Alors que la devanture du bar se dévoilait lentement aux yeux d’Erin, celle-ci se demandait si ce qu’elle faisait était réellement une bonne idée. La voix de la raison lui murmurait que non, qu’elle ne savait pas dans quoi elle s’engageait et que rien de bon ne pourrait en ressortir. Mais autre chose la poussait vers cet endroit sans qu’elle ne puisse réellement en comprendre les raisons. Les doutes, le besoin de réponses, l’instinct… Peu importait au fond. Tout ce qu’elle savait c’était que depuis qu’elle avait appris l’existence de ce lieu, elle n’avait plus qu’une idée en tête : s’y rendre. Depuis quelques temps, de telles convictions étaient rares pour elle alors elle se disait que ça devait être un signe. Si ça lui semblait si instinctif c’était qu’il devait y avoir une raison. La vérité, celle qu’elle ne voulait pas regarder en face, c’était qu’elle ne voyait pas d’autre alternative et que ce flou dans lequel elle vivait depuis plusieurs semaines menaçait de la rendre folle. Cela faisait trois semaines déjà qu’une simple soirée étudiante s’était transformée en cauchemar. Il y avait eu de la musique et de l’alcool, les bras de Balthazar, de la danse, un feu de joie et puis la morsure. Quand Erin s’était réveillée plusieurs heures plus tard ça avait été pour apprendre que sa vie ne serait plus jamais la même. Ses souvenirs étaient flous et la fièvre les rendait trompeur mais elle savait ce qu’elle avait vu, ce visage d’homme aux traits presque animal, ces yeux fauves qui brillaient d’un éclat mauvais et cette bouche pleine de crocs qui n’auraient pas dû se trouver là. Erin était une sorcière, elle en avait vu des choses inexplicables et des créatures magiques, mais jamais elle n’aurait pensé un jour devoir faire face à ça. Et encore moins en être la victime.

Si le réveil avait été difficile, les jours suivants avaient été pire encore. C’était Evan qui l’avait sorti de là et l’avait fait transplaner jusqu’à un médicomage qui avait pu l’aider. La blonde n’avait pas tout compris. De ce qu’il lui avait dit, il l’avait suivi quand elle s’était éloignée, son verre à la main, il se trouvait à quelques pas seulement lorsque l’attaque avait eu lieu, un sort avait fait reculer l’attaquant et sans réfléchir d’avantage il s’était saisi de la main de sa sœur pour l’emmener loin. L’homme -ou la bête ?- avait apparemment choisi de fuir puisqu’aucune autre victime n’avait été à déplorer. Ca avait été une bien mince consolation pour Erin. Les vies de ses camarades avaient été épargnées, mais il lui semblait que la sienne avait tout simplement voler en éclat. Même le médicomage n’avait pu lui apporter beaucoup de réponses, seulement que son attaquant était vraisemblablement un loup garou vu la morsure qui lui défigurait les cotes. Le problème c’était que la fête étudiante n’avait pas eu lieu un soir de pleine lune, ce détail changeait absolument tout. Erin n’avait pas été mordue par un loup-garou entièrement transformé, mais plutôt un sorcier qui forçait une sorte de transformation en dehors de la pleine lune. Un monstre parmi les monstres. Le médicomage avait été sûr de lui, la française n’allait pas se changer en louve une fois l’astre plein. En revanche il ne pouvait rien lui dire de plus, les effets de la lune sur son organisme et ses émotions, c’était une plongée dans l’inconnu. Ca terrifiait Erin pour pleins de raisons, mais en partie parce que des réponses, elle ne pourrait pas en obtenir d’un médicomage lambda. Pour cela, elle allait devoir se tourner vers une personne capable d’infliger une telle morsure. Un loup garou.

Dans un premier temps elle avait totalement rejeté cette idée. Elle venait de se faire mordre par un loup garou enragé, elle n’avait aucune envie d’en côtoyer d’autres volontairement. Elle devait l’avouer, il n’y avait pas que l’idée que sa vie avait été foutue en l’air par un de ces sorciers maudits qui entrait en compte, elle avait été aussi traumatisée par ce qu’elle avait vécu. La terreur qui l’avait étreint, l’idée que sa vie allait se terminer dans cette forêt, la violence de l’attaque et la douleur qui la suivait encore aujourd’hui. Rien ne s’était effacé de sa mémoire et quand elle fermait les yeux le soir c’était ces instants qu’elle vivait encore et encore. Sauf qu’Erin avait vite compris qu’elle n’avait pas le choix. Elle ignorait si un autre sorcier s’était déjà trouvé dans la même situation qu’elle, et si ça avait été le cas elle n’avait jamais entendu parler du moindre témoignage susceptible de l’aider. Alors elle avait dû se résigner, s’il y avait quelqu’un capable de répondre à ses questions, c’était bien un loup garou. Elle avait laissé cette idée s’imposer à elle pendant toute sa convalescence, quand elle ne se sentait pas partir à cause de la fièvre ou qu’elle ne songeait pas à Balthazar c’était à ça qu’elle pensait, parce qu’à ses yeux c’était son seul moyen de s’assurer un avenir aussi normal que possible. C’était ironique, sa vie avait volé en éclat à cause d’un loup garou et désormais elle songeait à se tourner vers l’un d’entre eux pour trouver de l’aide. Certains diraient que c’était le destin, mais elle n’était pas vraiment sûre d’apprécier ce coup du karma. Surtout qu’elle s’en rendait bien compte, il n’y avait pas d’autre choix qui s’offraient à elle.

Cela faisait désormais plus de trois semaines que l’attaque avait eu lieu. Erin s’était remis, même si elle gardait encore des traces physiques et mentale, et elle avait même commencé à tenter de reprendre le cours de sa vie en passant une journée en compagnie de Balthazar à Liverpool. Ca aurait presque pu être un succès si elle n’avait pas sentit ses émotions s’exacerber peu à peu au fur et à mesure de l’approche de la pleine lune. Chaque jour qui passait, elle se sentait un peu plus sur les nerfs et irritables. Elle avait des accès de colère qui ne lui ressemblaient pas et qui l’inquiétaient franchement. La française s’en doutait, tout ceci n’était pas dû au hasard, c’était en lien avec la morsure. Et ça lui faisait peur parce qu’elle ne pouvait absolument rien y faire. Chaque nuit, la lune se faisait un peu plus ronde et ses angoisses montaient d’un cran. Dans quelques jours à peine, elle serait pleine pour la première fois depuis que la blonde s’était fait mordre. Erin avait donc pris sa décision, elle devait trouver des réponses avant que la pleine lune n’arrive, elle voulait savoir à quoi s’attendre et ce qu’elle pouvait faire pour apaiser ses émotions qui la torturaient. Quelques jours plus tôt, Evan lui avait transmis le nom d’un bar de Londres où apparemment des loup garous se rassemblaient. Erin avait hésité, mais face au temps qui pressait elle avait pris la décision de s’y rendre. Bien sûr son frère avait voulu l’accompagner mais elle avait refusé, ce qui n’avait pas manqué de faire éclater une dispute entre eux. Encore un effet secondaire de la pleine lune qui approchait, en temps normal Erin n’aurait jamais laissé la situation s’envenimer au point de se disputer avec son frère. Mais il était trop tard désormais, et sa décision était prise. Renoncer n’était plus une option, elle avait besoin de réponses.

Sauf que tout ça, Erin se rendait compte que c’était bien plus facile à dire qu’à faire. Entrer seule dans un bar plein de loup garou alors qu’elle avait été attaquée par un d’entre eux moins d’un mois auparavant n’était pas si simple qu’elle avait bien voulu se le faire croire. Et si son agresseur se trouvait parmi eux ? Cette question emplissait la française d’une angoisse sourde qu’elle ne parvenait pas à calmer. Alors au lieu d’entrer directement dans le bar pour parler avec le propriétaire des lieux comme elle l’avait escompté, Erin se retrouvait à trainer dans la rue où se trouvait le commerce. Les yeux fixés sur la devanture, elle hésitait et changeait d’avis toutes les deux minutes. Tantôt décidée à faire ce qu’il fallait, tantôt complètement désespérée. Pour la première fois depuis bien longtemps, la Delacour se sentait complètement paumée. Elle n’avait aucune idée de si c’était la chose à faire ou si elle allait faire une grosse erreur. C’était sûrement pour ça qu’elle hésitait autant. Habituellement, toutes ses décisions étaient murement réfléchies et pesées, elle se renseignait avant de faire quoi que ce soit, mais là c’était impossible, elle ne pouvait que se fier à son instinct. Or, celui-ci était complètement perdu. Alors elle restait là, à quelques pas de la porte du bar à hésiter comme si elle jouait sa vie -et c’était peut-être le cas. La française se sentait un peu ridicule à tergiverser autant alors elle fini par prendre une inspiration et avancer la main vers la poignée de la porte. Sauf que quand des éclats de voix lui parvinrent à travers le bois -était-ce normal qu’elle puisse les entendre ?- tout le courage qu’elle avait rassemblé l’abandonna. Une nouvelle fois elle renonça et laissa retomber sa main le long de son corps.

Erin se retourna pour s’éloigner du bar, peut-être se sentirait plus forte un peu plus tard, mais une main s’accrocha à son bras et l’empêcha de bouger. « Pas si vite ! » La voix tonna dans le silence de la rue, la faisant sursauter. Le cœur battant à tout rompre, Erin se retourna pour se retrouver face à un sorcier brun inconnu dont les yeux sombres la toisaient avec méfiance. Elle voulu reculer, le faire lâcher son bras mais sa poigne était trop forte. « Lâchez-moi ! » Sa plainte fut royalement ignorée, en fait la main se resserra même sur sa peau, lui arrachant une grimace de douleur. La française sentit la crainte lui envahir les veines. Mais qu’est-ce qu’il se passait au juste ? Elle n’avait rien à se reprocher. Mais clairement, le regard de l’homme portait un tout autre discours. Il la toisa avec mépris un instant avant de la trainer jusqu’à l’intérieur du bar. « Regardez ce que j’ai trouvé en train de trainer devant le bar. » Il fit passer brusquement Erin devant lui, manquant de la faire trébucher. Elle sentit tous les regards se poser sur elle et sa respiration se fit plus courte. « Alors on joue les fouines ? On n’aime pas trop ça ici. » Erin déglutit difficilement. Derrière elle, le sorcier -loup garou ?- ne bougeait pas, lui interdisant toute fuite. Quant à ceux qui se trouvaient dans le bar, elle devinait aux regards qu’ils posaient sur elle que ce n’était pas de la sympathie qu’elle leur inspirait. Elle secoua la tête, un peu paniquée. « Non, non ce n’est pas ça, c’est… » Ses faibles protestations moururent dans sa gorge. Au fond c’était un peu ça, elle venait en quête de réponses. Mais elle avait ses raisons, des vraies raisons, il fallait seulement qu’ils acceptent de les écouter.

Maintenant qu'elle se trouvait devant le fait accomplis, Erin ne pouvait s'empêcher de se demander si elle avait pris la bonne décision. Se rendre dans un bar connu pour être un repère de loup garou, moins d'un mois après avoir été mordu par l'un d'entre eux et alors que la pleine lune était affreusement proche, ça lui semblait soudainement terriblement suicidaire. Au fond, elle savait qu’elle n’avait pas réellement d’autre choix, et c’était peut-être ça le pire. Elle avait eu beau tourner son problème dans tous les sens, sa conclusion restait invariablement la même. Elle ne pouvait pas rester ainsi à ignorer ce qui l’attendait, elle avait besoin d’aide, de réponses et de conseils, or les seules personnes capables de lui apporter tout ça étaient celles qui se changeaient en loup une fois la lune pleine. Sauf que si ça semblait assez simple dit comme ça -après tout, il ne s’agissait que d’aller discuter avec quelques sorciers- pour elle ça s’apparentait à une véritable épreuve. Avec la proximité du bar venait les questions. Etait-ce vraiment ce qu'elle voulait, chercher des réponses auprès des congénères de celui qui avait fait voler sa vie en éclats ? Etait-ce auprès de ces sorciers qu’elle souhaitait trouver de l'aide ? D'ailleurs rien ne lui garantissait que quiconque dans ce lieu accepterait de l'aider. Peut être allaient ils se contenter de rire de son sort avant de lui montrer la porte pour la laisser se débrouiller seule. Après tout, elle n'était pas vraiment louve. Elle n'était pas l'une d'entre eux. Elle n’avait aucune garantie que sa démarche soit couronnée de succès. Et puis il y avait une autre question que la Serdaigle ne parvenait pas à s'ôter de la tête : et si celui qui l'avait mordu se trouvait là ? Et s'il se contentait de la regarder venir chercher de l'aide tout en se délectant de savoir qu'il était celui à l'origine de son calvaire ? Cette pensée était insupportable pour Erin.

La française devait l’avouer, elle ne savait rien de l'univers des loup garou, juste ce qu'elle avait pu lire pendant ses études à Beauxbâtons ou au détour d'un rayon de bibliothèque et elle savait que ces informations dépeignaient souvent une image erronée de la réalité. La plupart des ouvrages parlaient des loup garous comme des bêtes sauvage qu’il valait mieux abattre, Erin avait toujours eu du mal à adhérer à cette vision des choses. Ils vivaient dans une société civilisée et les loup garous étaient sous leur forme humaine les trois quarts du temps, ils n’avaient aucune raison d’être des monstres. Mais son attaque par l’un d’entre eux mettait cet optimisme à mal. Peu importe combien elle voulait croire que les loup garous puissent être des sorciers lambdas tout ce qu’il y avait de plus fréquentable, l’un d’entre eux s’en était pris à elle et l’avait marqué à vie, elle ne pourrait plus jamais poser le même regard sur eux. Alors bien sûr qu’une fois arrivée devant le bar elle avait hésité, après ce qu’il lui était arrivé, la blonde avait encore du mal à s’imaginer entrer volontairement dans un repère de loup garous. Et l’attitude de celui qui lui faisait face en cet instant était loin de l’aider à reconstruire l’image qu’elle avait des lycanthropes. Il la prenait pour une fouine venue fourrer son nez dans leurs affaires et maintenant qu’il avait annoncé ça à tout le bar, Erin savait qu’il serait difficile de le contredire. Surtout qu’il n’était pas si loin que ça de la vérité, la seule différence c’était qu’elle n’était pas là poussée par une curiosité malsaine mais parce qu’elle avait réellement -et désespérément- besoin de réponses. Mais comment le leur faire comprendre alors que tous les sorciers -lycans- présents la toisaient déjà avec mépris ? Alors que ses grands yeux s’emplissaient d’appréhension, Erin eut l’impression que rien de ce qu’elle pourrait dire serait assez pour la sortir de ce mauvais pas.

Il y eut un instant de flottement, comme si les sorciers attendaient que l’un d’entre eux prenne la main et donne la marche à suivre pour calquer leur attitude sur la sienne. Erin eut le sentiment vague que ça aurait été le moment parfait pour plaider sa cause et leur prouver qu’elle n’était pas venue là juste pour satisfaire une curiosité mal placée, que sa démarche était justifiée et qu’elle ne faisait rien de mal. Mais les mots ne voulaient pas sortir. Elle se trouvait seule dans un endroit qui regorgeait de loup garous, soudainement, les souvenirs de la nuit de sa morsure étaient plus vifs que jamais. Elle commençait légèrement à se sentir paniquée quand une voix résonna. « Mitch… C’est qu’une gamine qui a dû se planter de bar. C’est pas ici pour prendre un thé ma jolie. » Machinalement, Erin hocha la tête en regardant tour à tour toutes les personnes qui la fixaient. La voix provenait d’un homme assit au bar, lui aussi l’observait mais pas avec le même air de méfiance que les autres. L’accent moqueur dans sa voix n’échappa pas à la Serdaigle mais elle choisi de ne pas y prêter attention, elle préférait passer pour une idiote plutôt que pour une fouineuse. Tant pis pour son égo, il y avait des moments ou la fierté n’était pas une chose très importante, et celui là en faisait partie. « C’est ça, c’est juste une erreur. Pardon… » Acquiesça-t-elle sans se faire prier. Une partie d’elle s’en voulait de se montrer si lâche, mais une autre songeait que c’était certainement la meilleure chose à faire. Cette visite l’avait emplie d’appréhension dès le début et elle ne voulait pas risquer de déclencher la colère de ces sorciers par mégarde. Voilà, c’était peut-être mieux ainsi. Erin savait que c’était un affreux mensonge, mais peut-être qu’elle parviendrait à gérer seule finalement. Peut-être que si elle se le répétait assez, elle finirait par y croire.

Presque soulagée de voir sa visite se terminer aussi abruptement, la Serdaigle se retourna pour quitter les lieux, priant Merlin que le sorcier qui lui barrait la voie la laisse passer sans faire plus d’histoire. « Attends deux secondes. » La respiration se la blonde se bloqua dans sa gorge alors que l’homme qui lui faisait face réagit aussitôt. Sa main vint de nouveau enserrer son bras et il la força à faire volte-face sans la lâcher. Comme si elle pouvait aller où que soit, entourée comme elle était. Gorge nouée, elle regarda le sorcier qui avait parlé s’approcher d’elle. Vu comment les autres réagissaient à ses paroles, il s’agissait peut-être de leur chef, ou du moins de quelqu’un qui avait de l’autorité sur eux. Elle n’avait plus qu’à prier qu’il décide de se montrer clément envers elle. « Qu’est-ce que tu es toi ? » De surprise, Erin ouvrit de grands yeux. En un instant, elle put sentir l’atmosphère de la pièce changer, le mélange de mépris et de méfiance qui y régnait se transforma pour ne laisser que des mines intriguées. Dorénavant ce n’était plus elle la curieuse, mais les autres. Elle, elle avait pris la place de monstre de foire, ce qui ne changeait pas beaucoup de la manière dont elle se sentait depuis sa morsure. « Quoi ? » Souffla-t-elle d’une voix faible. Ce n’était pas qu’elle était trop idiote pour comprendre la question ou que son cœur battait trop fort pour lui permettre de bien entendre, mais elle était complètement prise au dépourvue. Cette interrogation, elle ne sortait pas de nulle part. Etait-il possible que ce sorcier ait sentit qu’elle avait quelque chose de différent ? Comment avait-il fait ? Ses cicatrices étaient bien camouflées sous son t-shirt, personne ne pouvait deviner leur existence. Elle ne comprenait pas, et vu les airs un peu paumés des autres sorciers elle ne semblait pas être la seule dans ce cas. Ce qui sembla surtout agacer celui qui parlait.

« Je sais que le tue-loup vous abruti ce mois-ci, mais concentrez-vous un peu bordel. » Erin retint son souffle alors que les regards se transformaient de nouveau. Elle observa les sorciers qui l’entouraient se concentrer et humer l’air. Elle fronça les sourcils mais ne dit rien, consciente que son sort se jouait certainement en cet instant. Finalement, la main du dénommé Mitch la lâcha, ce fut toutefois un geste sans douceur, si elle n’avait plus l’air d’être considérée comme une indésirable, la française n’était pas non plus entrée dans leurs bonnes grâces pour autant. Erin fit un pas en avant pour s’éloigner de lui mais s’arrêta en réalisant que ça la rapprochait des autres. Jamais le sentiment d’être prise au piège n’avait été aussi fort, être la cible de tous ces regards sceptiques la rendait nerveuse. Par Merlin dans quoi s’était-elle engagée ? « T’as été mordue par un loup à moitié crevé ou quoi ? » La formule provoqua un mouvement de recul chez Erin. Elle n’était pas vraiment habituée à un langage aussi grossier, surtout lorsque cela la concernait directement. C’était la première fois que quelqu’un -en dehors de son frère et du médicomage qui l’avait aidé- lui parlait de sa morsure et le choix de mots du sorcier ne fit que lui rappeler qu’elle était un monstre désormais. Plus sorcière, pas louve non plus. A peine humaine au final. Il lui fallu quelques secondes pour accuser le coup et être capable de relever ses prunelles bleutées vers celui qui semblait diriger le groupe. « Je… Je ne sais pas. » Souffla-t-elle finalement. Elle se sentit stupide -ce qui était un comble pour une fière Serdaigle- mais c’était certainement la réponse la plus sincère qu’elle pouvait lui donner. Tout avait été vite cette nuit là, et depuis elle était dans le flou le plus total. Elle avait été mordue, les traces sur ses cotes étaient là pour en attester. Il avait certainement s’agit d’un loup garou. Mais ces certitudes s’arrêtaient là. Parce que ce soir là, la lune n’était pas pleine et ce qu’elle avait eu en face d’elle, n’avait pas été un véritable loup. Plus une bête entre l’homme et le loup, elle n’en n’était même pas sûre, tout était embrouillé dans sa tête et l’approche de la pleine lune n’était pas pour l’aider à y voir plus clair. « C’est pour ça que je suis ici, je cherche des réponses. » Osa-t-elle ajouter. Avec tous ces regards sur elle et le silence qui régnait dans le bar, Erin ressentait le besoin de se justifier. De montrer qu’elle n’avait pas été là juste pour fouiner, elle ne connaissait rien des personnes qui se trouvaient là mais elle se doutait que leur avis la concernant serait déterminant pour la suite. Elle jeta un coup d’œil autour d’elle avant de revenir sur celui qui lui faisait face. « Comment savez-vous que j’ai été… » Mordue. Le mot ne voulu pas sortir de sa gorge. C’était une réalité à laquelle elle avait encore du mal à se faire, mais clairement ceux qui l’entouraient n’avaient pas l’air d’avoir autant de scrupules, alors autant essayer de comprendre.

A la première occasion, Erin avait tenté de fuir le bar. C’était un comportement plutôt lâche, elle en était consciente, surtout qu’elle n’était pas venue là sans raison, mais elle s’en fichait. En cet instant, sa fierté n’était pas sa priorité. De toute façon elle n’avait jamais prétendue être une sorcière courageuse, elle n’était pas une de ces Gryffondors qui courraient au devant du danger et qui n’avaient peur de rien. Ce n’était pas pour rien que le Choixpeau l’avait réparti chez les Serdaigles. Elle était une intellectuelle et ça lui avait toujours convenu, les risques inconsidérés elle les laissait aux autres. La française ne prenait pas plaisir à tenter de repousser ses limites, cet endroit l’emplissait d’une vive crainte et elle avait beau se dire que cette visite était nécessaire, que c’était peut-être le seul lieu où elle pourrait trouver des réponses à ses questions sans être jugée et cataloguée, elle ne parvenait pas à la faire taire. La peur lui serrait le ventre et faisait bourdonner ses oreilles et elle n’était pas assez courageuse pour passer au dessus. Erin se trouvait dans un bar rempli de loup garous, et même si elle s’était rendue là de son propre chef -enfin plus ou moins- cette idée continuait de la terrifier. Elle se trouvait entourée de loup garous alors que l’un de leur congénère l’avait attaqué moins d’un mois auparavant. Pour ce qu’elle en savait celui qui s’en était pris à elle était peut-être même présent dans la pièce, à se délecter de sa détresse et de la peur qu’il lui causait. Bien sûr qu’elle avait tenté de fuir dès que l’occasion s’était présentée, comment l’en blâmer ? Elle cherchait des réponses, pas faire face à ses plus grandes craintes, elle n’avait rien à y gagner, à part des cauchemars en plus. Se sortir de là était certainement la chose la plus sage à faire.

Sauf qu’elle n’y parvint pas. Erin avait à peine fait un pas vers la porte que celui qui semblait être une figure d’autorité la rappela, poussant le dénommé Mitch à l’attraper de nouveau par le bras pour l’empêcher de partir. La peur afflua aussitôt dans les veines de la Serdaigle et les paroles du brun ne firent que la déstabiliser davantage. Qu’est-ce qu’elle était. Elle aussi elle aurait aimé le savoir. Apparemment elle n’était pas la seule puisque le sorcier qui lui enserrait le bras fini par la lâcher. Cependant aucun soulagement ne vint accompagner cette nouvelle semi-liberté. Elle se trouvait toujours face à plusieurs loup garous qui l’observaient avec un mélange de curiosité et d’avidité qui la mettait mal à l’aise. Quant aux paroles de leur chef, elles étaient loin de l’aider, même en passant outre la vulgarité des mots qu’il employait. Comment est-ce qu’il pouvait savoir qu’elle était différente ? Ca ne se voyait pas. C’était impossible qu’il le sache. Et pourtant il parlait de morsure sans la moindre hésitation. « Que tu as été mordue par un loup-garou à moitié crevé ? » Erin grimaça en entendant de nouveau cette formulation. Si elle avait été mordue par un loup garou à moitié crevé, soit un loup qui n’en méritait même pas le nom, alors qu’est-ce que ça faisait d’elle ? La Serdaigle connaissait la réponse à cette question et elle était difficile à entendre. « Je l’ai senti. » La française fronça les sourcils. Aussitôt une foule de questions se pressa dans l’esprit de la française. Est-ce que d’autres personnes pouvaient le sentir ? Comment avait-il pu sentir ça ? Ca n’aurait pas dû être possible. Sauf que pour lui ça semblait une évidence. Parce que qu’il était un loup garou, bien sûr. Il y avait tant de choses qu’elle ignorait. Ca lui rappela que toutes les personnes qui l’entouraient n’étaient autre que des loup garou et elle sentit l’angoisse remonter en flèche.

Le regard du sorcier se ficha dans le sien et elle fit de son mieux pour le soutenir sans sourciller. Elle devait combattre son instinct qui lui soufflait de sortir de là au plus vite, surtout maintenant qu’un dialogue semblait s’être ouvert. « Qu’est-ce que tu veux savoir ? » Erin hésita. Elle regarda le sorcier faire signe aux autres de s’éloigner et ne fut pas surprise de les voir obéir sans protester. Clairement celui qui lui faisait face représentait l’autorité ici. Un peu bêtement, elle suivi du regard celui qui l’avait trainé à l’intérieur avant de revenir au brun. « Tout. » Souffla-t-elle avant d’avoir eu le temps de véritablement y réfléchir. Pourtant les questions se pressaient contre ses lèvres. Qu’est-ce qui lui était arrivé ? Comment ça avait pu lui arriver ? Qu’est-ce qu’il allait se passer maintenant ? Il y avait tant de choses qu’elle ignorait et dont elle avait peur d’apprendre les réponses. Elle n’eut cependant pas le temps de formuler quoi que ce soit d’autre que le sorcier tirait une chaise pour l’inviter à s’assoir. Elle s’exécuta en se demandant si elle devait se sentir reconnaissante de voir ses questions acceptées ou craintive de toute cette situation. Sûrement les deux, de toute manière elle ne pouvait pas s’en empêcher. « T’as été mordue quand ? Tout ce que je peux te dire, c’est que tu sens le loup-garou, mais c’est très léger. Comme si la salive du loup qui t’a fait ça n’était pas assez puissante pour te transformer. » Erin se sentit pâlir. Elle sentait le loup garou. Par Merlin, rien que cette idée lui donnait le tournis. Elle savait que quelque chose avait changé en elle, que la morsure n’avait pas été sans conséquences, le médicomage le lui avait dit mais là elle en avait la confirmation. Et pas par n’importe qui, par la personne la mieux placée pour savoir ce dont elle parlait, un loup garou. « Tu ne te transformeras probablement pas si c’est ta crainte. » Sa respiration se bloqua un instant dans sa gorge, si bien qu’elle du faire un effort pour prendre une inspiration sifflante. Elle passa une main tremblante sur son visage et prit quelques secondes pour bien assimiler les paroles du sorcier. « Merci Merlin… » Souffla-t-elle à mi-voix. Elle se força à relever ses prunelles vers le sorcier. « Le médicomage qui s’est occupé de moi m’a dit la même chose, mais il n’était pas sûr de lui alors… » Alors elle-même n’avait pu être sûre de rien. En bonne Serdaigle, Erin restait consciente qu’il n’avait pas utilisé le mot « probablement » pour rien, mais il était lui-même un loup garou alors elle voulait croire qu’il était plus avisé sur la question. Elle avait besoin de se raccrocher à ça.

« Tu veux quelque chose ? Un café pour moi. » Erin réalisa qu’une serveuse se trouvait désormais à leurs côtés. Avec tout ça, elle en avait presque oublié qu’elle se trouvait dans un bar. Elle s’empêcha de se demander si elle aussi se changeait en louve à la pleine lune. Elle pouvait certainement considérer que c’était le cas de tout le monde ici. « Juste de l'eau, merci. » Lança-t-elle en adressant un faible sourire à la jeune femme qui s’éloigna avec un hochement de tête. Elle était déjà bien assez sur les nerfs comme ça, pas besoin d’y ajouter de la caféine. D’ailleurs de ce qu’elle voyait, elle semblait d’être la seule à ressentir ça dans le bar. Tous les loup garous présents avaient l’air d’être parfaitement maitres de leurs émotions. C’était parfaitement injuste, elle n’était même pas louve mais elle était la seule à se battre contre ses émotions à fleur de peau. « Tu t’appelles comment ? » Erin s’extirpa de ses pensées pour poser ses prunelles bleutées sur le sorcier. « Kesabel Greyback. » Greyback. Ce nom lui disait quelque chose. Elle avait l’impression qu’elle l’avait déjà lu quelque part, sûrement dans un de ces livres d’histoire qu’elle avait parcourus avant de venir rejoindre Balthazar à Poudlard. Un Greyback avait joué un rôle pendant la guerre contre Voldemort non ? Dommage, elle n’arrivait plus à se souvenir de tous les détails. Mentalement, elle nota de faire quelques recherches une fois qu’elle serait de retour à l’université. Si ce nom avait été lié à la guerre, elle voulait savoir à qui elle avait à faire ah si elle savait. « Erin Delacour. » Répondit-elle en tentant un nouveau sourire aussi peu assuré que le précédent. Habituellement elle aurait enchainé avec un enchantée ou ravie de vous rencontrer, ses parents lui avaient bien appris, ses manières étaient impeccables, mais cette fois ça aurait été un mensonge. Ce n'était pas vrai, elle n'était ni ravie, ni enchantée, en fait elle aurait tout donné pour ne pas se trouver dans ce bar, face à ce sorcier, elle aurait tout fait pour que rien ne l'ait poussé à en franchir le seuil. Alors elle choisit de garder le silence, ça lui semblait préférable à l'hypocrisie. Et puis ce Greyback n’avait pas l’air particulièrement attaché à la politesse. Elle était ici pour chercher des réponses, pas parce que cette visite l'emplissait de joie, c'était même tout l'inverse, l'appréhension lui serrait toujours la gorge, mais à choisir, l'ignorance était encore pire.

D’ailleurs avec tout ça, Erin n’avait pas encore répondu à ses questions. Si elle voulait obtenir des réponses, il allait falloir qu’elle commence par donner quelques informations sur les raisons de sa venue. Il en avait deviné, non sentit le plus important, mais elle devait tout de même éclaircir le reste. Elle prit une profonde inspiration et posa ses mains à plat sur la table pour s’empêcher de se triturer les doigts dans un tic nerveux. Elle se lança « Ca s’est passé le premier week end de juillet, le 4. J’étais à une fête à l’orée de la forêt de Pré-au-Lard, je me suis éloignée et… » Par Merlin, c’était aussi difficile qu’elle ne l’avait craint. « Et on m’a attaqué. » Le mot mordu ne voulait toujours pas franchir ses lèvres. De toute façon il était inutile qu’elle le dise, Kesabel l’avait déjà deviné, pas la peine qu’elle se torture avec ça. La blonde pinça les lèvres et prit une nouvelle inspiration pour repousser les souvenirs qui l’assaillaient. La musique de la fête, les danses avec Balthazar, la fraicheur de la forêt, l’éclat sauvage dans les yeux de celui qui l’avait attaquée… Tout lui revenait avec une clarté effrayante. Elle se força à continuer, parce que c’était nécessaire. « Ce n’était pas un homme, mais pas totalement un loup garou non plus… Il était si fort et terriblement grand. Tout est allé tellement vite, je n’ai rien pu faire. Tout ce que je sais c’est que ce n’était pas la pleine lune. » C’était sa seule certitude, la lune n’était pas ronde ce soir là et ça lui avait donné un faux sentiment de sécurité. Elle n’avait pas songé à ce qui l’attendait dans la forêt. « Ca n’aurait pas dû arriver. » Elle se souvenait vaguement d’un homme très grand aux traits sauvages et pas totalement humain. Il avait des mains aux griffes acérées et un grondement menaçant s’échappait de sa poitrine. Tout le reste était flou. Même Evan qui avait réussi à sortir de là par miracle n’avait rien pu voir de plus. C’était ça le pire, elle était dans le flou, ce qui était certainement la pire chose possible pour une Serdaigle. Erin n'avait rien à se raccrocher, à part à ce que pouvaient lui dire les sorciers de ce bar. « Je me suis dit que quelqu'un ici en saurait peut-être un peu plus sur ce qu'il m'arrive et pourrait m'aider. » Reprit-elle en jetant un coup d’œil autour d’eux. Les sorciers avaient repris leurs occupations mais elle voyait bien que certains continuaient de lui jeter des regards en coin. Sa présence serait l’attraction de la journée, à n’en pas douter. « Est-ce que c'est le cas ? » Demanda-t-elle en croisant le regard du Greyback. Ils étaient son seul espoir, ce qui était parfaitement ironique étant donné que c’était l’un d’entre eux qui avait fichu sa vie en l’air.

Ce n’était pas dans les habitudes d’Erin de rester dans l’ignorance. Encore moins quand elle savait que les réponses à ses questions étaient à portée de main. Elle le reconnaissait sans ciller, lorsque le choixpeau magique avait été posé sur sa chevelure blonde, il avait lu clairement et entièrement en elle. Il n’avait pas fallu plus d’une seconde à l’accessoire enchanté pour déclamer qu’elle avait sa place parmi les Serdaigles. Si tous les sorciers de Grande Bretagne s’entendaient à dire que le Choixpeau ne se trompait jamais, Erin devait bien admettre qu’ils avaient raison. Sa maison d’adoption lui convenait à la perfection. Les Serdaigles étaient des érudits avides de connaissances et la française ne prétendait pas le contraire : ça lui correspondait parfaitement. Inutile de faire semblant, de toute façon elle n’en avait aucune honte, passer son temps le nez dans des bouquins, ça lui plaisait énormément, apprendre, elle adorait ça, elle n’en n’avait jamais assez. Rares étaient les sujets sur lesquels Erin faisait l’impasse, même si depuis qu’elle était entrée en droit magique elle avait bien dû concentrer ces heures d’études sur cette thématique là. Il y avait cependant un sujet sur lequel elle ne s’était jamais imaginée travaillé avec autant d’ardeur : celui des loup garous. Ce n’était pas que ça ne l’intéressait pas, c’était simplement que c’était éloigné de ses études et qu’il y avait tellement d’autres sujets qui la passionnaient. De fait, la blonde se retrouvait avec des connaissances limitées sur cette question, essentiellement des souvenirs de ses cours à Beauxbâtons, et encore. Elle n’avait jamais cherché à combler ce vide, elle n’en n’avait jamais vu l’intérêt. Jusqu’à maintenant. Parce que maintenant elle se rendait bien compte de ses lacunes et de combien elles étaient importantes, et surtout handicapantes. Maintenant qu’elle était confrontée à cette morsure, Erin n’avait pas d’autres choix que de sortir de l’ignorance.

Elle l’avait rapidement compris, sa situation était différente de celle des loup garous, elle n’avait pas été mordue pendant la pleine lune et l’homme qui l’avait attaqué n’était pas changé en loup, du moins pas entièrement. Les réponses dont elle avait besoin, elle ne les trouverait pas dans des livres, elle avait tenté, elle avait cherché, mais elle avait fait chou blanc. Ses réponses, ce serait auprès des principaux concernés qu’elle pourrait les trouver, auprès des véritables loup garous. Et encore, rien n'était sûr, mais elle se devait de tenter le coup, elle ne pouvait pas rester ainsi. Malgré la peur qu’ils lui inspiraient, elle n’avait pas d’autre choix. Même le médicomage qui l’avait soigné s’était retrouvé dépassé par la situation, ce qui ne semblait pas étonner Kesabel outre mesure. « A mon avis, il n’a pas dû souvent rencontrer le cas. Ce n’est pas courant que tu aies ce type de loup-garou hybride. Il ne te rien dit sur ce que tu pourrais ressentir maintenant que tu as été en contact avec un loup ? » Erin prit un instant pour réfléchir et rassembler ses souvenirs. Si elle voulait que ce sorcier l’aide, elle devait lui apporter tous les éléments nécessaires. Ce n’était pas le moment de risquer de passer à côté de quelque chose d’important. Malheureusement, elle eut beau fouiner dans ses souvenirs, elle ne trouva pas grand-chose d’intéressant à ajouter. Etant donné que la morsure qu’elle avait reçue n’avait pas rassembler les critères pour provoquer la lycanthropie, le médicomage avait émis de forts doutes quant à une possible transformation en loup à la pleine lune. Mais c’était à peu près tout ce qu’il avait pu lui dire. « Non, c’était la première fois qu’il voyait ce genre de… Cas. Il m’a juste dit que la pleine lune pourrait avoir une influence sur moi mais sinon, il était aussi perdu que moi. » Confirma-t-elle avec un léger haussement d’épaules. Il fallait dire qu’avant ce fameux soir de juillet elle ignorait que des loup garous étaient capables de provoquer une forme de transformation, et encore moins que leur morsure pouvait créer des loups hybrides. Des connaissances dont elle se serait bien passée, elle garda cependant sa remarque pour elle, quelque chose lui disait que le sorcier qui lui faisait face ne l’apprécierait pas beaucoup.

Assise face à Kesabel, un verre d’eau entre ses mains, Erin commença le récit hésitant des évènements de début juillet. Quand elle mentionna la fête à l’orée de la forêt interdite, du côté de Pré au Lard, la Serdaigle eu le sentiment que le sorcier réprouvait ce choix de lieu. Pourtant les fêtes étaient nombreuses dans ces parages et les problèmes étaient rares, Erin elle-même ne s’était pas trop enfoncée entre les arbres. Elle savait que des créatures dangereuses peuplaient la forêt, elle avait cru être prudente, elle s’était trompée et en payait désormais le prix. « Sauf si tu tombes sur un mec complètement détraqué… » Une grimace amère se glissa un instant sur les lèvres de la française mais elle ne fit aucun commentaire. Ce Kesabel avait raison de la réprimander, elle le méritait. Elle avait été inconsciente alors elle n’avait pas le droit de dire quoi que ce soit. Un mec complètement détraqué, ça avait été bien pire que ça. Elle continua son histoire coute que coute, malgré les souvenirs difficiles que ses mots faisaient remonter. Si elle voulait de l’aide, elle devait être sincère et ne rien oublier, même si ça voulait dire affronter ses démons. Finalement, elle en arriva à la raison de sa présence, elle voulait comprendre, mais pas seulement elle voulait savoir si quelqu’un ici était capable de l’aider d’une manière ou d’une autre. Le seul avantage à être le centre de l’attention de tous les loups présents était que si l’un d’eux en était capable, il se manifesterait sans doute. « Tu te sens différente ? Et c’est pire à mesure que la pleine lune approche ? » Alors ça, Erin n’avait pas besoin de beaucoup réfléchir pour y répondre. Depuis la morsure elle ne se sentait plus elle-même, et c’était loin de s’arranger. Elle ne se reconnaissait plus, et elle devait l’admettre, il avait raison, c’était de pire en pire au fur et à mesure que la lune se faisait pleine dans le ciel. « Oui, c’est exactement ça. Je dors de moins en moins. Je suis sur les nerfs, j’ai l’impression que mes émotions font n’importe quoi, je m’énerve pour rien… J’ai l’impression que ça ne va jamais s’arrêter. » Et s’il ne lui disait pas le contraire, elle n’était pas sûre de pouvoir le supporter.

« La salive de ce loup détraqué t’a contaminée, mais pas sous sa forme la plus aboutie. Tu ne seras jamais une louve, mais tu as quand même hérité de quelques uns de ses sens. Cela se décuple à la pleine lune. Tu peux avoir des envies de viandes, mieux entendre, mieux sentir. Ton instinct se renforce aussi. Tes humeurs peuvent varier à cause de la lune. Plein d’effets qui sont liés à l’animal. C’est plus léger pour toi, mais tu le ressens forcément. » La Serdaigle serra ses doigts sur son verre d’eau. Elle tentait d’assimiler tout ce que Kesabel lui expliquait mais elle avait l’impression que son cerveau était un disque rayé qui avait du mal à tout enregistrer. C’était pourtant ce qu’elle avait demandé : des explications. Mais maintenant qu’elle en obtenait, elle trouvait ça terriblement difficile de les accepter. Tout ce qu’il lui racontait lui démontrait une même et unique chose : elle n’était plus totalement humaine. Il lui parlait de l’animal comme si elle devait désormais partager son corps et son esprit avec une louve. Erin trouvait cette idée particulièrement déstabilisante. Qu’est-ce que ça faisait d’elle ? Une phrase en particulier lui restait en tête. « Décupler mes sens ? » Est-ce qu’il était sérieux ? La bleue sonda les prunelles du sorcier, et clairement il semblait plus sérieux que jamais. En même temps leur sujet de conversation n’avait rien d’une blague. « Je n’avais pas fait attention. » Souffla-t-elle, perturbée par cette idée. Il fallait dire que ses émotions lui donnaient déjà tellement de fil à retordre qu’elle n’avait pas prêté attention au reste. Était-ce réellement possible ? Ses sens décuplés ? Un instinct plus développé ? Des envies de viande ? Tout ça lui donna le vertige. Qu’est-ce qu’il lui restait d’humain ? Machinalement, Erin renifla, comme pour tester cette théorie mais réussit surtout à se sentir stupide. Kesabel avait peut-être -sûrement- raison, mais pour le moment ses émotions sans dessus dessous prenaient toute la place.  

Erin profita de la brève pause qui suivi pour tenter de remettre de l’ordre dans son esprit. C’était elle qui était venue dans ce bar, c’était elle qui avait demandé de l’aide et des explications. Mais maintenant qu’elle obtenait tout ça, elle se rendait compte que s’y confronter n’était pas si évident que ça. Elle se rendait bien compte qu’il y avait quelque chose de différent chez elle depuis la morsure, mais en avoir la preuve était encore différent. Elle avait eu beau tenter de s’y préparer, Erin avait tout de même l’impression qu’elle venait de se prendre une claque. Avoir la confirmation qu’elle était changée à jamais n’était pas facile à entendre. « Tu as des questions en particulier ? » La Serdaigle releva les prunelles de son verre d’eau pour observer le sorcier. Des questions, elle en avait plein. Elle en avait tout le temps. Elle en aurait certainement jusqu’à la fin de sa vie. Pour le moment ces questions la torturaient et elle ignorait si les prononcer à voix haute l’apaiserait. Ou même si les réponses seraient bonnes à entendre. Si elle pourrait les supporter. Erin ne s’était jamais demandé si elle était forte, maintenant elle se posait la question. « Comment vous faites pour supporter ça ? » Demanda-t-elle finalement tout à trac. Elle ne s’était pas vraiment laissée le temps de réfléchir, de toute façon elle n’en n’avait pas besoin. De toutes les questions qui tournaient dans sa tête, celle-ci prenait le plus de place, envahissant la moindre de ses pensées. « Je veux dire… Je ne suis pas… Totalement comme vous, mais j’ai l’impression que mes émotions vont me rendre folle. Alors que vous vous, vous avez l’air d’aller très bien, vous avez l’air en contrôle. » Reprit-elle plus calmement, consciente que sa première question ne voulait pas dire grand-chose. C’était révélateur de ce qu’il se passait dans sa tête, c’était un bazar sans nom dont elle ne parvenait pas à faire grand-chose. « Comment vous faites ? Est-ce qu’il y a une potion que je peux prendre, ou quelque chose que je peux faire ? N’importe quoi. » Elle ne chercha pas à camoufler le ton presque suppliant de sa voix. Erin était désespéré et elle ne pouvait pas le cacher. Il n’y avait que le désespoir pour la pousser à se rendre dans un bar rempli de loup garous alors qu’ils lui inspiraient une terrible crainte.

« Tu saurais le reconnaître celui qui t’a attaqué ? » La française cligna des yeux, un peu déstabilisée par la question. Elle aurait peut-être dû s'y attendre. Elle venait avertir un groupe de loup garous qu'un taré se baladait dans les environs de Pré-au-Lard, elle s'entretenait avec celui qui avait l'air d'être leur chef, c'était normal qu'il veuille en savoir plus. Elle prit un instant pour rassembler ses souvenirs, même si elle n’avait aucune envie de les revivre, ils étaient toujours là, à la surface de son esprit. N’attendant qu’une chose, qu’elle les effleure du bout des doigts pour les faire remonter. Souvent ils profitaient même de son sommeil pour venir la tourmenter. Erin eut une grimace en y repensant. « Tout est allé horriblement vite, et il faisait nuit, mais je pense pouvoir le reconnaitre oui. » Elle hocha la tête. Les souvenirs étaient flous dans sa tête, mais ils étaient bien présents. Elle n’en avait aucune envie, mais elle ne doutait pas de pouvoir reconnaitre le sorcier qui l’avait agressé. Elle avait vu ses yeux fauves, son rictus cruel, tout était gravé dans sa mémoire. La Serdaigle le reconnaitrait entre milles, même sans cette semi-transformation forcée qui lui avait donné un visage sauvage, ça faisait comme une connexion entre eux. Elle détestait ça. Erin prit une gorgée d'eau, une idée s'imposant à elle. « Vous… Vous voulez le retrouver ? » Elle observa le sorcier avec de grands yeux. Ca lui paraissait si logique, et en même temps si terrifiant.

La morsure n’était pas sans conséquences. Même si Erin admettait sans problème qu’elle ne possédait pas beaucoup de connaissances au sujet des loup garous, elle n’était tout de même pas ignorante au point de croire que sa morsure ne changerait rien à son existence. Un loup garou, même à moitié transformé, même en dehors de la pleine lune, ça laissait des traces sur son passage. Erin n’était pas assez naïve pour s’imaginer le contraire. Les cicatrices sur ses cotes n’étaient pas le seul stigmate laissé par la morsure. Elle avait bien senti au fil des jours les effets que l’approche de la pleine lune avaient sur son organisme, le sommeil qui la fuyait, ses émotions qui s’aiguisaient jusqu’à devenir insupportables. Jusqu’à la rendre, elle, insupportable. Mais quelque part, elle s’était tout de même imaginé que ça s’arrêterait là. Parce que c’était déjà bien trop à supporter selon elle et qu’elle doutait de réussir à tenir encore longtemps. Parce que si ça allait plus loin encore alors elle se demandait ce qu’il lui resterait d’humain. Ses émotions faisaient n’importe quoi, elle ne maitrisait plus rien, ce qui était particulièrement difficile pour elle qui avait toujours eu tendance à contrôler le moindre aspect de sa vie. Alors l’idée qu’elle subisse encore de nouvelles conséquences de la morsure lui faisait peur. Que pourrait-elle encore encaisser avant d’imploser ? N’en subissait-elle déjà pas assez ? Au fur et à mesures des explications de Kesabel, Erin sentait le désespoir la gagner chaque seconde un peu plus. Le cauchemar semblait ne jamais s’arrêter. La pleine lune n’aurait pas d’effet que sur ses émotions, mais sur ses sens aussi. « Les odeurs vont te paraître plus fortes. Tu pourras les distinguer plus facilement. Ton ouïe aussi sera plus sensible. Ton instinct prendra parfois le dessus… En fait cela peut être tout ou juste une partie. Je t’avoue que je n’ai jamais eu l’occasion de connaître quelqu’un dans ta situation… » Le monde aurait pu se mettre à tourner autour d’Erin, ça lui aurait fait le même effet. Ses mains crispées sur son verre d’eau, elle tenta de prendre la pleine mesure de ce que lui expliquait le sorcier, mais ça lui semblait impossible. Il lui parlait de ses sens, d’un instinct qui prendrait le dessus « Je n’avais pas pensé à tout ça.  » Souffla-t-elle à mi-voix, complètement dépassée par ce qu’elle apprenait. Erin avait le sentiment dérangeant que ses émotions et ses sens ne lui appartenaient plus et c’était une idée des plus perturbante. Elle tenta maladroitement de renifler pour mettre à l’épreuve la théorie du Greyback, mais sans résultat probant pour le moment. Elle réussit juste à se sentir ridicule et à rougir en voyant le sourire en coin que sa tentative provoqua chez le loup.

Le truc, c’était que rien de tout ça n’était amusant aux yeux de la Serdaigle. Elle était venue dans ce bar chercher des réponses, mais les entendre était aussi difficile qu’elle l’avait craint. A chaque parole de Kesabel, elle se demandait quelle part d’humanité il lui restait exactement et elle craignait qu’à la fin de leur discussion il ne lui en reste plus du tout. De fait, des questions, elle en avait plein et elle doutait que cela cesse un jour. Erin avait du mal à imaginer un futur où elle vivrait en paix avec sa nouvelle condition. Ce n’était pas un choix, ça lui avait été imposé, jamais elle ne s’y ferait. Ce sentiment d’injustice était si fort, si ancré profondément en elle depuis cette nuit de juillet, qu’elle ne comprenait pas que d’autres puissent ne pas le ressentir. Ainsi, lorsqu’elle se laissa aller à poser une question sans réfléchir, elle commit une gaffe. Le regard du Greyback changea aussitôt. « Ce n’est pas un fardeau pour moi. J’en suis fier, bien au contraire. » Erin se figea sur son siège. Soudainement, l’idée qu’elle avait face à elle un loup garou lui revint en pleine figure. La peur l’envahit de nouveau à la pensée de toutes les horreurs qu’il pouvait lui faire subir si elle commettait l’erreur de l’insulter. Baissant les yeux, elle déglutit. « Pardon, je ne voulais pas… » Osa-t-elle murmurer sans pour autant aller au bout de ses paroles. Elle n’avait pas voulu l’insulter, insinuer quoi que ce soit en réalité. Simplement, cette situation lui était tellement insupportable qu’elle ne parvenait pas à imaginer que certains sorciers puissent s’y faire. Voire bien la vivre. Pourtant, elle devait l’admettre, tous les sorciers présents dans le bar, tous les loup garous, avaient l’air en paix avec leur nature différente. Au final, il n’y avait qu’elle qui en souffrait.

« Je suis un loup-garou depuis ma majorité. Je n’avais pas ce contrôle quand j’ai été transformé… » De crainte de commettre un nouvel impair, Erin se contenta de hocher la tête en silence. Depuis sa majorité… La française ignorait quel âge avait le sorcier mais elle pouvait l’estimer à la trentaine passée, ce qui voulait dire qu’il était loup depuis plus de treize ans. Cette idée lui fila un frisson, où en serait-elle dans treize ans ? Serait-elle toujours en train de lutter contre sa condition ou aurait-elle réussi à trouver un équilibre comme ces autres loups ? Il y avait tellement d’incertitudes et si peu d’espoir dans l’esprit de la Serdaigle. « Avec le temps, on sait vivre avec l’animal qui veut sa place aussi. Ici, on apprend depuis notre enfance à le connaître. On ne prend que rarement le tue-loup. Alors il s’exprime les nuits de pleine lune, mais c’est plus facile de le gérer au quotidien. » Prise au dépourvue, Erin cligna des paupières. Habituellement, la meute ne prenait pas de potion tue-loup, cette idée la mettait terriblement mal à l’aise. C’était un loup garou sauvage qui l’avait mordu, et ceux qui lui faisaient face ne prenaient pas toujours une potion pour maitriser la bête en eux. Elle ne savait pas trop si elle devait être impressionnée ou horrifiée. Certainement la deuxième option, mais elle se garda bien de le dire. Jusqu’à présent Kesabel lui avait certes paru un peu rustre mais il avait surtout répondu à ses questions sans sourciller ni la juger, elle n’avait aucune envie de le voir se mettre en colère.

Conserver le silence était bien plus sage et encouragea certainement le sorcier à poursuivre. « Je ne sais pas ce que le tue-loup pourrait te faire… Nous en avons tous pris ce mois-ci et c’est à peine si mon instinct s’éveille… » Nouveau hochement prudent de la tête de la part de la française. Elle ignorait tout des coutumes des loups garous, et plus précisément de cette meute. L’étendue de son ignorance commençait à se voir et elle se disait qu’elle allait devoir y remédier tôt ou tard pour espérer mieux comprendre ce qu’il lui arrivait. « Je veux dire, sur un loup-garou puissant comme moi par exemple, c’est comme un somnifère sur la bête. Mais sur toi… Il est si faible, je ne sais pas si cela te ferait du bien d’ingurgiter une telle potion… » Une légère grimace vint déformer un instant les lèvres d’Erin. Elle s’y attendait un peu mais la déception était tout de même présente. A ses yeux, Greyback était un expert du sujet, alors s’il supposait qu’une potion tue-loup lui ferait plus de mal que de bien, elle le croyait. Il fallait dire que son explication était logique et parlait à son esprit purement Serdaigle. Elle avait été mordue en dehors d’une nuit de pleine lune, elle n’était pas totalement louve, une potion si forte ne pouvait pas être bien reçue par son organisme. « Je n’ai donc pas vraiment de solutions. » Elle soupira doucement, mais prit aussi soin de relever le regard pour adresser un fin sourire au sorcier. C’était ainsi. Elle était venue pour des réponses, en sachant très bien que toutes n’allaient pas lui plaire. C’était le jeu.

Ce qu’Erin n’était pas venue chercher, en revanche, c’était la perspective future de revoir un jour son agresseur. Pourtant, elle aurait dû s’y attendre, maintenant qu’elle avait prévenu Greyback de la présence d’un ennemi dans les parages, il n’était pas étonnant qu’il veuille s’en occuper. Cependant, Erin devait l’avouer, la simple idée de se retrouver un jour face au loup fou qui l’avait mordu l’emplissait de terreur. Une peur qu’elle ne chercha pas à camoufler de ses traits lorsqu’elle demanda a Kesabel s’il avait l’intention de le retrouver. « On ne peut pas laisser ce type dans la nature. Il est dangereux. Qui sait combien de victimes il pourrait faire ? Et puis… j’ai pas envie qu’on accuse ma meute… » Un instant, la Serdaigle joua machinalement avec son verre d’eau. Son raisonnement se tenait, en fait c’était même parfaitement logique d’agir ainsi. Erin aurait pu prévenir la police magique ou le Ministère de la magie, mais quelque chose lui disait que des loup garous seraient plus à même de s’occuper de l’un d’entre eux. Et puis, en se tournant vers le Ministère, elle risquait d’alimenter de nouveau les peurs et préjugés qui existaient sur les loup garous. Elle avait peut-être peur d’eux, mais elle ne les haïssait pas au point de vouloir qu’une chasse au loup se mette en place. « Oui… Oui, bien sûr, je comprends. » Il ne s’agissait pas seulement de protéger la population sorcière, mais aussi la meute présente ici, elle en était bien consciente. Alors, elle prononça les mots qu’elle ne pensait jamais prononcer un jour. « Je pourrai le reconnaitre. Si vous avez besoin. » Erin soutint un instant le regard du sorcier avant de détourner le regard. Retrouver son agresseur la terrifiait au plus profond de son être, mais elle ne pouvait pas rester sans rien faire. Si elle pouvait faire quoi que ce soit -à sa mesure- pour aider la meute, elle devait le faire. Même si elle savait que rien de tout cela ne l’aiderait à retrouver sa vie d’avant. Qu’au contraire, cela risquait plus d’alimenter ses cauchemars.

Doucement, la française repoussa son verre désormais vide. Elle n’avait pas vraiment le sentiment d’avoir obtenu ce qu’elle était venue chercher. Elle avait des réponses, certes, mais elles avaient soulevé de nombreux points d’ombre et ne manqueraient pas de provoquer de nouvelles questions tôt ou tard. Au moins, discuter avec Kesabel lui avait permis d’y voir un peu plus clair et de savoir ce qui l’attendait. Ou du moins de tenter de s’en faire une idée. Au final, seul l’avenir le lui dirait. « Merci d’avoir pris le temps de répondre à mes questions. » Lança-t-elle au sorcier. Elle jeta un regard encore un peu nerveux autour d’elle. Dans le bar, les loup garous s’étaient pour la plupart désintéressés de sa présence, seuls un ou deux semblaient observer l’échange de loin. Elle tenta d’adresser un sourire -un peu crispé- à ceux dont elle croisait les prunelles avant de reporter son attention sur leur chef. A nouveau, elle prononça des mots qu’elle n’avait pas pensé dire. « Si j’en ai d’autres, est-ce que je pourrai revenir ici ? » Revenir ici, encore une chose qu’elle n’aurait pas pensé envisager lorsqu’elle avait mis les pieds dans ce bar, pourtant maintenant ça lui semblait inévitable. Et quand Kesabel lui donna son accord, elle savait que malgré toutes les incertitudes et les craintes, elle reviendrait.