C’est le cœur encore palpitant que Leah s’incline face au public du London bar, remerciant ces derniers pour les applaudissements qu’elle recevait. Elle avait beau se produire ici depuis maintenant onze années, elle ne s’en lassait pas et aucune soirée ne ressemblait à une autre. Alors qu’elle quitte la scène, la jeune musicienne est encore ivre des émotions qu’elle a ressenties sur scène. Comme si elle flottait, étant là sans être vraiment là. Ne sachant plus quelles émotions étaient réellement les siennes. Une fois éloignée dans la réserve du bar qui servait également de vestiaire pour les employés, il lui fallait encore quelques minutes pour se reprendre totalement et arriver à distinguer les émotions qui étaient réellement à elle de celles qui appartenaient aux autres. C’est elle qui était passée en dernière ce soir, le temps que les derniers clients partent et le London bar allait donc bientôt fermer ses portes.

« Pssst. » Une voix attira son attention, la jeune femme tourna la tête en direction de sa collègue qui s’occupait de nettoyer la salle. « Ta assuré ce soir, comme d’habitude ! » Lui dit-elle en levant fièrement son pouce devant elle ce qui arrachait un sourire à la jeune serveuse qu’elle était. Elle murmurait un « Merci. » Du bout des lèvres que sa collègue saurait décrypter et lui fis signe de filer. « Oh j’oubliais, j’ai un imprévu ce soir, je ne vais pas pouvoir te déposer, ça va aller tout de même pour toi ? » Le sourire toujours aux lèvres, Leah ne laissait rien transparaitre et se contentait d’opiner du chef. « Oui, t’en fais pas, je rentrerais autrement. » Combien de fois était-elle rentrée à pied de toute façon ? Bon beaucoup moins souvent que lorsqu’elle habitait encore dans la demeure familiale il était vrai. Mais à cette heure-là, elle ne se voyait pas déranger, sa mère ou ses amis. Elle allait donc reprendre ses anciennes habitudes. Après avoir remercié Leah sa collègue repartie du côté salle. Tandis que la O’Malley prenait ses affaires, bien contente d’avoir choisi un gros manteau bien chaud pour affronter la fraicheur de l’hiver surtout en sachant que le retour en voiture venait d’être compromis, fort heureusement il lui restait tout de même le métro. Elle prenait le temps de revenir dans le bar, saluait ses collègues qui étaient encore là avant de comme à son habitude, sortir par la porte de derrière. En règle général, cela évitait de tomber directement sur les derniers clients un peu éméchés qui pouvaient être encore dans le coin. Mais cela n’évitait pas tout et ça Leah ne le savait que trop bien.

Fut un temps ou la jeune musicienne aurait déambulée dans les rues de Londres, quasiment de manière insouciante. Aujourd’hui, une ombre plane au-dessus de sa tête et elle ne peut s’empêcher d’être anxieuse. Son regard ne cesse de regarder autour d’elle afin d’être certaine que personne ne s’approchait d’elle ou ne la suivait. Si l’atmosphère qu’il y avait en ce moment avec cette guerre entre les sorciers et le Blood Circle y jouait pour beaucoup, il n’y avait pas que cela. Les problèmes de clients un peu lourd qui se pensait tout permis ne datait pas d’hier malheureusement et Leah y avait toujours été un peu confronté. Comme dans chaque métier, il y avait ces avantages et ces inconvénients. Alors qu’elle s’éloignait de bar, afin de rejoindre la bouche de métro la plus proche. Du bruit se fit entendre dans l’une des rues voisines, des éclats de voix, des rires, des bruits de bouteille cassée, elle s’arrêta un instant, réfléchissant à un autre itinéraire et commença à reculer afin de ne pas croiser le groupe de personnes qui avaient l’air ivre. Mais dans la précipitation elle buta contre quelque chose, ou plutôt contre quelqu’un.

« Hey, tu t’es perdu ma jolie ? » Lui glissa-t-on à l’oreille, les vapeurs de l’alcool arrivant jusqu’à ses narines ne laissaient à la jeune femme aucun doute. « Excusez-moi. » Bredouilla-t-elle parce que rester polie même si la personne avait trop bu s’était important et cherchait à le contourner. Leah compris qu’elle n’allait pas s’en tirer aussi facilement lorsque la personne fit un pas de côté pour l’intercepter. « Je peux peut-être t’aider ? » La jolie serveuse en doutait beaucoup. Ne répondant pas cette fois, la politesse ça allait un temps n’est-ce pas ? Leah était gentille, mais pas idiote non plus. Se sentant de plus en plus prise au piège, elle regardait autour d’elle cherchant alors une échappatoire, devait-elle s’en aller dans l’autre sens et espérer que le groupe de personne était plus fiable ? Mais avant qu’elle n’esquisse le moindre mouvement, la main de l’homme se posait sur son poignet afin de la retenir. « Tu t’en va déjà ? », « Lâchez-moi ! » Répondait-elle alors du tac au tac en ayant soudainement perdu toute sympathie. Elle tentait de se défaire mais il avait bien plus de force qu’elle. Son cœur s’emballait et ce qui finit par la faire paniquer, c’était les souvenirs qui lui revenait en mémoire de la dernière où elle s’était également retrouvée en mauvaise posture. De cette odeur d’alcool bien trop similaire. Les paroles se confondaient, lui avait-il dit qu’elle allait adorer ça lui aussi ? Ou n’était-ce qu’un tour de son propre esprit ? Devait-elle hurler ? Mais sa gorge se retrouve comme bloquée tandis les émotions du type lui indiquait qu’il prenait un malin plaisir à la tourmenté et qu’il ne comptait pas s’arrêter là. Son seul espoir résidait-il dans le fait d’attendre qu’une personne passe par ici ? Et si ce n’était pas le cas, comment allait-elle pouvoir s’en sortir ?

L’espoir, c’était quelque chose que Leah possédait toujours au fond d’elle malgré tout ce qui pouvait se passer dans le monde actuellement. Et ce soir ne faisait pas exception. Se retrouvant dans une situation compliquée, elle ne pouvait pas s’empêcher d’espérer. Espérer que quelque chose ou quelqu’un la sorte de ce mauvais pas. Combien de chance avait-elle pourtant que cela arrive ? Vue le genre de personne qui devait être dehors à une heure pareille, il ne devait pas en avoir beaucoup et ça la jeune musicienne le savait. Mais cela ne l’empêchait pas de s’accrocher à cette petite lueur qu’elle avait au fond d’elle. Combien de fois c’était-elle dit qu’elle devrait enfin prendre des cours d’auto-défense ? Assez pour ne pas avoir assez de doigt pour savoir les compter et ce soir encore alors que la main de l’homme enroule son poignet l’empêchant de s’éloigner, elle se le répète. Le problème étant que Leah avait du mal avec la violence et elle ne se voyait pas donner des coups. Mais à ce stade, elle allait finir par être retrouvée morte dans un caniveau et c’est tout ce que cela lui aurait rapporter. De plus c’était sans doute mieux de savoir un minimum se défendre que de compter uniquement sur l’espoir que quelqu’un vienne et ainsi passer pour la victime qui ne peut se débrouiller seule. Le ring de Leah, c’est la musique, malheureusement les mots et les notes en cet instant ne lui était pas d’une grande utilité… Non il lui fallait apprendre à donner des coups. Comme cet homme qui, sorti de nulle part lui fit lâcher prise… Attend, quoi… ?

De quoi est-ce que Leah était le plus choquée ? De cet homme qui avait été sur le point de s’en prendre à elle ? Où de celui qui arrivait pour l’extirper de ce mauvais pas comme ce qu’elle avait tant espérer ? N’était-elle pas en train de délirer d’ailleurs ? Est-ce que son espoir n’avait pas pris le pas sur la réalité ? Si une personne était réellement là pour lui venir en aide, pourquoi ne l’avait-elle pas sentie ? Pourquoi ses émotions ne l’avaient pas prévenu d’une nouvelle présence ? Avait-elle été si happé parce ce qu’il se passait pour ne pas rester attentive au reste ? Et si ça avait été un autre de ces porcs voulant profiter de la situation ? Et si cet homme ne venait pas l’aider mais au contraire récupérer la proie qu’elle était que l’autre avait convoité ? Alors que tout un tas de pensée envahissait la jeune femme, elle en avait oublié d’esquisser le moindre geste. Trop secouée. Elle ne réagissait pas tout de suite alors que son sauveur lui posait une question. Elle regardait le corps de son agresseur sur le sol et son don essayait de sonder la personne à ses côtés pour savoir si elle était en sécurité ou si elle devait avoir peur… Mais rien… Comment ça rien ? Comment rien, ou en tout cas, pas grand-chose pouvait émaner d’une personne ? Leah posa alors son regard sur l’homme en question, se concentrant davantage. Si ce n’était pas grâce à son don qu’elle obtenait la réponse, se fut en le reconnaissant. Pas qu’elle connaissait particulièrement l’homme à côté d’elle. Mais elle l’avait déjà vue quelques fois au bar et elle s’en souvenait particulièrement parce que sa présence l’avait justement déjà troublée.

Il avait un regard perçant donnant cette impression à Leah qu’il pouvait lire en elle, alors qu’elle, elle n’y parvenait pas. Il ne s’était jamais rien émané de lui réellement, en tout cas, rien de percutant. Aucune émotion étrange, intense, comme si… Comme s’il n’était qu’une coquille vide incapable de ressentir quoique ce soit. Si Leah n’avait pas été en présence d’autres personnes elle aurait pu croire être de nouveau sous l’emprise de ce serum anti magie, mais elle savait que ce n’était pas ça. Et dans cette ruelle vide en dehors d’eux deux et de l’homme inconscient sur le sol, il n’y avait rien d’autre que ses propres émotions ou presque, peut-être pouvait-elle deviner un peu d’inquiétude à son égard ? Mélanger à un peu de colère envers l’individu qui s’en était pris à elle ? Mais elle n’était sûre de rien. Elle ne pouvait être certaine que de sa propre peur et de sa reconnaissance. Ce qui la rassurait finalement ? C’était donc le fait de voir un visage légèrement familier, même si elle ne savait pas quoi penser de lui et ne pouvait s’empêcher de penser qu’il était étrange, quelque chose lui intimait qu’il n’était pas là pour lui faire du mal. Peut-être que le fait qu'elle ne l'avait jamais vue s'enivrer jusqu'à devenir quelque chose comme la carcasse inconsciente qui était à côté d'eux y était pour beaucoup. Reprenant ses esprits, Leah finissait par hocher la tête aux paroles de cet homme.

« Oui… Non, je vais bien. Merci d’être intervenu, je ne sais pas ce que j’aurais fait si personne n’avait été dans les parages. » Avouait-elle alors sans pouvoir s’empêcher de regarder autour d’eux. A l’affut du moindre signe d’un autre tordu qui se baladerait dans les rues de Londres en cet instant même. Reportant son regard sur l’homme, elle reprit la parole. « Je… Vous reconnais je crois, vous venez quelques fois au London Bar non ? » Questionnait-elle avant de continuer sur sa lancer. « Excusez-moi je suis un peu surprise, il me semblait vous avoir vue quitter le bar un peu plus tôt, je n’aurais pas cru que vous seriez encore dans les parages… » Mais elle n’allait pas s’en plaindre loin de là, cela semblait être une chance pour elle. « En tout cas, merci encore. » Elle regardait encore une fois l’homme par terre et se demandait s’ils devaient faire quelque chose pour lui, mais la seule chose qu’elle avait envie de faire en cet instant était de déguerpir, Leah était une personne gentille oui, mais il ne fallait pas pousser non plus. S’apprêtant à reprendre son chemin en remerciant encore une fois son sauveur, elle se retrouva face à la réalité qu’il lui fallait encore du chemin avant d’arriver à destination et qu’elle n’était pas à l’abri de retomber sur ce genre de personne. Songeuse, elle se mordillait un instant la lèvre, se demandant si elle pouvait réellement demander quoique ce soit à cet homme qui avait déjà tant fait et à quel point cela pouvait être une bonne idée… Elle était là, à peser le pour et le contre jusqu’à ce que sa peur prenne le dessus et traverse la barrière de ses lèvres pour elle.

« Est-ce que faire un détour vous dérangerais ? » Est-ce qu’elle était vraiment en train de demander à un inconnu de la raccompagner ? Mais combien d’option avait-elle ? « Je suis encore assez de loin de chez moi et je… » Elle se coupa avant de reprendre directement. « Vous avez tout à fait le droit de refuser, c’est déjà bien gentil à vous d’être intervenu et probablement que le reste du trajet se fera sans encombre. » Combien de pourcentage de chance avait-elle de se faire agresser deux fois lors de la même soirée franchement ? « Oui ça devrait aller. » Ajouta-t-elle afin de s’en convaincre elle-même. « Oubliez, je ne veux surtout pas profiter de votre gentillesse et vous avez certainement autre chose à faire. » Au pire peut-être même qu’elle pouvait tenter d’appeler Jonas ou Raphaël et qu’un des deux pourraient la rejoindre à mi-chemin ? En tout cas elle ne voulait pas déranger celui qui l’avait aidé et s’en voulait déjà d’avoir émis cette idée. Il avait probablement autre chose à faire à cette heure-ci que de traverser un bout de la ville pour raccompagner la jeune femme apeurée qu’elle était, quelle mouche avait bien pu la piquer ?  Essayant se reprendre ses esprits elle se répétait encore une fois, qu’elle n’allait pas avoir le choix et devait vraiment apprendre à se défendre.

Ce qu’elle aurait fait… Leah n’est pas idiote, elle sait bien qu’elle n’aurait pas pu faire grand-chose et cette réalité l’effrayait. Sa sécurité dépendait d’un pourcentage de chance sur lequel elle n’avait aucun pouvoir. Cela lui faisait froid dans le dos et elle préférait l’ignorer et se concentrer sur les paroles de son sauveur. Il ne pouvait plus rien lui faire, oui, mais s’en prendrait-il à quelqu’un d’autre ? Leah était tout de même moins certaine que cet homme que l’envie de recommencer aller lui passer si facilement. Peu certaine de savoir si oui ou non elle devait se sentir totalement soulagée que ce soit lui qui soit venu l’aider, elle essayait de se rappeler où est-ce qu’elle l’avait vue. Et si elle se souvenait l’avoir croisé au bar ce soir, elle se souvenait aussi qu’il était parti avant l’ouverture ce qui soulevait quelques questions, mais il s’était passé beaucoup trop de choses pour que la jeune musicienne ne s’attarde réellement dessus, elle ne faisait que les survoler tandis que lui, se contentait de se présenter. Alexander un nom sur un visage. Il lui paraissait soudainement un peu moins étranger. « Leah. » Répondait-elle alors avec politesse. « Et tout le monde n’aurait pas forcément agis ou n’aurait eu les moyens d’agir alors j’insiste, merci. » Reprenait-elle avant de poser son regard sur son agresseur et de se demander l’espace de quelques secondes quoi faire de lui. Après avoir réfléchis et d’en être arrivé à la conclusion que sur ce trottoir il y était bien, elle préférait s’inquiéter du comment elle allait rentrer chez elle. Leah était d’une nature sociable, allant facilement vers les autres, son empathie l’y aidait pour beaucoup. Mais de là à s’imposer et demander à un parfait inconnu de la raccompagner chez elle ? Même elle était en train de se dire que ce n’était pas une bonne idée. Mais alors qu’elle lui donnait toutes les excuses en main pour refuser son invitation, voilà qu’il acceptait. Gênée, la jeune femme se tournait vers lui dans l’intention de lui dire que ce n’était pas la peine, mais il se mettait déjà en chemin.

« C’est très gentil. » Finissait-elle donc par murmurer avant de lui emboiter le pas. Alors qu’elle marchait, la tête baissée en pensant à tout ce qui venait de se passer, il reprit la parole, l’extirpant du cercle vicieux qui allait sans doute l’empêcher de bien dormir cette nuit. Sa remarque lui arrachait un sourire, il était vrai que vue comme ça, Leah pouvait passer pour une femme irresponsable. « J’apprécie beaucoup la marche à pied. Je rentrais toujours chez moi ainsi avant… » Avant que le secret magique soit révélé, avant que les agressions ne se succèdent… « Mais en général je rentre chez moi en voiture, ce soir il y a eu une légère complication. » Ce que Leah n’avait pas pu prévoir, voilà pourquoi elle s’était retrouvée dans cette situation. Continuant de marcher tout en réfléchissant, ce fut elle qui cette fois reprenait la parole peu de temps après. « Ce n’est pas la première fois que je me fais la remarque que je devrais vraiment prendre des cours d’auto-défense. » Disait-elle songeuse. « Mais moi et les sports de combat c’est… ça fait trente-six mille. » Ajoutait-elle légèrement amusée tandis que l’adrénaline de ce qui s’était passé un peu plus tôt commençait à redescendre et qu’elle commençait à se détendre. Toujours en réfléchissant à la chose, elle se tourne soudainement vers lui en mettant ses deux petits points en avant. « Regardez, ai-je l’air un minimum crédible ? » Certainement pas le moins du monde, surtout qu’elle n’avait pris aucun cours et que sa posture était loin d’être bonne, mais cela lui arrachait au moins un sourire. « Vous êtes sans doute mort de trouille n’est-ce pas ? » Riant légèrement de sa propre blague, elle desserra ses poings. Oui elle devait trouver un moyen de se défendre, mais elle n’avait pas encore trouvé, Leah n’était pas faite pour la violence et tenir une arme n’était pas une option non plus. La sienne c’était sa musique, malheureusement face à des individus mal intentionnés ou même des membres du Blood Circle cela n’était pas très efficace…

« Le vrai problème c’est qu’encore aujourd’hui, se balader dans les rues pour une femme reste beaucoup plus risqué que pour un homme. » Finissait-elle par faire remarquer en soupirant. Et que tous les hommes n’étaient pas aussi remplis de bonnes intentions que ses propres frères, ses meilleurs amis ou encore l’homme qui venait de la sauver. Si c’était le cas, le monde se porterait-il mieux ?

« Et c’est grâce à vous ! » Ajoutait-elle dans un léger sourire lorsqu’il lui rappela que la complication était en train de cuver son vin sur le bitume alors qu’elle expliquait pourquoi est-ce qu’elle était en train de rentrer à pied à une heure si tardive qu’il n’était pas si étonnant qu’elle tombe sur ce genre de tordus. Elle reprenait la parole en expliquant qu’elle s’était déjà fait la remarque qu’elle devrait prendre des cours d’auto-défense, mais que bon, elle et le sport de combat ce n’était pas un bon mélange. Cet homme qu’elle ne connaissait pas lui répondait néanmoins avec beaucoup de sérieux. La jeune serveuse hocha la tête. « Oui exactement, je n’ai besoin de mettre personne au tapis, pouvoir fuir me suffirait. » Elle n’avait aucune prétention de pouvoir battre qui que ce soit, cela ne l’intéressait pas. Leah était plutôt le genre de personne à fuir la violence. Fuir ce genre de situation était donc ce à quoi elle aspirait et si elle pouvait apprendre cela alors c’était amplement suffisant. Ayant besoin de redescendre la pression, Leah se mettait à plaisanter et simulait une fausse position d’attaque démontrant qu’elle n’était en rien impressionnante. La réponse d’Alexander la fit sourire de plus belle avant de hocher la tête en comprenant ce qu’il voulait dire à propos du gabarit.

« Alors il ne me suffit que d’arrêter de sourire ? » Demandait-elle innocemment avant de reprendre sa posture, de le regarder tout en retenant ce sourire qui avait envie de reprendre sa place initiale avant d’ajouter, « Je suis menaçante là ? Vous avez peur ? » Dit-elle en s’avançant un peu et en lançant son poing en avant sans le toucher évidemment avant de le regarder d’un air suspicieux. « Vous vous y connaissez ? Vous sauriez m’apprendre ? » Se hasardait-elle. Oubliant le fait qu’elle ne le connaissait que depuis quelques minutes et que c’était déjà bien gentil de sa part de bien vouloir la raccompagner. Mais étrangement, il lui inspirait facilement confiance. Etait-ce le fait qu’en sa présence elle ne ressentait quasiment aucune émotion ? Elle était elle-même, rien ne l’envahissait, rien ne venait influencer ses propres émotions et c’était reposant, surtout après un moment pareil ou elle avait besoin de se reprendre. Alors qu’ils avaient repris leur marche, Leah avait repris la parole annonçant que le vrai problème était qu’une femme ne pouvait même pas se balader dans les rues sans le moindre risque de se faire agresser. Alexander ajouta alors une autre vérité. Il était toujours plus facile de s’en prendre aux faibles, malheureusement oui, le monde tournait ainsi.

« Et puis des fois, il y a de bonnes âmes qui viennent en aide aux plus faible ! » Faisait-elle alors remarquer, faisant référence à ce qui c’était passé ce soir. « Mais cela serait fou de compter là-dessus à chaque fois. » Elle en avait bien conscience, elle avait eu de la chance cette fois, mais serait-ce le cas à chaque fois ? « Vous ne voulez pas travaillez à temps plein en tant qu’ange gardien j’imagine ? » Lançait-elle sur le ton de la plaisanterie, de toute façon elle n’aurait pas les moyens de payer quelqu’un pour la surveiller vingt-quatre heure sur vingt-quatre et puis à bien y réfléchir cela serait un peu effrayant n’est-ce pas ? « Vous faites quoi d’ailleurs dans la vie en temps normal ? » Demandait-elle par simple curiosité, mais aussi dans l’espoir de cerner un peu mieux ce personnage qui l’avait sauvée ce soir.

Si elle était d’accord avec le fait que fuir restait la meilleure option, elle n’était pas assez naïve pour croire que cela résoudrait tous ses problèmes. Fuir avait probablement ses limites aussi… Il suffirait à la personne de courir plus vite qu’elle. Ou encore d’anticiper sa fuite et de la coincer tout de même… Y avait-il seulement un moyen ? Un sourire triste étira alors les lippes de la jeune femme alors qu’Alexander reconnaissait que ce genre de leçon pouvait être utile. « Il en est malheureux de devoir en arriver là. » Répondait-elle simplement tout en étant tout de même assez d’accord avec lui, ce qui l’a désespérait un peu. Alors que la conversation tournait à propos de l’auto-défense et de ses maigres talents en la matière, la jeune femme lui faisait une démonstration en direct en prenant les quelques conseils qu’il lui fournissait. Elle avait du mal à croire qu’un simple sourire pouvait changer autant les choses, mais elle était amusée d’entendre qu’elle l’avait surpris.

« Je suis un peu spontanée. » Reconnaissait-elle alors en laissant tomber ses bras. « Et puis j’ai besoin d’oublier ce qui vient de se passer. » L’humour aidait pas mal en général. Alors qu’il reconnaissait l’intention, il souligna tout de même qu’il n’allait pas en faire des cauchemars, la serveuse souriait alors davantage. « Je ne sais pas si j’en suis déçue ou soulagée. » Répondait-elle en riant légèrement. Déçue car si elle prenait ce genre de posture face à un agresseur, elle voudrait effectivement ne pas lui déclencher une crise de fou rire, mais soulagée parce qu’Alexander n’avait rien d’un agresseur et qu’elle ne voudrait pas le traumatiser, même si… A bien y réfléchir, c’était sans doute quelque chose dont Leah ne sera jamais capable de toute façon. Mais serait-il d’accord pour l’aider ? Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? La jeune femme n’en avait aucune idée… Pourtant elle avait deux meilleurs amis qui avaient fait de la boxe pourtant, elle était certaine que Jonas serait capable de lui apprendre quelques mouvements… Mais taper n’était pas ce qu’elle recherchait. Non, elle voulait simplement être capable de se défendre et fuir dès qu’elle le pourrait. Et ça, Alexander semblait avoir très bien compris ce qu’elle voulait. Peut-être était cela qui justifiait ce choix tout de même assez étrange puisqu’il restait plus ou moins un inconnu ? Sa réponse étonnait la jeune femme. Pas le fait qu’il s’y connaisse, après tout elle venait de le voir en action quelques minutes plus tôt mais plutôt le fait qu’il ne refusait pas. Préférant la mettre en garde contre son caractère, mais le fait qu’elle lui était totalement inconnue ne semblait pas le déranger. A nouveau, cela arracha un sourire à la jeune femme.

« Lorsque je me lance dans quelque chose, j’ai tendance à le faire à fond. » Reprenait-elle dans un premier temps. « Je suis musicienne, j’ai commencé très tôt lorsque j’étais enfant. » et elle n’avait jamais lâché depuis, elle ne respirait que pour cela. « En revanche, je ne promets pas d’avoir les mêmes prédispositions que pour la musique. Je pense que vous pouvez aisément le deviner. » Qu’il soit exigent n’était sans doute pas un problème, elle l’était déjà avec elle-même. « Tant que vous êtes au moins capable de vous montrer patient, je pense que le reste pourrait aller. » Elle n’avait pas peur de recommencer encore et encore s’il le fallait. Après tout un morceau de musique demandait des heures de répétitions, mais elle préférait être honnête, elle n’allait probablement pas tout réussir du premier coup, loin de là et si cela lui posait problème, alors peut-être qu’elle devrait essayer de trouver quelqu’un d’autre et elle ne voulait pas lui faire perdre son temps. Elle ne savait pas à quoi elle s’était attendu eu lui demandant ce qu’il faisait dans la vie, mais elle ne s’était pas attendu à avoir autant tapé dans le mille en parlant d’ange gardien. Elle ne put s’empêcher d’écarquiller un peu les yeux sous la surprise.

« Vraiment ? Donc en plus de sauver les gens dans la rue, vous les sauver aussi dans votre bloc opératoire ? » Elle restait un instant stupéfaite se demandant c’était quel genre de chance qu’elle venait d’avoir ce soir ? Combien de pourcentage il y avait pour que les éléments s’alignent à ce point ? Mais elle était d’accord, elle n’était pas non plus pressée de voir ses capacités en la matière. En revanche elle se retrouvait assez impressionnée. « Je ne vous connais pas encore, mais ya t-il quelque chose que vous ne savez pas faire ? » Finissait-elle par demander amusée. Quel âge avait-il ? Il semblait pourtant ne pas être plus vieux qu’elle… Y avait-il anguille sous roche ? De tous les scénarios qu’elle aurait pu imaginer, celui-là il fallait le vivre pour pouvoir y croire…