Qui a des idées de naître en Janvier ? Franchement, les parents avaient carrément foiré lorsqu’ils avaient conçu les jumeaux. Il fallait les faire en Juin, pas en Janvier, ce fail intersidéral quoi. Alors oui, il est vrai qu’ils avaient pas non plus prévu les jumeaux de Lestang. Ce qui déjà est totalement honteux, ils auraient dû être hyper impatient de faire les perfections du monde. Mais en plus faut vraiment pas être doué pour se louper sur ce genre de détail et tomber enceinte… pour sûr qu’ils avaient foiré volontairement les parents de Lestang ou alors c’était à se demander comment des boulets pareils avaient pu faire des enfants aussi parfaits qu’Elise et Amaury… Quoi que, réponse évidente, ils avaient refilé leur cerveau à leur progéniture, c’était logique maintenant qu’Elise y réfléchissait. Il n’empêche que naître en Janvier, c’était quand même un mauvais calcul. Tous les ans c’était la même chose, un temps franchement discutable, une température rarement correcte.
Si les jumeaux avaient quand même réussi l’immense exploit de naître un premier janvier 2000, chose qui n’étonnait pas tant que ça quand on connaissait Elise et son désir d’être première partout. Qui se souvenait réellement de la date d’anniversaire ? Les gens ils avaient tous la même technique la bonne année = Anniv des jumeaux. Ça par contre, c’était un peu frustrant, c’est comme pour les cadeaux, à une semaine de noël… c’est tout pourri les gens ils ont pas le temps de refaire le stock d’argent. Ce qui expliquait qu’Elise n’avait toujours pas son guépard + sa chèvre des montagnes pour plus avoir à se fatiguer les jambes dans les escaliers.  Non mais parents tout pourris, ils n’avaient pas du bien lire la liste de cadeaux de trente pages de leur fille chérie, ça va ils en avaient qu’une et puis au pire ils offraient des fleurs à Amaury, c’est bien les fleurs et lui comme il était trop gentil, il arrivait à garder la face là où Elise aurait tout simplement jeté un coup d’œil à son frère l’air de dire, on est d’accord ils ont pété un câble. Ah mentir, pas de problème, elle savait faire mais des fois ça servait à rien surtout quand il y avait aucun avantage à la clé… non parce que mentir pour faire plaisir aux autres… puis quoi encore.

Pour une fois, ce n’était pas le premier janvier en lui-même qui était important, mais plutôt une lettre envoyée par un petit hibou très mignon, lettre plus que prometteuse. L’attente avait été longue, très longue et plusieurs fois elle avait fait la moue en constatant que le ciel demeurait gris. Saleté de ciel, il allait tout gâcher et Elise y tenait à cette journée, cette escapade loin de l’école et avec une personne qui, mine de rien commençait à être de plus en plus souvent avec Elise, comme si tout d’un coup chacune trouvait en l’autre son équilibre. Ça avait mis du temps, beaucoup de temps, mais la chose qu’en retirait Elise c’était à se demander comment elle avait fait pour passer à côté de ce plaisir d’être avec elle. Ah pas de doute les œillères de la demoiselle de Lestang étaient bien en place et pour une fois il n’y avait personne à accuser.
Le Jour J arriva beaucoup trop lentement pour Elise qui se pointa timidement vers une des fenêtres du bâtiment pour regarder le temps qu’il faisait dehors avant de débouler dans le réfectoire et de s’installer à côté de Sélénya, excitée comme une puce, oui dès le matin et de lui dire

« Pssst, c’est aujourd’hui et il fait beau ! On se retrouve où ? à quelle heure ? C’est toujours ok ? Coucou au fait !»

Heureusement pour le moral d’Elise et malheureusement pour celui de Sélénya qui devait au moins faire sa bonne action de l’année, la journée ne fut pas annulée et une fois qu’elle eut réponses à ses questions, Elise se releva aussi sec pour filer se préparer. Manger ? Prendre des forces ? Mais pourquoi faire ? Ah non il fallait être prête à l’heure. Et pour le coup Elise était plus que rapide, ah là les marches aucun soucis pour les gravir. Etre en retard ? Impossible pour le coup, c’était l’inverse à vrai dire, prête en temps record et au point de ralliement tout aussi en avance. Ce qui ne servait strictement à rien d’être vingt plombes en avance mais bon de toute façon, vu comme elle trépignait d’impatience, elle aurait sûrement soulée tout le monde.
Même Amaury aurait trouvé le moyen d’être gonflé par sa sœur qui était tout bonnement impatience. Ah non mais Sélénya avait tout intérêt à avoir bu beaucoup de caféine pour réussir à tenir avec l’excitée de service. Et encore, elle avait un avantage considérable que d’être une violente psychopathe – si si elle est violente Sélénya, Elise trouve en tout cas -  elle évitait déjà qu’Elise lui saute sur le dos, parce que très franchement la mistinguette en était capable. En plus ça faisait hyper longtemps qu’elle n’avait pas pique niquée… ou plutôt qu’elle n’avait pas pique niquée tout en sachant que rien ni personne ne viendrait essayer de la bouffer. Pas de pensées négatives aujourd’hui, on inspire, on expire et on essaie d’être détendue.

Echec total puisqu’à peine la silhouette de la blondinette avec qui elle allait passer la journée en vue, hop Elise était à nouveau au taquet et la rejoignait, chose totalement stupide puisqu’elle partait du point de rendez vous pour passer au même endroit moins d’une minute plus tard mais bon ce genre de détails, il valait mieux ne pas relever.
La traversée de la ville pour rejoindre le parc se fit cependant assez lentement parce que déjà à force de courir partout, et bien oui elle s’essoufflait, le cardio c’est toujours pas ça, mais surtout parce que Sélénya n’avançait pas vite – en même temps, on est d’accord ce serait stupide de courir – et qu’en plus elle portait les victuailles, un vrai chaperon rouge qui allait chez sa mère grand pour le coup. Sauf qu’elle n’avait pas le chaperon rouge et que si c’était pour manger juste un petit pot de beurre et une galette… oui ça craignait un peu, même si Elise était tellement ravie de passer du temps avec qu’elle aurait sûrement trouvé ça génial. En fait c’est simple, aujourd’hui tout était génial.

C’est donc dans un temps record pour Elise qui habituellement aurait clairement traîné la patte au bout de deux minutes de marches, aurait réclamé un taxi, aurait râlé vingt plombes parce qu’elle avait mal aux pieds, que les deux demoiselles arrivèrent dans le parc. C’est bon, elle avait pas parlé depuis au moins deux minutes, elle avait donc le droit de poser… un peu… de questions.

« On va où ? On fait quoi ? Tu ne veux toujours pas que je porte le panier ? Tu sais j’ai dit porter pas mettre mon nez dedans, je suis pas curieuse comme fille… pas trop… enfin d’accord un peu quand même. »

Non mais c’est vrai après tout, elle savait se tenir et elle n’allait pas fouiner dans le panier. Après tout c’est pas parce qu’elle avait posé au moins vingt fois la question pour connaître le programme, depuis qu’elle avait reçu la lettre que ça faisait d’elle une curieuse. C’était juste pour se renseigner et être prête à toute éventualité, parce que là, savoir qu’elle allait dans un parc elle avait pris son bonnet, alors que si Sélénya lui avait finalement lâché qu’elles allaient à la piscine, elle aurait prit son maillot de bain, voilà c’était de la curiosité bien placé !

Ah ça taclait direct ? Belle entrée en matière que celle visant à rappeler qu’Elise était la curiosité incarnée, enfin uniquement avec les gens qu’elle appréciait ou qui étaient utile, non parce qu’Adèle pour ne citer qu’elle n’avait pas le moindre intérêt aux yeux d’Elise et pourtant, elle était curieuse à son sujet. Pour ce qui était de Sélénya, il est vrai qu’Elise se montrait un peu curieuse, ce qui avait semble-t-il été remarqué par l’organisatrice de la journée et pourtant, vu le nombre de questions que se posait Elise en permanence, elle la ménageait du mieux qu’elle le pouvait, ayant la trouille que tout s’arrête brutalement entre elles deux. Ce n’était pas un manque de confiance envers son amie, uniquement envers elle-même. Que se passerait-il lorsque Sélénya reprendrait confiance en elle-même et qu’elle retrouverait son cercle d’ami d’il y a quelques années ? Elise était bien incapable de la suivre là-dedans continuellement parce qu’elle avait ce besoin de travailler assez souvent afin de se maintenir à un niveau qu’elle-même jugeait satisfaisant. Et en même temps, elle tenait à cette amitié et n’avait pas envie de la perdre, voulant au contraire la faire perdurer et pour cela, elle faisait attention à ne pas poser trente six mille questions, à toujours avoir des distances de sécurité convenable et apprenait même à éviter tout contact physique. Elle profitait de l’instant présent avec une immense satisfaction et ça devait certainement expliquer le fait qu’elle était enjouée à tout instant d’être à ses côtés, de faire partie de son cercle d’ami. C’est donc avec une extrême maturité que la jeune de Lestang roula des yeux, ne niant même pas le fait qu’elle était curieuse, visiblement elle était bien cernée par la blondinette au panier.

Une fois de plus, Sélénya refusa l’aide proposée, non mais ce n’était pas une question de lourd ou de pas lourd, partage des tâches tout ça, ça ne disait rien à Macmillan ?
A la suite de la proposition de l’endroit, Elise tourna la tête pour voir où elles allaient s’installer parce qu’à moins qu’il y ait des petites araignées, juste à l’endroit indiqué par Sely, il n’y avait pas trop de raisons pour qu’Elise refuse. Proposition qui fut donc accepté par un vigoureux hochement de tête avant que les deux camarades ne finissent par s’y rendre non sans que Sélénya ne trouve auparavant le moyen de la charrier, en même temps question stupide, réponse tout aussi stupide et dire qu’Elise ne pouvait même pas la charrier à son tour en lui demandant si elles allaient voir mère grand, la culture de Sélénya sur les contes moldus étant inexistante. Et oui, c’est un crime mais bon faire rattraper à quelqu’un plus de dix ans de contes, aie ça allait être très long. Elise mis donc quelques secondes de plus que d’habitude pour rétorquer.

« Ah parce que ce n’est pas ton nouveau sac à main à la pointe de la mode que tu portes, j’y croyais pourtant. »

Une fois la couverture installée pour éviter de se geler et d’avoir mal aux fesses, Elise se laissa tomber dessus plus qu’elle ne s’assit avant de regarder le cirque de Sélénya qui ramenait le panier vers elle. Non mais ça va, quand on disait d’Elise qu’elle était curieuse, c’était peut-être pas à ce point tout de même, elle n’attendait pas impatiemment que le panier soit à portée de main pour s’en emparer, elle avait un peu de tenue malgré tout.
Elle redressa la tête pour la regarder dans les yeux lorsque la question de savoir ce qu’elle voulait fut posée. C’était un test ? Non parce que logiquement si elles étaient là à une heure pareille et avec le panier du petit chaperon rouge, ça devait être pour manger. Sauf que ça semblait tellement étrange de répondre manger, sans parler du fait qu’elle risquait de passer pour une goinfre si ce n’était pas la réponse escomptée, surtout que le regard que lui lançait Sélénya était loin d’être tout à fait innocent. Eventuellement, si elle la fixait assez longtemps sans rien dire son amie reprendrait la parole, oui Elise comptait là-dessus. Fort heureusement pour elle, Sélénya ne lui laissa pas le temps de passer pour une idiote, sortant d’elle-même un paquet de son panier, effectivement, ça ne ressemblait pas du tout à de la nourriture, ainsi qu’une enveloppe. L’amour d’Elise pour les lettres était si évident que tout le monde s’évertuait à au moins glisser une petite lettre pour les cadeaux. Dans tous les cas, l’attention était telle qu’elle fit briller les yeux de la blondinette qui sentit son cœur tambouriner dans sa poitrine tant il était réceptif à la marque d’affection qui transparaissait par ce beau paquet et cette magnifique enveloppe.

Que le geste d’Elise lui sembla gauche lorsqu’elle tendit les deux mains pour se saisir du paquet, elle avait envie de lui dire tu n’étais pas obligée mais ces propos lui semblaient vide de sens, Sélénya le savait parfaitement cela, quel intérêt de se perdre dans des phrases pleines de politesse et stupides. Instinctivement, d’elle-même, elle aurait ouvert l’enveloppe en premier parce que c’était quelque chose qu’elle avait l’occasion de faire très souvent. Elle fut cependant arrêtée avant même d’avoir déposée le paquet sur la couverture, par la voix de Sélénya qui lui demandait d’ouvrir la lettre en second, proposition qui fut acceptée d’un hochement de tête et c’est avec déférence qu’elle déposa l’enveloppe sur la couverture pour se concentrer sur le paquet. Il n’était pas bien lourd, ça c’est une certitude, pas bien lourd du tout. Elise dessina de l’index droit les lettres calligraphiés représentant son patronyme, avant d’ouvrir le paquet et de s’immobiliser totalement devant le présent à l’intérieur. Son regard émerveillé devant cette plume immaculée voulait certainement tout dire. L’objet était magnifique, un blanc à faire pâlir d’envie la neige et pour être une connaisseuse en matière de plume – bah ouai à force d’écrire des lettres à tout le monde forcément – elle avait l’air d’être hyper agréable à tenir en main et ce serait mentir que de dire qu’Elise n’avait pas envie de l’utiliser sur le champ. C’était peut-être à ça que servait l’enveloppe ? Il y avait une lettre à l’intérieure pour qu’Elise puisse s’exercer ?
Au moment où elle releva la tête afin de remercier son amie et de rajouter cette parole que tout le monde sort, c’est trop, son regard fut attiré par une lumière argentée provenant de l’intérieur du paquet. Oh l’étoile scintillait si ça c’était pas le truc le plus mignon du monde. Elle était comblée, elle n’osait même pas prendre en main l’objet tellement elle le trouvait beau.

Qu’il fut difficile de combattre cette envie de se jeter au cou de son amie afin de déposer un bisou sur sa joue. Bisou qui aurait permis d’exprimer tout le panel d’émotion qui parcourait le corps de la petite chanceuse, sauf que c’était impossible et il aurait inhumain de filer une frousse pas possible à Sélénya alors que cette dernière venait de lui offrir le plus beau des présents. Il fallait donc mettre des mots sur cette émotion qui faisait pétiller les yeux d’Elise qui eut bien du mal à détacher son regard de la plume, sa plume, afin de regarder Sélénya pour essayer de s’exprimer au mieux même si, à ses yeux en tout cas, ses propos étaient incohérents, mal dit, digne d’un élève d’école élémentaire.

« Merci beaucoup. Je ne sais pas comment te remercier, elle est magnifique. Je n’ai jamais vu une plume aussi jolie. C’est vraiment pour moi ? Je peux la garder ? »

Question stupide mais qui lui semblait légitime à cet instant précis, si ça se trouve c’était une erreur de cadeau, elle était vraiment beaucoup trop belle pour qu’Elise se dise que oui c’était son cadeau. Son regard avait déjà quitté celui de son amie pour se poser à nouveau sur la plume qu’elle effleura de la main. Afin de ne pas faire tomber la boîte, elle déplaça sa main gauche pour mieux la tenir, puisque la droite se rapprochait de plus en plus de la plume à présent, ses doigts entrèrent en contact avec ce nom qu’elle avait dessiné quelques minutes auparavant et son regard s’illumina d’une infinie tendresse à l’égard de Sélénya tandis qu’une douce chaleur remplissait son être. Elle avait de la chance d’être son amie et n’aurait jamais assez d’une vie pour lui dire à quel point elle était ravie que leurs chemins se soient entremêlés. C’est la voix pleine d’émotion qu’elle lui glissa, tout en relevant la tête pour la regarder de nouveau dans les yeux.

« Tu es géniale, elle est magnifique. Merci. »

Est-ce qu’Elise était concentrée sur autre chose que sa plume, pas vraiment. Ça aurait été un énorme mensonge que de dire qu’elle se souvenait de la lettre à cet instant. Il fallait se mettre à sa place quelque petites secondes, le cadeau était somptueux. Grande première qu’elle ne réagisse aux paroles moqueuses de quelqu’un, oui même une moquerie sympathique. Il est vrai que Sélénya avait bien raison de lui dire que sa question ne valait pas grand-chose, surtout quand il y avait écrit son nom sur l’écrin, c’était compliqué de se tromper de cadeau. Elise était alors comblée, comment se souvenir qu’il y a plus quand c’est déjà parfait ?
Elle avait fini par se jeter à l’eau et attraper la plume entre ses doigts, la soupesant, la caressant de l’index avec un plaisir évident, sauf que voilà Sélénya venait de réveiller sa curiosité en posant une question. La lettre, elle avait oublié la lettre, effectivement, ça c’était légèrement exceptionnel de la part de la petite blondinette, grande fana des lettres. Les sourcils d’Elise se froncèrent tandis que son regard glissa de la plume qu’elle tenait entre ses doigts et qui scintillait à Sélénya dont le regard était rempli de malice. Elle en était encore à se dire qu’il fallait peut-être lâcher la plume afin de se saisir de la lettre que Sélénya s’en empara vive comme la foudre. Elle était attrapeuse ou gardienne ? Il y avait eu un loupé sur la vocation là. Non parce qu’Elise n’avait pas pu faire le moindre mouvement, un clignement de cils tout au plus que son amie s’était saisi de l’enveloppe, se payant le luxe de jouer sur le côté curieux d’Elise. Ça n’avait rien à voir avec le fait qu’elle ne voulait pas la lire, ni même que la plume était tellement bien que le deuxième cadeau serait forcément pourri, non c’était plutôt qu’Elise était légèrement occupée à se satisfaire du premier cadeau avant de s’occuper du deuxième.

Un claquement de langue réprobateur vint répondre à la deuxième question de Sélénya, ça certainement pas, elle n’allait pas la jeter. Elise avait très envie de rétorquer que c’était à elle, sauf que premièrement, ça faisait puéril et en plus si Sélénya n’avait plus eu envie de lui donner, elle était dans son droit. Pas une seule seconde la sorcière ne songea à cela, vu la lueur qui brillait dans le regard de Sélénya, elle se payait uniquement sa tête. Alors, lentement, Elise déposa la plume dans son écrin avant de se redresser et de rétorquer amusée. « Alors là, même pas en rêve tu la jettes ! Ce serait un crime contre l’humanité. » Oui non mais Elise exagérait jamais, c’est bien connu, il fallait prendre tout ce qu’elle disait comme vérité et sérieux absolus, sinon ça n’allait pas du tout. Après un calcul savant, imparable de la part de Sélénya – oui alors qu’on est tous d’accord, elle s’est laissée subtiliser la lettre sans le moindre effort – Elise récupéra la lettre qui tout d’un coup valait tout l’or du monde, ah ouai le premier passant qui aurait essayé de la voler ce serait retrouvé avec une de Lestang sur le dos à taper du poing sur son épaule pour qu’il lâche, c’est dire la violence de la demoiselle et l’intérêt qu’elle portait à cette lettre. Après, n’oublions pas que c’est Elise, elle n’avait pas la carrure pour la baston et il suffisait d’une droite pour la coucher on se souvient tous de la dérouillée par Andy, n’est-ce pas

C’est avec une modestie exemplaire qu’Elise fit un énorme sourire prétentieux à Sélénya, ouvrant la lettre sans attendre, non parce qu’on ne sait jamais avec l’attrapeuse-gardienne là, elle était trop vive et elle pouvait reprendre la lettre à tout moment, il fallait se méfier d’elle. En même temps qu’elle ouvrait la lettre « Non mais, tu vas rien jeter du tout, ça m’intéresse toujours les lettres. » Evidemment, comme d’habitude, elle se retrouva avec le papier du mauvais côté, le drame de sa vie que ne jamais réussir à saisir directement du bon côté la lettre. Il faudrait un code universel pour glisser sa lettre dans l’enveloppe, tien si elle ne devenait pas médicomage, elle se lancerait dans ce projet… en plus de celui de pilote de ligne pour les moldus, ça claquait pas mal ça comme projet. Elle retourna donc la lettre, bien évidemment parce que c’est quand même plus évident de lire quand on voit les écritures.

Pourtant, plus la moindre pensée moqueuse ne parcourut son esprit lorsqu’elle posa son regard sur les quatre mots. Son regard resta figé dessus pendant que ça faisait sens dans sa tête. Elle se souvenait remarquablement bien de la dernière fois qu’elle avait touché Sélénya, cette expression dans le regard de la blonde ainsi que sa réaction étaient certainement gravées à tout jamais dans la mémoire d’Elise qui en culpabilisait encore. Elle crispa ses doigts sur le papier avant de la regarder, plongeant son regard dans celui de son amie, murmurant avec douceur.

« Tu n’es pas obligée de faire ça. »

Comment lui faire comprendre qu’elle n’avait pas besoin d’un contact physique pour se sentir importante aux yeux de sa camarade, que c’était ces instants passés avec elle qui emplissait son cœur de plaisir. Elle n’avait pas besoin du moindre cadeau déjà, il faut le noter parce que c’était important, elle n’était pas avec Sélénya pour les cadeaux que cette dernière pouvait lui faire, elle était avec parce qu’elle l’appréciait en tant que personne, de ces moments où la demoiselle avait accepté sans rien en retour à part des remerciements, de lui apprendre à se débrouiller, un peu, sur un balai, à ces moments des derniers mois où il n’y avait plus rien à apprendre mais que la présence de Sélénya était tout bonnement indispensable au bien-être d’Elise. Cela permettait à la demoiselle d’en arriver à la conclusion que ça ne s’était pas arrangé du côté de Sélénya, marcher derrière elle c’était la voir éviter avec une précision chirurgicale le moindre contact physique, elle faisait toujours attention à ce que personne ne l’effleure, raison pour laquelle ce mot faisait tiquer Elise. Elle ne voulait pas être associé à quelque chose de négatif pour Sélénya et que par la suite cette dernière coupe les ponts parce qu’elle n’arrivait pas à passer au-dessus de tout ça et en même temps, comment nier les battements de son cœur qui s’était emballé en lisant ces mots, le sens était clair, la confiance que plaçait en elle son amie était incroyable lorsque l’on connaissait, un tout petit peu -parce que rappelons le que Elise ne s’était pas montré trop curieuse à ce sujet… oui elle mérite la palme d’or de la pote parfaite sur ce coup là – le passif de Sélénya et son désamour pour tout ce qui était contact physique.  La blondinette inspira un grand coup avant de reprendre la parole, essayant d’aider, un peu Sélénya pour le coup, on sait jamais ce mot avait pu être écrit sur un coup de tête.

« De toute façon, non tu ne reprendras pas ce cadeau et comme tu le vois il n’y pas de date d’expiration. Donc si dans quinze ans je décide de te faire un câlin… oui parce que c’est prévu qu’on se voit dans quinze ans, quand on aura des enfants, pour qu’ils jouent ensemble… à se taper dessus parce que tous les gosses font ça, tu ne pourras pas me dire non ! » Reprenant, un peu son sérieux, elle prit une nouvelle fois la parole, joyeusement «  Tu es douée pour les cadeaux, je viendrais te demander des conseils quand j’aurais besoin de faire cadeaux, prépare toi à me voir souvent. »

C’était déjà le cas, mais ça voulait dire se voir encore plus souvent… Oui, Elise était un sacré pot de colle, mais bon est ce que c’est une mauvaise chose ? Pas forcément.

Elle savait qu’elle n’était pas obligée de faire ce cadeau. Bon en même temps, pour tout le monde ça aurait été logique de base mais Elise craignait un peu que son amie se sente obligée. Pensive, elle essaya de remonter dans ses souvenirs, essayant de faire ressurgir au cours de ces dernières semaines les conversations avec Sélénya. Il y en avait eu un paquet, difficile de faire le tri. Elle n’avait pas l’impression d’avoir essayé d’être tactile avec son amie, elle s’était habituée à ne pas la toucher et les rares fois où elle l’avait effleuré c’était plus pour empêcher que quelqu’un d’autres rentre en contact, beaucoup plus franchement, avec elle. Est-ce que Sélénya avait vu dans ces actions, une tentative de rapprochement de la part d’Elise ? Ce n’était absolument pas le cas, la petite blonde avait beau être un peu envahissante dans la vie de son ainée, elle savait malgré tout se comporter et respecter ses envies et ses besoins, surtout ses besoins.

En parlant d’envie, Sélénya semblait connectée aux pensées d’Elise puisqu’elle rajouta après un temps de silence qu’elle en avait envie. Elise lui lança un regard perplexe, moins convaincue qu’elle à ce sujet. Est-ce qu’elle était vraiment prête ? Tout dans ses comportements démontraient l’inverse. Ce fut exactement la raison pour laquelle, elle lui offrit une porte de sortie, pensant sincèrement que c’était le mieux à faire. De plus, ça eut au moins le mérite de faire sourire Sélénya, elle lui offrait son amitié sur le très long terme, si ça c’était as génial. Pourtant, alors qu’elle pensait s’en tirer à bon compte, Sélénya l’arrêta d’une phrase et le regard d’Elise l’observa un peu dérouter, comment ça ? Lui faire croire que dans quinze ans elles se verraient toujours ? A vrai dire, Elise l’espérait sincèrement, d’accord elle ne pouvait rien promettre parce que les promesses sur le si long terme, c’est difficile de savoir si ça va tenir, mais elle y croyait.

Elle faisait fausse route et Sélénya eut la bonté d’empêcher l’esprit d’Elise de divaguer. Oh, c’était différent de ce à quoi elle pensait totalement différent même. Sélénya était donc loin d’être dupe, mieux encore, elle arrivait à savoir à la perfection lorsqu’Elise essayait de lui filer un coup de pattes. La conversation devint bien vite beaucoup plus sérieuse et si elles avaient été debout, certainement qu’Elise se serait dandiné sur elle-même tant elle aurait été mal à l’aise sous le compliment. Ce n’est pas vraiment qu’elle n’aimait pas les compliments, au contraire lorsqu’il y avait des compliments sur son travail scolaire, elle rayonnait de plaisir. Là, c’était un peu plus rare qu’on lui fasse ce genre de compliment, c’était même la première fois que quelqu’un lui disait avec le plus grand des sérieux qu’elle lui était bénéfique. Raison pour laquelle, elle déglutit longuement pendant le laps de temps où Sélénya ne parlait plus. Lorsque sa camarade reprit la parole, Elise était de nouveau concentré sur elle, sur ses dires et sur le fait qu’elle balayait toutes les interrogations et tous les doutes qu’Elise avait pu avoir en tête. Son regard se remplit d’une joie sans limite en entendant les dernières paroles de son amie. Elle avait envie de tenter l’expérience avec Elise et cette dernière avait beau baliser à l’idée que ça soit une catastrophe et que ça dégénère, elle mentirait si elle prétendait ne pas vouloir un câlin. C’est par un hochement de tête qu’elle répondit à la phrase de son amie qui la mettait en garde, Elise avait apprit la leçon en Septembre mais puisque Sélénya lui rappelait cet épisode, elle chuchota mal à l’aise.

« Je suis désolée de l’avoir fait. »

Cette journée lui laissait un goût doux-amer en bouche, oui elle était contente d’avoir retrouvé Sélénya mais elle aurait donné beaucoup pour pouvoir juste être moins… elle-même ce jour-là.
Elle observa son amie qui venait de se rapprocher et qui semblait tellement hésitante sur la démarche à suivre. Elise se força à ne faire aucun mouvement, se contentant de l’observer, essayant de comprendre ce qui avait pu pousser des hommes à la détruire de la sorte, c’était incompréhensible en réalité pour Elise, elle ne voyait pas l’intérêt de la démarche. Enfin, elle pouvait comprendre qu’on veuille démolir quelqu’un psychologiquement, ça c’était très clair dans sa tête, sauf que le faire à quelqu’un d’inconnu c’était complètement débile mais bon c’était pas nouveau qu’il existait des gens débiles dans le monde.

En attendant, elle laissa tout le temps qu’il fallait à Sélénya et eut même un petit sourire en la sentant si proche. Elle poussa un long soupir de contentement, ravie d’être tout contre elle. avant de sentir le cœur de la demoiselle comme pris au piège. Qu’est-ce qu’elle devait faire ? Personne ne l’avait préparé à ça, elle n’avait pas bougé, elle n’avait donc pas pris par surprise Sélénya, pourquoi elle paniquait de la sorte, Elise était parfaitement immobile, si ce n’est son propre cœur qui battait mais ça valait mieux hein, sinon c’était la mort assurée. Elle aurait bien voulu s’écarter pour permettre au cœur de son amie de retrouver un rythme moins rapide, sauf qu’au lieu de permettre à Elise de se déplacer pour l’aider à aller mieux, Sélénya fit le mouvement inverse gardant la Serdaigle bien contre elle. Ce fut sa phrase qui convainquit Elise de ne surtout plus bouger et qui la fit réagir différemment. Pourquoi la remerciait-elle au juste, Sélénya n’avait jamais donné l’impression à Elise de manquer d’amis. Effectivement, Elise ne percevait pas parfaitement l’utilité qu’elle pouvait avoir aux yeux de la Poufsouffle, certes elle savait que Sélénya ne restait pas avec elle uniquement pour faire plaisir à Elise – quoi que vu la gentillesse de la demoiselle, ça aurait pu être possible aussi – mais de là la remercier, c’était incompréhensible pour la Serdaigle qui demanda, perplexe.

« Pourquoi tu me remercies ? Je suis pratiquement certaine que tout le monde a envie d’être ton amie. C’est pas plutôt à moi de te remercier, pour le câlin ? Pour la plume ? Pour le temps passé avec moi depuis la rentrée… et même bien avant la rentrée ? Pour aujourd’hui ?  Tu me remercies pour quoi au juste ? »

Il fallait faire quelques petites piqures de rappel à Sélénya, ça devait être l’âge… Elle oubliait que c’était pas son anniversaire à elle et croyait que le câlin c’était le cadeau d’Elise… ahlala c’est pas beau de vieillir.
Elise essaya, timidement, lentement, scrutant la moindre réaction physique de son amie, de l’enlacer à son tour afin de lui rendre son câlin, priant pour que ça passe.

Si tous les moments qu’elles avaient passé l’une avec l’autre au court de ses derniers mois avaient emmenés à ce câlin, alors oui, la démarche avait été la bonne et Elise pouvait sourire en sentant la chaleur corporelle de son amie tout contre elle, enfin, même si elle n’en avait pas forcément eut conscience avant, puisque bien décidée à ne pas forcer Sélénya ni même songer à cela puisque la demoiselle n’était pas prête, elle était contente que ça arrive et devait reconnaître que ne pas la toucher, ne serait ce que pour des broutilles, quand l’une ou l’autre allait moins bien. Ça lui avait manqué. Ce cadeau était donc une bénédiction et elle le prenait très au sérieux.
En revanche, c’est un sourire moqueur qui accueillit les propos de Sélénya, non, Elise n’y croyait pas une seule seconde que des gens puissent ne pas vouloir être ami avec elle, c’était tout bonnement impossible. « Il va falloir que tu me les montres parce que je ne te crois pas du tout. » Bon à la limite, il devait bien y avoir quelques élèves qui n’aimaient personne, des gens qui ont envie de finir seul toute leur vie, ça existe, on ne peut rien y faire, ils doivent n’aimer que le son de leur propre voix, une vie bien ennuyeuse si vous voulez l’avis d’Elise qui aimait bien rencontrer de nouvelles personnes, échanger avec les gens pour apprendre tout pleins de nouvelles choses. Donc, pour les gens qui n’aiment personne, logique qu’ils n’aiment pas Sélénya, même si ce n’était pas vraiment à prendre en compte. De là songer qu’elle pouvait en trouver pas mal, Elise demandait à voir et attendait avec impatience la liste.
Le regard d’Elise s’éclaira une nouvelle fois en sentant les lèvres de Sélénya sur sa joue, un immense sourire se dessinait sur son visage bien qu’elle ne trouvait plus les mots, émue tout simplement par la confiance que son amie plaçait en elle. Si, Sélénya se décolla d’Elise, elle ne sembla pas vouloir que le contact s’arrête, juste vouloir croiser le regard de sa cadette qui ne la quittait pas des yeux, interloquée, hésitant à la lâcher et cherchant à lire dans l’éclat du regard de Sélénya si ça allait ou pas. Soit Elise était une truffe pour déchiffrer les émotions, ce qui était probable, soit Sélénya allait bien et elle pouvait rester contre elle à l’écouter parler d’elle et de son passé proche.

Que peu de gens soient au courant, ce n’était pas une surprise, Sélénya avait mis des barrières à Elise dès le début, se montrant très clair sur le fait que les gens n’avaient qu’à écouter les rumeurs à son égard s’ils voulaient avoir un semblant de vérité.  Sauf que le problème des rumeurs, c’est toujours la même chose, les gens rajoutent des détails et des détails, du coup c’est faux. La blondinette ne savait pas comment, ni pourquoi le comportement des gens à l’égard de Sélénya changeait lorsqu’ils apprenaient la vérité. Ça ne changeait pas la personne, alors il est vrai qu’elle avait changé, ne serait ce que par le fait qu’elle ne voulait plus être touché mais la mettre à l’écart pour une chose qu’elle n’avait pas choisi, lui lancer des regards remplis de pitiés, ça n’arrangerait rien. Dans le premier cas, elle allait encore plus se renfermer sur elle-même et dans le second, elle ne risquait pas d’avancer si elle voyait dans le regard des autres le reflet d’un passé qu’elle ne pouvait pas oublier mais auquel elle ne voulait pas forcément penser. Le regard bleuté d’Elise ne quittait plus celui de Sélénya, lui offrant un sourire en l’écoutant la remercier pour toutes les choses qu’Elise trouvait naturelles en fin de compte. Elle prit donc la parole, tout sourire « Oh, je vois. Il en aurait fallu beaucoup plus pour me faire partir ce jour-là. Il va falloir t’habituer Sélénya Macmillan, tu vas m’avoir sur le dos un bon paquet de temps. »

La question suivante la fit dresser un sourcil intéressé, oh elle voulait se confier. Elise hocha rapidement la tête plus que partante à l’idée d’en savoir un peu plus sur la façon de voir les choses de Sélénya, ce n’était pas de la curiosité malsaine, jamais elle ne s’en servirait contre la demoiselle. C’était juste pour essayer de la comprendre au mieux même si elle n’avait pas la prétention finale de pouvoir dire qu’elle comprenait parfaitement, non elle ne comprendrait jamais puisque ne l’ayant pas vécu personnellement et même si Sélénya était une bonne conteuse, ce dont Elise ne doutait pas, ce ne serait jamais pareil. Sans émettre la moindre protestation, elle obéit à la demande de son amie, fermant les yeux sans la moindre hésitation. Remettre sa sécurité entre les mains de Sélénya n’étant pas un problème. Pourtant, aucune histoire ne vint, alors au début Elise attendait patiente, peut être qu’elle cherchait ses mots ? Après tout ce n’était pas chose aisée que de se confier. Sauf que les secondes défilèrent, se transformant même en minutes sans qu’aucun son ne se fasse entende, tout était sombre et la seule chose qu’Elise entendait c’était les battements réguliers de son cœur, le bruit des enfants un peu plus loin qui devaient jouer au football et le chant des oiseaux dans les arbres. Rien de trop transcendant et ça l’agaça bien vite. Stoppa son agacement, quelque chose qui lui toucha la peau, déclenchant un frisson dans tout son corps. C’était pas des plus intéressants comme expérience, d’accord ce n’était pas douloureux, certainement que si ça l’avait été Elise aurait réagi rapidement. Là, elle était immobile, son rythme cardiaque s’était intensifié comme pour répondre aux sollicitations, son cerveau essayait en vain d’anticiper l’endroit et le moment où le toucher se ferait sans qu’il n’y parvienne. Elise avait beau savoir de qui ça venait, sa confiance envers Sélénya avait beau être puissante, elle se sentait incroyablement vulnérable face à la demoiselle et aimait de moins en moins l’expérience.

Lorsqu’enfin la voix de son amie brisa le silence, Elise se concentra sur cette voix qu’elle connaissait, y trouvant là son refuge avant de comprendre la demande et se retint réellement de grimacer, n’étant pas légitime pour cela, surtout vis-à-vis de celle qui parlait à cet instant et essayait tant bien que mal de lui montrer tout en restant dans le cadre pour le moins sécurisant et surtout qu’il suffisait qu’Elise ouvre les yeux pour se retrouver sous la lumière du soleil, là où Sélénya avait pu ouvrir et fermer les yeux autant de fois que nécessaire rien n’était venu remplacer l’endroit où elle était détenue. Déjà que là, elle n’aimait pas mais alors, elle voulait bien reconnaître que pour Sely ça avait dû être infernal.
La délivrance vint de cinq pauvres de mots et autant Elise pouvait parfois avoir du mal à obéir, sautant là c’est direct qu’elle ouvrit les yeux pour se retrouver nez à nez avec le regard de Sélénya sur elle et ses explications. Son cœur se serra douloureusement, elle avait provoqué ce genre de peur chez elle et c’était un sujet plus que sensible pour Sélénya, elle le voyait à sa réaction. Il n’y avait rien à dire à ça, elle n’avait pas envie de la prendre en pitié, peut être qu’il fallait la remercier de lui avoir montré cela mais pour l’instant, Elise ne pouvait pas, les mots restaient bloqués, son cœur n’ayant pas repris son rythme de croisière.

Son regard glissa sur la main de Sélénya toute tremblante qui venait de se glisser dans la sienne, à la recherche d’un contact ou pour vérifier qu’Elise ne se déroberait pas ? Que ce soit l’un ou l’autre cas, Elise ne fit pas le moindre mouvement, se contentant de regarder leurs mains liées et d’écouter la voix de son amie lui dire qu’il lui fallait un temps d’adaptation mais que ce n’était pas grand-chose, le temps était la clé pour qu’elle s’habitue. Elise retrouva sa voix, enfin et pour souffler « Je crois que je comprends un peu mieux. » Elle redressa alors la tête pour regarder Sely, espérant ne pas la vexer en disant cela, elle ne prétendait pas comprendre ce qu’elle avait vécu, juste que c’était un peu plus clair dans sa tête et qu’elle pouvait imaginer un peu mieux.

L’appel de la nourriture allégea complètement l’atmosphère et Elise se redressa un sourire aux lèvres avant de reprendre la parole sur un sujet qu’elle connaissait beaucoup mieux « Oh que oui, j’étais emballée par cette journée, j’ai oublié de prendre un petit déjeuner » Oublier… mais bien sûr disons plutôt qu’elle était excitée comme une puce et n’aurait rien pu avaler. Elle rapprocha sa main du panier pour le soulever et le ramener auprès d’elles avant de demander « Tu as pris quoi ? » Oui, ça y est Elise était totalement concentré sur la nourriture et à moins que quelqu’un essaie de lui voler la plume posée non loin d’elle, rien n’arriverait vraiment à la détourner du panier en osier et des victuailles qu’il contenait. Et pourtant, même si sa curiosité était à son maximum, elle ne touchait à rien attendant que Sélénya donne le top départ... hop hop hop il fallait accélérer si elle ne voulait pas d'une Elise morte de faim à ses côtés.

Comme tout le monde avait envie de répondre Elise. Décevoir les gens, qui ne le faisait pas ? Et puis l’important c’était de le reconnaître. Aux yeux d’Elise, puisque les deux filles ne voyaient pas la chose du même point de vue, jamais elle n’avait eu à se plaindre du comportement de la demoiselle et c’est fou mais elle était persuadée que Sélénya n’avait jamais agit différemment avec elle personnellement. Elle se voyait beaucoup plus négative qu’elle ne l’était en réalité, ce n’était pas grave, Elise serait là pour lui rappeler à quel point elle était une belle personne, enfin tant que Sélénya voudrait bien de sa présence à ses côtés.  Oh ça, pour le penser, elle le pensait. La confiance qu’elle avait placée en Sélénya, nul pourrait la lui retirer. Son regard pétillait de joie, se sentant réellement à sa place dans la vie de son amie, n’étant plus juste une demoiselle en difficulté. Enfin, pas en difficulté, faut le dire vite parce que la dernière fois qu’Elise était montée sur un balai ça n’avait pas non plus été une franche réussite. Tout dépendait du point de vue en fait. Elle était en vie, sa cousine aussi – ce qui était beaucoup moins positif - mais ça n’avait clairement pas été le meilleur moment d’Elise sur un balai… en même temps, un balai c’est pas du tout confortable, celui qui un matin s’est dit mais quelle bonne idée montons sur des balais magiques et faisons du vol, il s’est pas dit que le bois et bien ça fait mal au cul ! Tien donc, personne ne s’était jamais dit si les gens avaient inventé les coussins, le cuir et tout ce genre de choses agréables pour le chaises, c’est bien que le bois ça fait mal – et on ne parle pas des échardes… -  mais non lui il avait trouvé ça classe et personne n’avait remis ça en cause derrière. Et bah désolée mais Elise elle n’aimait pas voler dans une forêt de merde avec une cousine… de merde aussi… sur un balai. Bon, après le balai ça n’avait pas été le pire durant cette journée, mais bon c’est bon, elle avait donné et n’avait pas du tout envie de se retrouver une nouvelle fois sur un balai. Non, non vraiment être avec Sélénya ailleurs que sur un terrain et pas les fesses sur un balai c’était quand même beaucoup mieux, n’en déplaise à sa camarade fan de son balai.

Si elle ne dit finalement rien, c’est surtout parce que Sélénya la taquinait sur le fait qu’Elise ne s’était pas éloignée en Septembre et plus le temps passait, plus Elise se disait qu’en agissant ainsi, elle aurait fait une des plus grosses bêtises de sa vie. Elle haussa les épaules, assumant pleinement le fait d’être masochiste pour le coup, enfin surtout quand ça ne concernait que Sélénya, sinon elle était du genre à retaper quand on la tapait, par principe.
Son regard bleuté se posa dans celui de son amie, sentant une douce chaleur l’envahir, contente qu’elle pense cela et qu’elle le dise à haute voix. Oui, elles resteraient ensemble un bon paquet de temps si chacune en avait envie. Et petit à petit, elle gagnait la confiance de Sélénya, que ce soit par ses confidences par ci par là, par ce contact physique aujourd’hui qu’elle n’imaginait même plus parce qu’elle avait conscience que c’était trop pour Sélénya. De la même façon, elle évitait de poser des questions, même si au départ ça avait été très compliqué, elle s’habituait chaque jour un peu plus à ne pas vouloir en savoir plus. Sauf qu’aujourd’hui c’était un immense pas en avant pour Sélénya qui enchainait les cadeaux à la suite. Et si c’était très intéressant pour Elise et que sa curiosité était pour le moins assouvie.  Ça n’avait pas été le meilleur moment à vivre de sa vie et ça rendait Sélénya encore plus incroyable à ses yeux, pour dire les choses le plus clairement possible, Elise se sentait toute petite à côté, insignifiante même. Les pensées d’Elise partaient tous les sens pour essayer de se remettre déjà, mais aussi parce qu’elle essayait de comprendre comment ça avait pu arriver, c’était vraiment des gens horribles. Cependant, Sélénya fut très douée pour réussir à captiver l’attention d’Elise, trouvant même l’occasion de se moquer d’elle. « Je voulais pas être en retard. » Les dires d’Elise furent complétés par un tirage de langue des plus matures.

Sa curiosité était de nouveau totalement réveillée et c’est attentive que la blondinette écoutait Sélénya préciser qu’elle n’avait pas fait les sandwichs elle-même. Ce n’était pas du tout un problème, déjà elle avait fait en sorte de libérer sa journée pour être avec Elise, c’était bien assez généreux. Et l’avantage avec les elfes c’est qu’ils étaient plus que motivés quand il s’agissait de cuisiner et ce n’était pas pour manquer de respect à Sélénya mais vu le nombre qu’ils étaient dans les cuisines pour sûr qu’ils en avaient fait des quantités astronomiques alors que Sely aurait mis des journées pour arriver au même résultat. Elise confirma les dires de son amie, amusée « Je suis même persuadée qu’ils ont eu l’impression que tu leur faisais un cadeau en leur demandant le repas. »

Elise se redressa pour voir l’intérieur du panier et pour le coup, c’était impressionnant, non mais Sélénya avait oublié de préciser le nombre de personnes qu’ils étaient ? C’était impossible de tout manger, voir même de tout goûter et puis il y avait énormément de choix, c’était difficile de choisir. Enfin difficile pas pour tout le monde puisque son amie avait déjà attrapé un sandwich, là où Elise en était encore à faire le tri pour savoir lequel lui plaisait le plus. Finalement, elle jeta son dévolu sur un sandwich au thon bon et… un sandwich au saucisson parce qu’impossible de prendre l’un ou l’autre.
Elle venait à peine de prendre une bouchée dans son sandwich que Sélénya lui posait une question. Elle lui jeta un regard un peu surpris par le sujet qu’elle emmenait sur le tapis, ne sachant pas tellement quoi répondre. Afin de se donner un peu de courage, Elise termina son sandwich, bon d’accord c’est pas du tout pour le courage, c’est parce qu’elle mourait de faim. Elle laissa le deuxième sandwich sur la couverture pendant qu’elle prenait une inspiration et se lançait.

« C’était compliqué. Mon père avait envie de rencontrer sa nièce. Il l’idéalise, je comprends que c’est la fille de sa sœur, qu’il avait très envie de voir à quoi elle ressemblait. Sauf que du coup, on a dû mentir. Comment lui dire que sa nièce est une peste ? » Elise fronça les sourcils, embêtée « Je n’ai toujours pas compris pourquoi elle avait voulu venir passer noël chez nous, elle ne nous aime pas. Sa famille méprise nos parents, ils n’en parlent jamais. C’était quoi son but en venant chez nous ? Faire son rapport ? » Elise fit une pause avant de reconnaître « J’ai pas envie que mon père apprenne la vérité, je préfère qu’il l’idéalise plutôt qu’il comprenne que sa sœur n’a jamais parlé de lui à Froggy. »

Non, dans un sens ça n’avait pas été des vacances horribles, elle n’avait pas été blessée moralement ou physiquement. C’était plutôt des vacances épuisantes parce qu’il fallait faire attention à ce qu’elle disait, à ce qu’Adèle disait. Faire croire à un semblant d’entente alors qu’elle avait eu plus envie d’étouffer Adèle dans son sommeil qu’autre chose. Elle avait eu l’impression d’avoir retenu sa respiration pendant prêt d’une journée. A chaque fois qu’Adèle ouvrait la bouche. Elise s’était préparée à se jeter sur elle verbalement afin que le sujet parte sur quelque chose de totalement différent, même si en faisant ça elle savait que ça lui serait retombé sur le coin du museau, parce que papa n’aurait pas du tout apprécié. Elle s’était préparée malgré tout, et certainement qu’Adèle savait très bien qu’Elise n’aurait pas hésité puisqu’elle s’était tenue, ne faisant presque aucun faux pas. Ce qui n’empêchait pas mademoiselle de Lestang de trouver sa cousine tout aussi méprisable qu’avant les vacances. Non, on ne pouvait pas dire que la réunion de famille avait servi à resserrer les liens, les équipes n’avaient pas changé, Elise campait toujours sur ses positions avec Amaury et les deux s’accordaient au moins toujours à dire que cette cousine était un véritable poison. Sauf qu’elle était bien décidée à leur pourrir l’existence en restant là pour ses études… joie et bonheur.
Elise s’empara de nouveau du sandwich au saucisson, voyant en ce dernier une petite échappatoire même si, dans même un temps, elle avait envie d’avoir la réaction d’Elise à tout cela. C’était un peu compliqué de vouloir connaître ses pensées et en même temps de les craindre un peu.

Sujet épineux que celui de la famille de Lestang. Elise avait beau être une grande bavarde, ce sujet, elle ne l’abordait pas. Est-ce qu’il s’agissait d’une volonté de protéger sa famille ou de sauvegarder les apparences, elle-même ne le savait pas tellement. Et puis, il faut reconnaître aussi qu’elle était du genre à esquiver les conversations avec habileté lorsque ces dernières ne lui convenaient pas. Dire qu’elle était à l’aise, lorsque Sélénya essayait tant bien que mal d’en savoir un peu plus, c’était le plus gros mensonge du monde. Non, ce n’était pas son sujet favori. En fait, c’était surtout qu’est ce qu’elle voulait bien accepter de dire sur elle, sur ses parents, sur ses grands parents et oulalah qu’est ce que c’était compliqué d’ouvrir sa bouche. Autant critiquer Adèle, ce n’était pas vraiment un problème, c’était même évident et Sélénya savait depuis fort longtemps maintenant que ce n’était pas la tasse de thé d’Elise. Autant, le reste de la famille, ça n’avait oh grand jamais été mis sur le tapis par la blondinette. Si, elle ne disait pas le moindre mot à Sélénya, racontant pour le moment ce qu’il était facile de raconter, elle se préparait néanmoins à se confier un peu plus. Après tout, on n’a rien sans rien. On ne peut demander aux autres ou même attendre d’eux qu’ils disent la vérité et qu’ils se confient si par la suite, de l’autre côté il n’y a aucune confidence.
Elle comprenait ? Elise, de son côté n’était pas certaine de comprendre grand-chose, son cerveau était sans arrêt sollicité par sa cousine, c’était éreintant, un combat qu’elle voulait mener et dont elle ne voulait pas perdre une seule bataille, sauf qu’il est difficile de se battre lorsqu’on ne connait pas les desseins de son adversaire. Ce qu’Adèle voulait ? Inconnue. Ce qu’elle cherchait en provoquant les cousins ? Inconnue. Pourquoi venir dans la demeure des jumeaux ? Inconnue. La seule certitude d’Elise c’était qu’elle n’avait pas froid aux yeux, ça frôlait même l’inconscience. Un sourire répondit aux propos de la demoiselle allongée non loin d’elle. Elle aussi aurait menti ? Pourtant Elise n’en ressentait aucun plaisir, c’était plutôt un malaise à l’idée d’avoir trompé quelqu’un qui lui faisait confiance. Alors oui, c’était pour protéger, toute vérité n’est pas forcément agréable à entendre. Cependant elle était bien celle qui reprochait à son père d’avoir menti à Amaury et elle au sujet de cette famille Française dont il ne savait rien et qu’ils avaient découverts uniquement en fouinant.

Sélénya, en cet instant ressemblait énormément à Elise, se posant des questions pour essayer de résoudre l’équation Adèle et quelle belle équation n’est-ce pas ? Impossible de savoir ce qu’elle avait en tête, comment se battre contre quelqu’un qu’on ne connaît pas et qui en plus a le culot de venir en terrain ennemis. Elise poussa un soupir sans trop savoir quoi dire.
« Ça qu’elle ne nous apprécie pas, c’est l’évidence même. » Elle fronça les sourcils, baissant le regard sur la demoiselle avant de lui demander, essayant d’avoir une autre vision des choses que la sienne. « D’accord, on va essayer de comprendre. Imaginons que tu apprennes un beau matin que tu as un oncle vivant dans un autre pays avec sa famille. Un oncle qui n’en a rien eu à faire des valeurs de ta famille sang pure et qui s’est barrée pour fonder la sienne. » Elise fit une pause, la regardant dans les yeux, essayant de paraître sereine alors qu’elle aurait voulu gommer ses mots, n’arrivant pas à savoir si elle avait envie de le dire ou non. Elle continua néanmoins « Pourquoi tu irais passer noël chez lui après t’être pris la tête avec ta cousine et ton cousin juste avant ? Je tiens quand même à préciser que d’accord c’est moi qui aie vidé de l’encre sur sa copie mais c’est elle qui a décidé d’humilier Amaury en le laissant la draguer et tout cela avant que j’agisse.  Je n’ai donc fait que protéger mon frère. » Si, Elise pensait que son frère était un crétin fini pour l’occasion, à quel moment on drague une fille qu’on ne connaît pas, le dire à haute voix était beaucoup trop difficile, néanmoins le soupir ponctuant sa phrase était assez expressif. Bon, c’était peut-être aussi un peu l’occasion de reconnaître qu’entre les deux blondes de Lestang si ça avait explosé, c’était un peu la faute d’Elise même si en vrai de vrai, il fallait juste un truc pour lancer le rp à trois et que dans la logique pour que les trois se retrouvent ensemble c’était qu’Elise essaie d’aller trouver le soutien d’Amau après avoir fait une boulette, donc voilà. Joli preuve de confiance que celle que plaçait Elise en Sélénya à cet instant et pour une fois, elle ne quittait pas le regard de son amie, se préparant du mieux qu’elle pouvait à la déception qu’elle pourrait lire dans son regard. Les autres questions qu’elle posa furent pour Elise une échappatoire, elle s’empressa de répondre, comme si cela pouvait effacé ses mots précédents.

« Je sais qu’elle ne s’entend pas avec sa sœur. Je crois que cette dernière a essayé de la noyer, mais je ne lui ai pas posé la question du pourquoi. Sur le moment j’essayais juste de sauver nos deux vies et après… » Elise poussa un soupir « Elle redevenait la Froggy insupportable que je côtoie depuis Septembre. » Oui elle reconnaissait en sous-entendu que pendant quelques minutes, Adèle avait été autre chose qu’une fille insupportable. Elle reprit sur le sujet initial à savoir comment ça se passait en France « Si j’en crois ce que disent mes parents et que ça n’a pas changé, le grand père est insupportable. » Elise hésita quelques secondes avant de continuer. « Le père adoptif d’Adèle est loin d’être un chic type. » Hop, deuxième confidence déposée là comme ça, alors oui ça ne la concernait pas directement mais c’était reconnaître que la famille n’était pas aussi parfaite que tous avaient décidé de le faire croire, Elise se prêtant d’ailleurs habilement à ce jeu, mais c’était Sélénya, sa confiance en la Poufsouffle étant intact, elle était capable de reconnaître que cette famille était une catastrophe à tous les échelons. Elle termina ses confidences par un ton bourrée d’ironie « Sauf que quand ta famille craint plus que celle de tes cousins, à quel moment c’est judicieux de se les mettre à dos. Après, je ne dis pas, je ne l’aurais pas accueilli avec plaisir la petite Froggy mais si elle s’était montrée cordiale, j’aurais été tout à fait capable de faire de même. »

Les propos de Sélénya la touchèrent, démontrant cela le sourire tout content d’Elise. C’était la jeune fille ayant supporté des choses que même l’imagination d’Elise se refusait à inventer, qui lui parlait d’admiration ? C’était tout simplement magique et ça faisait ultra plaisir à la demoiselle Serdaigle. Pour le coup, Sélénya n’était pas loin de la vérité, elle bouillait de l’intérieur et ça avait été dur de dormir avec, de feindre que tout allait bien et de l’appeler par son prénom, voir même de se montrer cordiale alors qu’à chaque fois qu’elle voyait Adèle, elle avait envie de l’étriper. Elise finit par reconnaître à haute voix, comme si c’était ça la solution à tous les problèmes, ce qui n’était peut-être pas loin d’être la vérité. « J’avais Amaury avec moi, on était deux contre un, c’est beaucoup plus facile comme ça. » Elle avait beau avoir été écarté des confidences de son frère. Il avait malgré tout accepté de jouer, une fois de plus, ce rôle de frère au côté d’Elise qui avait bien besoin de lui dans ces moments-là, ne serait ce que pour empêcher le caractère beaucoup plus explosif de la blondinette de se révéler. Ah qu’est ce qu’il ne fallait pas faire pour faire plaisir à ses parents et éviter une bataille entre cousins dans la demeure de Lestang.

Bien sûr qu’elle se justifiait, comment aurait-il pu en être autrement ? Ce n’était pas quelqu’un sans importance à qui elle s’adressait. Si elle n’en avait eu que faire du regard que posait Sélénya sur elle, alors peut être que oui, elle n’aurait pas cherché à se justifier, racontant des faits, uniquement des faits. Non, c’était totalement faux, si cette fille n’avait pas eu la moindre valeur, elle ne saurait rien. Quel intérêt d’aller raconter sa vie pour quelqu’un qui l’indifférait. Alors oui, elle craignait que ce regard change. Son rythme cardiaque avait ralenti comme si tout le corps d’Elise se préparait à perdre cette amitié qui renaissait après quelques années de pauses. Son regard ne changea pas, par contre Elise se fit couper et pendant le millième de secondes où la phrase ne faisait pas sens, le visage eut le temps de se crisper. C’était si grave que ça pour qu’elle n’ait pas le loisir de s’exprimer davantage ? Elle avait tort, totalement tort même. Son regard dont l’assurance n’était plus qu’un vestige observait son amie tandis que cette dernière lui expliquait qu’elle n’avait nul besoin de se justifier. La confiance que la Poufsouffle plaçait en elle était incroyable si Elise n’avait pas besoin de se justifier sur des choses qui lui semblaient… importantes, et oui les devoirs et Elise c’était quelque chose de primordial.  Elle n’avait pas envie que le regard de son amie sur elle change, vraiment pas et quelque part, c’était rassurant d’apprendre qu’il fallait beaucoup plus qu’un devoir tâché pour que Sélénya la voit différemment. Elise n’avait pas pour objectif de faire pire, il n’y avait donc pas de raisons pour que leur amitié en pâtisse.

Est-ce que quelque part le fait que Sélénya dise qu’elle aurait voulu connaître cet oncle, ça n‘était pas un soulagement pour Elise ? Cela prouvait que toutes les familles n’étaient pas psychorigides et acceptaient de voir un de leur élément s’éloigner afin de fonder sa famille. Et bien, ça aurait été beaucoup plus facile de faire parti de la famille de Sélénya, elle était loin d’avoir le même mauvais fond que cette saleté de Froggy. Elle ne jugeait pas le père de sa camarade, alors oui c’était peut-être logique, mais il avait bien été renié par sa famille et pour pas grand-chose, de l’amour, bien que sur derrière ça bloquait la demoiselle Serdaigle même si à aucun moment elle ne risquait la même chose. Les enfants ont beau reproduire les erreurs de leurs parents, elle voyait très mal son père juger là-dessus et surtout sa mère laisser faire sans rien dire. Non, si la grand-mère paternelle d’Elise était une véritable carpette s’écrasant devant son mari, la mère d’Elise n’était pas comme ça et c’était tant mieux.
Oui, elle serait venue passer noël dans la famille de son oncle, excepté si les cousins étaient insupportables avec elle. Elise esquissa un sourire, elle trouvait la réponse logique. Adèle était téméraire et avait fait le calcul qu’elle ne risquait pas grand-chose et elle ne s’était pas tellement trompée, bon excepté les sous-entendus qu’Elise n’avait pu s’empêcher de faire, du pur Elise que de frôler les limites, d’épuiser mentalement l’adversaire pour lui faire perdre patience. « J’aurais été ravie que tu sois ma cousine. Tu aurais été accueillie différemment, je t’assure. » ça aurait aussi permis aux demoiselles d'être proches dès le plus jeune âge plutôt qu'à 18 ans.


Lorsque Sélénya posa la question suivante, Elise eut un petit temps d’arrêt, qu’est-ce qu’elle avait dit ? Crotte, elle avait juste raconté comment elle avait été mise au courant de la merveilleuse relation entre Adèle et Anna, elle n’avait pas fait attention au fait qu’elle avait balancé, bêtement, une information sur elle-même, génial, bravo Elise, maintenant impossible de se défiler. « Tu te souviens que suite à une altercation entre Adèle et moi dans les couloirs, nous avons été collé et lié par le poignet à l’air d’un sortilège débile par un professeur un peu stupide ? » Elle attendit la confirmation de son amie avant d’enchaîner, bien décidé à faire preuve de franchise à l’égard de Sélénya « Je voulais prendre un raccourci par la rivière, d’habitude avec Enola on saute de pierre en pierre et on s’en sort bien. Là, sauter me semblait difficile vu qu’on était attaché. J’ai donc voulu qu’on y aille à la nage, elle a dit non sans donner d’explications. » Par cette fin de phrase, Elise essayait de montrer l’incompréhension qu’elle avait ressenti ce jour-là. Certainement que si Adèle lui avait expliqué, elle aurait abandonné l’idée, ne souhaitant pas jouer avec les inquiétudes de sa cousine. Elle reprit la parole, un brin de culpabilité se faisant entendre dans sa voix. « Je l’ai poussé, parce qu’elle m’énervait, qu’elle ne faisait aucun effort, que je voulais qu’on finisse au plus vite. On est tombé à l’eau parce qu’elle ne devait pas s’y attendre. Elle était tétanisée, elle m’a pris pour sa sœur et j’ai dû nager jusqu’à la rive en ayant un poids mort accroché à moi. Un poids mort que je devais empêcher de couler et de boire la tasse au risque qu’elle panique ou qu’elle perde connaissance. » Les prunelles d’Elise accrochèrent celle de sa camarade tandis qu’amer elle reconnaissait avec froideur. « Je l’ai mise en danger mais j’ai donné de ma personne pour la sortir de ce pétrin pour qu’au final, dès que je n’étais pas utile pour sa misérable vie, elle m’en mette plein la tronche. » Et voilà, c’était ce qu’elle avait voulu dire lorsqu’elle avait parlé de sauver la vie. Elle aurait pu aussi raconter l’histoire sur le balai mais ça n’avait pas vraiment d’importance si ? C’était  pas des plus intéressants à raconter. En plus reconnaître qu’elle avait galéré sur un balai à Sélénya, c’était presque un crime contre l’humanité ça… un peu comme si elle lui disait qu’elle avait sérieusement songé à tuer la licorne… ouai peut être que cet épisode allait rester sous silence, faire l’innocente c’est très bien.

D’accord, Sélénya marquait un point, vu le tableau de famille que dépeignait Elise, il paraissait logique que Froggy ait décidé de venir faire un tour dans la famille de son oncle. Encore que, elle aurait pu préférer rester avec Hestia, après tout n’étaient-elles pas devenues les meilleures amies du monde ? Sûrement que dans la famille Carrow, Adèle aurait été accueilli en grande pompe et pourtant, loin de l’image parfaite qu’elle voulait donner d’elle, la Serpentarde était pas plus sang pur qu’Elise et Amaury, bon peut-être un peu plus puisque la mère des jumeaux était née moldue. Cependant, elle au moins n’avait pas commis quelque chose l’obligeant à fuir sa famille, il faut savoir ce qu’on veut. Elle grogna, de mauvaise grâce « Non, tu as raison… c’est logique. »
Et si là, elle était grognon, la phrase suivante de Sélénya bloqua totalement Elise. En plus c’était un murmure, signe que c’était une constatation n’admettant aucune autre vérité que celle qu’elle exposait. Ça ne passa pas, le regard d’Elise se fit beaucoup plus froid, tandis que l’agacement la gagnait, la jalousie à l’idée qu’on reconnaisse Adèle comme quelqu’un d’intelligente, concurrence directe pour Elise. C’est amer qu’elle s’exprima. « Si tu dis ça uniquement parce qu’elle est en médecine. C’est une classe de boulets. » Non, elle n’avait pas pour autant nier l’intelligence de sa cousine, se contentant de la passer sous silence.

Heureusement pour le moral d’Elise, le sujet revint sur quelque chose de beaucoup plus positif, le lien frère et sœur. Ah pour le coup, elle n’avait pas à se plaindre, Amaury restait la personne qui se dresserait contre vents et marées pour sa sœur. L’inverse étant d’ailleurs tout aussi vrai, Elise avait beau être une trouillarde finie, elle serait la première à monter au créneau pour protéger ce frère et d’ailleurs, c’était ce qu’elle avait fait avec Adèle, ne se contentant pas de la mépriser en silence.
Le sourire revint sur le visage d’Elise quand elle entendit les propos de Sélénya. Elle n’avait pas entièrement tort, Froggy pouvait s’estimer heureuse, ils n’étaient que deux. « Je plains mes parents si on avait été plus, déjà qu’il semblerait que petits Amaury et moi étions pas les enfants les plus faciles à éduquer, si on avait plus nombreux, je pense que mes parents auraient mérité une médaille… L’inverse est aussi vrai par contre, imagine si Froggy avait eu une sœur jumelle avec qui elle s’entendait bien… ça aurait été l’enfer à Poudlard. »
Déjà que là c'était invivable pour Elise qui devait la supporter TOUS les jours, avec une deuxième comme la première... horrible.

Comment une simple projection dans un univers parallèle pouvait donner autant de plaisir ? Comment une simple phrase de la part de Sélénya pouvait être aussi sympathique ? Et au vu du sourire qu’elle offrit à sa cadette, elle le pensait réellement. Il était impossible de refaire le passé, Elise le savait et il y aurait sûrement des choses qu’elle aurait changé si elle en avait eu la possibilité. Sauf qu’habituellement lorsque quelqu’un veut changer le passé c’est pour modifier quelque chose qui s’est mal déroulé, là c’était différent, c’était positif. Ce n’était d’ailleurs pas dû au fait qu’elle avait manqué d’amour dans sa vie que ce soit au niveau de ses parents, ou de son frère. C’était juste que ça lui aurait fait plaisir de l’avoir dans la famille même si la Poufsouffle n’avait rien à envier à Adèle. S’il fallait en sauver une, ce ne serait pas les liens du sang qui triompherait. C’est bien beau de partager son sang avec quelqu’un mais ça ne faisait pas tout.

Preuve en était, lorsqu’il avait fallu faire une petite virée dans les bois avec Adèle et dans une rivière… Oui déjà le genre de truc qu’Elise adorait dans la vie, sortir pour faire un peu de sport, parce que oui marcher, c’était carrément du sport. Et bien Elise trouvait qu’on lui avait mal donné sa partenaire. Elle était persuadée qu’il aurait été beaucoup plus simple de traverser une rivière avec Sélénya, bon d’accord il y aurait peut-être eu quelques tensions, non parce qu’Elise n’était pas non plus naïve au point de croire que Sélénya lui aurait fait un immense sourire plein de bienveillance si elle la foutait à la flotte.
Il n’empêche que le compliment de son amie lui fit chaud au cœur. Le manque de courage d’Elise était connu de bien des gens et qu’une personne proche d’elle lui fasse remarquer qu’elle avait été courageuse de ne pas avoir paniquer, ça avait quelque chose de jouissif. Surtout que ça venait quand même de Sélénya qui avait dû, plus d’une fois, faire face à une Elise qui ne voulait plus toucher – et on ne parle même pas de remonter – sur un balai après une chute. Ah non mais quand Elise ratait quelque chose, en règle générale, elle n’allait pas s’y confronter une seconde fois. Il en fallait donc de la patience pour la convaincre. Mais cette fois-ci, en effet, elle avait fait de son mieux pour ne pas céder à la panique. C’est pleine de franchise qu’elle reconnut, avouant sans mal ses failles. « J’étais morte de trouille. J’avais l’impression que je nous avais condamné à mort que si on y passait, c’était uniquement parce que j’avais agi comme une imbécile, refusant de comprendre que si elle ne voulait pas y aller, ce n’était pas parce qu’elle était chiante… même si elle est chiante quand même, ça n’enlève rien à son comportement. Mais, cette fois ci, elle avait une bonne raison. »

A la question de Sélénya, Elise ne sut pas quoi répondre. Pour elle aussi, c’était un mystère.  Si encore elles n’avaient pas été élevés ensemble, ça aurait pu se comprendre, elles se découvraient et ça ne passait pas. Après tout, c’était bien ce qui arrivait pour les cousines, elles apprenaient à se connaître et ça n’allait pas du tout entre elles. Sauf qu’Elise n’était pas le genre de personne à vouloir tuer, certes elle ne l’aimait pas et le reconnaissait sans mal mais pour de là, la tuer, c’était un pas beaucoup trop grand à franchir pour elle. Elle haussa donc les épaules « Je n’en sais pas plus que toi à ce sujet. Je ne l’ai jamais rencontré et la seule personne qui peut me parler d’elle n’est pas vraiment mon amie. Je n’ai pas du tout envie de la rencontrer cette sœur en revanche. Si c’est une psychopathe qui essaie de tuer tout le monde.  Je ne suis pas emballée. »

L’amertume d’Elise avait visiblement le pouvoir de faire sourire Sélénya, ah oui non mais ce sourire-là était pas du tout recherché par Elise. D’ailleurs à sa remarque, Elise dressa un sourcil, non mais la grosse blague, tien il manquerait plus que ça. C’est sans la moindre trace d’humour qu’Elise marmonna « Encore heureux. » Ah oui, c’est que la demoiselle, elle ne voulait pas être comparé à sa cousine en règle général mais si c’était au niveau intellect, ce n’était pas la peine d’essayer d’attendre de la modestie de la part d’Elise. Elle n’était tout simplement pas modeste. Pourtant, loin de se laisser influencer par la mauvaise humeur d’Elise, Sélénya décida de continuer sur ce sujet, voulant visiblement avoir le dernier mot face à une Elise qui restait de marbre, refusant catégoriquement d’abdiquer « Assez bête pour s’en prendre à moi. » Difficile pour Elise de lever le pied lorsqu’il s’agissait de l’intellect, trop peur de la concurrence pour qu’elle accepte de reconnaître que Sélénya était dans le vrai.  Par contre, il est vrai que ce fut un soulagement pour la blondinette que son amie fasse la remarque que c’était sa préférée, elle expira, s’apercevant qu’elle avait été totalement crispée pendant tout le temps qu’avait duré la conversation Froggy, comme quoi, cette conversation ne lui plaisait pas du tout.

A la phrase de Sélénya, Elise fit tout simplement les yeux ronds. C’est bien simple, aux yeux d’Elise, Sélénya c’était un peu le genre de personne à qui tout le monde veut ressembler alors que son modèle fasse la remarque comme quoi elle plaignait ses parents, c’était inconcevable. D’ailleurs, elle confirma pour elle que oui ça avait dû aller, et le deuxième hochement pour confirmer tout cela. Non vraiment, elle ne voyait pas comment elle pouvait dire qu’elle avait fait des bêtises. A la limite, Elise voulait bien reconnaître que Sélénya avait bien voulu suivre ses amis dans des fêtes qui ne plaisaient pas particulièrement à ses parents mais, ça ne venait pas d’elle et ça faisait de Sélénya une bonne camarade, pas quelqu’un faisant des bêtises. C’est avec conviction qu’elle lui glissa « Oh je pense qu’il ne pouvait pas espérer meilleur enfant que toi. »Non vraiment, impossible de réussir à enlever de l’esprit d’Elise que Sélénya c’était le modèle à suivre.

D’ailleurs le modèle avait entièrement raison sur le fait que ça aurait été une véritable catastrophe s’il y avait eu deux grenouilles françaises dans l’enceinte du château. Pour sûr qu’Elise aurait pété un cable, déjà que là, c’était à la limite du supportable… Sélénya n’était vraiment pas loin de la vérité. Elle marmonna, à moitié sérieuse « J’avoue que j’aurais sûrement été tenter de faire cramer les deux cousines. Après tout, la grenouille ça doit être meilleur cuit…Je n’aurais donc rien fait de plus que de respecter les traditions culinaires de ma famille française. » C’était tout vu, il ne fallait pas de deuxième Froggy à l’école pour le bien être moral d’Elise… surtout que si derrière Sélénya faisait l’éloge de l’intelligence – d’ailleurs quelle intelligence on se le demande – des deux cousines d’Elise et plus seulement d’Adèle. C’était le risque qu’Elise fasse la tronche à longueur de temps. Non mais de toute façon, là, rien que prouver à Sélénya qu’effectivement, elle n’avait rien à envier à Adèle, elle allait mettre un point d’honneur à avoir une meilleure note que cette dernière au prochain examen, comme ça… elle serait sûre.