Qu’est-ce qu’il foutait là exactement ? Parmi tous ces vieux cons et abrutis d’extrémistes qui ne daigneraient même pas lui accorder un regard s’il n’avait pas été un prodige du Quidditch et ancien champion du monde pour l’équipe nationale anglaise… Elwyn se posait bel et bien la question alors qu’il guettait l’assemblée face à lui, vêtu d’un magnifique costume noir de couturier. Une tenue dans laquelle il était peu à l’aise, bien trop habitué à des jeans bien souvent troués ou délavés, une banale paire de baskets ou de rangers ainsi que des hauts amples lui donnant une allure grunge. Alors que ses prunelles azurs glissaient de groupes en groupes, il joua légèrement avec le noeud de sa cravate, ayant toujours autant de mal à s’y faire. Avec un peu d’alcool dans le sang ça devrait faire l’affaire. Il ingurgita d’une traite son verre de whisky et fit signe à l’un des elfes de maison qui se promenait dans l’assemblée avec un large plateau. Son verre se remplit à nouveau et il s’empara d’une poignée de petits fours en cherchant du regard l’attroupement de sang-purs et autres gratin sorcier qu’il allait pouvoir rejoindre pour ne pas littéralement mourir d’ennui à cette soirée.

Depuis qu’Elwyn avait fait son entrée dans le monde du Quidditch professionnel, il avait été propulsé dans un univers qui lui était beaucoup trop familier et en même temps inconnu : celui des soirées mondaines sorcières. Un monde de faux semblants qu’il était persuadé d’avoir laissé derrière lui au moment du divorce de ses parents. Il fallait croire que le destin en avait décidé autrement. Si durant ses débuts il ne suscitait guère l’intérêt des convives, se goinfrant simplement allègrement aux côtés de certains de ses coéquipiers, bien vite ses prouesses sur le terrain intéressèrent. Nommé rapidement au poste d’attrapeur permanent, il était rare qu’il ne participe pas à un match d’envergure, ses talents et son goût du risque le rendant populaire auprès du public mais également terriblement efficace pour remporter la victoire. Tout le monde sorcier s’arrachait sa présence. Il faisait sensation en Angleterre, en Irlande, en France, en Espagne et en Italie également. Partout où leurs matchs les envoyaient, Elwyn et son équipe étaient conviée à tellement de sauteries qu’il leur était physiquement impossible de participer à toutes. Hell sélectionnait donc scrupuleusement celles qui semblaient amusantes, les hôtes avec le plus d’argent ou avec une liste d’invités principalement féminine. Si durant son enfance les soirées de ce type étaient ennuyeuses à souhait, à présent adulte et célèbre, il y trouvait toujours son compte.

A présent les choses avaient changé. Hell était toujours convié à des événements de ce type mais il représentait plus une petite distraction, un lot de consolation que l’on invite car on a pas pu avoir la star principale. Bien conscient de son nouveau statut et de la pitié qu’il suscitait chez certains, Elwyn n’acceptait plus que quelques rares invitations par pur intérêt. Un moyen de faire fructifier ses affaires, de se distraire en prenant de haut certains sang-purs prétentieux mais surtout de manger et boire gratuitement. Il ne lui en fallait pas plus dernièrement pour daigner honorer les hôtes de ces sauteries de sa présence. Afin de se donner un peu de motivation, Hell avala son second whisky de la soirée d’une traite et épongea le tout avec la poignée de petits fours qu’il venait de subtiliser avant de se lancer dans la foule. Il n’eut qu’à tendre le bras pour s’emparer d’un nouveau verre de liquide ambré et salua ici et là certains convives qui lui accordaient de larges sourires avant que son attention ne soit attirée par un bout de conversation qu’il capta. « Il me semble qu’il a grandi en Italie, comme vous très chère. Ce n’est pas la première fois que je l’invite à l’une de mes soirées. » Resté en retrait pour mieux écouter, Elwyn était incapable de voir à qui l’homme s’adressait, la jeune femme se trouvant dans son dos. « Vous parlez de O’Connor, le Diable Rouge ? » Demanda l’une des invitées avant de s’exclamer. « Je l’ai vu lors du match de la coupe du monde. Quel joueur remarquable ! C’est si tragique ce qu’il lui est arrivé… » Les quelques convives acquiescèrent avant que l’hôte de la soirée ne reprenne. « J’ai ouïe dire qu’il avait tout de même eu énormément de chance. Quelques centimètres sur la gauche et le manche de son balais touchait la colonne. Il aurait pu être paralysé. » Il y eut quelques murmures d’effrois avant qu’il ne reprenne. « Je n’ai pas pu avoir plus d’informations, le personnel qui s’est occupé de lui est sous serment inviolable mais je sais de source sûre que l’accident était véritablement terrible. Déchirant et tragique. » Non mais j’hallucine… Ils sont encore en train de ressasser ça après tout ce temps ?! Ce fut à cet instant qu’Elwyn décida d’intervenir et s’exclama en se tournant vers le groupe. « Ça n’a pas été des plus agréables, c’est sûr ! » Quelques exclamations leur échappèrent et il put s’introduire dans le petit cercle qu’ils formaient avant d’ajouter, prenant le temps de boire une gorgée de son whisky. « Mais vous aviez raison, quelques centimètres sur la gauche et j’étais paralysé. Quelques centimètres plus en profondeur et j’y laissais la vie… » Avec une certaine exaltation il laissa un silence gêné s’installer avant d’ajouter avec un large sourire amusé. « Un autre bon point pour vous, j’ai effectivement grandi pendant un temps en Italie. » Dit-il, provocant par la même occasion la fierté de l’hôte qui s’écarta très légèrement pour lui faire découvrir la jeune femme à qui il s’adressait. A sa vue, l’expression d’Elwyn devint plus froide, une lueur de rage naissant dans ses prunelles azur. C’est pas possible putain… Elle est partout maintenant ! Qu’est-ce qu’elle vient foutre là par Merlin ?! « Fabuleux ! Avez-vous déjà rencontré Mademoiselle Zabini ? Je suis sûr qu’en participant à diverses soirées mondaines italiennes vos chemins ont dû se croiser. » S’exclama le vieil homme avec un sourire foncièrement bon. Hell avait beau tenter de faire bonne figure, il dévisageait Anjelica, partagé entre toute la rage qu’elle faisait remonter en lui, rappel cuisant de ce qu’il n’était plus et un brin de… De quoi exactement ?! Incapable de mettre des mots dessus, il finit par esquisser un léger sourire narquois. « Bonsoir la crasseuse. » Dit-il dans un italien parfait, provocant l’admiration de tous avant de s’avancer vers elle. Il se saisit de sa main gauche et dans un élan de galanterie ayant pour simple but d’épater la galerie ainsi que de l’agacer, il se pencha pour délicatement poser ses lèvres sur le dos de sa main. « Ravie de vous revoir ici Mademoiselle Zabini. Vous êtes toujours aussi ravissante. » S’exclama-t-il cette fois-ci en anglais avant de se reculer sous les regards envieux des quelques femmes composant le groupe. Il reprit sa place dans le groupe et après avoir encore participé pendant de longues minutes à une conversation des plus barbantes sur la régulation des engins volants dans le ciel, Elwyn prit finalement congés en s’excusant poliment pour regagner le bar pour se faire servir un nouveau whisky.

Il n'y avait rien de pire que de se rendre à une soirée mondaine seul. Même mal accompagné c'était plus vivable que de se jeter en solo dans la gueule du loup. Malheureusement pour lui, Hell n'avait pas le luxe d'y aller en compagnie de coéquipiers de Quidditch comme à l'époque. Il était plus là en bonne bête de foire, le champion déchu abordable qui acceptait de faire une apparition mettant en avant sa boutique et mangeant à l'oeil. Si lui y allait avec un objectif, il avait du mal à concevoir ce que les autres pouvaient bien foutre là. Etait-ce pour les ragots, la « bonne » compagnie, la nourriture et l'alcool à moins qu'ils y trouvaient un véritable intérêt. Inconcevable pour Elwyn et pourtant... Il suffisait de voir à quel point ces soirées étaient prisées, les efforts que certains déployaient pour bien s'y faire voir ainsi que leurs larges sourires à moitié faux. Oui, visiblement certains appréciaient ces événements. Probablement un truc de sang-pur. Alors qu'il venait tout juste d'étancher la soif de ragots sur son compte dans l'un des groupes auquel il s'était greffé, peu surpris des profils qu'il y découvrait, Hell fut incapable de cacher sa surprise en y découvrant Anjelica. Si le choc initial fut bien vite remplacé par l'agacement de la croiser également ici ce soir, il devait bien l'avouer : un visage familier ne faisait pas de mal. Même s'il était insupportable, même s'il lui rappelait des souvenirs qu'il aurait préféré enfouir et oublier. Anje, bien que source de frustrations et de colère, représentait malgré elle un allier dans cette soirée. Il savait d'expérience qu'elle avait autant envie d'y être que lui...

Contrairement à la soirée après les courses de motos, impossible pour lui de se montrer désagréable, du moins pas en anglais et encore moins montrer le moindre signe d’irritation. Le moindre de leurs gestes étaient scrutés par une partie des convives sans compter sur les rumeurs qui devaient déjà circuler à leur sujet. Il avait passé son enfance en Italie, était connu pour y avoir vécu en temps à l’âge adulte, y fréquentait également les soirées mondaines… Anje en tant que sang-pur devait probablement avoir eu son lot d’événements de ce type. Il semblait alors peu probable qu’ils ne s’y soient pas déjà croisés au moins une fois. Le reste était laissé aux imaginations des uns et des autres. Elwyn, par provocation et pour alimenter les théories les plus folles à leur sujet, osa donc un baise main. Une première attaque en italien suivie d’un compliment en anglais pour satisfaire les plus curieux. Oui, ils se connaissent, mieux que tous pouvaient l’imaginer. La réponse d’Anje ne se fit pas attendre, lui extirpant pour la première fois depuis très longtemps, un premier sourire sincère. Très maigre et tout juste perceptible de la principale concernée mais tout de même. Elle avait réussi à lui arracher un brin d’honnêteté. Etait-ce son charmant petit accent italien qui, en plus de sa tenue, la rendait encore plus attirante ? Etait-ce ces compliments qu’il savait faux mais flattaient inévitablement son égo ? Allez savoir… Pas besoin de s’y attarder avec ce qui suivi. Sans grande surprise, les attaques en traite, blessantes et gratuites redémarraient entre eux. Par chance ils avaient l’italien pour communiquer sans risquer de dévoiler la véritable nature de leur relation. Se balancer les pires horreurs avec un large sourire avait un côté amusant. Ne pas pouvoir la saisir par la gorge et la plaquer contre un mur pour lui faire regretter ses insinuations… Moins !

Alors que tous les regards étaient à présent braqués sur Elwyn suite à la phrase d’Anje en italien, ce dernier se contenta d’afficher un large sourire forcé avant de s’exclamer en anglais. « Vous me flattez Mademoiselle Zabini… Tant de compliments de votre part, vous allez me faire rougir. » Si elle voulait jouer avec lui, elle était mal tombée. Elwyn allait se faire un plaisir de faire courir de fausses rumeurs à leur sujet durant toute la soirée. Tout en la défiant du regard avec un grand sourire destiné à l’assemblée, la conversation repris entre les différents convives du petit groupe. Hell y participa de façon assez distraite, son attention attirée, malgré lui, par la présence d’Angel et de ce qu’elle représentait ici ce soir. Finalement, il préféra s’excuser pour s’éclipser. Non sans surprise il regagna le bar où il eut à échanger avec un jeune couple de sang-purs de son âge qui semblait ravi de rencontrer un ancien champion du monde de Quidditch comme lui. Les deux jeunes gens à peine plus âgés que lui avaient beau lui évoquer les maisons à Poudlard et certains événements dans lesquels ils avaient été, preuves qu’ils se connaissaient même de loin, Elwyn était incapable de les remettre. Il se contenta donc de hocher poliment de la tête avec un sourire insupportable accroché au visage. Ce ne fut qu’en apercevant Anjelica aux proies d’un vieux dégueulasse qu’il écourta la conversation en leur donnant ce qu’ils attendaient. « Mais bien sûr ! Ça me revient enfin… Quel plaisir de vous avoir revu ce soir. » Satisfait, le couple pris congés alors qu’Elwyn se dirigeait un peu plus loin vers le bar, prenant une nouvelle gorgée de son whisky quand Anje le rejoignit.

Merde… Et elle ose me donner des ordres en plus… Ça commence mal. Tout en la fusillant du regard, il esquissa tout de même un sourire de façade avant de se retourner vers le buffet derrière eux pour cacher son agacement à la foule. Il se saisit de quelques petits fours qu’il enfourna et se retourna à nouveau pour observer l’homme que fuyait Anje. « C’est ton prétendant de la soirée ? » Demanda-t-il sans cacher son amusement. « Je t’ai connu plus exigeante avec les hommes que tu mets dans ton lit… Ça me déçoit de toi. » Continua-t-il avant de prendre une gorgée de whisky, lui jetant un nouveau regard, se surprenant lui-même à lorgner sur sa tenue plus qu’avantageuse. Moqueur, il haussa les épaules en l’entendant à nouveau pester et n’eut pas le temps de lui lâcher une nouvelle pique qu’elle se mit à rire en lui intimant d’être plus souriant. Ah ouai ?! Sérieux ? Hell se tourna légèrement vers elle et vint doucement glisser sa main dans son dos, effleurant la peau de sa chute de reins du bout des doigts avant de la déposer sur sa hanche. Pourquoi ne pas en profiter après tout ? Face à la surprise qu’elle affiche, il se rapprocha un peu plus d’elle, captant ses prunelles avant de lui murmurer à l’oreille. « Fais pas cette tête voyons… Tu voulais te débarrasser de ce vieux con, non ? » Il revint capter son regard, jouant avec la proximité de leurs visages pour alimenter les ragots et, comme il l’avait prévu, décourager le vieux pervers insistant. Du coin de l’oeil il vit l’homme bedonnant repartir se mêler à la foule et afficha un large sourire en lui murmurant. « On dirait qu’il ne supporte pas la concurrence… Même venant d’un sang-mêlé. » Hell finit par se reculer, retirant sa main de sur sa hanche tout en laissant une nouvelle fois courir ses doigts sur la peau si délicate de son dos. Un petit plaisir auquel il cédait bien qu’accompagné de douloureux souvenirs. « Qu’est-ce que tu viens foutre ici dans pareille tenue au fait ? Ton plan c’est de faire tellement bander tous les vieux sang-pur du coin qu’ils accepteront de te commander une moto ? » Hell dissimula son sourire narquois en finissant déjà son verre avant de reporter son attention sur elle. « A moins que tu sois en quête d’un nouveau parti à épouser ? »

Gérer l’hypocrisie ambiante, ça, Elwyn savait faire. Toute sa vie se caractérisait par les mensonges et les faux-semblants. Ses parents l’avaient traîné dans cet univers de paraître dès ses six ans après tout, il était habitué, il savait comment se comporter, il était blindé. Si durant un temps il avait eu l’espoir de ne plus jamais participer à des soirées mondaines, moldues comme sorcières, sa carrière d’attrapeur professionnel l’avait à nouveau propulsé sous le feu des projecteurs. On s’y arrachait sa présence, lui le joueur vedette, la star mondiale. Toute cette admiration, cet engouement qu’il suscitait. C’était d’un fatiguant. Anje avait été une bouffée d’air frais dans son univers étouffant d’attention. Elle ignorait qui il était et se foutait royalement qu’il puisse être le meilleur joueur du monde ou l’homme le plus riche de l’univers, elle s’était avant tout intéressée à lui. Une chose qui ne lui était jamais arrivée. L’intérêt qu’on lui avait toujours porté était motivé par quelque chose : son talent au Quidditch, sa popularité, son argent, son statut de fils d’ambassadeur, le sang pur de sa mère… A croire que toutes ces choses éludaient qui il était vraiment, que sans elles il n’était rien. Anjelica avait vu à travers tout cela. Elle en allait même jusqu’à dénigrer son sport, préférant les courses de motos volantes. Bien évidemment, c’était un sujet de discorde dans la relation qu’ils entretenaient à l’époque mais la dispute finissait toujours par se résoudre comme ils l’avaient toujours fait : sur l’oreiller.

La croiser dans ce nouvel univers avait quelque chose de singulier et rassurant en même temps. Enfin une personne qu’il savait du même avis que lui. Elle n’avait clairement pas envie d’être là. S’ils ne s’étaient plus fréquentés depuis des années maintenant, Elwyn la connaissait suffisamment bien pour affirmer que les soirées mondaines n’étaient pas son truc. Encore moins s’habiller de façon aussi chic. Ça n’était pas non plus sa tasse de thé à lui. Bien déterminé à ne pas lui laisser le dernier mot alors que devant une partie des convives elle osait l’attaquer, en italien certes mais tout de même, Elwyn joua sur un tableau différent. Celui des sous-entendus qui, à coup sûr, feraient jaser sur la véritable nature de leur relation. Il n’avait même pas eu besoin d’être là pour que l’hôte de ce soir suppose déjà qu’ils se connaissaient. Le simple fait qu’il ait grandi en Italie et passé une partie de son temps là bas signifiait-il automatiquement qu’il l’avait croisée ? Pour ce vieux con, oui. Soit. Visiblement sa dernière pique eut le don de plaire à en croire par les quelques regards et sourires appuyés qu’on leur lançait. Mission accomplie. Il venait de leur donner exactement ce dont ils avaient besoin pour se divertir tout en remettant Anje à sa place face à « l’élite » sorcière anglaise. Une dernière pique à laquelle Anje ne répondit pas, adoptant une attitude relativement étonnante. Elle était… Amusée ?! Non ! Impossible, comment pouvait-il l’amuser alors que suite à leur dernière altercation après la course de motos il était très clair qu’elle avait envie de lui arracher les yeux ?! Bien que légèrement intrigué, il resta un instant dans le groupe avant d’en prendre congés pour retrouver le bar, croisant un couple de sang-pur désireux de se faire un peu mousser.

Si une fois débarrassé de toutes sollicitations Elwyn envisageait déjà de s’éclipser ayant suffisamment fait acte de présence à son goût, l’arrivée d’Angel à ses côtés changea la donne. A en juger par sa façon de se comporter avec lui et les quelques mots qu’elle lui souffla, l’italienne fuyait un prétendant indésirable. Une opportunité en or pour Hell qui ne se priva pas de la taquiner, rajoutant même avec malice, un large sourire taquin scotché au visage. « Ça ne fait aucun doute voyons. Même en tant que sang-mêlé je reste un meilleur parti que tous ces cons. » Lâcha-t-il en belle démonstration de son égo. Si Anje avait besoin d’être sauvée, il allait se faire un plaisir de profiter de la situation. Il n’y avait pas de service gratuit avec lui. C’est ainsi qu’Elwyn profita de cette ravissante demoiselle en détresse qui s’était presque littéralement jetée dans ses bras pour effleurer avec une certaine délectation la peau de son dos avant d’attraper sa hanche. Le contact de sa main sur son torse lui extirpa un plus large sourire, assailli par les souvenirs de leurs moments de proximité enflammés. Ses prunelles azurées accrochèrent un instant l’ambre des siennes avant de glisser ses lèvres jusqu’à son oreille. Il y avait quelque chose de grisant dans cette situation. Entre désir à peine refoulé purement physique, presque bestial et rancoeur sauvage qui lui intimait de se montrer cruel envers elle. L’ambivalence des sentiments qu’Angel faisait naître en Hell le poussait à agir de façon toujours plus ambigüe sous couvert de l’aider à repousser ce prétendu malvenu. « Ça marche visiblement. » Lui souffla-t-il en retour alors que leurs visages n’étaient plus qu’à quelques centimètres l’un de l’autre, son souffle se mêlant dangereusement au sien. Bien que l’effet escompté avait été atteint, Hell se surprenait à ne pas vouloir la lâcher. Il fut toutefois contraint de défaire son emprise sur cette silhouette qui l’avait toujours, et continuait visiblement, de le mettre dans tous ses états. Dans le seul but on y croit de rééquilibrer la situation, il se permit quelques piques dont la réponse l’amusa grandement. « Vous nous laissez pas le choix que de mentir… Vous vous croyez si supérieurs vous les sang-purs qu’on est obligés de vous piéger pour rééquilibrer la balance. » Lâcha-t-il avec défis, la rancoeur de toutes les insultes, brimades et autres discriminations subies ressortant par ce biais. Il n’avait pas le souvenir d’Angel étant une puriste mais avec le temps, Elwyn avait appris à se construire une épaisse carapace afin d’éviter que toutes les attaques qu’il recevait en permanence ne l’atteignent plus. Du moins plus vraiment.

Alors qu’il finissait son verre de whisky et s’apprêtait déjà à en prendre un autre, l’alcool commençant à faire son effet sur l’humeur d’Elwyn, l’attitude d’Anje le surprit. Face à sa question, il fronça les sourcils, ses prunelles claires glissant avec un délice à peine dissimulé sur son dos, épousant les formes de la belle italienne. Son petit manège pour le provoquer à se pavaner ainsi marchait à merveille, pour son plus grand malheur. Anje savait qu’elle lui avait fait toujours beaucoup d’effet, si même dans son bleu de travail et avec de la graisse plein les mains il la trouvait sexy, en tenue de soirée il y avait peu de chances pour qu’elle devienne repoussante. Si elle voulait qu’il la reluque, Hell n’allait pas se faire prier. Ses iris rejoignirent toutefois les siens, la laissant jouer avec le pan de sa veste, un léger frisson le parcourant alors que ses doigts venaient subtilement se glisser contre son torse. Le sourire de la belle italienne fut bien vitre rejoint par celui de l’irlandais qui glissa sa main une fois de plus sur sa hanche, la rapprochant avec une certaine fermeté de lui. Ses lèvres retrouvèrent à nouveau son oreille pour lui murmurer. « Tu veux vérifier ? Vérifions alors. » Souffla-t-il avant de s’emparer de sa main et il l’entraîna à sa suite devant quelques regards intrigués de la part des invités. Porté par une étrange pulsion que lui-même n’expliquait pas, Hell emprunta un des couloirs qui menait vers l’intérieur du manoir et après avoir tourné à gauche, il s’engouffra dans la première pièce qui se présenta à eux. Les anciens amants atterrirent dans un petit bureau avec sa propre bibliothèque. Si au fond de la pièce le bureau et son large fauteuil trônait en pièce maîtresse, les imposantes étagères se dressaient de part et d’autres, montant jusqu’au plafond pour afficher la vaste collection de livres divers et variés possédés par le propriétaire des lieux. Au plus proche d’eux, deux petits canapés en cuir se faisaient face. Sa main emprisonnant toujours celle d’Anje, il referma la porte et vint la plaquer violemment contre le mur attenant. Un léger sourire narquois étirait ses lippes alors qu’il se rapprocha dangereusement d’elle, la maintenant piégée contre le mur. Elle voulait jouer ?! C’était le moment de vérité. Agrippé à sa hanche, la pulpe de ses doigts s’amusant à langoureusement glisser sur la peau dénudée de sa chute de reins, Hell vint lui souffler sans quitter l’ambre de ses prunelles. « Tu voulais vraiment t’assurer que tu peux toujours me faire bander, non ? Ou bien tu vas te dégonfler, Zabini ? » Ultime provocation alors que son torse et son bassin se rapprochait d’elle, réduisant toujours plus l’espace entre leurs corps qui semblaient s’attirer comme deux aimants.

Si on avait dit à Elwyn qu’Anjelica se trouverait à cette soirée, pas sûr que l’ancien champion du monde aurait accepté l’invitation. Le souvenir de leur dernière altercation verbale et un tantinet physique lui était bien restée en mémoire, source de frustration et d’une colère sourde envers l’italienne. Elle était la victime dans leur histoire commune. Après tout, l’irlandais s’était clairement joué d’elle. Il l’avait manipulée pour arriver à ses fins avant de se faire pincer. Pourtant, Elwyn ressentait une forte amertume envers la jeune sorcière. Le simple fait de penser à elle faisait naître une vague de colère en lui, douloureuse réminiscence d’un passé bel et bien révolu. Les souvenirs de leurs moments ensembles étaient devenus trop pénibles, emprunts d’une nostalgie insupportable. Anjelica lui rappelait que plus jamais il ne serait ce jeune homme à qui tout souriait, le champion du monde adulé et reconnu pour ses talents sportifs. Hell n’était plus que l’ombre de lui-même, animé par une colère sourde, un besoin de vengeance sur ce sort qui s’acharnait sur lui. L’excuse parfaite pour agir en parfait connard, déversant sa rage sur quiconque faisait l’erreur de croiser son chemin. Ce soir, les candidats se bousculaient au portillon et Angel venait de tomber dans les abysses, se jetant littéralement dans ses bras.

Il ne lui en avait pas fallu plus pour sauter sur l’occasion de rapprocher leur corps qui, à une époque, avaient du mal à se défaire des étreintes enflammées auxquelles ils s’abandonnaient avec joie. Une réminiscence du passé partiellement douloureuse dont il ne parvenait à se défaire. Quelque chose de primaire l’attirait encore vers Anjelica, le poussant à la provoquer, glissant ses doigts avec langueur sur la peau dénudée de son dos, rapprochant ses lippes de son visage tout en se délectant du parfum suave qu’elle dégageait. Damn it. Une attaque par ci par là pour noyer le poisson, se distraire et cultiver la haine qu’il éprouvait pour elle. Après tout, on disait bien que de l’amour à la haine il n’y avait qu’un pas. L’avait-il seulement vraiment aimée un jour ?! Pour ne pas laisser une seule seconde au doute de s’installer, Hell esquissa un léger sourire à sa remarque  concernant son assurance. Elle l’appelait suffisance. Y avait-il seulement une différence entre les deux termes ?! « Tu me flattes. » Souffla-t-il pour simple réponse, bien loin de se laisser démonter par les tentatives d’attaques d’Anje. Elle avait beau sortir les griffes et montrer les crocs, elle ne restait qu’un vulgaire chat de salon à ses yeux. Si la belle italienne souhaitait vraiment frapper là où ça faisait mal, il allait falloir qu’elle change de tactique et évolue dans une autre catégorie. Bonne change Angel ! En attendant, Hell profitait de la situation pour cracher son venin avec le sourire. Il fallait continuer de faire bonne figure face à tous les yeux qui les guettaient dans l’espoir d’un faux pas. Au pays des illusions, les apparences sont reines. Une fois de plus, il accueillit ses remarques par un faux sourire, un léger haussement de sourcil trahissant toutefois le mépris qu’elle suscitait jusqu’à ce que sa dernière remarque n’attire ses prunelles azur sur elle. Elle osait remettre ça sur le tapis ?! La véritable raison derrière leur liaison. Un bref claquement de langue témoignant son agacement lui échappa avant de prendre une gorgée du liquide ambré. « Tu faisais pas partie du plan à la base… » Concéda-t-il tout de même sans pour autant vouloir rentrer dans les détails. Anje avait été à la fois un bonus et une complication dans toute cette histoire. S’il savait qu’il devait infiltrer la Cosa Nostra grâce aux courses de motos, sa rencontre avec Anjelica n’était pas prévue. A l’époque il l’avait vu comme la cerise sur le gâteau. Sa petite récompense, le paiement en nature, l’avantage non négligeable à cette mission. Un petit plus qui était bien vite devenu complexe. Entre remords qu’il n’osait pas s’avouer, un attachement qu’il refusait de voir et une implication de plus en plus croissante dans cet univers pour elle… Angel lui avait rendu la tâche plus compliquée.

Aux vues de tous, les deux anciens amants s’engagèrent sur un chemin très glissant. Celui des provocations charnelles. Anje poussa un peu plus le bouchon, entraînant sans grande difficulté Elwyn à sa suite. Même aujourd’hui, alors qu’ils s’inspiraient mutuellement une certaine forme de colère, leur alchimie physique était encore bien présente. Sa dernière provocation éveilla un feu que plus rien ne pouvait éteindre. L’entrainant à sa suite dans un lieu à l’abris des regards indiscrets, Hell savait déjà que leur proximité et maintenant cette volonté d’intimité allaient faire jaser. Sur le moment il s’en foutait royalement. Angel avait réveillé un sentiment qu’il pensait mort depuis des années. Faussement piqué dans son honneur, il la plaqua sans ménagement contre le mur, cherchant d’une certaine manière à s’assurer qu’elle n’allait pas se débiner au dernier moment. Sa patience avait des limites mais visiblement, Anje ne semblait pas encline à jouer avec elle. Bien au contraire même. Ses quelques paroles prononcées avec cet accent qui lui provoquait des frissons incontrôlés réussirent à également lui arracher un léger sourire. Ne lui opposant aucune résistance, il s’empara fiévreusement de ses lèvres pulpeuses entamant un balais langoureux. Poussé par le feu ardent qu’elle animait toujours plus dans ses entrailles, faisant ressurgir les souvenirs torrides de leurs anciens ébats, ses mains glissèrent sur ses hanches pour l’agripper avec fermeté. Il voulait la sentir contre lui, s’enivrer de sa chaleur, de son contact qui le faisait lentement mais sûrement glisser vers la folie. Sans jamais quitter ses lèvres tentatrices, Hell la laissa le débarrasser de sa veste, bien obligé de relâcher son emprise sur son corps pour se retrouver à présent en chemise et cravate dont il défit un peu le noeud pour être plus à l'aise.

Un bref grognement d’insatisfaction lui échappa quand elle se détacha du baiser, mettant trop de distance à son goût entre leur corps. Il avait soif d’elle, soif d’une proximité qui lui inspirait autant de passion que de haine. Alors qu’il s’apprêtait à lui envoyer une remarque cinglante, le geste qu’elle entama le laissa sans voix. Ses prunelles glissèrent de celles d’Anje à la rondeur de ses seins qu’il se délectait de redécouvrir, la vallée que formait son ventre et ses hanches généreuses vêtues de ce petit bout de tissu si aguicheur. Le coeur battant sous l’excitation, Hell se mordit la lippe de délice, la pulpe de ses doigts effleurant déjà la peau délicate de son bas-ventre. Putaiiiiiin… Bordel de merde, qu’est-ce qu’elle me fait chier… Pourquoi fallait-il qu’elle soit toujours si sexy ?! N’aurait-elle pas pu développer des écailles de salamandre depuis leur rupture ou se transformer en harpie ?! Non ! Au lieu de ça il la trouvait toujours aussi excitante, voire même plus qu’avant. Comment c’est possible un truc pareil ?! Fuck me. Hell savait qu’il était foutu. Malgré toute la rancoeur qu’Angel lui inspirait, force était de constater qu’elle l’attirait tel un aimant. Entre leur petit jeu entamé dans la salle de réception, les insinuations glissées sous forme de menaces, la vue de son corps parfait, ce baiser et maintenant le fait de l’avoir quasiment nue devant lui… Impossible de faire marche arrière. Anje avait littéralement la preuve sous sa jambe qu’il pouvait toujours être sensible à ses charmes.

Elwyn avait beau être habitué à avoir tous les regards braqués sur lui, faire bonne figure alors qu’il était en pleine joute verbale avec Anje relevait plus du défi qu’autre chose. La situation était inédite. Jamais il n’avait eu à sourire alors que tout ce que son corps lui demandait c’était de hurler. Il faut dire que lors de leur dernier événement public « important » ensemble, les deux jeunes gens avaient eu du mal à ne pas se toucher pour d’autres raisons. Une époque qu’Elwyn aimait croire révolue. Un doux songe dont il se berçait alors même que le simple contact rapproché de la belle italienne suffisait à réveiller une passion qu’il se persuadait être morte. Son corps dangereusement proche du sien, le contact de sa peau sous la pulpe de ses doigts, son odeur si délicate et entêtante… Ça faisait trop. Trop d’un coup. Trop pour qu’il garde les idées claires. Surtout après autant de verres de whisky. Voilà ! C’était ça ! C’était l’alcool qui expliquait l’effet qu’elle parvenait à lui faire en à peine quelques secondes passées contre lui. Dans une vaine tentative de distraction, ses paroles se faisaient acerbes, dénotant des gestes qu’ils avaient l’un pour l’autre. Heureusement que personne ici ne pouvait comprendre ce qu’ils se disaient. Seuls les sourires avec lesquels Hell accueillait chacune de ses piques donnaient l’illusion parfaite d’un flirt entre les deux jeunes gens. Ce fut quand le sujet des motivations de leur liaison passée effleura le tapis de la conversation qu’ils se montrèrent tous deux plus secs, l’amertume teintant leurs paroles. Ils avaient tous deux des griefs bien distincts, se confrontant frontalement sans qu’aucun terrain d’entente ne puisse être trouvé.

Retrouver une certaine forme d’intimité avec elle avait quelque chose de grisant. Le contact de ses lèvres, de sa peau si tendre, des formes de son corps… C’était non sans un certain désespoir qu’Elwyn constatait avec quelle facilité Angel gardait une emprise sur lui malgré les années et la rancoeur. Il n’avait pu résister à son baiser et maintenant la simple vue de sa silhouette à moitié nue réussissait à le mettre dans tous ses états. Comment ne pas lui céder un peu plus et complètement rendre les armes ?! Grâce à simplement quelques petits mots, sans parler de son charmant accent italien, Anje le galvanisait. Il faut croire qu’il n’avait jamais vraiment cessé de ressentir cette attirance magnétique pour la jeune femme. Ses lèvres revinrent donc capturer les siennes avec une avidité qu’il lui était impossible de cacher alors qu’il la portait vers la bibliothèque à côté d’eux pour qu’elle puisse prendre appui sur les profondes étagères du meuble. La sentir si proche de lui, ses jambes enroulées autour de sa taille, ses mains qui se glissaient avec empressement sous sa chemise réveillaient des pulsions animales qu’elle seule savait lui inspirer.

Tout était allé très vite. Trop vite même. Elwyn avait complètement perdu le contrôle. Au final, il lui avait suffi de si peu pour perdre pied et s’engouffrer dans la brèche ouverte par Anje. Etait-ce cela son plan ?! Le faire chavirer ? Devait-il y voir une forme de vengeance ? Allait-il devoir s’attendre à un retour de flammes suite à leurs ébats ? Autant de questions qui se bousculaient dans son esprit, bien vite reléguées au second plan par le contact de son épiderme et la douce mélodie de ses plaintes. Il y avait quelque chose de si familier dans ces gestes précipités par le désir qu’elle éveillait en lui. Si à aucun moment depuis que ses prunelles s’étaient posées sur la belle italienne lors d’une course clandestine de motos volantes il n’avait imaginé la retrouver ainsi, force était de constater qu’elle lui avait manqué. Une partie, bien enfouie, de son être se réappropriait ses formes enchanteresses, reprenait de vieux automatismes oubliés pour la posséder à nouveau. Malgré toute la rancoeur qu’il éprouvait pour sa conquête du soir, elle savait réveiller mieux que personne un besoin bestial primaire. D’un mur à l’autre, de caresses en caresses, de baisers passionnés à plus sporadiques, évoluant de ses lèvres à ses formes, Elwyn était comme transporté par le plaisir grisant que ces retrouvailles généraient. Il n’y avait pas d’après, pas de foule grouillante derrière cette porte close qu’ils avaient franchis quelques instants plus tôt. Seul Angel et son corps à demi-nu accaparait son attention.

Trouver une bonne explication à pourquoi ils se retrouvaient là n’intéressait pas Elwyn. Il avait tout un tas de justifications qui lui venaient en tête pour justifier la folie dans laquelle ils s’abandonnaient mutuellement. L’alcool. Une tension sexuelle latente. Le besoin viscéral d’adrénaline. La facilité de retrouver un rapport autrefois si familier… Ce n’était pas les raisons qui manquaient en revanche toutes pouvaient être démontées par deux petits mots si simples et pourtant lourds en signification et rancoeur : pourquoi elle. C’est vrai ça, après tout. Pourquoi Anjelica et pas une autre ? Elwyn avait été pendant un temps familier de ces soirées mondaines remplies de sorciers et sorcières bien apprêtés. Il comptait à son tableau de chasse de nombreuses héritières qui s’étaient abandonnées l’espace d’une nuit dans ses bras, défiant la règle de pureté qui leur était imposée. L’ancien joueur de Quidditch professionnel savait que certaines de ses anciennes amantes se trouvaient là ce soir. Il aurait pu s’abandonner à la luxure avec elles. Pourquoi Anjelica ? Pourquoi celle qui représentait la quintessence même d'un avenir brisé à tout jamais inaccessible ? Qu’est-ce qui la rendait si attirante, si magnétique pour qu’il ne puisse se soustraire à son attraction ?! Le mystère restait entier.