Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas : la solitude, l'indifférence, la patience, le silence.

Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas

Les vacances de Noël étaient terminées. Et avec elles disparaissaient les grasses matinées, les journées affalé dans un des nombreux canapés du manoir et le service nuit et jour par l’elfe de maison. Ce qui permettait de mettre un peu de baume au cœur du Serpentard était la reprise des stages. Après avoir suivi Phobos, il allait découvrir un nouveau service. Il ne saurait lequel qu’en arrivant sur place. Helios n’était pas sûr de la nécessité de ce secret. De quoi les professeurs pouvaient-ils avoir peur ? De se faire suivre par un interne avant même que le stage ne commence ? Ou les échanges illégaux de stages entre étudiants pour aller où chacun voulait ? Il haussa les épaules : n’ayant pas encore eu le coup de foudre pour une discipline, il était heureux de pouvoir faire le tour de Sainte-Mangouste.

S’habillant tranquillement avec une tenue qui lui permettrait de survivre à à peu près n’importe quoi, il avait ensuite prit un bon petit-déjeuner en papotant avec Meredith. Cette dernière lui avait souhaité une bonne journée et un bon courage en l’embrassant sur la joue avant de revenir à son article  de la Gazette. Helios passa caresser Eos qui bailla et s’étira sous les attentions de son maître. Il émit un miaulement endormis avant de finalement se remettre en boule et ronronner de plus belle. Helios fut un tout petit peu jaloux en passant la porte, alors même que le froid matinal lui mordait le visage.

Le Carrow releva le col de son manteau et se dirigea vers Sainte-Mangouste. Il aurait pu transplaner mais marcher un peu dans l’air frais lui permettait d’avoir les idées claires. Il détailla les rues et les passants avec un soupçon de dédain mêlé à du dégoût. Toutes ces personnes insignifiantes qui depuis moins d’un an connaissaient l’existence des sorciers, un secret révélé après de nombreuses années, comme à des enfants à qui on aurait appris la non-existence du Père Noël. Helios avait entendu parler de cette coutume moldue. Mentir à sa progéniture… Cela le faisait doucement rire. « Et quand est-il de Meredith ? Ne t’a-t-elle pas fait également croire au Père Noël ? » Rapporta une petite voix dans sa tête. Il soupira et rejeta l’idée bien loin, au fin fond de son cerveau dans un placard fermé à double tours. Son Père Noël à lui n’avait rien de Noël…

L’arrivée à Sainte-Mangouste se fit sans encombre si ce n’était qu’il avait marché particulièrement lentement et qu’il n’était pas particulièrement en avance. Tentant de rattraper son retard en adoptant un pas vif, il fila au vestiaire se changer avant de rejoindre le groupe de stagiaires. Tous baillaient à un intervalle régulier en écoutant un des grands professeurs faire un long laïus sur la chance qu’ils avaient de pouvoir servir les sorciers et à quel point leur comportement reflétait l’ensemble de l’hôpital et qu’ils devaient bien se tenir et… Helios leva les yeux au ciel et mima une pendaison, ce qui fit rire son camarade à ses côtés. Le professeur fixa son regard sur Helios et lui lança d’une voix forte.

« Tiens Monsieur Carrow, nous allons commencer par vous. Vous serez affecté à la médecine légale. Bon courage. »

La réaction qu’eut Helios ne dût pas être celle qu’attendait le professeur. Vu les derniers retours de certains étudiants, le docteur Fawley était une tyrante avec laquelle, même en faisant un travail excellent, la note ne dépassait jamais la moyenne. Alors le sourire qu’il eut sur le visage laissa dubitatif le professeur qui marmonna quelques mots avant de lister le reste des affectations. Felix lui posa la main sur l’épaule.

« Bon courage Vieux, la Fawley, on dit qu’elle est folle à lier… Allez c’est que deux mois. »

« T’inquiète, je la connais déjà. Elle ne peut que m’aimer. » Répondit Helios avec un clin d’œil. Il partit avec assurance vers les sous-sols. Cependant celle-ci commença à s’effriter lorsqu’il ne trouva pas la salle de crémation où on lui avait indiqué trouver Alexis. La pendule ne s’arrêtait pas de tourner pour autant. Se souvenait-elle de la soirée du Nouvel an ? Peut-être qu’avec du recul, elle n’avait pas pris les avances d’Helios comme telles ? Peut-être juste comme de l’admiration ? Avec la sobriété, Helios gagnait en lucidité et finalement s’envoyer en l’air avec sa maîtresse de stage n’était peut-être pas la décision la plus intelligente. Alors qu’il trouvait enfin la bonne salle, il se fit une promesse à lui-même : il resterait professionnel. Bien sûr il serait charmant et incroyablement doué mais en tout bien tout honneur. Helios ouvrit la porte qui grinça et résonna dans toute la pièce. Soupirant de cette entrée ratée, il fut aussitôt questionné par Alexis.

« Monsieur Carrow, je vous prierai d’être à l’heure la prochaine fois. Arriver en retard pour votre premier jour au sein de mon service ne joue pas en votre faveur. »

Interdit, Helios resta à la porte sans trop savoir quoi faire. Il avait l’impression de revivre son stage avec Phobos encore une fois.  Les deux mois allaient être longs. Inspirant profondément, il sourit au Professeur dans un effort désespéré de cacher son désarroi. L’éclat de rire de la principale intéressée le laissa perplexe.

« Je plaisante, Monsieur Carrow. Bienvenue dans le service de médecine légale de l’hôpital Saint-Mangouste. Je serai votre référente et votre interlocutrice privilégiée durant toute la durée de votre stage. »

Se détendant légèrement, il garda son sourire de façade mais celui-ci s’agrandit malgré lui. Cette femme, c’était quelque chose.

« Professeur Fawley, vous savez accueillir les étudiants ma foi… » Helios émit un petit rire. « Hâte de suivre votre travail pour les deux prochains mois. »

Helios s’avança lentement vers Alexis et s’arrêta à son niveau devant la table d’autopsie. Il détailla le cadavre devant elle d’un œil scientifique. Peut-être était-ce le fait des tortures qu’il effectuait pour les Mangemorts ou les nombreux examens des patients pour l’hôpital mais la nudité dans le contexte médical ne le gênait plus. Comme la mort ou les blessures d’ailleurs. Le corps n’était dans ces moments plus qu’un empilement de chair, d’os, de muscles et de tendons, qui nécessitaient des réparations. Il perdait tout ce côté charnel et érotique ou à l’inverse écœurant qu’il pouvait avoir pour le commun des mortels. Le regard perdu sur la peau vidée de vie, il commença à poser des questions générales.

« Une nouvelle arrivante ? D’ailleurs, comment se passe l’admission des… Patients ? Vous avez déjà effectué un premier examen ? »

Codage d’après Libella sur Graphiorum

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« Ne m'appelez pas comme ça. Je suis médicomage, pas professeur. »

Helios repensa à ce que lui avaient dit plus tôt ses amis concernant Fawley. Elle n’était pas commode effectivement. Il l’avait véritablement préféré en habits de soirée, encline à la discussion sous le ciel parsemé de feux d’artifice…

« Pardonnez-moi Docteur Fawley, l’habitude. »

La mâchoire légèrement serré, Helios subissait. Les mêmes obstacles se mettaient toujours en travers de sa route : il n’aimait pas se faire remettre à sa place ou corrigé aussi sèchement, par qui que ce soit. Aussi bien Augurey, mère que supérieur hiérarchique. Mais il l’acceptait venant de personnes dont il avait besoin pour avancer. Car malheureusement, pour arriver au sommet il avait besoin d’hommes et femmes sur lesquels s’appuyer. Mais arriverait le jour où plus personne ne sera au-dessus de lui, si ce n’était peut-être l’Augurey, et alors il exigerait le respect qu’il méritait.

« Cela fait partie de mes assignations bien entendu d’accueillir avec ferveur les étudiants. Il faut leur donner envie de rester. »

Laissant trainer un sourire sur son visage, l’étudiant fixa sa mentor avec une lueur de curiosité dans le regard. Si leur rencontre n’avait pas commencé avec une ambiance aussi froide, professionnelle et rigide, il aurait très probablement relevé le sous-entendu qu’il avait voulu voir dans ces paroles. Scellant ses lèvres pour s’empêcher d’aggraver son cas dès le premier jour et réussir à tenir sa promesse faite à lui-même moins de deux minutes avant, il resta silencieux, attendant la suite des évènements. « La blouse est plutôt saillante sur elle » pensa Helios en tentant de ne pas trop déshabiller du regard Alexis.

« Je pense que ma réputation n’est plus à faire, Helios, je serai aussi intransigeante avec vous qu’avec les autres étudiants. »

« J’espère bien Docteur Fawley. Comment montrer au reste de ma promotion que je suis le meilleur si vous vous montrez trop indulgente ? » Ne put-il s’empêcher de répondre du tac au tac avec un air taquin. Cette phrase lui avait échappée. Il était définitivement mauvais aujourd’hui en relations sociales. Helios se sentait un peu trop puissant à Sainte-Mangouste : il se savait bon et cela le tuait à petit feu de faire des travaux dignes du plus novice du personnel infirmier. Mais le jeune homme devait se contrôler, comme en chaque instant de sa vie. Une question de survie.

Helios écouta en silence les commentaires d’Alexis. Il emmagasinait les informations comme un Niffleur avec l’or.

« […] Mais avant que vous me donniez votre avis sur la cause de son décès, rappelez-moi le protocole en vigueur pour une autopsie ? Comment doit-on procéder et pourquoi ? »

La Serpentard ne s’attendait pas à être interrogé aussi tôt dans la journée. Il releva les yeux du cadavre et regarda quelques secondes Alexis pour savoir si elle se moquait de lui. Lui demandait-elle véritablement le protocole d’autopsie ? Avait-elle aussi peu d’attente du Carrow ? Il avait révisé les grands pôles de Sainte-Mangouste ainsi que la théorie générale pendant les vacances. Ne sachant pas où il allait atterrir, il s’était préparé à toutes les éventualités. Les premières impressions étaient toujours les plus importantes, quoi qu’en disaient certains. Si une animosité ou une antipathie était présente aux premières lueurs d’une relation quelle qu’elle soit, cette dernière évoluerait difficilement vers autre chose, la personne ne cherchant jamais votre compagnie. Alors que la sympathie pouvait certes se muer en bien pire mais au moins la relation avait commencée quelque part. Il reporta son regard sur le cadavre en prenant une grande inspiration. Il commença à tourner autour de la table tout en répondant.


« À l’arrivée du corps, il est nécessaire de photographier la victime en l’état. Puis on récupère tous les objets et vêtements portés pour les envoyer aux archives. S’il s’agit d’un meurtre ils pourront être analysés ou tout simplement rendu à la famille du défunt si elle est connue dans le cas général. Ensuite commence véritablement le travail d’autopsie. » Arrivant de l’autre côté de la table, il se baissa pour mettre son visage au niveau du cadavre et l’inspecta. « Un premier examen externe est nécessaire. Il permet de relever la taille, le poids, les marques permettant d’identifier un ou une inconnu comme un tatouage, grains de beauté. Ensuite on passe aux éventuelles lésions visibles comme des bleus, plaies ouvertes... Il est également intéressant de regarder les ongles. On en apprend énormément avec ces parties-ci. » Fit-il en gigotant les doigts en direction d’Alexis avec un sourire. « Puis vient l’examen interne, où on pratique une incision en Y sur le buste du patient. On étudie chacun des organes majeurs : cœur, foie, poumon, cerveau ainsi que les tissus musculaires. Ils sont inspectés visuellement et pesés. Cela donne des informations sur la santé de la personne sur la table entre autres choses. » Helios se releva finalement et fixa Alexis. Il cherchait maintenant à savoir si elle était d’accord avec ses paroles. Difficile à lire celle-ci de supérieure hiérarchique. « Enfin, une fois l’autopsie terminée, on remet tous les organes à l’intérieur puis on referme pour pouvoir rendre le corps sans qu’il soit trop mutilé. Je sais que parfois aussi des sorts permettent de voir à travers la peau pour d’éventuelles études des os mais je ne les connais pas… » Un sourire. « Enfin pas encore. »

« Ensuite vous m’expliquez, à votre avis, de quoi est-elle morte ? »

Helios reprit une inspiration et reporta son attention sur le cadavre. Une jeune femme, la peau blanche tirant sur le bleu. Pour le moment, elle correspond plutôt bien au terme cadavre. Le Serpentard attrapa des gants dans la boite qui était à sa portée puis se rapprocha. Il manipula délicatement le corps, concentré. Il souleva difficilement un bras, la rigidité cadavérique commençait à opérer. Elle n’était pas morte depuis des jours. À moins que les sorts de froid l’aient particulièrement bien conservée. Des traces d’ecchymoses sur l’ensemble du corps. Ainsi qu’une évidente marque noire sur la poitrine. Celle-ci avait fait énormément de dégâts, rendant presque visibles les os en dessous.

« À première vue, femme de corpulence moyenne, type caucasien, la trentaine je dirai. Nombreuses ecchymoses, soit elle s’est battue, soit elle est tombée à de nombreuses reprises. Mais ses os semblent avoir accusé le coup donc ce n’est pas la cause du décès. Par contre, la brûlure profonde sur le torse me semble être le traumatisme le plus évident. » Il releva quelques instants ses yeux clairs vers Alexis. « Un Incendio pourrait avoir provoqué ce type de blessure. Et vu la profondeur et l’emplacement… La respiration et même son cœur n’ont pas dû apprécier. »

Helios ne savait pas quoi dire de plus. La moitié de son haut du corps avait brulé, libérant pratiquement des organes à l’air libre, organes qui n’avaient rien à y faire.

« Le temps d’examen que vous me laissez n’est pas très long Docteur… » Dit-il sur le ton de l’humour. Il était satisfait de ses réponses pour une première performance en médecine légale. Il s’était donc permis une petite boutade sur la fin. Si elle souriait, c’était gagné : elle l’aimait bien. Sinon, il allait devoir cravacher deux fois plus pour qu’elle éprouve ce sentiment.

Codage d’après Libella sur Graphiorum

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De nouveau, Helios se pensait tiré d’affaire, un peu spécial et légèrement privilégié. Et de nouveau Fawley trouvait un malin plaisir à lui ramener les pieds sur terre et à le mettre en garde sur les capacités qu’il savait qu’elle savait qu’il avait. Le Serpentard se retint de lever les yeux au ciel devant ces recommandations. Faire profil bas, très peu pour lui… Sauf quand il en avait besoin pour atteindre le haut du panier. Bien que son ego criait à l’hérésie, il acquiesça rapidement et silencieusement, pour montrer à Alexis qu’il avait compris et prit en compte la consigne.

Alors que Fawley commençait à répondre aux affirmations d’Helios, celui-ci se raidit. Il n’aimait jamais quand un professeur –ou un « chef de stage » ici pour éviter de se faire rabrouer par Alexis de nouveau – avait quelque chose à redire sur ses paroles. Ce n’était jamais bon signe et cela voulait surtout dire qu’il s’était trompé. Certes parfois, il faisait quelques erreurs exprès pour laisser la personne en face de lui présenter son savoir, souvent pour se sentir supérieur et ainsi apprécier davantage le Carrow. Mais ici, il avait choisit la technique de la perfection pour impressionner celle qui l’avait plutôt violemment rembarré au Nouvel An. « On avait pas dit qu’on ne parlait plus de cet épisode ? » demanda une petite fois particulièrement moqueuse dans son esprit.

Et voilà que maintenant il se sentait un véritable idiot. Évidemment qu’il fallait garder les effets personnels pour les étudier. Et bien sûr qu’il fallait utiliser un Prior Incantem pour avoir des informations sur la baguette du cadavre. Comment avait-il pu oublier ces informations si élémentaires ? Il avait envie de se taper la tête contre le mur. Il resta cependant stoïque, attendant la suite. Rester digne était primordial. Helios aurait menti s’il avait affirmé que la pommade qu’Alexis passa sur le dos  avec un si joli petit compliment ne lui fit pas plaisir. Surtout venant d’une personne aussi exigeante que le docteur Alexis Fawley.

Les félicitations avaient été aussi fugaces que l’observation d’une licorne dans la Forêt Interdite ou que la relation de Meredith avec le postier de la semaine dernière. Et en plus Alexis parlait maintenant de « médecine légale moldue ». Voilà qu’elle parlait comme Phobos. Il ravala ses commentaires. Après sa discussion avec le professeur Asclépiades l’année dernière, Helios était bien obligé d’accepter le fait que les moldus étaient capables de quelques petites choses intéressantes  pour les sorciers…. Comme certaines partitions qu’il aimait jouer au piano par exemple. Si tous les spécialistes de médicomagie qu’Helios croisait semblaient croire aux inventions moldues, il allait devoir se faire à ces idées s’il voulait lui-même devenir un jour un de ces spécialistes…

Après toute son analyse, Helios s’était lentement relevé, attendant une réponse d’Alexis. Il était assez impatient d’avoir son avis.  Mais encore une fois, il avait oublié un point essentiel. Les analyses sanguines… Il avait à présent envie de disparaitre derrière la table d’autopsie tant la honte s’emparait de son être. Il était plutôt doué à cacher ses émotions mais en cet instant, un léger rosé apparu sur ces joues. Ces années d’expériences sociales lui avaient permis d’éviter le visage cramoisi mais n’avaient pas pu sauver ses joues.

Ces sentiments furent bien vite oubliés lorsqu’Alexis commença a lui donner des informations importantes et croustillantes sur la victime. Un empoisonnement ?! Encore mieux ! Avec ses cours de potions, il avait déjà vu le poison dont parlait la médecin. La mort n’avait pas été rapide et sans douleur. Il regarda sous un jour nouveau la jeune femme allongée sur la table. Son esprit était partagé. Travailler sur de véritables corps était… Passionnant. Surtout pour une histoire de meurtre ! Il avait l’impression de se retrouver dans ces romans sorciers. Mais de l’autre, cette jeune femme avait souffert le martyr avant de mourir purement et simplement, par la main d’autrui. Autrui qui n’avait même pas eu le courage de l’assassiner en face. Helios savait que ce n’était pas donné à tout le monde de pouvoir regarder sa victime dans le blanc des yeux. Mais c’était bien le minimum de respect qu’il fallait s’imposer face à un camarade sorcier. Les moldus, par contre ne méritaient aucun traitement de faveur, encore moins de respect.

« Alors, selon vous, est-ce que quelque chose aurait pu la sauver ? Que peut-on en déduire sur le profil du meurtrier ? Et quelle est la démarche à suivre désormais ? »

Helios voyait en ces questions une deuxième chance d’impressionner Alexis. Heureusement pour lui, il aimait les potions et… Les poisons en faisaient partie. Il se savait plutôt calé sur le sujet. Par contre en ce qui concernait la psychologie du tueur… Il allait devoir faire appel à sa jugeote… Et à sa connaissance de l’être humain, patiemment acquise dans les sphères de l’aristocratie sorcière… Mouai, cette connaissance était quand même assez spécifique. Après est-ce que tous les sorciers ne fonctionnaient-ils pas sur un modèle équivalent ? Certains réussissaient mieux que d’autre de par leur sang, voilà tout ! Une grande inspiration et Helios était parti dans ses explications :

« Le poison de raisins de couleuvre est un poison relativement facile à faire ou à se procurer. Du moins avec le matériel et les ingrédients adéquats… A l’inverse, l’antidote est lui particulièrement difficile à trouver, ce qui fait de ce poison un produit de choix pour les gens peu instruits sur le sujet. » Il marqua une pause et regarda la jeune femme étendue sur la table froide. « Une simple extraction de bulbe de Mimbletonia fungus avec un ajout de poudre de corne d’Eruptif suffit à contrer les effets du poisons si l’antidote est administré suffisamment tôt… La durée varie en fonction de la quantité de poison ingéré. » Il releva son regard vers Alexis. Il se sentait étrangement en colère contre le potentiel tueur, en colère et désireux de vengeance pour une fille qu’il n’avait jamais connu. « Normalement ce poison permet une mort rapide, ce qui est souvent préférable pour éviter à l’empoisonné de prendre l’antidote. Soit le tueur voulait voir sa victime affaiblie et souffrir avant la mort, soit c’était un parfait idiot dans les dosages. Vu le poison choisi, je pencherai pour la deuxième option. Ce poison est… » Il soupira en réfléchissant aux paroles échangées plus tôt avec Alexis. « Détectables aux analyses. S’il s’était donné du mal avec un Incendio pour faire croire à une autre cause de la mort, il ne devait pas avoir cette information. Le poison indique que c’était prémédité… Personne ne se déplace avec ce genre de mixture sur lui…Sauf si c’est un spécialiste de potions quelconque. Mais un tel spécialiste en connaitrait les dosages. Donc, je dirais crime prémédité par un novice. » Il reprit son souffle et répondit à la dernière question de son professeur. Il récita presque le livre qu’il avait lu quelques jours auparavant. « Dans le cas d’une suspicion de meurtre sur la personne d’un sorcier, il est nécessaire de contacter la brigade de police magique qui prendra en charge l’enquête ouverte si suffisamment d’indices appuis cette ouverture. Dans le laps de temps, il est nécessaire de garder scellés ou protégés magiquement tout indice, analyse ou corps utilisable pour l’enquête. »

Helios souriait à présent. Il commençait à se prendre au jeu de se renvoyer la balle. Alexis posait les questions et il y répondait… Brillement. Il savait qu’elle était impressionnée. Enfin il l’espérait mais n’importe qui, pour un quatrième année, serait impressionné par son savoir. Alexis craquerait forcément pour lui faire un autre compliment. Elle en crevait d’envie c’était sûr ! Helios ne voulait plus s’arrêter, même si cela ne devait pas être un jeu et qu’il était sincèrement désolé pour la fille morte. Il aimait beaucoup trop les jeux où il pouvait gagner et montrer son savoir pour véritablement se montrer compatissant.

« Avez-vous un autre patient à me montrer Docteur ? »

Codage d’après Libella sur Graphiorum

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Alexis était véritablement une personne fascinante. Helios ne savait pas vraiment se l’expliquer. Mais comme d’habitude, cela ne l’empêchait pas d’essayer d’analyser ses émotions. Une espèce d’habitude tenace dont l’importance était triple : de une, s’il connaissait ses sentiments, il lui serait plus facile de les réprimer, de deux de les utiliser et troisièmement, cela lui permettait d‘éventuellement les modifier pour les feindre. Très efficace dans une conversation lorsque la manipulation est de mise. Rien n’est plus vrai que de vrais sentiments…. Même s’ils sont forcés pour finir par en devenir réel. Dans ce cas précis, Helios regardait la médicomage avec de l’admiration. Ca il en était sûr. Il y avait également une fine pellicule d’envie – il n’arrivait pas cependant pas à distinguer s’il s’agissait de l’envie du poste qu’elle occupait et l’envie d’elle tout simplement- le tout saupoudré de quelques copeaux de gratitude. Ce dernier sentiment le laissait perplexe. Peut-être était-ce parce qu’elle le challengait dans ses idées ? Qu’elle ne prenait pas pour acquis son intelligence de par son nom ? Qu’elle qu’en soit la raison, c’était rafraîchissant. Bien sûr Helios jouait et abusait du matronyme Carrow. Mais la comparaison, être le « fils de » lui pesait parfois. Ici il avait le sentiment, peut-être un peu puéril, d’être Helios et d’être excellent grâce à lui-même et lui-même seulement

Alors qu’elle lui répondait en lui expliquant que malgré leur esquisse de profil, ils n’étaient pas de la police magique, Helios souriait. Il se sentait intelligent et particulièrement à sa place. Un petit poids se disparut de sa poitrine : il avait correctement choisi sa voie. Répondre, pour un jeune de dix-huit ans ou moins, à ce qu’il voulait faire de sa vie était bien difficile. Et avec cette histoire d’université, c’était exactement ce qui se passait. Il était difficile de changer quand, après trois années de medicomagie, on se rendait finalement compte que ce qui faisait vibrer son cœur était la comptabilité gobelinesque !

Alors que le jeune homme pressait Alexis de lui montrer d’autres cas, celle-ci sembla se raidir. Relevant un sourcil en s’entendant appeler « Monsieur Carrow », le Serpentard dévisagea quelque peu sa supérieure.

« Encore une fois, vous êtes trop pressés. Il faut vous mettre en tête qu’ici, la rigueur est le maître-mot, tout comme la patience. Il faut savoir prendre son temps. Comptez-vous laisser cette jeune femme en plein milieu de la salle d’autopsie ? »

« Bien sûr que non mais… »

« Nous allons préparer le corps ensemble pour ensuite le remettre au thanatopracteur de l’hôpital qui fera les soins nécessaires avant de remettre le corps à la famille. Mais avant cela, je vous laisse écrire le rapport d’autopsie. »

Helios regarda avec stupeur le papier. Ce n‘était pas vraiment ce à quoi il s’était attendu. N’y avait-il pas un sous-fifre dédié à ce genre de chose ? Il déglutit lentement en se rappelant qu’en tant que stagiaire ici, c’était lui le menu fretin, le bas de la chaîne alimentaire, le sous-fifre. Soupirant, il attrapa le papier et commença la rédaction. S’il avait su, il aurait pris sa plume à papote.


Ils avaient passé quelques heures à la rédaction de ce rapport et Helios savait déjà que ce ne serait jamais sa partie fétiche. Au moins, Alexis était proche de lui, à lui pointer ses erreurs et autres fautes. Il se surprit à être ravi d’avoir une écriture particulière régulière, jolie et agréable à regarder. Sa mère avait tenu à cela. Elle disait qu’une belle écriture était primordiale pour être pris au sérieux dans ce monde. Alors il avait appris les pleins et les déliés. Il n’aurait jamais deviné qu’il aurait voulu que Lexie en soit quelque peu impressionnée. Ridicule ? Peut-être.

Ses joues rosirent légèrement lorsqu’il entendit son ventre émettre des protestations sur l’absence de nourriture. Il jeta un coup d‘œil furtif à Fawley espérant de tout son cœur qu’elle n’avait rien entendu. Un léger sourire lui indiqua tout le contraire. À moitié ravis –au moins ils allaient aller manger- il attendit l’invitation d’Alexis pour se diriger vers la cafétéria. Mais cela ne se produisit pas. Maintenant, le voilà qui était doublement désespéré : son ventre n’arrêtait plus de gargouiller et ils ne semblaient pas bouger vers la source de nourriture la plus proche. Helios releva impassiblement la tête. Elle le testait, il en était persuader. Et bien il était du genre borné dans ces situations et cela était hors de question qu’il craque le premier. Une question d’ego et d’honneur très probablement.


Malgré une faim prononcée qui tiraillait maintenant son estomac depuis trois-quarts d’heure, Helios ne craqua pas

« Allons déjeuner. »

Ces deux mots prononcés entrainèrent un soupir de soulagement de la part du Serpentard. Il suivit docilement Alexis et posa sa blouse près de la sienne. Alors qu’il la suivait, bien qu’il la dépasse de quelques dizaines de centimètres, il ne peut s‘empêcher de se sentir bien moins imposant que le docteur Fawley. C’était quelque chose d’imperceptible : les gens s’écartaient légèrement en la voyant, baissaient les yeux ou au contraire ne la quittaient pas du regard. Et rien que d’être derrière elle donnait à Helios une impression d’importance. Que c’était étrange. Il voulait ça. Un jour, lui aussi ferait cet effet aux gens de Sainte-Mangouste.

Alors qu’il déposait son plateau et s’asseyait en face d’Alexis, celle-ci se décida finalement à parler. Le trajet s’était fait en silence et le Carrow se demandait s’il avait fait quelque chose de mal. Peut-être était-elle énervée d’avoir été la première des deux à les entrainer vers le repas ?

« Les vacances de Noël sont de grosses périodes pour nous. Malheureusement, on note une augmentation d’accidents domestiques, des cas de violences mais aussi d’homicides… C’est pour cela que le service est assez vide, les médicomages prennent leurs congés quand cela redevient creux après le nouvel an. »

Helios hocha la tête en l’écoutant alors qu’il ne pouvait plus attendre et commença à grignoter son pain. Remerciant Alexis d’un signe de tête, le jeuen homme s’empara de son verre et bu d’une traite l’eau qui venait d’être servie. En plus de la faim, la soif s’était bien installée.

« Alors, Helios, dites-moi, pourquoi avez-vous choisi des études de médicomagie ? »

Déglutissant lentement, il ne s’attendait pas à se faire de nouveau questionner. Certes, les questions étaient plus personnelles et moins formelles mais il ne pouvait s’empêcher de rester méfiant : elle était sa supérieure et il n’allait pas non plus se livrer comme sur le divan d’un psychomage. Cette fameuse question, sur son choix de parcours, lui avait été posée à de nombreuses reprises et, de mémoire, il n’avait jamais répondu la même chose. Un autre de ses facettes : répondre ce que voulait entendre les gens, ou du moins ce que devinait Helios de leurs envies.

« La soif de comprendre. Le corps humain est un réseau si complexe et avec tellement de possibilités, que les casse-têtes sont infinis. Et puis ne pas se sentir impuissant devant quelqu’un qui souffre. Oui je dirais que ce sont mes deux principales raisons. » Il marqua une petite pause pour manger un brocoli. « Et vous ? Qu’est-ce qui vous a amené à la médicomagie légale ? » Demanda innocemment Helios. Il était prêt à lâcher quelques informations si seulement elle acceptait elle aussi de se livrer !

Helios balaya du regard la salle. Il n’y veut que deux personnes qu’il avait croisé quelque fois dans les couloirs en blouse. Probablement des medicomages mais il était bien incapable d’énoncer leurs spécialisation. Un nouvel arrivant entra, un dossier sous la main. Il s’agissait de Tom, un des camarades de quatrième année d’Helios. Un Poufsouffle particulièrement vaniteux. Le Carrow n’avait jamais cru cela possible. Il était exaspérant, encore plus lorsqu’il remarqua Helios et Alexis. Tom déposa le dossier sur la table et échangea quelques mots étouffés avec le vieux médecin. Helios le suivait du regard et alors que Tom se dirigeait vers la sortie, derrière Alexis, ce-dernier mima une décapitation suivit d’un geste assez obscène en regardant Helios et en pointant celle-ci du doigt. Le Carrow fronça les sourcils et lui jeta un regard mauvais. Il n’eut comme réponse qu’un grand sourire de Tom.

Helios n’osa pas reposer son regard sur Alexis de peur qu’elle ait vu l’échange, il préféra fixer son assiette et d’enchaîner pour noyer le poisson.

« Vous êtes à Sainte-Mangouste depuis longtemps ? Comment c’est de travailler ici ? C’est un des hôpitaux que je vise après mon diplôme mais j’aimerai choisir en toute connaissance de cause. » Dit-il en se resservant de l’eau, après avoir tout de même vérifié que le verre d’Alexis n’était pas encore vide. Il évita cependant soigneusement son regard à elle.

Spoiler:

Codage d’après Libella sur Graphiorum

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« Ce sont de bonnes raisons. Elles vous appartiennent. »

La mâchoire d’Helios ralentit quelque peu alors qu’il scrutait Alexis du regard. Elle semblait accepter ses paroles sans sourciller. Presque décevant. En étant cheffe de service, Helios aurait espéré qu’elle ait à minima un peu de jugeote. Cela voulait-il dire que des incompétents arrivaient aussi à la place qu’il enviait ? Cette place ne serait alors pas suffisamment élevée. Soudain intrigué par ses propres raisons, Helios prit la décision de réfléchir véritablement à la question. Etait-ce « ses » bonnes raisons ?

Aussi loin qu’il pouvait s’en souvenir, il avait plus ou moins fait ce qu’on lui avait dit ou ce que sa famille attendait de lui. Le piano, la maison Serpentard, ses options à Poudlard et même son entrée chez les Mangemorts. Mais qu’en était-il de la médicomagie ? Pourquoi avait-il choisit cette voie-ci ? Il se souvenait en avoir longuement discuté avec Phobos. Ce dernier avait « la tête dedans » et pouvait répondre à toutes les questions du jeune Carrow. Ainsi l’Asclépiades avait dû répondre à de nombreuses questions… Heureusement qu’il était professeur et en avait l’habitude.

Pour son choix d’orientation, Meredith avait laissé son fils libre. Bien qu’elle aurait sans douté préféré le voir dans la filière ou elle enseignait, elle ne l’avait obligé qu’à poursuivre ses études. N’avait-elle donc pas passé sa vie à mettre en place une université sorcière pour ne pas y voir son propre fils ?! Helios avait accepté sans broncher. Il voulait être supérieur aux autres et cela passait également par l’éducation. Helios n’était pas modeste : la modestie était l’arrogance des médiocres. Cependant il se sentait le besoin de renchérir. Alexis ne pouvait pas se contenter de ces deux seules raisons si ?

« Il est compliqué de définir si ce raisons m’appartiennent ou non, surtout lorsque beaucoup de gens vous en donnent sans vraiment savoir s’ils attendent qu’on leur rende… » Il sourit. « Je dirai oui, même si elle ne sont pas les seules. Je veux être le meilleur et faire le bien. La medicomagie me permet les deux. » Termina-t-il avec une franchise qui l’étonna lui-même. Le Carrow ne savait pas vraiment pourquoi mais il se doutait que Lexie saurait de quoi il parlait. Elle n’était pas médiocre. Certains auraient pu rire de ses raisons à lui. Pas elle. Enfin il l’espérait…

« […] Et puis finalement… J’ai eu de bons enseignants, dont Phobos. Enfin, je veux dire, le professeur Asclépiades. »

Le jeune homme sourit. Le Professeur Asclépiades semblait en effet avoir inspiré beaucoup de monde vers la medicomagie. Il s’agissait très probablement de la figure paternelle la plus saine qu’Helios connaissait. Enfin William aussi mais il était hors catégorie… Helios ne voulait pas penser à William.

Lexie continua son explication et le jeune étudiant fut surpris de la voir s’approcher mais plus encore de la voir répondre avec une phrase de plus de quatre mots qui n’était ni acerbe ni directive. Il sourit en sentant bien qu’elle commençait à l’apprécier… Enfin, Helios le savait déjà mais il avait quelque peu douté en entrant dans la salle de medicomagie légale ce matin. Cette femme était particulièrement intéressante à avoir de son côté. Helios devait s’entourer des meilleurs mais surtout de ceux qui n’étaient pas intéressés par le pouvoir. Lexie semblait correspondre aux deux catégories : après tout elle avait atteint la place qu’elle convoitait dans son domaine. Quelles raisons aurait-elle de monter si elle devait abandonner la medicomagie ?

« Et puis, comme vous avez pu le constater, je suis plus à l’aise avec les morts qu’avec les vivants. La plupart des vivants m’ennuie. »

Alors que le visage de Fawley ne semblait pas particulièrement agacé ou ennuyé, Helios se félicita de capter et garder l’attention de sa maitresse de stage. Elle était un puit de science qu’il fallait qu’il emmagasine. Un sourire de fierté illumina le visage du Carrow, bien qu’il tenta de le réprimer le mieux possible. Alexie ne semblait pas aimer ses éclats de confiance en lui…. . Elle avait dit « la plupart « ! Bien joué Carrow !  Elle apprendrait à l’apprécier, trop jouer le premier jour n’était cependant pas particulièrement recommandé.

« Encore un que je n’aimerais pas avoir comme collègue plus tard… »

Alors que Tom disparaissait dans le couloir, Helios reporta son attention sur Alexis et il acquiesça à la phrase de la médecin. Il continuait de manger mais plus lentement, sa faim commençant enfin à être apaisée, il n’avait plus besoin de se remplir l’estomac. Lui non plus ne désirerait pas Tom comme collègue… Ni comme médecin, ni comme quoi que ce soit d’ailleurs. Ce dernier n’avait aucun charisme, aucune élégance et aucune cervelle. C’était un bon à rien qui ne servait à rien… Personne ne pouvait se sentir plus intelligent à ses côtés : ses capacités cognitives étaient bien trop négatives… Qu’est-ce que c’était d’être supérieur à moins quelque chose ? Pas grand-chose…

Alexis répondait de nouveau à ses questions. Elle était d’humeur bavarde dis donc ! Helios ne s’y attendait pas vraiment. Peut-être que cela était vrai : un bon repas déliait toutes les langues. Il prit note dans un coin de son esprit de toutes ces informations, souriant de nouveau lorsque Fawley parla de subalternes. Il avait eu lui-même ce genre de pensées et les entendre dites à voix haute par la cheffe de la médicomagie légale le conforta dans la véracité de ces informations. S’il devenait un jour chef, il emploierait des administrateurs pour ce genre de tâches… Mais bon, c’était un avis personnel.

Helios devait encore se décider sur sa spécialisation. Bien que la medicomagie le passionnait, certains sujets de ce domaine le motivait plus que d’autres : s’occuper des vieux ou des enfants ne lui disaient pas du tout, comme les spécialistes de la vessie. Une part de lui-même voulait s’occuper des vivants : les morts ne montraient jamais aucune gratitude, peut-être à peine leur proches. Helios voulait voir si cela était compensé par les incroyables cas sur lesquels il serait amené à travailler.

« Et vous avez eu des patients… Qui sortaient de l’ordinaire ? Des cas presque dignes de se retrouver dans les manuels ? »

Le jeune homme n’aurait su dire s’il s’agissait d’une curiosité malsaine et morbide ou simplement d’une recherche purement scientifique. Les causes avaient bien peu d’importance au demeurant.

Codage d’après Libella sur Graphiorum

 Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas : la solitude, l'indifférence, la patience, le silence.

Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas

Alors qu’Alexis donnait certains conseils sur la vie en tant que medicomage, Helios fut surpris qu’elle accepte de lui donner autant d’informations et de moyen de s’en sortir convenablement en tant que medicomage. Il hochait la tête pour montrer son intérêt mais restait silencieux. Lexie –pour les intimes- avait déjà pris le chemin que lui-même espérait emprunter. Ils ne visaient tous les deux pas la même destination mais leurs étapes de voyage étaient profondément similaires.  Quand elle aborda le sujet de l’ambition en medicomagie, Helios eut un sourire en coin. Il n’avait jamais vraiment fait attention de savoir si cela était mal vu ou non. Il voulait juste s’élever dans les plus hautes sphères de la discipline, ce que les autres pouvaient bien en penser lui importaient peu. Seulement, il prenait conscience petit à petit qu’il n’aurait pas seulement besoin des « haut-placés » pour arriver à ses fins et que ne pas dénigrer le reste de ses futurs ou actuels collègues pouvait lui être bénéfique. Décidément, il aimait de plus en plus discuter avec Fawley… Ce stage qu’il pensait être une réussite dès le départ pour certaines raisons, restait une réussite bien que les véritables raisons soient plus terre à terre que quelques paroles et regards échangés lors d’une soirée de nouvel an.

Lorsqu’Alexis repoussa son assiette, Helios fut bien incapable de dire s’il s’agissait d’un signal quelconque pour annoncer la fin du repas ou seulement qu’elle n’avait plus faim. Il hésita quelques secondes en terminant ce qui se trouvait sur sa fourchette avant d’inspecter sa propre assiette. Elle était quasiment vide. Il la termina parfaitement en deux trois coups de fourchette et repoussa à son tour son assiette aussi blanche que si elle avait été propre.

« J’imagine que les meurtres sont les cas les plus intéressants et qui sortent le plus de l’ordinaire comme vous dites. »

Le jeune homme fut ravi de voir qu’Alexis répondait à sa question. Il se félicita d’avoir fini de manger pour être totalement et entièrement concentré sur la conversation qui allait suivre. Helios aimait apprendre mais seulement sur des sujets qui le passionnaient. Evidemment, l’ensemble des matières composant la medicomagie ne l’enchantait guère mais il avait réussi à relativement bien choisir ses options pour pouvoir faire un maximum de choses qui l’intéressent.

« Vous pourrez en juger par vous-même lors de ce stage. »

La déception commença à pointer le bout de son nez. Finalement il n’allait peut-être pas avoir d’histoire fascinante aujourd’hui. Il était à deux doigts de soupirer lorsqu’Alexis continua. La mâchoire d’Helios faillit se décrocher. Y avait-il des gens aussi fous pour faire ce genre de chose ? Découper une femme, qu’on osait prétendre aimer ? Surtout lorsque ce n’était pas réciproque… Le cerveau méthodique du jeune homme commença à travailler à cent à l’heure, se demandant quelle était la meilleure manière de découper un corps.

 « Heureusement pour moi, vous n'avez pas réagi de la même manière lorsque j'ai refusé les vôtres. »

Les émotions, souvent plutôt bien contrôlées du jeune homme affluèrent sous la forme d’un rosé bien vivace sur son visage. Ah celle-là, il ne s’y attendait absolument pas ! Elle venait de le prendre totalement au dépourvu, ce qui était un certain exploit en lui-même. Helios resta totalement circonspect devant le rire d’Alexis. Il ne savait pas vraiment comment réagir. Alors finalement, elle s’en était peut-être rendu compte de ces fameuses avances au nouvel an. Helios releva légèrement la tête pour se donne peu de contenance et émit un petit rire poli pour cacher son propre embarras. Le clin d’œil de son maître de stage mis encore davantage de bazar dans son esprit, si bien qu’il resta quelques longues secondes sans savoir comment régir.

Normalement, c’était lui qui menait les conversations. Sauf face à certaines personnes précises comme William, Meredith ou Phobos. Mais avec la majorité de ses connaissances, il avait toujours trouvé le moyen de garder le contrôle et de ne jamais être surpris. Car la surprise et la précipitation menaient rarement à des décisions bonnes et intéressantes pour soi-même. Enfin, c’était ce qu’il se complaisait à dire et à se rappeler. La réalité était quelque peu différente Il arrivait à garder le contrôle le plus souvent mais il n’avait pas encore toutes les ficelles rhétoriques pour pouvoir amener qui il voulait sur un terrain ou l’autre sans que cette personne ne s’en rende vraiment compte. Un jour cependant, dans quelques années, il y arriverait. Comme la médicomagie, comme le Conseil. Un jour il serait le meilleur.

Helios tenta alors de se remettre d’aplomb en buvant un verre d’eau. Il se décida finalement à prendre la parole. Il choisit le sous-entendu pour cette fois-ci. Il accordait gracieusement le point à son encadrante… Bien qu’ils ne jouaient pas dans la même cours : oh Helios aurait pu sans aucun doute trouver une superbe réponse gratinée à servir à Alexis mais il n’était pas encore suffisamment sûr de sa réaction. Rirait-elle avec lui ? Lui ferait-elle passer le pire stage imaginable ? Tant de questions que seule l’expérience allait pouvoir lui apprendre.

« Non fort heureusement. Ces avances étaient un malheureux incident. Enfin jusqu’à mon diplôme. » Répondit-il avec un sourire malicieux. Elle voulait le mettre mal à l’aise ? Elle avait réussi. Helios avait donc opté pour la meilleure idée pour cette situation-ci. Cela serait très probablement un atout particulièrement intéressant pour ces quelques mois qu’ils passeraient ensemble. Il avait extrêmement hâte. Lorsqu’Alexis fit mine de se relever, il s’empressa de l’imiter et proposa de débarrasser leurs deux plateaux respectifs. Il ne ferait pas le chevalier servant tout le stage mais i pouvait sacrifier quelques instants le premier jour. La quête était lancée. Il était prêt à relever le challenge. L’excitation lui piquait la peau. Enfin, ils se dirigèrent de nouveau vers la morgue. Helios suivait toujours la tête haute son encadrante. Les gens s’écartaient encore et toujours. Helios sourit, plein de satisfaction et d’arrogance. S’il avait pu sauter de joie, il l’aurait très probablement fait.

Codage d’après Libella sur Graphiorum