrent. Logique au vu de cette journée de merde et de leurs parents non présents pour elle. Lui, il était là, certes, ce n’était pas pareil. Elle aurait préféré ses parents et il comprenait mais il était là et caressait doucement son dos, la laissant craquer en paix, sans dire le moindre mot pour ne pas qu’elle se sente obligé de s’arrêter. Ça prendrait le temps que ça prendrait mais il restait patient à ses côtés, regardant ses mains trembler, dû à la fatigue certainement. Puis, finalement, elle sembla se calmer assez pour parler. Il l’observa attentivement, ce dilemme, il l’avait vécu, l’envie de tout plaquer et de ne plus les voir, sauf qu’il y avait cette sœur entre ces murs, dans une chambre voisine de la sienne et ça aurait voulu dire l’abandonner elle aussi ? Il n’avait pu s’y résoudre. Elle avait raison, ils ne lui ficheraient jamais la paix, c’était peine perdue ça, c’était des sangsues quand ils voulaient les parents.  Ne plus être sous leur toit mais rester dans la famille, c’était peut-être le meilleur plan en effet. Elle n’était pas loin et ils auraient l’impression que c’était toujours eux deux qui tiraient les ficelles. Des fois, ils étaient quand même bien naïfs. Il se tut durant tout le temps qu’elle parla. Ce n’est que lorsqu’elle s’arrêta de parler qu’il s’apprêta à répondre, sauf qu’il vit que sa poitrine se soulevait plus rapidement, signe qu’elle n’était pas au mieux de sa forme. Théo tendit donc le bras pour s’emparer de la potion en premier lieu et là lui tendre « Il faut que tu la boives, ça va aider ton corps à reprendre des forces. »  Une fois cette petite parenthèse santé effectuée, il répondit à ses propos « Ma proposition tient toujours, ce n’était pas une proposition en l’air, j’étais très sérieux. Et tu veux savoir, même si tu étais un poids lourd que je me traînerais, je m’en fiche, tu es ma sœur et ça ne me ferait pas changer d’avis. Je n’ai pas besoin d’aide financière ou autre, concentre-toi sur toi. » Pour montrer à quel point il était sérieux dans ses propos, il attrapa le trousseau de clé dans sa poche pour en défaire le deuxième exemplaire de la clé de chez lui avant de la tendre à sa sœur et de dire solennel « Tant que tu le souhaiteras, ma demeure est la tienne. »

Les propos de sa sœur furent un véritable soulagement, il ne ressemblait pas à son paternel même lorsqu’il tenait ce genre de propos. Voilà qui était rassurant. Elle enchaina, sans grande surprise elle détestait la personne lui ayant fait ça. Pour le coup, Théo aussi, il détestait chacune des personnes ayant mis les pieds à l’université. Elle soulevait un autre point, un point intéressant, le monde moldu n’était pas entièrement noir. Tout ces gens qui n’avaient rien fait, ils auraient été injuste de les punir pour des crimes commis par une poignée. Exactement de la même façon qu’ils seraient injustes de décréter que le frère et la sœur étaient des mangemorts à cause des actions de leur paternel. « Non, tu as raison, il faut faire la part des choses mais je peux te parier qu’au prochain repas de familles, on va entendre parler de représailles de la part de Papa sur des moldus qui n’étaient même pas là-bas. Et ça va être un cercle vicieux, il y aura de plus en plus de nouvelles recrues chez les mangemorts et chez le Blood Circle. »

Parler des enfants d’Alcyone semblait être la petite parenthèse joyeuse au milieu de toute cette journée pourrie. Bien que ça la fasse tousser de dire qu’elle se vengerait sur ses gosses. Ah bah oui non mais ça c’était le karma. Théo roula des yeux avant de plaisanter à son tour « Bonne idée, comme ça ils kifferont leur tonton ! J’ai déjà prévu de saper ton autorité, quand tu les gronderas, je dirais oh Alcy voyons, ne les embête pas, tu étais pire. »

Si parler de ses futurs enfants, pour peu qu’elle en aille bien entendu, chose que personnellement Théo ne souhaitait à personne, c’était un sujet joyeux. Bien vite, la pièce où ils étaient leur rappela la journée de merde qu’ils avaient passé et la demoiselle qui devait être sur un banc, à ressasser les évènements. Evidemment, parler de Sélénya, c’était parler de lui, vu qu’ils avaient été ensemble du presque début, à la fin et donc parler du fait qu’un des moldus était un peu tombé sur Théo avec brutalité. Il se laissa docilement faire par sa sœur tandis qu’elle constatait l’étendue des dégâts par elle-même. Pour le moment, l’adrénaline courrait encore dans ses veines, laissant la douleur de côté, il lisait juste dans son regard que ce n’était pas juste une peau rougit par la baffe d’un père. Puis ayant fini de vérifier, elle observa le bracelet, de ce fait Théo fit de même avant de répondre à sa question « Ils ne sont pas douloureux, ni rien, et ils ne sont pas ultra lourd donc pas vraiment de gêne physique. Mais impossible de faire la moindre étincelle de magie. Le fait qu’on ne les sente pas est encor plus traitre à mon sens parce qu’on oublie qu’ils sont là assez facilement et quand on tente de faire de la magie, on a ce moment d’incompréhension en constatant que ça ne marche pas avant de se souvenir. » Il fallait attendre que quelqu’un trouve une solution et en attendant, il fallait apprendre à vivre comme un moldu, chose qui n’emballait pas du tout le jeune homme qui avait l’impression d’avoir été amputé.

Heureusement, il y avait que la magie qui avait disparu, ses savoirs, ils les avaient toujours et pouvait s’en servir. Il pouvait se raccrocher à ce qu’il savait faire sans magie, faire boire des potions. Pour le coup, c’était exactement la même que Sélénya, elle prenait la potion sans trop de mal mais précisait que c’était immonde à boire. Il haussa un sourcil en l’entendant parler de suppositoire et esquissa un sourire « En vrai, c’est une bonne idée pour convaincre les réfractaires. Le premier qui me dira qu’il veut pas de potions, je lui dirais que j’ai des suppositoires s’ils préfèrent. Je suis sûr qu’ils vont être beaucoup moins réticent à boire mes potions. » Bon au vu de la tête qu’Alcyone tirait, la potion n’avait pas vraiment un goût de jus d’orange, mais elle fut finit rapidement, ce qui était une bonne chose, elle devrait aller mieux rapidement.


Quoi ? De quoi est ce qu’elle parlait qu’est ce qu’elle avait mal compris ? Tout était limpide pourtant dans les propos de Théo. La potion n’était pas sensée lui inventer des nouveaux souvenirs. Et pourtant, n’aurait-il mieux pas valu que ça soit ça ? D’accord, ce n’était pas des plus sympathiques d’espérer cela pour sa sœur mais il n’aurait pas eu l’impression que l’air venait à manquer dans ses poumons, que son sang se transformait en glace dans ses veines. Il resta quelques secondes silencieux, le temps de prendre conscience qu’il était dans la merde. Bien sûr qu’il pouvait essayer de s’en tirer en mentant à Alcyone. Il serait si simple de la regarder et de lui dire que ce n’est pas ce qu’elle croyait, certainement que le poids qui venait de se déposer dans son ventre se serait fait moins lourd. Là, sa bouche lui semblait pâteuse tandis qu’il essayait de trouver les mots pour la choquer le moins possible. « C’est ce que j’ai dit. » Autant reconnaître que déjà elle n’était pas folle. « Je ne veux pas abuser d’elle je t’assure. Ce n’était pas dans le sens je veux coucher avec elle. » Il s’embrouillait, il en avait conscience que parler à toute vitesse ça n’aidait pas spécialement, et pourtant il était incapable de ralentir dans ses propos, reprenant juste des respirations quand l’air venait à manquer dans ses poumons « C’est juste pour qu’elle ne fasse pas de cauchemars et je n’ai pas très envie de rester tout seul, mais si elle veut rentrer chez elle, je ne la forcerais pas à venir. Je n’ai pas choisi ces sentiments, les siens, les miens, c’est arrivé et je te jure j’ai essayé de les réprimer, j’ai vraiment essayé. » Mais il avait échoué, nul besoin de le dire, elle n’était pas idiote, elle avait sûrement compris toute seule. Il prit une profonde respiration, son regard plongé dans celui de sa sœur, prenant le parti d’être sincère « Je l’aime. » Après tout, si quelqu’un qui le connaissait depuis plus de vingt ans était dans l’incapacité de comprendre cela, qui le pourrait ?

Oui, exactement Alcyone avait trouvé la formule exacte pour décrire leur père. C’était un con. Un éternel insatisfait incapable de se détourner de son plan d’origine, à savoir avoir des enfants à son effigie. Chose qui ne fonctionnait pas le moins du monde. A se demander comment leur mère faisait pour le supporter, incompréhensible ça, sûr que c’était pour ça qu’elle était pas des plus sympathique avec Alcyone, à force de fréquenter son con de mari, il l’influençait.
Au moins, ils étaient d’accord, même si ce n’était pas des plus positifs, que cette catastrophe allait engendrer encore plus de haine de la part des Mangemorts. Et oui, l’un comme l’autre n’avait pas la moindre idée de ce que leur père avait sur les mains, parce qu’ils n’avaient jamais vraiment cherché à savoir, parce qu’il était plus facile de fermer les yeux plutôt que d’affronter la réalité. Il poussa un soupir « J’espère qu’on n’aura jamais à le savoir. » Et surtout, le plus important, que si ça venait à se savoir, ils ne soient pas tous éclaboussés par ses actes à lui. Déjà vivre avec, c’était suffisant comme punition d’après Théo.

Si la conversation avoir des enfants était amusante, c’était uniquement lorsqu’on parlait des enfants d’Alcyone. Non parce que lorsqu’elle se projetait dans un futur où c’était lui le père, ah tout de suite c’était bien moins intéressant et puis ça ne risquait pas d’arriver. « Je serais leur tonton préféré, tu verras. » Néanmoins, pour la seconde partie de sa phrase, il lui offrit un grand sourire « Oh, il n’y aura pas d’enfant de mon côté, tu ne risques pas de saper l’autorité de qui que ce soit. Si tu veux des neveux et nièces, tu as intérêt à avoir un mari qui a des frères et sœurs. »  Ah oui, Théo partait toujours du postulat que personne n’obligerait sa sœur à se marier à Dimka si elle n’en avait pas envie, ça va ce n’était pas trois idiots qui allaient choisir pour sa sœur.

Quelques minutes plus tard, voilà qu’ils étaient concentrés sur le bracelet que Théo avait au poignet et qui l’empêchait d’exercer sa magie. Le fait qu’elle touche le bracelet à son tour, si elle n’avait pas été blessé et qu’elle avait besoin de prendre des forces, il lui aurait demandé de jeter un sort, voir si c’était le simple fait de toucher ce bracelet qui inhibait les pouvoirs où s’il fallait vraiment l’avoir autour du poignet. Oui, c’était autant intriguant pour elle que pour lui, il ne comprenait pas, il détestait ce machin mais en même temps ça pouvait être utile même pour les sorciers, ça pouvait être une sécurité supplémentaire à Askaban. Il n’avait pas la moindre réponse à lui fournir quant à sa question. « Je n’en sais rien. Sur le mien non en tout cas, c’était un peu la bousculade et ce n’était pas ma priorité mais je demanderais à maman en sortant, on sera fixé. »

Alors qu’elle buvait docilement la potion qui n’avait pas l’air des plus délicieuses, il détaillait son nouveau plan… fortement imaginé d’après les dires de sa sœur, pour faire prendre des potions à ses patients. Au lieu de féliciter le génie de son frère qui était pour le coup merveilleux, Alcyone ne trouva rien de mieux à faire que d’essayer d’en récupérer les mérites et de faire fortune sur le talent de son frère « Tu vas me coûter cher toi, tu ne peux pas me donner l’astuce comme ça gratuitement, par bonté d’âme ? »

Peut être qu’il n’aurait pas dû lui faire boire la potion, la douleur sembla s’atténuer et réveiller la capacité de réflexion d’Alcyone. Alors oui, c’était cool qu’elle soit assez en forme pour réfléchir aux propos de son frère… peut être que ça aurait été encore plus cool que ça ne soit pas sur le sujet Sélénya. De toute façon, après la réponse de Théo, à moins qu’elle soit débile – ce qui n’était pas sensé être le cas – Alcyone aurait tilté potion ou pas.
Quoi qu’il n’avait peut être rien dit… Elle resta silencieuse un moment, ce qui était ultra stressant. Etre dans un hôpital avec un silence de mort, ça n’était pas l’éclate. Puis, finalement, elle prit la parole. Non mais sérieusement ? Est-ce que tout compte fait la potion n’avait pas grillé les neurones d’Alcyone, il jeta rapidement un coup d’œil sur l’étiquette. Non mais c’est vrai qu’il connaissait au moins 36 Sélénya… merci la logique, bien sûr qu’il parlait de sa pote, à quel moment c’était une question logique ça ? Ah oui c’est vrai qu’il aurait donné des nouvelles d’une illustre inconnue à Alcyone précédemment, juste parce qu’elles avaient le même prénom, elle la trouvait où sa logique elle ?

Il était tellement occupé à se dire mentalement qu’elle se foutait de sa tronche en essayant de trouver une autre explication, qu’il ne s’attendait pas à la question suivante. Touché. Il était incapable de dire le moindre mot. Il n’avait pas de mots pour s’expliquer, rien ne justifiait cela et il en avait bien conscience.
Son silence sembla être éloquent puisqu’elle finit par arriver toute seule comme une grande à la conclusion que oui. Comme quoi, elle était en âge de faire preuve de réflexion et que si c’était vrai pour elle, ça l’était aussi pour Sélénya mais bon, ce n’était probablement pas le moment de dire cela. En soi, la question était logique, il le savait bien, c’était plus facile d’imaginer qu’il existait une autre Sélénya, plutôt que de se dire qu’il s’agissait bel et bien de la même.

Il eut l’impression que le silence dura une éternité avant qu’elle ne prenne la parole pour… faire de l’humour ? Il la regarda déstabilisé avant de rétorquer en roulant des yeux « C’est ça, tu as deviné. Qu’est ce qui t’as mis sur la voie ? » Oh non mais le manque de respect, elle allait se prendre un coup d’oreiller elle si elle continuait.

Lorsqu’elle reprit plus sérieusement, il poussa un soupir de soulagement en entendant ses propos, l’angoisse qui s’était tapi dans son ventre s’envola presque aussitôt. Par contre, dans la tournure de ses phrases, quelque chose l’intrigua. « Comment ça à ce qu’il paraît ? Tu as jamais été amoureuse du tout du tout ? » Non mais alors ça c’était ultra surprenant, il avait beau ne jamais avoir été le genre de frère à regarder avec qui sa sœur sortait ou non, parce que ça ne le concernait pas du tout… Apprendre qu’elle n’était jamais tombé amoureuse… mais il fallait creuser, là si, c’était son devoir de frère que de se renseigner.

Mais quelle saleté cette sœur. C’est où pour échanger ? Elle craignait de fou. Comment ça un enfant avec ses gênes ça ferait du mal à la planète ? N’importe quoi. Il lui lança un regard moqueur « Tu sais qu’on est issu des mêmes parents ? Que ces gênes oh combien problématique pour la planète, tu les partages ? » Oui, il aurait tout aussi bien pu lui faire le coup que tous les grands frères – ou grande sœur – ont fait à leur cadet, à savoir le coup du on t’a trouvé dans une poubelle mais, non. La situation était beaucoup trop compliquée pour Alcyone dans cette famille, ce serait malvenu de la part de Théo de faire des phrases de ce genre. En plus, le karma se vengeait, elle se mettait à tousser, la petite Greengrass, Théo lui fit un sourire moqueur « ça t’apprendra à critiquer mes gênes géniaux. » Bon même si ça ne changeait rien au fait qu’il n’en voulait pas du tout de gosses, pas envie de passer son temps à s’inquiéter pour un oui ou pour un non… chose qu’il ferait déjà avec ses neveux, nièces, alors pas besoin d’en rajouter une couche.

Dans le genre inquiète de service, à moins que ce soit curieuse, Alcyone n’était pas mal dans ce genre, elle était en convalescence mais il fallait qu’elle jette un coup d’œil au bracelet de son frère, qui se montrait pour le moins coopératif, la laissant trifouiller en paix. Et quelque part, il aurait adoré qu’elle trouve la solution, pas uniquement parce que ça le frustrait de ne pas pouvoir faire de magie, pour le moment, il ne se rendait pas forcément bien compte de ce qu’il venait de perdre, mais bien pour Alcyone, ça serait une sacrée victoire qu’elle réussisse et leurs parents seraient bien obligé de reconnaître son talent. Ce ne fut pas le cas et en disant qu’il allait demander à leur mère, il y eut comme une lueur différente dans le regard d’Alcy, le fait de se retrouver seule semblant la déprimer d’avance « Je passerais te voir tous les jours, jusqu’à ce que tu sortes. » Il ne lui dit pas que leur mère passerait lui tenir compagnie, il n’en avait aucune certitude mais lui en tout cas il viendrait passer du temps avec elle, elle pouvait compter sur lui.

Parler de Sélénya, ça ne le soulageait pas vraiment, qu’on ne se mente pas, il était tendu comme s’il s’attendait à tout instant à se prendre une pique. La pique vint oui mais pleine d’humour et ça mettait un peu de légèreté dans cette soirée qui n’avait rien de léger. Forcément, qu’il rétorqua avec tout autant d’humour et c’est ce qui poussa Alcyone à continuer dans sa lancée. Se foutre de  la tronche de son frère ah mais si c’était un métier, elle serait millionnaire la demoiselle. Néanmoins, elle réussissait à merveille le fait de le détendre et de le mener sur le terrain de l’humour. Etant donné qu’elle parait toute attaque, saleté de sœur, il était trop prévisible, il se contenta de relever « C’est exactement ce que je me suis dit, sauf pour la partie t’as aucune chance, ça je suis pas d’accord. Franchement Alcyone, tu me connais je claque des doigts, pouf une fille apparaît, c’est le charme naturel des Greengrass. » Oui alors si on cherchait la modestie ce soir, elle était loin, très loin même.

Et puisqu’ils étaient lancés sur le domaine des sentiments, Théo était pour le moins surpris que sa sœur soit une telle truffe à ce sujet. Il fronça les sourcils, dérouté, lorsqu’elle confirma par son incertitude le fait de n’être jamais tombé amoureuse. Non mais même sans chercher à l’être, parce qu’elle croyait quoi, qu’il avait eu envie de tomber amoureux de Sélénya ? Non vraiment, il n’avait pas eu le choix. Après, il y avait aussi le fait de nier avoir des sentiments, c’était possible et il se demandait le plus sérieusement du monde si ça n’était pas le cas pour Alcyone. Surtout lorsqu’elle rajouta qu’elle était attachée à Dimka et quelque part, il en voulait à son père d’avoir mis à mal leur relation en essayant de les marier de force. Non mais c’était débile, surtout que d’après ce que disait Alcy, ils s’entendaient très bien, il fallait laisser faire le temps, ça aurait évité bien des problèmes mais ça, bien évidemment, c’était rêver que de croire qu’il laisserait du temps à sa fille.

Il ne répondit pas tout de suite cherchant ses mots, pas certain de ce qu’il fallait dire dans cette situation. Et pourtant, à la phrase suivante, il la regarda, longuement, ça dépendait, l’amour couple, non en effet, il n’avait rien vu de tout ça et clairement, le couple que formait leurs parents était pure magouille, il y avait eu des accords de passés et des avantages pour chacun mais à aucun moment il n’avait eu l’impression qu’ils s’aimaient réellement, disons qu’ils s’appréciaient et qu’ils avaient le même objectif. Néanmoins, l’amour il l’avait vu de son côté dans le regard de sa mère, certes il était totalement d’accord avec Alcyone, elle n’avait probablement pas eu les mêmes regards de la part de sa mère. Pour autant, de l’amour elle avait pu en voir depuis qu’elle était née, par ses mots à lui, par ses gestes et par sa présence. « Ils n’ont jamais dû être élu couple le plus amoureux de l’année. Ils nous ont appris une chose en revanche, que les engueulades dans un couple ça permet de le faire durer plus longtemps » Il décocha un sourire à sa sœur, parce que oui les gens édulcoraient pas mal l’amour mais parfois le partenaire on a beau le kiffer, qu’est ce qu’il est chiant. « Pour en revenir à toi et tes sentiments un peu nébuleux pour Dimka. Vous n’êtes pas obligé de vous marier mais ne pas se marier ne veut pas non plus dire que vous devez arrêter de vous fréquenter et faire exploser cette entente que vous aviez avant cela. C’est ta vie et c’est sa vie, trois personnes n’ont pas à vous dire quoi faire. » Avec un sourire, il ajouta « Et si tu as pensé à quelqu’un en particulier lorsque je t’ai posé la question pour savoir si tu avais jamais été amoureuse, c’est que oui, tu as déjà été amoureuse et que c’est pas parce que tu ne veux pas le reconnaître ouvertement que ton cerveau lui n’est pas au courant. »

Il y avait, malheureusement, beaucoup de vérité dans les dires d’Alcyone. Pourtant, Théo aurait aimé lui dire qu’elle se trompait, qu’elle exagérait et que si, bien sûr que si, ses parents avaient de la considération pour elle. Il était cependant certain de rien. En revanche, ce qu’il pouvait dire avec certitude c’est la chose suivante « Oh si t’en fais pas, l’entêtement il vient d’eux. L’intelligence vient de maman. »  Et puis, de toute façon. Même si elle avait eu des gênes différents, quand bien même, elle aurait été adopté, ça ne changeait strictement rien pour Théo. Sauf qu’il était sûr et certain que c’était bien la fille des deux, il y avait des choses qui ne trompaient pas, de la même façon que lui devait avoir récupérer des deux physiquement, la parenté d’Alcyone avec leurs parents était indiscutable. Sans oublier que parfois dans ses réactions, elle ressemblait beaucoup à leur mère, même s’il valait sûrement mieux garder cela pour lui, pas sûr que ça fasse plaisir à Alcyone de le savoir. De la même façon que si elle pointait du doigt les similarités entre Théo et leur père, le premier serait un brin ronchon et essaierait, en vain, de démonter ses arguments.  Bon parler de ses gênes géniaux, ça semblait pas être des plus évidents pour Alcyone, non mais elle devrait peut être porter des lunettes après, qu’est ce qu’il en savait lui. Quoi qu’il en soit, il n’avait pas envie de lui prouver qu’il avait raison en faisant des enfants, donc il ne pouvait que dire que si elle toussait… c’était parce qu’elle était médisante.

Néanmoins, puisqu’il aimait sa sœur, bon et aussi qu’il ne lui en voulait pas beaucoup, il promit qu’il passerait la voir tous les jours pour rendre ses journées un peu moins noir, même si, en vrai, sûrement qu’elle aurait préféré avoir deux parents à son chevet et soucieux de son état qu’un frère… il faudrait qu’elle s’en contente vu les deux handicapés des sentiments – ah bah ça aussi c’est de papa maman qu’elle tient – Alors qu’il plaisantait sur le fait, totalement faux en plus, parce que ça ne l’intéressait pas, sur le fait qu’il avait toutes les filles en claquant des doigts et qu’il ne s’était pas rabattu sur Sélénya parce que toutes les filles de son âge ne voulaient pas de lui. Alcyone le ramena sur terre en lui balançant qu’il  était pas crédible. Sœur indigne, mais fallait le laisser rêver un peu. Et puis il y eut la phrase suivante, un voile de tristesse s’abattit en l’espace d’une seconde dans son regard. Non, il n’était pas mieux que ça, certes il y en avait une seule, mais une gamine et il en était parfaitement conscient « Je crois qu’il aurait mieux valu que je sois un Don Juan en réalité. » mais bon, il n’était pas si facile de résister à des sentiments qui refusent de s’éteindre. Alors, il acceptait les règles du jeu, se détester, craindre d’être détesté par le monde et être aimé par Sélénya. Ce jeu là en valait la chandelle.

Théo retint un petit rire en l’entendant parler de modèle à reproduire, il secoua négativement la tête « Je crois que même si on y mettait du notre pour reproduire leur modèle, on y parviendrait pas. » Oh, certainement qu’il y aurait des disputes dans leur couple et c’était bien normal mais ce n’est pas pour autant qu’ils seraient comme leurs parents, chacun choisissant de se mettre en couple parce que les sentiments s’emmêleraient et heureusement. Il essayait de lui expliquer avec ses mots comment ressentir l’amour. Comment savoir si c’était de l’amour et il n’avait cité aucun nom, n’influençant absolument pas sa sœur. Pourtant, lorsqu’elle reprit la parole, il savait exactement de qui elle parlait. Un frisson le parcourut en imaginant sa sœur être frappé par un type ou une fille, les deux c’était un peu la même chose et s’en sortir parce qu’un ex-fiancé était intervenu. Qu’est ce que ça prouvait au juste l’action de Dimka, qu’il était prêt à mettre sa sécurité de côté pour venir en aide à Alcyone. S’il soupçonnait très fortement sa sœur d’être amoureuse du Dimitrov, il se demandait si l’inverse n’était pas possible ? Bien sûr, impossible d’en être sûr et certain tant qu’il n’en parlerait pas avec ce dernier, ce qu’il avait bien l’intention de faire, mais le doute s’immisçait en lui et ce n’était pas forcément négatif. « Tu penses que sans Dimka, tu serais arrivée ici dans un moins bon état ? » pour ne pas dire, ne pas être arrivé du tout.

Il cligna des yeux lors de sa confidence suivante. Alors être honnête, ça n’avait pas non plus été la priorité de Théo, qu’on se le dise, il avait plutôt fait une boulette puis décidé de ne pas mentir, que vraiment être venu parler à sa sœur dans l’idée de se confier. Mais bon, après tout, une vérité pour une vérité, ce n’était pas plus mal. Ainsi, ils se voyaient toujours, voilà une nouvelle qui réjouirait les pères des deux… amants. Ce terme ne plaisait pas tellement à Théo, en fait ça l’agaçait même de savoir qu’un gars avait des vues sur sa petite sœur, qui était toujours un bébé à ses yeux. Il faut bien que jeunesse se fasse, qui avait dit cette chose stupide ? Il aurait préféré que sa sœur ne fasse rien du tout, que personne la touche, elle était trop jeune… mais bon étonnamment, on demande jamais au frère.  « Espérons qu’ils abandonnent leur idée loufoque. Tu as une idée de ce que toi tu voudrais s’ils te lâchaient la grappe ? » Il hésita quelques secondes avant de rajouter, même si ça le stressait énormément « Si tu as confiance en lui. » et seulement à cette condition « ça ne me dérange pas » trop, parce qu’en vrai qu’un mec touche sa sœur bien sûr que si ça le dérangeait « qu’il passe chez nous quand vous en avez envie. » parce que oui, en vérité ce qu’il voulait c’est que sa sœur soit heureuse, peu importe avec qui et s’il allait mettre un peu, c’est vrai, son nez dans ses affaires, il la laissait libre de gérer sa vie sentimentale comme elle l’entendait tant que l’autre n’était pas un gros con. Puis revint Sélénya sur le tapis, oui, pour le coup, ils n’étaient pas très doués tout les deux. « On connaît les sentiments de chacun depuis le deux février de cette année mais on est ensemble depuis le 10 avril. Et je sais que c’est pas bien, je t’assure, j’en ai parfaitement conscience que c’est une énorme connerie et que je l’entraîne dans le mur mais j’arrive pas à gérer. »

Si Théo s’occupait de montrer les similitudes entre les enfants et leurs parents, similitudes qui n’étaient pas non plus très nombreuses, Alcyone de son côté, se fit une joie de montrer qu’ils ne leurs ressemblaient pas en tout point. Il hésita quelques secondes sur ce qu’elle disait, il est vrai qu’en étant totalement sincère avec lui-même, ses parents – oui même sa mère et ça lui faisait mal de penser cela – n’étaient pas les personnes les plus sympathiques de la terre. Il n’y avait qu’à voir la façon dont elle traitait Alcyone pour se rendre compte de cela. Impossible de la défendre sur ce point, quand bien même il l’aurait voulu. Pour la créativité, c’était du pareil au même, alors là, à part pour les punitions où là il avait eu l’impression qu’ils étaient plein de créativités quand il s’agissait de faire suer leurs enfants… Ah non mais Théo aurait préféré toujours la même plutôt que de se demander ce qui allait encore lui tomber sur le coin du nez. De même pour le côté protecteur, ça venait d’eux, c’était juste positif « Oh tu sais ils sont plein de créativités quand il s’agit de nous enquiquiner. Et eux disons qu’ils protègent… les intérêts de leur nom de famille. Ah ça craint je suis bien d’accord, que veux tu nous sommes meilleurs que nos parents. »

Non, définitivement, elle avait raison, il n’était pas ce genre de mecs. Il ne l’avait jamais été d’ailleurs, préférant essayer de construire des relations à chaque fois, ce qui ne fonctionnait pas des masses pour ce qu’il avait pu constater. Il posa un regard plein de tendresse et de reconnaissance sur sa petite sœur, lui soufflant suite à son compliment « Tu es la meilleure sœur dont on puisse rêver. »Elle avait, par sa présence, donnée un sens au mot famille, alors oui bien sûr il avait toujours fait partie d’une famille, mais l’unité, la véritable unité, il ne l’avait eu qu’avec la présence de cette soeurette… bon pas au début, il avait fallu quand même un peu de temps et qu’elle grandisse surtout mais une fois assez grande, elle avait réinventé le mot famille aux yeux de Théo.

Lorsqu’elle reparla de l’enfer qu’elle avait vécu quelques heures auparavant. Théo l’observa attentivement, si elle semblait convaincue que sans ces trois-là, elle ne s’en serait pas sorti, lui de son côté avait du mal à ne pas leur en vouloir. C’était sa sœur qui était alitée, pas les autres. Certes ils avaient un bracelet mais elle s’était pris une balle est ce que ça n’était pas pire. Et lui, est ce qu’il n’était pas pire d’ailleurs ? En tant que frère il avait un seul devoir, la protéger et il n’avait tout simplement pas été là pour le faire, laissant à trois adolescents cette tâche qu’ils n’étaient, au vu des résultats, pas capable d’accomplir. Si lui s’en voulait de ne pas avoir été là pour lui filer un coup de mains, elle s’en voulait pour les propos qu’elle lui avait tenu. « Nous avons juste mal choisi notre moment pour nous prendre le chou. »
En parlant de prendre le chou, forcément, ils en venaient à la raison de leur dispute, les parents et leurs idées à la noix de marier leur fille au premier sang pur avec qui elle traînait. Incroyable comme comportement. Le problème c’est qu’ils allaient gagner les bougres, pour peu que Dimka éprouve les mêmes sentiments qu’Alcyone et qu’il ne joue pas avec – chose qu’il n’avait pas intérêt de faire au risque de se prendre un frère très en colère dans les dents – les vieux allaient se dire qu’ils avaient raisons dès le début puisque leurs enfants, au final, étaient très bien ensemble. Bien qu’en réalité Alcyone et Dimka n’avaient pas non plus attendus leurs bénédictions pour se fréquenter. La seule chose que pouvait faire Théo, c’était de leur offrir son silence et de les laisser vivre leur vie chez lui. De toute façon une relation cachée de plus ou de moins, ça ne faisait pas une énorme différence, la seule chose qui était embêtant c’était que flûte c’était quand même sa petite sœur mais bon, c’était un peu injuste de penser cela alors qu’elle avait le même âge que Sélénya… Il lui adressa un sourire complice suite à son merci, même si dans un même temps il avait envie de déballer toute la panoplie de questions pour être sûr que Dimka valait quand même le coup… mais bon valait mieux demander directement au garçon, parce qu’Alcyone elle pouvait lui dire mêle toi de ton cul – et serait en droit de le faire – là où Dimka aurait forcément plus de mal à le dire.

Evidemment, si l’un devait parler de son couple, l’autre devait faire la même chose. C’était une sorte de deal tacite entre eux. Par contre, il n’était pas du tout à l’aise de parler du couple qu’il formait avec Sélénya. C’était la toute première personne au courant et la sensation de frayeur ne le quittait pas, il ne voulait pas que leur relation change. Il voulait rester ce frère dont elle était fière quelques instants auparavant, que rien ne change. Est-ce que ça se ressentait son inquiétude ? Sûrement que oui puisqu’elle vint passer ses bras autour de lui. Il fut tenté de l’arrêter, il est vrai pour lui dire de faire attention à elle mais dans un même temps, cette étreinte, il en avait besoin alors il la laissa faire, prenant cette dose de tendresse qu’elle lui offrait. Puis elle finit par s’écarter et prendre la parole à son tour. Il eut un sourire sans la moindre trace de joie. En une phrase, elle mettait en lumière le détail qui tuait, c’était Sely. Oui, ils connaissaient très bien cette famille et c’était là tout le problème. Il était en train de réfléchir sur quoi répondre lorsqu’une petite pique sur l’âge lui fut destinée, aussitôt il fronça les sourcils avant de répéter, amusé il est vrai « Tu as osé me traiter à la fois de vieux et de crouton mais toi tu cherches la guerre hein ? »Après, il est vrai que si la seule chose qu’il risquait était des petites piques sur la différence d’âge, il n’avait pas à se plaindre. Ça n’était vraiment pas ce point qui le tracassait.

Son regard se plongea dans celui beaucoup plus clair de sa sœur tandis que leurs mains se rejoignaient pour une étreinte. Ses mots se gravaient en lui, accompagné d’une bouffée de reconnaissance pour cette sœur qui lui montrait tout son soutien et il ne doutait pas une seule seconde que ce serait le cas, quoi qu’il puisse arriver, elle serait à ses côtés. « Merci Alcyone. »Il hésita quelques instants avant de revenir sur ses précédents propos. « Et je sais bien que le fait que ça soit justement Sélénya c’est déroutant, ça l’a été pour moi aussi quand je me suis rendu compte que mes sentiments évoluaient. Je dirais même que ça n’aurait pas pu être pire. Et je crois que bon nombre de gens préfèreront le petit jeune infidèle au vieux crouton respectueux. »