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Les moldus et élèves de Poudlard du forum se sentent cruellement seuls au milieu de tous ces sorciers adultes,
alors pensez à les privilégier pour vos personnages

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Et je prie qu'un jour quelqu'un revienne pour effacer ma peine ✘ Abi :: Three Broomsticks :: Pensine :: Les RPs
Kesabel Greyback
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Dim 27 Mar - 19:59

Abi & Kesabel
⚜ Et je prie qu'un jour quelqu'un revienne pour effacer ma peine ⚜

Rares étaient les fois où tu autorisais les visites dans ton élevage. Tu n’aimais pas spécialement que les gens viennent mettre leur nez dans ta façon de faire. Tu avais tes habitudes et les liens que tu nouais avec tes dragons étaient spécifiques. C’était quelque chose que tu te réservais rien qu’à toi. Personne n’osait t’interrompre, pas même les membres de ta meute. Surtout les membres de ta meute. Tu partageais tout avec eux. Tu passais presque toutes les heures de ta vie à les encadrer, les guider. Alors les instants avec tes reptiles, ils n’étaient qu’à toi et tu ne voulais pas qu’on vienne empiéter dessus. Malgré tout, tu te devais de faire des exceptions. Surtout lorsqu’une de tes dragonnes ne semblait pas se porter au mieux. Tu avais cherché à plusieurs reprises d’où cela pouvait venir, mais tes premiers contrôles n’avaient rien donné de très concluant. Tu l’avais endormi à l’aide d’une option, trouver en vain quelque chose qui pourrait expliquer son état léthargique. Elle n’était pas en surveillance de son oeuf. Pas assez vieille pour être dans une phase de laisser-aller. Pourtant, tu avais une certaine facilité à comprendre ses cerbères ailés… C’était d’ailleurs le cas avec un bon nombre d’animaux, tu l’avais remarqué depuis des années. Tu mettais ça sur le loup qui t’habitait. Tu le laissais souvent exprimer ses impulsions, ses émotions primaires. Elles te guidaient la plupart du temps. Alors cela ne t’aurait pas étonné que cela te donne la possibilité de mieux communiquer avec certaines créatures.


Néanmoins, tu n’arrivais à rien avec elle. Tu avais finalement demandé à Abigail de venir dans ta réserve. Tu avais connu la jeune femme à Poudlard. Une de ces connaissances de l’époque qui s’était éloignée alors que tu avais complètement vrillé. Enfin… Ce n’était pas tout à fait le cas avec l’ancienne Poufsouffle. Elle avait mis une certaine distance, tu l’avais noté, mais avait malgré tout continué d’échanger avec toi. Elle n’avait pas totalement coupé les ponts. Parce que cette passion commune autour de ces gardiens du ciel vous unissait malgré tout. Alors tu lui as ouvert ton jardin secret pour lui montrer la Noir des Hébrides qui est anormalement calme et passive afin d’avoir son avis. Tu possèdes plusieurs hectares de terrain pour le confort de ces animaux. Il arrive même parfois que certains disparaissent durant quelques jours. Ils finissent toujours par revenir. Rien que pour les morceaux énormes de viandes que tu leur prépares. Tu prends la parole alors que tu t’appuies sur la rambarde pour observer la femelle qui vient se coucher lascivement. « Franchement, je sais pas ce qui lui arrive. On dirait qu’elle fait une dépression. » T’es même pas moqueur quand tu dis ça. Tu aurais parlé d’une personne, cela aurait clairement pu être le cas. Mais pas concernant tes dragons. Ils ne simulent pas. Ils sont entiers et vrais. Tu sais qu’il se passe quelque chose sans mettre le doigt dessus et c’est frustrant. « Qu’est-ce que tu en penses ? Je peux l’endormir si tu veux l’approcher. »

Tu ne peux t’empêcher d’observer la jeune femme. Quelle femme elle est devenue. L’Abigaïl du passé que tu as connu plus jeune a changé. Tu l’avais aperçue évoluer à mesure que vous aviez grandi bien sûr. Voyant son caractère devenir différent, se métamorphoser. Jusqu’au point de non-retour entre vous. Balayant d’un revers de la main toute cette complicité qui vous avait un jour liée. Ses idées étaient trop bienveillantes par rapport au chemin que tu suivais. Un chemin sombre empli de colère, de vengeance. De souffrance. Seule la main du fantôme de ta soeur avait tenu la tienne dans ce périple que tu t’étais fixé. Loin de te douter que ton acte poserait plus tard sur tes épaules le rôle d’alpha que tu as à présent au sein de la meute des Greyback. Si cela faisait bien longtemps que tu n’avais pas vu l’enseignante, la recevoir dans ton antre créait un sentiment étrange dans ta carcasse vide. Un souvenir nostalgique de cette jeunesse échue, bercée de ton insouciance. Cette idée que tu étais désinvolte et encore innocent t’aurait presque fait rire. Une image faible de ce que tu pouvais être. Et pourtant tout au fond de ton palpitant résonnait en écho une petite voix vibrante je suis toujours là. Toutefois, tu ne l’écoutais pas. Tu étais devenu un homme fort. Tu avais survécu à Azkaban malgré ta condition lupine dans cette maudite cage.

D’ailleurs, tu repenses aux histoires que tu as entendues récemment sur le compte de la jeune femme. Il paraît qu’elle a perdu son frère dans de terribles circonstances. Tu pourrais t’en foutre dans le fond. C’est pas comme si tu le connaissais ou que tu étais proche d’elle. Mais tu sais ce que ça fait. Toi, c’était ta soeur. Ta chair. « J’ai entendu parler de ce qui t’est arrivé… » Les mots s’échappent de tes lippes. L’ambre de tes yeux s’accroche à ses prunelles. T’es pas du genre à demander si ça va bien aux gens. Parce que dans le fond, cela ne t'intéresse pas. Mais qui mieux que toi peut comprendre ce qu’elle doit ressentir actuellement ? C’est ta façon à toi de faire les choses. De montrer que tu peux écouter si elle en a envie. Même si tu ne l’exprimes pas clairement. T’es pas non plus un type qui se pose pour jouer aux confessions intimes. Pourtant tu ne peux pas faire comme si de rien n’était tandis que la rumeur de l’incident a couru à la vitesse d’une poignée de poudre de cheminette dans votre milieu. Il n’est pas très grand, il faut l’admettre. Alors forcément, quand cela arrive, tout le monde est rapidement au courant.

Tu as toujours eu conscience des risques à être si proches des dragons. D’ailleurs, tu n’es pas totalement indemne de tes rencontres avec eux. Si tu as des cicatrices de loups qui marquent ta chair, il y a aussi des brûlures et des griffes qui viennent de ces êtres aux écailles ardues. Tu es précautionneux, méticuleux, mais cela ne suffit pas toujours. Et les accidents arrivent même aux meilleurs.

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Abigail MacFusty
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Mer 30 Mar - 10:24

Août 2018

Cela faisait déjà plusieurs jours. Peut-être des semaines ? J’en savais rien. Je n’avais plus aucune notion du temps qui défilait, je ne savais plus quel jour on était, je ne voyais plus le soleil se lever ou se coucher. Tout en moi et autour de moi était mort. La vie, le destin, la Verte Galloise m’avaient arraché à la seule et unique personne que j’aimais le plus au monde. La seule et unique personne qui ne m’aurait jamais abandonnée, la seule et unique qui me comprenait en totalité et avec qui je n’avais jamais eu besoin de me justifier.
Mon frère n’était plus, j’avais perdu un guide, un ami, mon phare dans la nuit. Aujourd’hui, plus que jamais, j’étais seule au monde. Je refusais de partager les événements de l’accident avec ma famille et ma petite sœur adoptive pour leur épargner les détails, l’horreur de la situation. Ils savaient l’essentiel : que j’avais fait une terrible faute, que je n’avais pas réussi à protéger mon aîné. Quand bien même ma famille ne m’en tenait pas rigueur (ils avaient reçu les témoignages des autres sorciers présents), la culpabilité restait imposante et gonflait mon cœur jusqu’à l’étouffer.
Je voulais mourir de chagrin, il me semblait que plus rien n’avait d’importance en ce moment. Les larmes avaient tant coulé sur mes joues qu’aujourd’hui, je n’avais plus assez de réserve d’eau pour pouvoir continuer. Mes yeux étaient rouges, mon teint pâle. Je ne dormais presque plus, car mon sommeil était entrecoupé de visions horrifiques. J’étais légèrement amaigrie, car je ne mangeais presque plus, toute la nourriture me semblait insipide sans lui.

Ce qui m’avait extrait de ma léthargie, c’était ma passion pour les dragons. Ils avaient encore besoin de moi comme dragonologiste. Alors, je me levais tous les matins. Je me rendais sur les diverses îles des Hébrides pour étudier les grands sauriens. Je prenais mes notes, j’écrivais mes rapports, je travaillais… machinalement, sans plus d’émotions, sans sentiments, sans m’émerveiller.
C’était donc avec ce même automatisme que j’avais répondu à la demande de Kesabel.
Nous nous étions connus à Poudlard, notre passion commune pour les dragons avait animé une amitié passionnante à l’époque. Je m’étais éloignée de lui lorsqu’il avait commencé à changer suite à un événement dramatique dans sa vie. Ironie du sort puisque, en parallèle, je m’étais battue pour Rory. Peut-être que mes frêles épaules n’avaient pas la place pour supporter deux garçons en détresse ? Malgré tout, la dragonologie avait été plus forte, et nous ne nous étions jamais véritablement perdus de vue. J’en étais vraiment heureuse, car, des amis dans l’univers des dragons, j’en avais que trop peu, car beaucoup trouvaient mes méthodes trop dangereuses et surtout surfaites et idiotes. Je n'avais jamais compris en quoi la douceur pouvait être peu adaptée, et ce, même avec des créatures aussi dangereuses que les dragons. Fort heureusement pour moi, le sorcier qui se trouvait à mes côtés n’avait jamais remis en question mes méthodes ni même ma façon d’agir avec les dragons, ou avec lui…

Aujourd’hui, plus que jamais, je comprenais ce qu’il avait ressenti… et je m’en voulais. Je m’en voulais tellement de ne pas avoir su, à l’époque. De ne pas avoir été à la hauteur pour l’aider et le soutenir comme il en avait besoin. Grand Merlin… toute la culpabilité que je ressentais présentement allait sûrement m’achever. Présentement, je devais faire pâle figure, comparé au souvenir timide que mon interlocuteur devait avoir de moi.
Mais ce n’était pas le moment de m’apitoyer sur mon sort, une dragonne avait besoin de mon aide, et une Noir des Hébrides qui plus est. Je me promenais avec cette race de dragon avant même que je ne sache marcher, ils n’avaient pour ainsi dire aucun secret pour moi. Néanmoins, l’état de ce spécimen était une véritable énigme, si j’en croyais ce que Kesabel m’avait résumé.
Voyant du coin de l’œil qu’il s’appuyait contre la rambarde, moi, les bras croisés sur ma poitrine, je restais droite comme un i, clignant calmement mes paupières entourées du noir de mes cernes. Une dépression hein ? Comme je pouvais la comprendre. Sa proposition pour l’endormir me fit légèrement soupirer. J’étais avant tout spécialisée dans le comportement des dragons. Je voulais donc d’abord observer davantage sa manière de se comporter avant de vérifier son état physique. Qui plus est, je n’avais aucun doute que le sorcier à mes côtés avait déjà fait le nécessaire à ce niveau. D’un léger geste de la tête, je lui répondais d’une voix teintée de mélancolie, dénuée des intonations habituelles qu’elle possédait.

- Non, on va éviter au maximum, elle est déjà assez apathique. On va déjà essayer de restreindre les possibilités.

Mes prunelles, dénuées de leurs éclats vifs qu’ils avaient habituellement lorsque j’étais en présence des dragons, parcoururent l’étendue de l’environnement dans lequel se trouvait la dragonne. Kesabel avait fait les choses bien et je n’en avais jamais douté. Après tout, les éléments Noir des Hébrides qu’il avait dans sa réserve étaient répertoriés chez nous, les MacFusty. Notre devoir, notre tradition, demandait de veiller sur tous les sujets. Kesabel avait reproduit au mieux le lieu de vie naturel où s’ébattaient les confrères sauvages de la dragonne. Il y avait tout ce qu’il fallait : l’océan, les falaises, les grottes humides, l’herbe rendue verte par la pluie régulièrement, mais courte, car les conditions météorologiques n’offraient pas une pousse optimale.
Nous n’étions plus en période de couvaison des œufs et la femelle était dans la force de l’âge. Alors quoi ? Il y avait encore mille et une possibilités. Je reprenais la parole en regardant le sorcier du coin de l’œil, n’ayant pas la force de soutenir son regard.

- Je vais te poser des questions, peut-être idiotes, ne le prends pas mal, mais comme ça, je suis sûre qu’on n’oublie rien. Comment tu la nourris ? Qu’est-ce qu’elle a comme aliment ? Est-ce qu’elle nage ? Est-ce que l’eau est salée ? Est-ce qu’il y a eu un événement particulier qui est arrivé dans son environnement ? Je réfléchissais rapidement à une dernière question et continuais. Elle a un compagnon ?

Mes interrogations pouvaient sembler étranges et un peu disproportionnées, pourtant, elles avaient toutes un sens. Le Noir des Hébrides avait un besoin élevé de bouger, de chasser, que ce soit du cerf ou du bétail. C’était l’une des rares races de dragons à être trapue, car ils avaient besoin de s’accrocher aux falaises des Hébrides, et puisque l’eau faisait partie intégrante de leur territoire, les ailes étaient légèrement plus petites, afin qu’elles s’adaptent lorsque l’animal venait à nager. Dans l’eau, nous (les MacFusty) avions observé qu’ils leur arrivaient de manger du poisson et même certaines algues. Ainsi, la salinité de l’eau avait sûrement son importance pour la bonne santé de l’animal. Ensuite, si quelque chose s’était produit dans la réserve, la femelle aurait pu en payer le prix d’une manière ou d’une autre. Enfin, nous approchions de la fin de l’été, la période de reproduction allait toucher à sa fin, et si la femelle n’avait pas eu de compagnon durant cette période, il était fort probable que c’était quelque chose qui lui manquait du fait que c’était une race de dragon qui était monogame.

Lorsque ces événements seront écartés, nous aurons déjà retiré de grandes possibilités expliquant la cause de l’état de la dragonne.
Mon regard se perdant dans la contemplation de la femelle, j’essayais de repérer un signe, un indice, quelque chose qui pouvait expliquer son état, et, perdue dans mon observation, je n’avais pas été préparée à la phrase du sorcier.
Surprise, je sursautais un peu. Aborder ce sujet, c’était encore vif pour moi, brûlant, et c’était le moins que l’on puisse dire. Je comprenais bien la démarche de Kesabel, tout le moins, j’avais la naïveté de le croire, mais je n’avais aucune envie d’aborder le sujet de Kyle pour le moment. Seule importait la pauvre créature devant nous. Pourtant touchée par son intention, je ne pus m’empêcher de le regarder avec reconnaissance avant d’articuler tant bien que mal, un trémolo d’émotion dans la voix.

- On… en parlera plus tard s’il te plait. Mais merci.

Avec mille efforts, je lui accordais un sourire sincère. Je lui étais reconnaissante de m’offrir la possibilité de parler de l’accident, mais présentement je ne voulais pas me concentrer sur la dragonne en étant rattrapée par les souvenirs de mon frère. Je savais par avance que je risquais alors de mal faire mon travail. Kyle était mort. La dragonne non, et je me devais de l’aider et de la protéger, à défaut d’avoir su le faire avec mon propre frère…


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Lun 27 Juin - 15:27

Abi & Kesabel
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Tu n’étais pas du genre à demander de l’aide. Un peu trop d’ego et de fierté pour t’abaisser à cela. Mais lorsqu’il s’agissait de tes dragons, plus rien ne comptait réellement. Tu avais toujours préféré la compagnie des créatures fantastiques quand tu étais enfant. Cela n’avait pas beaucoup changé tandis que tu avais vieilli. Malgré tout, ta fascination pour ces reptiles ailés, elle n’avait cessé de croître te guidant vers ce métier singulier. Tu restais persuadé qu’une part de toi étant à présent lupine, tu avais un lien différent avec les animaux de manière générale. Tes sens aiguisés t’aidaient également à mieux les comprendre. Le loup qui t’habitait partageait avec toi son instinct primaire te donnant comme un sixième sens qui t’était propre et que peu de gens pouvaient réellement saisir en dehors de tes congénères. Du moins ceux qui avaient cette sensibilité et fascination concernant les créatures qui peuplaient le monde magique. C’est pour cette raison que voir la femelle dans cet état te perturbait. Tu faisais toujours en sorte que les animaux ailés dont tu t’occupais soient dans les meilleures conditions possible. Tu exécrais Gringott qui avait enfermé un dragon dans leurs fondations, et plus encore celui qui leur avait fourni la créature. Tu t’étais imposé chez eux pour pouvoir prendre soin de cette bête à défaut de pouvoir l’en libérer. Tu ne comprenais pas que le gouvernement sorcier puisse laisser ce genre de choses exister. Comme quoi… Toi, ancien prisonnier d’Azkaban aux mains plus que sales, pouvais avoir une certaine morale. Quand cela ne concernait pas les êtres humains qui t’avaient dégoûté de leurs manières depuis des années.

Voir la dragonne dépérir te troublait sans que tu ne parviennes à mettre le doigt sur le problème qu’elle pouvait rencontrer. D’un point de vue de santé, elle allait parfaitement bien. Tu pouvais peut-être avoir raté quelque chose lors de tes contrôles mais tu restais sur la réserve. La MacFusty qui se trouvait à tes côtés avait l’air d’être l’ombre d’elle même. Elle avait le visage marqué par des cernes profonds et elle qui était d’un naturel plutôt enjoué semblait avoir perdu la flamme qui l’habitait normalement.

Au moment où elle prit la parole, tu l’écoutais poser ses questions et quand tu abordas le sujet de son frère, tu entendis les battements de son myocarde s’accélérer légèrement, ressentant alors l’émotion qui la traversait. « Nous ne sommes pas obligés d’en parler. Mais saches que je comprends ce que tu traverses. » dis-tu simplement. Tu n’avais pas été capable d’évoquer Lua durant des mois suite à son décès. Ta langue s’était déverrouillée avec Lex, trouvant en elle une amie précieuse. Une âme soeur aussi sombre que tu ne l’étais également à cette péride. Tu avais pu te confier à elle, expiant tes projets sans sourciller. Elle ne t’avait jamais jugé et là avait été la différence avec beaucoup d’autres. Si Abigail avait reculé devant la personne que tu étais devenu à l’époque, elle ne t’avait pas totalement condamné comme d’autres avaient pu le faire.

Tu revins alors sur ces demandes. C’était assez simple de décrire les appâts que tu lâchais pour stimuler les dragons que tu élevais. Les préparations aussi. La nage faisait également partie de leurs habitudes. Tu avais parfaitement recréé les conditions de vie dans leur réserve naturelle. Néanmoins, tu pris quelques instants pour repenser à ses dernières demandes alors que tu observais la femelle qui semblait presque endormie tant elle était calme. Tu concluais. « Je crois qu’au niveau de l’habitat tout va bien ainsi que pour la nourriture. Son compagnon est un peu plus loin. Je réfléchissais si quelque chose avait pu les troubler et maintenant que j’y pense, j’ai retrouvé des oeufs à moitié écrasés il y a quelques semaines. Ils n’étaient malheureusement plus viables… C’était peut-être les siens. » Tu prenais quelques instants pour regarder la dragonne qui se mouvait à peine sous vos yeux. « Le timing semble correspondre à son déclin en plus. Une sorte de dépression suite à la perte des oeufs ? Ou encore une ‘grossesse nerveuse’ ? » Il arrivait de temps à autre qu’elle soit en train de faire comme si elle préparait un nid maintenant que tu y pensais. Maintenant la question, c’était comment et quoi faire ? Soulager sa mélancolie te semblait bien compliqué. Ce n’était pas comme si tu pouvais lui offrir de nouveaux oeufs. Encore moins t’en procurer par tu ne savais quel moyen vu qu’il n’était pas l’heure de la saison des accouplements. Si la dragonne attendait désespérément l’arrivée de ses nouveaux oeufs pour compenser la perte des anciens… Elle pouvait également être tout simplement dans une sorte de période apathique suite à la mort de ses petits qui n’avaient jamais pu voir le jour… « J’ai lu des techniques sur des oeufs placebos mais je ne pense pas que ce soit une bonne solution. Que fera-t-elle quand elle comprendra qu’ils n’écloront jamais ? » Si c’était vraiment la clé de son état, à part si une potion pour la reboostée existait, tu ne voyais pas réellement comment lui venir en aide. Hormis le temps. Comme pour toi avec Lua. Comme pour Abi avec son frère…
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Abigail MacFusty
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Mer 13 Juil - 15:34

Août 2018

À la proposition de Kesabel, je lui accordais un sourire triste et forcé tout en hochant le menton. Je le remerciais pour sa sollicitude, mais à dire vrai, je ne parvenais même pas à parler de ma douleur à mes parents. Ma sœur adoptive, n’en parlons pas nous étions en guerre froide. Rory était bien trop occupé avec ses propres problèmes… J’étais seule. Seule avec mon chagrin et mon deuil. Seule à devoir affronter le souvenir fantomatique d’un frère perdu à jamais….
Alors, pour résister à cette douleur incommensurable qui m’étreignait la poitrine, je m’étais enfermée dans un silence macabre, à double tour. J’avais scellé mon cœur et mon âme qui étaient alors devenus hermétiques à toutes réquisitions extérieures. Je m’étais enfermée dans une obscurité abyssale dont plus personne ne pourrait me tirer. Jamais plus.
De par ce fait, je ne voyais pas bien comment l’homme qui se tenait à mes côtés pourrait faire un miracle. Certes, il avait aussi perdu un être cher à l’époque, ce qui m’avait fait prendre de la distance. Parce que je n’avais pas compris, parce que je n’avais pas été une amie à la hauteur. Aujourd’hui, plus que jamais, je comprenais par où il était passé, et par Merlin, l’infect goût du regret était si amer ! Pour me retenir de ne pas m’effondrer à côté de lui, j’enfonçais discrètement mes ongles dans la peau de mes bras croisés. M’accrocher à une autre douleur me permettait miraculeusement de tenir bon. Qui plus est, il fallait vraiment aider cette pauvre dragonne étendue devant nous, tout amorphe. Moi, je pouvais attendre, moi, je n’étais pas importante.
Moi la petite sorcière insignifiante que tout le monde avait oubliée et qui avait été abandonnée.

Fort heureusement pour moi, il n’insista pas davantage. La proposition était donnée, il en revenait qu’à moi de décider quoi en faire. Ce n’était pas tombé dans l’oreille d’une sourde, mais pour le moment, je n’avais aucune envie d’évoquer l’accident survenu quelques jours auparavant.
J’appréciais sa délicatesse et je l’en remerciais, mais notre priorité pour l’instant était cette dragonne. Voir un animal souffrir de la sorte me mettait toujours très mal à l’aise à cause de ma forte empathie. Dans mon état actuel, j’aurais très bien pu me rouler en boule également et me mettre à pleurer pour elle tant j’avais de peine en écoutant le récit de ce qui lui était arrivé.
Décidément, la perte d’un être cher semblait être monnaie courante, alors que pourtant, elle ne devrait pas l’être.
Un soupir las et attristé traversa ma gorge mise au supplice de ne pas pouvoir gémir le mal qui me rongeait.

- Alors oui… inutile de chercher plus loin, ça doit être ça. Les parents couvent toujours étroitement leurs œufs, tu le sais bien. Si tous les œufs ne sont pas viables, alors effectivement les parents peuvent sombrer en dépression durant une période plus ou moins longue. Ça dépend du caractère du dragon. Ce n’est pas la première fois que j’observe un tel phénomène, surtout chez les Noirs des Hébrides.

J’appréciais cette race plus que les autres pas uniquement parce qu’ils étaient mes protégés par un devoir familial ancestral. Non, ils avaient un sens de la famille bien à eux. Une fois en couple, ils le restaient et élevaient leurs petits ensembles. Lorsque ceux-ci étaient en âge de quitter le nid, ils pouvaient vivre en solitaire des années avant de se mettre en couple.
La famille avait toujours été une notion particulièrement importante chez les Noirs des Hébrides, comme pour les MacFusty. Alors… perdre l’un de ces membres était une véritable déchirure.
À nouveau, je sentais ma gorge se nouer tandis que je déglutissais avec difficulté. Intérieurement, je ne cessais de me flageller en songeant à ma sœur. Si seulement nous ne nous étions pas à ce point appliquées à pourrir notre relation, nous pourrions surmonter ça toutes les deux.
Battant des paupières pour chasser ses pensées, je venais me frotter les yeux pour reprendre contenance avant de continuer d’une voix d’abord tremblante.

- Je ne pense pas qu’il s’agisse d’une grossesse nerveuse si c’était ces œufs, mais bien d’une dépression suite à la perte des œufs. Il faudrait que tu trouves pourquoi ces œufs ont été écrasés subitement, histoire de faire en sorte que ça ne se reproduise pas. En fait… Je m’éclaircissais la voix et décroisais enfin les bras pour désigner la dragonne. Quand un œuf n’est pas viable, la dragonne continuera à le couver jusqu’à ce que le temps de l’éclosion est dépassé. C’est un processus naturel, du coup elle quittera le nid sans changer de comportement tu vois ? Elle comprendra d’elle-même. En revanche, si l’œuf lui a été retiré avant qu’elle ne quitte le nid, même s’il n’était pas viable, ça peut engendrer ce genre de comportement. Tu sais, la mère communique avec ses petits alors qu’ils sont encore dans les œufs… un lien se créer déjà à ce stade-là. C’est pour ça qu’une séparation à ce moment de la couvaison est trop brutale.

J’observais un instant de silence tout en tapotant mes lèvres avec mon index. J’étais en pleine réflexion sur ce qu’il y avait de mieux à faire dans cette situation. C’était très délicat. La suggestion de Kesabel n’était pas idiote, mais il soulignait lui-même la faille de cette technique.

- Mmh… je ne pense pas que pour son cas à elle ce soit une bonne idée. Comme tu dis, quand elle comprendra qu’il n’y aura pas d’éclosion, le problème va revenir je pense. Pire, tu pourrais avoir brisé la confiance que tu as durement gagnée avec elle. Je pense que le mieux à faire, c’est effectivement d’attendre. Pour un cas moins sévère ça peut effectivement aider mais là, je pense que ce n'est pas pertinent... Je te donnerais une liste de plantes à rajouter dans sa nourriture et son eau, pour le mâle aussi. Ça va les aider à surmonter tout ça, le mâle peut en avoir besoin lui aussi.

De mon œil aiguisé et attentif, je contemplais la place que bénéficiait le couple. En tant que MacFusty, la réserve de Kesabel Greyback était dans nos dossiers, surtout parce qu’il possédait des Noirs des Hébrides. Je n’avais jamais douté de son professionnalisme et sa réserve était l’une des meilleures que je connaissais. Voilà pourquoi je n’étais pas étonnée de voir un terrain parfaitement adapté à leurs besoins. Ils ne manquaient de rien, il n’y avait donc aucune raison apparente pour que cette dragonne soit dans cet état.

- Évidemment, tu surveilleras ses selles si tu ne l’as pas déjà fait, mais franchement, je ne pense pas que son problème soit… physique. Je me passais une main sur la nuque. En vérité… le seul remède miracle que je verrais pour son cas… ce serait de trouver un dragonnet orphelin. Peut-être qu’elle l’adopterait et se remettrait en quelques jours. Je réfléchissais rapidement. Malheureusement on ne m’a recensé aucun cas dans les Hébrides, sinon je te l’aurais fait parvenir… Peut-être que ça fonctionnerait même pour une autre race, par exemple un v…

Impossible de sortir le nom de cette race. Surprise par ce blocage mental, je me mordais la lèvre avant de camoufler mon visage dans le creux de ma main. Inexorablement, des larmes s’échappèrent de mes yeux et coulèrent le long de mes joues. Les essuyant d’un geste un peu brusque, je relevais la tête pour observer les nuages et prendre une profonde inspiration.

- Je te prie de m’excuser. Je… Putain… Kesabel, est-ce que tu pourras un jour me pardonner de m’être éloignée de toi alors que tu avais besoin de moi à l’époque ? J’avais rien compris à l’époque et maintenant je me rends compte que… j’ai été conne. Pardonne-moi.

Ma voix tremblait et trahissait les sanglots que je retenais tant bien que mal. Hors de question que je me lamente devant lui… mais je jugeais nécessaire de lui demander de me pardonner pour mon erreur passée. Une erreur… impardonnable à mes yeux.



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La douleur d’Abigail, tu la ressentais. Tu la comprenais aussi. Tu te souvenais de la jeune femme tandis que vous étiez encore à Poudlard et aujourd’hui son regard semblait éteint. Elle qui avait toujours été pétillante dans tes souvenirs n’avait plus cette même joie de vivre et cette insouciance qui l’avaient pourtant habitée alors que tu la fréquentais. Perdre Lua a été la pire épreuve que tu aies connue jusqu’à présent. Même dans cette enfance, cette formation pour survivre au loup-garou chaque nuit de pleine lune, ce n’était rien en comparaison du sentiment de solitude et de vide qui t’avait assommé. La perdre tandis qu’elle était ton unique pilier dans ce monde complètement absurde t’avait jeté sans repère et cela t’avait poussé vers des chemins sombres. Tant et si bien que le Kesabel souriant et jovial avait laissé place à un être rempli de rancœur. Seule la vengeance importait. Beaucoup t’avaient laissé tomber. Tu n’avais pas une famille normale. Une qui aurait su t’encadrer et te soutenir. Au lieu de cela, cette haine avait nourri leurs espoirs les plus fous. Tu n’avais jamais été aussi fort pour résister chaque nuit où les lupins étaient de sortie. Et lorsque tu ôtas la vie de ton enfoiré d’oncle, toi qui t’étais attendu à être condamné par les tiens, tu avais été encensé. Ton père était devenu l’alpha et déjà en toi s’éveillait ce gène prêt à prendre le relais et tous le sentait, le voulait. Tu avais surpassé leur folie en libérant la tienne. Tes actes les années qui suivirent ta sortie de Poudlard faisaient souvent l’objet de rumeur. Tu as fini à Azkaban durant huit longs mois. Faute de preuves… néanmoins tu étais bien coupable. Cela a eu au moins le mérite de te calmer… un peu. La perte d’un être peut totalement changer votre vie. Votre chemin. Enfant, tu n’imaginais pas devenir un alpha. Gérer cette meute, la guider dans ce monde de fou. Pourtant c’est ce que tu fais. Tu les haïssais et tu les contrôles maintenant. A l’instar d’un Louis XIV qui a manipulé sa cour royale, tu en fais de même à présent. Tu ne sais pas ce que Lua pense de ce que tu es devenu. Ce qui est certain, c’est que tu vengerais sa mort encore et encore si c’était à refaire. Tu prendrais la vie pour honorer la sienne qui lui avait été volée bien trop tôt. Ta seule bouffée d’air frais était tes dragons. Une fascination que tu avais depuis ton plus jeune âge. Alors que tu n’étais qu’un pauvre gamin vivant dans une cabane miteuse, tu te souvenais de Lua et de ses récits qu’elle te racontait. A présent, tu savais qu’elle les inventait pour toi. Surtout qu’il fallait toujours qu’elle y glisse un dragon. Elle t’avait même offert un livre dont tu avais usé les pages à force de le lire et relire. L’histoire que tu adorais était celle où une sœur et un frère s’échappaient d’une forêt sombre sur le dos du reptile. Combien de fois avais-tu imaginé que cela pouvait être vous ? Le dragon avait toujours symbolisé cette liberté que tu n’avais pas eue. Si cela dénotait clairement des attentes de tes parents qui auraient préféré un travail plus lucratif et plus utile à la meute, tu n’en avais eu rien à faire.

Tout un passé, qui t’avait éloigné d’Abigail et qui pourtant aujourd’hui vous réunissait devant cette pauvre dragonne totalement apathique. Et si tu en venais à demander de l’aide, ravalant ta fierté, c’est qu’il y avait réellement un problème que tu n’arrivais pas à résoudre. Tu te sentis obligé de lui parler de son frère… L’appeler et faire comme si tu n’étais pas au courant te semblait étrange. Ne pas lui en toucher un mot aussi. Cela faisait bien trop écho avec ce que tu avais vécu. Tu comprenais sa douleur. Un silence s’installa l’espace d’un instant alors que vous observiez la femelle en souffrance. Tu lui parlas de cet œuf brisé que tu avais trouvé faisant finalement le lien avec la situation actuelle. Tu écoutes la jeune femme tandis qu’elle t’explique plusieurs étapes durant la couvaison. Tu hoches tranquillement la tête. Tout ce qu’elle raconte est logique. Tu ressens au travers de ses la difficulté qu’elle a à s’exprimer. Cela fut d’ailleurs pire alors qu’elle tenta de parler d’une autre race de dragon. Sa voix chevrotante, elle cacha son visage d’une main. Tes sens aiguisés éprouvaient les pulsations de son myocarde trahissant sa peine… « Tu m’as déjà beaucoup aidé, on peut s’arrêter là… » soufflais-tu doucement. Lorsqu’elle releva le visage, essuyant les traces de sillons de larmes, tu ne sus pas réellement comment réagir. Tu te tournais légèrement vers elle au moment où elle reprit la parole.

Tu la fixais un instant ne t’attendant absolument pas à une telle déclaration. Tu passais une main dans tes cheveux, presque nerveux que la balle revienne dans ton camp. Tu n’avais pas l’habitude d’en parler. « Viens… » Tu posais une main au milieu de son dos pour l’inviter à marcher. A quelques minutes de là où vous vous trouviez, c’est là que se situait ta maison. Tu n’habitais pas loin de ta réserve, à l’écart de Pré-au-Lard et non loin de la forêt interdite. Tu attrapais ton paquet de cigarettes pour en allumer une et tu tirais dessus. « J’étais pas simple à l’époque. » réponds-tu finalement comme pour lui dire de ne pas s’en vouloir. Etrangement tu avais beaucoup de rancœur à l’encontre de Soledad qui t’avait totalement tourné le dos quand tu étais tombé dans ces travers. Il n’y avait eu que Lex à cette époque… Tobias était venu compléter ce tableau. « Ma sœur a été tuée durant son apprentissage pour devenir loup-garou. Les morts brutales, violentes… ça te laisse pas indemne. » Aucune bien sûr. Mais ces accidents terribles… C’était pire. Tu observais un instant les arbres qui délimitaient les chemins de terre que vous empruntiez. « Je vais pas te dire que ça ira mieux avec le temps, parce que c’est faux. Le manque est toujours présent. C’est juste qu’il surgit sans prévenir alors que tu crois que tout va bien. Et puis, je suis pas un exemple. J’ai jamais vraiment fait mon deuil. » Tu pensais que tuer ton oncle, celui qui avait pris la vie de Lua serait salvateur. Tu imaginais mourir en faisant cela. Mais le destin en avait décidé autrement… Ce que tu avais fait bien sûr n’était pas connu en dehors de la meute, mais les rumeurs allaient bon train et tes agissements au nom de la meute avaient souvent fait quelques titres dans les journaux. La perte de Lua avait de toi une personne sombre et immorale. Peut-être que si les gens avaient résisté et étaient restés avec toi… peut-être que tu aurais choisis une autre voie… « J’habite là-bas. Tu veux prendre un verre avant de repartir ? » Tu montrais de la main ta demeure qui se dessinait à l’horizon. C’était simple. Tu n’avais pas envie d’une grande maison. A l’intérieur, c’était très spartiate. Pas de décoration, juste le nécessaire pour y vivre. Il n’y avait pas de photo, de coussins pour faire joli. C’était ordonné, rangé. Froid. Mais tu n’avais pas besoin de plus.
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Abigail MacFusty
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Jeu 27 Oct - 14:30

Août 2018

J’avais un pieu dans le cœur et il m’était impossible de le retirer. En réalité, je ne savais même pas si je désirais le retirer. Évidemment, ce serait moins douloureux, mais c’était précisément pour cela que je souhaitais attendre qu’il fusionne à ma poitrine. Ne plus ressentir la douleur de la perte, commencer à oublier mon frère en faisant le deuil, c’était tout simplement inimaginable. Alors je préférais souffrir, d’autant plus que l’accident était survenu quelques semaines auparavant. Ma famille entière pleurait en se soutenant et moi, je m’isolais. Parce que j’avais toujours été l’enfant un peu à part, parce que je ne savais pas comment me confier, parce que je n’osais pas leur avouer que tout était de ma faute. Je n’avais rien fait pour venir en aide à Kyle et j’étais persuadée que cette culpabilité me suivrait jusque dans ma tombe. J’allais devoir vivre avec et le cacher à ma famille, un peu par peur, mais aussi et surtout par lâcheté. Malgré le fait que je sois un être solitaire, j’appréciais ma famille, je les aimais du fond du cœur, même cette peste de Moïra. Si d’aventure je leur disais la vérité, ils me banniraient sûrement. Je perdrais tout ce que j’avais présentement, mon univers s’effondrerait et il ne resterait plus rien de moi. Il m’était déjà difficile de me tenir droite maintenant que le drame nous avait touchés, alors me retrouver seule. Je n’avais plus Harper, je m’étais éloignée de Rory, j’évitais Moïra et Aïko et Kyle avait disparu à jamais.
Je me retrouvais toute seule et la seule lumière qui me permettait de garder le cap, qui me donnait encore l’oxygène nécessaire à ma survie, c’était les dragons. J’avais répondu à l’appel de Kesabel parce que je l’avais bien connu à l’époque, parce que nous nous étions perdus de vue, parce que je vivais avec le regret de m’être éloignée de lui alors qu’il en avait eu besoin, et surtout parce qu’il avait besoin de mes conseils. Non pas que le travail passe avant tout, mais c’était une manière pour moi de fuir la lourdeur de la vie. Lorsqu’il m’avait contactée pour me demander de faire la seule chose dont j’étais encore capable et dans laquelle je ne doutais pas de moi, j’avais répondu présente. Si me retrouver devant un Noir des Hébrides fut difficile à cause du souvenir encore sanguinolent de l’accident, j’étais tout de même soulagée qu’il ne s’agisse pas d’un Vert Gallois. En réalité, je craignais que le traumatisme de la perte de mon frère soit si profond que je ne puisse plus exercer en tant que dragonologiste.
Venir ici était un test.

Ce fut donc un peu rassérénée, mais avec un nœud indescriptiblement douloureux que je fixais la pauvre dragonne déprimée tandis que le sorcier à mes côtés m’indiquait avoir toutes les réponses à ses questions. Je déglutissais avec difficulté, toutefois peu convaincue par le travail que je venais de fournir. Je savais que je pouvais faire mieux, mais quelque chose m’en empêchait, comme une main glacée et invisible qui me gelait l’intérieur du corps et mettait l’entier de mon âme en léthargie. Assommée par le doute et les regrets, je formulais les excuses que j’aurai dû demander des années auparavant. Sans avoir l’air de m’en tenir rancune, Kesabel posa une main dans mon dos pour m’entraîner avec lui. Je le suivis sans opposer la moindre résistance, prenant de longues et profondes inspirations pour chasser les larmes qui me nouaient la gorge.
Du coin de l’œil, je le regardais s’allumer une cigarette et sans me formaliser, moi qui étais non-fumeur, je balayais les lieux du regard. J’aimais cet endroit, entre Pré-au-Lard et la forêt interdite. Entre civilisation et monde sauvage. J’aimais cette balance si difficile à trouver. Ses paroles eurent le mérite de m’arracher un petit sourire.

— Ah parce que maintenant tu es plus facile à vivre ?

Puis je retrouvais de mon sérieux alors qu’il me conta dans les grandes lignes ce qui était arrivé. Le décès brutal de sa jeune sœur dans un apprentissage de loup-garou. Je ne pus m’empêcher de froncer les sourcils à cette information. Non pas que j’étais dégoûtée et parce que je me méfiais des lycans, bien au contraire. J’étais du genre à apprécier les bêtes, Kesabel le savait très bien. C’était davantage parce que j’ignorais tout de ces coutumes et j’apprenais présentement qu’il en existait de tels.

— Ça a dû être dramatique… Cet apprentissage c’est… quelque chose… d’important ?

Je hasardais, sans avoir la prétention de toucher à ce qui ne me regardait pas. Je souhaitais surtout partager une peine que nous avions dès lors en commun. Mon cœur se souleva de désespoir aux paroles peu encourageantes de Kesabel, mais elles étaient si vraies qu’elles me percutèrent.

— Je me demande… si c’est vraiment vivre que de ressentir à chaque instant un tel manque et une telle douleur. J’observais un instant de silence pour ma réflexion. Mais je suis certaine d’une chose… je veux continuer à souffrir pour ne pas oublier. J’ai la sensation que faire mon deuil ça va… je ne sais pas, l’effacer de ma mémoire. Ça risque de me faire oublier qui il était, tu vois ? Je fixais un instant l’horizon, à nouveau perdue dans mes pensées avant d’oser questionner. Comment tu fais ? Pour vivre avec ?

Faire avec le manque, continuer à avancer sans Kyle, ça me paraissait tout bonnement impossible et inimaginable. Il avait été celui qui me connaissait le mieux, celui qui ne m’avait jamais jugé, celui qui me comprenait même lorsque je restais muette. Il avait toujours été doux et compréhensif, et me dire que je n’aurais plus jamais se soutient pourtant indéfectible était… C’était une déchirure, un tremblement de terre. J’avais aujourd’hui dans le cœur un gouffre qui ne pourra plus jamais être comblé.
À son indication, j’observais la sobre maison, et une fois à l’intérieur, je balayais les lieux d’une œillade intéressée et curieuse sans jamais être déplacée. Je reniflais un peu en me grattant le nez, signe de la gêne que je ressentais de me retrouver ainsi chez lui. Ça n’était jamais arrivé avant. C’était comme si nous venions de sceller quelque chose de tacite dans notre amitié. Toujours dans le but de détendre l’atmosphère et de vouloir un peu chasser nos fantômes, je me permettais une remarque humoristique.

— Oh, je vois qu’on a le même talent pour la décoration.

Si d’autres pouvaient trouver l’endroit austère et froid, moi j’y voyais un lieu pratique et simple, ce qui détonait avec la personnalité de Kesabel. Même si chez moi tout était rempli de livres et que quelques photos rappelaient certains de mes souvenirs, le tout restait aussi très simple et surtout pratique pour moi et mes recherches en dragonologie et en botanique. Glissant mes mains dans mes poches, restant poliment derrière la porte tant qu’il ne m’avait pas offert de me mettre à l’aise, je m’éclaircissais un peu la gorge.

— Pour tes dragons… Je n’ai pas ce qu’il faut sous le coude, mais je suis certaine que j’ai de quoi te préparer le mélange chez moi. Il me faudra un ou deux jours. Ce n’était pas dans mes habitudes d’être aussi évasive, et je m’en rendis compte. Je remuais les épaules, mal assurées. Je devais me reprendre, je le savais, mais le deuil me ralentissait beaucoup. Tu seras livré après-demain.

Assurais-je. Si je ne me donnais pas une limite, alors je craignais que ce pauvre animal n’ait jamais les plantes dont il avait besoin pour aller mieux… et si j’étais incapable de prendre soin de moi, je me devais au moins de prendre soin de mes protégés, surtout les Noirs des Hébrides. Parce que c’était tout ce qu’il me restait. C’était mon héritage.


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Sam 4 Mar - 18:07

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Tu sentais bien que la jeune femme à tes côtés n’était pas au mieux de sa forme. Honnêtement, cela aurait été n’importe qui d’autre, tu n’en aurais certainement rien eu à foutre. Mais Abigail s’était toujours montrée gentille. Même quand tu avais vrillé, elle avait certainement pris du recul par rapport à tes agissements, mais sans pour autant chercher à te porter un jugement de valeur. Elle n’avait pas cherché à te faire la morale, à te changer. Elle était restée non loin sans pour autant s’approcher, mais cordiale. Tu n’avais pas de remords ni d’aigreur envers elle, comme tu pouvais en avoir une envers Soledad. Tu avais eu des liens forts avec la Mexicaine qui avait fini par t’abandonner, tout simplement. Peut-être était-ce parce que le lien avec la Macfusty était plus léger, moins profond que cela se passait mieux avec elle. L’étude de la dragonne fut assez rapide finalement. Tu n’avais même pas pensé au fait qu’elle pouvait faire une dépression à cause de la perte de son œuf. C’était la première fois que tu étais confronté à cette problématique. Il faudrait que tu te renseignes davantage auprès d’autres confrères. Tu avais un petit réseau efficace. Les premières consignes d’Abigail étaient déjà assez utiles pour te permettre d’agir afin de venir en aide à ton reptile ailé. Tu avais toujours eu un lien fort avec ces créatures fantastiques. Comme si le fait d’être un loup te donnait des avantages que d’autres ne pouvaient avoir. Un instinct entre l’animal qui t’habitait et eux. Tu n’étais d’ailleurs jamais mieux qu’ici quand tu étais sous ta forme humaine.

Toutefois la conversation prit un tournant auquel tu ne t’attendais pas. Faisant quelques pas en compagnie de la jeune femme, tu sortais une cigarette pour tirer plusieurs lattes. Une addiction comme une autre qui t’avait gagnée avec les années. Tu lâchais un petit rire enroué par la fumée à sa remarque. « Un point pour toi MacFusty. » Non tu n’avais rien de simple. Il était difficile de te comprendre. De te cerner. Seule Lex avait la possibilité de se vanter d’un tel exploit. Mais vous étiez brisés tous les deux. C’était une évidence. Quand tout le monde s’était écarté de ton chemin, elle était venue le percuter. Deux âmes brisées dans deux carcasses fracassées. Abigail avait bien raison, tu n’étais pas simple. Différent, mais loin d’être simple. Tu remarquais qu’elle était perturbée alors que tu lui racontais la perte brutale de ta sœur. Tu ne t’en étais jamais remis. Ton deuil… Tu ne l’avais pas fait. Depuis, tu te contentais de gérer ta meute du mieux que tu le pouvais. Et surtout, tu hantais ta mère qui était le reflet de ta souffrance et de celle de Lua. Tu tirais longuement sur ta cigarette avant de répondre. « C’est l’héritage de notre meute. Ce qui fait notre réputation. » Tu perpétuais cette tradition même si tu avais mis en place des sécurités qui n’existaient pas à l’époque. Comme des lupins qui étaient sous potion pour veiller. « Dès que tu as onze ans, à chaque pleine lune, tu es lâché dans la forêt et tu dois survivre au loup-garou qui t’entraîne. » Lachais-tu brutalement. Cette tradition paressait barbare aux yeux de tous. Pour toi, ce n’était qu’une coutume comme Noël. Tu lâchais un petit rire. « Quand t’es à Poudlard et que c’est la pleine lune, t’es content d’y échapper, crois moi. » A l’époque de ton père, Fenrir, et de son frère, c’était encore plus cruel. Tu avais adouci les mœurs quand tu avais été nommé leader de cette troupe. Vous n’aviez rien de petits anges, il ne fallait pas non plus déconner. Mais tu savais le goût prononcé de ton géniteur pour les enfants et c’étaient des choses que tu ne tolérais plus à présent.

Les questions de la jeune femme qui suivirent te firent sourire. Etais-tu vraiment le mieux placé pour parler de ça ? Tu avais une relation malsaine avec la mort de ta sœur. Tu n’allais certainement pas la rassurer ou encore la guider sur une route qui l’aiderait à aller mieux. Elle n’était pas Lexi qui arpentait les mêmes méandres. Tu te raclais la gorge. « Je ne vis pas avec. Je subis en toute honnêteté. » Allais-tu lui dire qu’à chaque anniversaire de Lua tu te mettais une mine ? Que tu apportais un gâteau à ta génitrice pour la faire souffrir ? Que tu avais grandi avec une table qui avait accueilli la dépouille de Lua que tes parents n’avaient pas pris la peine de changer ? Qu’une trace vermillon était encore incrustée dans le bois brut de sa surface ? Ton loup s’agita sous le flot d’émotions qui te traversait. Ta mâchoire se crispa un instant avant que tu ne te mettes à fumer à nouveau. « J’arrive pas à faire mon deuil. J’ai voulu venger sa mort dès que je l’ai perdue. » Tu marquais un silence, plongeais ton regard dans le sien. « Je l’ai fait et ça n’a rien changé à mes ressentiments. » Tu avais tué ton connard d’oncle. Celui qui avait ôté sans la moindre culpabilité la mort de Lua. Si cela t’avait soulagé, que tu ne regrettais pas… La peine et la douleur résidaient toujours dans ta poitrine.

Vous arriviez dans ta demeure dans laquelle tu l’invitais à entrer. Sa remarque sur ta décoration te fit lâcher un sourire. « Installe-toi. J’ai de l’alcool ou du café. Aussi efficace que ma déco, tu en conviendras. » disais-tu, écrasant ta clope dans un cendrier posé sur la table que tu l’invitais à rejoindre. Tu prenais ce qu’elle te demandait et récupérais un verre de whisky pour toi avant de t’asseoir à ses côtés. « Merci, j’espère que ça va l’aider. Je vais me renseigner auprès de quelques confrères en Europe aussi. » Tu levais ton verre en sa direction avant de le porter à tes lippes et d’en boire une gorgée. « Pour en revenir au deuil… Je pense qu’on réagit tous différemment. Moi, dès qu’une date clé est en approche, je pars en couille. » soufflais-tu en reposant ton verre.
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Mar 14 Mar - 20:09

Août 2018

Les pieds foulant la terre et l’herbe de la région, je laissais mon regard s’évader sur l’horizon tout en imaginant ce que Kesabel me contait de manière succincte. J’ignorais tout des aspects de la vie d’un loup-garou, et ce qu’il me racontait me fascinait, sans pour autant que je cherche à en savoir trop. Je ne voulais pas paraître indiscrète, mais, il fallait le dire, tout ce qui touchait les créatures m’intriguait, qu’importe leurs origines et leurs dangerosités. Grandir aux côtés des dragons m’avait rendue farouche derrière mes airs timides et gentils. Des airs qui trompaient bien des gens, et les premiers étaient mes collègues dragonologistes. Si Kesabel respectait mon travail et mes méthodes, ce n’était pas le cas de quelques sorciers usant de vieilles méthodes très discutables. J’essayais de changer ça en prouvant l’impact psychologique sur les dragons, que ces agissements coercitifs avaient un réel impact sur leurs comportements, mais souvent, j’avais l’impression de gueuler dans le cul d’un éruptif. Que je sois une petite femme menue et timide ne m’aidait pas malgré mon nom de famille. J’étais encore jeune dans le métier, je n’avais que mon diplôme universitaire et ma thèse, j’avais conscience que je me devais de faire mes armes… mais encore une fois, la preuve que mon travail pouvait faire ses preuves était là, juste sous mon nez : la dragonne faisait une dépression, car elle avait perdu son petit.
Un dragonologiste classique ne s’en serait jamais rendu compte et aurait cherché ailleurs. Moi, j’étais convaincue qu’il s’agissait de ça, car je n’avais aucun doute du talent et des bons soins prodigués par Kesabel. Ce cas sera peut-être le premier qui pourrait témoigner de mes recherches. J’avais une montagne de travail, une montagne de preuves à faire, et je ne m’en lasserais jamais. J’aimais trop ça et aujourd’hui, c’était un travail salutaire.
Tirée de mes pensées par les paroles de Kesabel, je me contentais de hocher la tête non sans avoir haussé un sourcil étonné.

— Je te crois sur parole. C’est une tradition qui a l’air importante même si, décrite comme ça, elle paraît… dangereuse. Vous êtes sous potion tue-loup ? J’enfonçais mes mains dans mes poches avant de répliquer rapidement. Excuse-moi si je suis indiscrète, n’hésite pas à le dire. C’est juste que je ne connais pas et ça m’intrigue.

Puis, il y eut ces questions. Cette situation. Cette condamnation. Je me mordais l’intérieur de la bouche en écoutant ses confidences, retenant mes larmes. Comme je le comprenais ! Et comme je regrettais de m’être éloignée de lui à l’époque. Je poussais un soupir, le souffle saccadé par la peine, sans chercher à fuir son regard.

— Merci pour ce que tu me confie… ça m’aide beaucoup… tu vois, je… avec ce qui est arrivé, je me suis dit que j’allais abandonner mon métier. Ça retourne le couteau dans la plaie et de toute façon, dans le milieu, personne ne donne de crédit à mon travail de comportementaliste. Je sais que changer les habitudes sont difficiles, mais… en fait, là, je ne m’en sens plus capable.

Kesabel savait à quel point la dragonologie était mon rêve. C’était aussi ce qui me raccrochait à la raison en ce moment même… mais devais-je réellement continuer en l’état ? Je n’étais pas à l’abri d’une erreur de jugement qui pourrait m’enfoncer davantage dans la dépression. Je grimaçais un peu en déglutissant.
Je rentrais chez lui et m’installais à la table qu’il m’indiquait non sans joindre nerveusement mes mains entre elles.

— Si tu as, je veux bien un whisky.

La petite sorcière que j’étais provenait tout de même des Hébrides. Boire ne me faisait pas peur, même si je n’étais pas complètement accoutumée à l’alcool, je ne refusais jamais un verre, surtout pour me détendre, et surtout par un ami. Je le lorgnais éteindre sa cigarette et me servir tout en m’accoudant pour enfoncer mon menton dans la paume de ma main.

— De nouveaux avis te seront bénéfiques oui, mais je suis assez sûre de mon coup, tu sais…

Encore une fois, je craignais que Kesabel ne prenne pas mon avis très au sérieux, ce qui m’enfonçait davantage dans ma lubie d’abandonner la dragonologie. Je faisais tournoyer mon verre pour y faire danser le whisky, pensive.

— Je… enfin, je ne sais pas comment je serai l’année prochaine, mais… je pense que cette date va être maudite pour moi aussi… perdre Kyle… c’est comme perdre un bout de moi. Je ne sais pas comment je vais faire sans lui. J’ai juste envie de creuser un trou et de me laisser dépérir dedans… Je comprends pas pourquoi la mort l’a emporté lui et pas moi. Il réussissait tout mieux que moi, il était l’héritier de notre famille, il était vif et sociable, il savait parler aux autres et il avait du charme. Je suis juste… rien en fait… J’ai hérité du devoir familial et je… je n’en ai pas envie.

Les larmes aux yeux, le trou dans la poitrine, je pris une grande gorgée de whisky non sans tousser lorsqu’il me brûla la gorge. Ça avait au moins eu l’effet de me remettre les idées en place. Je regardais mon ami.

— Excuse-moi, je fais ma pleureuse… Comment tu vas toi en ce moment, le moral, le travail et tes loups ?

Tant bien que mal, j’essayais de changer de sujet. Ressasser ne changerait rien, cela ne ferait pas revenir les morts, et je ne me remettrais jamais de la disparition de Kyle. De cela j’étais certaine.
 


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Dim 21 Mai - 22:33

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Le cylindre blanc coincé entre tes lippes, tu avançais aux côtés de la jeune femme. Tu tirais dessus aspirant la fumée sans en avoir réellement conscience de ton geste, signe que tu étais devenu dépendant à cette saloperie. Ce n’était même plus un plaisir, mais un besoin. Que cela sillonne jusqu’à tes poumons et que ta dose de nicotine journalière fasse effet. Tu aimais bien Abigaïl. Derrière sa douceur se cachaient des répliques piquantes, saisissantes. Certains la prenaient peut-être à la légère, mais ce n’était pas ton cas. Un ressenti, un feeling. Mettez le mot que vous vouliez derrière. Tu l’appréciais malgré les années qui passaient et sa petite pique concernant ta complexité t’arracha même un sourire. Elle s’interrogeait ensuite sur cette sorte de formation qui vous poussait à devenir des loups-garous. Pas de n'importe quel niveau. C’était au-delà de toutes limites. Les autres loups ne pouvaient pas être comparés à ceux que vous étiez. Un petit rire s’échappait de tes lippes. « Pas à mon époque, non. C’était considéré pour les faibles, cette potion. » Même si ce n’était plus le cas à présent, que chaque louveteau en formation se retrouvait avec un tuteur, ce dernier n’avait pas ingurgité quoi que ce soit. Par contre, d’autres étaient présents pour protéger l’enfant. Avec le tue-loup dans leur veine. C’est à cause de ce manque de vigilance que Lua était morte. Mais d’une certaine façon, c’était aussi la preuve que vous étiez fort. Qu’avant de devenir un canidé, vous en aviez vaincu un autre. Tu secouais doucement la tête à ses excuses, l’air de dire, ce n’est pas grave. « Lua est morte durant cette tradition comme je te disais. Paradoxalement… j’ai pas pu mettre un terme à ça. Ce qui fait qu’on est une meute à part. J’ai sécurisé cette façon de devenir un loup. Je me suis aussi assuré que chacun était consentant… » L’étais-tu à l’époque ? Pas certain que tu sois capable de répondre à cette question. Lua ne l’était pas. C’était pour cela que tu l’avais vengé. Tuer t’avait donné l’impression d’aller mieux, mais en réalité, ce n’était qu’une illusion. « Les loups qui se rassemblent, ils le font après avoir été transformés. Nous on a vécu ensemble avant, pendant et après. Ca créait des liens… » Aussi étrange cela devait être aux yeux des personnes extérieures à tout ce bordel.

Vos regards se croisèrent alors qu’elle vidait doucement son sac. Tout abandonné. Que tu la comprenais. Combien de fois avais-tu eu envie de crever après son départ ? A quoi rimait la vie si c’était pour finir de la sorte ? Même les sorciers ne savaient ce qu’il advenait après la mort. Où était-elle à présent ? Ce vide. Ce trou béant dans ta poitrine. Tu le ressentais chaque jour. Pourtant parfois, tu croyais avancer, passer à autre chose. Cela revenait d’autant plus brutalement. Sans prévenir. Un souvenir. Une vague allusion. Le cœur se serrait. Les larmes s’entassaient. Tu refusais de pleurer. De laisser la douleur t’envahir. Car le peu de place qu’elle prenait était déjà incommensurable. Comment laisser aller le reste alors que c’était déjà bien trop poignant ? « Je sais même pas quoi te dire Abi… J’ai traversé tout ça. Je crois que c’est pour les autres que je suis resté la tête hors de l’eau et que je suis encore là. » La vengeance d’abord. Puis l’idée qu’un jour tu serais là où tu es. A présent, tu vivais pour eux. Pour les guider, les protéger. Tu changeais les choses. Certaines. Petit à petit. Tu effaçais l’empreinte de Fenrir, puis celle de ton père. Laissant la tienne. Plus faible aux yeux de certains. Toujours bien trop violente pour d’autres. Tu attrapais le whisky et vous servait deux verres. D’un geste lasse, tu écrasais ta cigarette dans un de tes cendriers. « Je te fais confiance. » soufflais-tu en parlant des dragons et de ses conseils. « Je me suis dit comme toi. Pourquoi elle et pas moi ? Elle était le jour quand j’étais la nuit. Tout mon opposé. Toujours de bonne humeur, positive… Pourtant c’est elle qui est partie… » T’avais pas de réponse. Qui en avait en réalité ? Personne ne pouvait être d’une réelle écoute dans ces moments-là. Tu étais seul avec ta douleur. Tu la subissais, car personne n’était capable de réellement comprendre. Chacun traversait le deuil à sa façon. Le vide. C’est tout ce que tu retenais de son départ. Le vide. L’absence. Le noir. Le manque. Le manque… Ne plus toucher, ne plus prendre dans ses bras. Ne plus parler. Ne plus rien… Ton palpitant se serra lentement à l’agonie de ces pensées douloureuses. Etrangement, vos positions étaient assez similaires à présent. « T’excuse pas. J’ai rarement des personnes avec qui parler de ça. Qui peuvent comprendre ce que c’est… » Chacun son deuil. Mais vous aviez l’air d’être similaires dans vos réactions. Tu prenais une longue gorgée de whisky. « Ca va… en dehors de ma dépressive. » dis-tu avec une pointe d’amusement, parlant de ta dragone. « Est-ce que tu arrives à avoir des projets de ton côté ? »
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Mar 6 Juin - 21:39

Août 2018

Attentive, réellement intéressée, j’écoutais les confidences de Kesabel concernant sa meute. Je n’étais pas certaine de tout comprendre dans les détails, mais j’avais la prétention de pouvoir m’imaginer assez convenablement de quoi il s’agissait. Pour autant je ne souhaitais pas être indiscrète et me renseigner sur des choses qui ne me concernaient pas. Je devinais les lois lupines bien différentes de celles que je côtoyais habituellement, qu’elles soient humaines ou non. Car oui, j’avais l’habitude de discuter avec des centaures voire de temps en temps des selkies, mais jamais je n’avais eu affaire aux loups-garous… et à dire vrai, je n’étais pas certaine de vouloir m’en rapprocher. Non pas qu’ils me faisaient peur, j’étais de ces sorciers qui les acceptaient en tant qu’humain et non pas en tant que malade qu’il fallait absolument museler. J’étais de ceux qui appréciaient les bêtes, qu’importe leurs formes. Cela dit, je n’étais pas certaine de pouvoir me sentir à l’aise dans leur univers. Ma préférence se tournait indubitablement vers les dragons, et cela me fendait aujourd’hui le cœur. Parce que l’accident me revenait tous les jours en tête. Parce que j’étais prise dans un étau entre mes émotions et ma passion. Je plissais les yeux pour écarter ces sombres pensées et revenir au sujet de la conversation.

— C’est complexe… mais je suis sûre qu’avec toi, ta meute est entre de bonnes mains… ou bonnes pattes je ne sais pas. J’eus un petit sourire maladroit en coin avant de continuer. En faitl… ça m’évoque un peu la politique. J’imagine que chaque meute a ses mœurs et ses manières de faire ? Je réfléchis un instant avant de demander. Est-ce qu’il existe des conflits entre les meutes ?

Alors que je prenais place chez lui, je me laissais aller aux confidences de mon état actuel, de mon cheminement de pensées. Que faire ? Continuer dans la dragonologie ? Tout arrêter ? Accepter l’héritage familial ou m’enfuir et ne plus jamais revenir ? Cette dernière question souleva un autre douloureux souvenir. Le visage de Harper s’imposa devant mes yeux, m’obligeant à me mordre la langue pour m’empêcher de grimacer de douleur. Non, fuir n’était pas la solution, et j’avais tellement souffert du départ de mon ex-petite amie que je n’allais certainement pas faire subir ça à mes proches. Garder la tête hors de l’eau… oui, mais comment alors que j’avais les pieds lestés par un sac de pierres ? Et au final, à qui pouvais-je me confier ? Je n’avais personne.
Harper avait coupé les ponts. Mes parents pleuraient également mon frère. La relation avec ma sœur s’était encore plus compliquée depuis l’accident. Arrondella était trop proche de Harper pour que je me confie à elle d’une quelconque manière, et je n’avais pas spécialement de nouvelles de Rory.
En bref, la solitude que j’avais si bien entretenue durant toute ma vie devenait maintenant mon ennemi alors qu’elle avait toujours été mon alliée.
Mon métier que j’aimais tant et qui me rendait forte était aujourd’hui mon cauchemar. Un peu lasse, je regardais le whisky dans mon verre en lâchant un discret soupir.

— Tout s’est inversé. Ce qui était ma force est devenu ma faiblesse. Mes rêves sont devenus des cauchemars. Je n’ai plus aucun repère ni rien à quoi me raccrocher. J’ai la sensation d’être une naufragée en pleine tempête. Je ne sais plus où se situe le haut du bas, la gauche de la droite. Je me pinçais un peu les lèvres. Contrairement à toi, personne ne compte sur moi, personne n’a besoin de moi… je n’ai pas à tenir pour qui que ce soit. Je haussais les épaules, fataliste et indifférente. Si ça avait été moi, on ne me pleurerait certainement pas.

Y avait-il une envie suicidaire sous cette dernière confidence ? Peut-être. Mais c’était davantage le désespoir qui parlait, qu’une réelle envie de passer à l’acte. J’étais simplement perdue. J’eus un sourire ironique.

— C’est fou, quand on y songe, de constater que dans notre vie, tout ce qu’on construit ne tient au final que sur une seule chose, ou une seule personne. Et quand cette chose ou cette personne disparaît et bien… que reste-t-il ? Je levais des yeux un peu brillants sur Kesabel. Moment philosophie.

Petit trait d’humour dans une vaine tentative de dédramatiser la situation. Pour que ce soit plus simple à supporter, mais c’était comme poser un pansement sur une jambe de bois.
Je sirotais mon whisky, reconnaissante des paroles de Kesabel qui me demandait de ne pas m’excuser. J’eus un nouveau sourire triste, les yeux un peu dans le vague.

— Est-ce que tu as envie d’en parler un peu ?

Depuis le début, je parlais du décès de mon frère, et lui se contentait d’évoquer sa sœur sans jamais entrer dans les détails. Peut-être que s’il partageait davantage ce qu’il ressentait, s’il en avait envie et s’il s’en sentait capable, je trouverais quelques réponses.
Je soufflais d’amusement à sa petite remarque ironique concernant la dragonne, puis sa question me prit de court. Un peu décontenancée, j’ouvrais la bouche, comme si la réponse était une évidence, puis, réalisant que ce n’était en fait pas le cas, je refermais mes lèvres en fronçant les sourcils.

— Euh…

Laissais-je traîner sur le ton de la réflexion. Je cherchais. Je cherchais sincèrement. Mais en fait, le temps s’était arrêté depuis l’accident, et plus rien n’avait d’importance. La tête un peu penchée, je regardais un meuble au loin comme s’il allait me donner une réponse appropriée.

— Je… je crois que j’en avais avant, mais maintenant, c’est comme s’ils n’existent plus. Je n’arrive même pas à me souvenir de quoi il s’agissait. Du coup… je crois que non, je n’ai aucun projet. Je n’ai aucune envie de me mettre en couple, aucune envie d’avoir des enfants, je ne sais pas si j’ai envie de continuer à exercer en tant que dragonologiste, je n’ai pas envie de voyager… je fronçais les sourcils. Du coup, euh, non. Je n’arrive pas à avoir de projet. Rien ne me donne envie, là, comme ça. Je revenais sur lui, un peu intriguée. Et toi, tu en as ?

Est-ce qu’avoir des projets permettait la paix ? Était-ce la solution miracle pour lutter dans cette tempête ? Pour garder, justement, la tête hors de l’eau ?

 


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Abi & Kesabel
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Tu n’étais pas un grand bavard d’habitude. Mais Abigaïl avait cette douceur naturelle qui te laissait t’épancher facilement à ta plus grande surprise. Tu parlais rarement de toute cette complexité à gérer cette meute. Parfois tu te demandais même si c’est ce que tu avais vraiment voulu. C’était presque un travail à temps complet et écouter les autres se plaindre auprès de toi n’était pas ce que tu préférais. Pourtant un lien t’unissait à eux. Celui de la vengeance au départ. Les contrôler, les dominer après ce qu’ils avaient fait subir à ta sœur. Tu avais presque failli les détruire de l’intérieur. Cela avait été une de tes idées premières. Mettre un terme aux lubies de ses monstres. Mais si les anciens étaient des êtres innommables, les jeunes comme toi avaient l’espoir d’un avenir meilleur. C’est ainsi que de fil en aiguille, tu avais commencé à façonner ceux qui t’entouraient. Les plus vieux n’appréciaient pas les changements et tu t’en foutais bien. La tradition restait. Bien plus cadrée mais toujours aussi cruelle aux yeux du sorcier extérieurs à votre monde. Tu esquissais un sourire alors qu’elle disait qu’ils étaient entre de bonnes pattes. Tu n’en étais pas toujours certain. Tu faisais au mieux, te montrant fort, ne voulant laisser aucune faille transparaître. « Je n’y avais jamais pensé mais effectivement ça y ressemble. Il y a toujours des formes d’alliances pour conserver son territoire. D’autres qui veulent agrandir les leurs… » Tu marquais une pause avant d’ajouter avec une pointe d’amusement. « Je vais peut-être me présenter en tant que Premier ministre. J’aurais du succès. » Les loups-garous étaient assez mal vus. Tes ancêtres n’étaient pas étrangers à cette image. Tu y avais participé allègrement pour parvenir à tes fins. Ce n’était pas quelques années à être plus sage que tout allait être effacé. Surtout que tu n’étais pas le seul à jouer… D’autres se faisaient un plaisir de massacrer quelques sorciers les nuits où la lune était pleine.

« Pourquoi tu penses que personne ne compte sur toi ? Tu as encore de la famille, des amis. » De ton point de vue, elle semblait entourée mais tu ignorais certainement beaucoup de choses dans sa vie. Même si vous vous entendiez bien, vous ne vous étiez jusqu’à présent jamais épanché l’un avec l’autre sur vos tourments. « Mon exemple n’est certainement pas à suivre, mais ce besoin de venger Lua a été mon moteur. Je sais qu’elle n’aurait pas voulu que j’agisse ainsi mais elle n’aurait pas voulu que je m’effondre. Je crois que ton frère voudrait que tu finisses par te relever doucement. » Tu marquais un silence, cherchant un parallèle à ton histoire et la sienne. « Je ne pensais pas finir leader de cette meute. C’est un autre chemin qui s’est présenté. Peut-être que pour le moment, tu devrais t’éloigner des dragons sur le terrain ? Un peu plus dans la théorie ou encore dans la consultation comme tu viens de le faire avec moi. » Souffler, rester en lien avec sa passion mais regarder autrement, l’aborder d’une façon différente. C’était ainsi que tu finissais par projeter les choses avec le temps. Mais ce n’était pas arrivé du jour au lendemain.

Lorsqu’elle te proposa d’en parler, tu pris une gorgée assez longue de whisky. La liqueur ambrée brûla doucement ta langue avant de glisser dans ta gorge, laissant une trace chaude à son passage. Avais-tu envie d’en parler ? Etait-elle prête à entendre ce que tu avais fait ? Tes proches savaient ce qu’il s’était passé. Tu n’avais plus besoin de le dire à voix haute. Etait-ce une facilité finalement ? De ne plus avoir à le dire ? Tu observas ton verre avant de relever les yeux vers elle. « L’ancien alpha était mon oncle… C’est lui qui nous entraînait avec ma sœur les soirs de pleine lune. C’est lui qui l’a tuée. » Tu finissais finalement ton verre d’une traite. « Il a ramené son corps décharné au petit matin, le posant comme un vulgaire chiffon sur la table de notre salon. Elle était… méconnaissable tant la peur et la douleur marquaient son visage. Et mes parents… mon oncle… c’était comme si elle avait perdu une partie de jeu. Un game over sans try again… Une bagatelle. Ma colère, ma haine… elles ont fini par prendre le dessus sur ma peine. Je ne voulais plus qu’une chose, la venger. Alors j’ai préparé mon plan… je devais devenir le plus fort, le plus violent… Et la nuit de ma transformation, j’avais pris un couteau. J’ai survécu le temps imparti quand mon oncle a plongé ses dents dans mon épaule, ma lame a transpercé son ventre sur toute sa longueur… » Tu attrapais la bouteille de whisky et t’en resservais, proposant à Abi si elle en souhaitait de nouveau. Tes prunelles glissèrent sur son visage épiant ses réactions. Te concentrant sur tes sens pour tenter d’écouter si son cœur s’emballait de peur face à tes révélations. « Mon père a pris les commandes et quand il est mort ça a été mon tour. Je pensais que ça me ferait du bien, mais comme tu le vois, je n’arrive pas à faire mon deuil… »

Tu détournais un peu la conversation en parlant de projet. « Tu voulais faire quoi avant ? » Est-ce que tu avais des projets toi ? C’était également une bonne question. « J’ai deux axes différents. Mes dragons… où je suis seul avec eux et c’est ce que je préfère. Et la meute. Le projet c’est de les garder tous vivants, c’est déjà pas mal, non ? » dis-tu avec un léger rire.
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Dim 27 Aoû - 11:24

Août 2018

Je ricanais à l’idée de voir Kesabel se proposer comme Premier ministre. Le pire, c’était qu’il serait bon, j’en étais persuadée. Certes, il n’avait peut-être pas la fibre sociale recommandée, mais je n’étais pas certaine que les Premiers ministres en place en avaient beaucoup non plus. Le pouvoir de la politique n’était-il pas de nous mentir de manière éhontée pour attirer davantage d’électeurs ? J’avais l’illusion de croire que ce n’était pas le cas pour Kesabel, il était plus… vrai, et sa nature de lycanthrope devait y être pour beaucoup. Je l’imaginais davantage sortir les crocs et les griffes pour se faire entendre (et respecter) plutôt que de parlementer plus ou moins poliment avec ses rivaux. En cela, il avait gagné mon respect et mon affection, car s’il m’avait envoyé sur les roses à l’époque, je l’avais apprécié, car, justement, il n’avait jamais fait de faux semblants avec moi. S’il y avait bien quelque chose que j’abhorrais, c’était le mensonge.

— J’en suis certaine.

Concédais-je, toujours amusée de le voir diriger le monde sorcier britannique. Un loup-garou aux commandes, ce serait une première, et ce serait un changement extraordinaire dans les mentalités. Un changement que je désirais ardemment assister, plutôt que cette guerre qui nous pendait aux nez avec le Blood Circle et les Mangemorts.
Je poussais un petit soupir.
Ce poids qui lestait ma poitrine ne s’allégeait décidément pas, même en discutant. C’était pourquoi je n’aimais pas me confier, cela ne faisait que retourner le couteau dans la plaie, mais Kesabel avait vécu la même chose que moi, il avait aussi perdu un être cher, et j’avais l’illusion de croire que de lui confier mes maux, il saurait, à défaut de trouver les mots justes, comprendre l’étendue de ma douleur. Il était hors de question que je me laisse aller dans les bras de ma famille qui, elle aussi, avait perdu un fils et un frère. Quant à mes amis…

— Hé bien… Kyle était le garçon parfait. Idolâtrie d’une petite sœur ? Il était intelligent, joyeux, volontaire et travailleur, et si j’ai aussi ces qualités, sans fausse modestie bien sûr, lui, il possédait cette facilité à discuter avec les autres, à aller de l’avant. Il avait des ambitions et des projets. Il savait s’entourer des bonnes personnes et il savait les diriger. Je me pinçais les lèvres. Je ne suis rien de tout ça. Je suis timide, renfermée et mes méthodes en dragonologie ne cessent d’être confrontées aux vieux imbéciles au Ministère. Je ne sais pas comment défendre mes projets et je n’arrive pas à parler aux gens. Je faisais tournoyer mon verre de whisky pour y observer le contenu, mélancolique. Je vais hériter de l’affaire familiale alors que c’était Kyle qui y était destiné depuis toujours. Ils ne le disent pas, mais je vois bien dans le regard de mes parents qu’ils sont déçus que je sois encore vivante et non pas Kyle. Interprétation ? Harper est partie et je ne collectionne pas les amitiés, comme tu le sais… ma gorge nouée m’empêcha de prendre convenablement mon inspiration. J’hoquetais. Sans Kyle, je suis complètement seule.

Je noyais mon chagrin dans une grande gorgée de whisky qui me fit toussoter un peu. Au moins, ça me dégageait la gorge. Malgré les bourdonnements qui battaient mes tempes, je parvenais à saisir le sens des paroles de Kesabel. Je fermais les paupières. M’éloigner du terrain… J’y avais déjà songé, mais cette perspective me rendait d’autant plus inutile que je me sentais déjà. Pour autant, approcher un dragon de trop prêt maintenant me paralysait de peur. Non pas que je craignais de me faire blesser, mais parce que les images de l’accident me revenaient sans cesse devant les yeux, et je revivais en boucle, de manière d’autant plus vive et douloureuse, ce qui s’était passé. J’étais littéralement devenue inutile sur le terrain.

— Pourtant, je ne sais faire que ça.

Soufflais-je, un peu désemparée. Et c’était vrai. Bien que j’ai aussi un certain talent pour la botanique, je vivais pour les dragons depuis ma naissance et il n’avait jamais été question que je fasse quelque chose d’autre dans ma vie que dragonologiste. Alors quoi ? Je pourrais finir à faire de l’administration au Ministère, mais cet endroit me donnait la chair de poule tant je le trouvais austère avec ces grands murs noirs. Être enfermée toute la journée ne me convenait pas. Je pouvais éventuellement assister ma mère dans son cabinet de vétérimage, mais je n’étais pas certaine de pouvoir l’accepter comme ma supérieure malgré toute l’affection que je lui portais. Aussi, si je m’éloignais de la dragonologie, j’imaginais sans mal le regard empli de déception de mon père, qui alors, comptait sur moi pour reprendre les affaires familiales. Après tout, le médaillon de la famille, que mon frère avait porté depuis ces dix-huit ans, ornait maintenant mon cou. J’avais accepté la tâche en toute conscience de cause, pour autant, je ne m’en sentais pas les épaules pour le moment. Je me passais une main sur le visage en m’adossant à la chaise, un soupir bruyant traversant mes narines.

— Je ne sais pas… je pourrais continuer mon projet sur le comportement des dragons, mais cela me demande des observations sur le terrain et dans mon état…

Je ne terminais pas ma phrase. La mort ne m’effrayait pas, pour autant, je n’avais pas le désir d’accepter son étreinte malgré ma profonde dépression. Il y avait toujours une étincelle de volonté de rester en vie qui subsistait au fond de mes entrailles. Mais, j’ignorais pourquoi.

— Tu as raison, je dois me retrouver un but, mais pour le moment, je n’en vois aucun. Reprendre l’affaire familiale reviendrait à oublier la mémoire de Kyle. Je ne me sens pas prête pour ça… Alors quoi ? M’enfermer au Ministère ? Hors de question. Peut-être que je devrais retourner dans un pays éloigné, mais je veux être proche de ma famille si des conflits éclatent, je suis revenue pour ça après tout… Un vague sourire aux lèvres, j’appuyais mon coude sur la table et enfonçait mon menton dans le creux de ma main avant de lancer, ironique. Je vais me proposer comme prof à Poudlard, tiens.

Ce serait le pompon. Moi, petite Abigail farouche, timide et qui a du mal à élever la voix, professeure. Voilà une image aussi saugrenue que Kesabel Premier ministre.
Et, puisque nous étions sur le ton de la confidence, et que trouver une oreille attentive en Kesabel m’avait quelque peu soulagée, je lui proposais de faire de même avec moi. J’avais la prétention de croire qu’il me faisait assez confiance pour cela. J’ignorais si la chose lui pesait trop ou si c’était une véritable marque de confiance envers moi, mais il se confia alors. Attentive, les lèvres à peine trempées dans le whisky, je l’observais tout en écoutant son récit. Plus il se confiait et plus mes sourcils se fronçaient. Son oncle semblait être un personnage absolument horrible. Je sentais mon cœur s’éteindre sur la conclusion terrible.
Je lui tendais mon verre, le visage sombre. L’image que j’avais de Kesabel n’était en rien changée malgré ces confidences. J’avais toujours su qu’il avait fait quelque chose de terrible, et si je n’approuvais pas cette manière d’agir, je pouvais comprendre pourquoi il l’avait fait. Le désir de vengeance pouvait étreindre n’importe quel cœur. Même le mien. Car oui, ce dragon, j’avais hésité à le tuer dans l’intention de me venger. Je n’ai jamais pu m’y résoudre.

— Ça a dû être terrible… je suis désolée que tu aies eu à vivre ça. Je pris un instant pour choisir mes mots. Je n’ai que ta version des faits, mais… je ne suis pas certaine que tu ne sois pas un minimum soulagé. Je veux dire… cet oncle, comme tu me la dépeins, semblait être un horrible personnage. Je crois que le monde des lycans ne s’en porte que mieux, car c’est ce genre d’individus qui donne une mauvaise image à ce que vous êtes, je me trompe ?

Timidement, j’osais croiser son regard. Du monde des lycans, je n’en connaissais que des bases. Je m’étais renseignée un peu dessus, car il s’agissait de créatures, de sorciers atteints d’un mal incurable, et forcément, c’était quelque chose qui me fascinait et qui ne m’effrayait nullement. Non, malgré ses confidences, je n’avais pas peur de Kesabel, et mon attitude resterait inchangée. Sans doute que mon anesthésie du moment, à cause du deuil, m’aidait à accepter plus facilement la fatalité.
Je rendis son sourire alors qu’il m’expliquait sa manière de vivre aujourd’hui, avec ses dragons et sa meute. Au moins, il avait quelque chose à quoi se raccrocher. Les lèvres pincées, je réfléchissais un peu avant d’ouvrir la bouche.

— Avant… avant, je voulais montrer au monde entier qu’il ne sert à rien d’user de la manière forte pour amadouer un dragon et le soigner. Ma thèse universitaire était tournée en ce sens et mes recherches actuelles continuent à rassembler des preuves. Mais personne ne m’écoute, comme toujours. Alors, à quoi bon ? Avant, j’avais le projet de voyager, partir à la rencontre de tous les dragons de la Terre, de tous les étudier pour trouver les points similaires de leurs comportements, de pouvoir répertorier tout cela… Je ricanais à ma propre bêtise. Billevesées.

Une gorgée de whisky enflamma ma gorge. J’eus ce froncement de sourcils typique en le sentant descendre mon œsophage, puis je repris.

— Maintenant, mes parents comptent sur moi pour l’affaire familiale, mais je n’ai pas les épaules. Donc… je ne sais pas. Je ne sais plus.
 


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Visiblement, Abigail était aussi convaincue que toi quant à tes capacités à devenir le Premier ministre de ce pays. Tes méthodes bourrues risquaient de ne pas passer auprès de la majorité de la population. Et encore, il aurait fallu que tu veuilles t’emmerder avec ces personnes ce qui était loin d’être le cas. S’occuper de ta meute, c’était déjà bien suffisant quand tu voyais les embrouilles stupides qui pouvaient se créer entre deux familles. Tu te souvenais d’un évènement comme si c'était hier. A tes yeux, cela te semblait stupide, mais tu savais que tu devais intervenir pour éviter qu'il ne dégénère en une bataille sanglante. Deux familles de loups étaient sur le point d'en venir aux griffes pour une querelle vieille comme le temps. Personne ne se souvenait vraiment de la cause originelle du différend, mais cela n'avait plus d'importance.
Tu t'étais dirigé vers le lieu de rassemblement habituel, une clairière au cœur de la forêt. Les membres des deux familles étaient déjà présents, se lançant des regards furieux. Ils attendaient tous une action de ta part et tu avais trouvé une idée qui effectivement aurait pu être digne d’un politicien.Une cérémonie de réconciliation. Deux représentants devaient venir le lendemain et jurer de mettre fin à cette rivalité sinon tu les renvoyais de la meute. La réconciliation ou l’exil. Qu’importe leur ancienneté dans la meute. Qu’importe si cela faisait des années qu’ils évoluaient avec vous. Cet ultimatum avait plutôt bien marché. Tu avais ricané. Tu t’imaginais bien faire ça avec les anglais. Tu n’es pas d’accord ? Tu dégages.

Tu écoutais ensuite Abigail parler de son frère tout en buvant une gorgée de whisky. Ce qui était certain c’est qu’elle semblait l’admirer. Avec une pointe d’idolâtrie ? « Tu penses vraiment que tes parents voudraient que tu sois morte ? » Finis-tu par demander après quelques secondes. Tu ne connaissais pas réellement ses liens avec sa famille mais est-ce qu’elle était dans le vrai en usant de ces propos ? Tu savais que ta mère se fichait bien que tu sois en vie ou non, cela était certain. Elle vivait toujours dans ce taudis qui t’avait vu grandir, éloignée de tout, dans une pauvreté certaine. Mais tu savais pourquoi vous en étiez arrivé là, et cela existait bien avant la mort de Lua. Sa disparition avait aggravé la situation. « T’es restée trop longtemps dans l’ombre de ton frère. La lumière te fait peur mais je suis certain que tu vas t’en sortir. » Finissais-tu par ajouter. Comme tu étais resté longtemps derrière ta sœur. Qui t’avait protégé du mieux qu’elle le pouvait dans cette famille déséquilibrée. Quand elle avait perdu la vie cette nuit là, toute l’attention s’était finalement tournée vers toi. Il fallait que tu réussisses le rituel. Quelle honte si un Greyback n’arrivait pas devenir un loup… « T’as le droit à une pause aussi. » Faite ce que je dis, pas ce que je fais. Tu étais loin d’appliquer ses propres conseils à ta personne. Clairement tu avais foncé tête baissée. « Une petite jeune, t’aurais la côte avec les gamins je suis sûr. Ca changerait des éleveurs de veracrasses en plus. » dis-tu amusé alors qu’elle parlait de devenir prof. Ce n’était pas une idée si déconnante.

Quand la conversation dévia sur ton histoire, tu hochais la tête. Oui, ton oncle était un connard sans nom et il avait participé à véhiculer des horreurs sur les loups garous. Tu soufflais. « Il y a eu une période où je n’ai guère été mieux. » Mais il fallait que tu le fasses pour grimper dans cette meute. Tu t’accrochais à cette excuse, car tu avais pu gagner du pouvoir grâce à cela. Asseoir ta position. Etre le responsable, tu ne l’avais pas anticipé à la mort de ton père, des années plus tard. Beaucoup le murmurait, mais tu n’étais pas certain d’en avoir envie. Tu te foutais des autres. Bien trop concentré sur ton vécu, ta douleur. Alors quand cela s’est manifesté, que la magie a décidé que c’était bel et bien toi, tu as pris cette opportunité. Pour mieux détruire de l’intérieur ces ancêtres qui assombrissaient la vie de beaucoup trop de personnes. « Pourtant ça marche. Je t’ai bien fait venir. C’est que j’ai confiance en tes connaissances. » Tes dragons étaient une échappatoire. Tu trouvais refuge auprès de ces reptiles volants. Peut-être qu’avoir un animal en toi facilitait ta connexion avec eux, tu n’en savais rien. Mais jamais tu n’avais usé de mauvais traitement sur eux pour parvenir à t’en occuper. Ceux qui te demandaient des larmes pouvaient aller se faire foutre. Tu n’allais pas malmener ces créatures pour qu’ils réalisent des potions en tout genre. « Envoie-les chier. Ca se voit que tu as pas envie de reprendre cette affaire. C’est pas une question d’épaules.  » Ca t’allait bien de dire ça alors que tu avais récupéré toute une meute gérée par tes ancêtres depuis des années. Mais avec le temps tu avais appris à aimer ce que tu faisais avec eux.
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Août 2018

Ma bouche s’étira en une grimace à la question de Kesabel. Est-ce que je pensais vraiment ce que je disais ? Est-ce que, vraiment, mes parents voudraient me voir morte ? Au fond de moi, tout au fond, je savais que non, je le ressentais, là, dans mes tripes. Mais mon désespoir du moment additionné à de vieilles blessures d’enfances me rendait de mauvaise foi. Rien de grave dans le fond, j’avais eu une enfance heureuse en comparaison à celle de Harper ou de Rory, je n’étais pas à plaindre je le savais, mais la famille idéale n’existait pas. J’avais souffert d’être la cadette d’un frère bien trop doué alors que, paradoxalement, je l’adorais. Mais il n’y avait pas que ça. Ma santé pesait lourd dans la balance. Une santé fragile qui pouvait basculer du jour au lendemain sans crier gare. Quelque chose que Kesabel ne connaissait pas. Lui, plus que les autres, je ne désirais pas voir dans son regard cette lueur qu’on tous ceux qui savent. Un genre de pitié.
Un peu dépitée et mal assurée, je poussais un soupir comme toute réponse. Je ne savais pas, ou plutôt, je ne voulais pas savoir. Je préférais me renfrogner dans mon orgueil blessé plutôt que d’admettre que mes parents seraient effondrés de la même manière qu’ils l’étaient avec Kyle, si ça avait été moi. Malgré cela, je devais bien admettre que Kesabel avait raison sur un point : j’étais restée trop longtemps dans l’ombre de mon frère.
Je n’avais jamais cherché à être le centre de l’attention, au contraire, j’étais passée maîtresse pour me fondre dans la masse, d’ailleurs, j’excellais dans les sortilèges de camouflage et de défense, et ce n’était pas uniquement motivé par mon professionnalisme en dragonologie. J’aimais me cacher des autres, je ne voulais pas attirer l’attention, parce que j’étais maladivement timide. Ceux qui avaient su me voir malgré tout se comptaient sur les doigts de la main, et Kesabel en faisait partie. Je hochais la tête en m’appuyant misérablement contre le dossier de ma chaise.

— Tu as sûrement raison. C’est juste que je ne suis pas combattive de nature et devoir sans arrêt faire valoir mes droits au Ministère alors que j’ai le même diplôme que tout les autres, j’ai même plus de pratique que la plupart, et ça me… Je grommelais. C'est injuste.

Je savais que pour faire entendre ma voix et mes nouvelles méthodes, je devais taper du poing sur la table. Je l’avais fait jusque-là et apparemment avec brio puisque j’avais réussi à convaincre plusieurs de mes collègues dragonologiste, dont Kesabel, même si avec lui, je n’avais pas eu besoin d’argumenter bien longtemps puisqu’il utilisait déjà les méthodes douces et positives. Mais voilà, aujourd’hui, dénuée de mon frère, je ne me sentais plus capable de rien. Avec lui, je croyais pouvoir déplacer des montagnes. À présent je ne me sentais à peine capable de me déplacer moi-même.
Un sourire ironique étira mes lèvres alors que ses paroles étayaient mes propos. Je m’imaginais bien en jeune professeure avec des méthodes tout à fait nouvelles, proche et à l’écoute des élèves. Je me sentirai capable de les gérer comme une enseignante qui se voudrait à l’écoute, mais avec une autorité naturelle.

— Et pourquoi pas directrice pendant que tu y es ?

Un ricanement m’échappa. Le tableau était vraiment idiot et improbable. Alors… pourquoi est-ce que l’idée s’accrochait et refusait de s’en aller ? Je fronçais les sourcils, un peu décontenancée.  
Dans une tentative d’écarter tout ça, je pris une grande rasade de mon whiskey en levant les yeux sur mon interlocuteur alors qu’il m’avouait n’avoir guère été mieux que son oncle. Un fait qui ne m’étonna guère et qui ne suscita donc aucune espèce de réaction de ma part. J’avalais tranquillement le liquide ambré qui me brûla agréablement la gorge, les yeux posés sur mes doigts fins. Après un instant de réflexion, je brisais le silence entre nous.

— Bah… j’imagine qu’on ne peut pas toujours échapper à nos origines… et dans le fond… ce que tu as fait appartient au passé. Je fronçais un peu les sourcils en choisissant mes mots. J’ai remarqué que la nature humaine apprécie chercher les défauts chez les autres plutôt que de porter attention à ce qui se fait de bien. J’ai décidé de m’accrocher à cette idée… qu’il y a toujours du bon en quelqu’un. Se rendre compte de ses mauvais actes passés et vouloir changer, c’est ce qui importe le plus, je crois.

Est-ce que je me raccrochais à quelques illusions ? Dans mon état ce n’était pas impossible et pourtant, j’en étais profondément convaincue. Après tout, je ne voyais pas la bête dangereuse en regardant le dragon, mais simplement un animal incompris. Je ne voyais pas Kesabel comme un loup sanguinaire, mais comme une personne avec un potentiel différent. Je plantais mes iris sombres dans les siennes.

— Si, à présent, tu cherches à protéger ta meute et te repentir de ce qui a été, alors, c’est déjà beaucoup. Je fis la moue. Je ne suis pas certaine que les braconniers à l’origine de notre excursion aient quelques remords que ce soit concernant mon frère…

L’ongle de mon index longea les lignes sinueuses du bois de la table. Petite sorcière qui refusait de se laisser emporter par le mal sous toutes ses formes. J’étais drapée d’un optimiste parfois déconcertant. Je le tenais de Harper. Son visage m’apparut et m’arracha un soupir, alors, je noyais mon chagrin dans une nouvelle gorgée de whiskey.
Les paroles de Kesabel me firent l’effet d’un pansement sur mon cœur blessé. Je lui souris avec tendresse.

— C’est gentil, merci.

Pour lui comme pour moi, les dragons étaient un moyen de fuir la réalité. Nous trouvions refuge en leurs compagnies, en les étudiants et en cherchant à prendre soin d’eux. Je ne pus empêcher le souvenir du vent écossais venir caresser mes cheveux et refroidir mes joues. Un court instant, je crus entendre l’océan frapper les îles des Hébrides. Depuis le berceau, j’étais entourée de dragons, surtout des Noirs des Hébrides, je respirais dragon et je ne jurais que par eux. J’appréciais ces longues randonnées dans la nature avec ma famille dans le but de découvrir de nouvelles nichées. Mon père avait des connaissances qu’aucun livre ne pourrait répertorier. Ma mère avait le talent de la douceur et de la discrétion. Mes parents s’étaient évertués à nous transmettre tout cela, à Kyle et à moi. Ils avaient réussi… en partie. Je chérissais ma famille, je chérissais mon travail de dragonologiste et je chérissais mes dragons. Mais aujourd’hui, je n’avais plus foi en rien.

— Pourtant, j’aime travailler avec eux. Le travail là-bas est fascinant. Je frottais mon visage avec ma main gauche dans un soupir. Comme dit, je crois surtout qu’en ce moment… Je ne sais plus où j’en suis et je ne sais plus de quoi j’ai envie. Reprendre l’affaire familiale serait un honneur, mais ça me donnerait aussi l’impression de marcher sur les plates-bandes de Kyle. Je sais, c’est con… mais c’est mon sentiment. Enfin… je verrai avec eux. Ils ne peuvent pas me forcer la main de toute façon.

Je n'étais pas rebelle dans l'âme. Envoyer chier mes parents n'était pas dans mes habitudes, loin de là. Nouvelle gorgée d’alcool pour me faire avaler mes propres paroles. J’étais majeure et vaccinée, et même si j’avais le sens du devoir, mes parents ne pouvaient en rien m’obliger à reprendre l’affaire familiale. Il y avait encore assez de MacFusty de la seconde branche pour récupérer tout ça… mais cette idée de me faisait mal au cul, comme si on me volait quelque chose qui m’appartenait à moi et à moi seule. Encore des émotions contradictoires que je ne parvenais pas à démêler. Je me redressais un peu sur ma chaise.

— Toi, tu… tu as bien été obligé de reprendre les affaires de ta famille non ? Comment ça s’est passé ? Je veux dire… tu as l’air d’apprécier maintenant… ou alors, je me trompe ?

Les rôles s’inversaient. Si j’avais été le guide de Kesabel depuis la disparition de sa sœur, aujourd’hui, il était le mien. Peu recommandable, j’en avais conscience, mais je savais aussi qu’il y avait bien pire. J’avais confiance en lui.



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Abi & Kesabel
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Tu n’étais pas doué pour conseiller les gens. Écouter n’était pas vraiment ton fort non plus. Peu pouvait se vanter d’avoir ce genre de discussion avec toi. En vérité, tu te fichais souvent des autres. Rares étaient ceux pour qui tu portais un réel intérêt. Lex par exemple ou encore Euron. S’ils n’étaient pas des loups, ils faisaient partie de ta meute à tes yeux. Tu aurais tout fait pour eux. Concernant Abigaïl, c’était un peu différent. Si vous vous étiez perdus de vue, elle n’avait pas été du genre à te juger pour tes actes. Aussi répréhensibles pouvaient-ils êtres.

Tu laisses tes pensées errer parmi les ombres du passé. Le souvenir de ta sœur, jadis pleine de vie, résonne dans le silence de tes souvenirs. La violence de tes actes en tant que loup-garou te pèse parfois, une fureur incontrôlée qui a laissé son empreinte sur ton existence. La douleur de sa perte t'obsède, et par moments, dans les recoins sombres de ta conscience tourmentée, tu regrettes les moments où ta sauvagerie a pris le dessus. Les crocs de ton oncle l'ont arrachée à la vie, et la vision de sa vulnérabilité face à la cruauté de ce monde décadent hante tes pensées comme un spectre indomptable.

Tes griffes ont parfois été des instruments de destruction. Le souvenir de ta sœur apparaît comme une lueur fragile dans l'obscurité de ta culpabilité. Tu as cherché la vengeance avec une intensité dévorante, mais la réalité de tes actes te rattrape, laissant place à des échos de regrets au creux de ton être tourmenté. Le constat amer qu’avoir tué ton oncle n’a même pas soulagé ta peine. L'idée que ta sœur aurait pu être sauvée d'un destin si cruel persiste dans tes pensées. Son regard, teinté de terreur, ressurgit régulièrement, te rappelant que ta nature violente a contribué à la tragédie qui a marqué ta famille. La haine que tu as cultivée en toi, la recherche incessante de justice, se heurte à une réflexion plus profonde, une réflexion où le regret danse avec la fureur.

Abigaïl à tes côtés perçoit probablement la dualité en toi, entre la bête sauvage assoiffée de vengeance et l'âme tourmentée qui regrette les conséquences de ses propres actes. Un Kesabel déchiré entre la brutalité de sa nature lupine et la fragilité de son humanité perdue. Comment ce petit bout de femme peut rester là, chez toi, à attendre ton avis, tes conseils ? Cela te dépasse et pourtant tu joues le jeu parce qu’en dehors de la meute, cela n’arrive pas souvent. « Continue d’avancer comme tu le fais, avec de vraies convictions. A force, ils pourront plus ignorer ton travail. » Certainement plus facile à dire qu’à faire, ça tu en étais conscient. « Et comme je disais, prend ton temps. Tu viens de perdre ton frère. Le monde des dragons peut comprendre que tu as besoin d’être tranquille. » Ses parents inclus. Et si elle voulait tout balancer et devenir funambule dans un cirque, pourquoi pas ? A sa remarque pour être directrice, tu esquissais un sourire. « Je te dis de prendre ton temps et toi tu te vois déjà piquer le bureau du directeur. »

Quand elle te parla de toi, du passé, de s’accrocher à ce qu’il y avait de bon chez les gens, tu restais un instant silencieux. La mort de ton oncle a déclenché une succession inéluctable, plaçant le fardeau de l'Alpha sur les membres de ta famille. D'abord ton père, puis toi-même. La nature torturée qui anime ton être, la dualité entre l'homme et la bête, trouve un écho dans le rôle de responsable que tu portes maintenant. Malgré tes tourments intérieurs, tu as accepté cette responsabilité avec la détermination farouche d'un loup-garou. La protection de la meute est devenue ton devoir, une mission sacrée que tu ne peux négliger. Tes pensées se tournent vers les nuits sans fin où tu as veillé sur la meute, sentant le poids de la loyauté et de la confiance qui repose sur tes épaules. Chaque décision, chaque rugissement, reflète la volonté de protéger les tiens. Tu te surprends à ressentir une certaine paix dans cette responsabilité qui transcende ta propre douleur. Peut-être que dans la protection des autres, tu trouveras un chemin vers la rédemption que tu cherches dans l'obscurité de tes propres tourments ? « Disons que j’étais animé par ce besoin de me venger au départ, je pensais prendre le contrôle pour le mener à la baguette. Mais avant que je n’y arrive, c’est mon père qui a pris ce rôle. Et au fil du temps, mon envie a changé. J’ai changé beaucoup de règles inhumaines, viré les plus dangereux… J’ai déconstruit ce que j’ai haï pour mener les choses à ma façon. » Oh ce n’était pas parfait bien sûr, la meute n’était pas peuplée d’ange. Tu n’en étais pas un. Mais disons qu’à tes yeux, tu avais fait un ménage suffisant pour détruire ce qui avait été et t’imposer. « Tu as besoin de recul toi aussi, pour savoir quoi faire. C’est pas maintenant que tu auras une illumination. Laisse le temps au temps. »
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Lun 15 Jan - 15:44

Août 2018

J’avais le cœur dans un étau, le cul entre deux sièges et j’étais prise entre deux feux. La sensation, pour le moins pénible, m’empêchait de rester convenablement en place sur ma chaise malgré la tristesse qui ployait mes épaules. Je changeai d’appui, je remuais les jambes, les croisaient, les décroisaient. Toute l’agitation intérieure que je ressentais se manifestait quelque peu à l’extérieur. Un parallèle qui attira mon attention puisque je me sentais plus morte que vive.
Harper partie, Kyle décédé, je n’avais plus personne à qui me raccrocher, je me retrouvais complètement seule et désorientée, dans la nuit d’une vie qui ne voulait pas de moi depuis la naissance. Ma maladie me le rappelait tous les jours. D’ailleurs, c’était un miracle que je ne sois pas en train de vomir mes tripes présentement. Comme si l’appel de Kesabel me permettait encore de marcher, ou tout le moins, d’avancer, plutôt que de m’arrêter et de m’abandonner complètement aux ténèbres.
La nourriture n’avait plus aucune saveur et le monde perdait ses couleurs. Je voyais tout en noir et blanc. Pourtant, cet instant, figé dans le temps, chez Kesabel, me fit du bien, auprès de ses dragons, avec cette odeur si caractéristique qu’ils trainaient derrière eux, et avec cet échange de confidences sacrées. N’importe quel sorcier aurait pu être scandalisé des mots échangés à cette table, et pourtant, nous étions là, à cœur ouvert, à révéler nos plus sombres secrets. J’aurais pu prendre la fuite en apprenant qu’il était un loup-garou, chef de meute qui plus est. Au contraire, Kesabel me fascinait d’autant plus. Il aurait pu s’alarmer de mon attitude négligée et abattue, presque suicidaire, et pourtant, il n’avait rien stigmatisé. Nous ne nous traitons pas comme des gens malades ou différents. Nous nous traitions comme nous voulions être traités : à notre juste valeur, purement et simplement.
J’esquissais un sourire amusé quant à sa remarque sur la direction. Je dirai même qu’un rebond de souffle avait soulevé ma poitrine, comme un rire coincé. Un rire douloureux, comme si j’avais oublié ce que c’était que de rire. D’un hochement de tête dans sa direction, je reprenais une gorgée de whiskey.

— Touchée. Mais tu ne me reprocheras pas d’être ambitieuse au moins une fois dans ma vie.

Autant pousser la plaisanterie jusqu’au bout. Je n’étais absolument pas une personne ambitieuse, ou en tout cas, aucunement carriériste. Je ne cherchais pas la gloire ni la richesse. Seul le désir de vivre en autarcie avec la nature et les dragons m’intéressait… et davantage aujourd’hui. Comme si c’était la dernière chose qui me maintenait en vie.

— Du temps…

Répétais-je comme une litanie alors qu’il me confiait un peu sa charge de travail avec la meute. L’affaire familiale. Et quelle affaire… Il avait dû tout restructurer, il avait pris sa place en s’imposant, il avait assis son autorité et avait fait honneur à tout ceux de sa meute en faisant fit de la fierté de sa famille et de toutes les atrocités traditionnelles qu’ils avaient. Encore une fois, je mesurais à quel point ma vie avec Kesabel était différente même s’il y avait des similitudes. Ma vie était bien plus tranquille, bien plus simple. Je n’avais pas à tout restructurer, je n’avais pas à m’imposer, ma famille n’était pas mon ennemie, les MacFusty restaient soudés aussi bien dans la vie privée qu’au travail.
Mais trop noyée dans ma peine, je m’isolais et refusais tout contact avec eux pour le moment parce que je ne pouvais pas supporter leur peine en plus de la mienne. Je devais m’occuper de moi, et c’était quelque chose que je devais faire seule… ou tout le moins, pas en leur compagnie.
Alors, reprendre l’affaire du clan…
Un soupir traversa mes lèvres alors que mes épaules s’affaissèrent davantage.
Du temps.
Du temps pour prouver l’efficacité de mes méthodes au sein de la communauté des dragonologistes. Du temps pour faire mon deuil. Du temps pour les affaires familiales. Du temps pour la réconciliation. Du temps pour l’avenir.
Mais quel avenir ?
Sans nul doute un avenir sombre et tumultueux dont j’ignorais la fin bien que j’en ai une vague idée. Plus rien n’avait d’importance.
Après un maigre sourire triste à cette pensée, je relevais les yeux vers Kesabel.

— Merci pour tout ce que tu as fait pour moi aujourd’hui. Je ne vais pas te prendre plus de temps… mais n’hésite surtout pas à me rappeler si jamais il n’y a pas de changement avec la dragonne. On essayera d’autres pistes. Je vais tout consigné comme ça on aura une trace de nos recherches, qui sait, ça peut être utile.

Sans grande conviction, je terminais mon verre puis me relevais.

— Encore désolée de m’être un peu épanchée… Ce n’était pas mon genre de le faire et il le savait. N’hésite pas à me contacter si tu as besoin de quoique ce soit.

Le sous-entendu était clair.



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Sam 3 Fév - 22:13

Abi & Kesabel
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Tu ressens le poids des paroles prononcées, la douleur palpable dans l'air alors que la tristesse et la détresse s'entremêlent. Tu gardes un visage impassible, un masque de neutralité qui dissimule les émotions tourbillonnant en toi. Tu n’as jamais été un fin conseiller. Rarement tu es celui qui tend l’oreille pour écouter les autres s’épancher. Toi même tu as tendance à tout garder pour toi. Malgré tout, un sourire en coin se dessine sur tes lèvres, teinté d'une nuance d'amusement. Ton regard, d'un ambré profond, ne dévie pas de l'interlocutrice. « L'ambition, une compagne parfois capricieuse, mais elle donne un sens à nos actions. » Pour un ancien Serpentard, il fallait reconnaître que cette qualité n’était finalement pas étrangère. Tu étais parti du gamin pauvre en haillon, au jeune homme craint par tous, pour finir chef de la meute qui t’avait vu grandir. Si tu prenais quelques instants pour regarder le chemin parcouru, il était évident que tu avais gravi les échelons par la force d’un mental déterminé. Mais était-ce réellement l’ambition qui t’avait guidé ? La réponse était non. Ta place, elle était arrivée entre tes mains suite à ton besoin de vengeance. C’était elle qui avait guidé chacun de tes gestes jusqu’à présent. Et tu étais dans un brouillard complet quant à tes pensées à ce sujet. Dans le fond, tu voulais venger Lua. Tu l’avais fait. Mais ta souffrance à toi, elle était toujours là. Insidieusement enfouie au creux de tes entrailles et elle se manifestait régulièrement sans que tu ne parviennes à le maîtriser.

La profondeur de tes paroles résonne dans l'atmosphère silencieuse. Pourtant, malgré ton vécu, tu comprends cette recherche de quelque chose de plus, d'une raison de continuer malgré les épreuves. La quête de sens, une constante dans la vie de chacun. Du temps. Les mots répétés comme une litanie expriment le besoin impérieux d'une pause, d'une respiration dans cette course folle que représente la vie. Tu hoches la tête, reconnaissant tacitement la nécessité de prendre le temps nécessaire. « Le temps, une denrée précieuse et fugace. Il peut être notre allié ou notre ennemi, tout dépend de la manière dont nous l'apprivoisons. »

Le récit de la charge de travail avec la meute, de la gestion de l'affaire familiale, résonne en toi. Les responsabilités qui pèsent sur les épaules, les choix difficiles à faire pour préserver l'unité et la survie de ceux qui te sont chers. Dire qu’au départ, en prenant cette place, tu voulais tous les détruire pour la perte de ta sœur. Tu ne savais pas réellement quand tes convictions avaient mué. Tu savais que tu avais compris le plein pouvoir que tu avais quand tu avais imposé des changements drastiques sans que personne ne s’y oppose. Alors au lieu de t’acharner dans la voie mener par la mort, tu t’étais dit que tu façonnerais la meute à ta façon. N’en déplaise à certain, c’était même pour ton plus grand plaisir. Tu observes avec attention son expression, sentant le poids de la gratitude dans ses paroles. Ton regard ambré ne fléchit pas, mais une légère inclinaison de tête exprime ton acceptation. Tu n’es vraiment pas habitué à ce rôle. Encore moins à recevoir des remerciements parce que tu as été attentif auprès de quelqu’un. Auprès des lupins que tu encadres, c’est normal que tu les protèges et les guides. Rare sont les mercis. Et souvent, les reproches prennent leur place. Quand tout va bien, personne ne se manifeste. A l’inverse, tu es assailli par les contestations… Tu finis par souffler, perdu dans tes pensées et tu réponds à Abi. « Aucun besoin de remerciements. Nous sommes liés par des circonstances qui dépassent notre compréhension. Nous continuerons à chercher des solutions, ensemble. Les dragons sont des créatures étonnantes, et je suis convaincu que nous trouverons un moyen de comprendre et d'aider la dragonne. » Elle se lève, exprimant ses excuses pour s'être épanchée, et tu inclines légèrement la tête en signe de compréhension et tu te lèves à ton tour afin de l’accompagner jusqu’à la porte de ta demeure. Il n’y a pas un grand chemin à faire mais cet espace te convient parfaitement. C’est ton refuge.
« Ne t'excuse pas. Parler de nos fardeaux peut être libérateur. Et je n'hésiterai pas à te contacter si besoin. Sois forte, et prends soin de toi. » En la faisant venir chez toi pour observer la femelle reptilienne, tu ne t’étais certainement pas attendu à ce que cela se termine ainsi. Tu avais parlé de tes pensées les plus enfouies comme tu l’avais rarement fait. Seule Lex pouvait se vanter de connaître la moindre de tes pensées. Abi en avait eu un aperçu aujourd’hui, aussi menu soit-il. Elle quitte la pièce, laissant derrière elle son odeur, et tu restes seul avec tes pensées, le poids de la nuit et de ses secrets enveloppant l'espace autour de toi.
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