Il y a des jours comme celui-là, où dès le réveil, ce n’est pas ça. Être réveillé aux aurores par les piaillements d’un moineau, à moins que ce soit le bruit d’un pinson Elise n’était pas vraiment l’ornithologue du siècle, un oiseau c’est un oiseau, ça vole, ça a des plumes, ça s’arrête là. Tout ce qu’elle savait en revanche c’était que cet oiseau en question qui la réveillait n’était pas chaud pour la migration. Dommage que son lit soit trop loin de la fenêtre, elle était prête à lui envoyer ce qui lui passait sous la main dans le bec, pas sûr qu’un oiseau faisant la taille d’une main apprécie de se prendre un livre dans la tête. Elise n’appréciait pas non plus d’être réveillé aussi tôt et l’insulta copieusement, mentalement, avant de remettre son oreiller sur la tête pour se rendormir, sauf que ça ne marche jamais comme ça, ce n’est pas parce qu’elle voulait dormir que son esprit était d’accord, non une fois réveillé, il était prêt pour une nouvelle journée.

Avec ce genre de réveil, c’est difficile d’être d’attaque. Les bruits dans la grande salle lui semblaient affreux. Elle avait l’impression que tous les élèves faisaient un concours pour savoir lequel hurlait le plus fort. Et bien le vote d’Elise allait à un gamin qui n’avait pas encore mué et qui avait une voix de crécerelle, limite si la demoiselle ne priait pas pour qu’il s’étouffe avec son pancake. Elle comprenait, habituellement, l’excitation des nouveaux élèves, l’impression que c’était un rêve éveillé, la hâte qu’ils avaient de tous aller en cours, avant de constater que non tous les cours ne sont pas ultra passionnants. D’habitude, Elise était quand même un peu plus motivée et participait même aux conversations. Là, elle se contentait de regarder la boisson fumante dans son bol et de touiller avec sa cuillère à l’excès. Elle comatait, voilà et sûrement qu’elle aurait pu piquer du nez si un de ses adorables camarades ne lui enfonça pas son coude dans les côtes. Sa réaction première fut quand même de s’écarter, clairement bonne patte au réveil, on la poussait, elle se poussait sans chercher à comprendre ni à se rebiffer. Sauf qu’aujourd’hui, ça ne fonctionna pas du tout, à peine décalé et buvant une gorgée du breuvage lactée, à nouveau le même coude lui rentra dans les côtés. D’accord c’était peut-être quelqu’un qui parlait avec les mains, ça arrive, c’est chiant mais ça arrive. Une nouvelle fois elle se décala, manquant par la même occasion de renverser son chocolat sur elle-même. Au troisième coup, là son cerveau s’éveilla, n’aimant pas du tout subir des coups à répétition, un coude ça fait mal en plus. Elle leva donc le nez pour observer la petite frimousse qui la regardait les yeux brillants d’excitation. Implicitement, elle l’invita à s’exprimer d’un mouvement de tête, évitant même la tape amicale dans l’épaule qu’il s’apprêtait à lui infliger. Non mais c’est bon la violence ?! Est-ce que boire une nouvelle gorgée au moment où il lui posait la question fut une bonne idée ? A en juger par la réaction d’Elise qui s’étouffa complètement avec son truc, mettant bien évidement du chocolat partout -ça va c’est mieux que de l’encre -. Pourtant la question n’était pas méchante, mignonne même, sauf que c’était posé à la mauvaise personne. Elise se massa les tempes, longuement se replongeant dans ses souvenirs. Elle avait été dans ce même cas de figure à demander de l’aide à quelqu’un afin d’avoir l’air un peu moins pitoyable sur un balai. Enfin il n’avait pas non plus dit ça comme ça, Elise lisait à travers les lignes - comme elle le voulait -. Longuement, elle poussa un soupir, observant ses camarades espérant qu’ils avaient tous suivi la conversation, après tout elle venait presque de leur cracher dessus, et que quelqu’un se sacrifierait, voir même trouverait ça génial de former machin sur un balai. Personne ne se manifesta, elle marmonna, se défilant un peu pour le coup

« On en reparle ? Je dois y aller. »

Elle était totalement dégoutée de ne pas avoir pu finir son chocolat chaud, journée pourrie, et déprimée à l’idée de ne pas avoir réussi à dire un non clair. Ça voulait presque dire qu’elle avait accepté ça. Elle sortit du château, observant quelques instants les nuages dans le ciel, nombreux mais de couleur blanche, elle ne risquait donc en théorie pas que le ciel ne lui tombe sur la tête. Elle marcha au gré de ses pensées, les souvenirs remontant désagréable pour certains, la terre ça a vraiment un goût affreux, agréable pour d’autres, l’excitation que de réussir et de voir le regard de son professeur-élève qu’on essaie d’épater. Se sentait-elle réellement capable de transmettre ce que sa camarade lui avait transmis, pas vraiment. Sans oublier que le balai c’est pas comme le vélo -bon en plus Elise avait horreur du vélo, la douleur des genoux écorchés c’était inscrit en elle – mais le balai ça s’oublie, enfin elle supposait. Oui d’accord toutes les excuses étaient bonnes pour dire non, après les bons souvenirs étaient plus nombreux que les anciens, ça comptait dans la balance ça et mademoiselle Macmillan, et bien Elise l’aimait bien certainement grâce aux leçons de vol, bon et sa gentillesse à toute épreuve.

Est-ce que fut un hasard que de tomber sur la demoiselle de Poufsouffle, pour le coup ? Et bien oui, parce qu’Elise n’avait encore le don de faire apparaître les gens quand elle pensait à eux, purée sinon ce serait la classe intersidérale. Cela faisait très longtemps qu’elle n’avait pas vu la demoiselle. Elle avait plus ou moins entendu des rumeurs sur son retour mais Elise et les rumeurs, c’était plus vraiment ça, on ne lui referait pas le coup du père noël… elle avait été hyper déçue le jour où Amaury lui avait dit qu’il existait pas, elle lui avait un peu hurlé dessus en le traitant de menteur et elle avait pas mal déchantée quand ses parents avaient confirmé la version du jumeau.  Donc voir Sélénya en chair et en os – c’est mieux pour la santé d’être en chair et en os – c’était presque comme si le père noël existait, en moins gros et moins barbu et plus féminin aussi. Pour le coup Elise en oublia même sa fatigue et le fait qu’elle n’avait même pas fini son chocolat chaud, envolé toutes les interrogations, elle se précipita vers la demoiselle et lui sauta dessus. Alors oui ce n’était pas vraiment dans les habitudes de la blondinette mais en même temps ça faisait une éternité qu’elle ne l’avait pas vu. Et un gros câlin ça n’a jamais fait de mal à personne n’est-ce pas ?

Gros malaise. Tout dégénéra en l’espace d’un claquement de doigt. Comment une personne aussi agréable à fréquenter dans les souvenirs d’Elise en tout cas, pouvait faire aussi mal. Le coup qu’elle se prit la sonna quelques secondes sans qu’elle ne parvienne à comprendre pourquoi. Forcément se prendre un coup parce que la personne se débat, sans raison attention, parce qu’Elise avait quand même une force de moustique et que niveau agresseur en puissance, on repassera. Il n’empêche que la blondinette fut éjectée, vraiment un moustique c’était l’exemple parfait. En plus voilà qu’à nouveau quelqu’un lui hurlait dans les oreilles, c’était le kiff de tout le monde cette année de bousiller les tympans d’Elise ? Après Adèle, Siobhan maintenant c’était le tour de Sélénya, ils s’étaient tous donnés le mot c’est ça ?
S’il n’y avait que sa réaction bizarre de lui hurler dessus et de lui faire mal, non parce qu’Elise allait avoir une bosse là, c’est sûr. Le léger détail en plus c’était que les larmes coulaient sur les joues de sa camarade sans qu’Elise ne parvienne à comprendre ce qu’il se passait. Elle n’avait aucune idée de comment réagir à cet instant précis, il se passait quelque chose qui la dépassait totalement, c’était incompréhensible pour elle. Elle avait pris un coup sur la tête et était devenue subitement amnésique ? Pourquoi personne ne l’avait prévenu ? Bon peut être parce que c’est pas le genre de truc qu’on annonce à tout le monde. Qu’est ce qui était le pire ? Se faire taper ? Se faire crier dessus ? Non rien de tout ça, le pire ce fut ce regard que Sélénya posa sur sa cadette et qui poussa Elise à reculer d’un pas, puis de deux, craignant pour sa sécurité. Pourquoi la regardait-elle comme ça avec autant de colère dans les yeux ? Tout dans son attitude rappelait un animal sauvage pris au piège qui se sent en danger, inférieur et qui essaie malgré tout de faire face à l’oppresseur, quitte à y laisser sa vie. Elise n’avait pas la moindre idée de comment les gens réagissaient dans ces cas-là, elle n’avait pas vu assez de documentaire -parce que les animaux c’était pas son dada -. Néanmoins, elle se doutait assez bien du fait qu’il ne fallait plus du tout s’approcher, ne pas rentrer dans le périmètre de sécurité dont avait besoin la demoiselle pour respirer plus calmement. Voilà, elle allait s’en remettre toute seule, s’apaiser par elle-même et se rendre compte qu’il n’y avait pas le moindre danger et que ce n’était qu’Elise.

Rien ne fonctionna comme le voulait la demoiselle de Lestang, rah des fois les gens ils font tellement pas d’efforts, c’est navrant. Sélénya commença à parler, elle vivait quelque chose d’intense visiblement et semblait être présente physiquement mais tout en étant ailleurs mentalement, très étrange sensation. Et puis c’était pas clair pour la blondinette qui pencha la tête sur le côté, elle ne voulait pas retourner où au juste ?

Ah en plus elle avait un train de retard, super, elle n’avait même pas remarqué qu’Elise ne la touchait plus. Elise écarta les mains l’air de dire hé cocotte personne te touche, détends-toi. Geste qui ne servit pas le moins du monde puisque Sélénya reculait. Franchement, heureusement pour elle qu’il y avait un mur pour empêcher son désir de s’éloigner la mettre en danger, sinon sûrement qu’elle aurait été capable de tomber dans le lac vu que rien ne semblait pouvoir la perturber… Enfin rien de plus que ce qu’Elise avait fait indépendamment de sa volonté, cela va sans dire. Sa réaction lui fendait le cœur, que ce soit le fait qu’elle semblait complètement l’avoir oublié, comme si Elise avait inventé tout ces moments qu’elles passaient ensemble. Le fait qu’elle la craignait, craignait un geste de sa part. Et le pire c’était le fait qu’elle soit prostrée contre le mur comme si Elise allait l’attaquer, ça n’arriverait pas. Pour autant, la laisser dans cet état là était tout bonnement impossible, elle était en proie à une terreur sans nom, la blondinette se laissa à son tour glisser au sol pour ne pas paraître plus imposante si sa camarade la regardait d’en bas, à la même hauteur ça les ramenait dans un contexte ou l’une était l’égal de l’autre. Elle s’avança à quatre pattes sur l’herbe, oubliant toute dignité, au diable la dignité dans ces moments là, peu lui importait la façon dont n’importe qui pourrait la voir. Son regard cherchait à capter celui de l’animal blessé, elle s’immobilisa devant elle, évitant de rentrer ans sa bulle d’air, pourtant elle s’adressa à elle tout doucement, essayant de trouver des mots pour l’apaiser même si c’était pas évident. Qu’est ce qu’il lui était arrivé ? Qu’était devenu Sélénya et où était la demoiselle qu’Elise avait l’habitude de côtoyer.

« Hé ce n’est que moi. Personne ne t’emmènera nulle part Sélénya, tout va bien tu es en sécurité ici, il ne t’arrivera rien. »

Facile à dire, n’importe quoi pouvait arriver à n’importe quel moment. Les pensées d’Elise étaient visiblement parasitées par des pensées négatives. Elle se rapprocha encore, millimètre par millimètre jusqu’à se retrouver juste à côté de Sélénya. A son tour elle s’adossa contre le mur, poussa un long soupir, il suffisait d’un rien pour qu’elles se touchent mais pour le moment pas le moindre contact. Elle faisait acte de présence mais ne la toucherait pas. Elle plongea un regard sur la demoiselle à ses côtés et murmura avec chaleur

« Tu m’as manqué. Je suis contente que tu sois de retour. »

Que pouvait-elle dire d’autres à part essayer de la replonger sur des souvenirs qu’elle espérait positif. C’était vraiment pas évident, il était où le manuel expliquant ce qui était arrivé à sa camarade et puis pourquoi dans le monde réel, les spoilers n’existent pas. Elle en aurait bien eu besoin d’un bon spoiler, ça lui aurait évité de se sentir démunie face à la douleur de son amie, de ne pas savoir gérer et de souffrir de l’avoir fait souffrir. Pas évident c’est sûr.

Comment faisait Amaury pour gérer quand Elise faisait des crises de paniques, il faudrait qu’elle lui demande. Sûrement que lui, il aurait trouvé les paroles pour apaiser la demoiselle en un claquement de doigt. Pour Elise, c’était tout sauf naturel, elle avait bien conscience qu’elle avait tout intérêt à faire très attention à Sélénya, non parce que si c’était pour s’en reprendre une, merci du cadeau. Manquerait plus qu’elle ait pleins de bosses, fille battue mais par sa pote, tout va bien. Observatrice, et sur la défensive à son tour, elle ne quittait plus la demoiselle du regard, cherchant à savoir dans quel état elle se trouvait. Pauvre Sélénya était la seule pensée cohérente qui parcourait l’esprit de l’étudiante, elle semblait vivre un cauchemar éveillé, tous ses sens étaient en alerte, ce qui n’avait pas spécialement de sens pour Elise. Et pourtant, Elise c’était vraiment pas la courageuse par excellence, un rien l’effrayait, qu’il s’agisse d’un insecte qui lui tomberait sur la tronche – ou un hippopotame – N’est ce pas Siobhan. Si encore, elles s’étaient retrouvés dans la forêt interdite, là elle aurait compris la frayeur de Sélénya à l’idée d’être touchée. Non parce que niveau endroit flippant, vraiment c’était pas mal la forêt. Sans oublier le fait qu’Elise aurait été tout aussi terrifiée que sa camarade, c’est important de le préciser ça tout de même. Là, elles étaient dans un endroit relativement sûr, aux dernières nouvelles, elles ne risquaient pas d’être attaquées par des insectes grouillants, terrifiants, méchants et tout un tas de mots se finissant par ant. Dans le domaine de la trouille être rejetée l’inquiétait aussi, drôlement, elle n’aimait pas offrir sa confiance et son amour aux gens.  

Il est beaucoup plus facile de souffrir de paroles de gens que l’on aime le plus sincèrement du monde, que des gens qui sont là, parce que la vie l’a voulu ainsi. Le problème c’est que s’il y a bien un truc incompréhensible dans ce bas monde, c’est les sentiments, impossible de savoir quand le cœur va décider qu’il appréciera untel ou untelle. Et là était tout le problème d’Elise, les sentiments elle ne les gérait pas et quelque part, l’angoisse naquit en elle à l’idée que Sély lui tourne le dos sans qu’elle ne parvienne comprendre pourquoi. Qu’est ce qu’elle pouvait bien faire pour inverser la tendance ? Pour le moment, rien de spécial, comme à son habitude lorsqu’elle était un peu stressée, elle découpait méticuleusement les brins d’herbe devant elle.

La voix de son aînée la tira de sa destruction de la pelouse. Sa voix, c’est bien simple, elle était méconnaissable, si Elise n’avait pas su qu’elle se trouvait à côté de Sélénya, elle n’aurait jamais su que c’était elle qui parlait. Elle tremblotait, comme le reste de sa personne. Elle se trouvait à côté d’une personne qui tremblait comme si elle était gelée, sauf qu’il ne faisait pas froid, du tout. Elise esquissa un tout léger sourire, essayant de la réconforter par ce simple geste, naturel mais voulant dire tout un tas de chose. Sourire qui ne resta pas longtemps sur le visage de la blondinette. Non, vraiment pas, la deuxième phrase était tout ce qu’il y a de plus désagréable. Alors oui en apparence, c’était sympa, si on ne remarquait pas qu'elle ne semblait même pas convaincue par ses propres mots. Si c’est pour mentir, ça n’avait aucun intérêt de parler, pourquoi ne tout simplement pas dire dégage, avec un peu plus de tact quand même. Ouai le tact, c’est important, déjà que c’était pas des plus agréables que d’entendre une hésitation dans la voix de quelqu’un qui dit qu’il vous manque et bon sang niveau hypocrisie Elise en connaissait un rayon, elle maitrisait cet art depuis bien longtemps.
Obéissante, elle hocha la tête à la demande, qui n’en était pas vraiment une par ailleurs, plutôt un ordre ? Non un conseil qu’Elise traduisit par la phrase suivante : Si tu ne veux pas t’en prendre une à nouveau, distance de sécurité. Parfait, le message était passé. Il était même passé depuis quelques minutes, au moment où elle s’était pris un coup à vrai dire. Mais, c’était sympa de prévenir, ça permettait à Elise d’être sûre. Elle ne ferait pas la même erreur des fois, elle apprenait relativement bien de ses erreurs et la leçon venait de se marquer au fer rouge dans sa tête.

Si elle ne dit pas la moindre parole, c’était plus parce qu’elle n’arrivait pas à trouver les bons mots, savoir quoi dire. Enfin peut être qu’il aurait mieux valu qu’elle les trouve vite parce que Sélénya qui essaie de faire l’humour, ah non mais c’est une catastrophe. Certaines personnes devraient s’abstenir de faire de l’humour, vraiment. Et pour sa gouverne, elle non plus se souvenait pas que Sélénya était du genre à taper les gens hein. Elle ne s’était jamais dit que quelques années sans se voir, ça briserait une amitié et pour le coup, elle s’en voulait presque à elle-même d’être venue la trouver. Il valait mieux vivre dans un souvenir positif que d’affronter la réalité et de s’apercevoir quelle est beaucoup moins belle que ce qu’Elise avait imaginé. Elle croisa ses bras contre son ventre, comme pour se protéger du froid, mais infligé par la douche froide que Sélénya venait de lui infliger en érigeant des barrières tout autour de sa personne, qu’à cause de la température environnante.

Puis, il y eut cette question à laquelle Elise ne savait pas répondre. Son instinct mordant avait très envie de balayer la question par des paroles pleines de sécheresses, qu’est ce que ça pouvait bien lui faire après tout ? Elle avait été assez clair par ses gestes et par ses propos et Elise tenait bien trop à son cœur pour accepter qu’on le meurtrisse. Sauf que voilà, à la limite peu importe comme Sélénya la voyait à l’instant T, ça ne changeait pas les sentiments qu’Elise pouvait éprouver à son égard. Non elle l’aimait bien et s’il n’y avait personne pour entretenir cette amitié, elle allait sombrer dans l’oubli et ce n’était pas ce que la blondinette souhaitait. Pour sa part, elle avait apprécié tout ce temps passé en compagnie de sa camarade et si cette dernière avait oublié ces bons moments, ce n’était pas le cas de sa cadette qui se redressa contre son mur, s’installant confortablement avant de faire le plus gros effort du monde, demander pardon.

« Je suis sincèrement désolée de t’avoir touchée Sélénya et je te demande de bien vouloir m’excuser. »

Que c’était compliqué à faire. Il y a vraiment des gens qui gèrent quand ils doivent demander pardon ? Elise voulait une formation, parce qu’elle avait plus l’impression d’être pitoyable qu’autre chose. Elle laissa passer quelques secondes, déjà pour que son propre esprit s’en remette, pour que le message soit bien passé aussi, puis elle reprit la parole, tout aussi mal à l’aise que précédemment.

« J’étais vraiment contente de te revoir, c’est tout. Je ne recommencerais pas, je te le promets. Je vais bien. »

Puis à force de chasser le naturel, il revint au galop subitement et c’est sans la regarder cette fois ci, admirant sans doute ses propres chaussures avec une minuscule tâche de boue – invisible à l’œil nu cela va sans dire – qu’elle rajouta, sans mépris, sans jugement, juste un constat, puis une question, parce que bonjour la curiosité d'Elise.

« Tu as changé, je crois que je ne m’y attendais pas. Que s’est il passé pour que tu aies ce genre de réaction ? »

Que c’était compliqué, comment deux années pouvaient autant changer une personne ? Est-ce qu’elle aussi avait autant changé ? Peut-être, il est difficile de se rendre compte des changements lorsqu’on côtoie une personne tous les jours, pourtant des changements il y en a forcément, personne ne reste muré dans le même schéma toute sa vie. Elise faisait preuve aujourd’hui d’un sang-froid exemplaire, il faut croire qu’elle avait tout donné niveau agacement avec le piaf ce matin, ou alors que le fait de ne pas avoir fini son petit déjeuner ça l’avait calmé pour la journée, les deux cas sont possibles.
Sélénya marquait un point, Elise n’aurait jamais pu deviner que ça aurait dégénéré aussi rapidement et elle le regrettait amèrement. Que n’aurait elle pas donner pour justement être dans la tête de sa camarade et pouvoir effacer de cet esprit la douleur qui semblait faire de sa vie un enfer. Elle ne voulait pas supprimer les souvenirs de Sélénya, ça non, ça n’avait pas de sens, les souvenirs forgeaient une personne et permettaient de ne pas faire la même erreur. Un enfant qui se brûle les doigts, la leçon sera gravée en lui, le feu c’est dangereux, pour autant la douleur s’effaçait, la peur du feu s’effaçait aussi. Certains traumatismes ne fonctionnent pas ainsi et il s’était passé quelque chose avec la demoiselle aux côtés d’Elise et elle aurait aimé pouvoir apaiser ses maux. Elle aurait voulu poser sa tête contre la sienne et lui promettre que tout irait bien. Elle ne pouvait ni la toucher, ni lui faire ce genre de promesses. Elle se contentait donc d’essayer de lui envoyer des vagues d’amour par la pensée, sans que ça ne fonctionne vraiment, elle n’avait pas de super pouvoirs mais c’est l’intention qui comptait.

Elle serra les dents en entendant les propos suivant de la demoiselle. Oh la boulette, à la première question, ça sentait déjà le roussi. C’était la première fois que quelqu’un faisait la remarque suivante tout de même, à quel moment c’était une bonne idée d’écouter les rumeurs ? Elle lui lança un regard un peu perdu en l’écoutant parler avec un tel détachement de ce qui lui était arrivée et du fait que ça parlait d’elle dans son dos sans pression, ni retenue. C’était désolant que les gens fassent ça, Elise ne remportait peut-être pas la palme de la camarade la plus agréable du monde mais elle n’était pas du genre à se réjouir de la douleur des gens et n’irait pas parler en mal d’eux, enfin c’est quoi ce genre de comportement. Elle ne faisait pas de l’humour, n’est-ce pas ? Elle se voyait vraiment comme quelqu’un de cinglée, foutaises que tout ceci. Elise ne connaissait pas quelqu’un qui s’en sortirait indemne d’une séquestration, forcément que ça travaillait les gens et c’était totalement malsain d’en arriver à la conclusion que c’était Sélénya qui était cinglée. Elle devait se reconstruire et ça ne se ferait pas en un claquement de doigt et si les gens ne faisaient pas l’effort de la comprendre, c’était eux les cinglés. Elise regarda le ciel un instant, cherchant comme tourner ses mots au mieux, puis elle prit la parole calmement.

« Non, je n’écoute pas les rumeurs. Je me fiche de la façon dont les gens te perçoivent, je ne veux même pas parasiter mon esprit de leurs propos et de leurs visions douteuses, s’ils sont débiles, c’est leur problème. Mon opinion je me la fais sans l’aide de personne et la seule façon de se la faire, c’est de venir te parler directement. Alors oui, peut-être qu’en écoutant les gens, j’aurais évité de faire une boulette mais j’aurais eu aussi des sacrés préjugés. Je préfère la façon dont tout ceci s’est produit. »

En revanche, il y avait quelque chose qu’elle ne comprenait pas le moins du monde et qui allait certainement finir par franchir l’espace de ses lèvres. Pour quelle raison des moldus l’avaient enfermé ? Elise fréquentait des moldus depuis qu’elle était haute comme trois pommes, bon après elle ne balançait pas sa condition de sorcière à tout le monde, c’est vrai. Il n’empêche qu’elle n’arrivait pas à comprendre l’intérêt de séquestrer quelqu’un. Super plan, bravo les boulets, ils s’étaient dit quoi à ce moment là la bande de branquignol en puissance, que personne ne viendrait chercher Sélénya. Non mais sérieux vlà les lumières que c’était ceux-là. Elise avait hyper envie de poser tout un tas de questions à sa camarade. Sélénya devait la connaître, pour une soi-disant cinglée, elle était quand même vachement douée la demoiselle. Elle stoppa la curieuse en une phrase. Flûte, c’était difficile d’en parler, ça voulait dire qu’Elise allait rester dans le flou ça, l’angoisse. Ah non mais sérieux, Elise détestait se poser des questions sans avoir de réponses, c’était un effort surhumain qui lui était demandé de la boucler. D’ailleurs, ça devait se voir sur son visage qu’elle était dégoutée de devoir faire cet effort, mais bon si on ne fait pas d’efforts pour les gens auquel on tient, pour qui en faire n’est ce pas.
Voilà donc la blondinette curieuse comme pas permis qui prenait une immense inspiration pour réussir à dire. « Je comprends. » Oh le miracle, non mais sérieux, non pas qu’Elise comprenne, ça merci quand même, un peu de respect mais qu’elle n’essaie pas d’en savoir plus. Elle rajouta tout de même « Pour ce que ça vaut, je ne te trouve pas cinglée Sélénya et je trouve ça méprisable que des gens puissent penser cela de toi. Je n’ai pas le pouvoir de faire taire les rumeurs à ton sujet mais je te promets que si j’entends quelqu’un parler en mal de toi, je me ferais une joie de lui rentrer dedans pour te défendre. »

Et bien oui parce que quand même, Elise ça restait le genre de personnes à défendre ses potes contre vents et marées, il fallait bien prévenir Sélénya qu’elle avait une défenseuse pour veiller sur elle, c’est pas deux ans et une séquestration qui allait briser une amitié, ça non, pas question. Bon et parce que la curiosité était un peu trop présente en la demoiselle, elle marmonna tout de même « Je peux te poser quand même une toute petite question ? » ça va, une seule question pour les dizaines qu’elle avait en tête, c’était toujours faire un effort.


Le choix des mots était peut-être un peu surprenant. Bien entendu que toute personne normalement constituée, et jusqu’à preuve du contraire Elise n’était pas non plus un cas désespéré à ce sujet, aurait secoué la tête négativement. Il paraît évident que personne dans ce bas monde – enfin si, devait bien y avoir quelques truffes qui trouvaient ça cool – n’apprécierait de se prendre un coup, ou se faire crier dessus, sans même parler des deux combinés. Pourtant, Elise n’avait pas menti, si on lui avait donné la possibilité de changer un minuscule détail, de prendre en compte des rumeurs, elle aurait refusé. Elle s’était pris un coup et après ? Elle ne s’en portait pas mal, ce n’était pas non plus comme si Sélénya l’avait mise à terre pour la tabasser, là oui les choses auraient été différentes et Elise n’aurait peut-être pas aussi bien pris la chose. Non pas à cause de la douleur physique, on se remet beaucoup plus vite des douleurs physiques que des douleurs morales et d’être la cible de quelqu’un qu’on a appréciée, ça ne devait pas être évident de l’accepter et de pouvoir ensuite regarder la personne sans avoir la crainte que ça se reproduise.
Elise tourna la tête pour regarder la demoiselle qui trouvait le moyen de faire de l’humour, moisi en prime et d’avoir ce petit sourire, non mais vraiment, en plus elle était fière de sortir ça. Elise haussa les épaules, avant de rétorquer un peu moqueuse sur les bords, les yeux pétillants de malice « Et moi qui pensais que personne ne s’en rendrait jamais compte. Quelle perspicacité, je suis épatée. »

Est-ce que c’était une bonne chose de la taquiner en retour ou est ce que c’était un mauvais calcul ? Elise n’en savait rien mais partait du principe que la considérer comme différente, ou même fragile psychologiquement, ça n’aiderait pas spécialement Sélénya. De plus, il devait y avoir bien assez de personnes pour la couver comme un petit oisillon tout juste sorti du nid, autant se démarquer des autres.
Son amusement fit cependant place à un agacement certain lorsque Sélénya reprit la parole, non pas parce la demoiselle refusait qu’Elise s’attire des ennuis, ce qui n’était pas vraiment un problème pour la blondinette. De toute façon, depuis le début de cette année scolaire, Elise avait déjà des ennuis, elle avait même trouvé le problème par excellence, le minuscule petit détail qui empoisonnait sa vie, mademoiselle Froggy. Difficile de faire pire que cette Française qui était une emmerdeuse, rien de mieux que ce mot pour la décrire. Alors se prendre la tête avec le reste de l’école lui semblait beaucoup plus simple que d’avoir le dessus sur Adèle. Ce qui enquiquinait Elise dans les propos de sa camarade c’était le sujet rumeur, oui les gens étaient juste incroyables. Ils n’avaient jamais cette intelligence de fermer leur bouche plutôt que d’aller raconter des choses sur les uns et les autres, c’était insupportable et ça embêtait réellement Elise même quand il ne s’agissait pas de rumeurs sur elle. Bon après peut être qu’il y en avait mais comme elle ne se tenait pas informée, elle était toujours la dernière au courant. Elle fronça les sourcils avant de dire estomaquée « Et tu t’étonnes que je n’aie pas écouté les rumeurs à ton sujet ? Et j’interviendrais quand même si j’en ai l’occasion. Si je ne défends pas les personnes auxquelles je tiens, qui défendre ? Et comment me regarder dans le miroir le matin ? »

Le soupir de Sélénya était presque aussi clair que si elle avait dit tu me gonfles. Elise se tassa donc un peu sur elle-même. Est-ce qu’elle se rendait compte des efforts que faisait sa cadette pour ne pas la noyer sous un flot de question ? Elle en avait des milliards à poser. Elle brûlait d’envie de tout savoir mais faisait de son mieux pour être supportable et pour respecter les désirs de sa camarade, ce qui ne semblait pas suffire. C’est donc ultra timidement, et à une vitesse folle, certainement pour que ça passe mieux aux yeux de Sélénya même si c’était complètement stupide, c’était pas la vitesse à laquelle elle posait sa question qui dérangeait, c’était les questions en elle-même. « Quelles étaient leurs motivations ? » Personne n’agissait sans raison, tout le monde avait une ligne de conduite, croyait en quelque chose, sauf que là, ça dépassait totalement Elise et ça l’inquiétait grandement à vrai dire.

Elle observa attentivement Sélénya lorsqu’elle lui posa une question. Est-ce que ça l’intéressait réellement de savoir ça ou est ce que c’était pour fuir les questions de la demoiselle un peu trop curieuse à son goût, ce qu’Elise avait parfaitement conscience d’être. Dans ces cas-là, que fallait-il répondre, la vérité et lui parler de choses dont elle se foutait sûrement éperdument ou édulcorer tout ça et faire uniquement ce qu’on attendait d’elle, changer de sujet et lui foutre la paix. Elle murmura « J’avais peur qu’Amaury ne poursuive pas ses études et de me retrouver ici sans lui. » C’était peut-être de la lâcheté, la peur d’être sans la présence réconfortante de son frère la tétanisait au plus haut point. Elle savait que ça arriverait, que viendrait le jour où elle reviendrait dans cette école sans lui mais pour le moment elle devait reconnaître qu’elle était soulagée qu’il soit là, soulagée d’avoir son allié de toujours. Et d’ailleurs, heureusement qu’il était là, comment aurait-elle vécu la présence de Froggy sans Amaury pour la soutenir. Est-ce que ça intéressait Sélénya de savoir ça ? Elise n’en était pas du tout persuadée, elle revint donc sur des propos bien moins personnels « Ça fait bizarre au début de retrouver des gens qui avaient fini leurs études. Il y a aussi les étudiants d’autres écoles, ça fait des nouvelles rencontres, des rencontres dont parfois je me serais bien passée. » Ah clairement, il y avait au moins une personne qu’elle se serait bien passé de rencontrer et manque de bol c’était la personne qu’elle allait se taper pendant huit longues années. Ouai peut être qu’il ne valait mieux pas le dire à haute voix ça. Garder le silence parfois, c’était pas plus mal.

Progrès, c’est vite dit. Cependant ce n’était pas tant le fait qu’elle fasse ou non des progrès qui était intéressant, c’était la palette d’émotions qui naissait sur le visage de Sélénya. Elle était présente dans la conversation, ne se contentant pas de répondre pour être polie, elle essayait de rebondir aux phrases de sa camarade et ça faisait plaisir à la blondinette qui lui renvoyait bien volontiers la balle. Raison pour laquelle Elise roula des yeux, faussement agacée avant de lui répondre, un immense sourire aux lèvres « Une vrai championne. Je pense même que tu devrais donner des cours aux gens. Tu deviendrais la première prof de perspicacité de l’école. Tout ça grâce à moi, quelle fierté. » Parce qu’un peu de vantardise n’a jamais tué personne, enfin peut être que si, aucune idée, les morts ne peuvent contredire Elise de toute façon.

Pourtant la réaction physique de Sélénya fit paniquer totalement la pitchoune, qu’avait-elle dit ? Qu’est ce qu’elle avait ? Sa première réaction fut de tendre la main pour la poser sur son épaule et essayer par une simple pression de la rassurer. Elle n’alla pas au bout de son action, de son envie, refermant sa main en un poing avant de la laisser tomber le long de son corps dans un soupir, elle était bien incapable de l’aider, quand bien même elle le voulait. Elle était impuissante et ce n’était pas la peur de se prendre un coup qui la rendait immobile, comme quoi Sélénya était bien perspicace, plutôt le fait qu’elle était persuadée que Sélénya n’apprécierait pas d’être touchée de nouveau et que ça aurait été mesquin de la part d’Elise d’aller contre la volonté de la demoiselle.

Elle écarquilla les yeux, surprise de la phrase de son ainée, elle s’inquiétait pour Elise ? C’était ça qui la faisait trembler ? L’idée qu’Elise puisse prendre un mauvais coup ? Elle en resta bouche bée, elle n’avait pas songé une seule seconde à ça, comme si tout n’allait que dans un sens. Elle sentait le regard de Sélénya sur elle et manqua réellement d’éclater de rire en entendant le deal. Et quel deal, comment ne pas l’accepter, c’est avec arrogance que la blondinette répondit. « Je plains sincèrement la personne qui me donnera un coup. Déjà parce que je répliquerais mais ensuite parce qu’oulalah si je me fais abimer, Amaury va péter un câble sur la personne. Néanmoins, deal accepté. » Elle tendit la main, geste machinal, habitude, puis hésita à retirer sa main aussi vite qu’elle l’avait tendue. Elle plongea son regard dans celui de sa camarade essayant de lui faire passer le message qu’elle était désolée, qu’elle ne voulait pas aller contre les envies de Sélénya. Sauf que la symbolique était là aussi, si elle retirait sa main, elle retirait son deal. Oh que c’était compliqué, peut être que si elle essayait d’attraper la pâquerette au sol ça serait mieux perçu ? Ou alors ça ferait mauvaise blague, ouai garder la main tendue et rester comme une idiote ce n’était peut-être pas si grave. Que ne faut-il pas faire parfois.

S’il y a bien une chose dans laquelle Elise était douée, imbattable, indétrônable et carrément désagréable, c’était pour mettre le doigt pile où il fallait. Sa curiosité allait même au-delà de ce qu’avait pu vivre Sélénya, elle voulait comprendre comment le monde fonctionnait et sa concentration au moment où la demoiselle prit la parole, était bien réelle. Elle fronça les sourcils autant étonnée que déstabilisée par les propos de son amie. Les hommes restaient incroyables, ah Elise reconnaissait sans mal qu’étudier n’était pas une mauvaise chose, mais ils dépassaient les limites de l’éthique. Vouloir des réponses oui elle comprenait, mais pas à n’importe quel prix. C’était toujours le même problème, pourquoi une vie valait plus qu’une autre ? Pourquoi les personnes en position de forces devaient absolument écraser les autres ?

La plus belle preuve de confiance de Sélénya eut lieu dans ce contexte précis. Elle aurait pu s’arrêter à la première moitié, répondre uniquement à la question en surface, sans chercher à donner le plus d’élément possible pour Elise et sa curiosité dévorante.  Et pourtant, elle se confia alors qu’elle avait dit elle-même que c’était difficile d’en parler, qu’elle ne répondrait pas à toutes les questions qu’Elise aurait pu poser. La sorcière la regardait incapable de savoir quoi dire. Enfin si, elle savait quoi dire mais les mots semblaient tellement inutiles dans cette situation. Qu’aurait-elle pu dire ? Je suis désolée pour toi, combien de personnes avaient dû lui dire ça, ça n’apaiserait pas la jeune fille de le savoir. Je suis là ? Nul besoin de le dire, Sélénya n’était pas aveugle, elle la voyait parfaitement. Toutes les paroles de réconforts qu’auraient pu dire Elise lui semblait tellement vide de sens qu’elle se contenta de souffler « Merci. » Merci d’être là, merci d’être mon amie, merci pour la confiance que tu places en moi. Tant de choses dîtes en un seul mot et c’était peut-être mieux que toutes les déclarations du monde.

Le sujet Amaury était beaucoup plus léger, il faut au moins reconnaître ça. Elle n’avait même pas idée à quel point ça aurait été bizarre pour Elise. Elle était habituée à ne pas être avec lui 24h sur 24, depuis l’enfance, ce qui avait des bons côtés, par exemple quand il fallait tricher aux devoirs, ah là pas de soucis ça ils avaient toujours trouvé leur compte. Les parents avaient même bien fait de faire en sorte de les mettre dans des classes différentes dès le plus jeune âge, même si Elise ne le reconnaitrait jamais à haute voix. Comme ça Poudlard n’avait pas été un sevrage brutal comme il l’avait été pour d’autres jumeaux séparés. Elle arrivait même à y voir un avantage à leur séparation, ni Serdaigle, ni Serpentard, ils étaient entre les deux se faisant plus confiance l’un à l’autre que chacun envers leur propre maison. Ah clairement, Elise lui balançait sans aucun scrupule toutes les infos sur Serdaigle. Sauf que tout cela avait un prix, comment vivre par la suite sans lui. Comment devenir Serdaigle juste Serdaigle alors que depuis 7 ans, elle ne l’avait pas été une seule seconde, détestant d’ailleurs, encore aujourd’hui, que les gens ne voient en elle que l’écusson brodé sur sa robe de sorciers. Elle prit tout cela sur le ton de l’humour « Oh notre chouette serait juste morte d’épuisement à force de devoir envoyer des lettres pour qu’on se retrouve à Pré au Lard. »
Les propos suivant d’Elise semblèrent éveiller Sélénya qui darda aussitôt un regard sur sa cadette. Elise semblait donc avoir conclu un peu rapidement que Sélénya tentait de faire la conversation pour l’éloigner des questions personnelles. Elle semblait vraiment intéressée par ce qu’Elise disait et lui offrait son soutien sans même connaître le fin mot de l’histoire. Enfin après, ça pouvait se retourner contre Elise à tout instant, qu’est ce qui lui garantissait que Sélénya n’était pas la meilleure pote d’Adèle et qu’au moment où elle citerait son prénom, elle ne perdrait pas son amie qu’elle venait à peine de retrouver. Elle glissa un regard sur elle ou il devait clairement être inscrit dedans, j’ai peur de te perdre à nouveau. Elle prit sur elle pour faire taire cette crainte et se confier « J’ai une cousine. » Elle fit un timide sourire avant de continuer « Enfin j’ai toujours eu une cousine, sauf qu’elle était pas réelle avant cette année. » Son regard s’assombrit nettement pour la dernière partie de ses propos, où la voix n’était plus du tout enjouée

« C’est fou parce qu’elle n’est pas spécialement plus intelligente que moi, elle n’est pas spécialement sympa non plus, non elle est carrément détestable mais clairement il semblerait que sa place dans la famille soit indiscutable. Moi aussi je veux faire partie de cette famille, je ne vois pas pourquoi ça m’est refusé, quand je vois la cousine, je ne me sens pas spécialement inférieure. » Enfin si elle le voyait carrément, pureté du sang, mais qu’y pouvait-elle ? Elle ne cherchait même plus à croiser le regard de Sélénya n’ayant pas envie d’y lire un quelconque jugement, elle aurait même adoré dire qu’elle s’en foutait d’être jugé mais ça n’était pas le cas, pas cette fois ci. Elle avait vraiment essayé de ne pas être envieuse mais la présence de Froggy l’empêchait de s’épanouir, se comparant sans cesse à la demoiselle ayant traversé la Manche. Ses oreilles avaient bourdonné lors de la soirée de rentrée, son regard était allé chercher celui de son frère dans la grande Salle comme pour lui demander si elle avait bien entendu. La réaction du frère lui avait appris bien trop vite qu’il s’était passé un truc. Et le cauchemar quoi, elle se retrouvait Serpentard et en médecine… Tout pour plaire. Après ça, la machine était en marche, impossible de revenir en arrière et il était évident que ça exploserait tôt ou tard, qu’Elise se contenait, attendant le meilleur moment pour frapper, cherchant le point faible de Froggy à la manière d’un Limier. Elle trouverait, c’était une certitude et à ce moment-là, Adèle ne serait plus réellement en mesure de répliquer quoi que ce soit. Mais tout ça, bien évidemment, elle ne pouvait pas le dire, pas le montrer, alors elle fixait l’herbe, très jolie herbe, elle était verte  - ouai de l’herbe quoi -.

Si en faire trop donnait ce résultat, il était évident qu’Elise n’allait pas arrêter de sitôt. Non parce qu’avoir le mérite de réussir à faire sourire Sélénya et pas le genre de sourire que tout le monde sait faire pour donner le change et avoir l’air de s’intéresser à la conversation. Il s’agissait là d’un vrai sourire, raison pour laquelle Elise leva les mains en signe d’innocence avant de prétendre, moqueuse « Jamais, je n’oserai en faire trop, voyons Sélénya. »

S’il y avait bien une chose que la demoiselle semblait gérer à la perfection c’était le fait de charrier Elise, voilà que maintenant elle se payait sa tête en feignant le choc. Après, elle était dans le vrai, Elise ne savait pas vraiment donner de coups de poings, mais c’était surtout parce que ses batailles elle les gagnait verbalement et que s’il fallait se défendre physiquement, elle savait qu’elle n’avait pas besoin de s’en charger elle-même, le frère répondait présent et puisqu’il s’en sortait admirablement bien, pourquoi aurait elle apprit à se battre. Après, peut être qu’un jour ça lui porterait préjudice de se reposer sur le frère, mais pour le moment ce n’était pas le cas, alors pourquoi se plaindre. Carrément que l’argument était bon et pourtant ce ne fut pas l’enjeu de la minute qui suivit, et pour le coup elle passa très lentement cette minute. L’atmosphère venait de se tendre et sérieusement, mais quelle boulette. Et pire que tout le visage de Sélénya qui s’était figé et dont le regard était posé sur la main d’Elise. Qu’est ce qu’elle voyait à cet instant ? Une ennemie ? Une emmerdeuse finie ? Quelqu’un qui l’empêchait d’être tranquille ? Quand est ce que tout cela cesserait, est ce qu’un jour Sélénya serait capable de voir les gestes des gens autrement que comme des menaces envers sa sécurité ? Et pourtant la demoiselle se battait contre ses propres démons et s’en tirait remarquablement, les yeux d’Elise brillaient d’une joie immense en sentant une main venir sceller le deal. Alors oui, ce n’était pas la poignée de main la plus ferme du monde, et alors ? Le geste était là, clair, net, précis et c’était une victoire, petite, certes mais nul besoin que la victoire soit grande pour qu’elle soit belle. Elle s’en sortait admirablement bien et c’était tout ce qu’il y avait à prendre en compte finalement.

Nul besoin de long discours pour montrer aux gens l’importance qu’ils prennent dans une vie. Le merci qu’elle lui souffla avec toute la sincérité dont elle pouvait faire preuve le démontra à la perfection. Que dire de la réaction de Sélénya, elle était touchante. Elle avait dû en vivre des galères pour qu’un aussi petit mot ait autant d’effet sur elle. Surtout quand ça ne venait que d’Elise, qui n’était pas la personne sur qui elle avait l’habitude de compter. Il est vrai, qui compterait sur quelqu’un de plus jeune que soi, qui avait forcément beaucoup moins d’expérience surtout à des âges aussi peu avancés que celui des élèves de Poudlard. L’écart s’était d’ailleurs encore plus creusé au cours de ces dernières années, différemment bien entendu, ce n’était plus tant scolairement parlant que Sélénya avait une avance considérable sur sa cadette mais sur la vie en elle-même. Et en même temps, peu importe toutes les expériences qu’elle avait en plus, ça n’empêchait pas Elise de sentir son cœur se gonfler de joie en voyant la réaction de la personne à ses côtés.

Et voilà parler d’animaux avec Sélénya c’était avoir le droit à son amour pour les bestioles. Non mais c’est sûr qu’elle aimait toutes les bestioles, même les dégoutantes genre, les araignées. Voilà pourquoi Elise ne lui envoyait jamais de lettres, parce qu’elle allait sûrement offrir pleins de trucs bons à Alba, lui lisser les plumes etc, et après cette andouille de chouette voudrait rester avec elle pour toujours. Comment expliquer ça au reste de la famille hein ? Oh vous savez Alba a trouvé beaucoup mieux que nous. Non c’est moyen donc le mieux c’était d’éviter de tenter le diable.
Et oui, ça n’arriverait pas, Elise ne se retrouverait pas seule à l’école avant un bon bout de temps et pour le coup c’était tant mieux pour elle surtout. Sans oublier que maintenant, pour le plus grand bonheur d’Elise, si ça venait à arriver bah c’était pas si grave, il y avait une autre de Lestang dans l’équation… Le pied, non mais à part le père d’Elise qui avait pour le coup des gros problèmes et arrivait à se faire croire à lui-même que sa nièce c’était le top du top de la nièce, qui était heureux de cette situation ? Non mais cette fille, c’est quand même un sacré calvaire et franchement, si la sœur est moins chiante faites un échange, Elise voulait bien faire des efforts – enfin non clairement elle ne voulait pas en faire – mais à choisir si l’autre était mieux, autant se coltiner la gamine hein. Comment qu’elle s’appelait la jeune truffe déjà… Bref appelons là Froggy Junior. Froggy Junior ne pouvait pas être pire qu’Adèle, si ? Pourvu que non sinon bonjour la famille de dégénérés.

Qu’est ce que ce sujet là était épineux, qu’est ce qu’Elise pouvait détester l’ouvrir sur sa famille. Est-ce que le terme leurs correspondait, rien n’était moins sûr, parler du côté maternel ça allait, elle voulait bien raconter ses vacances à la mer avec les grands parents du côté de maman. Parler de ses parents ou même de son frère n’avait jamais posé problème à la demoiselle mais parler des gens de l’autre côté de la Manche, c’était plus compliqué, c’était s’ouvrir aux autres et quelque part, fissurer cette façade où tout allait bien. Elle ignora la première question, fixant les brins d’herbes. Elle ignora la seconde question, peut être que si elle faisait semblant de ne rien entendre, la question s’envolerait, le sujet deviendrait moins personnel. Elle était injuste et le savait, à quel moment on peut demander à quelqu’un de s’ouvrir si dans un même temps on ne veut pas se confier. Mais ce n’était même pas qu’elle n’avait pas envie de se confier, c’était une peur de perdre ce qui est acquis, parce que justement elle avait bien conscience que tout ce qui est acquis ne l’était pas définitivement et c’était ça qui l’embêtait le plus.
Elle eut quand même une réaction, démontrant au mois qu’elle écoutait parfaitement bien ce que disait Sélénya non loin d’elle, ce petit sourire en constatant qu’elle essayait de la rassurer. Ce qui pour le coup n’était pas des plus concluants, enfin elle savait qu’elle aurait dû s’en foutre, qu’en soit que des gens qui n’avaient jamais compté pour elle puisse la juger, elle aurait dû pouvoir passer au-dessus et si ça la gonflait depuis quelques années, depuis qu’elle était au courant en fait, là c’était chamboulé par Adèle qui était loin, très loin, de frôler la perfection.

La véritable réaction fut cependant en sentant la main de Sélénya effleurer son épaule, elle redressa la tête pour la voir rapatrier sa main dans sa zone de confort. Décidément, elle faisait beaucoup d’effort sur elle-même la sorcière, il était peut-être temps de lui rendre la pareille. Elle poussa donc un léger soupir avant de l’ouvrir à nouveau.
« Pourquoi je fais moins partie de cette famille qu’Adèle ? Parce que mon sang est impur. » Ses traits se fermèrent littéralement à cette phrase. Et pourtant c’est sans la moindre animosité, plutôt de l’inquiétude, qu’elle reprit « Ecoutes, je sais que c’est important la pureté du sang, le désir de vouloir à tout prix préserver cette pureté et que c’est pas forcément bien vu le fait de ne pas respecter cette tradition mais je pense sincèrement que je n’aurais pas été différente si j’avais été sang pur et à la limite, si c’est pour ressembler à Adèle. Je préfère ne pas l’être. »

Au moins c’était dit et si ça l’angoissait réellement de connaître la réaction de son amie par rapport à tout ça, il lui était impossible de changer ce qu’elle était. Et si la pureté d’un sang l’emportait sur tout le reste et bien c’était désespérant et cette année allait être encore plus catastrophique que ce qu’elle présageait. Perdre toutes les personnes qu’elle avait côtoyé au fil de ces années, sous prétexte que la nouvelle de Lestang était sang pur, ne l’enchantait pas mais alors pas du tout et pourtant, elle essayait vraiment de se préparer mentalement.

La voix de Sélénya claqua, impossible de se méprendre sur l’émotion qui transparaissait dans sa voix et Elise poussa aussitôt un soupir de découragement, super elle avait réussi à l’énerver, bravo championne, dix sur dix. En revanche, la méprise fut plutôt sur le sens de la première phrase, Elise était déjà sur la défensive avant ça donc forcément, le comprit de travers et lui lança un regard noir. Non ça n’était pas des conneries, pourquoi lui mentirait elle et se cacherait derrière l’excuse de la non pureté de son sang pour expliquer qu’elle ne faisait pas partie de cette famille. C’est totalement déroutée qu’elle écouta la seconde phrase et pris peur en la voyant sortir sa baguette. Mais elle n’avait pas du tout envie de se lancer dans un duel pour que Sélénya puisse prouver la supériorité de son sang ! C’était quoi son problème tout d’un coup, Elise était certainement pas en train de la provoquer. Elle ne fit pas le moindre geste pour aller chercher sa baguette à son tour, elle ne répondrait pas à cela, elle ne jouerait pas ce jeu, ça n’avait pas le moindre intérêt. Elle se contentait d’être sur ses gardes, sentant que tout lui échappait, sans qu’elle ne parvienne à comprendre pourquoi.

C’est uniquement en voyant la mini lame percer la peau de sa camarade qu’elle comprit toute la symbolique derrière le geste et les propos précédents de la sorcière. Le côté soigneur en herbe d’Elise pris le dessus sur tout le reste en l’espace d’une demi-seconde et c’est réprobatrice qu’elle s’adressa à la demoiselle qui s’était piquée le doigt « Tu étais pas obligée de faire ça. » Néanmoins, elle répondit à la sollicitation de son amie, attrapant à son tour le truc sur le sol avant de faire exactement la même action que celle de Sélénya, quelques secondes auparavant, pour enfin lui rendre l’objet, le regard fixé sur la goutte de sang qui perlait à son doigt, qu’est ce qu’il fallait pas faire, elle avait de ces idées des fois. Ça faisait un peu mal tout de même, surtout que merci, elle était un peu au courant que la couleur du sang était exactement pareille, encore que il y avait peut être d’infime variations sur la couleur mais c’était dû à autre chose que de la pureté.

Elle écouta attentivement les propos de la demoiselle Macmillan, même si ce n’était rien de trop surprenant si elle y réfléchissait sérieusement. Quelque part, elle savait que Sélénya l’appréciait, enfin en tout cas assez pour lui filer un coup de mains lorsqu’elle en avait eu besoin. De la même façon, elle se doutait bien qu’elle n’était pas du genre à tourner le dos à un membre de sa famille sous un prétexte de non pureté de sang, prétexte qu’Elise trouvait totalement grossier à dire vrai. Il était évident que Sélénya n’allait pas être la plus grande fan des moldus, l’inverse eut été étonnant. Cependant c’était exactement le point à soulever à ce moment-là, si Elise avait très envie de lui souffler de ne pas mettre tous les moldus dans le même panier – déjà parce qu’ils rentrent pas tous… ou alors faut un gros panier – n’était-ce pas là une façon de lui faire remarquer qu’elle faisait exactement la même chose, différemment certes, parce qu’Elise ne craignait pas spécialement les sangs purs, enfin leurs avis sur sa personne, en règle général ça lui passait au-dessus, s’ils vivaient dans leur petit monde restreint grand bien leur fasse après tout. Ce qui l’embêtait c’était plutôt que cette pureté prenne l’ascendant sur les liens forgés, ce qui ne semblait pas être le cas pour Sélénya et c’était un véritable soulagement. Elle répondit donc, compréhensive.

« Je comprends pour les moldus, ça me paraît évident que pour le moment ce ne soit pas les gens que tu affectionnes le plus au monde et il faudra sûrement du temps avant que ça s’améliore un peu, beaucoup de temps. »

Elle esquissa un sourire sur la deuxième partie des propos, il est vrai qu’elle aurait sûrement eu les mêmes idées pourries que les autres, déjà qu’actuellement ce n’était pas non plus la personne la plus modeste du monde, loin de là, qu’est-ce que ça aurait été. Elle l’observa avec ce petit sourire moqueur avant de lui rétorquer, amusée « Oh, je suis sûre que j’aurais pu compter sur toi pour que tu me tapes sur les doigts parce que j’étais trop vantarde et que je prenais tout le monde de haut. » Pour ce qui était d’Adèle, qui blâmer réellement, elle ou ses aînés ? Difficile à dire, il était évident que la famille y était pour beaucoup mais si le père des jumeaux avait réussi à se détacher de ça, pourquoi elle non ? Enfin l’exemple était pourri, c’était uniquement par amour que monsieur avait agi, ah non mais là c’était compliqué pour Adèle, elle s’aimait juste elle pour ce qu’avait pu remarquer Elise, c’est compliqué d’espérer quelque chose. « Pas heureuse c’est un euphémisme. Donc tu ne la connais pas… et bien je ne te la conseille pas comme amie. Elle est imbuvable. Tu regarderas quand tu seras dans la grande salle, tu vas la repérer direct, une blonde qui se croit au-dessus de tout le monde, impossible de la rater. »

Si sa camarade porta le doigt à sa bouche pour que ça cesse de saigner rapidement, cette action fit qu’Elise observa à son tour la petite goutte de sang sur son doigt avant de faire la remarque suivante « C’est pas la chose la plus intelligente qu’on est fait ensemble ça. » Non mais il fallait le dire hein, que ça ne devienne pas une habitude de faire des trucs stupides. Bon après niveau dangerosité, c’était pas non plus hyper grave, en plus vue la superficie ça allait être plutôt rapide à se soigner, nul besoin de se prendre la tête à faire un sort et puis il faut reconnaître que Sélénya était quand même drôle à regarder avec son doigt dans la bouche, ça n'était pas dans ces moments là qu'elle avait l'air le plus futé. Elise refusait de faire la même chose, ah non, vraiment, mauvais exemple que celui de Sélénya.

Son regard revint néanmoins rapidement sur la demoiselle à ses côtés puisque cette dernière s’adressait à elle. Oui, elle le savait qu’ils n’étaient pas tous comme ça et heureusement d’ailleurs que Sélénya n’était pas l’exception qui confirme la règle et ça voulait surtout dire que les trois quarts étaient formatés dès leur plus jeune âge, dans la pure tradition. Qu’est ce que ça devait être lourd, déjà que les parents qui répètent cinquante mille fois à leurs enfants, dis bonjour, dis merci, fais ci, fais pas ça, c’est d’un lourd pour les gosses mais si en plus de ces règles il y a la petite phrase sur les sangs purs c’est le mieux, sois pas décevant à parler avec la racaille, pff l’éducation ça devait être quelque chose. Elle hocha la tête consciente de toute cela avant de constater « Je crois que ta famille est plus ouverte d’esprit que mon père, c’est dire comme les préjugés ont la vie dure. » Puis très vite la curiosité sans réelle limite d’Elise la poussa à vouloir en savoir plus sur la famille Macmillan qui à ses yeux semblait pour le coup si parfaite « Comment ça se passait pour toi enfant ? Ta famille fait des réceptions entre sang pur, est invité à ces réceptions ou les sangs purs vous snobent un peu vous aussi ? »

Elle offrit un véritable sourire à Sélénya en entendant le compliment que cette dernière lui faisait et qui gonflait sa poitrine de plaisir. Douce chaleur, sensation plaisante et l’impression que ces dernières années n’avaient fait que mettre en pause le lien qui les unissait sans l’émailler un seul instant. Elle lui glissa avec la plus grande des sincérités « Je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour que cette opinion que tu as de moi ne change jamais. »