« Ady, ne fais pas l’enfant.
- Je n’ai pas envie de me marier, Caleb.
- Il ne s’agit pas de ce que tu veux faire, mais..
- Mais de ce que je dois faire, je sais. On dirait papa, quand tu parles comme ça !
- Papa a raison. Tu ne peux pas continuer à bénéficier des privilèges de notre rang sans te plier à tes devoirs. »

*Je lève les yeux au ciel, en croisant les bras sous ma poitrine. Je savais que je n’aurais pas dû venir prendre le thé avec mon frère quand il me l’avait proposé. Nous ne nous voyons que rarement, les réunions de famille, ce n’est pas très fréquent chez les Flint. J’appréciais toujours de voir mon aîné, mais les choses se terminaient systématiquement de la même façon. Finalement, Caleb garde le silence, et je me dis que c’est gagné pour ce soir. Mais au lieu de cela, voilà qu’il sort de nulle part un document qu’il fait glisser sur la table en verre, qui se fond parfaitement dans la magnifique verrière du château familial. Curieuse, je ne peux pas m’empêcher d’y jeter un oeil.*

« Alors sans parler de mariage dans l’immédiat, rencontre au moins cet homme. Il est chef du bureau des Aurore, c’est un black et… C’est le fils de Yelena Black. 
- LA Yelena Black ?
- Oui, celle que maman écoutait en boucle. »

*Soudainement, mon frère vient de capter mon attention. J’attrape le dossier et constate qu’effectivement, sur le profil présenté, on peut lire le nom de sa mère. Qui est Yelena Black ? Oh, seulement l’une de mes grande icônes de la musique. Une femme qui était morte quelques années avant ma naissance, mais que maman avait toujours adoré et m’avait fait écouté en boucle toute mon enfance. Il ne serait pas de trop de dire qu’il s’agissait de l’une de mes principales inspirations dans la vie.

Je ne m’étais jamais trop intéressée à sa vie personnelle, quoi que je savais qu’elle était une sang-pur. Elle avait donc un fils de… 37 ans. C’était tout de même onze de plus que moi. Mais le simple fait qu’il soit l’enfant de mon idole était une bonne raison pour le rencontrer, et ça, Caleb le savait. Surtout que, d’après cette petite photo, il était parfaitement à mon goût.


C’est pour cela que, quelques semaines plus tard, je me trouve là, devant le Regent’s Park, à onze heure tapante. Bon, peut être à onze heure deux. Mais ce n’était tout de même pas de ma faute si j’avais été un peu coincée dans le traffic avant d’arriver. Mais je détestais tout de même avoir deux minutes de retard, ce n’était vraiment pas mon genre.

Au moins, je suis plus que largement bien apprêtée. Une jolie robe à la coupe droite, mes cheveux remontés en un chignon complexe, un maquillage irréprochable. Et pour cause, avant de venir, j’étais à une petite interview, et j’avais demandé sur la préparation une coiffure et un maquillage digne d’un date. Après l’interview, il m’avait suffit de me changer pour une tenue un peu plus formel que le jean et le haut que j’avais mis devant la caméra, et j’avais été prête.

Ainsi, dans ma jolie robe bleue marine, les cheveux relevés dégageant ma nuque, je cherche le visage que j’avais aperçu sur cette photo il y a quelques semaines. Mais je n’ai pas besoin de chercher bien longtemps que je sens une main poliment tapoter mon épaule. Je me retourne et tombe sur cet homme. Il est assez grand et ressemble bien à la photo. Il est élégamment vêtu et ses mots sont aussi délicat que sa tenue. Je lui souris et hoche la tête.*

« C’est bien moi. Enchanté monsieur Black. Veuillez pardonner mon léger retard, j’ai été surprise par le traffic. Mais je vous en prie, vous pouvez m’appeler Ady. »

*Personne ne m’appelait jamais par mon prénom complet, ni par mon nom de famille, alors je préférais largement ce surnom. Ce n’était pas forcément preuve de proximité pour moi, simplement une appellation.*

« Vous êtes fort aimable, je ne puis que vous retourner le compliment. »

*Affirmais-je, en souriant, aimablement. Je ne peux m’empêcher de détailler son visage fin, mais marqué de traits droits et virils. Il est bel homme, c’est certain, son apparence est soigné. Aucun doute, il est parfaitement mon genre d’homme. Mais plus important, surtout. C’est le fils de Yelena Black. Mais devais-je l’évoquer ? Parler de ma mère pouvait encore être douloureux pour moi, et je n’étais pas une enfant lorsque je l’avais perdu, comme lui. Alors cela me paraissait très mal poli. Tant pis, je me contenterais de le savoir, c’était déjà une bonne chose, n’est-ce pas ? Et puis, peut être que le sujet viendrait sur le tapis de lui même.*

« Savez-vous ce qui est prévu pour aujourd’hui ? »

*Demandais-je, ignorant tout de ce qui avait pu être organisé pour notre rendez-vous arrangé. Peut être était-ce lui qui avait choisi le lieu ? Cela dépendait tellement des parents et des hommes, impossible de le savoir à l’avance. Mais au moins, il saurait ce que serait la suite des événements. En espérant que je ne me sois pas habillée trop formellement pour cela.

*L’homme face à moi ne semble pas s’encombrer de ressentiment pour mon léger retard et j’en suis soulagée. Caleb m’en aurait voulu si les choses avaient mal démarré à cause de ma « carrière » dans le monde moldu. C’était un sujet un peu tabou, dont on ne parlait pas vraiment. Par chance, au moins, je réussissais, et mes chansons plaisaient aussi dans le monde sorcier, la famille Flint n’avait donc rien à y redire… Pourtant, tout de même… Personne ne voyait cela d’un bon oeil. Mon père trouvait que les sangs-purs n’avaient pas à s’abaisser à être un vulgaire troubadour, amuseur public… Ou plutôt, il se pliait à l’opinion des sangs-purs un peu plus ferme que notre branche familiale.


Mais moi, je m’en fichais. Moldus, sorciers, tant qu’on aimait ma musique, je ne comptais pas m’empêcher de faire ce que j’aimais. Pourtant, face à un sang pur, j’éviterais de trop en parler… D’autant que les Black n’étaient pas réputés pour être des grands fans des moldus. J’avais d’ailleurs été surprise que cette rencontre se fasse dans le Londres moldus plus que sorcier. Mais pour moi, peu importait, désormais, j’étais à peu près aussi à l’aise dans l’un que dans l’autre. Le monde sorcier était tout de même celui que j’avais connu en grandissant, et parfois, j’étais tout de même surprise de certaines situations. Mais après 7 années à vivre parmi les moldus, je m’étais habituée à tout cela.


Enfin, pour aujourd’hui, je me contente de demander ce qui était prévu pour notre rendez-vous. D’un geste élégant, l’homme récupère sa montre à gousset, ce que je trouve particulièrement attirant. Ce genre de chose n’était plus trop porté ou utilisé dans le monde moldus, et j’en étais bien attristé. N’était-ce pas particulièrement distingué, ce genre de tenue, de geste, d’objet ? Je me mordille la lèvre, en me disant que j’avais finalement bien fait d’accepter ce rendez-vous. Après tout, j’étais célibataire depuis quelques mois maintenant, et à défaut de me marier, je pouvais bien profiter de ce rendez-vous comme si de rien n’était ? C’était étrange, bien sûr, nous ne nous étions jamais rencontré. Mais si je partais positive, les choses se passeraient forcément mieux que si je traînais la patte pour ce rendez-vous.

Nous avons donc plusieurs heures. Je me retrouve pensive. Où devrais-je amener Orion Black pour notre premier rendez-vous ? Dans un parc ? Pas très intéressant. Dans un bar ? Pas très classe, nous n’étions pas habillés en conséquence de toute façon. Un escape game ? Je doutais que ce soit son genre. Et à cette heure, il n’y avait de concert nulle part. L’emmener au studio pour lui montrer mon monde et mon quotidien ? Bof. Je l’observe, un instant, mais ma réflexion est coupée par sa question. Je ne peux contenir un sourire amusé en secouant la tête.*

“Sage est celui qui sait reconnaître qu’il ne sait pas quelque chose. Je vis chez les moldus depuis plusieurs années que j’en oublie que certains termes y sont uniques.”

*Je pointe ensuite la route, un peu plus loin, avant d’ajouter : *

“Les moldus se déplacent avec ces voitures, Londres est une grande ville où beaucoup de gens circulent, donc les routes sont parfois saturées. C’est ce qu’on appelle le trafic.”

*Lui avais-je appris, avant de me tourner, et de voir son regard se poser sur une mère et son fils avec nostalgie et mélancolie. Je reconnais ce regard pour avoir souvent le même en tombant sur des scènes me rappelant mon enfance et ma propre mère. Je ne peux guère que comprendre ce regard et cette tristesse.

Son sourire se ferme, puis il tourne le regard vers moi. Je lui souris, avant de proposer, sur un coup de tête : *

“Avez-vous déjà visité un musée ? Le british museum et celui d’histoire naturelle sont très connus chez les moldus.”

*Avais-je simplement proposé. Je ne sais pas pourquoi, mais je l’imaginais bien, dans cette tenue, à admirer des oeuvres d’art, ou lire quelques panneaux dans les vieux bâtiments d’un musée. Peut être avais-je simplement envie de voir cette scène ? Mais flâner dans un musée était une chose que je faisais parfois avec ma mère quand elle m’emmenait dans le monde moldu, bien que ce soit assez rare.*

*En réalité, je n’imagine pas qu’une information si banale que celle-ci puisse pousser à une réflexion comme la sienne… D’autant plus que c’était désormais évident pour moi, tout cela. Très honnêtement, tout ça me passe au-dessus de la tête. Je trouvais ça assez puérile, cette guéguerre, chacun ne pouvait donc pas vivre de son côté tranquillement ? Moldus ou sorciers, il y avait des choses qui nous rapprochaient, d’autres qui nous éloignaient… Et alors ?

Moi, je me fichais de qui faisait quoi, qui aimait qui, qui pouvait user de magie et qui n’en usait pas. Chacun croyait en ce qu’il voulait croire, chacun pratiquait la magie, ou non. Cela dit, je pouvais comprendre un sentiment de jalousie venant des moldus, puisque la technologie avait beau avoir bien évolué, jamais elle n’atteindra le niveau de la magie. En réalité, c’était l’avis d’une gamine privilégiée et égoïste que j’avais là, et au fond de moi, j’en avais sûrement un peu conscience.

Mais pouvait-on m’en vouloir ? Je n’y pouvais rien si j’étais née dans une bonne famille, sang-pur, assez fortunée et respectée, si j’avais été choyée par ma mère, si j’avais hérité de ce talent et cette passion pour la musique ou de ce physique. J’étais née avec tout, la beauté, la richesse, les privilèges. Alors ce que les autres faisaient ? Je m’en fichais. Tant qu’on ne me dérangeait pas, chacun pouvait vivre sa vie, non ? Je n’avais pas de complexe qui me faisait dire que les sang-pur devaient diriger le monde, ou peut être n’avais-je pas envie d’avoir sur les épaules les responsabilités de ce que cela amènerait. Non, j’étais bien dans ma vie partagé entre le monde moldu et le monde magique.

Enfin, bref, il se contente de me dire que c’était intéressant, et cela me ramène des années en arrière, quand je m’étais moi-même fait ce genre de réflexion en apprenant les détails de la vie sans magie. C’était certes, beaucoup moins pratique que le transplanage, moins rapide, plus polluant aussi. Mais c’était le mieux que la technologie moldue avait, pour l’instant en tout cas. Et puis, si je ne voulais pas me faire pointer du doigt en tant que sorcière dans ce climat un peu tendu, il valait mieux éviter de trop utiliser la magie pour ce genre de chose. En soit, cela ne me dérangerait pas tant que cela se sache, mais je craignais l’impact que cela aurait sur ma carrière, alors je faisais attention. Il n’y avait rien de plus important pour moi dans ma vie que ma musique, alors il était hors de question que je gâche ma carrière pour quelque chose d’aussi insignifiant qu’un espèce de “coming out magique”.

Le brun fait alors un constat à voix haute, un constat qui n’est pas bien étonnant pour un homme si habitué à la vie dans le monde magique. Je hausse les épaules avant de répondre : *

“Je m’y suis habituée. Si c’est ce qu’il faut pour vivre de ma passion, ce n’est pas cher payé.”

*Affirmais-je, avec aplomb. Cela ne plaisait peut être pas, surtout à ma famille, mais s’il avait fallu renoncer à mon titre pour faire de la musique, je l’aurais sûrement fait, sans trop hésiter qui plus est. Après tout, comme je le disais souvent, la musique avait été là pour moi quand le reste du monde ne l’était, ma famille moins encore que d’autre. On ne pourrait jamais retirer ma magie, mais ma musique autant une part de moi que cette magie.

Alors, après cette intervention, je me contente de sourire avant de lancer la suite de la discussion sur notre rendez-vous arrangé. Je lui propose de visiter un musée, et il accepte sans se faire prier, ce qui me réjouit, tout en m’informant qu’il n’en avait jamais visité avant aujourd’hui. Rapidement, je fais donc mon choix, et lui répond : *

“Alors va pour le British Museum, il n’est pas bien loin, mais pas juste à côté, allons y à pied.”

*Proposais-je donc, en lançant le mouvement. C’est là qu’il se confie, et je soupire d’aise, en posant une main sur mon coeur. Je le laisse finir, avant de lui offrir un grand sourire pour répondre : *

“En réalité, je suis soulagée par votre aveu. J’ai moi-même accepté ce rendez-vous à défaut d’un mariage immédiat pour satisfaire mon frère aîné et mon père. J’ai beau être née avec le sang pur, je ne compte pas me marier par obligation pour autant. Cela dit, notre différence d’âge m’importe peu, en revanche. Contentons nous de passer un bon moment tout en rassurant nos familles mutuelles !”

*Avais-je donc conclu, comme une promesse muette de prétendre être séduit, pour au moins échapper quelque temps à d’autres remarques de nos familles. En tout cas, de mon côté, je comptais bien user de ce rendez-vous pour éviter d'autres discussions sur le sujet dans les mois à venir !*

*Ma vision était peut être restreinte ou, de nouveau, celle d’une personne privilégiée. Mais je ne pouvais que me dire qu’en réalité, c’était surtout de la naïveté. Au fond, j’espérais peut-être que si chacun ignorait son voisin à défaut de pouvoir vivre en harmonie, le monde ne s’en porterait que mieux. A force de partager le mode de vie des moldus, je pouvais comprendre qu’il était difficile de renoncer à certains luxes, comme pour la voiture, l’avion ou même le téléphone portable. Les sorciers jugeaient cela durement, mais en réalité, c’était comme les priver de transplanages ou de hiboux : la société serait sans dessus-dessous. Je pouvais comprendre les deux parties, et à mon sens, comme pour tous, la bonne réponse n’était pas dans l’excès. Aider les moldus à supprimer toutes ces choses polluantes pour créer peut être une technologie usant de magie, la solution pourrait être là. Vouloir priver les moldus de leur façon de vivre sans leur proposer de solution de repli, cela me paraissait exagéré et surtout, irréaliste.

M’enfin, de toute façon, je n’étais pas du genre à songer à tout cela tous les quatres matins. ma musique m’importait bien plus que tous ces questionnements sans queue ni tête, dont je n’avais pas la réponse. Je n’étais pas assez investie chez les sorciers pour avoir mon mot à dire, et pour les moldus, s’ils savaient que j’étais une sorcière, je pouvais dire adieu à toute influence. Et encore une fois, ma musique était bien plus importante pour moi que tous ces conflits.

Plus importante même que toute relation romantique, qui, jusque-là, m’avaient de toute façon toutes déçues les unes après les autres. Et surtout, bien plus importante qu’un mariage arrangé, qui rassurerait mon père et mon frère mais m’enfermerait dans une cage que je détestais déjà. Au moins, il était rassurant de voir que l’homme qui m’accompagnait aujourd’hui était sur la même longueur d’onde. C’était vraiment rassurant, à n’en pas douter.

Sa réponse m’arrache un rire amusé, avant de le regarder, d’un air très amusé. Ainsi, Orion Black était un séducteur. En réalité, les rumeurs que j’avais vaguement entendu d’une oreille faisait de lui un Don Juan, non pas dans le sens qu’il courait les jupons, mais qu’à mon instar, il avait eu un certain nombre de relations qui s’étaient arrêté à leur balbutiement. Peu importe ses raisons, je n’y avais pas vraiment prêté attention, car en réalité, si on regardait mon image publique, à ce sujet, ce n’était guère plus brillant.*


“Quel charmeur vous faites, Monsieur Black.”

*Il continue, et me fait rire de nouveau, en roulant des yeux d’un air amusé en secouant la tête, faussement embêté, mais appréciant sincèrement son humour : *

“J’espère que non. Ne savez-vous donc pas que vos deux profils n’ont rien à envier l’un à l’autre, ne vous en faites pas, s’il y a la moindre photo, vous serez à votre avantage… Surtout dans cette tenue.”

*Affirmais-je en glissant, à mon tour, un petit compliment sans m'encombrer de trop de subtilité. Après tout, il n’y avait pas été avec le dos de la cuillère, donc je n’avais pas de raison d’y aller délicatement non plus. Si nous ne nous étions pas mis d’accord pour un simple rendez-vous rassurant nos familles, j’aurais pu croire qu’il tentait de me séduire. Mais après tout, pourquoi pas ? Il était bel homme, tout à fait mon genre. Il semblait curieux, qui était une qualité bien souvent négligée chez les hommes, mais que je savais particulièrement apprécier. Il connaissait mon métier, mais au vu de son ascendance, il était plutôt bien placé pour ne pas le déprécier. Peut être même qu’il pourrait apprécier ma musique ? Devrais-je l’inviter à mon prochain concert en petit comité, comme j’aimais le faire de temps en temps ? C’était une idée ma foi plutôt intéressante que je gardais à l’esprit. Enfin, je ne devais pas m’emballer, comme à chaque fois qu’un garçon me plaisait. A 28 ans bien tassé, il était temps que je garde les pieds sur terre, et que j’arrête de m’emballer au moindre compliment bien placé d’un garçon qui me plaisait. Alors, je me reconcentre, d’autant plus sur sa prochaine question.

D’un geste, je sors mon propre smartphone dernière technologie de ma poche en hochant la tête : *

“Bien sûr ! Aujourd’hui, ce serait presque comme demander à un sorcier s’il a une baguette, c’est l’extension des bras des moldus… Mais je dois admettre que c’est tout de même bien pratique. Beaucoup plus rapide, plus fiable et plus interactifs que les hiboux. J’aime beaucoup mon hiboux, bien sûr, mais ce n’est pas franchement comparable. Et puis, internet, ça, c’est une brillante invention des moldus ! Je peux vous montrer, si vous êtes si curieux. Connaissez-vous les réseaux sociaux ?”

*Demandais-je, en déverrouillant mon écran d’un geste mécanique, prête à dégainer les applications pour satisfaire sa curiosité et lui faire découvrir ce que moi-même j’avais mis des années avant de parfaitement comprendre et maîtriser.*

*Cacher mes émotions n'avait jamais été mon fort. J’étais une artiste, pas une politicienne. On m’avait enseigné l’art de la rhétorique, évidemment, celui de bien paraître en public. Je savais faire bonne figure et bonne impression lorsque je me détachais de ce qui arrivait, ce qui était globalement souvent le cas quand je ne faisais que répondre à mon devoir de naissance. Mais dès que mon cœur battait, que la colère m’envahissait ou que le désespoir me secouait, tout un chacun pouvait le lire au fond de mes yeux, à défaut de l’entendre dans mes chansons. C’était aussi et même surtout pour pouvoir écrire mes chansons que je ne m’étais jamais intéressée à la façon de cacher mes émotions ou même de les réprimer. Je préférais les exprimer dans mes accords et mes chants.

Dans tous les cas, Orion n’aurait pas beaucoup besoin de son don de légimencie pour comprendre ce que je pensais ou ressentais. Ou alors peut-être me croyait-il terriblement brillante actrice, pour mentir sur ce qui se lisait dans mon regard. Je ne perdais pas de temps à mentir, quoi que, parfois, j’avais du mal à poser des mots sur ce que je ressentais, surtout quand j’étais frustrée ou que les choses ne se passaient pas comme je voulais qu’elles se passent.

Enfin, dans tous les cas, oui, j’apprécie plus que je ne l’aurais imaginé ce premier rendez-vous. L’espace d’un instant, j’ai une pensée pour Ewan. Ce n’était sûrement pas correcte pour une femme toujours officiellement fiancée que de rencontrer un autre homme comme ça. Je savais qu’il le tolérait quand il s’agissait de moldus ou de sang-mêlés que je n’épouserais pas, mais cette fois, les choses étaient différentes. M’en voudrait-il suffisamment pour enfin rompre ces fiançailles qui traînaient depuis plus d’une décennie ? Mais était-ce vraiment ce que je souhaitais au fond de moi ?

Je ne voulais pas y penser, ce n’était d’ailleurs pas correct de penser à un autre homme pendant un rendez-vous galant, n’est-ce pas ? Fort heureusement, la question du brun me permet de penser à autre chose, et en l’occurrence, à la technologie. Je sors mon téléphone, lui en parle un peu, et lui demande s’il connait les réseaux sociaux. Il émet une hypothèse et je fais une petite moue, en secouant un peu la tête, avant de répondre : *

“Sur le concept global, oui. Mais c’est plus précis. Chaque réseau a son intérêt. Instagram est une plateforme pour partager les photos au public, snapchat permet de communiquer de façon plus privé en s’assurant que les messages s’effacent et qu’on ne puisse pas prendre de captures d’écran. Youtube est là pour les vidéos, c’est là que je partage mes chansons principalement. Et il y en a plein d’autres !”

*L’informais-je, avec intérêt. Pour être honnête, j’avais toujours trouvé ça assez fascinant, surtout qu’encore une fois, je n’avais pas eu de mal à m’établir sur ces plateformes : ma réputation et mes chansons m’avaient permis d’avoir facilement ce que beaucoup de jeunes cherchaient désespérément. Enfin, ce n’était pas non plus le but de ma vie, mais cela ne me déplaisait pas, de savoir qu’on appréciait suffisamment ma musique et la personne que je montrais pour qu’on désire me suivre sur les réseaux et partager un bout de mon quotidien.

C’est là qu’Orion lance une idée. Mais alors que je l’écoute, je ne peux m’empêcher de réaliser qu’il a eu la brillante idée de s’arrêter en plein milieu de la route. J’avance un peu, mais il ne me suit pas tout de suite, pendant que je me retourne pour lui dire que le feu vient de passer au rouge et que nous devons avancer. Mais je n’ai le temps de rien dire que, déjà, un automobiliste ne s’embarassant pas de jeter un coup d'œil à la route fonce sur le sorcier. Son prénom m’échappe alors que, sans plus de délicatesse, j’attrape ce que je peux, c’est-à-dire sa veste, et tire d’un coup sec pour lui éviter de se faire renverser. Mais dans mon élan, j’ai tiré un poil trop fort, au point que le corps du brun vient percuter le mien avec force et me fait tomber au sol, fort heureusement, presque entièrement sur le trottoir, mais dans une rencontre un peu trop intense… D’autant plus que, entraîné par son élan sûrement, le brun se retrouve sur moi, pendant que la voiture disparait en klaxonant.Je me redresse sur les coudes en grognant un peu, les coudes probablement abîmés et les fesses ayant pris un sacré coup. Je plonge alors mes yeux clairs dans ceux du brun, pour lui dire avec un peu de malice au milieu de tout ça : *

“Leçon n°1 du monde des moldus : on ne traîne pas sur la route, surtout quand le feu est vert. Même les sorciers n’ont pas le temps de sortir la baguette pour contrer une voiture qui roule un peu vite…”

*A ma pointe d’humour, le brun réplique une brève excuse d’un air confus, avant d’enchaîner sur une pointe d’humour. Je hausse un sourcil amusée face à sa réflexion et réponds, sur le même ton : *

“Vous avez raison, pourquoi serait-ce toujours la damoiselle en danger et le brave chevalier qui la sauverait ? Nous sommes en 2019, un peu de modernité, par la barbe de Merlin !”

*Affirmais-je en me redressant un peu. Et puis, il ajoute qu’au point où nous en sommes, nous pouvions désormais nous passer de l’encombrement vouvoiement et des très politiquement correct “Monsieur Black” et “Miss Flint”. Exit les noms de famille.

J’attrape sa main, mes yeux plongés dans les siens, mon sourire ne quittant pas mes lèvres, en me redressant. Sans le quitter du regard, je lui réponds : *

“Cela me parait sensé, Orion.”

*Je me lève ensuite, et essuie la poussière sur ma robe, notamment sur mes fesses. Pendant ce temps, Orion se met à genoux, prétendant refaire son lacet, mais je le vois user de sa baguette et sens mes égratignures se refermer discrètement, pendant que je jette un regard autour de nous, pour m’assurer que personne ne compte venir vers nous pour voir si tout allait bien. Mais s’il y avait eu des regards sur nous, ce n’était désormais plus le cas, alors je pouvais me détendre et le laisser faire.

Orion se redresse, je tourne de nouveau la tête pour poser mon regard sur lui et le remercier, mais il se penche à mon oreille et murmure quelques mots qui me font légèrement rougir, en songeant qu’il pense à mes fesses… Ou peut être parce que mes idées sont loin d’être digne d’une jeune fille bien élevée. Enfin, certes, je n’étais pas totalement coincée, mais je restais une jeune femme rêveuse et romantique. Je ne savais pas ce qu’il dégageait, si c’était son charisme naturel ou simplement son charme qui me touchait tout particulièrement, mais je le trouvais tout particulièrement attirant.

Je toussote, le poing fermé devant mes lèvres et légèrement remonté pour cacher mes pommettes ayant légèrement rosie. Ce n’était pourtant pas par pudeur, mais plutôt un peu honteuse à l’idée que, finalement, cela ne me déplairait pas, ce genre de geste. Allons, je venais de le rencontrer, ce n’était pas mon genre ! Alors, je balaie ces pensées, avant de simplement le remercier.*

“Merci.”

*Me contentais-je de dire. Orion eut ensuite la délicatesse de changer de sujet, pour, en plus, me faire de nouveau rire, amusée. Un peu fière, je fais une petite moue.*

“Fais un show de trois heures à chanter et à danser, tu verras c’est plus physique qu’on ne pourrait le croire ! Et puis, cela dépend de comment on présente les choses. Avoir été tiré par une demoiselle pour se retrouver sur elle moins d’une heure après la rencontre, n’est-ce pas là la preuve d’un charme irrésistible ?”

*Je ne plaisantais qu’à moitié. Son charme était parfaitement irrésistible, même si ce n’était pas du tout pour cela que je l’avais tiré à moi.

Avec beaucoup d’attention, mon très cher compagnon pour la journée me propose de m’asseoir pour reprendre mes esprits. Je suis touchée par son attention et m’apprête à lui dire que je n’ai pas vraiment besoin de m’asseoir mais il parle ensuite d’une vidéo youtube. Et pourquoi pas, tiens ? Je réfléchis un instant et finis par hocher la tête : *

“Pourquoi pas, ça ne nous fera pas de mal !”

*Affirmais-je, avant de pointer un banc vers un parc, un peu plus loin. Nous nous y installons et, de nouveau, je dégaine mon téléphone qui, heureusement, n’a pas subi de dégâts lors de notre chute spectaculaire. Là, j’ouvre rapidement youtube d’une main experte et, dans la barre de recherche, tape mon nom, tout simplement. Rapidement, des vidéos défilent, et je finis par choisir l’une des dernières pour lui montrer, avant de guetter, un peu gênée, sa réaction, surtout devant cette chanson qui parlait d’une ancienne relation…*

*Orion rit. Il est d’autant plus beau quand il rit. C’est un son que j’aime, une mélodie envoutante. Je pourrais écrire une chanson sur ce rire, ce sourire, ce regard. J’ai envie de le faire rire encore plus, pour assister à ce spectacle encore et encore. Je voudrais même être la seule à assister à ce spectacle.

Orion a raison, je faisais confiance très vite, trop vite. Peut être était-ce de l’optimisme, de la naïveté voire de la bêtise. Mais j’aimais penser que c’était simplement mon côté positif : je voyais d’abord le côté positif des gens… Et puis, je partais toujours du principe que j’allais apprécier une personne, et ses actions determinaient ensuite si c’était effectivement le cas ou non. Pour l’instant, il n’y avait rien qui me permettait de penser qu’Orion n’était pas sincère dans ses mots et ses gestes.

En parlant de ça, le brun continue son opération séduction sans s’encombrer de subtilité et me fait légèrement rougir en me pinçant les lèvres.*

“Si vite ? Il faut faire monter le désir, Orion…”

*Enfin, ça, c’est ce que je disais. A une époque de ma vie, je m’étais promis d’arrêter de coucher le premier soir lorsque j’étais vraiment très attiré par mon partenaire, mais soit je n’avais pas tenu ma résolution, soit j’en étais ressorti terriblement frustrée. Depuis, je me laissais porter par mes désirs. Cela dit, le jeu de séduction et savoir se faire désirer était aussi quelque chose que j’aimais. Lorsque j’étais décidé, non pas pour de stupides questions de morale à deux francs six sous, mais bien pour faire monter le désir jusqu’à nous en rendre fou, alors je pouvais m’y prêter.

En songeant à cela, je me rends compte que ce rendez-vous n’était pas censé être ce genre de date. C’était un rendez-vous arrangé par nos deux familles deux sang-purs qui attendaient de leur enfants un mariage. Ce n’était pas deux personnes qui, spontanément, avaient songé qu’ils pourraient passer un bon moment ensemble. Je ne peux m’empêcher de jeter un regard au brun en songeant à cela, avant de me dire qu’il valait mieux ne pas y penser et plutôt profiter de ce rendez-vous le temps qu’il durerait.

Pour commencer à me présenter un peu plus, nous voilà installé sur ce banc, au milieu de la foule, pour lui montrer ce que je faisais de ma vie. Sa main se pose sur mon épaule et je ne trouve rien à y redire. Sa paume est chaude et cette chaleur irradit de mon épaule dans tout mon corps, c’est agréable.

La vidéo avance, et finalement s'achève. Je redresse le regard sur lui pour écouter ses remarques. Je le laisse parler et continuer en me pinçant les lèvres. Et puis, finalement, c’est plus fort que moi, j’explose de rire. Je tousse un peu pour me calmer, avant de me redresser en le regardant, le regard brillant d’amusement. Ce n’est pas de la moquerie, simplement un choc des cultures… Et pourtant, Dieu seul savait que j’y étais passé, moi aussi. Comment avais-je pu oublier à quel point cela pouvait être étonnant pour des sorciers ? Tout cela faisait tellement partie de ma vie quotidienne que j’en avais oublié que ce n’était pas du tout intuitif pour les personnes qui n’avaient jamais vu cela.

J’inspire profondément, avant de m’expliquer : *

“Désolée, je ne me moque pas, c’est simplement… Une réaction plutôt adorable. Je crois que je n’ai plus la notion de ce qui est surprenant pour les sorciers ou non. J’aurais dû te l’expliquer avant, rien n’est vrai. Ce sont des effets, et du jeu.”

*Je réfléchis une seconde, avant de repondre à ses questionnements plus précisement, car cette réponse pouvait être assez vague, surtout quand on a aucune notion des habitudes et technologies moldus.*

“Je ne connais pas cet homme. Enfin, je ne l’ai vu que sur le tournage, c’est un acteur. Tout n’est que du jeu, c’est comme du théâtre, ça fait partie de mon métier. Ce ne sont pas de vrais baisers, ni mon lit, ni rien. Tout est fait pour que ça paraisse vrai, mais ça ne l’est pas. Comme le lion, et les autres animaux. Les moldus ont une technologie qui permet de superposer les images et prétendre que c’est la même. On a filmé un lion, et puis une autre scène sans lion de mes chants, et puis, on a regroupé les deux images.”

*Je le regarde, en me pinçant les lèvres, avant d’ajouter : *

“Il n’y a donc aucune raison d’être jaloux, ni de craindre que je finisse par me prendre un coup de griffe de lion en tournage. Mourir de la patte d’un lion pour une Serdaigle, non, très peu pour moi.”

*Affirmais-je malicieusement, avant de hausser un sourcil.*

“Mais merci pour la chanson. Les téléphones permettent de les écouter sans avoir à regarder les vidéos, je pourrais te montrer comment, si tu veux. D’ailleurs, pourquoi ne pas commencer par aller te chercher un téléphone ? Comme ça, tu pourras même prendre des photos de notre sortie au musée. Qu’en penses-tu ?”

*Proposais-je, tout sourire, détendue par ce petit fou rire devant la réaction du brun face à ma vidéo. Mais en effet, sans lui avoir expliquer que tout était faux et que je ne connaissais pas cet homme, les choses devaient être un peu étrange dans son esprit. Avait-il pu songer que j’étais le genre de femme à me partager, ou pire, que j’aimais qu’on me regarde avec d’autre ? Non, c’était définitivement trop étrange, je n’avais pas envie d’y songer. C’était vraiment idiot de ma part ne pas lui avoir expliqué. Peut être avais-je vécu trop longtemps chez les moldus, car tout cela me paraissait évident. Enfin, au moins, il se montrait honnête. Et cette réaction me donnait envie de lui faire découvrir d’autant plus de choses que les moldus avaient développé. S’il réagissait comme ça à une vidéo youtube, je me demandais comment il réagirait… Au cinéma, par exemple, ou mieux, à un film en 3D ! Une soirée film semblait s’imposer, dans tous les cas, avec popcorn et tout ce qu’il fallait… Mais plus tard. Pourquoi pas lors d’un second rendez-vous ? Ce n’était pas du tout quelque chose que j’aurais imaginé en débarquant ici, et pourtant, là, maintenant, je n’ai pas envie que ce rendez-vous s’achève et pire, même, je me prenais la main dans le sac, en train de songer déjà au prochain…Décidemment, Orion était plein de surprise, à n’en pas douter.*

*Au moins, Orion ne semble pas se vexer de mon rire. En revanche, il marmonne un peu. Je ne peux pas m’empêcher de me dire que je vivais peut être un peu trop parmi les moldus pour oublier à quel point tout ça était difficile à comprendre pour un sorcier. Surtout qu’il y a moins de 10 ans, j’étais tout comme Orion. Je n’y comprenais pas grand chose, moi non plus. J’avais dû demander des conseils à des amis moldus, nés-moldus ou cracmol qui vivaient parmi eux depuis toujours. Et puis, petit à petit, les choses qui me paraissaient bizarres étaient devenues des habitudes, et désormais, je ne voyais même plus les choses qui étaient typiquement moldus.

Et puis, il me dit qu’il était tombé sur une détraquée sexuelle, et j’ouvre grand la bouche, choquée, mais exagérant un peu ma réaction, l'œil brillant.*

“Moi, monsieur ? Voyons, pour qui me prenez vous, monsieur Black ?”

*Je me mords la lèvre, avant de rire et de hausser les épaules.*

“Non, tu seras déçu si tu attends des trucs étranges, je suis définitivement classique à ce niveau là. Pas dans le mauvais sens du terme cela dit. Mais il est encore un peu tôt pour parler de nos préférences à ce niveau là, non ?”

*Demandais-je en haussant un sourcil entendu. A peine une heure après le début de notre rendez-vous, surtout complètement sobre comme ça, c’était beaucoup trop tôt. Enfin, pour un jeune homme de sang-pur que je rencontrais pour faire plaisir à ma famille, c’était trop tôt. Caleb m’en voudrait sûrement si je me contentais d’une nuit d’amusement, s’il finissait par l’apprendre. Il me ferait la morale, me dirait que j’avais encore pris les choses à la légère, que je ne comprenais pas qu’il s’agissait de l’honneur familiale, d’autant qu’une femme ne devrait pas se donner si facilement blablabla

Pas le discours le plus féministe du monde, c’était certain. Surtout que je ne comprenais pas son obsession avec le mariage. Il n’était pas particulièrement heureux d’avoir convolé en noces, nos parents ne l’avaient jamais été. Ils se supportaient, ils avaient eu des enfants à qui ils tenaient tous les deux, mais c’était à peu près ce à quoi se résumait leur 23 ans de mariage. Et moi, je ne voulais pas ça. Je ne voulais pas d’un mariage si minable que je me sentirais obligé d’aller chercher ailleurs pour y trouver tout ce qui me manquait. Etait-ce si étrange que cela ?

Enfin, bref. Pour l’instant, la question ne se pose pas : nous sommes relativement sage et en public. Pour le reste du rendez-vous, je lui propose même d’aller chercher un téléphone tout de suite avant d’enchaîner sur le musée. Mais voilà qu’il lance une “réunion stratégique”, ce qui m’amuse.*

“Bien, monsieur le chef des Aurors.”

*C’est plutôt sexy, ce côté là, à faire des plans et prévoir tout. Sa première affirmation ne me paraît pas incorrect, mais j’ai plutôt l’habitude que tout le monde me regarde, depuis que j’étais célèbre. Cela dit, il n’a pas tort, cela vient en partie de sa tenue. Si ma robe est assez classe, elle reste tout à fait décente pour 2019. Mais il semble être un gentleman tout droit sorti d’un film des années 30. C’était très sexy, mais pas très approprié, il faut l’admettre. Cela dit… C’était tout de même dommage. Je fais donc une petite moue et le laisse finir.*

“Ca me tue de l’admettre, mais tu as raison, ça me va. C’est dommage, cette tenue te va vraiment très bien…”

*Ajoutais-je en venant retirer une poussière imaginaire de son col, en relevant le regard vers lui, songeant que je l’aurais apprécié encore plus si j’avais pu lui retirer. Mais gardons cela pour plus tard, peut être un second rendez-vous, dans le monde sorcier cette fois, où cette tenue serait moins inappropriée et surtout, attraperait moins le regard.

En parlant d’attirer le regard, Orion dégaine une liasse de billets plus épaisse que le bouquin sur l'histoire de Poudlard. Mes mains viennent immédiatement se poser sur la sienne pour venir le faire remettre ça dans sa poche.*

“Oh mon dieu, ranges ça ! On pourrait te voler, voir te racketter avec une somme pareille. Les moldus n’utilisent presque plus de liquide… Mais bon, ça devrait suffire, ne t’en fais pas.”

*Je soupire, me lève et lui tends une main pour l’aider à se relever avec un petit sourire.*

“Allons te rhabiller alors. Je connais une boutique où on devrait trouver de quoi te rhabiller comme un.. Vrai Londonien.”

*Murmurais-je, pour ne pas dire comme un moldus, mais en le sous-entendant clairement. Pour être honnête, j’ai envie de m’amuser de l’habiller dans un style totalement streetwear, mais d’une certaine façon, je sais d’avance que ça lui ira aussi, alors ce ne serait pas amusant. Autant la jouer classe mais plus… Passes partout. Je sors alors mon téléphone, cherche pour une boutique sympa dans le coin, en trouve une et redresse la tête : *

“J’ai trouvé ce qu’il nous faut. D’après google, enfin, d’après mon téléphone, c’est à 7 minutes à pied… Par ici.”

*Je lance donc la marche dans une direction, après avoir fait signe à Orion de me suivre.*

*A sa remarque, je lève les yeux au ciel, avec un sourire qui traduit bien malgré moi que je ne suis pas si agacée ou embêtée par sa réponse. D’autant que j’avais parlé avant de réfléchir, et si ma phrase était au futur plus qu’au conditionnel, ce n’était pas tant volontaire. Ou peut-être était-ce juste inconscient ? Difficile de le dire.*

Oh, ça, ça ne dépend que de toi. Personne ne sait où nous mènera l’avenir.

*D’ailleurs, je n’aurais pas pensé que ce rendez-vous organisé par mon frère nous amène ici, à ce genre de discussion. Orion était différent des autres sang-purs que j’avais croisé. Il était l’exact opposé d’Ewan, toujours si poli et patient. En pensant à mon fiancé “officiel” mais avec qui je repoussais le mariage depuis plus de 10 ans, j’ai une pointe de culpabilité qui me vient. Mais je l’efface vite : je ne comptais pas me marier, de tout façon, pas plus avec Orion qu’avec Ewan. Et puis, coucher avec un homme si j’en avais envie, à 28 ans, c’était bien normal… Non ?

Bref. Je passe à autre chose, bien que je ne cache pas ma déception quand je lui confirme qu’il faudrait effectivement qu’il se change. Etant donné qu’Orion ne connait strictement rien au monde moldus (c’était peu de le dire, avait-il seulement suivi un seul cours sur les moeurs moldus à Poudlard ?), c’est moi qui le guide vers une boutique, merci le GPS. D’ailleurs, sans surprise, cela attise la curiosité du brun à mes côtés, et je fais un peu la grimace : *

“Honnêtement, je ne sais pas trop, je sais l’utiliser mais te dire d’où ça vient. Il y a un capteur qui donne ta position à un satellite en temps réel, et via la carte de Londres et le point que tu as mis, il calcule l’itinéraire qui va le mieux en fonction de ton mode de locomotion, et voilà.”

*C’est à peu près la seule explication que j’ai. Dans les détails ? Aucune idée de ce qui captait ma présence à tel ou tel endroit. Je devais accepter de partager ma localisation, ce que je faisais à chaque fois (et d’ailleurs, je m’assurais toujours d’éteindre la localisation quand j’étais dans le monde sorcier, par acquis de conscience).

Finalement, nous arrivons devant le magasin, et Orion fait un peu la tête. Je ris à sa remarque, attrape son bras et secoue la tête.*

“Mais non, fais moi confiance, ne fais pas attention à la vitrine. Allons-y.”


*Je l’entraîne à l’intérieur du magasin, me dirige dans le rayon homme, et regarde pour rapidement trouver quelques pantalons, un jean, un pantalon droit bleu marine et un beige, avant de prendre quelques chemises aussi de différente couleur, une blanche, une bleu pâle et une bleu nuit.*

Vas d’abord essayer ça, on choisira une veste en fonction du reste. C’est par là.

*L’informais-je, après lui avoir fourré tous les vêtements dans les bras et en avançant vers les cabines. Là bas, la vendeuse, en voyant un si bel homme débarquer se redresse, avant que je ne lui signale ma présence en signalant 6 articles, pour lui faire comprendre que ça ne servait à rien de lui faire les yeux doux. D’ailleurs, en se tournant vers moi, la vendeuse fronce les sourcils, comme si elle me reconnaissait, alors je pousse Orion pour ne pas me faire embêter avec des photos ou quoi. Je désigne ensuite une cabine à Orion en m’installant sur les petits poufs installés au milieu des cabines.*

Tu peux te changer ici, tu n’auras qu’à me montrer quand tu auras mis le premier ensemble, j’attends ici !

*Orion n’a pas l’air particulièrement convaincue par cette boutique, et moi, je prends cette mission d’autant plus à cœur. J’appréciais cette petite mission qui me changeait bien de mon quotidien. C’était rafraîchissant et amusant. Même si j’aimais qu’on m’habille et que des stylistes m’aident au quotidien, des fois, choisir et mieux encore, choisir pour quelqu’un d’autre, c’était particulièrement amusant !

Je m’applique dans mon choix, même si ça n’a pas l’air de trop plaire à Orion, je ne lui laisse pas le choix et le pousse vers les cabines. Qu’il s’estime heureux, avec son physique, j’aurais pu lui faire essayer une dizaine de tenues juste pour voir à quoi il ressemblait avec tel ou tel type de vêtement. Trois, c’était finalement bien raisonnable.

Une fois dans la cabine, alors que je suis assise en face, me retenant de me mettre en tailleur, ce qui n’est pas le plus élégant dans cette tenue, j’attends. Ou plutôt, je trépigne à l’idée de le voir dans un jean, une tenue un peu plus détendue, j’étais certaine que ça lui irait très bien aussi. D’ailleurs, il prend la parole, et même s’il ne peut pas le voir, je hausse les épaules.*

Pour être honnête, ça m’amuse beaucoup, alors vraiment, il n’y a pas de quoi !

*Affirmais-je avec malice, en me demandant par quoi il va commencer. Et puis, il pose une question, et je perds un peu de mon entrain. Je soupire, et moi qui était penché en avant me penche en arrière et, de nouveau, hausse une épaule, mais avec moins d’entrain. Je repense à Ewan… Mais peut-on vraiment parler de vie sentimentale quand mon “couple” d’avec mon fiancé a quasiment dix ans maintenant ? Non, pas vraiment. D’ailleurs, c’est surtout parce que nous étions fiancés que cette relation s’était terminée. Je n’étais pas du tout à l’aise avec les mariages entre sangs purs, depuis que je savais comment l’avait vécu ma mère… M’enfin, la question n’est pas là, et sans le savoir, heureusement que je ne pense pas plus en détail, car j’aurais pu dévoiler mon plus énorme secret comme ça, au premier rendez-vous, à un presque inconnu. Heureusement, la catastrophe est évité, et je me contente de répondre ce que je pense, avec transparence pour continuer sur notre lancée : *

“Officiellement, je suis fiancée, à un MacMillan, mais je repousse le mariage depuis quasiment 10 ans, parce que je ne veux pas de mariage arrangé. C’est un peu par dépit que mon frère m’a proposé ce rendez-vous, un peu comme compromis. Sinon, il n’y a pas grand chose à dire. J’ai eu une relation en début d’année, mais ça n’a pas duré très longtemps.”

*Comme d’habitude, avais-je songé, en soupirant. Mais je conclus finalement : *

“Au moins, ça fait de bonnes chansons. Et toi, alors ? Il y a une petite amie jalouse dont je devrais me méfier si elle apprend que tu as un rendez-vous pour rassurer ta famille ? Je dois m’attendre à recevoir des lettres de haine pour avoir osé t’emmener au musée en tête à tête ?”

*Demandais-je, sur une pointe d’humour, surement pour détourner la conversation de mes propres relations assez catastrophique, puisque je n’étais pas foutu d’en garder une seule.

Et puis, Orion sort de la cabine, fait un tour sur lui-même, et je ne peux pas m’empêcher de jeter un coup d’oeil à ses fesses qu’il a fort jolies et qui sont particulièrement mis en valeur dans ce jean, d’ailleurs. Je me lève, et viens retirer un faux plis sur son col, avec une petite moue songeuse.*

“C’est plutôt pas mal. Et… Très moldus. Mais un très beau moldu.”

*Lui avais-je dit, très sérieusement, fronçant les sourcils, avant de me pincer les lèvres pour ne pas rire. J’hésite un instant, avant de jeter un regard dans la cabine.*

Je ne sais pas s’il vaut mieux un haut sombre ou clair pour faire ressortir la couleur de tes cheveux et de tes yeux. Dans le doute, essaies le pantalon beige et la chemise bleue nuit, et on verra lequel est le mieux ! Et tu me trouves trop habillée, tu n’auras qu’à me choisir une tenue toi aussi, on sera assorti comme ça !”

*Lui proposais-je avec un clin d’oeil, avant de me reculer pour retourner m’asseoir et attendre qu’il se change à nouveau.*

*Pas le temps pour les affaires de coeur ? Voilà qui me paraissait bien triste.Ou peut être était-ce mon besoin d’affection qui me faisait dire cela. Je devais l’admettre, depuis la mort de ma mère, je cherchais l’approbation et l’affection de tous ceux qui voudraient bien m’en donner. J’allais toujours trop vite dans toutes mes relations, je fonçais tête baissée et d’ailleurs, ça ne se terminait jamais très bien. Au moins, je commençais à en avoir confiance, même si le fait de le savoir ne m’empêchait pas de recommencer. La plupart des gens ne refont pas la même erreur deux fois… Moi je la faisais trois, quatre, dix ou vingt fois pour être bien sûr, manifestement. Enfin, bref, je soupire, après eu un petit rire.*

« Bon bon, tant mieux alors. Mais ce n’est pas un peu triste, d’errer dans la vie sans jamais personne à chérir ? »

*Autant qu’être aimée, et peut être même plus, c’était aussi d’aimer dont j’avais besoin. Après tout, j’étais une artiste, je me nourrissais de mes émotions pour écrire et jouer. Je ne serais pas grand chose sans touts les émotions qui me permettaient de créer ma musique, c’était certain.

Et puis, il y a un instant un peu mode. Ce n’était pas ma passion absolue -rien ne dépassait la musique, mais avec le temps, j’avais appris à coordonner mes tenues et, je devais l’admettre, j’appréciais plutôt de suivre la mode. De toute façon, mon style était sans cesse commenter, alors il valait mieux que je fasse de bons choix. Et puis, à force de travailler avec des stylistes pour mes clips ou ms interviews, j’avais appris quels étaient les couleurs qui me mettaient le plus en valeur.

Mais avec mes cheveux dorés et mes yeux azurs, il était certains que ces couleurs ne seraient pas celle du brun aux yeux sombres derrière ce petit rideau. Restait à savoir lequel de ces deux alliances de couleur assez classique et basique lui irait le mieux.

J’ajoute qu’il pourra me choisir une tenue pour nous accorder s’il le souhaite, mais il me dit que ce n’est pas la peine, que je suis « magnifique comme ça ». Quel vil flatteur. J’étais plutôt sensible à la flatterie, mais on me disait souvent que j’étais belle. Désormais, les compliments qui me touchaient le plus n’était pas ceux qui touchait à mon apparence. Ou peut être que j’avais désormais suffisamment grandit pour vouloir être appréciée non pas pour ce à quoi je ressemblais mais bien pour qui j’étais.


Et puis, Orion parle d’un sujet qui m’avait trotté en tête avant d’arriver et j’ai enfin l’occasion d’en parler. De parler de l’unique raison qui m’avait poussé à accepter ce rendez-vous. Qu’il soit bel homme n’était qu’un bonus. Il aurait pu être le plus laid des hommes, j’aurais voulu absolument rencontrer le fils de mon idole. Un grand sourire s’affiche sur mes lèvres.*

« Je sais… Pour être honnête, c’est même l’une des raisons principales pour laquelle j’ai accepté ce rendez-vous. Ma mère… Elle adorait les chansons de Yelena Black, j’ai pour ainsi dire grandit bercé par sa voix. Je l’admire beaucoup, c’est une grande inspiration pour moi. Mon frère a très largement joué sur cette carte pour me faire accepter ce rendez-vous. »

*Avais-je alors avoué en riant un peu. Mais tout ce que je venais de dire était de la plus pure des sincérités. La voix de Yelena Black m’était probablement plus familière que celle de mon père et j’aimais terriblement toutes ses chansons, même si j’avais mes petites préférés.

Cela dit, Orion enchaîne sur un autre sujet qui me fait lever les yeux au ciel, avec un petit sourire amusée.*

« Je me suis promis de ne pas céder au premier rendez-vous il y a quelques années, j’essaie de m’y tenir, aussi séduisant soit mon partenaire. »

*Affirmais-je, avant de me lever et de m’approcher pour effleurer son torse pour retirer un pli de la chemise. Je me mords ensuite la lèvre inférieure en observant sa tenue avant de croiser les bras et hocher la tête. *

 « Il n’y a aucun doute, la chemise blanche et le pantalon sombre, c’est mieux. Cela fait plus ressortir tes yeux. »

*Lui avais-je dit, en hochant la tête, d’un air très convaincue, et même particulièrement sérieux, puisque je prenais ma mission de nouveau look très au sérieux. Je redresse donc la tête et, tout sourire, lui dit : *

« Tu n’a qu’à enfiler la tenue et je vais aller voir une vendeuse pour lui dire que nous prendrons les vêtements sur toi. Tu me rejoins à la caisse ? »

*Lui proposais-je, avant de faire un pas pour sortir des cabines, avant de me tourner : *

« Au fait, il faut ramener les vêtements que tu ne mets pas ici ! »

*Je pointe le portant, avant de lui offrir un dernier sourire et de m’éclipser à la recherche d’une vendeuse.*