Je vous l'avais bien dit, qu'il était trop malin pour mourir aussi facilement


Malin, c'est l'une des premières choses que j'ai appris me concernant. Le fait est, que Monsieur Ombrage a parfaitement raison. J'ignore exactement comment je me suis sorti de là, si bien que je n'ai pas vraiment pu répondre aux aurors qui m'ont retrouvé sur une route isolée en pleine campagne Irlandaise, totalement désorienté. Ombrage semble bien me connaître, malgré notre différence d'âge évidente. Nous ne sommes clairement pas de la même génération, mais pourtant il est évident que nous ayons été proches dans ce que j'appelle ma vie d'avant. Il n'a jamais cru à ma mort, personne ne semblait convaincu d'ailleurs, que j'étais mort et enterré, ou en train de me décomposer quelque part dans un endroit isolé.

On pourrait penser que c'est l'espoir, qui faisait croire à ma famille et à mes proches que j'étais encore de ce monde. Mais plus que ça, c'est la personne que j'étais qui les a convaincu que j'étais encore en vie. J'ai visiblement déjà disparu une première fois, Ombrage et ma famille ont donc tout de suite su que j'étais capable de partir sans laisser de trace, tout en étant vivant. C'est bien révélateur d'une certaine ruse, d'une intelligence. Être capable de brouiller les pistes pendant des mois, sans se faire remarquer par qui que ce soit, tout en étant activement recherché... Si l'on pensait que j'avais disparu volontairement, ce n'est pourtant pas tout à fait le cas. Mais les faits sont-là : je ne suis pas mort aux mains du Blood Circle. J'ai réussi à survivre, et même à m'enfuir.

Chang est de retour ?... Wow, on va devoir faire attention à ne pas oublier nos cravates d'uniforme alors !


Préfet en chef, c'est le rôle que j'ai depuis quelques années visiblement. Si j'ai encore des souvenirs de Poudlard, ils sont surtout scolaires. Mes relations avec les autres ?... Je n'en ai aucune foutue idée. Pourtant, aux dires de mes camarades, je suis quelqu'un de très stricte et de très autoritaire. S'en est presque maladif, surtout quand il était question de retirer des points aux élèves de Gryffondor. Je connaissais le règlement par cœur semblerait-il, si bien que j'en connaissais toutes les failles et toutes les subtilités que la plupart ignoraient. J'était un garçon assez obsessionnel, souhaitant la grandeur, souhaitant faire briller le blason de ma maison. Serpentard d'ailleurs, a gagné la coupe l'année dernière. Carrow m'a dit que c'était insupportable, la pression que je mettais à tous les membres de ma maison pour qu'ils excellent scolairement afin de gagner des points. Insupportable et casse pied, mais efficace pourtant...

Un garçon avec beaucoup d'ambition, et une droiture certaine semblerait-il. L'envie de briller, l'envie de réussir, d'être le meilleur en écrasant les autres au passage. Surtout Prewett, qui était vraisemblablement mon ennemi juré depuis le début de notre scolarité. J'ai beau avoir beaucoup oublié, il semblerait que j'ai gardé cette habitude d’appeler les gens par leur nom de famille pourtant. C'est ce que les gens ont tout de suite souligné et remarqué : Chang, t'as pas changé tant que ça finalement, tu continues de nous appeler par nos noms de famille. J'ai dû les réapprendre, associer des noms à des visages. On a dû me dire quel type de relation nous entretenions au par avant. Car ça, je n'en ai aucun souvenir.

Ah oui, un élève brillant. Vraiment excellent, un génie. Il avait même reçu le prix de meilleur espoir de l'année par le mensuel de la métamorphose, avant d'entrer à l'université !


Un élève studieux, premier de la classe. Insupportable aussi semblerait-il, un véritable monsieur je sais tout, qui rendait trois pages de parchemin quand le professeur n'en avait demandé qu'une seule. Tout simplement parce que j'élaborais toujours plus, poussait mes recherches plus loin que mes camarades. Un bourreau de travail, un forcené des examens. Touts mes ASPIC validés avec un O, toutes mes buses également sauf pour la défense contre les forces du mal où je n'avais obtenu qu'un E. Ma mère m'a même dit que j'en avais pleuré, de n'avoir pas eu la note maximale à cet examen ! Pleurer pour ça à 15 ans, c'est un peu excessif non ? Enfin, je ne sais pas vraiment.

Je passais le plus clair de mon temps libre enfermé dans la bibliothèque à étudier, ou dans la salle commune à réviser à des heures tardives. Ces résultats scolaires, je ne pense pas qu'ils soient simplement dû à mon QI élevé  : c'est sans doute beaucoup de travail aussi. Mon haut potentiel intellectuel, c'est également Ombrage qui m'en a parlé. Lui aussi est concerné, tout comme sa fille Septima. Nous sommes différents, nos cervelles ne fonctionnent pas de la même manière que les autres gens. Sans même m'en rendre compte, j'ai donc appris que j'étais différent. Un peu bancal, trop sensible, et trop intelligent pour mon propre bien.

Depuis mon retour dans le monde réel, il est vrai que je passe énormément de temps à lire, pour tenter de me souvenir. Si la métamorphose était vraisemblablement mon domaine de prédilection avant que tout cela n'arrive... C'est désormais les sortilèges qui m'intéressent le plus. Il a suffit qu'Ombrage mentionne les sortilèges affectant la mémoire, pour que je me plonge immédiatement dans des recherches acharnées sur le sujet.

C'est vrai qu'il picolait pas mal, il venait souvent ici les week end. A force, on a pas mal discuté lui et moi... Et vraiment, j'avais jamais vu quelqu'un qui allait aussi mal que Chang !

 
Si visiblement certains de mes camarades blaguaient en disant que si un jour, j'avais par malheur un T à un devoir j'en viendrai à me suicider... Ils n'avaient peut-être pas tout à fait tord. A mon réveil, je n'ai pas pu faire autrement que de remarquer des cicatrices sur mes bras. Assez profondes, qui sont bel et bien là et témoignent d'un passé trouble. J'étais déprimé, sous traitement même, pour soigner une dépression assez sévère. Je comptabilisait déjà trois tentatives de suicide d'après les médicomages qui ont lu mon dossier. Mais je ne me souviens pas d'avoir été malheureux à ce point pourtant...

Je ne sais pas si je vais bien, aujourd'hui. Je dirais que oui, puisque je ne songe pas à m'ôter la vie, ni à noyer mon chagrin dans l'alcool comme autrefois. On a pourtant préféré me fixer des rendez-vous mensuels à sainte mangouste, pour vérifier mon état psychologique et l'avancement dans mon amnésie. Je retrouve peu à peu mes souvenirs, au travers des histoires des autres. Ou bien, je me souviens de choses assez peu importantes finalement, quand je passe à un endroit particulier du château. Comme une odeur de cigarette dans des escaliers à côté du hall de la grande salle.

Toujours est-il que j'étais dans une forte détresse psychologique autrefois. On évite de trop me parler de mon ex aussi, toujours porté disparu. De ce que j'en sais, nous serions parti ensemble loin de tout ce chaos lui et moi. Il estimait que ce n'était pas sa guerre, puisqu'il était un étudiant Japonais, venu ici en échange. Je l'ai suivi, ou alors lui m'a suivi en cavale. Ce n'est pas très clair. Si moi on m'a retrouvé, ce n'est pas le cas pour lui. Je ne me souviens même pas de son visage, on m'a simplement transmis son nom : Utakata Taira. C'est un inconnu pour moi, c'est ce qui est sans doute le plus terrible dans tout ça.

C'est vrai que Hyacinthe a toujours été assez secret...

 
Je n'étais pas du genre à trop parler. Plutôt renfermé, à garder mes problèmes pour moi. Ma petite soeur m'a dit qu'elle avait toujours pensé que nos parents me préféraient à elle. Qu'elle s'en voulait énormément d'avoir souhaité ma mort si souvent, quand j'ai finalement disparu pour de bon. J'ignore pourquoi elle pensait celà de moi. Mais je n'étais pas facile à vivre, d'après ses dires et ces des autres. Un type sinistre, plutôt désagréable et hautain. Qui pourtant, une fois seul le soir, passait ses nuits à pleurer. Je portais un masque de personne absolument abjecte et insupportable, sans doute pour me protéger des autres. Une sorte de carapace, que j'ai eu durant des années.

J'aimerai rattraper le passé avec Nymphéa, que l'on m'a présenté comme étant ma petite soeur. Nous avons très peu d'écart elle et moi, à peine dix mois. Alors c'est un peu étrange que nous ne soyons pas proches tous les deux, non ?... Il faut que j'apprenne à la connaître. Elle, mes deux parents, ceux qui autrefois étaient mes amis.

Le plus frustrant dans la situation actuelle, c'est qu'ils sont tous des inconnus pour moi.
 

« ... Maman ? » Appeler cette femme ainsi est étrange. C'est quelque chose qui me serre le cœur même, sans que je ne saches vraiment pourquoi je ressens un mal-être si profond. Je ne me souviens pas d'elle. Oublier la femme qui vous a donné la vie, aimé de tout son cœur et élevé, c'est probablement la pire des choses non ?... Elle aussi, doit éprouver de la peine en regardant mon visage qui lui est familier, tout en sachant que je ne sais plus qui elle est, qui elle a été pour moi. « Oui mon poussin ? » Ce surnom affectueux aussi, me fait frémir d'inconfort. Probablement parce que au fond de moi, je sais que se faire appeler poussin à 21 ans par sa mère, c'est un peu honteux en société. Pourtant, il n'y a personne pour nous juger. La maison est vide, seulement occupée par nous deux pendant que ma sœur et mon père sont sortis faire des courses. Nymphéa a eu le droit de s'absenter quelques temps de Poudlard, étant donné la situation exceptionnelle... Une affaire familiale, le retour inattendu du fils aîné disparu.  

« Dis, est-ce que tu as des albums photo à me montrer ?... Les médecins ont dit que ça pourrait m'aider à me souvenir de certaines choses... Et... Au pire, tu me raconteras ? » Comme toutes les mères du monde entier, Cho Chang possède bien entendu des albums photos de ses enfants, remplis de clichés embarrassants. C'est donc tout naturellement qu'elle saute sur l'occasion pour les ressortir de la bibliothèque du salon.   Sur l'une des premières photos, je devine qu'il s'agit d'elle plus jeune, accompagnée de mon père : « Le bébé dans mes bras, c'est toi bien entendu. Tu es né le 14 Février, le jour de la Saint Valentin... Même si ton père et moi avons dû annuler la réservation au restaurant, tu as été le plus beau des cadeaux Hyacinthe. » J'esquisse un petit sourire timide, tout en me concentrant sur la photo. Clairement, entre un nourrisson et un adulte de 21 ans, il y a tout un monde. Mais c'est drôle quand même, d'être né à la Saint Valentin n'est-ce pas ? « Pourquoi est-ce que je m'appelle Hyacinthe d'ailleurs ? Et pourquoi Chang et pas MacLeod comme papa ? » C'est vrai ça, j'ai le présentement que des Hyacinthe, il n'y a en a pas énormément qui courent les rues. Ce n'est pas comme si elle m'avait appelé Harry ou Thomas par exemple. « C'est ton père qui a choisi ton prénom. Il est professeur d'histoire, et adore la mythologie. C'est pour ça que ta petite sœur et toi, vous avez des prénoms assez peu communs... Hyacinthe, était le fils d'un roi. Il était très beau, et courtisé par tous les deux. Malheureusement un jour, il est mort dans un accident en pratiquant le lancer de disque, la version antique du frisbee. La légende raconte que là où son sang à coulé, des fleurs ont poussé. Des Jacinthes. Cédric, ton deuxième prénom a une histoire aussi... C'est moi qui l'ai choisi. C'était le nom de mon premier amour, Cédric Diggory. Nous sortions ensemble à l'école, et il est mort assassiné à tout juste 17 ans un peu avant que la guerre ne commence, a nuit où Celui dont on ne doit pas prononcé le nom est revenu. Cédric, c'est donc un hommage à un jeune-homme, qui serait devenu un grand sorcier s'il avait pu vivre plus longtemps... Je suis certaine qu'il se serait battu pour la justice, s'il avait encore été vivant. » Ma mère marque une pause dans son histoire, mon histoire, pour prendre une gorgée dans sa tasse de thé. J'ai de vagues souvenirs scolaires sur la guerre, dans les années 90. Je me souviens du programme d'histoire de la magie. Mais pas du nom de Cédric Diggory.   « Et pourquoi Chang ?... Comme ton père est un moldu, nous ne savions pas si tu allais être un petit sorcier ou pas. Mais dans le doute, on pensait que ce serait plus simple pour toi d'avoir mon nom, au cas où tu ailles dans le monde magique quand tu serais plus grand. Puis aussi... Chang, ça colle mieux à ton physique que MacLeod. Il nous fallait un mixe des deux, au niveau du nom, pour que ça représente bien le fruit de notre amour ! »

J'ai l'impression d'être totalement détaché de tout cela. C'est difficile, de mettre les mots dessus. Je vois une photo d'enfant, une famille heureuse d'acceuillir un petit être dans leur vie. Mais j'ai l'impression de regarder un film, d'être un simple spectateur plutôt que quelqu'un d'impliqué. Les pages se tournent, et ma mère s'arrête sur une autre photo. Le petit garçon dessus, doit avoir cinq ans environ, et a déjà un livre dans les mains. Pas le genre de livre éducatif pour les enfants avec des images pour raconter une histoire sans avoir besoin de livre, mais un petit livre jeunesse qui est déjà rempli de tout un tas de mots. « En tant que parents, nous nous posions beaucoup de questions sur toi... Bien entendu, on était très contents d'avoir un petit garçon intelligent ! Mais on se demandait quand même si c'était normal, que tu sois déjà aussi mature pour ton âge, sur certains sujets. On se demandait si c'était normal que tu saches déjà lire si tôt... Tu venais parfois nous demander quand tu n'arrivais pas à comprendre un mot, mais c'était assez rare... Déjà à cet âge-là, tu préférais chercher tout seul, après que ton père t'ait appris à utiliser un dictionnaire. Tu pouvais y passer des heures, tu allais chercher un mot, puis tu allais en voir un autre parce que tu n'avais pas compris la définition... ça pouvais t'occuper toute une après midi entière ! » « C'est à ce moment là que vous m'avez envoyé voir un psychologue ? »  Ma mère secoue la tête en souriant, et tourne quelques pages plus loin. L'enfant a grandi, il a pris quelques centimètres et pose devant l'entrée de la maison que nous occupons. Il porte son uniforme scolaire, et en dessous, la date est précisée : 1er Septembre 2008, rentrée de Hyacinthe au collège moldu.
Il semblerait que je sois donc allé à l'école non magique pendant un moment. Mais un calcul rapide me fait réaliser que l'enfant est bien jeune, pour entrer déjà au collège. Je fronce les sourcils et tente de me souvenir... Mais si je suis la logique de la situation grâce aux indices temporels, j'ai sauté deux classes.  « C'est seulement plus tard, que ton institutrice nous a conseillé de voir un spécialiste. Au début, j'avais surtout peur que tu sois autiste. On t'aurais toujours autant aimé, si ça avait été le cas, mais j'avais peur de ne pas être à la hauteur de tes besoins. Finalement, après les examens, il s'est avéré que tu es surdoué. Tous les parents rêvent d'avoir un enfant intelligent, mais c'est beaucoup plus compliqué que ça à gérer, ce n'est pas juste avoir des bonnes notes à l'école. Il y a tout un tas d'autres facteurs... Tu avais du apprendre à réagir normalement comme tout le monde, face à des situations qui nous semblent banales à nous... Tu avais du apprendre à essayer de comprendre et maîtriser tes émotions. Au final... Je crois que c'est surtout ça qui te rendais malheureux Hyacinthe... »

En l'écoutant j'ai l'impression d'avoir été un fardeau pour mes parents. Ils auraient surement préféré que je sois normal comme ma petite sœur Nymphéa, qui d'ailleurs était une jolie petite fille. Sur la photo suivante, j'ai encore grandi et je suis devant la maison à nouveau, avec mon uniforme scolaire. Cette fois-ci, je reconnaît celui de Poudlard. Ma benjamine elle, a un uniforme moldu et a les yeux rouges. « Pourquoi Nympéa a l'air d'avoir pleuré ?... Elle voulait aller à Poudlard elle aussi ? » Pour ma part, j'ai l'air carrément fier, avec mon uniforme du collège magique. Bien plus enthousiaste que sur les photos de rentrée des classes précédentes, lorsque je me rendais à l'école moldue. Je comprend la logique de mes parents, d'avoir voulu nous offrir une éducation non magique également. Il faut bien apprendre à lire, écrire, et compter avant d'entrer au collège pour y apprendre la magie ! Et puis, c'est tout à fait logique puisque notre père est un moldu. Lui aussi a l'air fier sur la photo, affichant un grand sourire en posant une main sur mon épaule. « Pendant longtemps, nous avons pensé que seule Nymphéa était une sorcière. Tu n'avais montré aucun signe de magie, on te croyais moldu comme ton père. Mais finalement, c'est un peu avant tes onze ans que tu as fait preuve de magie. Tu étais très jaloux de ta petite sœur à l'époque, quand elle a fait ses premières bêtises magiques ! C'est une drôle d'histoire d'ailleurs... Vous vous étiez disputés pour une carte de fête des mères. Tu n'étais pas d'accord sur la couleur des paillettes, et en vous chamaillant, ta sœur a rendu ton nez violet ! Votre père a paniqué, en voyant ça. Il a essayé de te le nettoyer, mais ça ne partais pas ! Il avait du attendre que je rentre du travail pour que je puisses te l'enlever d'un coup de baguette magique. J'imagine qu'elle se sentait spéciale, à être une sorcière comme moi. Tout comme toi, tu étais spécial à cause de ton intelligence. Alors, quand on a su que tu étais toi aussi un sorcier... Finalement, Nymphéa a dû penser qu'elle n'était plus aussi extraordinaire que ce qu'elle pensait. » Je fronce les sourcils, en me rapprochant un peu plus du cliché. Celui-ci est magique puisqu'il bouge, et le sourire de l'autre enfant semble vraiment forcé. « Pourtant, vous nous aimez tous les deux pareil, n'est-ce pas ? Quand on dit que les parents ont toujours un préféré c'est faux non ? » « Certains parents ont en effet un enfant préféré... Mais pas dans cette famille. On vous aime tous les deux. Il y a bien assez d'amour pour tout le monde. »

En passant à un autre album photo, je constate que je commence à devenir plus âgé au fur et à mesure des pages. J'arrive déjà un peu plus à reconnaître mes traits, avec l’adolescence qui arrive. Je dois avoir à peu près quinze ans, puisque je montre fièrement mon badge de préfet sur la photographie. Je reconnais la cuisine de la maison, où le petit déjeuner est présent sur la table. Le hibou de la famille est installé sur le dossier de la chaise derrière moi et se lave paisiblement une aile. « Nous étions très fiers de toi, quand tu as reçu un badge de préfet. Ton directeur de maison à l'époque, t'avais choisi pour ton sérieux et tes résultats scolaires. » Je tente de me souvenir de ma tâche de préfet de Serpentard. J'ai quelques vagues images qui me reviennent, des situations assez banales. Comme quand j'ai découvert le wagon réservé aux préfets dans le Poudlard express lors de cette rentrée. J'ai la vague impression que j'avais été très impressionné. Tout comme quand les directeurs de maison nous avaient tous reçus, pour nous expliquer les tâches que nous devrions effectuer. « Le directeur de Gryffondor nous avait parlé d'honneur, et avait eu un regard plein de dédain en direction des préfets de Serpentard, je m'en souviens... Il me semble que je lui avais répondu qu'il y avait parfois plus de courage et d'honneur chez des élèves des autres maisons, que chez ceux de Gryffondor. Qu'au moins à Serpentard, être une langue de vipère avait ses avantages : nous n'avons pas notre langue dans notre poche, et nous assumons nos paroles même blessantes. Que le courage et la droiture, c'était ça aussi.  »  Ma mère rigole à cette anecdote et hoche la tête. Elle semble s'en souvenir. « Tu avais pris la défense de Nymphéa aussi une fois à l'école, quand des filles de Serpentard l'avaient embêtée. Mais tu ne lui as jamais dit que c'était toi, qui l'avais vengée... »

Plus les pages se tournent au fur et à mesure du temps qui s'égraine, plus j'arrive à me reconnaître. Les photos les plus récentes montrent que j'ai de longs cheveux noirs, semblables à ceux de notre mère. Je pose avec mon diplôme de Poudlard d'ailleurs, de nouveau dans la cuisine de la maison. Il s'en passe des choses, dans cette pièce... Subitement, il y a un bon dans le temps. L'année change d'un coup, et mes longs cheveux sont devenus blonds. J'ai l'air plus triste également, mais accepte visiblement de poser aux côtés de Nymphéa pour une ultime photo de rentrée scolaire... Est-ce que c'est durant cette année que j'ai fugué en Norvège, pour faire Merlin ne sait quoi ? Sans doute. La dernière photo de l'album est un cliché datant de Noël, si j'en crois le sapin. Nous sommes tous ensemble sur le canapé du salon et il y a un jeune homme que je n'avais pas vu avant. Il est asiatique lui aussi, et semble avoir à peu près le même âge que moi. Est-ce que c'est avec lui que j'ai subitement disparu quelques mois plus tard ?...