C’est samedi. Tu aimes les samedis parce que les samedis, c’est grosse murge au White Thestral et ça depuis des années. Depuis que vous êtes en Angleterre, c’est un des rituels auquel tu ne déroges pas parce qu’il permet de se retrouver ensemble, que la famille soit réunie et que vous vous amusiez tout en décompressant de la semaine. Lors de ces soirées, se joignent bien entendu Anjelica et Jaeden, parfois Adèle et Théodora, mais tu as alors l’impression d’être invincible avec eux. C’est ta famille, c’est ta raison de vivre et de te battre. Mais avant de pouvoir boire jusqu’à plus soif, avant de pouvoir faire tout cela, il y a ce rendez-vous avec Raphaël en début d’après-midi noté sur ton agenda et cela risque de prendre du temps. Tout l’après-midi en réalité.

Lorsque le jeune moldu s’est pointé un soir pour te parler tatouage, tu n’y as pas cru tes oreilles. Il faut dire que tu n’as pas l’habitude de tatouer d’autres personnes que les membres de la Cosa Nostra ou des connaissances de la famille. Mais Raphaël n’est pas n’importe quel moldu puisqu’il est un ami de Jaeden et d’Anje, et donc par conséquence, un de tes amis. Enfin ami, il ne faut pas exagérer, disons que tu es prêt à lui rendre ce service, parce que t’es sympa comme mec. Le jeune homme a été gravement blessé lors de l’attaque de l’Institut attaque dont tu s’es sorti sans la moindre égratignure d’ailleurs, parce que c’est ça, la Zabini attitude, et ouais les loosers désolé pour vous ; il a été mordu par les clébards que ces putains de Blood Circle ont lancé sur la foule déchaînée. Tu n’es pas certain que c’était la place de Raphaël d’être là malgré le fait qu’il semble impliqué dans le combat que mène les sorciers pour faire comprendre au monde moldu que vous n’êtes pas les méchants de l’histoire. Mais c’était peut-être ridicule de s’investir autant quand on a pas les capacités physiques pour se défendre, mais là c’est ton humble avis qui prévaut. Si Raphaël avait envie de se faire bouffer à chaque raid sorcier, entre guillemets, c’est son souci et non le tien. Lorsqu’il est arrivé au White Thestral il y a quelques semaines, avec l’envie farouche de te faire tatouer dans l’heure (déjà non mais le gars il croit que tu as que ça à faire ou quoi ?), tu as du réfréner ses ardeurs en lui disant que vu la gueule de sa blessure, cela n’allait pas être possible tout de suite. La cicatrisation n’était pas terminée et tu lui avais conseillé une crème pour favoriser celle-ci et accélérer le processus de guérison.

Tu es en train de préparer la salle, la porte ouverte sur le bar où quelques clients attendent qu’on serve leur café. Il faut dire qu’en journée, c’est souvent assez calme, ce qui te permet de tout installer jusqu’à l’arrivée du moldu qui ne tarde pas à se pointer. Tu viens à sa rencontre alors qu’il passe la porte du bar et lui fais signe de te suivre. Tu lui pointes le fauteuil dans lequel il s’assoit bien rapidement tout en commençant à se déshabiller. « Bah putain, t’es sacrément excité, on dirait moi lors de mon premier rapport sexuel. » ricanes-tu en regardant le jeune garçon. Tu secoues la tête : « Non, comme tu me l’avais demandé, je ne lui ai rien dit. » Tu sais garder un secret lorsqu’on t’en confie un. Et puis au final, tu peux comprendre qu’il veuille garder la surprise pour ses proches. Un tatouage, ce n’est jamais anodin. Après, qu’il ne compte pas rivaliser avec Jaeden, il n’existe personne au monde de plus tatoué que lui. Il n’est jamais surpris de rien à ce niveau-là. Quoi que… Le modèle pensé par Raphaël est simplement magnifique. Tu avais réfléchi longtemps à ce qu’il souhaitait et tu avais réalisé plusieurs croquis avant d’arriver au modèle qui lui plaisait. Un tatouage en deux parties, ce n’est pas si commun. Les deux avant-bras du jeune homme seront bientôt recouverts d’un magnifique Phenix qui s’échappe de sa cage. Tu as rapidement compris qu’il avait un lien avec l’Ordre du Phénix mais tu n’as jamais posé de question, ce n’est pas le genre de la maison de questionner les amis.

Tu lui montres le dernier croquis réalisé par tes soins et lui demandes : « On part toujours sur ça ? J’ai rajouté des ombrages ici et là. » Tu lui montres les endroits où tu as accentué l’ombre et les floutages pour rendre le tatouage plus vivant, plus intéressant. Tandis que Raphaël vérifie que tout lui convient, tu attrapes son bras et vérifies sa cicatrice : « C’est nickel pour tatouer, cela a bien cicatrisé. » Tu commences par nettoyer la peau de Raphaël pour la préparer à l’aiguille qui va bientôt mitrailler sa peau, il est probable qu’il fasse moins le malin lorsqu’il verra la taille de l’aiguille.

Tu es amusé de voir à quel point Raphaël est excité et attend avec impatience que tu tatoues un motif à l’encre indélébile sur sa peau. C’est souvent ainsi lors de premiers tatouages en réalité. Même si celui que tu portes au bras est l’unique que tu possèdes, tu as remarqué que la plupart des personnes que tu tatoues reviennent quelques jours après pour un second, puis pour un troisième, voire davantage pour les plus férus. Personnellement, personne ne dépassera jamais Jaeden en la matière mais il est vrai que tu prends plaisir à marquer la peau des clients. Lorsque ton meilleur ami t’a présenté Raphaël, tu as rapidement accepter de tatouer le modèle qu’il désirait : une cage et un Phénix, tout un symbole pour lui. Tu as accepté par pur philanthropie vous y croyez vous? : déjà parce que, en tant que pote de Jaeden il a le droit à un passe-droit -bah oui, tu ne tatoues pas n’importe qui-, de plus le motif choisi par le moldu était intéressant et t'a plu, et enfin c’était un beau moyen pour lui de camoufler cette blessure infligée par les chiens fous du Blood Circle. Te concernant, même si tu n’as que faire de la guerre entre Mangemorts et Ordre du Phénix, tu n’en demeures pas moins que tu n’es pas d’accord avec les agissements des Blood Circle, encore moins quand cela blesse des moldus innocents. Enfin bon, quoi qu’il en soit, lors de ce fameux raid, Raphaël avait hérité d’une bien jolie blessure. Te concernant, pas une seule égratignure au compteur mais tu te promets de ne pas en parler au moldu, il pourrait se sentir rabaissé, voire même carrément nul même si c'est la vérité. Même si en soi, tu n’approuvais guère ce genre de mission kamikaze. Il avait été idiot mais bon, que veux-tu, peu ont ton génie. « Ce n’était pas forcé, ton tatouage est sur l’avant-bras, pas sur l’épaule ou le buste. Mais t’inquiète, je vais pas mater. » ricanes-tu lorsqu'il te demande s'il a eu tort de se dévêtir. Il faut dire que Raphaël n’est pas très malin, ni voluptueux, donc il ne t’intéressait pas du tout.

Tu confirmes à Raphaël n’avoir rien dit à Jaeden et un sourire satisfait s’installe sur les lèvres du français ; il tient vraiment à ce que la surprise soit complète. C’est amusant comme les gens veulent toujours surprendre les autres. Le croquis que tu as effectué sur la base des souhaits du moldu semble lui plaire également. Tu es ravi que cela lui plaise, il faut dire que tu as passé quelques heures dessus pour que cela soit parfait et à sa convenance. Tu aimes les choses bien faites comme Théodora. Pendant que tu examines sa blessure, celle qu’il souhaite masquer, Raphaël te demande comment tu comptes t’y prendre pour couvrir la cicatrice et tu attrapes le dessin pour lui montrer. « Je vais me servir de l’armature de ses ailes, ici et ici. Limite la cicatrice va donner du relief, ça va être top, ne t’en fais pas. » Tu tentes de le rassurer tandis que tu nettoies sa peau, bientôt elle sera mitraillée par une aiguille sans relâche. Tu passes également une crème anesthésiante pour tenter de calmer la douleur mais cela ne l’empêchera pas. « Ravi que ça te plaise en tout cas. » conclues-tu, pensant que la conversation va s’arrêter là et que tu vas pouvoir commencer à travailler tranquillement. Tu l’avoues, tu aimes bosser en silence parce que tu te mets dans ta bulle et que tu ne penses plus à rien. Cela te permet aussi te garder toute ta concentration, toute ton attention.

Raphaël n’est pas de cet avis puisqu’il réouvre la bouche dix secondes plus tard, te posant mille et une questions. Celles-ci sont légitimes alors tu te contentes de lui répondre le plus précisément possible. « Bah la crème que je viens de te mettre va atténuer un peu la douleur mais tu sentiras quand même. On peut pas faire d’anesthésie locale, la peau serait toute molle et ça irait pas pour tatouer. Et puis je suis pas médicomage, je sais pas comment tu peux réagir à un produit comme ça. » réponds-tu tranquillement tandis que tu prépares les aiguilles et enfiles tes gants après avoir désinfecté le matériel. « Comme tu veux pour le paiement, j’accepte les deux. » dis-tu, concis. Il faut dire que la Cosa Nostra a de l’influence des deux côtés, que ce soit côté magique et sorcier, tout comme le Thestral Motor d’ailleurs. Peu importe dans quelle monnaie il te paiera, cet argent sera blanchi les affaires sont les affaires. Alors que tu t’apprêtes à débuter, tu soupires lorsqu’il se dégage pour farfouiller dans son vieux sac moche. Tu te redresses sur ton tabouret et croises les bras autour de ta poitrine, légèrement agacé. Tu te contiens parce que c’est un pote de Jaeden mais putain, il est agaçant non ? Tu le regardes sortir une caméra et tu fronces les sourcils à sa demande saugrenue. « Euh ok mais tu me filmes pas et tu me mets pas sur votre informatique là, internet truc muche. » Tu souris doucement : « Ouais, je sais, dommage, ma tête rend si bien en vidéo, t’aurais buzzé de fou. » Une bombe atomique sur la caméra, bien sûr que ça aurait fait boum vous avez vu le jeu de mot ? c’est marrant non ? Allez riez un peu s’il vous plaît ! Tu attrapes l’aiguille et tu demandes : « On y va ? Je commence par la cage, c’est plus simple et cela t’habituera à la douleur. Tu auras plus mal sur l’autre à cause de la cicatrice je pense. » Tu te rapproches de lui et lui demandes l’approbation pour débuter. Quelques secondes plus tard, l’aiguille mitraille enfin la peau blanche de Raphaël, bientôt à jamais marquée par une multitude de traits à l’encre inaltérable.

Tu souris en entendant ce que Raphaël te répond sur le fait de mater. Il faut dire que tu ne te prives pas pour te rincer l’œil quand tu le peux mais bon, que le jeune homme se rassure, il n’est franchement pas ton genre. Pas du tout même. Il lui manque de sacrés atouts bien situés. Et étant donné ce que tu vois actuellement, Raphaël est loin de les posséder. « Certains oui, mais t’inquiète pas, t’en feras pas partie. » dis-tu en ricanant doucement. « T’as pas ce qu’il faut. » Tu ajoutes : « Cela ne m’empêche pas de demeurer très professionnel. » Tes tatouages sont toujours réalisés à la perfection. Peu importe que la nana soit super bien gaulée et que tes yeux lorgnent outrageusement sur sa poitrine ou sur le creux de ses reins ; il n’empêche que chaque client ou client est toujours reparti satisfait du White Thestral.

Les précisions sur le tatouage passées, tu tentes de réassurer le jeune homme et cela fonctionne. Raphaël semble ravi de ce que tu proposes de faire pour lier le tatouage à la vilaine cicatrice qu’il tente de dissimuler. Il faut dire que c’est le but premier de l’encre noire sur sa peau donc tu t’es évertué à trouver la meilleure solution, celle qui permettra au jeune homme de camoufler sa blessure tout en ne l’oubliant jamais ; elle fera bientôt partie de lui et de l’histoire du tatouage. Tu aimes bien ces demandes : ce n’est pas si souvent que cela qu’on cherche à embellir une blessure mais tu trouves l’idée foutrement belle. Ne pas faire disparaître la cicatrice mais la sublimer au travers d’un dessin à jamais gravé dans l’épiderme, voilà ce que cherche Raphaël et les autres clients comme lui. « Ravi que cela te plaise. » Après quelques banalités échangées notamment sur le mode de paiement et sur la gestion de la douleur, le moldu fit une demande un peu particulière : il souhaitait filmer le truc. Filmer le moment où tu allais marteler sa peau. Tu n’as rien contre même si tu n’as franchement pas envie de te retrouver sur l’internet, le lieu où les moldus se retrouvent pour diffuser des choses inutiles. Non pas que tu ne souhaites pas que le monde entier admire ton sublissime visage et ton incroyable travail, cela n’est pas ça, mais tu n’as pas envie de te retrouver à devoir justifier cette activité qui n’est pas tellement déclarée et qui n’est qu’un passe-temps par-dessus le marché. Pas envie de te retrouver avec des dizaines de clients qui souhaitent passer entre tes mains expertes comprenez ce que vous voulez « D’accord pas de problème. C’est vrai que la première fois, c’est un moment dont on se souvient. » Cela indique aussi à quel point l’on devient accro ou non à ces aiguilles. Si l’on regarde Jaeden, effectivement, on peut sans contexte dire qu’on en veut toujours davantage. Mais si l’on regarde ta sœur et toi, on se rend compte rapidement à quel point certaines autres personnes restent plus sobres. Toi-même, seul le tatouage de la Cosa Nostra vient noircir ta peau. Anjelica en possède un autre que tu lui as fait à la mort d’Andréa mais rien d’aussi voyant que Jaeden. Les gens réagissent différemment. « Après notre rendez-vous, tu sauras assez vite si tu en veux d’autres ou non. Cela t’apparaîtra assez rapidement. » Sur ces bonnes paroles, tu commences ton travail. L’aiguille martèle enfin la peau du jeune moldu et tu mets Raphaël en garde sur la douleur mais il fait son gros dur en rappelant que la morsure du chien qui lui a valu son petit séjour dans la salle de tatouage est sans doute bien plus douloureuse, ce qui est probablement vrai après tout. Te concernant, tu as échappé sans problème à ce clébard donc tu ne sais pas ce que ça peut faire de sentir les crocs de l’animal dans sa chair. Pas de chance pour Raphaël.

Le silence s’installe ensuite et tu travailles religieusement, avec précaution, méticuleusement. Tu aimes cette ambiance tranquille où rien ne vient troubler ce que tu fais, où rien ne vient troubler cette quiétude et ta concentration. Tes pensées divaguent loin tandis que la cage prend doucement forme sur le bras de Raphaël. Les traits sont fins, délicats, épurés et tu te félicites d’être si bon. Raphaël gigotte à un moment où une aiguille touche probablement une veine, rendant le coup d’aiguille plus douloureux. « Désolé. » dis-tu sans le penser vraiment. C’est le revers de la médaille pour une œuvre de qualité, il faut passer par là et par la douleur. Tu relèves l’aiguille de la peau de Raphaël et ta tête se tourne vers lui lorsqu’il t’interroge bien soudainement sur le Conseil d’administration. Tu gardes une expression neutre et te repenches sur le tatouage pour ne pas qu’il puisse lire tes réactions. Tu détestes le Conseil. Tu hais ce qu’ils sont, tu hais comment tu dois les servir. Comment être neutre sans griller ta couverture ? En mentant, bien évidemment. Il allait falloir user de supercherie. Par chance, c’est une de tes qualités. « C’est Jae qui te l’a dit ? » Cela t’intéresse de le savoir. « Cela ne fait pas très longtemps que j’en fais partie. Seulement depuis quelques semaines en réalité. » Depuis ton retour d’Italie. Tu avais rapidement eu envie de défaire Anjelica de cette obligation. « Disons que le Conseil était intéressé par ce que notre entreprise pouvait leur apporter en tant que boîte qui fonctionne bien et qui a un lien entre les deux mondes. » Ce n’est pas totalement la vérité mais tu dois bien t’en arranger. « Anje avait été approchée et faisait déjà le lien entre eux et nous, j’ai repris le relais à mon retour. Cela s’est fait assez naturellement. Le Conseil recherche des ambassadeurs donc il suffit simplement de te présenter et d’expliquer ce que tu peux apporter à la cause. » Cause dont tu te fiches éperdument en réalité. Rien ne t’intéresse en dehors de ton propre business et de la protection de ta famille. « Disons que pour le moment, je prends mes marques. Je dirige une entreprise qui emploie de nombreux sorciers que ce soit sur le Thestral Motor ou le White Thestral, ils me demandent notamment mon avis sur la poursuite de la gestion des entreprises dans le contexte de crise qu’on traverse. Ils ont finalement besoin de personnes qui sont proches des réalités de terrain et qui collaborent côté sorcier et côté moldu. » En fait, ça, c’est le côté officiel. Il y a bien évidemment tout le côté officieux avec certaines demandes de transports délicates et illicites mais étrangement, le conseil s’en arrange bien quand c’est à son avantage. Avoir les pieds et mains liés à cause de ce connard de William, voilà où vous en êtes rendus. Tu demandes : « Pourquoi cette question ? » On ne pose jamais de telles questions au hasard et tu t’interroges sur les motivations du jeune français sur ton rôle au conseil.

Maintenant que les bavassages de convenance sont terminées, tu t’évertues à te concentrer sur la tâche pour laquelle il est venu. Le tatouage. Il est vrai que le motif que tu as dessiné selon ses volontés est vraiment réussi et tu as hâte de pouvoir le voir une fois fini. L’encre noire contraste avec une simplicité déconcertante avec la peau blanche du jeune moldu. Tu souris à chaque trait dessiné, chaque dessin qui prend forme tout en y prenant un plaisir non dissimulé. Tu aimes ça, tatouer. C’est l’une des choses que tu apprécies le plus avec le dessin, cela te met dans un état de calme que tu ne saurais définir. Alors que tu t’attaques à un des éléments plus complexes du tatouage, Raphaël brise le silence en te posant des questions sur ton rôle en tant qu’Ambassadeur. Si au prime abord tu hésites à l’envoyer chier, tu te contiens pour Anjelica. Elle aime bien ce gars-là alors il ne s’agit pas non plus de se montrer désagréable. Pour autant, tu aurais toutes les raisons de l’être. Après tout, tu n’as nulle envie de faire parti de ce Conseil. On t’y a forcé, toi et la Cosa Nostra d’ailleurs. Tu t’enquières de savoir comment il a eu l’info et tu es rassuré quand tu comprends que ce n’est pas Jaeden qui lui a dit. « D’accord. » dis-tu lorsqu’il évoque le registre. Après tout, même si c’est connu de tous, tu n’as pas forcément envie que cela s’ébruite et que tu doives répondre tous les quatre matins à d’autres gugus comme Raphaël qui s’interroge. Non pas que cela te dérange tant que ça, mais tu n’as pas envie de devoir encore et toujours déblatérer les mêmes conneries alors que tu en as strictement rien à branler. Moins on te parle du Conseil, mieux tu te portes.

Tu expliques néanmoins quelques brides de la raison pour laquelle tu es obligé de t’asservir à ce putain de conseil, en enrobant la vérité par quelques mensonges. C’est l’histoire que tu balances à chaque fois. « Je ne pense pas. » dis-tu lorsqu’il demande s’ils sont au courant pour les courses. « Après, peut-être qu’ils ferment les yeux. Cela n’a rien à voir avec le Conseil. Cela n’apporterait rien. » C’est faux et tu le sais, c’est justement ce qui les intéresse mais Raphaël n’a pas à savoir ça alors tu dissimules la vérité derrière un joli drap de soie, comme d’ordinaire. Intéressant. C’est le mot qu’il prononce lorsque tu termines ton discours et tu ne peux t’empêcher de refreiner un haussement de sourcils. Super intéressant ouais…. On a pas tous la même définition du mot intéressant, apparemment. Pour toi, un contrat juteux c’est intéressant, une nana canon c’est intéressant, un rail de coke c’est intéressant. Pas devoir se faire chier tous les jeudis soir aux réunions des ambassadeurs. Ça non. Comme quoi, il faut vraiment de tout pour faire un monde.

Tu relèves les yeux vers Raphaël quand il explique faire parti de l’Ordre du Phénix. Tu l’ignorais et cela te surprend. Ni positivement ni négativement. Cela te surprend, c’est tout. Il est vrai que dans cette guerre, tu es neutre, la seule allégeance qui t’importe est celle de la Cosa Nostra, l’allégeance à ta famille, à ton clan, à la mafia. Le reste n’a que peu d’importance tant que cela ne vient pas déranger ton business et tes affaires. « Je ne le savais pas. » dis-tu tranquillement tout en te penchant à nouveau vers son bras. Tes doigts se crispent de manière presque imperceptible sur l’aiguille lorsqu’il évoque Elyssa Rosier et un sourire carnassier s’installe sur tes lèvres. Rosier, une vivante contradiction à elle toute seule. Tu as eu l’occasion de la côtoyer d’assez près et c’est une femme effectivement très intéressante, et cette fois-ci, le mot est réellement bien choisi. Pour autant, tu détestes qu’elle tourne autour de la Cosa Nostra, tu détestes qu’elle enquête et tu détestes qu’elle vienne fouiner. Heureusement pour toi, depuis qu’elle est au Conseil, elle a d’autres chats à fouetter.

Tu écoutes sagement, continuant ton travail avec la rigueur et les soins qui te caractérisent tout en l’écoutant lui expliquer son entrevue avec Rosier. Tu hoches la tête à plusieurs reprises afin de montrer qu’il a ton attention, plus par politesse que pour autre chose. Lorsqu’il a terminé, tu dis : « Tu veux mon avis ? » Oui dis oui ahahah ça te rappelle quelqu’un ? Tu n’es pas bon pour donner des conseils, mais il est là pour ça. « T’as l’air d’être un gars intelligent sinon tu serai pas amie avec ma sœur. Cela a l’air d’être une cause qui te tient à cœur. Je pense qu’effectivement ce combat a besoin de personnes qui ont vraiment envie de s’y impliquer. » Tu rajoutes : « Il y aura toujours des gens plus légitimes ou méritants. Mais tu as raison, si tout le monde se dit ça, personne ne fait rien en définitive. » Tu t’arrêtes de tatouer un instant, posant l’aiguille sur la table et scrutes les traits prenant vie sur la peau de Raphaël. Parfait. Tu reprends ta besogne et soupires : « Tu peux toujours essayer de proposer l’idée, au moins, cela permettra peut-être d’ouvrir le débat. Mais je suis d’accord avec toi, je ne serai pas serein à ta place en tant que moldu chez les Ambassadeurs. » Tu n’as nul besoin d’expliciter, il sait de quoi tu parles. « Tu fais partie de l’Ordre, t’es en quelque sorte choyé là-bas. Les sorciers qui y sont croient réellement à la paix entre les moldus et sorciers et s’y attèlent du mieux qu’ils peuvent. Mais au Conseil, se lancer dans la gueule du loup avec la moitié des gens qui veulent ta mort, c’est effectivement pas le meilleur plan. » Tu ajoutes : « Je ne sais pas s’il y a de bonnes ou de mauvaises réponses. Mais si j’étais moldu au conseil, j’aurai peur à mon cul. » Tu termines : « Le Blood Circle a fait trop de mal Raphaël. Les partisans de la magie noire sont plus nombreux que jamais. Peut-être qu’il faudrait penser à une autre instance qui n’existe qu’au sein de l’Ordre pour commencer ? J’en sais rien, je pense à voix haute. » Tu conclues : « Quelles compétences tu pourrais apporter ? »

Raphaël est épuisant à ouvrir sa grande bouche. D’ordinaire, tu aimes bosser dans le calme. Après les quelques échanges de convenance concernant la pluie, le beau temps et les derniers détails sur le tatouage, tu avais espéré -il faut bien le dire- pouvoir travailler en paix mais cela ne semblait pas être l’idée du jeune Raphaël qui te pose des questions sur ton rôle en tant qu’Ambassadeur. Si la première idée qui te traverse l’esprit est de dire la vérité, de dire que t’en as rien à branler et que ça te fait chier d’être mêlé à toute cette merde, tu te dis que tu ne peux pas faire ça parce que cela serait trahir ta couverture et tu ne le souhaites pas. Alors au lieu de mentir, tu lui sors la version édulcorée que tu balances à chaque personne qui te pose des questions sur le sujet. Pour être honnête, c’est assez rare qu’on vienne t’enquiquiner sur cela. La plupart des membres de la Cosa Nostra n’a que faire du Conseil d’Administration. Lorsque Raphaël annonce qu’il fait parti de l’Ordre du Phenix, tu es surpris et le jeune homme explique qu’il ne s’en cache pas. Tu hausses les épaules. « Ah c’est pas vraiment la raison de ma surprise. Je reviens d’un an en Italie, je savais pas que l’Ordre avait élargi ses critères d’inclusion, c’est tout. C’est pas si idiot que ça que des moldus en fassent partie en réalité. » Tu ricanes doucement en repensant à ce qu’il a dit être lui, oh oui, tu vois très bien ce qu’il veut dire par-là… Un moldu relou qui pose plein de questions, étonnant qu’il ne passe pas inaperçu. Tu ravales ta boutade et restes poli. Après tout, c’est un ami d’Anje et Jae’, alors continuons à mettre les formes.

Après avoir expliqué tout ce que tu pouvais lui dire sans se griller, tu espères avoir la paix. Mais non, Raphaël te demande clairement ton avis sur la question alors tu le lui donnes, tout en ignorant si cela va lui convenir ou non. Raphaël pose la question de savoir s’il doit le faire ou non et tu ne sais pas quoi lui répondre. A-t-il envie d’être du bétail près à subir le courroux des mangemorts ? Après avoir donné ton avis, Raphaël explique qu’il ne veut pas perdre de temps et qu’il est presque inutile de prêcher la bonne parole à des gens qui croient déjà que la paix est possible. « C’est juste. » dis-tu en opinant de la tête tout en continuant le tatouage, méticuleux. Briser le cercle vicieux ? Tu y crois aussi. Pas pour les mêmes raisons que Raphaël. Cela serait bon pour ton business c’est certain. Mais au fond, n’es-tu pas d’accord avec cela ? Même si la famille Zabini a eu quelques tendances mangemortes il y a quelques générations, Anjelica et toi n’avaient jamais perpétués cette tradition, tout comme votre père. Des amis moldus, des amis sorciers, peu importe bien. Et même si tu complais davantage dans le monde sorcier, tu sais qu’Anjelica a beaucoup d’amis dans le monde moldu et cela ne te pose aucun problème. « Pas faux. » dis-tu distraitement lorsqu’il évoque le fait qu’il pourrait avoir des « gardes », des « agents de sécurité » qui pourraient l’escorter. « Prends peut-être un nom d’emprunt ? Je sais pas ? Fais gaffe à ta famille. » conseilles-tu. La famille, n’est-ce pas ce qu’il y a de plus important ?

Ce sont les derniers mots que tu prononces parce qu’ensuite, Raphaël se lance dans une si longue explication que tu n’écoutes pas tout. Mais ce mec est un véritable moulin à parole ! Si au début tu te dis que tu vas répondre à tout cela, tu te dis ensuite que c’est presque vain. Raphaël fait les questions et les réponses seul. Cela tombe bien, cela te permet de demeurer concentré sur ta tâche qui prend forme petit à petit sur le bras du jeune homme. Tu ne captes que quelques mots clés recueillir des témoignages, blabla ; gouvernement Kane blabla ; propagande anti-sorcière blabla. Il y a déjà tellement réfléchi, tu te demandes vraiment s’il avait besoin de ton aide où s’il cherchait simplement quelqu’un qui puisse le pousser à prendre cette décision. Redorer l’image des sorciers blabla. Bon courage Raphaël, tu penses. Perdre sa magie blabla, tu relèves doucement la tête, acquiesçant à cette idée. Tu n’imagines pas ce qu’on doit ressentir lorsqu’on se sent démuni, sans ses pouvoirs et sans perspectives de guérison. Les cas relevés étaient plus ou moins graves, de ce que tu en sais et les médicomages n’arrivaient pas vraiment à comprendre comment ni pourquoi certains étaient peu touchés et d’autres développaient des formes plus intenses. Apprendre à vivre à la moldue. Tu tiques et hausses un sourcil. « Aucun sorcier n’a envie de vivre à la moldu Raphaël. Mais effectivement, des connaissances de base pourraient être utiles. Rien que comprendre fonctionne le métro londonien serait déjà incroyable pour la plupart des sorciers. » Tu conclues en disant : « T’as pas besoin de moi pour prendre ta décision, elle est déjà prise depuis longtemps. » dis-tu, un sourire amusé aux lèvres.

Tandis que le silence se réinstalle doucement dans la pièce, tu laisses tes pensées vagabonder bien loin. Raphaël se contente de poser quelques questions sur l’avancée du tatouage, sur des choses insignifiantes et vos échanges en restent là. Le tatouage terminé après de longues heures du travail, tu finis par poser l’aiguille, satisfait. Un sourire s’étale sur tes lèvres, tu es ravi du résultat et la réaction du jeune moldu indique qu’il l’est tout autant. Il n’arrête pas de te remercier cent fois pour ton travail et tu secoues la tête. « Content que ça te plaise. » Tu lui donnes une crème et quelques recommandations pour les semaines à venir puis tu termines en disant : « Repasse dans un mois, je ferais les retouches. » Le moldu sort du bar et tu t’affales sur ta chaise, épuisé par cette longue séance de tatouage, tout autant que par les bavassages du jeune français.