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Les moldus et élèves de Poudlard du forum se sentent cruellement seuls au milieu de tous ces sorciers adultes,
alors pensez à les privilégier pour vos personnages

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Don't be a stranger | Eirian :: Three Broomsticks :: Pensine :: Les RPs
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Mer 4 Aoû - 12:25
Don't be a stranger
ft @Eirian Howl


21h.
Le 12 square Grimmaurd crépite d'une ambiance électrique tandis que les membres de l'Ordre s'entassent dans la salle de réception. Les chaises grincent, le parquet craque, et s'élève des multiples conversation chuchotées un murmure commun, inintelligible, un brouhaha de fond à la lueur des lampes dorées.

Sévastian a envie d'une clope. C'est tout ce qui trotte dans sa tête à mesure qu'il détaille les visages défilant à la porte. Parfois, l'atmosphère grave et énergique des lieux le galvanise; aujourd'hui elle le stresse. Ses doigts s'agitent sous la pulsion addictive. Il souffle par le nez dans un effort pour se calmer et se focalise sur les faciès qui se suivent, détaillant leurs traits pour y placer un nom et une identité. C'est devenu un réflexe, une drôle de déformation professionnelle qui lui a permis du moins d'obtenir une très bonne mémoire physiologique. Alors il y travaille. Ce type, là, fait partie des plus anciens.; la femme qui le suit était déjà là à son entrée dans l'Ordre, mais elle ne figure pas parmi les membres de la première heure; la jeune fille qui suit ne vient que depuis quelques mois. Elle a sans doute l'âge de Dimka.

Dimka. Le nom a un goût doux-amer sur sa langue et sa simple évocation génère des dizaines de questions dans son esprit malade. Est-ce qu'il va bien ? Est-ce qu'il viendrait ? A-t-il évolué loin de ses parents ou s'est-il conformé au moule dévorant des mangemorts ? Aurais-je envie de le voir ou serais-je terrifié de le croiser ? Est-il seulement à Londres, ou est-il resté en Russie ? Est-ce que je lui manque ?

Ah, merde. Génial. Maintenant, Sévastian a envie d'une clope et d'un verre. Un soupir s'arrache à ses lèvres tandis qu'il s'enfonce dans sa vieille chaise branlante, les bras croisés, les lèvres pincées dans une moue mécontente. Son pied tapote le parquet innocent d'un rythme nerveux. Dans un effort pour ne pas dégouliner de mauvaise humeur, le jeune homme se recentre sur la porte. Il y a une vieille dame qu'il croit avoir déjà croisé mais dont il n'arrive jamais à replacer l'identité, ce qui est curieux, une demoiselle avec qui il a sympathisé, et... Il se redresse d'un coup. Ses yeux s'écarquillent, puis se plissent en détaillant le visage du nouveau venu.

Non.
Ce n'est pas possible. Il a mal regardé.

Le barman fait un effort et lit avec application les traits qui lui font face. Le fin faciès, les yeux verts, les lèvres dessinées, les boucles brunes, la posture tendue... Non. Non, ça ne peut qu'être lui. Et s'il en croit leurs regards croisés, Eirian est aussi surpris que lui de le croiser.

Merde. Merde, merde, merde. Le gosse n'est - n'était - absolument pas au courant de la nature de Sévastian. Le gosse n'est pas censé l'être, d'ailleurs. A part Leah, les employés du London Bar sont tous tenus éloignés de son secret. Alors soit, soit, Eirian n'y a jamais travaillé qu'avec un statut précaire de presque-intérimaire, mais l'idée que son identité soit entre les mains de quelqu'un d'autre est... Angoissant. Surprenant. Surprenant, parce que ce n'est pas grave. Ils sont à l'Ordre du Phénix, se rassure-t-il, et manifestement l'un comme l'autre n'ont pas envie que leur statut de sorcier soit visible à la face du monde moldu. Ils sont dans le même camp, dans la même merde, et n'ont mutuellement aucun intérêt à révéler l'autre. C'est ce que Sévastian se répète en boucle alors que commence la réunion, dont il n'entend aucune parole au milieu du brouhaha de ses angoisses et de ses interrogations. Il vole une œillade vers son ancien collègue. Un tas d'événements passés lui reviennent, des petits rien qui s'accumulent dans son esprit comme des pièces de puzzle, qui se défont pour s'assembler d'une meilleure manière, où aucun morceau ne manque et où tout a du sens, brusquement. Bien sûr, qu'Eirian était un sorcier depuis le début. Bien sûr. Pourquoi n'a-t-il pas vu ? Comment n'y a-t-il pas pensé ?

Furtivement, le barman espère que cette découverte ne ruinera pas ses progrès dans la confiance du jeune homme. Lui prouver qu'il ne lui voulait aucun mal a pris tant de temps, tant d'efforts, tant de petites attentions désintéressées et de paroles réconfortantes, tant de gestes doux et de mots mesurés qu'il serait dévasté de reculer. Ils ont à peine tissé une relation, au final, à peine esquissé un lien. L'idée d'avoir tout ruiné en apparaissant ici ce soir laisse un goût amer sur sa langue. Il a l'âge d'être son petit frère.

Oubliez l'envie, Sévastian a besoin d'une clope. Et d'un verre. Son coeur est désormais enflé d'une urgence insupportable et la réunion est interminable et le jeune homme se fiche éperdument de ce qui se dit parce qu'il a peur soudain d'avoir perdu un... Un quoi ? Une figure fraternelle, en est-il vraiment là ? Oui. Il y a quelque chose dans sa poitrine qui se contracte et se contracte et il voudrait que cette foutue assemblée se termine pour aller voir Eirian et lui expliquer. Lui poser des questions, aussi. Il lui lance une autre œillade sans vraiment réfléchir.

Il faut qu'il se justifie, d'abord. Il faut aussi qu'il le prévienne de n'en parler à personne. Il faut qu'il le rassure en expliquant qu'il se taira également. Il faut qu'il lui explique son silence et l'interroge sur son sort. Une inquiétude nouvelle nait dans sa poitrine alors que le miroir de leurs deux situations se dessine encore, que la méfiance innée de son cadet prend un sens et une texture et il craint les vérités qui pourraient se cacher derrière sa façade minutieusement construite.

Ses dents s'enfoncent dans la chair tendre se sa lèvre inférieure et il tente en vain de se concentrer sur la réunion. Rien n'y fait. Ses pensée divaguent et son attention glisse vers le jeune homme assis non loin de lui et il lui jette des regards réguliers. Chaque minute paraît en durer dix, chaque seconde un millier et il fixe les aiguilles avec une forme d'obsession qui serait sans doute risible s'il n'était mortellement nerveux. Au final, il ne remarque la fin de l'assemblée qu'au travers des gestes de ses coéquipiers, qui se lèvent tous d'un coup sans qu'il n'ait ne serait-ce qu'entendu l'au revoir du meneur.

Merde.

Sévastian se redresse comme un piquet, brusquement, et se retourne vers Eirian dans l'espoir qu'il soit encore là. Par chance, ils semblent être sur la même longueur d'ondes. La nécessité du damage-control est claire sur leurs visages crispés et il en rirait s'il n'était concerné. C'est qu'ils doivent être un spectacle divertissant pour l'oeil extérieur, plantés comme des bâtons à se demander quoi faire pour ne pas dévoiler leurs secrets à la face du monde. Drôles, ou pathétiques ?

Leurs regards se croisent, un instant, et le jeune homme esquisse un sourire qui doit tenir davantage de la grimace angoissée que du rire chaleureux. D'un signe de tête silencieux, il indique une pièce en amont de la salle de réception. Le message se veut clair : ils pourraient discuter discrètement, là-bas.

Le barman n'insiste pas, de crainte d'éveiller la méfiance naturelle de son interlocuteur, et se contente de mener le chemin vers ce qu'il espère être un endroit tranquille. Il ouvre la porte en fermant les yeux, priant pour ne pas se trouver nez-à-nez avec d'autres agents. Bingo. Sa main demeure sur la poignée de porte alors qu'il laisse son cadet passer devant lui, espérant qu'il accepte de pénétrer la pièce.

Un soupir lui échappe à nouveau. Un sort de discrétion est formulé, mais il se retient de fermer la porte à clef afin de ne pas faire paniquer son interlocuteur. Il dégaine ensuite sa cigarette électronique, enfin, et se retourne vers Eirian.

"Bon."

Les mots lui échappent. Sévastian se rend compte avec effroi qu'il ne sait absolument pas quoi dire. Alors il improvise, conscient pourtant qu'il n'est pas des plus habiles lorsque le stress enfle ses poumons:

"On est des sorciers, donc."

10 points pour le clan des tempêtes, Sévy.
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Eirian Howl
Eirian Howl
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Lumos
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Jeu 5 Aoû - 23:00
Don't be a stranger
« j'espère que ça t'ira Don't be a stranger | Eirian 8298856 Eirian s'est un peu lâché Don't be a stranger | Eirian 544686074 »
Un coup d’œil à ta montre. Tu n’es pas tout à fait en retard pour la réunion de l’Ordre, mais tu n’es pas en avance non plus. Le rythme s’est brutalement accéléré depuis que tu es entré dans le mouvement et tes journées sont bien remplies, entre les cours où tu t’efforces de maintenir des moyennes honorables, le travail certains soirs et week-ends qui te vrille les nerfs et maintenant le Phénix. Pour autant, c’était la seule solution viable sur le long terme, et tu ne regrettes pas – pas encore, du moins. Tu restes dans l’expectative, attendant de voir comment les choses vont tourner. Tu as longuement pesé le pour et le contre avant de t’engager officiellement. Tes convictions rejoignent parfaitement celles de l’Ordre, là n’est pas la question, et ce n’est pas l’envie de participer qui te manque. Mais les rejoindre, c’était briser ta ligne de conduite habituelle, ta volonté de faire profil bas toujours et partout, c’était prendre le risque d’exister un peu plus aux yeux d’autres, aux yeux des adultes, ceux du Ministère comme les Aurors, c’était attirer l’attention sur toi, sur ta vie. Pourtant, cela devenait une nécessité : ta brève capture par le Blood Circle il y a trois mois, la conscience aiguë que tu as frôlé le désastre et la mort t’ont montré que le danger ne cessait de se rapprocher et que tu avais besoin d’assurer tes arrières. Maintenant que ton père sait que tu rôdes toujours à Londres, maintenant qu’il sait à quoi tu ressembles… seul, tu n’as aucune chance. Si jamais le pire advenait, si ta véritable identité venait à être dévoilée d’une façon ou d’une autre, il faudrait que tu puisses prouver que tu es réellement du côté des sorciers, que tu n’es ni un espion ni un traître – même si tu te doutes qu’aucune action ne sera suffisante en temps de guerre. Alors, tu pries surtout pour que personne ne découvre jamais la vérité.
À ta grande surprise, ton entrée dans l’Ordre s’est faite sans heurts, on t’a accepté avec une simplicité à laquelle tu ne t’attendais pas, ta première mission avec Sean O’Malley et William Ombrage a été un succès, on a reconnu tes qualités sur le terrain – tu tâtonnes encore un peu pour trouver la juste balance entre ce qu’est censé savoir un étudiant de deuxième année de Protection magique et tes compétences particulières, notamment du côté des arts martiaux –, et, finalement, même si cela t’oblige à sortir un peu de l’ombre, cela renforce tes mensonges et ta fausse identité. Tu as besoin d’exister un peu plus dans le monde des sorciers pour te rendre insoupçonnable.
Tu as trouvé un but, une nouvelle sécurité, tu te fonds dans le décor. L’un dans l’autre, tout se passe bien et tu savoures ce répit.

Mais depuis le temps, tu devrais savoir que ces moments ne cachent que des mauvaises surprises. Alors que tu entres dans la salle de réception, tu prends rapidement la mesure des lieux que tu connais bien maintenant – la porte par laquelle tu es entré, celle au fond qui débouche sur une autre salle, les fenêtres qui donnent sur la rue. Autour de la table reste une de tes places de prédilection, à mi-chemin entre la porte et les vitres, te permettant de ne tourner le dos ni à l’une ni aux autres, de voir qui entre ou s’il se passe quelque chose à l’extérieur. Parfait. Seulement alors tu reportes ton attention sur les présents. Des hommes et des femmes que tu connais de vue, d’autres dont tu connais les noms, parfois les états de service, d’autres encore que tu n’as pas eu l’occasion de croiser, et puis… Ton cœur rate un battement, puis deux, puis repart dans une course folle. Ce n’est pas… possible ? Une vague de panique t’envahit tandis que tes deux vies, celle chez les sorciers et celle chez les moldus, entrent en collision.

Sévastian.
Le prénom résonne dans ta tête sans que tu parviennes à lui donner sens dans ce contexte. Il est barman. Il est moldu. Il est… tout un tas de choses, mais pas un sorcier, surtout pas un sorcier. Tu restes figé une seconde de trop tandis que les autres prennent place. Tu luttes contre l’impulsion qui te pousse à tourner les talons, à fuir, comme si cela pouvait effacer les dernières secondes, comme s’il était possible qu’il ne t’ait pas vu. Mais c’est trop tard. Tu perçois la même surprise de son côté, la même stupéfaction. Des sentiments qui doivent se lire aisément chez toi, que tu n’arrives pas à dissimuler, trop pris au dépourvu. Tu te dépêches de t’installer, l’esprit en ébullition, tâchant de juguler les tambourinements de ton cœur. Tu as l’impression que tes voisins pourraient les entendre – tu n’as même pas fait attention à côté de qui tu t’asseyais. Du calme.
Pour l’instant, un seul constat, implacable : Sévastian est un sorcier et il fait partie de l’Ordre. Il t’a vu, il connaît une partie de ta situation – heureusement que tu as gardé ton identité sorcière et tes faux papiers pour travailler dans le monde moldu, sinon ce serait encore pire – si ça peut vraiment l’être. Est-ce qu’il savait ? Est-ce qu’il avait compris que tu étais un sorcier ? Est-ce pour cela qu’il s’intéressait à toi ? – Mais tu n’étais pas dans l’Ordre à ce moment-là, tu n’avais pas eu d’ennuis non plus avec le Blood Circle, rien qui ait pu remonter jusqu’aux oreilles des sorciers. Tu balaies tout ce qui te revient de tes échanges avec lui – qu’est-ce que tu lui as dit, qu’est-ce qu’il a pu apprendre sur toi, qu’est-ce qui aurait pu te trahir, qu’est-ce que tu as manqué dans son attitude ? –, tes efforts pour dissimuler ta nature de sorcier.
Il connaît la précarité de ta situation alors que du côté sorcier, tu entretiens toujours avec soin le mythe de ta famille, tes parents, ton petit frère et ta petite sœur, tous moldus, il a entre les mains de quoi tout faire voler en éclats, de quoi pousser l’Ordre à enquêter sur toi, et ça te glace. Pourquoi ? Comment ? Tu… Il était présent pour toi, malgré ta défiance, malgré tes reculades, toujours patient, attentif. Tu as fini par accepter une partie de ce qu’il te donnait en guettant le moment où ça tournerait mal, où il montrerait une autre facette, même si ce n’est jamais venu, même si tu commençais à avoir davantage confiance, à accepter ce soutien, et tu essayais de l’aider pour équilibrer entre vous. Après tout, vous êtes deux adultes. Tu t’es souvent demandé pourquoi il tenait tant à te venir en aide – enfin, tu sais qu’il a vécu une situation semblable à la tienne, mais pour toi, ça ne suffisait pas à tout expliquer. Il ne pouvait pas être si désintéressé, il ne pouvait pas vraiment vouloir t’aider, tu n’en vaux pas la peine. Et maintenant… la gorge nouée, tu luttes contre l’amertume dans ton ventre, contre l’acidité qui t’envahit, contre ce quelque chose qui souffle trahison et déception et illusion. Tu commençais à y croire, mais tu lui as menti et il t’a menti. Tu ne peux pas lui reprocher d’avoir gardé le secret sur ses pouvoirs, mais…
Qu’est-ce que tu étais vraiment pour lui ? Est-ce qu’il a pu se jouer de toi ? Sa surprise en te voyant plaiderait pour le non. Ou alors il ne s’attendait seulement pas à te voir dans l’Ordre. Réfléchis. Tu glisses un regard vers lui, croises le sien tourné vers toi. Lui non plus n’a pas l’air de savoir à quoi s’en tenir. Est-ce que les autres sont au courant de sa vie moldue ? Est-ce qu’il redoute autant que toi ce que tu pourrais dire ? Tu n’en as aucune idée. Et il va te falloir des certitudes avant la fin de cette soirée pour déterminer à quel point tu es dans le pétrin.

On parle autour de toi sans que tu y prêtes attention, tu n’as aucune idée des sujets discutés dans la réunion, même si tu t’efforces de te donner une mine intéressée pour éviter les regards trop curieux. Les mains crispées sur tes cuisses, tu guettes les gestes de Sévastian. Savoir ce qu’il te voulait – ça ne devrait pas être ta priorité, mais tu as besoin de comprendre. Déterminer à quel point il risque de parler aux autres. Lui… demander de ne rien dire. L’idée te serre le ventre. Une partie de tes secrets entre les mains d’un autre, c’est autant que tu ne contrôles plus, c’est autant qui peuvent atterrir là où il ne faut pas. Après toutes ces années à entretenir tes mensonges… Dire que tu te réjouissais que tout se passe bien !

Est-ce que cette réunion devait durer aussi longtemps ? Tu ne peux t’empêcher de consulter ta montre et tu crains presque qu’elle ne se soit arrêtée. L’aiguille des minutes semble à peine bouger, mais la trotteuse sautille joyeusement en une boucle infinie. Il faut que tu retiennes Sévastian dès la fin, ne pas lui laisser l’occasion de parler avec d’autres – de laisser échapper quelque chose sur toi, même innocemment. Tu peines à quitter les aiguilles des yeux, ne le fais que pour revenir sur le jeune homme. La réunion passe dans une sorte de brouillard, tu n’en retiens rien.

Enfin. Enfin, elle s’achève. Les autres se lèvent. Tu ne quittes pas Sévastian des yeux, prêt à réagir, mais il ne bouge pas tout de suite. Tu te redresses lentement tandis que la salle se vide – une attitude à laquelle les autres sont déjà habitués, tu supportes mal les contacts et la foule, alors si tu ne peux pas être le premier dehors, c’est plus simple de sortir en dernier. Sévastian est aussi tendu que toi, et ça pourrait presque être rassurant si l’angoisse ne te noyait pas à ce point. Tant de choses vont se jouer dans les prochaines minutes. S’il parle, si l’Ordre se penche sur ton cas, tu devras fuir de nouveau. Abandonner Poudlard. Disparaître en ayant les sorciers et le Blood Circle aux trousses. Ce ne sera qu’une question de temps avant que les uns ou les autres ne te trouvent, tu ne pourras pas les semer.
Le sourire de Sévastian est bien différent de celui qu’il t’adresse d’ordinaire, crispé. Il désigne une autre salle, tu hoches la tête pour toute réponse. Tu prends une inspiration profonde, discrète. Essaies de juguler ta panique latente. Damage-control. Il faut que tu aies l’air sûr de toi, ne pas lui donner plus de prises. Merlin, est-ce trop demander qu’un jour, quelque chose se passe bien ?

Tu suis Sévastian à quelques pas en arrière, frôles ta baguette du bout des doigts. Elle est à portée de main au cas où. Il s’assure que la salle est vide, te laisse entrer. Tu passes devant lui avec un frisson dans le dos. Du calme. C’est Sévastian. C’était… ? Est-ce qu’au fond, tu peux dire que tu le connais ? Les fenêtres, les issues, puis tu gardes ton regard attaché sur lui tandis qu’il referme la porte – ne la verrouille pas – et malgré toi, le geste te touche, parce qu’il fait encore attention, parce qu’il se souvient. Un sortilège pour protéger vos échanges, puis il sort sa cigarette, et le mouvement familier te ramène à ce que tu sais de lui – ce que tu croyais savoir. Barman. Avec une cigarette électronique. Est-ce qu’on fait plus moldu ? Est-ce qu’il y a quelque chose que tu aurais dû voir ?
Tu attends qu’il prenne la parole. Son premier mot ne dit rien si ce n’est qu’il semble aussi perdu que toi. « On est des sorciers. » Ce ne serait pas si dramatique, tu partirais dans un fou rire nerveux, voire hystérique. Londres compte des millions d’habitants, combien de putains de chances y avait-il pour que tu sympathises avec un sorcier derrière un comptoir moldu ? Beaucoup trop, visiblement. Ou alors tu as un talent rare pour bousiller les statistiques – mais ça tu le sais depuis que tes pouvoirs sont apparus.

On est des sorciers, tu répètes, comme un écho. C’est…

Absurde ? Irréel ? Terrifiant ?

— Inattendu.

C’est peut-être, sans doute l’euphémisme de l’année. Y a-t-il autre chose à dire ? Des dizaines, des centaines, beaucoup trop pour que tu arrives à les ordonner et les canaliser. Tu te raccroches à ton vague plan, à cette priorité qui n’en est pas une, parce que peu importe ce qu’il voulait, peu importe votre lien, ce qui compte, c’est qu’il ne dise rien. « Qu’est-ce que tu fais là », « est-ce que tu t’appelles vraiment Sévastian », « est-ce que tu as vraiment vécu ce que tu dis avoir vécu », « depuis combien de temps » et « pourquoi » et « comment », et encore « pourquoi », tout se bouscule sur tes lèvres et rien ne sort. Tu croises les bras.

— Est-ce que tu ignorais vraiment que j’en étais un ?

Ou est-ce pour cela que tu m’aidais ?
Mais ça, tu ne le prononces pas. Trop personnel, trop révélateur de ce que tu ressens. La défiance et la distance sont de retour.
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Don't be a stranger | Eirian 21013008104866668 Don't be a stranger | Eirian M-daille-Eirian

Spoiler:





   
On the run,
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Anonymous
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Ven 6 Aoû - 11:59
Inattendu. Oui, c'est bien le mot. Sévastian ne s'y attendait pas. Sévastian a dans la tête un tas de scénarios plus probables, de rencontres plus propices, mais non, il a fallu que ce soit ici, dans cette grande bâtisse que rien ne parvient à rendre moins austère, dans cet ancien pavillon de mangemorts qui lui serre la gorge par sa terrifiante familiarité, il a fallu que ce soit à l'Ordre du Phénix que leurs chemins se croisent et le jeune homme serait empli d'amertume s'il n'en était terrifié. Il n'a pas envie qu'Eirian se fasse des idées. Il n'a pas envie de prendre ses angoisses et de les justifier. L'idée seule lui retourne l'estomac, le noue et le pèse et... Il tire nerveusement sur sa cigarette, cherchant la brûlure de la nicotine à défaut de pouvoir sentir celle de l'alcool. Ce qu'il ne donnerait pas pour un verre.

— Est-ce que tu ignorais vraiment que j’en étais un ?

Bras croisés. Regard défiant. Eirian est redevenu comme avant. C'est dans le ton de sa voix, c'est dans la tension méfiante de son visage, c'est dans ce corps qu'il a fermé brusquement. La vision lui fait l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Ses entrailles se tordent, sa respiration se bloque. Il pourrait presque imaginer le craquement d'un cœur qui éclate. Ca fait mal. Ca fait mal de se voir jaugé par celui qu'il a seulement voulu protéger, mais à qui il a menti et ta faute, c'est ta faute. Tu es une déception, Sévastian. Il a la trachée qui flanche et les mains qui tremblent, il a la poitrine en vrac et le bide en morceaux, mais c'est sans une once d'hésitation qu'il laisse couler le mot. Unique, authentique. Sincère. Merlin, il espère qu'Eirian voit qu'il est sincère.

"Oui."

Une sensation enfle dans sa poitrine, comme une grande vague irrépressible. Une urgence, un désespoir, un besoin d'agir et d'agir vite, de prouver, de justifier, de tout faire pour ne pas être rejeté.

"Bien sûr que oui."

Il prend une inspiration tremblante et se mord la lèvre inférieure, réfléchit à ce qu'il pourrait bien dire. Si Eirian lui tournait le dos... C'est ridicule, ridicule, ils ne se connaissent pas si profondément, son cadet lui a tout juste entrouvert la porte de ses secrets, il n'y a jamais eu de révélation ou de confiance, pas vraiment, pas comme ça, et pourtant. Pourtant, Sévastian a cette douleur fantôme dans sa poitrine à l'idée de le voir partir, à regarder la distance dans son regard grandir, et il ne peut s'empêcher de se répéter qu'il a l'âge de Dimka, qu'il espérait protéger quelqu'un cette fois, qu'il ne veut pas, ne peut pas aussi regretter ça, qu'il va se noyer sous le poids de ses échecs s'il continue comme ça, et il y a peu de choses qu'il ne serait prêt à sacrifier pour éviter d'effondrer ce qu'ils ont construits jusque là.

La vérité. C'est la réponse à toutes ses questions, suppose-t-il, l'unique clef qu'il peut encore utiliser, la seule solution pour ne pas redevenir un étranger. Fais chier. Fais chier. C'est qu'il a son lot de secrets, Sévastian, son pesant de regrets et son lot de plaies qu'il se refuse à soigner. Il n'a pas envie de se dévoiler. Il n'a pas envie d'offrir à son cadet plus de lanières pour son fouet. Eirian n'a sans doute pas conscience de son propre pouvoir, parce que son aîné est un adulte qui n'en porte que le nom et garde en lui des gangrènes que personne ne saura jamais purifier. Eirian ignore qu'un rejet pourrait le broyer.

Le jeune homme déglutit. Tire une dernière fois sur sa cigarette en fixant le sol d'un oeil obstiné. Laisse la fumée blanche épouser ses joues pour mieux s'évaporer.

"Pour être honnête, je n'avais pas l'intention - enfin, je veux dire, je ne pensais pas que c'était possible - de croiser d'autres sorciers dans le bar. C'est... C'est pour ça que j'y suis entré."

Une pause. Une pause pour respirer, une pause pour déglutir, une pause pour se préparer. Il ferme les paupières, comme on le fait face à une grande chute que l'on s'apprête à tenter. Seulement voilà, Sévastian a toujours eu le vertige, et les atterrissages lui ont rarement donné tort.

"Je ne voulais pas te cacher quoique ce soit non plus. Enfin, pas comme ça. Si tu veux savoir... Je suis un sang-pur. C'est de la merde, comme mot, je sais, mais pour ma famille, en Russie, c'était très important. Les Dimitrov, là bas, c'est un peu comme les Malefoy ici, pour te donner une idée."

Un grand manoir froid et des parents intransigeants, un berceau sans amour où les claques résonnent plus souvent que les rires d'enfants. Tu es une déception, Sévastian.

"Je ne m'entendais pas très bien avec mon père."

Les cicatrices qui maculent son dos ricanent face à son euphémisme crasse. Mais il ne veut pas trop en dire. Il ne peut pas formuler ce qu'il a toujours tu. Ce serait... trop dangereux. Et si Eirian a besoin de connaître pour comprendre, il n'a sans doute pas la moindre envie d'entendre ses récits d'horreurs. Et tu n'as pas envie qu'il sache que tu les a abandonnés. Parce qu'il saurait, alors, il saurait que ça pourrait lui arriver. Et tu ne le reverrais jamais.

"Je suis parti.", glisse-t-il pour éviter d'y penser.

Son sac, et son chat, et rien dans les poches et aucune arme dans ses bagages, rien pour affronter la vie et le froid et la solitude qui l'attendaient dehors. Sévastian reprend une bouffée de tabac pour éviter de croiser le regard de son interlocuteur, craignant le jugement qu'il imagine y trouver, ou pire, une méfiance accrue, un mur nouveau érigé entre eux, gigantesque et impénétrable.

Sa gorge est serrée. Il a envie de pleurer. Il voudrait fuir. Il voudrait boire. Il voudrait oublier toute cette foutue conversation, mais il ne peut pas. Alors le jeune homme fixe le parquet, obstinément, et laisse s'échapper ses mots comme les volutes blanches de sa cigarette.

"Tu connais déjà la suite. La rue trois ans, puis le bar, et... tu sais ce que c'est, de vouloir garder son secret. Entre le Blood Circle et les autres moldus qui pourraient nous vouloir du mal, je n'ai pas vraiment l'option de le révéler. J'aurais dû voir, par contre, je le reconnais. Si je l'avais fait, si j'avais su, je te l'aurais dit, Eirian."

La suite se perd en un murmure.

"Je te le jure."
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Eirian Howl
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Sam 7 Aoû - 14:26
Don't be a stranger
« début 2020 »
Sévastian est un sorcier, et c’est douloureux comme un coup de poing dans le ventre, comme un poignard dans le dos. Ça ne devrait pas l’être pourtant, tu sais depuis longtemps que tu ne peux faire confiance à personne, principe répété par ta mère, la seule à qui tu te fies, jusqu’à ce que tu en fasses une règle de vie. Ne pas laisser approcher les autres, jamais, ne pas leur donner de prises, ne pas leur montrer plus que ta façade construite au fil des années. Mentir, les yeux dans les yeux, en souriant, pour survivre. Mais tu t’es toujours senti un peu plus libre du côté des moldus, pas moins en danger, non, évidemment, mais… tu pouvais plus facilement te fondre dans la foule. Tes faux papiers te protégeaient, tu n’avais qu’à dissimuler ta baguette, éviter que quiconque se rende compte que ton sac à dos contenait dix fois trop de choses pour sa taille, une contenance impossible sans la magie. Esquiver la police, les services sociaux quand tu n’étais pas encore majeur… c’était déjà ton quotidien. Et sans proches, sans attaches, tu n’avais pas besoin de mentir plus que le nécessaire, pas comme à Poudlard. C’est peut-être pour cela que tu t’es fait avoir il y a plus de deux ans. C’est peut-être pour cela aussi que tu n’as pas fui Sévastian, alors que tu aurais dû dès qu’il a commencé à se montrer gentil, à comprendre une partie de ta situation, à essayer de t’aider. Il était moldu, il ne risquait pas de mettre en danger ta couverture dans le monde sorcier. Il avait l’air de comprendre, alors que toi, chat sauvage qui refuse de se laisser apprivoiser mais ne peut s’empêcher de rôder autour de la maison, tu te sentais terriblement seul, à survivre comme tu pouvais pendant ces mois d’été, à tâcher de gagner un peu d’argent au fil de l’année. Mais voilà, Sévastian est un sorcier, et tes erreurs risquent de te coûter très cher une fois de plus. Si les sorciers apprennent que tu es sans-abri, s’ils tentent de se renseigner sur tes parents, de se rendre à l’adresse qui traîne encore dans tes dossiers… Tu dois l’éviter. Tu ne peux pas perdre cette vie-là non plus.
Ce n’est pourtant pas cette question qui vient en premier, la demande que tu dois formuler. Non, ce que tu cherches d’abord à savoir, alors que ça ne devrait pas avoir d’importance, c’est l’ampleur de la trahison, à quel point tu t’es laissé manipuler, à quel point tu as été aveugle. Toi qui t’imaginais capable de repérer ce genre de choses… Mais une bonne partie de tes perceptions sont faussées depuis deux ans, tordues par les angoisses et l’hypervigilance qui transforment tout en menace, noyant souvent les vraies alertes. Méfiant, tendu, tu guettes la réponse de Sévastian. Lui non plus n’a pas l’air à son aise, presque… désemparé. Un mot, un seul. « Oui ». Il sonne vrai, sincère. Est-ce qu’il l’est ? Sa confirmation ne t’aide pas beaucoup plus. En général, tu crois plus aux actes qu’aux paroles, trop conscient de tout ce qu’on peut dissimuler, de l’empilement de mensonge et de vent que tu es toi-même. Tu aimerais que ce soit vrai, pour de bon, mais tu as passé l’âge de confondre tes espoirs avec la réalité, de te laisser avoir par quelques mots prononcés avec la bonne intonation.

— Ce n'est pas si évident.

C’est dur et c’est hypocrite, parce qu’il pourrait bien te renvoyer tes questions à la figure, il pourrait porter les mêmes accusations contre toi. Parce que tu n’as aucun droit à exiger la vérité de lui alors que tu es tout aussi coupable. Vous avez menti tous les deux, parce qu’il est difficile de faire autrement dans le monde moldu. Au fond, tu ne sais pas si c’est à lui que tu en veux le plus ou à toi-même, pour n’avoir rien vu, ni compris, pour avoir ouvert une porte qui risque maintenant de t’exploser au visage. Ne fais confiance à personne. Tu croyais l’avoir intégré pourtant. Tu devrais savoir gérer seul, comme l’adulte que tu es, ne pas commettre toujours les mêmes erreurs.
Tu en as marre aussi. Dès que tu crois avoir trouvé un peu de stabilité – non, ça n’en était pas, seulement un point d’ancrage dans la tourmente et c’est déjà beaucoup, quelque chose en quoi tu commençais à croire –, tout explose comme un kaléidoscope devenu fou, se décompose et se recompose en un nouveau schéma, mouvant, incertain, auquel tu dois t’adapter, dont les pièces aux angles trop aigus essaient de se remboîter. Tu as l’impression de te couper dessus, d’avoir toujours deux ou trois tableaux de retard. Que tes propres cristaux peinent de plus en plus à s’emboîter dans le reste, toujours en décalage.

La nervosité de Sévastian se voit dans la façon dont il tire sur sa cigarette. Il ne te regarde pas en face, le regard ancré aux lattes du parquet. Et c’est idiot, sûrement, mais tu as l’impression de retrouver une part de toi dans son attitude ; son manque d’assurance a quelque chose de douloureux et de rassurant à la fois, sans arrogance ni artifice. Il ne pensait pas croiser d’autres sorciers dans le bar, d’où le fait qu’il l’a choisi. Ce qui ressemble à des confidences te prend au dépourvu. Est-ce qu’il va vraiment se confier pour expliquer son attitude, là, maintenant, malgré ta froideur et ta distance ? Est-ce qu’il tient vraiment à ce que tu le croies ? Pourquoi ? La confiance, ça reste quelque chose de nébuleux pour toi, quelque chose d’insaisissable, juste hors de portée de tes doigts. Ça ressemble à un saut dans le vide sans parachute – sans savoir si la chute sera de quelques centimètres ou de plusieurs dizaines de mètres, et ça te terrifie. Tu essaies de contrôler le peu qu’il reste en ton pouvoir, ce n’est pas pour le semer chez d’autres, avec le risque qu’il leur échappe.
Ses paroles éveillent un drôle d’écho dans ta poitrine – ce sont des mots que tu aurais pu prononcer, parce que c’est pour cette raison que tu as choisi de travailler dans le monde moldu malgré les dangers. Le monde sorcier est bien plus petit, hors de question de prendre le risque que la précarité de ta situation remonte aux mauvaises oreilles.

Tu as l’impression d’être un funambule, de te tenir sur une corde raide, avec le vide de part et d’autre, et Sévastian en face de toi, aussi vacillants l’un que l’autre. Tu as l’impression que la moindre parole ou le moindre mouvement de travers va rompre ce fragile équilibre, ce lien ténu qui vous relie, fait de silences et de gestes que tu ne comprenais pas, de confidences qui n’en étaient pas vraiment, juste un coup d’œil que tu laissais passer avant de refermer la porte.
Un silence que tu laisses flotter, parce que tu sens que ce n’est pas fini. La suite a l’air difficile et tu ne veux pas le presser ni casser la ligne de ses mots avec les tiens. Tu veux savoir – comprendre, surtout. Il y a quelque chose d’écorché en lui, quelque chose de fragile.
La suite te cueille ; tu ne sais pas exactement ce que tu attendais, mais certainement pas cette histoire-là. Elle explique pourtant tellement de choses – notamment ce qu’un sorcier peut faire dans un bar moldu. Sang-pur, et c’est incongru ça aussi, si loin de ce qu’il montrait. Sang-pur et il ajoute que ce mot n’a rien de correct – et c’est si rare de l’entendre, toute la société sorcière conspue le « sang de bourbe » qui t’a suivi toute ta scolarité, mais emploie l’autre sans souci, alors qu’au fond c’est la même chose, juste en creux. Tu penses à Dimka, que tu ne connais pas vraiment. Sont-ils de la même famille ? Des cousins, peut-être ? Ce n’est pas le moment pour de telles questions. Tu vois le genre de la famille en tout cas. Les problèmes avec son père… tu peux en imaginer la teneur si Sévastian a préféré se réfugier dans le monde moldu. Et en vérité, tu n’es pas né dans une famille si différente. La même idéologie, en inversé, la même haine de l’autre, de la différence. Le même refus de voir naître d’autres idées, surtout chez leurs propres enfants.

« Je suis parti. »

Moi aussi, je suis parti, tu pourrais dire. Avec trois vêtements, une peluche et des livres d’enfants fourrés dans un petit sac à dos, tout ce que ta mère a eu le temps de prendre. Moi non plus, je ne m’entends pas avec mon père. Tu gardes le silence, parce qu’il y a sans doute beaucoup de non-dits derrière cette phrase, parce que c’est son histoire, pas la tienne, parce que tu ne peux pas prononcer ces mots-là, surtout pas ici, mais tu sens quand même cette fêlure, cette brisure qui fait tellement écho à la tienne, dont les trajectoires se frôlent et se superposent, c’est étrange et proche à la fois, familier et différent. Comme un reflet. Il a l’air coincé, presque comme un animal acculé – une sensation que tu ne connais que trop bien. Et ça te touche beaucoup trop, tu ne devrais pas céder à cette émotion-là, mais essayer de voir au-delà, prendre du recul.
Et la suite, oui, la rue et le monde hostile, cet univers si différent. La nécessité de survivre. Celle du secret aussi. Et encore, toi, tu as la chance d’avoir Poudlard qui t’abrite la majeure partie de l’année. Il jure qu’il te l’aurait dit – et tu ne peux pas faire autrement que le croire, tu ne peux pas renier cette histoire-là. Un sang-pur qui fuit son monde, qui accepte la vie à la rue dans le monde moldu, qui travaille dans celui-ci pour éviter les sorciers, qui rejoint l’Ordre du Phénix… Tu ne peux qu’imaginer ce qu’il a traversé et sacrifié, ce que ça lui a coûté de se retrouver dans un monde quasi inconnu, à quel point il a dû se sentir perdu. La gorge nouée, tu cherches son regard.

— Moi aussi, j’aurais dû le voir et le comprendre.


Mais tu ne le lui aurais pas dit, tu aurais sans doute disparu du jour au lendemain en priant pour ne jamais le recroiser. Le constat n’est pas très reluisant face au courage qu’il vient d’avoir. Mais tu ne peux, ne veux pas lui mentir encore plus. Tes doigts triturent la couture de ton sweat – un qu’il t’a passé, tu réalises brusquement. Ta main retombe. Tu as l’impression de lui cracher à la figure après ce qu’il a fait pour toi.

— Je ne pense pas que j’aurais eu le cran de te l’avouer.


À ton tour de fixer le parquet comme si tu le trouvais fascinant, de suivre les courbes et les nœuds du bois. Envolée l’assurance que tu essayais de manifester, cette volonté de contrôler les conséquences de cette rencontre.

— Je suis entré dans ce bar, et dans d’autres, pour la même raison que toi. Parce que je ne croyais pas possible de tomber sur d’autres sorciers. Et j’ai tout fait pour le cacher, je suis né-moldu, j’ai grandi dans ce monde… Tu n’aurais pas pu le voir. Ou alors, c’est que j’aurais vraiment foiré quelque chose, et il vaut mieux pas.

Et parce qu’il est temps que tu dises le plus important, et cette fois, tu redresses la tête :

— Je te crois. Merci beaucoup de me l’avoir dit, j’imagine ce que ça t’a coûté… Je… suis désolé de t'avoir parlé comme ça.

Tu connais assez la valeur des secrets et l'importance de leur préservation. Tu te mords les lèvres. Il y a des choses que tu vas devoir dire pour être sûr qu’il ne commette pas d’impair vis-à-vis des autres membres de l’Ordre. Mais le reste, ton père, la raison de ta situation, tout ce chaos qu’est devenue ta vie et contre lequel tu luttes, tous ces comportements irrationnels qu’il accepte et qu’il prend en compte alors que tu es incapable d’avouer ce qui t’est arrivé, que tu l’enfouis au fond de toi… ça, tu ne peux pas le dire. C’est lâche et c’est égoïste, et tu le sais.

— Je te promets que je ne dirai rien à personne.

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Don't be a stranger | Eirian 21013008104866668 Don't be a stranger | Eirian M-daille-Eirian

Spoiler:





   
On the run,
falling to the depths

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You wish you were someone else
Who didn't need your help to get by ?
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Lun 9 Aoû - 11:54
Attendre la réponse d'Eirian lui donne la sensation d'être un accusé à la barre, muet et rigide, soumis entièrement à la décision d'un jury intransigeant. Sévastian se tient droit, la gorge nouée et les mains frémissantes, ses yeux rivés sur la danse figée des rainures du parquet. Il tente de respirer sans se bloquer, tente de dissimuler le désespoir irrationnel qui le prend à la gorge, mais son cœur bat trop fort et ses lèvres se triturent et il est certain de n'être rien de moins qu'un livre ouvert pour son interlocuteur. C'est terrifiant, cette mise à nu, c'est paralysant, comme cette sensation vertigineuse qui nous enveloppe au bord d'un grand précipice. Le jeune homme sait qu'il se trouve actuellement dans l'un de ces moments charnières, ces grands géants qui prennent un bout de vie et le renverse, ou bien le maintiennent plus fort encore. Et il a beau prier, ruer, espérer, se résigner, la vérité c'est qu'il n'est pas maître de cette relation, ni de son évolution. La dernière réaction de son cadet ne promet d'ailleurs rien de bon à cet égard.

Et ça fait mal. Ca fait mal, d'être à la merci de quelqu'un, d'être soumis à l'incontrôlable, d'être certain de perdre un match qu'il n'a jamais désiré commencer. Ca fait mal de savoir qu'il ne sera peut-être plus accepté, alors qu'il voulait juste l'aider. Le protéger. Comme un frère ?

Sévastian a vraiment besoin d'un verre.

— Moi aussi, j’aurais dû le voir et le comprendre.

Les mots le prennent de cours et le jeune homme relève brusquement la tête, cherchant le regard de son partenaire. Celui-ci a visiblement jugé bon de s'absorber dans la contemplation des lattes de parquets, dans une inversion des rôles qui l'étonne, qui le surprend mais qui fait naître en lui un espoir qu'il n'ose pas avouer. A-t-il bien compris ? A-t-il bien entendu ? Nerveusement, presque frénétiquement, Sévastian fait tourner la phrase dans sa tête, la tourne et la retourne et la dissèque.

Il y a de la compréhension, là-dedans. Il y a de la compréhension et un aveu, une perche tendue à son égard, un "moi aussi" qui s'étend au delà de la simple confession prononcée. Le jeune homme est paralysé, en apnée, attendant les mots qui feront ou déferont cet étrange lien d'amitié qu'il a noué. Une lueur imprudente s'est allumée au creux de sa poitrine et il a peur d'encourager ses braises, peur surtout de les voir s'éteindre sous le joug d'une seule phrase. Alors il observe, il détaille, remarque les mains nerveuses qui torturent le vieux pull - son vieux pull ? - et le relâchent subitement. Son coeur enfle presque instantanément d'un mélange chaud et presque douloureux d'affection et de compassion. Eirian aussi est terrifié. Eirian est terrifié et il est légitime, légitime parce que la vie lui a appris à se méfier et à se protéger, que les aînés mentent et blessent et qu'il vaut mieux s'en éloigner. Forcément, qu'il a peur. Forcément qu'il ne peut passer à autre chose aussi spontanément qu'un autre.

— Je ne pense pas que j’aurais eu le cran de te l’avouer.

Ce n'est pas grave, a-t-il envie de souffler. C'est normal, a-t-il envie d'insister. Son cadet n'a pas le même vécu, son cadet a connu la rue et ce sont des choses qui forgent, qui forgent dans un moule aussi solide qu'imparfait, blessé par des fêlures qui s'imposent aussi fort que le froid en hiver.

— Je suis entré dans ce bar, et dans d’autres, pour la même raison que toi. Parce que je ne croyais pas possible de tomber sur d’autres sorciers. Et j’ai tout fait pour le cacher, je suis né-moldu, j’ai grandi dans ce monde… Tu n’aurais pas pu le voir. Ou alors, c’est que j’aurais vraiment foiré quelque chose, et il vaut mieux pas.

Il sait. Bien sûr qu'il sait pourquoi il est rentré dans ce bar. Tout a du sens, désormais. Il voit ce qui lui était auparavant indiscernable, et le grand puzzle qu'est Eirian a pris quelques contours, quelques formes qu'il comprend mieux et qui lui donnent quelques idées désagréables quant au passé du garçon. Ca le répugne, encore aujourd'hui, de l'imaginer seul dans le froid. Ca le torture, l'idée qu'un gamin qui a l'âge d'être Dimka se traîne la nuit dans les ruelles sombres de la capitale, sans savoir où aller ou comment. La révélation de son sang ne le rassure pas. Un sang-pur qui se cache des sorciers dans le monde moldu, c'est étonnant mais pas illogique. Il y a un tas de choses à fuir, lorsqu'on craint la vengeance d'un patriarche mangemort et rétrograde. Un né-moldu qui se réfugie dans la rue... Où sont tes parents, Eirian ? Où est ta famille ? Sévastian esquisse un pas vers son interlocuteur, s'arrête, hésite. Il voudrait s'approcher, voudrait l'étreindre et le rassurer, mais il est incertain encore de ce qu'il incarne pour son vis-à-vis, ne veut ni l'acculer ni le braquer. Puis il y a cette voix, dans sa tête, cette voix que rien n'arrête et qui lui susurre sans cesse des vérités qu'il ne peut admettre. Il a été abandonné, souffle-t-elle. Il a été abandonné comme tu as abandonné tes adelphes. Tu as peur de son regard sur ton sang, demande-toi plutôt ce qu'il penserait de tes actes. Tu ne vaux pas mieux que ceux qui l'ont laissé là.

— Je te crois. Merci beaucoup de me l’avoir dit, j’imagine ce que ça t’a coûté… Je… suis désolé de t'avoir parlé comme ça.
— Ne t'excuse pas.

Les mots se sont formés d'eux-mêmes, instantanément, sans lui demander d'avis ou de permission. Il ne les regrette pas. Un sourire tendre se dessine sur ses lèvres tandis qu'il se penche, cherche à cueillir le regard vert de son interlocuteur.

— Eirian, tu fais avec ce que tu es. Ne t'excuse pas de te protéger, tu as fait ce que tu avais à faire. Ce n'est pas toujours agréable mais... Je comprends.

Puis les propos de son cadet résonnent, une assurance qu'il n'osait pas réclamer mais dont la présence l'apaise. Il le sent immédiatement. Les épaules se dénouent, le cœur comprimé se relâche, ses côtes contractées acceptent un peu plus d'un air qu'elles refusaient jusqu'alors. Son visage se détend.

— Je ne dirai rien non plus. Je te le jure.

Sévastian esquisse un pas de plus, tend une main innocente vers son cadet et ébouriffe ses cheveux bouclés à défaut de pouvoir le serrer dans ses bras. Il espère qu'il l'acceptera. Peu enclin toutefois à risquer plus que ça, il se recule rapidement et crache tranquillement une nouvelle bouffée de cigarette. Les volutes blanches dansent dans l'atmosphère désormais moins lourde, et il laisse un rictus paresseux courber ses lèvres. Un appui maladroit sur son bras libre le hisse en haut d'un comptoir - à moins que ce ne soit un vieux bureau - et il noue ses chevilles en fixant son compagnon.

— Putain, je me demandais comment tu faisais pour ranger toutes tes affaires dans ton sac en plus, tu sais ? J'me disais que t'étais un champion du Tetris mais tu trichais.

L'heure des confessions s'est achevée. Sévastian est convaincu qu'Eirian, comme lui, est assez fatigué pour ne pas se plonger dans les questions qui planent toujours sur leurs deux existences. La conversation, bien que courte, a été... compliquée. Pour son interlocuteur sans doute plus encore que pour lui.

— Et comme j'ai bien retenu que tu es un né-moldu, je t'informe que tu vas devoir m'apprendre à jouer à Mario Kart. Tu as forcément des prédispositions et moi, j'suis une merde à ce jeu. C'est infernal. On avait zéro cours d'étude des moldus à Durmstrang et je peux te dire que ça se voit. Je comprends toujours pas comment me servir de certaines fonctionnalités de mon téléphone, s'te plaît. Une fille m'a carrément surnommé "le boomer" au bar. T'imagines la honte ?

Un rire facile s'échappe de ses lèvres, un peu forcé mais non moins sincère. Il a besoin de ça. Il a besoin de cette normalité pour se rassurer, besoin de tendre cette branche d'olivier pour ne pas se laisser submerger. La voix dans sa tête est là, insidieuse, et souffle toujours les pires atrocités, et il a besoin de la faire taire. Plus tard, ce sera avec un verre. Plus tard, il se noiera dans la boisson, mais Eirian mérite mieux que ça et il attendra, rien qu'un peu, avant d'avaler ses poisons.
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Eirian Howl
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Lumos
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Lun 9 Aoû - 23:00
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« début 2020 »
Tout tourbillonne tandis que Sévastian déroule son histoire, ces mots qui résonnent en toi avec tant de force, parce que c’est à la fois très proche et très différent, une histoire en miroir, une enfance saccagée par des parents qui ne méritent pas ce nom, la rue où vous vous êtes échoués, vos efforts pour vous en sortir, essayer de construire quelque chose. Lui qui s’en sort, toi qui te débats toujours au milieu des flots sombres en espérant encore trouver la lumière. Tu aurais voulu que ce soit différent, que ça ne touche pas aussi juste. Qu’il ait moins mal et qu’il ait une meilleure vie, qu’il n’ait pas connu lui non plus une partie de ce que tu traverses. Tu ne pensais pas que quelques phrases pourraient franchir à ce point les barrières que tu ériges autour de toi, saperaient tes défenses aussi facilement, les remparts derrière lesquels tu t’abrites. Tu te sens étrangement vulnérable alors que c’est lui qui se dévoile, parce que c’est trop proche, parce que tu comprends bien plus que tu ne le voudrais, parce que ça te rassure tout en t’effrayant. Parce que la tempête que tu imaginais devoir affronter se transforme en autre chose, en mieux ou peut-être en pire, et tu ne sais pas comment y faire face. Ce n’est pas tout à fait cette conversation-là que tu aurais voulu avoir, mais c’est celle qui se déroule et tu te sens démuni.

« Moi aussi », c’est le plus juste que tu puisses dire, sans avouer la vérité. « Moi aussi », et pas seulement pour le fait qu’il est un sorcier. Ce ne sont que deux mots, mais tu as l’impression de livrer une vérité bien plus grande. Un « je comprends » qui se cache. C’est un pardon donné, aussi, et tu espères qu’il peut l’entendre. Vous êtes aussi coupables l’un que l’autre – ou aussi innocents, parce que tu sais trop bien ce qui peut pousser au secret et il n’est pas celui des deux qui ment le plus, il n’est pas celui qui est une tromperie et une fraude des pieds à la tête. Son nom est le vrai, son histoire aussi. Il n’y a que ton physique qui est réel, peut-être, parce que tu as retrouvé tes couleurs naturelles en allant à Poudlard – il n’y a que cela de vrai et pourtant tu le hais pour ce qu’il t’a valu. La nervosité te ronge, et le pull – son pull – te brûle.
Tu déroules ce que tu peux dire, avoues ton sang, guettes ses réactions – redoutes surtout les questions, parce que tu en ouvres le chemin, parce que le fait que tu sois un sorcier en plus n’explique et ne justifie rien. Si ta famille est un problème, pourquoi la rue plutôt qu’un refuge dans le monde magique ? Cette question que tu refuses absolument, que tu ne veux surtout pas que les sorciers se posent, qui te pousse à faire profil bas, à rester sous les radars à l’école. Mes parents sont des moldus suffit en général à détourner l’intérêt de la majorité d’entre eux. Sévastian ne t’a cependant jamais interrogé sur les tiens et tu espères que ça va continuer, tu n’as pas envie de lui mentir en face, pas maintenant en tout cas, mais tu n’auras pas le choix. Tu te figes, incertain, lorsqu’il s’avance vers toi, mais il ne s’approche pas davantage. Tu t’excuses de la dureté de tes mots, de ta défiance – elle ne te quitte pas complètement, comme elle ne te quitte jamais avec personne.

« Ne t'excuse pas. »

Tu le lui devais quand même. Tu croises son regard tandis qu’il te sourit. Et c’est lui qui s’emploie à te rassurer alors que c’est toi qui as lancé les hostilités, lui qui s’est confié. Mais il… comprend, et tu sais que c’est vrai. Et c’est terrifiant. Tu t’es souvent senti en décalage avec les autres, à Poudlard, avec leurs vies en apparence si normales, auxquelles tu faisais coller tes mensonges – tu aurais voulu savoir ce que ça faisait vraiment de vivre ce que tu inventais, une famille unie, pas de plus gros souci que de réussir ses études, pas de père qui hurle que tu es un monstre et une abomination, pas de traque et pas de balles qui te brûlent le flanc, pas de peur que tout s’arrête d’un jour à l’autre. Même si tu sais que les apparences peuvent être trompeuses, tu as souvent été jaloux. Tu t’es demandé, aussi, si quelqu’un pourrait saisir. S’il y avait des personnes qui éprouvaient des choses comparables, pas identiques, mais similaires, qui pouvaient comprendre, partager ce qui t’agite, le chaos de ta vie, la détresse toujours plus profonde. Tout en sachant que tu ne pourrais rien leur dire. C’est peut-être aussi pour cela que tu as laissé approcher Sévastian, parce que cela faisait au moins une personne qui connaissait ta situation, ce que tu as toujours tu chez les sorciers. Quelqu’un qui pouvait comprendre sans mettre en péril le reste. Maintenant, c’est compliqué, et tu ne sais pas quoi faire de cette compréhension, tu ne sais pas quoi faire de tes émotions – les enfouir et les ignorer, elles ne comptent pas, chuchote la part rationnelle de ton cerveau encore en état de fonctionnement, mais tu n’en es pas capable –, tu ne sais pas quoi faire de cette drôle de sensation un peu trop claire au milieu du tourbillon sombre qui te submerge, qui pourrait ressembler à de l’espoir et à du réconfort, mais qui te donne envie de la fuir parce que c’est trop dangereux, parce que ce n’est pas pour toi, parce que tu en as déjà trop dit, trop montré, trop avoué.

Sévastian se détend, un soulagement que tu ne peux pas rater. Est-ce qu’il était si anxieux que cela face à cette discussion ? Aussi nerveux et effrayé que toi ?

« Je ne dirai rien non plus. Je te le jure. »


Est-ce que tu peux y croire ? Tu en as envie, mais tu n’oses pas ; tu prêteras l’oreille à ce qui se dit dans les couloirs, tu verras si d’autres sorciers viennent t’en parler, si des attitudes changent. Tu auras des réponses prêtes, alors. Et puis… vous êtes liés par le secret de l’autre, tu n’es pas sans arme si jamais ça tourne mal. Non que tu en aies envie… mais tu ne peux pas négliger cette possibilité. Sa main se tend vers toi, t’ébouriffe les cheveux. Tu te crispes, le corps raide, les dents serrées, prends sur toi pour ne pas reculer. Il ne te veut pas de mal. Mais tu ne respires que lorsqu’il la retire. Tu retrouves un peu ta voix, pour être sûr qu’il sache ce qu’il ne doit pas dire.

— Je n’ai jamais parlé de ma situation dans le monde sorcier. Ils croient que…


Tout va bien ? Mais ce serait avouer que tout va mal – il le sait déjà de toute façon, c’est toi qui n’es pas prêt à prononcer ces mots à voix haute, à les entendre résonner, parce que ça rendrait les choses trop concrètes, trop tangibles. Je vis toujours avec ma famille ? Là, c’est plutôt le lieu qui t’empêche de le dire à voix haute, le lieu et les gens qui traînent dans les couloirs, même si tu ne perçois rien de l’autre côté de la porte. Il entendra forcément tes mensonges à un moment ou un autre, quand on te parle de vacances, quand tu parles de ton petit frère et de ta petite sœur, poursuivant ceux entamés à l’école.

— Que je retourne chez moi pour les vacances, quand je ne suis pas à Poudlard. Et je préfère que ça reste comme ça.


Ça reste ambigu, ça dit les choses sans les dire. C’est aussi un moyen de le rassurer à ton sujet, tu n’es pas dehors en permanence, tu es à l’abri dix mois sur douze, et c’est déjà beaucoup. Tu n’as à te soucier que de payer tes fournitures scolaires et de trouver de quoi manger pendant l’été. Ça pourrait être bien pire.
Sévastian se recule, tu suis les volutes de fumée des yeux avant de revenir sur lui. Il s’installe et tu redoutes ses prochaines phrases, les questions auxquelles tu ne pourras pas répondre, pourquoi, comment. Mais ce n’est pas cela qui vient, juste une remarque anodine, que tu comprends comme telle, et ça te tire un sourire tandis que le nœud dans ta poitrine se relâche. Tu respires plus librement. Plus de questions ou seulement des innocentes, et ça te va. Tu te doutes qu’il n’a pas tout dit, comme il sait bien que tu n’as quasiment rien lâché, mais tu n’as pas besoin d’en savoir plus. Envie, peut-être, parce que tu t’intéresses à lui, parce que tu aimerais l’aider comme il t’aide si tu le peux, mais tu ne l’obligeras pas à parler, et tu ne lui demanderas rien tant que tu ne seras pas toi-même décidé à en dire plus. Tu peux continuer sur la même ligne qu’avant, et c’est déjà plus que tu n’espérais.

— Zut, une réputation qui s’effondre ! Mais oui… Sortilège d’extension indétectable. Surtout qu’il n’y a pas que des vêtements dedans.

Cela faisait déjà quelques années que tu cachais ta malle de Poudlard dedans en revenant de l’école pour l’été, pour ne pas traverser Londres en la tirant derrière toi lorsque tu rentrais chez toi. Pour ne pas attirer l’attention – pour ne pas la semer derrière toi si jamais ton père ou ses complices du Blood Circle vous tombaient dessus au coin d’une rue. Ça t’a plus qu’aidé la première année, quand tu n’avais pas encore atteint ta majorité sorcière.
Sévastian continue dans la même veine. Tu n’es pas sûr que tes compétences en matière de jeu soient plus développées que les siennes. Ta mère t’avait bien acheté une console portable quand tu étais adolescent, mais tu ne l’avais pas emportée à Poudlard et tu n’es pas resté assez longtemps dans l’appartement pour penser à la récupérer. Tu l’aurais sans doute revendue, de toute façon. Mais tu apprécies l’effort qu’il fait, ce retour à quelque chose de plus normal, à ce qu’était votre relation avant que tu ne l’aperçoives tout à l’heure. Même si toute ta tension n’a pas disparu, encore sous le contrecoup de la conversation et de ses implications, tu es bien plus détendu. C’est un peu forcé, peut-être, mais tu as besoin de ramener tes angoisses à un niveau plus rationnel, de ne pas penser à tout ce qui pourrait mal tourner si jamais… Sévastian n’est pas tel que tu le crois. De croire que ça va bien se passer, que tu as évité le pire.

— Je ne suis pas sûr d’être très doué, mais pas de souci pour une démo ! Et franchement, tu te débrouilles vraiment bien pour quelqu’un qui ne connaissait pas le monde moldu. Je t’aiderai pour le téléphone, si tu veux. Et s’il y a d’autres technologies ou sujets où tu as des questions… n’hésite pas. Moi, je n’ai jamais compris comment les sorciers faisaient pour tenir sur des balais et surtout pour aimer ça.

Tu souris, malicieux.

— Non, je n’imagine pas. Je ne suis pas vieux, moi ! Mais je compatis.


Tes vingt ans ne sonneront pas avant quelques mois, tu peux en profiter.

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Mer 11 Aoû - 17:13
— Je n’ai jamais parlé de ma situation dans le monde sorcier. Ils croient que…

Que tout va bien. Que ce sont des bras aimants qui l'accueillent l'été, et pas les rues moites de la capitale. Qu'il a une famille qui l'attend en rentrant, et pas les rats qui grouillent près des poubelles publiques le soir. Sévastian hoche la tête. Il ne peut pas dire qu'il approuve, mais il comprend. Il la connaît bien, la honte viscérale de la pauvreté, ce sentiment déraisonné de responsabilité, comme si on était fautif de sa propre précarité. Il la connaît bien et ça lui fait mal de la savoir vivante dans la poitrine de son cadet, de la sentir palpiter dans ses veines et brûler son estime de lui-même. Eirian est trop jeune et souffre déjà de trop de maux pour encore creuser ce gouffre, mais la vie est une conne et la justice ne fait pas partie de ses mœurs.

— Aucun problème, Eirian. C'est toi qui vois.

Je n'approuve pas mais tu ne changeras pas. Sévastian lui sourit tranquillement, d'une expression qui se veut calme et tendre, et reprend une bouffée de cigarette. Le goût amer étreint sa langue, remplit sa gorge et sa trachée d'une chaleur agréable. Il ferme les yeux pour mieux la savourer.

Sa phrase est une fin en soi. La conversation est terminée; ils ont fini de naviguer cette mer pleine d'écueils, peuvent voguer vers des flots plus cléments pour poursuivre un voyage serein, et le jeune homme ne peut contenir son soulagement à l'idée d'avoir enfin passé cet obstacle.

C'est son tempérament de barman qui prend le relais. Son sourire s'agrandit et ses épaules se détendent, et les mots s'échappent plus aisément de ses lèvres dénouées tandis qu'il change de sujet. Et les phrases sont joueuses, et le ton est léger, et Sévastian se prend à espérer. A se rassurer, surtout, que ce n'était qu'un petit plongeon dans cette relation et qu'il n'a pas fait couler le radeau maladroit qu'il était parvenu à construire. Il insiste, donc, blague et s'autorise même à rire, cherchant avec enthousiasme à voir naître un sourire sur le visage d'Eirian. Ce n'est pas un succès immédiat, mais ce dernier semble au moins enclin à répondre :

— Zut, une réputation qui s’effondre ! Mais oui… Sortilège d’extension indétectable. Surtout qu’il n’y a pas que des vêtements dedans.
— Attends, attends, il me faut des détails ! Tu mets quoi dedans, un hibou ? Nan, nan, plus lourd, plus lourd. Un Hypogriffe ?

Il est taquin, Sévastian, et ça lui rappelle des souvenirs qui font mal et qui soulagent. Il est taquin comme ça lui arrive rarement, comme ça lui arrive avec peu de gens, et il se laisse prendre au jeu d'une affection qu'il ne peut feindre. Eirian a l'âge d'être son petit frère, d'être Dimka, et même s'il est profondément différent du garçon qu'il a gardé en souvenir, rien ne peut le retenir de ressentir cette émotion trop forte.

Les propos continuent, et des confessions nouvelles apparaissent, bien loin du climat tendu d'autrefois. Celles-ci sont bon enfant. Le barman a conscience de ses lacunes en matière de monde moldu, et il en rit avec plaisir chaque fois qu'elles lui sont rappelées. Il a appris à s'en moquer, parce que c'est plus aisé d'une part, et surtout parce qu'avouer ses fautes aussi fort lui permet de ne pas éveiller de soupçon. Il semble n'avoir rien à cacher, quand il s'en vante ainsi... Mais gagner une partie de Mario Kart, rien qu'une, serait tout de même une belle victoire.

— Je ne suis pas sûr d’être très doué, mais pas de souci pour une démo ! Et franchement, tu te débrouilles vraiment bien pour quelqu’un qui ne connaissait pas le monde moldu. Je t’aiderai pour le téléphone, si tu veux. Et s’il y a d’autres technologies ou sujets où tu as des questions… n’hésite pas. Moi, je n’ai jamais compris comment les sorciers faisaient pour tenir sur des balais et surtout pour aimer ça.

Cette fois, Sévastian éclate de rire.

— De un, c'est parce que tu ne m'as pas vu la première fois qu'on m'a demandé "mon numéro". J'ai cru qu'on parlait d'un matricule et j'ai dit quelque chose du genre "145" pour faire semblant que j'étais un type normal. La fille a ri, jusqu'à comprendre que je comprenais rien. Ensuite elle a cru que c'était parce que je comprenais pas l'anglais - je parlais pas hyper bien à l'époque - puis après... Bah après elle a juste pensé que j'étais chelou !

C'est un souvenir drôle, un souvenir lumineux au coeur du chaos qu'était cette époque là à ses yeux. A l'époque, ça ne l'avait pas fait rire du tout, mais maintenant... Maintenant il a le recul et la maturité pour pratiquer l'auto-dérision avec enthousiasme. La compréhension de ce monde, si différent de celui dans lequel il est né, lui a également permis de rendre la scène plus comique que lorsqu'il l'a vécu.

— Pour ce qui est du balais, j'aimais bien ça plus jeune mais je n'ai pas monté sur un balai depuis... Piou ! Trop longtemps. Si ça se trouve je suis devenu comme toi !

Le sourire d'Eirian est communicatif et sa blague lui fait chaud au coeur. Il est rare de voir son cadet se détendre. Sévastian n'en dit rien, de crainte de briser le moment chaleureux qu'ils ont créé, préfère à la place poser une main théâtrale sur sa poitrine.

Moi, vieux ? Je suis déçu, Eirian. Moi qui pensais qu'on était amis...

Un clin d'oeil naît tout seul sur son faciès avant qu'il ne poursuive :

— Je te ferai jouer au jeu là, Polemone go. On verra comment tu t'en sors, puisque tu n'es pas un vieux !

La vérité, c'est qu'un de ses collègues lui a installé cette application et qu'il n'a aucune idée de comment s'en défaire, et qu'il n'a aucune idée de comment on y joue. Tout ce qu'il a remarqué, c'est qu'il est censé attraper des créatures magiques fictives et virtuelles en faisant un geste sur son téléphone. Les moldus sont étranges.

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Eirian Howl
Eirian Howl
Serdaigle OP
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Lumos
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Mon allégeance : Ordre du Phénix
Jeu 12 Aoû - 21:56
Don't be a stranger
« début 2020 »
« C’est toi qui vois ». Une fois de plus, il comprend, ne cherche pas à forcer, n’essaie pas de t’obliger à agir autrement, même si tu te doutes qu’il aimerait le faire. Ne te dit pas que c’est mal ou que tu devrais parler ou qu’il ne faut pas rester seul – au fond, tout cela, tu le sais déjà. Ne demande pas pourquoi. À Poudlard, il n’y a pratiquement personne à qui tu pourrais en parler, même si tu le voulais – et ce n’est pas le cas. Elise ? Elle a été quasi la seule à remarquer ton changement au début de la septième année ou du moins la seule à s’en soucier assez pour venir t’en parler. Mais tu lui as tu la vérité, as esquivé les questions, laissé seulement entendre que tu avais assisté à quelque chose de traumatisant. Tu commences à te rapprocher de Kayla dont tu es le tuteur depuis le début de l’année, votre relation devient plus amicale… mais tu ne te vois pas te confier à elle, surtout sur ce genre de sujet. C’est trop… personnel ? Et puis, dire ça sans expliquer le reste, ce serait difficile, elles ne retiendraient pas leurs questions sur ta famille, essaieraient peut-être d’alerter d’autres personnes, et tu as moins que tout envie que des sorciers commencent à fourrer le nez dans ta vie privée. C’est plus simple de laisser croire que tu as une vie de famille classique, normale, avec ses hauts et ses bas, des parents moldus qui ont parfois du mal à comprendre la magie, de gentils cadets pour compléter le tableau, et voilà. De toute façon, tu ne saurais même pas par où commencer pour en parler, quels termes choisir, comment l’avouer, comme si ta gorge nouée refusait de laisser passer les mots, comme si tu préférais les enfouir au fond de toi – et c’est plus simple de faire semblant, de faire comme si tout allait bien, de ne pas gérer les autres et leurs regards en plus de toi-même.
Et maintenant, même si l’été reste une ombre redoutée, une sorte de sprint de deux mois, une plongée en apnée, tu arrives plus ou moins à faire face. Tu repères les maisons ou les immeubles abandonnés ou en travaux, t’y faufiles sans te faire remarquer. Ça te fait au moins un toit – en revanche, ça remédie rarement aux courants d’air ou à la température ambiante. Et tu prends soin de ne jamais rester plus de quelques jours au même endroit, pour ne pas créer d’habitude, ne pas attirer l’attention, tâchant de te rendre invisible dans les recoins et les ombres de Londres. La magie aide un peu aussi, maintenant, même si tu évites de trop l’utiliser dans la capitale. Sévastian t’a déjà proposé de t’héberger au moins un peu, mais tu t’y es toujours refusé – pas assez discret, et il était moldu, impossible de prendre ce risque, et ça pouvait être dangereux de plein d’autres manières, mais ça, tu ne le lui avoueras jamais.
C’est toujours un peu étrange de te dire que Sevastian sait et comprend. Trop habitué à garder tes distances, à enjoliver ta vie, tu ne sais pas comment gérer ni répondre. C’est toujours un peu étrange de penser qu’il ne dira rien. De cela, tu restes moins sûr cependant même si l’idée qu’il mente possède quelque chose de dérangeant alors que tu portes ce qu’il t’a donné. Tu jugeras avec le temps, aviseras en fonction des changements. Tu devrais le remercier pour ses mots, mais ça ne vient pas, tout te paraît encore trop instable, comme si tu ne t’ajustais pas encore à cette nouvelle réalité, comme si une porte vers toi restait béante et que tu ne pouvais pas la re-verrouiller. Tout ce que tu arrives à produire, c’est un hochement de tête.

Le changement de conversation te libère, t’aide à respirer plus facilement. C’est fini pour ce soir au moins. Ça te laissera le temps de te reprendre, d’intégrer la nouvelle situation – de te dire que tu l’as échappé belle – que tu devras être plus méfiant avec les « moldus » que tu croises à l’avenir. Ça ne se passera pas toujours aussi « bien » que ce soir. Tu surveilleras davantage tes mots, les indices que tu laisses échapper malgré toi – même si ce n’est pas un hasard que Sévastian ait su voir derrière une partie de tes mensonges, il y a des signes qui ne trompent pas, que tu ne peux pas masquer, pas autant que tu le voudrais, assez pour faire illusion devant la majorité des gens qui ne voient rien, ne veulent pas voir, pas suffisamment pour tromper ceux qui ont vécu la même chose.

— Pauvre hippogriffe ! Non, juste la cage du hibou, une malle, un chaudron, la moitié de la bibliothèque de Poudlard, une ou deux plantes en pot… Ah, et une armure qui voulait voir du pays et je crois que c’est à peu près tout.

L’énumération s’allège à mesure que tu la poursuis dans un inventaire à la Mary Poppins. Même si ton ton reste neutre, comme si tu répondais sérieusement à la question, seul le début est vrai. Mais tu ne doutes pas que le sortilège rende ton sac capable d’abriter tout ce que tu cites.
Sévastian éclate de rire en soulignant ses lacunes dans le monde moldu, et ça aussi, ça te parle, tu te rappelles trop ton désarroi en arrivant à Poudlard, en essayant de comprendre ce monde dont tu ne connaissais rien, toutes ces choses que les autres savaient déjà et que personne ne prenait le temps de t’expliquer. Tu as passé une bonne partie de ton temps libre avant les vacances de Noël à la bibliothèque, à ingurgiter tout ce que tu pouvais comme connaissances sur le monde magique. Maintenant, après toutes ces années, c’est devenu rare de te prendre en défaut – enfin, tu n’es pas un spécialiste, mais tu as les connaissances de base. Tu imagines sans mal la surprise de la fille en entendant le numéro donné au hasard. Tu sais bien que ce n’est pas aussi drôle que ça en a l’air, mais il vaut toujours mieux en rire qu’en pleurer. Toi, tu notais tous les concepts que tu ne saisissais pas pour filer ensuite à la bibliothèque. Il y a juste le Quidditch auquel tu n’as jamais vraiment accroché, même en tant que spectateur.

— Oh, je ne pense pas que tu puisses perdre à ce point ! Je crois que c’est une sorte de talent de s’en sortir aussi mal.

Tu te détends un peu plus, et ça tire dans tes joues, comme si tes muscles n’avaient plus l’habitude de fonctionner de cette façon.

— Justement, les amis, c’est là pour dire la réalité des choses, non ?

La formulation est un peu tordue, mais tu ne peux pas dire « vérité » maintenant. Ton sourire revient en l’entendant parler du jeu.

— C’est Pokémon, pas Polemone.

Tu les regardais, à une époque où tout était différent. Après, les dessins animés n’avaient plus exactement le même attrait. Ça fait des années que tu n’as pas joué, vraiment joué. Ton téléphone ne te sert que les fois où tu viens à Londres, essentiellement pour travailler certains soirs ou le week-end. Tu penses « survie » et « nécessité », « discrétion » et « vigilance ». Jouer, c’est baisser ta garde, oublier un peu ton environnement. Tu as un nœud dans le ventre, mais tu ne montres rien.

— Je vais gérer ! Je regardais les dessins animés enfant et j’ai un peu joué, je te montrerai mes talents de maître Pokémon. Tu ne peux pas vivre chez les moldus sans connaître au moins Pikachu !

Après tout, ça fait pratiquement partie de la culture maintenant. Tu te demandes s’il a déjà eu l’occasion d’aller au cinéma depuis qu’il a trouvé une certaine stabilité, s’il a pu découvrir un peu ce pan de la culture moldue. Cependant, l’heure commence à tourner. Tu seras de toute façon en retard pour l’heure du couvre-feu qui s’applique même pour les étudiants, mais ce sera loin d’être la première fois que tu seras dehors à des heures indues. Depuis le début de ta scolarité, tu as une longue pratique des balades nocturnes et de l’évitement tant des professeurs que des fantômes. Mais tu as aussi besoin de faire le point sur cette soirée, de retrouver un environnement que tu maîtrises mieux pour cela. Tu hésites cependant à prendre congé. Absurde. Tu as déjà établi que vous aviez des moyens de peser sur l’autre, vous en avez conscience tous les deux. Tu ne peux qu’espérer que c’est suffisant et qu’il ne te trahira effectivement pas. Espérer que tu peux lui faire confiance, au moins sur ce sujet. Tu finis par lâcher :

— Il va falloir que j’y aille.



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Ven 13 Aoû - 16:24
Ils rient. L'ambiance est légère, soudain, si différente de leur conversation tendue, si loin des enjeux du début, et Sévastian se perd dans la douceur du moment qu'ils partagent. Il se conforte dans cette tendresse presque fraternelle, s'enthousiasme du sourire qui naît sur les traits d'Eirian, et c'est avec une fluidité renouvelée qu'il enchaîne les mots et les sujets.

Les taquineries de son interlocuteur lui mettent du baume au coeur. Paradoxalement, Sévastian se sent plus proche de lui maintenant qu'avant cet instant, comme si brusquement les pièces de puzzle éparses qu'il tentait d'aligner s'étaient assemblées, qu'elles avaient achevé de former un petit pont - un pont encore fragile et branlant et bancal - entre lui et Eirian. Comme si tous les non-dits avaient désormais un sens, comme s'ils avaient crevé un abcès qui coûtait déjà sans qu'ils ne le sachent au lien qu'ils tentaient de former. Mais peut-être que l'utilisation du pluriel dans sa phrase est une méprise. Le barman n'est pas certain qu'Eirian cherchait réellement à s'ouvrir, avant, est même persuadé qu'il n'avait entrebâillé sa porte que sous la contrainte d'une compréhension mutuelle. Et peut-être que son statut perçu de moldu était une entrave de plus aux pas qu'il faisait vers lui à l'époque, peut-être que cet apparent manque de magie était alors un boulet qu'il traînait maladroitement derrière lui tandis qu'il tentait de rattraper le garçon. Ca a du sens, maintenant. Ca a du sens et il comprend, même si c'est un peu douloureux, cette crainte viscérale de se révéler et d'être rejeté, repoussé, exposé... Tué. Tué, dans le pire des cas. S'il en croit les réactions parfois extrêmes de son compagnon, il a dû être exposé à cette menace trop jeune, trop tôt. Y penser lui serre le cœur.

Lorsqu'il prononce le mot ami, ses yeux cherchent discrètement ceux de son cadet. Il craint sa réaction, craint surtout d'être allé trop loin, d'avoir posé le pied hors des limites bien verrouillées du garçon. Un instant, une seconde, il se fige. Mais Eirian sourit toujours, et la réaction spontanée qu'il lui offre fait enfler une vague de chaleur dans sa poitrine.

— Justement, les amis, c’est là pour dire la réalité des choses, non ?

Amis. Il a utilisé le mot, songe-t-il. Il l'a utilisé sans sourciller, et c'est une confirmation de tout ce qu'il avait compris, et c'est la concrétisation d'un soulagement qu'il n'osait espérer. Sévastian sourit, d'un grand sourire ravi dont il ne parvient pas à tamiser la lumière. Un bonheur tranquille envahit sa poitrine, comme un soleil étreignant ses côtes.

— Dire la réalité et insulter, c'est différent !

Mais sa phrase est inutile à l'aube de la réplique d'Eirian :

— C’est Pokémon, pas Polemone.

Et si ce n'est pas la parfaite synthèse de comment se faire passer pour un abruti fini, le barman ignore quoi faire. Un éclat de rire lui échappe tandis qu'il esquisse un geste de la main.

— Tu vois ? Quand je te dis que je suis grave, Eirian. Je peux littéralement lire le putain de nom tous les jours sur mon téléphone.

Le garçon poursuit et se vante - oui, se vante - de ses talents de maître Pokémon, un talent dont Sévastian craint de ne saisir absolument aucun enjeu. Il rit de nouveau, parce que la situation lui semble surréaliste et puis parce qu'effectivement, son interlocuteur semble posséder bien plus de notions que lui.

— Tu ne peux pas vivre chez les moldus sans connaître au moins Pikachu !
— Oui, je le connais ! C'est le rat/marmotte jaune avec une queue en éclair ? Qui est mignon ?

Cette fois, il est confiant. Il sait qu'il a raison. Trop de fois il a vu les peluches démesurées défiler dans les bras de parents tour à tour fiers et déroutés, et il a bien analysé le nom de cette créature dont plusieurs générations de moldus semblaient amourachés.

Ils restent ainsi un moment, à échanger quelques mots, à profiter du silence, et le temps défile avec une tranquillité nouvelle dans cet espace qui n'appartient qu'à eux. Peut-être qu'il n'ira pas au bar, finalement. Peut-être qu'il rentrera et mettra un peu d'ordre dans son appartement. Ses pensées s'égarent et il songe brusquement qu'Eirian doit avoir un couvre-feu à l'école. Il se redresse soudain, ouvre la bouche tandis que son cadet le devance:

— Il va falloir que j’y aille.

Sévastian hoche la tête.

— Poudlard, hm ? Aucun souci.

Un sourire tendre bourgeonne sur ses lèvres, et il lui esquisse un clin d'oeil. Il espère que son cadet est aussi confiant que lui sur ce départ, conscient qu'il a désormais un allié de plus à Londres plutôt qu'un ennemi ou qu'un danger.

— A bientôt, little guy.

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